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     ITA-4041-96

MONTRÉAL (QUÉBEC), CE 16e JOUR D'OCTOBRE 1996

EN PRÉSENCE DE ME RICHARD MORNEAU, PROTONOTAIRE

     Dans l'affaire de la Loi de l'impôt sur le revenu,

     - et -

     Dans l'affaire d'une cotisation ou des cotisations établies par le ministre du Revenu national en vertu d'une ou plusieurs des lois suivantes: la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada et la Loi sur l'assurance-chômage,         

CONTRE:

     JEAN GUY VENNES

     Débiteur

ET:

     PAUL VENNES

     Opposant

     ORDONNANCE

     Cette requête de la requérante est rejetée sous réserve de son droit de présenter de nouveau une telle requête avec une preuve répondant aux motifs de l'ordonnance.

     Richard Morneau

     Protonotaire

     ITA-4041-96

     Dans l'affaire de la Loi de l'impôt sur le revenu,

     - et -

     Dans l'affaire d'une cotisation ou des cotisations établies par le ministre du Revenu national en vertu d'une ou plusieurs des lois suivantes: la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada et la Loi sur l'assurance-chômage,         

CONTRE:

     JEAN GUY VENNES

     Débiteur

ET:

     PAUL VENNES

     Opposant

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ME RICHARD MORNEAU,

PROTONOTAIRE:

     La Cour est saisie par Sa Majesté la Reine du Chef du Canada (la requérante) d'une requête en vertu des règles 319(4) et 324 des Règles de la Cour fédérale (les règles) afin qu'elle puisse faire entendre un témoin lors de l'audition prochaine d'une requête en opposition à la saisie-exécution immobilière déposée par l'opposant.

LES FAITS

     Il appert du dossier que le 21 juin 1996, la requérante a procédé à la saisie exécution d'un immeuble sis au 5175, 18e Rue à Grand'Mère par suite d'une dette fiscale du débiteur-saisi, M. Jean Guy Vennes.

     Le 5 septembre 1996, M. Paul Vennes déposait en cette Cour une tierce-opposition afin d'obtenir l'annulation de cette saisie au motif qu'il serait propriétaire de cet immeuble.

     À l'appui de cette opposition, il déposa un affidavit dont les allégués se lisent comme suit:

         1.      Je suis l'opposant dans la présente requête en opposition afin d'annuler;         
         2.      En date du 21 juin 1996 fut pratiquée une saisie exécution de l'immeuble via la présente requête et ce, afin de prélever une somme de 66,130.79$ le tout faisant suite à un bref de "fieri facias" émis et délivré le 4 juin 1996 et conformément à la règle 2000 des Règles de la Cour Fédérale;         
         3.      J'invoque les articles 596, 597 et suivants ainsi que 674 du Code de Procédure Civile de la Province de Québec et ce, pour cause d'insaisissabilité de l'immeuble saisi mentionné précédemment;         
         4.      En effet, l'immeuble faisant l'objet des présentes m'appartient et ce, pour l'avoir acquis de M. Réjean Fortin le 24 décembre 1992;         
         5.      Antérieurement, je détenais une hypothèque de 25,000.00$ sur ledit immeuble et ce, en date du 30 septembre 1987 et publicisée à la circonscription foncière de Shawinigan le 1er octobre 1987 sous le numéro 141065;         
         6.      Subséquemment, un acte de correction d'hypothèque fut apporté le 8 janvier 1991 toujours pour ladite somme de 25,000.00$ et dûment publicisé à la circonscription foncière de Shawinigan sous le numéro 164906;         
         7.      De plus, un acte de vente est intervenu le 14 janvier 1991 par Jean-Guy Vennes à Réjean Fortin pour la somme de 75,000.00$ et dont je suis d'ailleurs intervenu et publicisé à la circonscription foncière de Shawinigan le 16 janvier 1991 sous le numéro 165002;         
         8.      De plus, j'ai dûment adressé un avis de 60 jours le 5 novembre 1992 à Réjean Fortin et d'ailleurs publicisé à la circonscription foncière de Shawinigan le 6 novembre 1992 sous le numéro 177896;         
         9.      La saisie pratiquée en la présente instance est donc irrégulière, illégale et nulle et ce, avec toutes les conséquences que de droit;         
         10.La présente saisie me cause un préjudice très sérieux en tant que propriétaire;         
         11.Tous les faits allégués aux paragraphes précédents sont vrais;         

     Le 16 septembre 1996, la requérante présentait à cette Cour une première requête visant à faire entendre des témoins en vue du débat sur le mérite de l'opposition à la saisie (la première requête de la requérante). L'affidavit soumis alors par la requérante contenait les paragraphes qui suivent:

         1)      Les témoins que Sa Majesté la Reine entend faire comparaître ont connaissance de certains éléments de preuve essentiels à la bonne conduite de cette affaire et sont les personnes aptes à témoigner d'éléments nécessaires à la preuve de Sa Majesté la Reine;         
         2)      Il s'avère possible que Réjean Fortin, Jean-Guy Vennes et Vivianne Poitras refusent de collaborer et de signer volontairement un affidavit considérant leur intérêt dans la présente affaire.         
         3)      Tous les faits allégués au présent affidavit sont vrais.         
         (mon souligné)         

     Le même jour, je rendais l'ordonnance qui suit:

              Requête rejetée sous réserve du droit de Sa Majesté de présenter une nouvelle requête appuyée d'affidavits rencontrant les termes de la règle 319(4).         

     Le 7 octobre 1996, la requérante déposait la requête mentionnée au premier paragraphe des présents motifs avec, en appui, deux affidavits, soit un d'un agent de recouvrement oeuvrant pour le ministre du Revenu national et un de la procureure responsable du dossier. Quant à l'agent de recouvrement, les paragraphes pertinents de son affidavit se lisent comme suit:

         2.      Dans le cadre de mon enquête, j'ai appris que Vivianne Poitras est l'épouse du débiteur-saisi depuis 1971, le tout tel qu'il appert d'une copie d'un acte de partage en date du 15 janvier 1991 annexé comme pièce "B" de mon affidavit;         
         3.      J'ai également appris que l'épouse du débiteur-saisi, Vivianne Poitras, aurait effectué certains paiements relativement à l'immeuble situé au 5175, 18e Rue à Grand-Mère qui fait l'objet de l'opposition à la saisie immobilière produite au présent dossier de Cour;         
         4.      Je ne peux communiquer avec Vivianne Poitras considérant son intérêt certain dans la présente affaire et sa position opposée à celle du ministère du Revenu national;         
         (mon souligné)         

     Quant à la procureure, les paragraphes pertinents de son affidavit sont les suivants:

         2.      Je dois pouvoir interroger Vivianne Poitras, l'épouse du débiteur-saisi, afin entre autres de tenter de démontrer que des ventes, relativement à l'immeuble situé au 5175, 18e Rue à Grand-Mère, ont été simulées;         
         3.      Le témoin que Sa Majesté la Reine entend faire comparaître a connaissance de certains éléments de preuve essentiels à la bonne conduite de cette affaire et est la personne apte à témoigner d'éléments nécessaires à la preuve de Sa Majesté la Reine;         
         4.      Considérant l'intérêt opposé de Madame Vivianne Poitras à celui de Sa Majesté la Reine dans la présente affaire et la nécessité que la Cour apprécie la crédibilité du témoin, il s'avère nécessaire que Sa Majesté la Reine interroge le témoin à l'audience.         
         (mes soulignés)         

     Il appert d'une note au dossier provenant du greffe que le procureur de l'opposant, sans consentir à cette requête de la requérante, n'a pas tenu à déposer d'observations à l'encontre de celle-ci.

ANALYSE

     Le paragraphe 319(4) se lit comme suit:

         Règle 319.(4)      Avec la permission de la Cour ou d'un juge de la Cour d'appel, pour une raison spéciale, un témoin peut être appelé à témoigner en séance publique ou devant un juge de la Cour d'appel relativement à une question de fait soulevée dans une requête.         
         (mon souligné)         

     Dans l'affaire Cyanamid Canada Inc. v. The Minister of National Health and Welfare (1992), 52 F.T.R. 22 (C.F. 1re inst.), le juge en chef adjoint de cette Cour a tenu à rappeler les propos suivants quant au caractère exceptionnel que vise l'expression "raison spéciale" au paragraphe 319(4):

         It is clear that motions are to be conducted on the basis of documentary evidence and that it is exceptional to depart from this practice. Rule 319 of the Federal Court Rules provides that allegations of fact upon which a motion is based shall be by way of affidavit although, by leave of the Court and for special reason, a witness may be called to testify in open Court in relation to an issue of fact raised by an application. In Glaxo Canada Inc. v. Canada (Minister of National Health and Welfare) and Apotex Inc. et al. No. 4) (1987), 11 F.T.R. 132, Glaxo's application under rule 319(4) for leave to call a witness to give viva voce evidence in relation to certain issues of fact raised in the application was dismissed. Rouleau, J., commented (at p. 133):         
                 Under Rule 319 all the facts on which a motion is based must be supported by affidavit evidence. It is only 'by leave of the court' and 'for special reason' that a witness can be called to testify in relation to an issue. There were no cases presented to me by counsel for the plaintiff nor am I aware of any case law which identifies the test as to what constitutes 'special reason'. In my opinion, this is a question to be decided on the facts of a particular case with the onus being on the applicant to prove the existence of 'special reason' to the satisfaction of the court. What is clear from the jurisprudence is that leave will be granted by the court only in exceptional circumstances.                 

     Lorsque le 16 septembre 1996, j'ai rejeté la première requête de la requérante, j'étais d'avis que le simple fait de soulever dans un affidavit une possibilité que certains témoins refusent de signer des affidavits n'était pas là une raison suffisante, donc une "raison spéciale" au sens du paragraphe 319(4) des règles et de la jurisprudence ayant eu à interpréter ce paragraphe. Tel était le sens de mon ordonnance.

     La requête sous étude établit-elle maintenant une situation spéciale propre à amener cette Cour à autoriser l'interrogatoire en Cour de Mme Poitras?

     Dans son affidavit au soutien de la présente requête, la procureure de la requérante indique que le témoignage de Mme Poitras servirait à établir, entre autres, le caractère simulé de certaines ventes; aspect essentiel et nécessaire à la preuve de la requérante. Les ventes dont il s'agit doivent être celles alléguées par l'opposant dans son affidavit. La version de Mme Poitras porterait plus précisément, suivant l'affidavit de l'agent de recouvrement, sur le fait que Mme Poitras "aurait effectué certains paiements relativement à l'immeuble situé au 5175, 18e Rue à Grand-Mère".

     On peut comprendre et on doit respecter que la requérante veuille de façon certaine compter sur la version de Mme Poitras. On doit noter au passage que cette version ne serait toutefois pas la seule à militer en faveur de la reconnaissance éventuelle du caractère simulé des diverses ventes. En effet, le même jour où la requérante déposait la requête sous étude, elle déposait également au dossier de la Cour quatre affidavits, autres que ceux discutés ci-haut, qui visent tous à établir la même simulation.

     Cependant, je ne considère pas que la requérante puisse simplement s'en remettre à des déclarations générales, telles celles que l'on retrouve au paragraphe 4 de l'affidavit de l'agent de recouvrement et au paragraphe 4 de l'affidavit de sa procureure, pour obtenir que cette Cour passe outre au régime général d'audition des requêtes prévu au paragraphe 319(2) des règles. Rappelons que lesdits paragraphes 4 de ces deux affidavits se lisent respectivement comme suit:

         4.      Je ne peux communiquer avec Vivianne Poitras considérant son intérêt certain dans la présente affaire et sa position opposée à celle du ministère du Revenu national;         
         4.      Considérant l'intérêt opposé de Madame Vivianne Poitras à celui de Sa Majesté la Reine dans la présente affaire et la nécessité que la Cour apprécie la crédibilité du témoin, il s'avère nécessaire que Sa Majesté la Reine interroge le témoin à l'audience.         

     On peut admettre sans plus de débat que Mme Poitras a effectivement des intérêts opposés à ceux de la requérante. Toutefois, ce fait n'est pas en soi de nature à empêcher l'obtention d'un affidavit par ailleurs satisfaisant. À preuve, lors de la première requête, la requérante indiqua dans son avis de requête ce qui suit:

         Il s'avère possible que Réjean Fortin, Jean-Guy Vennes et Vivianne Poitras refusent de collaborer et de signer volontairement un affidavit considérant leur intérêt dans la présente affaire.         

     Or, parmi les quatre affidavits soumis par la requérante le 7 octobre 1996 se trouve un affidavit de M. Réjean Fortin qui semble apporter une version des faits convenant apparemment à la requérante.

     L'agent de recouvrement de la requérante se dit incapable de pouvoir communiquer avec Mme Poitras en raison de l'intérêt opposé de cette dernière.

     C'est là à mon avis où il y a un manque.

     Je pense que dans des circonstances comme les présentes, tout requérant qui désire obtenir la permission de faire entendre en audience un témoin se doit de démontrer par affidavit circonstancié:

-      qu'il a cherché à ce que cette personne collabore à la rédaction et signe un affidavit; et,         
-      qu'il lui a été impossible d'obtenir cette collaboration.         

     Enfin, puisque tout témoignage devant la Cour ne doit pas prendre place inutilement, je pense qu'il serait à propos qu'il soit affirmé également - comme ce fut le cas ici - que ledit témoignage est essentiel à la preuve de la partie cherchant à faire entendre le témoin. À cet égard, on devrait pouvoir démontrer que l'interrogatoire de tout autre affiant, tel l'opposant dans les circonstances, n'a pu ou ne pourrait suppléer à un tel témoignage.

     Par ailleurs, on n'appuie ici d'aucune façon l'affirmation à l'effet qu'à la différence des autres témoins, l'on doive apprécier la crédibilité de Mme Poitras par le biais de son témoignage en personne.

     Dans une autre affaire impliquant une tierce opposition à une saisie effectuée au profit du sous-ministre du Revenu du Québec en matière de taxe d'accise, j'ai eu à refuser audit sous-ministre une requête similaire à la présente. Après avoir rappelé les principes généraux applicables, j'ai énoncé ce qui suit:

              Il faut savoir que l'accord des parties ou l'absence de véritable contestation par l'une d'elles pour faire entendre des témoins lors de l'audition d'une requête n'est pas en soi une raison spéciale ni un élément qui fait que l'on doit éviter de rechercher une telle raison.         
         ...         
         Il n'a pas été établi ici par le requérant qu'il lui est ou qu'il lui a été virtuellement impossible d'obtenir des affidavits des divers témoins qu'il entendait par ailleurs faire entendre.         

(Sa Majesté c. 89071 Canada Ltée et 3088-7723 Québec Inc., décision du 2 juillet 1996, dossier GST-498-95)

     Cette décision fut portée en appel et le 8 août 1996, le juge Denault de cette Cour rejetait l'appel par le biais de l'ordonnance qui suit:

                  L'appelant n'a pas démontré d'erreur dans la décision du protonotaire justifiant l'exercice, par un juge de cette Cour, de sa discrétion en lieu et place de celle du protonotaire (Canada c. Aqua-Gem Investments Ltd. [1993] C.F. 425). Il n'a pas démontré en particulier qu'il lui était impossible de procéder au contre-interrogatoire de l'opposant (R. 332.1) ou d'obtenir un affidavit des commerçants qu'il désire interroger. Bref, rien n'autorise cette Cour à déroger à l'application de la R. 319(2) pour permettre l'audition de témoins en cour.         
                  L'appel est rejeté.         

     Cette requête de la requérante sera donc rejetée mais, encore une fois, sous réserve de son droit de présenter de nouveau une telle requête avec une preuve répondant aux présents motifs.

     Richard Morneau

     Protonotaire

Montréal (Québec)

le 16 octobre 1996

            ITA-4041-96

Dans l'affaire de la Loi de l'impôt sur le revenu,

     - et -

Dans l'affaire d'une cotisation ou des cotisations établies par le ministre du Revenu national en vertu d'une ou plusieurs des lois suivantes: la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada et la Loi sur l'assurance-chômage,

CONTRE:

JEAN GUY VENNES

            Débiteur

ET

PAUL VENNES

            Opposant

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     NOMS DES AVOCATS ET DES PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU DOSSIER DE LA COUR:

INTITULÉ DE LA CAUSE:

ITA-4041-96

Dans l'affaire de la Loi de l'impôt sur le revenu,

     - et -

Dans l'affaire d'une cotisation ou des cotisations établies par le ministre du Revenu national en vertu d'une ou plusieurs des lois suivantes: la Loi de l'impôt sur le revenu, le Régime de pensions du Canada et la Loi sur l'assurance-chômage,

CONTRE:

JEAN GUY VENNES

     Débiteur

ET

PAUL VENNES

     Opposant

REQUÊTE ÉCRITE EXAMINÉE SANS COMPARUTION DES PARTIES À MONTRÉAL

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR:Me Richard Morneau, protonotaire

DATE DES MOTIFS DE L'ORDONNANCE:le 16 octobre 1996

OBSERVATIONS ÉCRITES PAR:

Me Josée Paquin pour Sa Majesté la Reine

Me Pierre Goulet pour l'opposant Paul Vennes

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:

Me George Thomsonpour Sa Majesté la Reine

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

Me Pierre Goulet pour l'opposant Paul Vennes

Goulet, Charest et St-Pierre

Grand'Mère (Québec)


Mise à jour : 2007-04-24 Haut de la Page Avis importants

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