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Le 26 septembre 2007

Notes pour une allocution de M. Robert Rabinovitch, président-directeur général de CBC/Radio-Canada, au Prix Italia.

À la recherche d’un auditoire canadien, mais pas à n’importe quel prix : un contexte particulier au Canada

Merci de m’avoir invité au prestigieux Prix Italia. Bien que ma communication soit essentiellement en anglais, je tiens d’abord à saluer tous les participants francophones, y compris les délégués de Radio-Canada.

À titre de radiodiffuseur public national, CBC/Radio-Canada offre des services en anglais et en français sur l’ensemble du territoire canadien, de même qu’à l’étranger sur RCI. C’est sur cette réalité que se fondent mes propos.

Les défis auxquels doivent faire face les radiodiffuseurs publics au XXIe siècle, particulièrement en ce qui a trait à la télévision, sont aussi nombreux que cruciaux. Autant au Canada que n’importe où ailleurs.

Il y a encore 10 ans, par exemple, le Canada ne disposait pas de 100 chaînes spécialisées numériques. Il n’y avait pas non plus une centaine de chaînes étrangères disponibles par satellite, y compris la RAI, ni près de 20 services de télévision à la carte et de vidéo sur demande. Les Canadiens regardaient la télévision et écoutaient la radio, mais ce n’était pas au moyen d’ordinateurs portables, de « Blackberries », de téléphones cellulaires ou « d’iPods », comme ils le font maintenant. En 2004, il n’y avait pas de radio par satellite au Canada. En 2005, YouTube n’existait pas, et en 2006, le téléphone multimédia n’était pas encore apparu.

En tant que radiodiffuseur public national, CBC/Radio-Canada estime que les Canadiens doivent avoir accès à du contenu distinctif créé par des Canadiens, pour des Canadiens et au sujet des Canadiens, et ceux-ci veulent aussi y avoir accès à leur convenance.

Notre rôle consiste à lier les Canadiens entre eux, à leur pays et au reste du monde. Il consiste à permettre aux Canadiens de mettre en commun la diversité de leurs réalités, de leurs voix et de leurs origines, car elles sont le reflet de notre identité nationale. Pour y arriver, on ne peut plus se contenter d’être un simple radiodiffuseur ou télédiffuseur avec une vague présence sur Internet. Aujourd’hui, nous nous définissons non pas comme un télédiffuseur, un radiodiffuseur ou même une entreprise qui offre des services sur Internet. Nous sommes un fournisseur de contenu sur toutes les plateformes possibles.

Alors que mon allocution d’aujourd’hui porte principalement sur la télévision, j’aimerais tout de même dire quelques mots sur nos services de Radio. CBC Radio et la Radio de Radio-Canada remportent toutes deux un grand succès et répondent à tous les critères de qualité, c’est-à-dire qu’elles sont populaires et qu’elles défendent les valeurs du service public. Elles fournissent également du contenu aux autres plateformes.

De plus, en diffusant notre contenu sur différentes plateformes, nous avons découvert des choses intéressantes. Par exemple, nos services de Radio ont réussi à attirer de nouveaux auditoires, plus jeunes, par l’entremise des baladodiffusions. Et en proposant des émissions sérieuses et bien faites. Il n’est pas nécessaire de niveler par le bas pour attirer un auditoire plus jeune. D’ailleurs, cet auditoire plus jeune est intelligent, connaît à fond les médias, et ne tolérerait pas qu’on le prenne de haut. C’est la capacité de joindre ces nouveaux auditoires qui nous permet de mesurer aujourd’hui notre réussite dans cet univers multiplateforme.

Cependant, malgré la croissance des nouveaux types de médias et la fragmentation de l’auditoire, la télévision demeure le média de masse le plus présent dans le monde occidental : il s’agit du principal propagateur de la culture dans la société et d’un puissant outil de consolidation de l’identité. La télévision représente aussi la pierre d’assise sur laquelle on peut bâtir une stratégie fructueuse pour diffuser du contenu sur de multiples plateformes.

Dans une large mesure, le défi que nous devons relever est lié à la réalité particulière qui distingue le contexte canadien de celui du reste du monde. Je parle de la proximité des États-Unis. Le Canada abrite l’environnement de radiodiffusion le plus soumis aux forces de la concurrence de toute la planète, aux portes du pays devenu le plus grand exportateur de culture populaire, tout particulièrement en matière de télévision et de cinéma.

Il ne s’agit toutefois pas de dénigrer les États-Unis. Les Américains se classent parmi les meilleurs créateurs de contenu du monde. Les critères de production et les sommes investies à la fois dans la création et la promotion d’émissions de télévision sont imposants à tout point de vue. Il est donc d’autant plus difficile pour le contenu canadien de jouir d’une grande visibilité et d’une place de choix dans un paysage médiatique saturé. La concurrence est féroce.

Et tandis qu’on assiste à l’intégration des entreprises, les auditoires, eux, se désintègrent. Non seulement la visibilité des services actuels et des nouveaux services diminue en raison de la fragmentation, mais les revenus fondent au fur et à mesure que les auditoires diminuent, ce qui se traduit par moins d’argent pour financer la programmation.

C’est l’influence cumulative de tous ces facteurs qui nous a amenés à concentrer nos efforts sur le contenu plutôt que sur les plateformes. Par conséquent, même si je suis ici pour vous entretenir de la manière de mesurer la qualité à la télévision, je dois aussi reconnaître que notre programmation vidéo représente un élément central de notre stratégie en matière de contenu multimédia.

À titre de télédiffuseur public national du Canada, et conformément au mandat culturel qui nous a été confié, nous devons présenter des émissions canadiennes captivantes, originales, audacieuses et divertissantes, dans un format qui plaît aux Canadiens, et qui attire un grand nombre de téléspectateurs. Nous devons les intéresser et promouvoir les valeurs du service public.

Même s’il est vrai que, contrairement aux radiodiffuseurs privés, la taille des auditoires n’est pas tout ce qui compte pour nous, il est également vrai qu’on ne peut prétendre être un radiodiffuseur public, si le public n’est pas au rendez-vous. Si trop peu de gens nous regardent, cela signifie que nous manquons de pertinence. Et si c’est le cas, pourquoi les Canadiens devraient-ils continuer à investir dans la télévision publique?

La taille des auditoires a aussi des incidences sur nos revenus publicitaires. Lorsque nous perdons des auditeurs, nous perdons aussi la capacité de produire du contenu. Si nos auditoires augmentent, par contre, les revenus additionnels sont directement utilisés pour développer davantage de programmation de haut calibre.

La taille des auditoires et les cotes d’écoute sont une manière de mesurer le succès et la qualité. Les valeurs du service public en sont une autre. Pour CBC/Radio-Canada, la question du service public est ancrée dans un certain nombre de principes directeurs interdépendants, dont les suivants :

  • enrichir la vie démocratique et culturelle des citoyens canadiens;
  • représenter la diversité et encourager la cohésion sociale;
  • réaliser les objectifs de la politique publique.

Dans les présentes circonstances démographiques, géographiques et économiques, les valeurs fondamentales associées à la démocratie et à la culture ne peuvent être défendues, si elles sont simplement soumises aux lois du marché. On ne peut pas compter sur les marchés libres pour promouvoir l’autonomie culturelle et l’identité nationale s’ils sont laissés à eux-mêmes. Seul un système mixte de télévision publique-privée peut permettre d’atteindre les objectifs de la politique publique canadienne.

La diversité des genres d’émissions présentées est également un signe distinctif d’une programmation de télévision publique de qualité. Nous estimons que, pour pouvoir présenter un contenu captivant, notre programmation doit être composée d’émissions revêtant les caractéristiques suivantes :

  • canadiennes;
  • distinctives;
  • intelligentes et stimulantes;
  • distrayantes;
  • dignes de confiance;
  • rassembleuses;
  • représentatives des collectivités;
  • innovatrices.

Bien entendu, quelle que soit la force d’attraction de nos émissions, nous échouerons si les auditoires ne les regardent pas. Même si les compliments de la critique et les récompenses ne peuvent être ignorés lorsqu’il s’agit de déterminer la qualité de nos émissions, il faut au départ trouver le juste équilibre entre ce qui est populaire et ce qui est pertinent.

En matière de télévision publique, trouver le juste équilibre n’est pas une chose aisée.

Même si rien ne me ferait plus plaisir que de pouvoir dire que CBC Television et la Télévision de Radio-Canada jouissent toutes deux d’un succès comparable, en réalité, les résultats affichés par nos services de télévision diffèrent grandement dans les marchés francophone et anglophone, et ils varient avec le temps.

Depuis quelques années, la Télévision de Radio-Canada a misé sur une stratégie très spécifique qui s’est avérée remarquablement fructueuse. Cette stratégie a demandé de procéder à un investissement substantiel dans de nouvelles émissions, programmation qui a été élaborée en fonction de quelques attributs clairement définis. Ces attributs répondent autant aux attentes des auditoires qu’aux valeurs de service public. Selon ces attributs, la nouvelle programmation devait être :

  • audacieuse;
  • en mesure d’intéresser de vastes auditoires;
  • passionnée.

Nous avons pris des risques, comme doit le faire une télévision publique, et nous avons lancé de nouvelles émissions dramatiques et de divertissement plusieurs saisons d’affilée. Certaines émissions se sont avérées des échecs et ont été retirées des ondes. D’autres ont attiré près de deux millions de téléspectateurs par semaine dans un marché qui ne compte que sept millions de personnes.

En l’espace de trois ans, notre auditoire aux heures de grande écoute a fait un bond, passant de 16,5 à 22 pour cent. Parallèllement aux cotes d’écoute, nos revenus ont augmenté et notre créativité a connu un nouvel élan. Pour ma part, je suis d’avis que nous avons réussi à créer une offre télévisuelle de qualité. Et la tendance se poursuit aujourd’hui, en dépit de la fragmentation accrue du marché télévisuel de langue française.

Passons maintenant au réseau anglais. Au cours des 20 dernières années, d’autres pays industrialisés ont eu recours à leurs radiodiffuseurs publics pour renforcer leur identité culturelle. Partout ailleurs, sauf au Canada anglais, les dramatiques produites sur place représentent l’option la plus populaire aux heures de grande écoute. Quant à nous, c’est la programmation américaine qui domine.

Au cours des dernières années, nous avons compris que nous possédons un avantage comparatif par rapport aux autres radiodiffuseurs sur le marché : notre programmation canadienne distinctive. Nous avons retrouvé nos racines et développé un contenu bien d’ici pour nos émissions dramatiques, de divertissement et pour nos émissions jeunesse.

CBC Television a apporté ces changements majeurs tout en mettant l’accent sur les auditoires, sans perdre toutefois de vue les valeurs de service public. Et, ce qui est tout aussi important, nous avons amélioré notre capacité de prendre des risques.

Notre programmation de divertissement doit être le secteur où l’on prend de grands risques, puisqu’il s’agit d’un secteur où des échecs occasionnels préparent le terrain pour les réussites. La série Little Mosque on the Prairie, qui a fait parler d’elle et a été acclamée à l’étranger, même ici en Italie où elle a gagné cette année les prix de la meilleure série et du meilleur script lors de la Roma Fiction Fest, constitue la preuve qu’un radiodiffuseur public qui prend des risques et n’a pas peur de se faire le reflet de la société peut remporter des succès.

La prise de risques mène au succès, et les succès futurs nous obligeront aussi à nous considérer non plus comme un télédiffuseur, mais comme une entreprise fournissant du contenu. Bien qu’il faille que nous produisions des émissions de télévision à succès, nous devons également nous assurer que toutes nos émissions, télévisées ou autres, sont conçues dès le départ pour l’ensemble des plateformes. Et cette philosophie est maintenant adoptée par tous nos services.

En résumé, les radiodiffuseurs doivent être alertes et prêts à prendre des risques, et ils ne doivent jamais perdre de vue leur objectif principal qui consiste à améliorer la vie démocratique et culturelle des citoyens.

Nous devons être présents sur toutes les plateformes sans en privilégier aucune, nous devons attirer de vastes auditoires et nous devons défendre les valeurs du service public. L’atteinte de ces objectifs est la véritable mesure de la qualité.

Je vous remercie.

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