Pêches et Océans Canada / Fisheries and Oceans Canada - Gouvernement du Canada / Government of Canada
 
Pêches et Océans Canada

Histoire récente de la pêche à la morue dans le Canada atlantique

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2GH - La morue du nord du Labrador
2J3KL - La morue du sud du Labrador - est deTerre-Neuve
3Pn4RS - La morue du nord du golfe du St-Laurent
4TVn - La morue du sud du golfe du St-Laurent 3Pn4RS - La morue du nord du golfe du St-Laurent
3Ps - La morue du banc du St-Pierre
4TVn - La morue du sud du golfe du St-Laurent 4TVn - La morue du sud du golfe du St-Laurent
3Ps - La morue du banc du St-Pierre
4X - La morue du sud du plateau néo-écossais
4X - La morue du sud du plateau néo-écossais
4VsW - La morue du nord du plateau néo-écossais
5Ze - La morue du banc Georges 4X - La morue du sud du plateau néo-écossais

Les stocks de morue de l’Atlantique Nord-Ouest sont répartis selon les 11 pêcheries suivantes, réglementées par l’Organisation des pêches de l’Atlantique Nord-Ouest (OPANO):

1.  Groenland Ouest (divisions 1A-1F)
2.  nord du Labrador (divisions 2G + 2H)
3.  sud du Labrador - est de Terre-Neuve (divisions 2J + 3K + 3L)
4.  sud du Grand Banc (divisions 3N + 30)
5.  Bonnet Flamand (division 3M)
6.  banc Saint-Pierre (sous-division 3Ps)
7.  nord du golfe du Saint-Laurent (division 3Pn + 4R + 4S)
8.  sud du golfe du Saint-Laurent (division 4T + 4Vn)
9.  nord du plateau néo-écossais (divisions 4Vs + 4W)
10.  sud du plateau néo-écossais (division 4X) et golfe du Maine (division 5Y)
11. banc Georges (division 5Z)

Le présent document porte sur les stocks de morue retrouvés dans les eaux canadiennes de 2J3KL (soit les divisions 2J, 3K et 3L de l’OPANO); 3Pn4RS (soit les divisions 3Ps, 4R et 4S de l’OPANO); et 4TVn (soit les divisions 4T et 4Vn de l’OPANO). Les stocks de morue de la sous-division 3Ps (banc Saint-Pierre, situé au large de la côte sud de Terre-Neuve) et des divisions 4X, 4W et 4Vs du plateau néo-écossais sont aussi mentionnés.

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Parmi les neuf stocks distincts de morue du Canada atlantique que gère Pêches et Océans Canada (MPO), trois font l’objet de nombreux débats – la morue du Nord, au large de la côte est de Terre-Neuve et de la côte sud du Labrador (2J3KL sur la carte ci-dessus), la morue du nord du golfe du Saint-Laurent (3Pn4RS sur la carte ci-dessus) et la morue du sud du golfe du Saint-Laurent (4TVn sur la carte ci-dessus). De fait, nombreux sont les Canadiens qui s’intéressent aux mesures de gestion des ressources halieutiques et des océans appliquées dans ces trois régions y compris les pêcheurs commerciaux, pêcheurs sportifs, scientifiques, professeurs d’université, citoyens intéressés à l’actualité, et politiciens fédéraux, provinciaux et municipaux. Bien que les parties intéressées aient à cœur la conservation, la protection et la reconstitution des stocks de morue, les points de vue quant à la meilleure manière d’atteindre des buts diffèrent.

Le présent document est un exposé de l’histoire récente de la pêche à la morue dans les eaux du Canada atlantique au cours de la dernière décennie, en particulier depuis l’annonce du premier moratoire en 1992. Cet exposé vise à documenter les nombreuses mesures de conservation et autres décisions prises par le gouvernement du Canada afin de reconstituer les stocks de morue et d’aider les pêcheurs et les travailleurs des pêches touchés par les fermetures de la pêche à la morue. Il inclut aussi les progrès récents réalisés dans l’étude et l’analyse de divers stocks de morue, qui ont abouti, en bout de ligne, à de nouvelles fermetures de la pêche en 2003.

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Avant le moratoire

La pêche à la morue constituait autrefois la pierre angulaire de la structure sociale et économique du Canada atlantique, notamment à Terre-Neuve et au Labrador, où la pêche a débuté dans les années 1500. Les débarquements annuels dans les années 1800 variaient entre 150 000 et 400 000 tonnes (t).

Une panoplie d’engins étaient traditionnellement utilisés pour pêcher la morue dans les eaux côtières : trappes, palangres de fond, filets maillants, lignes à main, turluttes et sennes. Les goélettes qui pêchaient en haute mer utilisaient surtout des palangres. Puis sont apparus au XXe siècle le chalutier à vapeur et le chalut à panneaux, ainsi que les navires-usines permettant la transformation et la congélation des prises directement en mer. Ces percées technologiques et d’autres ont entraîné une augmentation constante des débarquements annuels, qui ont atteint un pic durant les années 1960 de presque deux millions de tonnes. Puis ils ont accusé une baisse spectaculaire dans les années 1970, n’atteignant même pas 500 000 t en 1977, bien que, de 1981 à 1990, la pêche à la morue alimentait encore 59 p. 100 des débarquements sur la côte nord-ouest sur le plan de la valeur.1

Vers la fin des années 1980, les effectifs des stocks de 2J3KL, 3Pn4RS et 4TVn ont commencé à être une source de préoccupations; le total des débarquements prélevés dans les stocks de morue du Nord et du nord du golfe du Saint-Laurent entre 1984 et 1992 est tombé en chute libre, passant de 38 648 à 11 828 t.2

Pour stopper cette baisse spectaculaire des débarquements, le MPO a introduit plusieurs mesures de gestion : modifications réglementaires, contrôle et surveillance accrus de la pêche, légère augmentation des droits de permis et interdiction de pêcher au chalut à panneaux dans certaines pêcheries (engin mobile remorqué par un bateau pour récolter le poisson). Malheureusement, ces mesures n’ont pas permis de réduire les pressions sur ces trois stocks. Des facteurs environnementaux, la pression de la pêche et les incertitudes entourant l’évaluation des stocks, en plus des allégations de surpêche étrangère, de braconnage et de prédation par les phoques, ont gonflé davantage les préoccupations tout au long de 1991 et 1992. Le volume des prises et les effectifs des stocks continuant à péricliter, les conjectures à savoir si le MPO allait restreindre ou fermer la pêche prirent de l’ampleur.

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Annonce du moratoire de la pêche de la morue du Nord et de mesures de soutien du revenu

Le 2 juillet 1992, le ministre des Pêches (John Crosbie) a annoncé un moratoire de deux ans de la pêche à la morue dans 2J3KL afin de permettre à la biomasse génitrice de revenir rapidement à sa moyenne à long terme. Cette période de deux ans visait à permettre au Ministère et aux intervenants de considérer les étapes nécessaires pour assurer l’auto-suffisance de la pêche dans ces divisions de l’OPANO.

Le ministre ayant reconnu que les pêcheurs commerciaux et les travailleurs d’usine de transformation du poisson ne tireraient aucun revenu de la pêche à la morue dans 2J3KL pendant la période de fermeture de la pêche de deux ans, a aussi annoncé des prestations d’aide spéciale de 225 $ par semaine pendant 10 semaines à quelque 19 000 Canadiens et Canadiennes qui avaient soit épuisé leurs prestations d’assurance-chômage (a.-c.) ou qui n’avaient pas accumulé un nombre suffisant de semaines de travail pour avoir droit à des prestations.

Dans la même foulée, un plan intégré de remplacement et de rajustement du revenu a aussi été préparé ainsi que les mesures suivantes de restructuration de l’industrie à long terme.

Le Groupe d’étude sur les revenus et l’adaptation des pêches de l’Atlantique a été créé. Il a été chargé d’examiner la structure du revenu de la pêche au poisson de fond au Canada et de recommander un programme à long terme de supplément et de stabilisation du revenu à Développement des ressources humaines Canada (DRHC) et au MPO. Richard Cashin, président de la Fishermen, Food and Allied Workers Union (FFAW), en était le président.

Le Programme d'adaptation et de redressement de la pêche de la morue du Nord (PARPMN) de deux ans, annoncé le 17 juillet 1992, comportait quatre volets : un programme de remplacement du revenu, un programme de formation, de professionnalisation et d’accréditation, un programme de retraite anticipée volontaire et un programme de retrait de permis volontaire. Le PARPMN couvrait aussi les coûts liés à la suspension des activités de pêche, la mise au point de méthodes de pêche sélective et le développement de nouvelles pêches afin d’alimenter les usines à terre.

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Autres stocks de morue - mesures de conservation et de mise en application

Des restrictions sur la pêche d’autres stocks de morue ont été annoncées dans le Plan de gestion du poisson de fond de l’Atlantique pour 1993, diffusé le 18 décembre 1992. Le Total autorisé des captures (TAC) de morue dans de nombreuses pêcheries était nettement réduit3, la pêche d’hiver à la morue dans 4VsW à l’aide de tous les types d’engin était fermée et la pêche à la morue dans 4Vn en décembre était interdite. Des mesures sévères de conservation et de mise en application de la réglementation étaient aussi mises en place pour confirmer que ces restrictions faisaient partie d’une stratégie de rétablissement à long terme des stocks de morue de l’Atlantique.

A aussi été annoncé dans le Plan de gestion pour 1993 la création d’un organisme consultatif indépendant réunissant des scientifiques et des représentants de l’industrie de la pêche, appelé le Conseil pour la conservation des ressources halieutiques (CCRH), qui remplaçait le Comité scientifique consultatif des pêches canadiennes dans l’Atlantique et le Comité consultatif du poisson de fond de l’Atlantique. Le CCRH a été chargé d’examiner les évaluations de tous les stocks de poissons de fond et les opinions des intervenants obtenus durant les audiences publiques, et de fournir annuellement au ministre des Pêches et Océans des recommandations écrites sur les mesures de conservation.

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Programmes d’adaptation pour les pêcheurs de morue

Les pêcheurs de morue touchés par les réductions des TAC et les autres restrictions annoncées en 1993 ont pu se prévaloir du Programme d’adaptation des pêches de l’Atlantique et des programmes d’adaptation semblables administrés par Emploi et Immigration Canada.

Le 23 avril 1993, les pêcheurs et les travailleurs d’usine touchés ont aussi pu se prévaloir d’une initiative conjointe du MPO et d’Emploi et Immigration Canada, appelé le Programme d’aide pour la pêche des poissons de fond de l’Atlantique (PAPPFA). Cette stratégie de transition dotée d’un budget de 191 millions de dollars mettait l’accent sur les programmes de formation, les projets de développement de l’emploi, le soutien du revenu, le développement communautaire, la diversification économique, l’amélioration des plans de pêche et la coopération fédérale-provinciale. Le but à long terme du PAPPFA était une industrie de la pêche du Canada atlantique viable et durable.

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Autres mesures de gestion du poisson de fond de l’Atlantique en 1993

Malgré les mesures prises par le MPO en 1992 pour reconstituer les stocks de morue de l’Atlantique, les conclusions du conseil scientifique de l’OPANO indiquaient que le stock de 2J3KL avait continué à péricliter à cause des conditions climatiques difficiles et des taux de mortalité élevés. Le Conseil était d’avis aussi que ces stocks ne se rétabliraient pas avant la fin des années 1990. Diffusées le 18 juin 1993, ces conclusions laissaient présager les recommandations pour les stocks poissons de fond que le CCRH a présentées au nouveau ministre (Ross Reid), le 23 août 1993. En effet le CCRH recommandait pour la morue, l’églefin et le goberge la fermeture immédiate de la pêche dirigée de six stocks, d’importantes réductions des quotas pour trois stocks et d’autres mesures de conservation pour quatre stocks.

Le ministre a répondu aux recommandations du CCRH le 31 août 1993 en annonçant d’autres mesures de gestion pour le reste de la saison de pêche de 1993; la pêche à la morue dans certaines pêcheries a été entièrement interdite4 et les quotas pour certains stocks ont été réduits5. Afin d’assurer que les pêcheurs touchés par ces nouvelles mesures aient accès aux programmes de soutien du revenu, le ministre a aussi annoncé des modifications à la LSPA et la prolongation de l’Allocation temporaire pour l’adaptation des pêches.

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Changement de cap : les pêches de l’avenir6 et l’engagement envers la reconstitution des stocks de 1993 à 1997

En novembre 1993, le Groupe d’étude sur les revenus et l’adaptation des pêches de l’Atlantique a présenté son rapport final – le rapport Cashin – aux ministres du MPO (Brian Tobin) et de DRHC (Lloyd Axworthy). Intitulé Changement de cap : les pêches de l’avenir, ce rapport attribuait la situation difficile de la pêche du poisson de fond de l’Atlantique à trois problèmes fondamentaux: la dépendance excessive sur la ressource, la pression démesurée de la pêche sur celle-ci et la surcapacité des secteurs de la pêche et de la transformation. En d’autres mots, il y avait trop de pêcheurs de morue et de bateaux et pas assez de poisson pour alimenter la pêche.

Ce rapport contenait 42 recommandations pour pallier à ces problèmes, dont neuf exigeaient des modifications du régime d’assurance-chômage pour les pêcheurs. Les autres ciblaient des mesures précises, comme l’amélioration des politiques et des mesures de gestion; des réductions de la capacité des secteurs de la pêche et de la transformation; l’ajustement du revenu et la formation; ainsi que la diversification de l’industrie.

Le ministre des Pêches (Brian Tobin) a répondu directement au Rapport Cashin le 16 novembre 1993, promettant de reconstruire l’industrie de la pêche de l’Atlantique et les villages de pêcheurs grâce à quatre stratégies. Il promit de créer un partenariat entre le ministre des pêches et l’industrie de la pêche et de rétablir la fiabilité des décisions relatives à la conservation et à la gestion et la confiance en celles-ci. Il a aussi juré de créer une industrie de la pêche viable et de rétablir le fondement économique des villages de pêcheurs. Peu après, le CCRH présenta au ministre un rapport sombre sur l’état des stocks de poisson de fond de l’Atlantique, mais ceci n’a pas empêché ce dernier de se dire prêt à prendre les mesures rigoureuses nécessaires pour reconstituer les stocks de poisson de fond et de réaffirmer son engagement « de ne pas tourner le dos à ceux touchés par la crise qui secouait l’industrie de la pêche ».

Le 20 décembre 1993, le ministre des Pêches a annoncé que toutes les principales pêches à la morue seraient fermées et que les quotas pour d’autres espèces de poisson de fond seraient fortement réduits en 1994. Le moratoire, qui devait prendre fin en principe le 15 mai 1994, a été prolongé pendant une période indéterminée et d’autres mesures de conservation (plans de pêche, sélectivité des engins, allocations limitées de prises accessoires, limite de prises quotidiennes et fermetures saisonnières de la pêche récréative) ont été imposées. Le ministre s’est en outre engagé à faire un examen complet du processus de délivrance de permis et annoncé des mesures intérimaires pour bloquer l’entrée dans le secteur de la pêche au poisson de fond. Il n’a autorisé la pêche dirigée à la morue qu’au sud-est de la Nouvelle-Écosse, dans 4X et 5Ze.

On a estimé à ce moment-là que jusqu’à 35 000 pêcheurs et travailleurs d’usine n’auraient pas d’emploi en 1994 à cause des fermetures des pêches et des restrictions mises en place depuis 1991. Conforme à son engagement envers ces Canadiens et Canadiennes, le ministre a desserré les règles d’admissibilité à la Stratégie du poisson de fond de l’Atlantique ( LSPA), considérant cela une question d’équité fondamentale. Les modifications assuraient que les mesures de soutien du revenu étaient les mêmes pour tous, indépendamment de la province de résidence.

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La Stratégie du poisson de fond de l’Atlantique (LSPA)

Le 19 avril 1994, les ministres du MPO (Brian Tobin) et de DRHC (Lloyd Axworthy) ont annoncé un programme de 1,9 milliard de dollars s’étalant sur cinq ans, appelé La Stratégie du poisson de fond de l’Atlantique (LSPA), de concert avec l’Agence de promotion économique du Canada atlantique (APECA) et l’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec (DEC-Québec). La LSPA, qui remplaçait le PARPMN et le PAPPFA, est entrée en vigueur le 16 mai 1994.

La LSPA comprenait deux grands volets : des mesures de soutien du revenu et des mesures visant à réduire la capacité de pêche de 50 p. 100 et à rationaliser l’industrie. Mettant l’accent sur les mesures d’adaptation de la main-d’œuvre, la LSPA visait aussi à aider les individus touchés à avoir accès à de la formation professionnelle et à des possibilités d’emploi à l’extérieur du secteur de la pêche.

De 1994 à 1997, le MPO et ses partenaires provinciaux et sectoriels se sont consacrés à la tâche ardue qu’était la mise en oeuvre de la LSPA. Quatre conseils d’adaptation de la capacité de pêche ont été établis à l’échelle de la région de l’Atlantique et les ministres du MPO et de DRHC se sont rencontrés régulièrement pour discuter des progrès réalisés et de l’efficacité de la LSPA.

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Réouverture restreinte de la pêche à la morue et relevés restreints par pêche indicatrice et sentinelle

Dans le rapport annuel pour 1997 qu’il a présenté au ministre des Pêches (Fred Mifflin), le CCRH recommandait la réouverture restreinte de la pêche à la morue dans 3Pn4RS et 3Ps car il était d’avis que les stocks retrouvés dans ces eaux s’étaient suffisamment rétablis pour soutenir de faibles niveaux de pêche commerciale. Le ministre a donné suite à ces recommandations en fixant des TAC de 6 000 t pour 3Pn4RS et de 10 000 t pour 3Ps ainsi qu’un TAC de 2 000 t pour les prises accessoires en vue d’achever les relevés par pêche sentinelle et l’expérimentation d’engins dans 4TVn, mais que la pêche dirigée dans ce secteur n’était pas rouverte. Des contrôles serrés ont aussi été mis en place afin que les objectifs de conservation soient atteints, y compris des plans de pêche axés sur la conservation, l’application rigoureuse des règlements et un contrôle serré des prises à quai et en mer.

Toutefois, les évaluations des stocks effectuées par le MPO révélaient que les perspectives de la pêche de la morue de l’Atlantique demeuraient sombres en général. Lorsque le ministre des Pêches (David Anderson) a annoncé, le 27 mai 1998, les mesures de gestion de la pêche du poisson de fond pour le golfe du Saint-Laurent en 1998, il a fait part de sa profonde préoccupation du fait « que malgré plusieurs années de moratoire sur la pêche de la morue de l’Atlantique, il y ait peu d’indications de rétablissement, avec l’exception de 3Ps ». La pêche commerciale à la morue dans la plupart des pêcheries7 a donc continué d’être interdite, quoique le TAC pour 3Ps ait été bonifié, pour passer à 20 000 t.

À la recommandation du CCRH, des exceptions ont été faites afin que puissent être effectués des relevés par pêche indicatrice et sentinelle dans trois pêcheries en vue de recueillir des données scientifiques permettant de brosser un tableau fidèle de la situation de ces stocks. À cette fin, le ministre a fixé des TAC de 3 000 t pour 4TVn et 3Pn4RS et de 4 000 t pour 2J3KL.

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Programme d’adaptation et de restructuration des pêches canadiennes

Le 18 juin 1998, les ministres du MPO, de l’APECA et de DRHC ont annoncé le Programme d'adaptation et de restructuration des pêches canadiennes (PARPC), doté d’un fonds de 730 millions de dollars étalé sur cinq ans, dont la raison d’être était de faire face à la réduction permanente de la pêche du poisson de fond de l’Atlantique. L’objectif du PARPC était spécifiquement « d'aider les particuliers et les collectivités côtières à s'adapter aux possibilités offertes à l'extérieur du secteur de la pêche et à jeter les bases d'une pêche autosuffisante, durable sur le plan environnemental et économiquement viable ».

Le PARPC était divisé en cinq volets : 250 millions de dollars pour le retrait de permis de pêche; 180 millions de dollars consacrés aux clients de la LSPA; 135 millions de dollars pour des mesures de rajustement des revenus, de la formation et des services de counselling; jusqu’à 100 millions de dollars destinés au développement économique et communautaire régional, administrés par l’APECA et DEC-Québec; et jusqu’à 65 millions de dollars consacrés à un programme de retraite anticipée. (Les fonds réservés aux clients de la LSPA consistaient en des paiements forfaitaires finaux remplaçant les sommes qu’ils auraient reçues si ce programme s’était poursuivi pendant une cinquième et dernière année, conformément à ce qui était prévu au départ.)

Lors de l’annonce du PARPC, le ministre des Pêches a déclaré que les stocks de poisson de fond de l'Atlantique pourraient mettre de nombreuses années - peut-être des décennies - à se reconstituer et que même alors le secteur ne pourra soutenir le même nombre de pêcheurs et de travailleurs des usines de transformation. Il a admis que la restructuration de ce secteur sera difficile, mais que les options étaient claires : « ou bien nous avons des pêches durables, ou bien nous n'en avons pas du tout. ». Il a aussi informé les pêcheurs de morue que c’était leur dernière chance de quitter le secteur de la pêche de la morue avec l’aide du gouvernement.

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Optimisme prudent de 1999 à 2001

Bien qu’une attitude mettant de l’avant la conservation ait prévalu de 1999 à 2001, le rapport du CCRH indiquant une légère amélioration de l’état de certains stocks de morue. Ayant recommandé pour 1999 la réouverture restreinte des pêches commerciales dirigées dans 2J3KL, 3Pn4RS et 4TVn, le MPO a fixé un TAC combiné de 20 000 t pour ces trois pêcheries en 2000; il a aussi porté le TAC pour 3Ps à 30 000 t en 1999, puis l’a ramené à 20 000 t en 2000 et à 15 000 en 2001 et 2002.

Dans la logique des réouvertures restreintes de la pêche, des mesures de gestion rigoureuses, y compris la surveillance à quai et en mer, des restrictions sur les engins et le contrôle des prises, ont été appliquées dans toutes les pêches du poisson de fond de l’Atlantique de 1999 à 2001. Les relevés par pêche sentinelle ont continué d’être une source de renseignements précieux sur les effectifs des stocks. Une surveillance plus étroite de la pêche récréative et de la pêche de subsistance (permis, étiquettes et journaux de bord) a permis de contrôler les prises et d’estimer les volumes de morue pris chaque année par ces secteurs.

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Une pêche transformée

Entre 1992 et 2001, le gouvernement du Canada a dépensé 3,9 milliards de dollars pour le soutien du revenu, des mesures d’adaptation de l’industrie et des programmes d’aide au développement économique pour l’industrie de la pêche de l’Atlantique. Au total, 1 769 pêcheurs ont choisi de prendre une retraite anticipée pendant cette période, et 3 686 permis ont été rachetés par l’entremise des quatre programmes d’aide économique entrepris dans les années 1990.

Le Canada atlantique comptait 17 200 titulaires de permis de pêche du poisson de fond en 1992 et 10 372 en 2002, soit une baisse d’environ 35 %. De fait, des 6 380 titulaires de permis de pêche du poisson de fond autorisés à pêcher la morue dans 2J3KL, 3Pn4RS et 4TVn en 2000, seuls 3 882 en ont pêché, et la plupart en petites quantités. Près de la moitié de ces titulaires ne dépendaient de la morue que dans une proportion de moins de 10 % de leur revenu de pêche total. Les 288 titulaires de permis (7 %) dont le revenu de pêche dépendait entièrement de la morue ont gagné moins de 10 000 $.

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Faits nouveaux

En avril 2002, le CCRH a présenté au ministre des Pêches (Robert Thibault) un rapport révélant que les stocks de poisson de fond du golfe du Saint-Laurent, y compris la morue, n’avaient vraiment pas montré des signes de rétablissement. Les rapports sur l’état des stocks de morue de 3Pn4RS et 4TVn révélaient que l’on s’attendait peu ou pas à une croissance des effectifs à court terme.

Bien qu’il ait accepté la recommandation du CCRH à l’effet de maintenir les niveaux existants des TAC aux niveaux pour 2002, le Ministre a prévenu l’industrie, le 17 juin 2002, qu’« il faudra apporter de fortes réductions à moins que nous puissions vérifier un renversement de cette situation de déclin des stocks et des signes concrets de leur rétablissement ». Il a aussi encouragé les représentants de l’industrie à unir leurs efforts à ceux du MPO afin d’établir une stratégie pluriannuelle de reconstitution des stocks de poisson de fond.

Pendant tout l’automne 2002, les rumeurs publiques couraient à l’effet que la pêche à la morue dans 2J3KL, 3Pn4RS et 4TVn serait totalement interdite. Dès novembre 2002, le ministre a informé ses collègues du caucus fédéral que les stocks de morue de la côte atlantique étaient en tel mauvais état qu’il devrait peut-être fermer les pêcheries pendant une période indéterminée.

En février 2003, les scientifiques du MPO, les gestionnaires des pêches, les représentants de l’industrie ainsi que des professeurs d’universités canadiens et du monde entier ont participé à un processus d’évaluation zonale (PEZ) afin d’examiner l’évaluation scientifique faite par le MPO des stocks de morue de l’ Atlantique8. Grâce au PEZ, une évaluation formelle par les pairs a été faite des recherches menées par le Secteur des Sciences du MPO sur les stocks de morue et leurs écosystèmes et des relevés recueillis au moyen du programme de pêche sentinelle et indicatrice du poisson de fond. À la fin du processus, des rapports sur l’état des stocks ont été établis pour chacun des stocks évalués, et envoyés au CCRH pour étude et consultations auprès des intervenants de l’industrie et des collectivités.

Le 24 mars 2003, dans le rapport qu’il a présenté au ministre, le CCRH indiquait que la légère amélioration de l’état des stocks à la fin des années 1990 et l’optimisme prudent qu’elle suscitait avaient fait marche arrière. Il a aussi signalé que les effectifs des stocks avaient atteint un creux historique et ne montraient aucun signe de rétablissement prochain bien qu’il continuait de recommander la pêche. Le comité multipartite de Terre-Neuve-et-Labrador et le groupe Le groupe de défense des intérêts du Québec ont aussi fait parvenir des rapports au ministre au sujet de l’avenir de la pêche. Les renseignements et les recommandations qui y étaient présentées ainsi que l’analyse du MPO, ont été étudiés soigneusement avant de prendre la décision de fermer la pêche à la morue.

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Fermeture de la pêche à la morue en 2003

Le 24 avril 2003, le ministre des Pêches et des Océans a annoncé la fermeture de la pêche à la morue dans 2J3KL, 3Pn4RS et 4TVn. En même temps, le Ministre et ses collègues de l’APECA et de DEC-Québec ont également exposé un plan d’action en quatre volets de 50 millions de dollars pour aider les personnes et les collectivités les plus touchées par la fermeture de ces pêches et pour accroître la recherche scientifique afin de déterminer les causes du sérieux déclin de ces stocks. Le plan prévoyait :

  • une aide au développement économique des collectivités, soit un investissement de 44 millions de dollars sur deux ans par l’entremise de l’APECA et de DEC-Québec afin de fournir de l’aide en vue de la création d’emplois à court terme;
  • une amélioration de la viabilité des économies locales;
  • des mesures de conservation, y compris la création de zones d’exclusion des phoques et de zones sans chalutage, la fermeture de la pêche récréative de la morue dans le golfe du Saint-Laurent et au nord-est de Terre-Neuve-et-Labrador, et, pour les trois années suivantes, une réduction de 40 % du TAC de capelan;
  • des recherches scientifiques - un programme de 6 millions de dollars échelonné sur deux ans afin de poursuivre les activités courantes visant à évaluer l’impact des phoques sur les stocks de poisson.

De l’aide financière temporaire a également été mise à la disposition des pêcheurs et des travailleurs d’usine affectés par les fermetures, en plus des projets de création d’emplois à court terme mis en place grâce aux 27 millions de dollars investis dans le Programme temporaire de revenu dans les pêches qui a été annoncé par le ministre du Développement des Ressources humaines le 3 juin 2003.

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Lectures suggérées et sites Web

Groupe d'étude sur les revenus et l'adaptation des pêches de l'Atlantique. Changement de cap : les pêches de l’avenir. Ministre des Approvisionnements et des Services Canada. Ottawa, 1993.

Palmer, Craig and Peter Sinclair. When the Fish are Gone: Ecological Disaster and Fishers in Northwest Newfoundland. Fernwood Publishing. Halifax, 1997.

Plan de gestion intégrée des pêches pour 1999 – Poisson de fond de l’Atlantique. Direction générale des Communications, Ottawa,1999. (révisé tous les ans)

Sites Web

Le monde sous-marin – La morue de l’Atlantique

Pêches et Océans Canada – Salle Médias


1.  Statistiques de Pêches et Océans Canada citées dans Palmer, Craig et Peter Sinclair. When the Fish Are Gone. Ecological Disaster and Fishers in Northwest Newfoundland. Fernwood Publishing. Halifax, 1997: page 33. [ retour ]
2.  Palmer et Sinclair, page 37. [ retour ]
3. 3Pn4RS, 4TVn(J-A), 4VsW et 3Ps. [ retour ]
4.  3Ps, 4VsW, 4TVn (J-A),  4Vn(M-D). [ retour ]
5.  3Pn4RS et 4X. [ retour ]
6.  Rapport publié par le ministre des Approvisionnements et Services Canada, Ottawa, 1993. [ retour ]
7.  2GH, 2J3KL, 3Pn4RS, 4TVn et 4VsW. [ retour ]
8.  2J3KL, 3Pn4RS, 4TVn, 4X et 4VsW. [ retour ]


   

Dernière mise à jour : 2007-05-23

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