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Bureau de la concurrence du Canada

Bureau de la concurrence

Précis d'information technique

Acquisition par Johnson & Johnson de la division des produits sans ordonnance de Pfizer Inc.

Ce précis d'information technique vise à résumer les principales conclusions de l'examen effectué par le Bureau de la concurrence (le Bureau) au sujet de l'acquisition par Johnson & Johnson de la division des produits sans ordonnance de Pfizer Inc. (Pfizer).

Le lecteur est invité à faire preuve de prudence dans son interprétation de l'évaluation que le Bureau de la concurrence a effectuée de cette transaction. Les décisions en matière d'application de la loi sont prises au cas par cas; les conclusions dont il est question dans le présent précis d'information sont propres à cette fusion et ne lient pas la commissaire de la concurrence (la commissaire). Par ailleurs, les exigences légales de l'article 29 de la Loi sur la concurrence ainsi que les politiques et pratiques du Bureau qui concernent le traitement des renseignements confidentiels limitent son aptitude à dévoiler certains renseignements obtenus au cours de l'examen d'un projet de fusion. Le lecteur doit aussi tenir compte du fait que certaines sections du consentement (le consentement) conclu par Johnson & Johnson et la commissaire sont confidentielles.

Contexte

Le 26 juin 2006, les parties ont annoncé que Johnson & Johnson comptait acheter la division des produits sans ordonnance de Pfizer Inc.(la transaction), qui est constituée des marques telles que Listerine®, Nicorette®, Rolaids®, Sudafed®, Benadryl® et Visine®. Les instances du domaine de la concurrence du Canada, des États-Unis, de l'Europe, de l'Australie, de la Corée, du Brésil et d'autres pays ont examinées la transaction. Les parties ont présenté leurs arguments au Bureau et lui ont fourni les renseignements additionnels requis. Le Bureau a pour sa part mené des entrevues et examiné les renseignements de divers intervenants, dont les concurrents, les grands détaillants, les pharmacies et les distributeurs. Dans le cadre de son examen, le Bureau a consulté la Federal Trade Commission des États-Unis ainsi que la Direction générale de la concurrence de la Commission européenne.

À la suite de son examen, le Bureau a conclu que la transaction aurait vraisemblablement pour effet d'empêcher ou de réduire sensiblement la concurrence au Canada dans la vente d'un seul produit, notamment l'onguent pour l'érythème fessier du nourrisson à l'oxyde de zinc (Communiqué de presse). Le 19 décembre 2006, Johnson & Johnson et la commissaire ont convenu de résoudre ce problème en vertu de l'article 105 de la Loi sur la concurrence . L'entente prévoit que Johnson & Johnson Inc. se dessaisira de l'onguent pour l'érythème fessier du nourrisson vendu sous la marque Zincofax® ainsi que des actifs connexes. Le 20 décembre 2006, le consentement a été enregistré auprès du Tribunal de la concurrence.

Les parties

Johnson & Johnson est une société cotée en bourse, dont le siège social est au New Jersey, aux États-Unis. En 2006, Johnson & Johnson affichait des ventes mondiales de 53,3 milliards de dollars américains. Ses activités sont réparties entre trois divisions : i) matériel médical et diagnostic, ii) produits pharmaceutiques, et iii) produits sans ordonnance.

La division des produits sans ordonnance fabrique et commercialise un grand éventail de produits de soins pour nourrissons et enfants, de produits pour les soins de la peau, de produits de santé bucco-dentaire et de soin des plaies, ainsi que des produits de santé pour femmes, des produits nutritionnels et des produits sans ordonnance. Ces produits sont destinés au grand public et sont achetés sans ordonnance. Johnson & Johnson vend ses produits dans le monde entier par l'intermédiaire de grossistes ainsi que directement à des détaillants indépendants ou en réseau.

Pfizer est une société pharmaceutique internationale sise aux États-Unis. Ses activités se concentrent essentiellement dans la recherche, le développement, la fabrication et la vente de médicaments sous ordonnance destinés aux humains et aux animaux. Avant cette transaction, Pfizer avait trois division, soit i) la santé humaine, ii) la santé animale, et iii) les produits sans ordonnance.

La division des produits sans ordonnance de Pfizer était responsable de produire et commercialisé divers produits en vente libre dont certains sous ordonnance1 servant aux soins bucco-dentaires, au traitement des voies respiratoires supérieures, au traitement de la tabacomanie, à la santé gastro-intestinale, aux soins de la peau et des yeux et au traitement de la calvitie. Pfizer vendait principalement ces produits à des grossistes et à des détaillants.

Chevauchement de concurrence

Au Canada, bien que l'on compte 34 marchés de produits distincts où au moins une des deux parties fournit des produits, le Bureau de la concurrence n'a constaté un chevauchement de concurrence que dans huit de ces marchés. Après un examen approfondi, le Bureau a conclu que la transaction aurait vraisemblablement pour effet de réduire sensiblement la concurrence dans un seul de ces marchés de produits, celui de l'onguent contre l'érythème fessier du nourrisson. Dans les sept autres marchés, la transaction ne soulève pas de problèmes importants sur le plan de la concurrence.

Marché du produit

L'onguent contre l'érythème fessier du nourrisson est une crème ou un onguent médicamenteux contenant un ingrédient actif, l'oxyde de zinc. Ce produit réduit la démangeaison, contient un léger antiseptique pour prévenir l'infection et atténue la douleur et l'inconfort. Les onguents contre l'érythème fessier du nourrisson créent une barrière entre la peau du bébé et la couche, et permettent ainsi de prévenir ou de traiter les irritations cutanées. Les onguents contre l'érythème fessier du nourrisson renferment un ingrédient médicamenteux, l'oxyde de zinc, en concentrations diverses, ainsi que des ingrédients non médicamenteux. Les produits Johnson & Johnson Inc. conçus pour soigner cette irritation sont Aveeno Baby®, Johnson's Baby® et Penaten®, et ceux de Pfizer, Desitin® et Zincofax.

Marché géographique

Le marché géographique pertinent des produits sans ordonnance et, plus particulièrement de l'onguent contre l'érythème fessier du nourrisson, s'étend à l'ensemble du Canada. Au nombre des facteurs que le Bureau a pris en considération figurent les suivants.

  1. Les parties distribuent leurs produits à tous les consommateurs canadiens à partir d'un seul endroit. Quant aux acheteurs, ils se procurent ces produits pour le compte d'un réseau de magasins de détail ou d'un groupe d'achat et distribuent ces produits à leurs points de vente au détail au Canada sans coûts de transports considérables;

  2. Les marques des parties sont d'envergure nationale; les ventes ne sont pas limitées à aucune région ou province canadienne particulière;

  3. Aucune restriction réglementaire ou juridique n'empêche la distribution de produits sans ordonnance sur tout le territoire canadien à partir d'un seul endroit; il n'existe pas d'obstacle commercial interprovincial connu.

Quant à la possibilité d'élargir le marché géographique, les règlements de Santé Canada limitent l'entrée au Canada de produits sans ordonnance provenant de l'étranger. Entre autre, Santé Canada exige que les médicaments sans ordonnance et les vitamines vendus au Canada soient dotés d'un code d'identification de médicament (DIN) attestant que le produit peut être vendu au Canada. De plus, tous les produits pharmaceutiques vendus au Canada doivent afficher une étiquette, un emballage et des directives dans les deux langues officielles, d'où la nécessité de fabriquer des séries spécialement destinées au Canada qui respectent les normes prévues dans la réglementation canadienne. Les fabricants peuvent ainsi segmenter les marchés canadien et américain et pratiquer des prix différents dans les divers marchés, ce qui crée des obstacles non négligeables à l'accès des produits américains au marché canadien. En outre, à l'exception de la marque Desitin, les marques dominantes sur les marchés canadien et américain sont différentes. Les deuxième et troisième marques en importance des onguents contre l'érythème fessier du nourrisson aux États-Unis, à savoir A&D et Balmex, ne sont pas vendues au Canada. Même la marque Desitin est vendue sous un emballage différent aux États-Unis.

Pour toutes ces raisons, le Bureau a conclu que le marché géographique pertinent des produits pharmaceutiques sans ordonnance, et plus particulièrement dans le cas de l'onguent contre l'érythème fessier du nourrisson, est le Canada.

Parts du marché

Les parts du marché ont été déterminées à partir des données les plus récentes sur le volume des ventes qu'a recueillies AC Nielsen Canada au cours d'une période de 52 semaines consécutives. Les données de AC Nielsen étaient les données de tierces parties les plus précises que le Bureau a pu obtenir sur les ventes au détail des produits pharmaceutiques sans ordonnance.

Dans les marchés où les parties détenaient une parts bien inférieures au seuil de 35 % prévu par les Lignes directrices pour l'application de la loi - Fusions (Lignes directrices), le Bureau a conclu que la fusion n'aurait vraisemblablement pas pour effet d'empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence2. Quant aux marchés où les parts dépassent ce seuil, le Bureau en a effectué une analyse approfondie pour déterminer si la transaction allait avoir pour effet d'empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence. Comme il a été mentionné, le Bureau a jugé qu'il convenait de se concentrer à un seul de ces marchés, celui de l'onguent contre l'érythème fessier du nourrisson.

Entraves à l'accès

Il faut en règle générale de cinq à dix ans pour qu'un produit destiné à la vente libre soit mis sur le marché. Après avoir subi toutes les étapes normales de recherche et de développement requises, tout nouveau produit est soumis a un processus de réglementation administré par Santé Canada3. Même si le processus d'approbation réglementaire des produits sans ordonnance a été simplifié et qu'il est moins strict que celui auquel sont soumis les médicaments sous ordonnance, il n'a pas perdu son importance pour autant. Comme la plupart des produits destinés à la vente libre ne sont pas de nouveaux médicaments, les fabricants ne sont pas tenus de demander un avis de conformité; toutefois, tout nouveau produit destiné à la vente libre doit se faire attribuer par Santé Canada un numéro DIN. Les produits destinés à la vente libre en pharmacie doivent obtenir un numéro DIN, et la procédure peut être assez longue. Le fabricant doit aussi obtenir une autorisation de Santé Canada s'il se propose de modifier le statut du médicament d'ordonnance en celui de médicament en sans ordonnance.

De plus, un nouveau concurrent sur le marché devra investir beaucoup de temps et d'argent avant de devenir compétitif sur ce marché. Il devra assumer des coûts irrécupérables élevés pour, entre autres choses, faire connaître et promouvoir la marque. Un nouveau concurrent doit également convaincre les détaillants de vendre ses produits, une tâche qui peut s'avérer difficile en raison de l'espace limité sur les tablettes. La réputation peut elle aussi constituer une entrave importante. Devant ces obstacles, il est improbable qu'un nouveau concurrent réussisse dans le marché et à bien s'y positionner en moins de deux ans.

Les intervenants considèrent que la réputation de la marque dépend plus de la marque que du spécialiste en commercialisation ou du fabricant. Un nouveau concurrent doit engager des dépenses considérables dans des activités publicitaires et promotionnelles ciblant les pédiatres, les omnipraticiens, etc., au cours d'une longue période pour augmenter sa part de marché. Durant ces dernières années, aucune nouvelle marque n'a réussi à accaparer plus de 6 % du marché. En outre, plusieurs des marques qui ont tenté d'augmenter leur part de marché par des investissements considérables n'ont réussi qu'à conquérir 1 ou 2 % du marché.

Concurrence des marques de distributeur

Les marques de distributeur représentent près de 17 % de toutes les ventes de produits sans ordonnance au Canada4. Le Bureau s'est penché sur la question de savoir si un produit de la marque distributeur d'onguent contre l'érythème fessier du nourrisson, qui est dans le même marché pertinent du produit, créerait une pression sur le prix dans le cas d'une hausse significative du prix. Les intervenants du marché ont signalé que, en règle générale, la mesure dans laquelle les produits de marque de distributeur posent une concurrence sérieuse aux produits des grandes marques varie grandement selon la catégorie des produits. L'un des indicateurs de l'ampleur de la concurrence réside dans l'écart des prix. En effet, l'écart entre le prix d'un produit de grande marque et celui d'un produit de marque de distributeur peut différer grandement selon les catégories de produits. Un grand écart entre les prix peut traduire une diminution de la capacité d'un produit de marque de distributeur à discipliner les produits de marque.

Dans le cas de l'onguent contre l'érythème fesser du nourrisson, l'écart entre le prix des produits de marque de distributeur et celui des produits des grandes marques est assez considérable, ce qui donne à penser que le produit de marque de distributeur n'a pas d'effet sur le prix des produits des grandes marques.

Substituts acceptables

La gelée de pétrole peut être utilisée pour prévenir l'irritation, mais n'est pas considérée comme un traitement efficace contre l'érythème fessier du nourrisson. La gelée de pétrole n'a aucune propriété médicinale, ne facilite pas la guérison et n'est pas absorbée par la peau. Elle n'est pas vendue comme un traitement de l'érythème fessier du nourrisson et se trouve généralement dans une section à part sur les étalages du détaillant.

Dans les cas d'érythème grave, un médecin pourrait prescrire une crème à faible teneur d'hydrocortisone. Non seulement cette solution requiert une ordonnance, mais elle implique aussi plus de frais.

Pouvoir compensateur

Le Bureau a eu de multiples entretiens avec les détaillants à grande surface du Canada. Ces détaillants représentent près de 70 % de toutes les ventes d'onguents contre l'érythème fessier du nourrisson au Canada. Il convient de souligner que les onguents contre cet érythème fessier ne prennent généralement que très peu d'espace sur les étalages, et que leur potentiel de vente est considéré comme limité. Si l'acquisition n'avait pas été assujettie à des mesures correctives, l'entité fusionnée aurait alors possédé quatre des cinq marques les plus populaires au Canada. Les détaillants n'auraient pu restreindre la puissance commerciale qu'elle aurait été en mesure d'exercer.

Élimination d'un concurrent dynamique et efficace

La transaction aurait eu pour effet d'éliminer la concurrence entre les plus importants fournisseurs de ce marché de produits au Canada. Elle aurait par ailleurs eu pour effet d'accroître considérablement la concentration dans ce même marché, lequel aurait alors été sous l'emprise de Johnson & Johnson Inc. L'information recueillie a donné à croire que l'onguent contre l'érythème fessier du nourrisson fait l'objet d'une demande particulièrement inélastique, et que la transaction aurait probablement eu pour effet de pousser les prix à la hausse. Johnson & Johnson Inc. ainsi que Pfizer Canada Inc. ont toujours maintenu leur position avantageuse respective sur le marché en axant leurs activités promotionnelles sur ceux qui influencent les décisions d'achat, à savoir les médecins (les pédiatres et les omnipraticiens, plus particulièrement), les sages-femmes, les administrateurs d'hôpital, les infirmières hygiénistes, et ainsi de suite. Les deux entreprises ont distribué des coupons-rabais et annoncé leurs produits dans les circulaires de magasins. Elles ont également ajouté des échantillons de leurs produits aux trousses pour bébés fournies par les hôpitaux. De plus, la transaction aurait agi comme une désincitation à l'innovation.

Conclusion

Le Bureau a conclu que, sans mesure corrective, Johnson & Johnson Inc. aurait détenu une très grande part du marché canadien de l'onguent contre l'érythème fessier du nourrisson. Après la transaction, elle aurait possédé quatre des cinq marques les plus populaires au Canada. La cinquième marque la plus populaire et les marques des distributeurs, ne semblait pas en mesure de restreindre efficacement le pouvoir qu'aurait exercé l'entité fusionnée. Les faits recueillis ont permis d'établir que, après la transaction proposée, rien n'aurait véritablement empêché Johnson & Johnson Inc. de hausser ses prix.

Pour donner suite aux conclusions du Bureau selon lesquelles la transaction aurait vraisemblablement eu pour effet de réduire la concurrence, Johnson & Johnson a conclu avec la commissaire un consentement l'engageant à se dessaisir de la marque Zincofax. Sans ce dessaisissement, Johnson & Johnson Inc. aurait détenu une part de marché de près de 60 %. En se dessaisissant de cette marque, Johnson & Johnson Inc. aura une part de marché dans la mi- trentaine. Cette part est légèrement supérieure à celle que elle détenait avant la transaction.

Le Bureau est convaincu que, grâce au dessaisissement prévu par le consentement, la transaction n'aura vraisemblablement pas pour effet d'empêcher ou de réduire sensiblement la concurrence sur le marché canadien de l'onguent contre l'érythème fessier pour nourrisson.


1 La division des produits sans ordonnance de Pfizer ne vend que trois produits sous ordonnance au Canada : Reactine 20mg, Anuso-HC et Anugesic-HC.

2 Le commissaire ne contestera généralement pas une fusion en se basant sur des préoccupations reliées à l'exercice unilatéral d'un pouvoir de marché lorsque la part de marché de l'entité fusionnée est inférieure à 35% après la fusion. » Fusions – Lignes directrices pour l'application de la loi, septembre 2004, paragraphe 4.12.

3 Si le produit sans ordonnance a été approuvé aux États-Unis, le processus de réglementation de Santé Canada sera légèrement raccourci.

4 Données recueillies par AC Nielson sur 52 semaines consécutives jusqu'au 18 mars 2006, tous canaux de distribution confondus, à l'échelle nationale.


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