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Le Canada dans le monde : Politique internationale du Canada
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Entrevue vidéo
Paul Rogers
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Le Dr Paul Rogers discute du nouveau paradigme de sécurité.

Le Dr Rogers est professeur d'études sur la paix à l'Université Bradford, au Royaume-Uni. Ses recherches portent sur la sécurité, les conflits, ainsi que sur les mouvements paramilitaires et terroristes.

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Entrevues vidéo:
(en anglais avec transcription en français)

Note: Les opinions exprimées ne sont pas nécessairement celles du gouvernement du Canada.

 Paradigme2 minutes Quicktime
 
 Problèmes de sécurité internationale

3 minutes

Quicktime
 
 Participation

1 minutes

Quicktime

 L'opinion publique au Moyen Orient

2 minutes

Quicktime

 Les élections aux États-Unis

2 minutes

Quicktime

(Les vidéolecteurs sont disponibles ici : QuickTimeWindows Media)



Transcription

 

Biographie (paradigme)

Je m’appelle Paul Rogers, je suis professeur en études sur la paix à l’Université de Bradford. Je suis biologiste de formation. J’ai travaillé dans le domaine du développement international en Ouganda pendant plusieurs années – il y a près de 40 ans maintenant. Je me suis beaucoup intéressé aux aspects politiques du développement, particulièrement aux conflits pour la possession des ressources. Au cours des 20 à 30 dernières années, j’ai travaillé de plus en plus sur des questions de sécurité internationale. Aujourd’hui, je m’intéresse particulièrement aux mouvements paramilitaires et terroristes, ainsi qu’à la façon dont les militaires occidentaux y répondent.


Paradigme

Je pense qu’à certains égards, il y a eu un changement de paradigme après le 11 septembre, mais en combinaison avec ce qui se passait déjà aux États-Unis. À son arrivée au pouvoir, au début de 2001, le gouvernement Bush était pour l’essentiel plus unilatéraliste et indépendant sur les questions de sécurité. Il renonçait à un certain nombre de traités et croyait réellement que le nouveau millénaire était pour les États-Unis l’occasion de faire preuve d’un leadership unique. Le projet pour le nouveau siècle américain, en un sens, en était l’illustration parfaite. Et pour l’essentiel, avant le 11 septembre, dès juillet-août 2001, on avait le sentiment à Washington que les États Unis avaient le vent dans les voiles et pouvaient véritablement faire preuve d’un leadership international d’un genre nouveau avec l’arrivée d’un « nouveau siècle américain ». C’est le 11 septembre qui a suivi dans la foulée qui, à mon sens, symbolise réellement le changement de paradigme survenu. Le 11 septembre a mis en évidence des vulnérabilités insoupçonnées jusqu’alors. Cela a donné lieu à une très forte réaction. Je ne pense pas qu’elle aurait été très différente si Gore avait obtenu la présidence en 2001. Mais sous Bush, elle a été forte en ce sens qu’il fallait tenter de récupérer ce qui semblait perdu : la perspective d’un vrai leadership. Vous combinez ces deux phénomènes et je pense que vous avez une bonne explication de la force qui a été utilisée en Afghanistan, l’événement majeur avec le discours sur l’état de l’Union en janvier 2002 et le discours à West Point – l’axe du mal, la nécessité de faire échec aux menaces. Le tout s’est combiné pour présenter une vision bien différente des États-Unis que sous Clinton. C’est là que réside le changement de paradigme global, à mon sens.


Problèmes de sécurité internationale

À plus long terme, les grands problèmes qui vont se poser pour la sécurité internationale sont les effets combinés de trois phénomènes. Premièrement, il y a le fossé socio-économique qui s’élargit rapidement : un milliard de gens réussissent très bien, tandis que cinq milliards ne s’en sortent pas. Deuxièmement, vous avez une majorité de gens beaucoup plus instruits en marge de la société. Les gens sont beaucoup plus conscients de leur « marginalisation par rapport à la majorité »; et, en un sens, nous faisons face à une révolution faite d’attentes déçues. Cela se manifeste à l’occasion par de véritables soulèvements, comme au Népal actuellement. Le troisième facteur se situe plutôt dans le futur, mais il n’en est pas moins présent : il s’agit des contraintes environnementales, à commencer par le changement climatique. Il est très probable que, si les tendances actuelles se maintiennent, la sécheresse pourrait s’installer définitivement sous les tropiques. Cela causera d’énormes problèmes. Vous combinez ces trois phénomènes, et vous avez une idée des problèmes qui vont se poser dans les 10 à 30 prochaines années, mais dont il faut tenir compte maintenant. Je dois admettre que je pense que la réélection de George Bush ne va certainement pas améliorer les choses.

Dans l’immédiat, la « guerre contre la terreur » - comme on l’appelle – est en cours depuis près de trois ans et ne donne pas les résultats escomptés. Le réseau al-Qaïda et ses membres affiliés sont aussi actifs, sinon plus, que dans les trois années précédant le 11 septembre. Nous avons assisté à toutes sortes d’attaques, plus récemment à Jakarta et à Taba, en Égypte, et il y en aura probablement d’autres.

Alors l’idée de faire échec à cette menace du terrorisme – telle qu’elle est perçue – par des moyens militaires conventionnels ne semble pas donner de résultats. À bien des égards liée à cela, vous avez la question de l’Iraq qui se révèle très difficile. D’où la nécessité de remettre les choses à plat dans l’immédiat – ce qui paraît peu probable, je dois admettre, vu que le président Bush a été réélu – et de faire preuve d’une certaine sagesse politique à l’égard des problèmes auxquels nous faisons face à long terme.

La Grande-Bretagne est dans une position étrange en ce sens que, sur certaines questions, comme le développement international et le changement climatique, elle va vraiment de l’avant et joue, jusqu’à un certain point, un rôle de chef de file. Mais simultanément, le gouvernement britannique actuel est très proche du président Bush; Tony Blair, en particulier, voit la guerre contre la terreur comme une lutte à finir « entre le bien et le mal », pour ainsi dire. Il ne semble pas y avoir de changement réel au sein du gouvernement britannique sur ce point, même si l’opinion publique est majoritairement contre cette association étroite avec George Bush.

Pour ce qui est d’un pays comme le Canada, je pense que le Canada est dans une position très significative et intéressante. Il a effectivement une certaine influence aux États-Unis, bien que limitée, peut-être pas aussi grande que la Grande-Bretagne. Mais le Canada joue depuis longtemps un rôle au sein des Nations Unies. C’est l’un des rares pays qui, je dois dire en toute franchise, joue effectivement dans la cour des grands dans des dossiers comme le développement, l’environnement et, dans une certaine mesure, la sécurité aussi. Cela peut poser des problèmes à certains moments, mais cela signifie que, au sein des Nations Unies, des pays comme le Canada, et quelques autres, peuvent jouer un rôle non négligeable – j’irais même jusqu’à dire qu’ils peuvent aider à définir une approche plus durable à long terme en matière de sécurité internationale.


Participation

Je pense que c’est dans un domaine comme celui-là qu’on invoque ce dicton éculé : « la connaissance, c'est le pouvoir ». Essentiellement, sur des questions comme les disparités socio économiques mondiales, le changement climatique, la dépendance à l’égard des combustibles fossiles, les gens ont besoin de prendre beaucoup plus conscience des tendances à long terme. Je dirais certainement que, si les gens sont disposés à le faire, ils peuvent mieux accepter les types d’arguments invoqués à l’appui d’une politique de sécurité plus sensée à long terme. Les questions liées au maintien de la paix, à la prévention des conflits, à la résolution des conflits, un retour à une approche plus multilatérale sur des questions comme le changement climatique, les mines terrestres, la vente d’armes et le reste, ce sont toutes des questions sur lesquelles un regain d’intérêt du public peut vraiment donner à réfléchir aux gouvernements de tous les horizons politiques. C’est un domaine dans lequel on aimerait voir un débat plus large et, en ce sens, le genre d’initiative que vous avez au Canada, avec ce genre d’armement est, je pense, tout à fait remarquable et très valable.


À plus long terme

À plus long terme il y a bien sûr le risque d’une instabilité considérable en Arabie saoudite. Alors vous avez là un problème majeur. L’Arabie saoudite arrive en première position dans le monde pays quant aux réserves pétrolières. Près de 27 p. 100 de tous les gisements pétroliers au monde se trouvent dans un pays; l’Iraq est le seul pays qui s’en rapproche quelque peu avec environ 11-12 p. 100 des réserves. Des problèmes sont donc à prévoir en Arabie saoudite.

Et, tout à fait indépendamment, il y a la question de l’antagonisme qui oppose les États-Unis et l’Iran. L’Iran est très complexe parce que vous avez effectivement les théocrates conservateurs qui ont énormément de pouvoir en ce moment, mais il y a toute une nouvelle génération d’Iraniens qui ne sont pas prêts à accepter ce genre de théocratie. Alors il y a des problèmes internes en Iran, et le problème est que, si les États-Unis s’en prennent à l’Iran, cela revient à consolider la position des théocrates conservateurs par rapport aux réformateurs. Autrement dit, là encore, c’est plutôt contre-productif. Et il est utile de se rappeler que, à plus long terme, l’Iran vient juste après la Russie pour ce qui est de l’accès aux réserves de gaz naturel, ce qui va prendre beaucoup d’importance dans les 20 à 30 prochaines années.

Lié à cela, et sans doute le plus étonnant, c’est la manière dont la Chine s’y prend avec les grands producteurs de pétrole et de gaz naturel du Moyen-Orient. Je pense que cela va mener à plus long terme à des tensions entre la Chine et les États-Unis, particulièrement avec un gouvernement plus à droite à Washington.

Alors, tout dans tout, je pense personnellement que le Golfe est d’une importance cruciale pour la sécurité internationale. Et il faut absolument aborder les choses autrement pour éviter une instabilité encore plus grande.


L’opinion publique au Moyen-Orient

Ce qui se passe en Iraq est un sujet dont il vaut sans doute la peine de discuter. Pour l’essentiel, si vous passez en revue les événements qui se sont déroulés en Iraq depuis près de vingt mois maintenant, le fait est qu’une insurrection prend de l’amplitude, une insurrection très sérieuse. Le gouvernement iraquien, qui est essentiellement un régime nommé, n’exerce pas véritablement le pouvoir dans le pays. Les États Unis ont du mal à maîtriser cette insurrection, qui est sans doute en train de s’aggraver à l’heure qu’il est.

Simultanément, avec la réélection du président Bush, la position néo conservatrice faisant valoir la nécessité de régler une fois pour toutes les problèmes en Iraq va rester dominante. Je pense donc qu’il y a gros à parier que l’insurrection va continuer. Fait extraordinaire, lors de l’escalade qui a conduit à la guerre, l’un des arguments invoqués en faveur de la guerre était le lien entre le régime de Saddam Hussein et le réseau al-Qaïda et Oussama ben Laden. Cela n’a jamais été prouvé; on peut affirmer avec certitude qu’il n’y a jamais eu de liens. Ce qui se passe maintenant cependant, c’est que l’Iraq est en train d’attirer des partisans plus radicaux du Jihad, et des gens se rendent en Iraq pour aider les insurgés. En un sens, le genre de combat que certains des paramilitaires ont associé à al-Qaïda en Afghanistan, ils ne l’ont plus généralement en Afghanistan; ils l’ont maintenant en Iraq. Alors, par une ironie du sort incroyable, il se trouve que la situation en Iraq se prête à l’installation d’un nouveau centre d’entraînement pour les paramilitaires islamiques. Cela n’était certainement pas prévu, à mon sens, et tant que durera l’insurrection en Iraq, cela demeurera un facteur important à long terme.

Lié à cela, il y a le pétrole du Golfe, il faut en apprécier l’extraordinaire importance à long terme. Je reconnais que le Canada a des ressources potentielles très considérables si le prix grimpe sur quelques années, mais pour l’essentiel, dans l’immédiat, les deux tiers de toutes les réserves pétrolières mondiales aisément exploitables sont dans le Golfe. Et le Golfe est d’une importance géopolitique cruciale. L’un des vrais problèmes qui se posent aujourd’hui c’est évidemment la perception dans l’ensemble du monde arabe – je ne parle pas de la réalité – la perception que ce sont les Américains, de concert avec les Israéliens, qui contrôlent le pétrole arabe. Que ce soit vrai ou non importe peu. C’est cette perception qui compte. Et, fait intéressant dont il n’est presque pas fait mention dans les médias occidentaux, dans tout le monde arabe, on est parfaitement au courant des liens actuellement très étroits entre les militaires américains et les militaires israéliens. Là encore, cela envoie un message très difficile qui, à mon sens, est contre-productif pour les intérêts américains en matière de sécurité.


Les élections aux États-Unis

La réélection du président Bush, avec un mandat plutôt clair – le résultat du scrutin ne laisse aucun doute là-dessus – ne fait que renforcer l’idée que les politiques qui ont été élaborées ces trois dernières années vont, à tout le moins, se poursuivre. En revanche, les États-Unis ont de très sérieuses difficultés en Iraq – on a tendance à oublier qu’il y a encore probablement 17 000 soldats en Afghanistan engagés dans une difficile guerre de rébellion. Alors les États-Unis sont quasiment au bout de leurs ressources militaires.

Il est probable que des forces considérables resteront mobilisées en Iraq, dans l’espoir de réprimer la rébellion. Je dois dire que je doute que cela marche. Alors la perception innée aux États-Unis de la nécessité de faire échec au terrorisme est compromise par les difficultés rencontrées maintenant. Je ne pense pas que cela va mener à un remaniement des politiques dans les deux à trois années à venir. Et il est possible, à tout le moins, qu’il y ait des interventions – pas nécessairement militaires – contre des pays comme la Corée du Nord et particulièrement l’Iran. À bien des égards, l’Iran va être le pays à surveiller, en raison de la relation étroite entre le gouvernement Bush et le gouvernement israélien, mais aussi parce que les pays européens sont beaucoup plus mal à l’aise quant au risque d’affrontement réel à court terme en Iran.


Les articles du Dr. Rogers (en anglais seulement)
 
Professor Rogers' International Security monthly breifings. Oxford Research Group. 
 
Paul Rogers' weekly commentary on the 'war on Terror'. Open Democracy.
 
Politics in the next 50 years: The Changing Nature of International Conflict. (October 2000) Peace Studies Papers, Fourth Series, Working Paper no. 1. University of Bradford, Department of Peace Studies, October 2000.
 
International Security in the Early Twenty-First Century. (January 2000) International Security Information Service (ISIS) Breifing Paper, No. 76.