M. MARCHI - DEVANT LA JAPAN SOCIETY - TORONTO (ONTARIO)

98/43 SOUS RÉSERVE DE MODIFICATIONS

NOTES POUR UNE ALLOCUTION

DE

L'HONORABLE SERGIO MARCHI,

MINISTRE DU COMMERCE INTERNATIONAL,

DEVANT LA JAPAN SOCIETY

TORONTO (Ontario)

Le 5 juin 1998

Ce document se trouve également au site Internet du Ministère :

http://www.dfait-maeci.gc.ca

Je remercie la Toronto Japanese Association of Commerce and Industry et la Japan Society d'avoir organisé cet excellent déjeuner.

On m'a rappelé récemment qu'en 1929, seulement deux ans après avoir été autorisé à établir des relations diplomatiques avec d'autres pays, le Canada en a établi avec deux pays qu'il considérait très importants : la France et le Japon.

Près de 70 ans plus tard, je suis ici pour réaffirmer l'importance que nous attachons à nos relations avec le Japon et pour déclarer, sans ambiguïté, que nous avons l'intention de rester des amis sûrs et des alliés fidèles pendant les 70 prochaines années!

Vos organisations ont toujours joué un rôle important, en favorisant les relations économiques, en augmentant la compréhension culturelle et en appuyant les échanges dans les domaines du commerce et de l'éducation, entre le Japon et le Canada.

Votre rôle est encore plus vital maintenant, alors que les difficultés financières que connaît actuellement l'Asie incitent certains à remettre en question notre engagement à l'égard de cette région ou à proposer de porter ailleurs nos intérêts et nos efforts.

En pareilles circonstances, votre connaissance en profondeur et votre perspective à long terme deviennent essentielles, en nous rappelant les débouchés qui s'offrent à nous et les atouts fondamentaux qui les appuient.

Je me réjouis donc de l'occasion qui m'est offerte aujourd'hui de vous rencontrer pour réaffirmer notre engagement à l'égard du Japon et établir des relations commerciales encore plus étroites avec lui.

Je voudrais commencer par indiquer clairement la position du Canada : nous ne sommes pas des amis des beaux jours. Le Japon est le deuxième partenaire commercial du Canada pour l'importance et l'un de nos principaux alliés dans le monde. Notre engagement à son égard demeure inchangé.

Nous pensons au proverbe japonais selon lequel « il est facile de briser une flèche, mais pas un faisceau de 10 » et nous avons l'intention de rester à vos côtés et de vous offrir notre appui.

En effet, tandis que nous célébrons le 70e anniversaire des relations diplomatiques entre nos deux pays, nous sommes plus optimistes que jamais sur ce que nous réserve l'avenir.

En tant que compagnon à long terme, le Canada est prêt à accompagner ses paroles de soutien par des mesures d'aide. Nous collaborons avec le Japon, au sein du G-7 et de l'APEC [Coopération économique Asie-Pacifique], pour appuyer les économies durement touchées de l'Asie du Sud-Est. Par exemple, nous avons contribué aux programmes d'aide multilatérale du FMI [Fonds monétaire international] pour la Corée et la Thaïlande et nous avons apporté un soutien supplémentaire à l'Indonésie et à d'autres pays de l'Asie du Sud-Est.

Nous savons aussi, comme vous, que les problèmes de l'Asie ne seront résolus en fin de compte que par les Asiatiques et qu'il faudra apporter des réformes et prendre des décisions difficiles.

Dans le cas du Japon, les problèmes sont de nature structurelle et cyclique. Pour les résoudre, le Japon a pris un certain nombre de mesures, notamment le « big bang » visant à déréglementer les marchés financiers. Les autres initiatives ont consisté notamment à injecter des fonds de l'État dans les banques, à effectuer des dépenses dans les travaux publics et à réduire l'impôt.

Le Canada appuie ces efforts en tant que premières mesures importantes. Toutefois, il continue de penser qu'une déréglementation et une réforme d'ensemble constituent la seule manière d'assurer une croissance et une relance économiques durables.

La déréglementation augmentera la demande intérieure, accroîtra la compétitivité mondiale et créera de nouvelles possibilités d'emplois.

Même si le « big bang » va produire une certaine déréglementation, nous pensons qu'une restructuration plus poussée des entreprises, des relations entre entreprises et des systèmes de distribution sera nécessaire pour assurer une relance de l'économie à grande échelle.

Le Canada ne se pose pas en critique du Japon, il parle en tant qu'ami qui a connu sa propre période de réforme et de renouveau et qui comprend les avantages qu'un tel processus peut présenter.

Les difficultés que nous avons connues ont été différentes de celles du Japon, mais les deux pays ont tous les deux besoin de s'adapter aux changements et je suis convaincu que les Japonais sauront se montrer à la hauteur.

Aussi, même si le Canada reconnaît la gravité des problèmes auxquels est confronté le Japon et la nécessité d'apporter des réformes importantes, il est aussi décidé à ne pas laisser les difficultés actuelles masquer les immenses possibilités qui existent toujours.

L'une de ces possibilités est offerte par l'APEC. Comme vous le savez, 1997 a été l'Année canadienne de l'Asie-Pacifique, dont le point culminant a été le Sommet de l'APEC que nous avons organisé à Vancouver.

Nous devons profiter de l'impulsion créée par cette année passionnante. Nous avons l'intention de poursuivre nos efforts pour réduire les obstacles au commerce et ouvrir de nouveaux marchés, en commençant par la réunion des ministres du Commerce de l'APEC, qui aura lieu plus tard ce mois-ci en Malaisie. Il est important que nous tenions les engagements pris à Vancouver afin de créer des économies asiatiques plus fortes et plus robustes à moyen et à long terme.

Comme je l'ai indiqué il y a un instant, le Japon se place juste derrière les États-Unis comme principal partenaire commercial du Canada. L'année dernière, le commerce bilatéral entre nos deux pays s'est élevé à plus de 23 milliards de dollars et un tiers des investissements étrangers au Canada était d'origine japonaise.

On ne saurait trop insister sur la taille et l'importance de l'économie japonaise. Le Japon représente à lui seul près d'un cinquième du PIB [produit intérieur brut] mondial et effectue presque 12 p. 100 des exportations dans le monde. Sa population de 126 millions d'habitants constitue un marché très évolué et hautement concurrentiel. Dans des domaines tels que l'automobile, l'électronique et la technologie industrielle, les entreprises japonaises sont des chefs de file à l'échelle internationale.

Toutefois, le Japon doit aussi se rendre compte que, tout comme un avion a besoin de deux ailes pour voler, un pays a besoin d'importations aussi bien que d'exportations pour créer une économie interne saine. Tous les efforts visant simplement à « exporter pour relancer l'économie » sont voués à l'échec dès le départ parce que cette démarche prive les Japonais de l'apport précieux d'échanges et d'investissement qui encourage les dépenses locales et l'augmentation de la productivité.

J'exhorte donc le Japon à adopter une position plus ouverte à l'égard des produits et des services provenant de l'étranger.

Le Canada désire renforcer ses relations déjà étroites avec le Japon et a établi un plan d'action pour augmenter notre partenariat commercial. Comme un grand nombre d'entre vous le savez, ce plan désigne un certain nombre de secteurs qui sont les plus prometteurs, à notre avis, pour les entreprises canadiennes. Ces secteurs comprennent notamment le tourisme, les technologies de l'information, l'équipement et les instruments médicaux, les produits de consommation et les matériaux de construction ainsi que les aliments et les produits du poisson.

On a déjà enregistré un certain nombre de succès retentissants. Dans le secteur des produits alimentaires, par exemple, tous les ans, de nouveaux produits canadiens sont adaptés aux besoins des clients japonais et sont adoptés par ces derniers.

Nous avons aussi progressé sur un autre front, que nous appelons « la coopération en pays tiers », en concluant un accord visant à promouvoir la collaboration entre nos secteurs privés respectifs.

Cet accord a été fondé sur le principe que, grâce à des partenariats, nos entreprises, en particulier nos petites et moyennes entreprises, pourraient conquérir une plus grande part du marché mondial de l'infrastructure en plein essor.

Depuis la signature de l'accord de coopération en pays tiers en 1996, on a enregistré un certain nombre de succès éclatants. Par exemple, H.A. Simons, de Vancouver, a établi des relations avec une entreprise japonaise pour collaborer à un projet pétrochimique en Arabie saoudite et, ici à Toronto, R.A. Andrews, une petite société d'ingénieurs, réalise actuellement son troisième projet avec une société japonaise.

Le resserrement de nos liens commerciaux avec le Japon consiste en partie à mieux faire connaître la technologie, les produits et les services canadiens. À cette fin, je me suis entretenu avec le ministre japonais de l'Industrie et du Commerce, M. Horiuchi, lors de la réunion de la Quadrilatérale en avril, et nos premiers ministres se sont rencontrés à plusieurs reprises, tout récemment au Sommet du G-7 de Birmingham, où ils ont convenu qu'une mission commerciale canadienne de haut niveau devrait se rendre au Japon.

Une telle mission permettrait de poursuivre l'excellent travail de la mission de partenariats d'affaires de la Keidanren, qui a eu lieu au Canada, en septembre 1996.

Je sais que les secteurs privés des deux pays ont adopté cette idée et qu'une délégation de haut niveau sera dirigée par MM. Jacques Bougie et Tom D'Aquino, peut-être dès novembre.

Tout comme les Canadiens doivent mieux informer les consommateurs du Japon de ce qu'ils ont à vendre, ils doivent aussi mieux expliquer ce qu'ils ont à offrir aux investisseurs de ce pays. Nous devons faire savoir à nos amis japonais que le Canada est un endroit idéal pour investir ou pour créer une entreprise.

Un grand nombre d'entre vous connaissez une étude menée par KPMG, qui a comparé les coûts d'établir une entreprise dans sept pays : cinq membres de l'Union européenne, les États-Unis et le Canada.

Cette étude a conclu que, lorsqu'on tient compte de tous les éléments, le Canada arrive en première place. Autrement dit, il revient moins cher, à raison de quelque 5 p. 100, de créer et d'exploiter une entreprise au Canada que dans n'importe quel autre pays étudié, à savoir en Europe, en Grande-Bretagne et aux États-Unis.

C'est un point crucial. Les investisseurs asiatiques, qui veulent s'implanter en Amérique du Nord afin d'avoir accès aux 400 millions de consommateurs du marché de l'ALENA [Accord de libre-échange nord-américain], peuvent le faire d'une manière plus économique au Canada qu'aux États-Unis.

Prenons un simple exemple de l'étude de KPMG, une société asiatique qui établit une usine type de 100 travailleurs au Canada, économisera, en moyenne, près de 1 million de dollars américains par an par rapport à une installation similaire située au sud de la frontière.

Quand on combine ces faibles coûts à la haute qualité de nos travailleurs, de notre infrastructure et de notre niveau de vie, on obtient un excellent climat pour l'investissement.

L'industrie automobile est l'un des secteurs qui a déjà montré les avantages que présente l'investissement au Canada. En conjuguant la compétence des travailleurs canadiens aux capacités techniques des constructeurs d'automobiles japonais, nous avons créé certaines des installations d'assemblage les plus efficaces du monde.

Comme un grand nombre d'entre vous le savez, le Canada a examiné la compétitivité du secteur automobile et les résultats seront publiés prochainement.

Le secteur automobile ne représente qu'un exemple des fructueux investissements japonais au Canada et nous pensons qu'en faisant savoir ce que nous avons à offrir, nous pouvons en attirer d'autres, beaucoup d'autres, pour le plus grand avantage des deux pays.

Nous voulons faire en sorte que, lorsque les gens d'affaires japonais pensent à investir à l'étranger, une grande feuille d'érable rouge leur vienne à l'esprit!

Naturellement, les relations entre le Japon et le Canada vont bien au-delà du commerce des produits et des services. Il existe aussi des échanges intensifs au niveau des personnes, par l'intermédiaire du tourisme, des programmes pour les jeunes et du jumelage de villes.

Ces échanges favorisent non seulement l'amitié entre nos deux peuples, mais ils contribuent aussi à ce que les relations entre le Japon et le Canada conservent le profil qu'elles méritent.

J'ai commencé par parler de la nécessité de garder une certaine perspective pour évaluer la crise actuelle en Asie. Je dirais que vous qui vous trouvez dans cette pièce avez un rôle particulier à jouer pour fournir cette perspective.

Les Canadiens veulent mieux comprendre les événements qui se déroulent au Japon. Nous avons besoin de votre compréhension, de votre connaissance et de votre expérience. Dans les jours à venir, votre contribution sera plus précieuse que jamais.

Pour conclure, je voudrais vous raconter une histoire au sujet d'Abraham Lincoln qui, à mon avis, illustre ce que j'ai essayé de vous dire aujourd'hui.

Dans sa jeunesse, Lincoln se promenait un soir avec un ami lorsqu'une pluie de météores s'est produite. Le jeune compagnon de Lincoln s'en est effrayé, mais ce dernier lui a dit de regarder les étoiles fixes au-dessus d'eux situées au-delà des météores.

Aujourd'hui, nous devons regarder, au-delà des difficultés actuelles, les étoiles brillantes des débouchés et des promesses. Nous devons juger les orages pour ce qu'ils sont, ennuyeux, mais temporaires. Si nous le faisons, nous verrons le soleil levant du Japon qui brille toujours derrière les nuages, encore plein de promesses et encore assez fort pour assurer un bel avenir à son peuple.

C'est l'avenir que le Canada voit pour le Japon et c'est l'avenir que nous voulons contribuer à assurer.

Merci.