Rapport de John F. Caddy: L'état des connaissances sur la ressource
homard dans la baie Miramichi
L'état des connaissances sur la ressource homard dans la baie Miramichi et
dans les eaux adjacentes; suggestions concernant le règlement du conflit au
sujet des saisons de pêche et pistes de recherche visant à faciliter la gestion
du homard
J.F. Caddy Ph.D.
Chercheur universitaire, T.H. Huxley School of Environment,
Earth Sciences and Engineering, université de Londres, Angleterre
Adresse postale : Via Cervialto 3,
Aprilia 04011, Latina, Italie
«Ô Grand Esprit
Dont les vents m'apportent la voix,
Et dont le souffle donne vie au monde entier,
Écoute-moi, je suis jeune, petit et si faible
Et j'ai besoin de ta force et de ta sagesse»
(Extrait d'une prière indienne)
TABLE DES MATIÈRES
La présente partie du rapport forme un tout; il renferme des suggestions sur
le règlement du différend qui s'appliquent à la situation telle qu'elle se
présente en 2001 et qui ne sont pas dans le rapport comme tel.
A/ La population de homards qui est exploitée pendant la pêche d'automne et
la pêche du printemps suivant est la même.
On s'appuie sur les divers aspects de la biologie et de la dynamique du
homard décrits dans des publications et sur diverses données pertinentes pour
prédire les conséquences d'une saison de pêche d'automne dans la baie Miramichi.
Dans le cadre de cette analyse, on accepte les estimations actuelles concernant
le degré d'exploitation de l'espèce au cours de la pêche de printemps, qui
compte pour 75 à 85 p. 100 des captures et des taux de mortalité annuels
correspondants, et on s'interroge sur les conséquences de l'ouverture d'une
saison d'automne où le même stock serait exploité, dans le même secteur. Le
contexte est qu'en raison de la mue d'été au cours de laquelle les homards
atteignent la taille légale, une forte proportion de homards accèdent à la pêche
d'automne, ce qui fait, par conséquent, de la pêche d'automne une pêche
d'interception avant la pêche de printemps. La pêche de printemps est tributaire
des mêmes homards qui sont de nouvelles recrues et ont échappé à la pêche
d'automne l'année précédente. En cas de pêche d'automne intensive, les
survivants accédant à la pêche du printemps suivant seront peu nombreux et les
prises de printemps diminueront. Des signes de prises insuffisantes au printemps
par les pêcheurs non autochtones se sont déjà manifestés au printemps de cette
année. La situation ailleurs et quelques calculs élémentaires indiquent que si
la pêche d'automne n'est pas réglementée, toute la récolte se fera à l'automne,
du fait que les pêcheurs ne pourront plus être concurrentiels pendant la saison
de printemps. Cette tendance est confirmée par des données en provenance des
États-Unis où il n'y a pas de période pendant laquelle la pêche au homard est
interdite et où la majeure partie des débarquements ont lieu en été et en
automne.
On a décidé de fixer la saison au printemps parce que les homards capturés au
cours de cette période sont en meilleure condition et se vendent à un prix plus
élevé. C'est aussi une période de l'année où aucune autre activité de pêche
n'est praticable alors que la pêche du homard en automne chevauche les pêches du
crabe, du hareng et la pêche au chalut qui se pratiquent l'été et l'automne,
avec la possibilité de conflits d'engins et d'une interruption des activités
pour une pêche axée sur plusieurs espèces. La principale raison demeure que la
pêche d'automne est d'une telle efficacité qu'elle risque d'entraîner une
surpêche et une diminution des stocks.
B/ Les taux de capture et l'efficacité des casiers sont supérieurs en
automne
Diverses études scientifiques confirmées par les observations du MPO
signalent que les taux de capture de homards sont beaucoup plus élevés au cours
de la pêche du début d'automne qu'au cours de celle de printemps. C'est un
phénomène qui est connu et étudié depuis longtemps; plusieurs études
scientifiques en expliquent d'ailleurs les raisons. Les homards se meuvent plus
rapidement l'automne et sont plus attirés vers les casiers appâtés par temps
chaud. En outre, leur population est plus dense dans la baie Miramichi au début
de l'automne qu'au printemps, étant donné qu'à cette dernière saison, ils sont
plus dispersés et se trouvent plus au large, en eau froide. Par ailleurs, les
homards s'alimentent activement en été et en automne, après la mue.
D'après les estimations, le ratio de vulnérabilité à la capture ou «
potentiel de capture » est de 2,5 à 9 fois plus élevé à l'automne qu'au
printemps; il est en fait de 5 à 6 fois plus élevé, selon l'estimation la plus
acceptée. Cette augmentation du potentiel de capture est attribuable à une
activité accrue à des températures plus élevées, à la nécessité de s'alimenter
pour reconstituer les réserves dans lesquelles les homards ont puisé pendant la
mue et la ponte ainsi qu'à une plus forte densité de population dans les zones
côtières en automne.
Si l'on tient compte de cette vulnérabilité accrue à la capture, un nombre
déterminé de casiers permet de capturer le même nombre de homards en automne
qu'un nombre beaucoup plus élevé de casiers placés au printemps. On propose
d'autoriser la pose de 5 600 casiers en automne 2001 dans le plan de gestion du
homard de Burnt Church. Dans les zones statistiques 70, 71 et 73, ce nombre de
casiers aurait une capacité de capture équivalant à un pourcentage important du
nombre total de casiers (60 000) placés par tous les pêcheurs titulaires d'un
permis de pêche de printemps. Compte tenu des considérations exposées aux points
1 et 2, une forte diminution des prises pour le printemps suivant serait à
prévoir si la pêche d'automne était autorisée dans ces trois zones statistiques.
En fait, la pêche dans le secteur de Burnt Church n'a pas eu lieu dans toutes
les zones de la baie et par conséquent les incidences seraient jusqu'à présent
moins fortes que celles qui sont indiquées au point 7. On estime qu'entre un
tiers et un quart des homards pénétrant dans les eaux côtières sont dans les
zones où le MPO a permis aux pêcheurs de Burnt Church de pêcher. Le calcul du
pourcentage du stock qui pénétrera dans le triangle où ont pêché les pêcheurs de
Burnt Church est une priorité pour la prochaine saison d'automne, étant donné
qu'il permet d'établir l'incidence de la pêche d'automne sur la pêche du
printemps suivant. En se basant sur l'hypothèse qu'un tiers ou un quart du stock
dans les zones 70, 71 et 73 pénétrera dans la zone où ont pêché les pêcheurs de
Burnt Church, on estime que la diminution des prises au cours du printemps
suivant sera de 30 à 33 p. 100 et de 22 à 25 p. 100 respectivement (voir tableau
ci-après).
Si tout le stock des zones 70, 71 et 73 a émigré dans le triangle où ont
pêché les pêcheurs de Burnt Church à l'automne 2000 (fig. 6B), étant donné que
le potentiel de capture est environ 5 ou 6 fois plus élevé d'après les relevés
au casier faits par le MPO en automne et d'après les données biologiques, les
conséquences de cette pêche équivaudraient pratiquement à une fermeture complète
de la pêche le printemps suivant. Il semble évident que les 300 casiers par
permis autorisés par le MPO devaient être placés au printemps. Si le nombre de
permis attribués aux pêcheurs de Burnt Church avait une incidence par rapport à
la pêche de printemps, le nombre équivalent de casiers par permis pour la pêche
d'automne serait beaucoup moins élevé, soit de 50 à 60 casiers par permis, pour
un coefficient du potentiel de capture (q) de 6 :1 à 5 :1.
Pour 13 permis, il faudrait un total de 650 à 780 casiers pour obtenir le
même résultat au printemps.
Comme on peut le constater, l'incidence de la pêche d'automne dépend
principalement du degré de chevauchement spatial de la pêche avec la migration
des homards vers les eaux côtières en été, qui n'est pas connu. Elle ne dépend
pas principalement du coefficient du potentiel de capture qui ne concerne que
les homards pêchés dans le triangle en question. D'après les données disponibles,
< 34 % des fonds favorables au homard de la baie se trouvent dans le triangle où
ont pêché les pêcheurs de Burnt Church en l'an 2000 dans lequel sont incluses
quelques zones très productives comme le fer à cheval. Force m'est de conclure
que le déficit net au printemps ne sera probablement pas inférieur à 25 %.
C/ La protection des femelles oeuvées est essentielle pour le renouvellement
de la population
J'estime que l'accent placé actuellement sur la protection des géniteurs et
que l'idée de viser une certaine production d'oeufs que met de l'avant le Conseil
pour la conservation des ressources halieutiques (CCRH) sont justifiés. Il y a
cependant matière à pousser la réflexion plus loin en ce qui concerne une
question capitale : devrait-on pêcher des femelles matures après la première
ponte ou faudrait-il plutôt préserver la petite population de homards de grosse
taille qui échappent à la pêche? La deuxième option semble préférable et des
mesures telles que fermer des zones, tailler une encoche dans la queue des
femelles oeuvées ou faire un règlement interdisant une ouverture de plus de 5 po
à 5 ½ po de diamètre dans les casiers pour protéger les gros spécimens, semblent
être adéquates. Les raisons justifiant de telles mesures sont la viabilité
accrue et le nombre élevé des oeufs produits par les gros homards mais aussi leur
prix moins élevé à la livre et les difficultés de vendre les homards « de
premier choix » à des prix supérieurs au prix courant. Je crois que les pêcheurs
devraient s'efforcer de maintenir cette précieuse « marge de sécurité » pour une
pêche où les limites de prises et d'effort de pêche ne sont pas vérifiées de
façon très stricte. Quoi qu'il en soit, une telle décision devrait être fondée
sur une analyse bioéconomique et ne devrait pas être uniquement motivée par un
souci de maximisation du tonnage.
En ce qui concerne les femelles matures non oeuvées (sans oeufs),
l'accouplement ou la ponte se produisent en alternance une année sur deux; les
femelles deviennent « oeuvées » et fixent les oeufs sous leur queue. Les oeufs
peuvent être pondus et fertilisés par du sperme emmagasiné depuis le dernier
accouplement, qui peut remonter à un an, et ils sont fixés à la queue par une
sorte de colle. Le sperme a été stocké par la femelle en paquets ou
spermatophores et peut dater de l'année précédente. Les femelles sans oeufs qui
ont été fertilisées ne présentent aucun signe extérieur distinctif et par
conséquent ces futures mères sont vulnérables à la capture pendant toute l'année
qui précède la ponte, jusqu'à ce que les oeufs soient fixés sous la queue, ce qui
leur donne le statut de femelles matures protégées qui doivent être remises à
l'eau.
Par conséquent, même si les femelles oeuvées sont remises à l'eau, pendant une
période qui couvre généralement une saison après la fécondation, les risques de
capture des femelles non oeuvées avant la ponte sont de 75 p. 100. C'est la
raison pour laquelle on pratique une encoche dans la queue de 50 p. 100 des
femelles oeuvées, qui est une mesure de gestion à participation volontaire. Les
grosses femelles de taille marchande qui ont une encoche à la queue sont
généralement fécondes, même si elles n'ont pas d'oeufs et elles doivent être
remises à l'eau. Cette mesure tient compte de la production beaucoup plus élevée
d'oeufs par les grosses femelles et de la viabilité accrue de leurs oeufs.
D/ Les homards migrent vers les eaux côtières à la fin du printemps et en
été, et vers le large en automne
Étant donné que la majeure partie de la recherche sur le homard faite par le
MPO devait être effectuée pendant la saison de pêche pour éviter les plaintes
des pêcheurs, on possède peu de renseignements sur la biologie du homard en été
et en automne, notamment en ce qui concerne le cycle de vie et les migrations.
Les études classiques axées sur le marquage au cours d'une saison et la capture
des sujets marqués au cours de la période correspondante de l'année suivante
indiquaient des déplacements restreints (d'environ 7 milles) d'une année à
l'autre.
Les pêcheurs savent que les homards parcourent de plus longues distances que
cela lorsqu'ils migrent des eaux côtières vers le large parce qu'ils suivent les
pointes d'abondance dans les eaux côtières pendant la saison. En fait, les
homards s'installent dans les eaux côtières au printemps afin de profiter de la
température plus élevée de l'eau grâce à sa faible profondeur pour accélérer le
développement des oeufs, puis se dirigent vers le large à l'approche de l'hiver.
C'est important étant donné que diverses études indiquent que dans les
populations qui sont à proximité de leurs limites nordiques (comme dans le golfe
du Saint-Laurent), les larves écloses précocement ont les meilleures chances
d'avoir un long cycle de vie planctonique. Le présent rapport renferme des
suggestions de recherche sur divers aspects de cette question.
E/ Les homards sont dans les eaux côtières en été pour muer, s'accoupler et
libérer leurs larves écloses dans le plancton
Les baies et autres zones littorales sont généralement des points de
rassemblement pour les femelles matures et la baie Miramichi semble être une
zone importante pour muer, s'accoupler et libérer les larves. D'autres études
par marquage en automne, financées par le MPO, s'imposent pour obtenir des
renseignements plus précis à ce sujet et il est recommandé que ces activités sur
le terrain soient effectuées par la nation de Burnt Church aux termes d'une
entente contractuelle, avec un certain soutien technique. J'estime cependant
pour le moment qu'il y a de fortes probabilités que la baie soit un lieu de
rassemblement pour les homards qui sont normalement dans les zones situées à
l'extérieur de la baie en hiver et au printemps.
D'après ce que les pêcheurs commerciaux interviewés m'ont dit, la pêche
d'automne à d'autres fins que pour répondre aux besoins restreints liés à la
subsistance et aux activités rituelles engendrera d'autres tensions sociales
avec les pêcheurs commerciaux non autochtones. Ces derniers ont fait depuis
longtemps des investissements dans cette pêche et l'ont développée en acceptant
des règlements plus stricts.
À mon avis, il serait souhaitable de retarder la saison d'automne de deux
semaines pour réduire l'incidence de l'abondance des prises durant la période la
plus chaude de l'automne, étant donné que les températures sont susceptibles de
baisser en septembre, ce qui atténuerait beaucoup l'impact de la pêche durant
cette période.
F/ Motifs invoqués pour justifier une pêche d'automne
À l'heure actuelle, les motifs invoqués par Burnt Church pour justifier la
pêche d'automne sont l'absence des pêcheurs non autochtones, le besoin d'emplois
l'été et les taux de capture élevés à proximité des côtes en automne. La pêche
d'automne ne nécessite pas l'utilisation de gros bateaux, actuellement non
accessibles aux membres de la nation de Burnt Church. Un nombre important de
résidents de Burnt Church vit de l'aide sociale, en raison des possibilités
restreintes d'emplois locaux. Ils sont en mesure de participer à la pêche en
automne seulement ou de faire poser le nombre de casiers attribués à l'ensemble
des membres de la bande par des pêcheurs équipés des bateaux nécessaires, pour
qu'ils pêchent pour eux.
G/ Y a-t-il de bonnes raisons pour qu'une entente soit conclue entre la
bande de Burnt Church et le MPO?
La conclusion d'une entente de pêche avec le MPO a été rejetée jusqu'à
présent par la nation de Burnt Church mais d'après les accords qui ont été
signés par le MPO avec d'autres Premières nations, une telle entente serait
accompagnée de fonds importants pour la création de possibilités d'emplois pour
les membres de la bande qui sont défavorisés et pour l'achat de permis de pêche
additionnels. La contrepartie mentionnée par le MPO serait l'obligation de
remplacer les permis de pêche d'automne par des permis de pêche de printemps et
la limitation progressive de la pêche d'automne à des fins de subsistance et des
fins rituelles, étalée sur une période de trois ans, par exemple. D'autres
permis de pêche seraient également accordés si des membres de la bande de Burnt
Church acceptaient de concentrer leurs activités de pêche au printemps et
d'adapter leur plan de pêche de façon à le rendre compatible avec ceux des
autres intervenants dans la pêche de printemps, qui sont assujettis aux
règlements du MPO. À l'exception de la question de la pêche d'automne, le plan
actuel de Burnt Church contient des dispositions très semblables à celles des
plans du MPO, ce qui simplifie l'harmonisation d'autres dispositions.
Tout type de gestion de la pêche doit absolument reposer sur des données
fiables. Pour le moment, les seules données fiables sont obtenues par pêche
sentinelle. Il faut poursuivre ces activités mais des données précises sur les
prises, sur leur composition biologique selon la taille et sur le nombre de
casiers ainsi que sur l'identité des pêcheurs et la période où la pêche a été
pratiquée sont absolument essentielles pour protéger la ressource d'une surpêche
accidentelle, même si l'interprétation des données peut être faite de façon
indépendante. Les pêcheurs de la nation de Burnt Church et les pêcheurs non
autochtones ne fournissent pas les données sur les prises ni les données
biologiques nécessaires pour assurer la protection de la ressource.
H/ Racines historiques de la pêche au homard par les membres de la bande de
Burnt Church
Les Mi'kmaqs pratiquent probablement une pêche de subsistance du homard dans
les eaux côtières depuis des millénaires, mais en ce qui concerne la pêche
commerciale moderne avec des casiers, on a signalé qu'une quarantaine de membres
de la bande de Burnt Church pêchaient le homard à temps partiel avant la
limitation du nombre de permis instaurée dans les années 60 et que ces pêcheurs
ne voyaient pas pourquoi ils devaient acheter des permis alors que la pêche
était limitée. Plus tard, les permis ont été rattachés aux bateaux plutôt qu'aux
titulaires. En fait, les conditions de prêt imposées à cette époque au
Nouveau-Brunswick n'encourageaient pas les Autochtones à demander des prêts pour
l'achat d'un bateau ou d'un permis. Si le nombre total de permis de pêche de
printemps au homard pour la bande de Burnt Church approchait la quarantaine,
cela procurerait de l'emploi à quelque 120 personnes dans le secteur de la pêche
du homard, sans compter les emplois liés à l'entretien des bateaux et à la
fabrication des casiers.
I/ Les aspects territoriaux sont plus marqués dans la pêche au homard que
dans les pêches hauturières
La pêche du homard diffère des autres pêches plus mobiles par son caractère
territorial plus prononcé en raison des TURF (droits territoriaux d'exploitation
par les pêcheurs) s'appliquant officiellement ou officieusement dans la plupart
des pêches côtières de homard. En raison de ces droits, les casiers placés dans
les zones de pêche habituelles d'autres pêcheurs sont une source potentielle de
conflits. Par conséquent, il est important que l'harmonisation des activités de
pêche ne se fasse pas uniquement entre la nation de Burnt Church et le MPO mais
aussi avec le concours des collectivités de pêcheurs voisines.
J/ L'optique des pêcheurs non autochtones
Les pêcheurs non autochtones sont fermement convaincus qu'il ne devrait y
avoir qu'une saison, étant donné que les problèmes de conformité aux règlements
doivent être relativement sous contrôle pour tous les participants et que,
d'après eux, il ne serait pas possible d'y arriver pour une pêche d'automne, à
moins que le MPO n'assure une surveillance active des prises. J'estime qu'il
faudrait opter pour une seule saison de pêche parce qu'on n'est, à ma
connaissance, jamais parvenu, dans quelque pays que ce soit, à réglementer de
façon efficace deux saisons par an à cause des nombreuses difficultés
logistiques que cela pose. Cependant, si l'on accepte le point de vue des deux
parties, il serait peut-être possible d'instaurer deux saisons, mais à la seule
condition d'assurer une surveillance étroite et que ce soit en vertu d'un
système d'attribution des prises par saison, ou par pêcheur, surveillé de près.
Au cours des entretiens que j'ai eus avec des pêcheurs commerciaux des
collectivités voisines de Burnt Church, ceux-ci m'ont dit qu'ils seraient
disposés à accepter sans aucune friction la présence des pêcheurs autochtones
dans les lieux de pêche de printemps. Ils ont dit qu'ils seraient même disposés
à s'éloigner davantage des champs de pêche côtiers les plus productifs pour
permettre aux détenteurs de permis de Burnt Church de pêcher plus près des côtes
au printemps. Ils s'opposent toutefois vigoureusement à ce que l'on délimite des
zones de pêche exclusives pour le printemps et à ce que la bande de Burnt Church
ait un accès exclusif à la baie Miramichi, ajoutant que la plupart d'entre eux
avaient évité d'y pêcher au cours des dernières années.
Ils ont toutefois dit que s'il y avait à nouveau une saison d'automne cette
année, et que si le MPO n'intervenait pas, ils seraient obligés de pêcher
pendant la même saison dans la même zone, par réaction d'autodéfense, même s'ils
savent que cela aurait probablement des conséquences très néfastes sur le stock
local de homard. Ils estiment en effet, à juste titre il me semble, qu'une pêche
d'automne excessive et non contrôlée compromettrait leurs moyens de subsistance
et anéantirait leurs efforts de conservation.
K/ Conséquences probables du maintien du statu quo dans le conflit actuel
Si la pêche locale de printemps était remplacée par une pêche d'automne sans
réglementation du nombre de casiers, on pourrait s'attendre à ce que les
rendements de cette pêche diminuent considérablement et à ce que seuls les
pêcheurs les plus habiles en tirent un revenu raisonnable. Pour amorcer une
reconstitution progressive du stock, il est absolument indispensable de diminuer
le niveau de la pêche et d'harmoniser les plans de pêche.
Les pêcheurs non autochtones m'ont assuré qu'ils participeraient également à
la pêche d'automne dans la baie si les membres de la nation de Burnt Church y
posaient un nombre important de casiers à l'automne 2001.
Dans ces circonstances, le MPO serait obligé de prendre des mesures de
gestion, étant donné la responsabilité de garantir la conservation qui lui
incombe à la suite du jugement rendu par la Cour suprême dans l'affaire
Marshall. Sans contrôle de gestion, la conservation serait fort compromise.
L/ Quelques options pour un règlement du conflit
Pour être complet, on a mentionné qu'une possibilité est que le MPO rachète
les permis de pêche et les engins à un prix équitable aux pêcheurs commerciaux
qui veulent cesser de pêcher. Cette option n'est pas écartée, mais elle ne sera
pas examinée dans d'autres parties du présent rapport étant donné qu'il faudrait
probablement qu'elle soit financée par des fonds fournis dans le cadre d'une
entente avec la nation de Burnt Church.
Une possibilité pour la nation de Burnt Church est d'accepter de conclure une
entente avec le MPO en vertu duquel je suppose qu'on lui attribuerait des permis
de pêche additionnels pour le printemps uniquement. Dans ce cas, je présume que
ces permis supplémentaires ne seraient pas exploités, que les bateaux
nécessaires ne seraient pas fournis et que les membres d'équipage ne recevraient
pas de formation avant la date proposée pour la saison d'automne pour Burnt
Church pour l'année 2001. Si les membres de la nation de Burnt Church
concluaient une entente avec le MPO, ils devraient limiter le nombre de casiers
posés au cours de la saison d'automne 2001, car celui-ci serait réduit
progressivement au nombre nécessaire aux fins de subsistance et aux fins
rituelles lorsque les nouveaux permis de printemps seraient mis en vigueur.
Je verrais une possibilité en ce qui concerne cette option. Pour passer une
entente satisfaisante pour toutes les parties, il conviendrait d'attribuer à la
nation de Burnt Church une affectation collective que l'on pourrait appeler le
total des prises admissibles (TPA). Logiquement, ce TPA devrait être considéré
comme la moyenne des prises annuelles récentes dans les zones 70, 71 et 73, qui
est de 1 219 tonnes (environ 2,688 millions de livres). Peu importe le
pourcentage de ces 1 219 tonnes attribué à Burnt Church, on pourrait le
considérer comme une part collective de ce stock partagé pour 2001, que la
nation de Burnt Church pourrait répartir comme elle l'entend entre ses divers
membres.
M/ Qu'adviendrait-il s'il n'y avait pas d'entente de pêche avec le MPO?
Par contre, si la nation de Burnt Church rejetait la possibilité de passer un
accord avec le MPO et comptait continuer à agir comme elle l'a fait en l'an
2000, année au cours de laquelle elle a posé plus de 2 000 casiers, le MPO
serait confronté à un dilemme difficile à régler s'il veut éviter que les
pêcheurs non autochtones ripostent et que la pêche du homard s'effondre. Après
avoir dit qu'il retarderait tout effort de pêche jusqu'à ce qu'une entente
puisse être conclue entre les parties et jusqu'à ce que celles-ci aient adopté
une approche commune en ce qui concerne la conservation du stock qu'elles
partagent, le MPO signale qu'il serait peut-être obligé d'imposer un système de
contingentement avec le même TPA que plus haut et qu'il devrait prendre une
décision en ce qui concerne les prises attribuées. Tout cela, à supposer que les
pêcheurs de Burnt Church et les pêcheurs commerciaux non autochtones aient
l'intention de pêcher pendant les deux saisons.
Si le MPO optait pour un système de quotas par souci d'équité lorsque deux
saisons de pêche sont autorisées au cours de la même année, les zones 70, 71 et
73 deviendraient probablement un secteur de gestion d'urgence du homard pour une
période d'une durée indéterminée quoique idéalement restreinte. Sous un tel
régime, il semble logique que les prises puissent être faites par toutes les
parties durant la saison de printemps ou la saison d'automne en attendant qu'une
entente soit conclue. Toutes les prises faites par les pêcheurs des deux parties
devraient être enregistrées au débarquement. Elles devraient être retranchées de
la part collective en ce qui concerne les Autochtones, probablement en fonction
des permis de pêche commerciale et du nombre de casiers attribués actuellement,
en proportion du nombre total de permis de pêche commerciale au homard accordés
dans ces zones statistiques.
Les prises par les pêcheurs non autochtones seraient déduites du quota
individuel par bateau dans le cas des pêcheurs commerciaux; on pourrait faire le
calcul en divisant le TPA restant après en avoir retranché la part de la nation
de Burnt Church, par le nombre de permis décernés aux non Autochtones. Les
prises totales ne devraient pas dépasser le TPA mentionné plus haut.
Un tel système de gestion d'urgence serait insatisfaisant pour toutes les
parties, mais on ne sait pas quelles autres options garantiraient la
conservation dans ces circonstances. Ce régime de gestion d'urgence pourrait
ressembler au système antérieur, sans les contingents, au cas où l'on pourrait
s'entendre sur une pêche de printemps avec l'entière participation des pêcheurs
de la nation de Burnt Church, dans le cadre d'un accord de pêche harmonisé en
vertu duquel les prises d'automne pourraient être réduites progressivement sur
une période de quelques années au niveau requis pour satisfaire aux besoins
internes de la nation de Burnt Church
N/ Amélioration de la gestion de la pêche du homard et besoins en matière de
recherche
Bien que les pêcheurs non autochtones ne manifestent aucun désir de discuter
de nouveaux règlements tant que le conflit actuel ne sera pas réglé, ils sont
disposés à examiner plus tard les conséquences des diverses options proposées
dans le présent rapport. Celles-ci comprennent des études sur des récifs
artificiels, des secteurs fermés à la pêche, une limitation du diamètre des
ouvertures des casiers et des mesures éventuelles de mise en valeur du homard.
La nation de Burnt Church est également fort intéressée par de la recherche
sur le homard et diverses procédures expérimentales qui fourniront de l'emploi à
plusieurs membres de la bande évincés de la pêche sont mentionnées. Le MPO a
indiqué que si la pêche d'automne est soumise à une réglementation, il sera
peut-être disposé à acheter un certain nombre de homards capturés pendant cette
saison pour les marquer et les relâcher après avoir recueilli des données
biologiques, pour voir où ils seront capturés à nouveau au printemps. On pourra
également engager certains des plongeurs chevronnés de la bande pour faire des
observations sous l'eau et faire des études du rendement des casiers, ainsi que
pour faire des relevés des juvéniles.
O/ Aménagement d'un centre de recherche à Burnt Church dans le cadre d'une
entente sur les pêches
On recommande de construire, dans le cadre d'une entente globale sur les
pêches avec le MPO, un petit aquarium public et un centre de recherche sur le
terrain afin de profiter de l'accès au homard pour faire des études au cours des
mois d'été. Ces activités généreraient également des emplois pour des membres de
la bande de Burnt Church et constitueraient un attrait touristique local. Les
touristes pourraient observer divers aspects de la biologie du homard dans
l'aquarium et aller ensuite observer la remontée des casiers à l'extérieur. Ce
type d'activité pourrait être combiné avec l'exploitation d'un kiosque de vente
d'objets d'artisanat local, un petit casse-croûte et des expositions sur la
culture micmaque, des spectacles de danse ou de tambourinage.
Ce centre de recherche pourrait également servir de quartier général d'une
petite réserve écologique destinée à préserver les milieux estuariens de
Miramichi, ce qui nécessiterait le recrutement de gardes parmi des membres de la
bande qui recevraient dès lors une formation spéciale. En ce qui concerne
l'établissement de cette installation, on pourrait demander de l'aide aux
universités des Maritimes et d'autres régions du pays ainsi qu'à des ONG.
J'ai communiqué avec le Laboratoire maritime Huntsman de St. Andrews qui
comprend une vaste installation de recherche et un grand aquarium. La lettre que
m'a envoyée le conservateur indique que cet établissement a préparé des cours
analogues en biologie marine pour les Autochtones et que l'on pourrait préparer
des cours de ce genre pour faciliter la formation. Des cours de biologie marine
pour les jeunes membres des collectivités des Premières nations et pour les
enfants des pêcheurs de homard locaux, organisés dans le but de promouvoir
l'harmonie sociale, contribueraient à donner un sens des responsabilités à
toutes les personnes concernées et les encourageraient à pratiquer la
conservation.
Il conviendrait d'établir un site Web pour la nation de Burnt Church. Ce
serait un avantage pour apprendre ce que d'autres groupes autochtones font pour
améliorer leurs moyens d'existence et pour signaler les nouvelles installations
comme l'aquarium, les visites écologiques et les possibilités de recherche sur
le homard.
Le différend entre la nation de Burnt Church et les pêcheurs commerciaux non
autochtones à propos de la pêche du homard a éclaté peu après le jugement rendu
par la Cour suprême du Canada le 17 septembre 1999, dans le cadre de l'affaire
Marshall. Ce jugement a confirmé la validité des traités qui ont été signés en
1760 et en 1761 avec la Couronne par les collectivités micmaques et malécites.
Les dispositions de ces traités incluent un droit de pratiquer la chasse, la
pêche et la cueillette à des fins de « subsistance convenable », sous réserve de
règlements dans la mesure où des règlements s'imposent :
- pour des motifs de conservation;
- pour d'autres circonstances impérieuses majeures d'intérêt public, par
exemple l'équité économique et régionale ou la reconnaissance de l'importance
historique de la pêche pour les non Autochtones.
(Extrait de la Fiche d'information du gouvernement du
Canada).
La décision ultérieure de la Cour de rejeter la requête de la West Nova
Fishermen's Coalition en vue d'obtenir une nouvelle audition confirme que c'est
là le fondement des règlements concernant les pêches comme la pêche du homard
qui seront dorénavant mis en oeuvre par Pêches et Océans Canada. Les troubles de
septembre et d'octobre 1999, au cours desquels plusieurs membres des deux camps
ont été blessés et des dommages représentant 210 000 $ CAN ont été faits aux
casiers placés par les pêcheurs mi'kmaqs ont créé un climat de crainte et de
colère, et d'agitation publique. Alors que les tensions ont quelque peu diminué,
le problème n'a pas été résolu et l'harmonie sociale entre les collectivités
concernées n'a pas été rétablie complètement. D'après le site Web « Disparities
in Law and Power », après ces troubles, la Cour suprême a fait au sujet des
règlements de pêche des commentaires qui «... semblaient faire pencher la balance
du pouvoir en faveur du gouvernement, au détriment des Autochtones ». Ces
commentaires semblaient donner aux gouvernements fédéral et provinciaux le
pouvoir de «...réglementer l'exercice d'un droit issu d'un traité lorsqu'un tel
règlement s'impose pour des motifs de conservation ou pour d'autres motifs ». En
outre, cet avis incluait le paragraphe suivant :
«... L'objectif prépondérant est la conservation qui relève entièrement de la
responsabilité du ministre compétent et non des utilisateurs autochtones ou non
autochtones de la ressource. Le pouvoir de réglementation s'étend à d'autres
circonstances impérieuses majeures d'intérêt public comprenant par exemple
l'équité économique et régionale et la reconnaissance de l'importance historique
de la pêche pour les non Autochtones et leur participation ».
Le site Web mentionné ci-dessus
(http://www.rism.org/isg/dlp/bc/introduction/index.htm) signale qu'après cette
décision, le MPO a restreint à 600 le nombre de casiers que la nation de Burnt
Church est autorisée à poser et qu'il a commencé à confisquer les casiers
excédant cette limite, mais précise qu'une justification détaillée de cette
limite n'a jamais été fournie par le ministère. Au printemps de l'an 2000, le
MPO a proposé des ententes de pêche prévoyant l'octroi de permis communautaires
aux Premières nations pêchant au Nouveau-Brunswick. De telles ententes ont été
signées par 29 des 34 bandes et ont donné au MPO un pouvoir de réglementation
extérieur aux droits issus de traité « en échange d'espèces, de bateaux,
d'engins et de cours de formation ». On a dit que ces ententes avaient été
jugées insatisfaisantes par le Atlantic Policy Congress of First Nations Chiefs
et aucune entente de ce genre n'a été signée par la nation de Burnt Church qui a
élaboré elle-même une politique et un plan de gestion en matière de pêche. Cette
politique a pour objet de protéger les droits issus de traités, la pêche et
l'écosystème et de garantir des avantages collectifs à tous les membres de la
collectivité. Étant donné que peu de membres de la collectivité avaient ou ont
des bateaux assez gros pour s'aventurer en dehors de la baie, il était
inévitable que ces droits soient principalement exercés l'été, lorsque le homard
se rapproche des côtes et qu'il est facile à capturer.
Le plan fixe la limite à 15 000 casiers pour la pêche de printemps et à 5 600
pour la pêche d'automne, avec l'intention de régler les questions de
conservation mentionnées dans les explications comme suite au jugement Marshall.
Le MPO n'a pas reconnu le plan de gestion du homard de la nation de Burnt Church
ni les étiquettes de casiers distribuées par Burnt Church en application de ce
plan. L'arrestation de pêcheurs autochtones et la confiscation de leurs engins
sont survenues au cours de la pêche d'automne de l'année dernière; des coups de
feu ont été tirés et des membres des deux camps ont subi des blessures
corporelles. Quelques dizaines de millions de dollars ont été dépensés pour la
répression dans une atmosphère digne de celle qui règne dans les états policiers
dans le cadre de certaines opérations. Voici ce qu'on dit dans le dernier
paragraphe du texte concernant cette affaire qui est affiché dans ce site Web :
«... Après la fermeture de la pêche d'automne, c'est-à-dire au mois
d'octobre... le calme le plus complet s'est rétabli mais l'on ne voit aucune
possibilité de règlement du conflit engendré par les disparités causées par les
changements dans l'interprétation de la loi et dans la répartition du pouvoir. »
Bien que les droits issus de traités et que le pouvoir d'attribution du droit
d'accès à la ressource homard soient au coeur de cette crise, les droits
d'exploitation de la ressource homard ne sont pas le seul enjeu. Cette crise a
également des dimensions biologiques dues au cycle de vie du homard d'Amérique
et des dimensions socioéconomiques, dues au fait que la pêche d'automne dans la
baie Miramichi vient de l'exercice, par les membres de la bande, de leurs droits
issus de traités aux termes de la décision Marshall, qui est motivé, en grande
partie, par l'absence d'autres débouchés économiques, alors qu'ils sont, pour la
plupart, des assistés sociaux. On m'a notamment parlé de la nécessité pour
divers membres de la collectivité de placer quelques casiers à partir d'un petit
bateau, au mois d'août, pour gagner de 500 $ à 1 000 $ afin de pouvoir acheter
les vêtements nécessaires à leurs enfants avant la rentrée scolaire. S'il
existait d'autres possibilités d'emploi pendant cette période, plusieurs membres
de la collectivité seraient peut-être disposés à réduire la pression exercée sur
la ressource homard au cours de l'automne. Une de nos suggestions peut s'avérer
utile dans ce contexte, à savoir qu'il serait souhaitable de tenir compte du vif
intérêt des Mi'kmaqs pour la biologie de la ressource. La participation des
Autochtones à la recherche sur le homard procède de ce que l'anthropologue
Fikret Berkes appelle « l'écologie sacrée », qui repose sur les mêmes croyances
que la prière micmaque citée au début du présent document.
En fait, la participation de la nation à des études biologiques sur la
ressource et à l'examen des mesures de mise en valeur du homard dans la baie qui
sont possibles dans le cadre des dispositions d'un plan local de gestion, est
une possibilité qui sera examinée plus loin dans ce rapport.
Une des options examinées par le MPO pour résoudre le problème des incidences
biologiques d'une saison de pêche d'automne et la question plus générale de la
gestion optimale de la population de homards de la baie Miramichi et des eaux
adjacentes a été de chercher un expert indépendant qui ferait une étude dans le
contexte du mandat mentionné à l'annexe I. Voici le rapport qui a été préparé à
l'abri des pressions qui auraient pu être exercées par les diverses parties
concernées.
Du 19 juin au 13 juillet, j'ai rencontré les pêcheurs autochtones et non
autochtones, des représentants du MPO et d'autres experts; j'ai en outre examiné
les données et les études scientifiques disponibles sur la pêche du homard dans
le sud du Golfe et j'ai présenté l'ébauche du présent rapport à la nation de
Burnt Church et au MPO le 12 juillet 2001. Bien entendu, j'ai disposé de trop
peu de temps et de données pour faire une étude approfondie mais j'espère que le
présent document sera suffisamment étoffé pour être le pivot d'un dialogue, même
si la nation micmaque de Burnt Church, les pêcheurs non autochtones ou le MPO
n'approuvent pas toutes les recommandations qu'il contient.
Dans les années 60, le gouvernement fédéral a créé une catégorie de pêcheurs
à plein temps avec les pêcheurs côtiers qui exerçaient plusieurs emplois et
pratiquaient des activités saisonnières tantôt à terre et tantôt en mer.
L'ironie du sort a voulu que cette situation rende les pêcheurs commerciaux non
autochtones de cette région très dépendants d'un nombre très limité de
ressources.
En ce qui concerne les droits établis de participer à la pêche du homard, les
représentants de la nation de Burnt Church affirment que 40 pêcheurs de la
collectivité participaient à temps partiel à la pêche du homard avant qu'on n'en
limite l'accès après 1967 mais à cette époque, ils étaient peu désireux ou
incapables d'obtenir des permis, probablement parce qu'ils exerçaient, depuis
des temps immémoriaux, le droit d'exploiter le homard pour leurs besoins
personnels dans des zones situées en dessous des laisses de marée en utilisant
des techniques de pêche artisanales. La décision de rattacher les permis aux
bateaux plutôt que de continuer à les attribuer aux pêcheurs, prise en 1969, a
également contribué à faire disparaître du secteur de la pêche du homard
plusieurs petits exploitants. La limitation ultérieure du nombre de casiers par
permis semble, comme l'a signalé De Wolf en 1974, avoir rapproché la moyenne du
nombre de casiers posés du plafond fixé et avoir en fait accru l'effort de pêche
dans certaines zones de pêche; c'est une tendance à laquelle est venue ensuite
s'ajouter l'utilisation de bateaux plus gros et plus efficaces et de casiers de
plus grandes dimensions. Toutes ces mesures réglementaires ont désavantagé les
pêcheurs à temps partiel pratiquant plusieurs activités, notamment les
Autochtones qui pêchaient le homard à l'occasion et étaient apparemment
incapables d'obtenir des prêts pour acheter des homardiers par l'intermédiaire
des établissements de crédit du Nouveau-Brunswick.
Parsons (1993) a signalé qu'autrefois, «... les entrées et les sorties dans le
secteur de la pêche du homard étaient déterminées, dans une grande mesure, par
l'existence et l'attrait des autres perspectives d'emploi ». Cependant, après
les travaux d'un groupe d'étude chargé d'examiner les aspects économiques de la
pêche du homard, créé en 1974 par le MPO, le ministère a convenu que l'objectif
de gestion des pêches du homard devait être le rendement économique optimal et
on tenta de réduire le nombre de pêcheurs en grande partie par attrition. Les
autres pêcheurs devaient être convertis en pêcheurs « professionnels » et leurs
activités devaient être étalées sur plusieurs ressources. En fait, la valeur
d'un bateau de pêche avec permis augmenta considérablement à la suite de cette
décision et comme l'indique Parsons, «... Il en a résulté que ceux qui pouvaient
se les offrir ont acheté les bateaux ... ». C'est ainsi que dans les années 80, la
pêche du homard entra dans une période d'expansion au cours de laquelle les
prises doublèrent mais, toujours d'après Parsons (et la plupart des biologistes
spécialisés dans l'étude du homard sont probablement d'accord avec lui), «... la
reprise des stocks de homard ne résultait pas de la réduction de l'effort par le
biais du programme de rachat, mais plutôt d'une pointe de recrutement du homard
à l'échelle de l'Atlantique ».
Cependant, comme le précise cet auteur, le rendement net pour les pêcheurs
aurait été beaucoup moins élevé sans les retraits de permis (mais les
débarquements totaux auraient été à peu près les mêmes). C'est pourquoi la
limitation du nombre de permis pour la pêche du homard a été efficace, à en
juger d'après les objectifs économiques que l'on essayait d'atteindre, mais elle
a nécessairement restreint l'accès à la ressource et elle a incité les pêcheurs
à plein temps à poser davantage de casiers par bateau. Dans un premier temps,
l'effort total de pêche a probablement augmenté étant donné que les pêcheurs de
homard à temps partiel ont vraisemblablement abandonné la pêche pour s'adonner à
d'autres activités quand les prises ont été moins bonnes.
La présente section renferme des informations relativement détaillées afin
d'expliquer pourquoi les pêcheurs locaux à temps partiel ont été évincés. Parmi
eux, il y avait des pêcheurs autochtones à temps partiel qui n'avaient reçu
aucune aide et aucun encouragement pour continuer à participer à cette activité
de plus en plus réglementée et de plus en plus lucrative.
Le homard a un cycle de vie curieux et fascinant, mais qui n'est pas très
connu en dehors des milieux scientifiques; c'est pourquoi les conséquences de
certaines initiatives de gestion du stock ne sont pas manifestes. Une première
conclusion des conversations que j'ai eues avec les personnes les plus
impliquées dans la crise actuelle est le besoin urgent de sensibiliser davantage
le public à la biologie du homard, car c'est une ressource importante pour les
collectivités côtières des Maritimes. Je dirais que cette conclusion est valable
aussi bien pour les pêcheurs commerciaux non autochtones que pour les pêcheurs
autochtones. On pourrait utiliser dans les écoles des documents didactiques
permettant de comprendre aisément l'interaction entre les règlements concernant
le homard et la biologie de l'animal, qui pourraient être traduits en langue
micmaque. Étant donné que les membres des Premières nations sont d'une façon
générale depuis longtemps des protecteurs des ressources naturelles, il est
clair que le sort des espèces et des milieux dont dépend leur survie les
intéresse et je suis certain qu'ils seraient bouleversés si ce différend
entraînait une forte diminution des populations de homard. En fait, c'est grâce
à l'opinion commune que toutes les parties concernées veulent garantir le
bien-être et la productivité d'une importante ressource des Maritimes que l'on
pourra trouver une solution. L'objectif de tous les utilisateurs de la
ressource, autochtones ou non autochtones, devrait être de faire comprendre que
tous ceux qui ont le privilège de l'exploiter se doivent de la protéger
efficacement. Lorsque l'exercice d'un droit d'exploitation risque d'entraîner la
destruction de la ressource à laquelle ce droit s'applique (c'est ce qui s'est
malheureusement produit pour d'autres ressources, au Canada et dans d'autres
pays), des négociations menées de bonne foi pour maintenir l'exploitation sous
contrôle sont essentielles et urgentes, avant le début de la saison d'automne
des Mi'kmaqs (août 2001).
Les directives techniques concernant le Code de conduite pour une pêche
responsable de la FAO (FAO 1997) indiquent que la formulation de directives en
matière d'aménagement nécessite l'accord préalable de tous les intervenants. «...
Non seulement en ce qui concerne les détails techniques donnés par des experts
locaux en ressources, en économie et en sociologie mais aussi en ce qui concerne
les paradigmes et objectifs communs... Dans une large mesure, ce processus doit
être accompli dans le contexte local et ne peut se présenter sous forme de «
recette ». Ce raisonnement est manifestement valable en l'occurrence et
j'examinerai brièvement le plan de gestion du MPO en le comparant avec celui qui
a été élaboré par la nation de Burnt Church, pour voir s'il est possible de les
rendre compatibles.
Les directives de la FAO indiquent en outre que «... la période actuelle est
une période d'expérimentation intensive de nouvelles approches en matière
d'aménagement des pêcheries, approches qui sont axées entre autres sur des
mesures techniques, des outils économiques et sociaux visant à assurer l'équité
intergénérationnelle... et des cadres d'aménagement fondés sur la collaboration
entre l'État et les pêcheurs et leurs collectivités... La recherche de
(nouvelles) combinaisons d'outils d'aménagement acceptés pourrait s'avérer
fructueuse dans de nombreux cas. » Cela s'applique également à la pêche du
homard et indique qu'il faudrait permettre aux collectivités côtières locales,
et pas seulement à la nation micmaque, d'essayer de nouvelles méthodes de
gestion, pour autant que ces méthodes n'aient pas, comme l'indiquent les
explications concernant la décision Marshall, «... une incidence négative sur
l'importance historique de la pêche pour les non- autochtones ».
Les directives de la FAO signalent en outre que «... dans les pêches de petits
métiers, les contacts entre les utilisateurs, les dirigeants politiques et les
administrations ont tendance à reposer principalement sur des processus sociaux
et des institutions »... «...Lorsque les opinions sont contradictoires ou que les
institutions actuelles ne sont pas acceptées par toutes les parties,
l'incapacité d'atteindre le niveau minimum de compatibilité convenu aura une
incidence directe sur l'acceptabilité d'un plan d'aménagement, sans parler de
ses possibilités de mise en oeuvre . Les conflits entre divers utilisateurs des
mêmes ressources aquatiques sont courants... et une tâche importante des
autorités compétentes consiste à évaluer les conflits actuels et potentiels dans
le but d'en limiter l'ampleur autant que possible. »
C'est vite dit. Dans la présente situation, on est confronté à un problème
majeur, à savoir que « l'autorité compétente » qui, pour le gouvernement, est le
MPO, n'est pas pleinement acceptée par une des parties qui a invoqué le statut
national au Canada. Un article paru dans l'édition du 9 octobre 2000 de la revue
Time Canada (Vol. 156 no 15) cite le rapport de 1996 de la Commission royale sur
les peuples autochtones qui affirme que «... les relations futures entre les
Indiens et l'État devraient être des relations de nation à nation ». C'est
l'opinion d'une des parties au conflit, la nation de Burnt Church. Sans être un
expert en matière de droit constitutionnel, je suis au courant de quelques
dispositions d'ententes internationales sur les pêches étant donné que j'ai
travaillé pendant vingt ans pour la FAO. D'une façon générale, les dispositions
législatives nationales sur les pêches dans les zones économiques exclusives
sont harmonisées avec celles des accords internationaux sur la conservation
signés par les parties, comme le Code de conduite pour une pêche responsable,
dont l'application n'est pas obligatoire. Plusieurs articles du code sont
pertinents dans le cas qui nous occupe, que l'on remplace le terme « État » ou
non par un terme désignant une autre entité sociale. En fait, de nombreux pays,
et je crois qu'il est juste d'y inclure le Canada, reconnaissent que les
principes énoncés dans le Code s'appliquent également aux pêches relevant de la
compétence nationale.
Considérez par exemple ce qui suit :
L'article 6.4 du Code dit que «... les décisions portant sur la conservation et
l'aménagement dans le domaine de la pêche devraient être fondées sur les données
scientifiques les plus fiables disponibles, en tenant compte également des
connaissances traditionnelles relatives aux ressources et à leur habitat, ainsi
que des facteurs environnementaux, économiques et sociaux pertinents. Les États
devraient accorder la priorité à la conduite de recherches et à la collecte de
données, pour améliorer les connaissances scientifiques et techniques sur les
pêcheries, y compris sur leurs interactions avec l'écosystème. »
Le thème qui semble pertinent d'emblée dans le passage ci-dessus est la
nécessité du respect des connaissances traditionnelles, mais pour qu'une entente
de partage de la ressource soit fructueuse, les deux parties concernées
devraient collaborer à la recherche sur les pêches et à la collecte de données;
il faut que ce soit là la base de toute cogestion future de la ressource homard.
Il convient de préciser que la nation mi'kmaque de Burnt Church n'a pas tenu de
registres adéquats sur ses activités de pêche et qu'elle s'est montrée sceptique
au sujet des observations faites par des agents des pêches. Cette situation
m'oblige à fonder mon argumentation sur des principes biologiques et sur le
cycle de vie du homard. Un système adéquat de collecte des données et le recours
à la pêche sentinelle seront nécessaires pour pouvoir faire des analyses plus
fouillées.
Alors que l'article 7.2.1 recommande l'adoption de mesures d'aménagement
appropriées fondées sur les données les plus fiables disponibles, l'article
7.2.2 précise entre autres que «... les intérêts des pêcheurs, y compris de ceux
qui pratiquent la pêche de subsistance, la pêche aux petits métiers et la pêche
artisanale, doivent être pris en compte ». Je pense qu'en toute équité, cela
s'applique à la fois aux pêcheurs autochtones et aux non autochtones qui sont
parties à ce différend.
L'article 7.6.5 dit que : «... Les États et les organisations et arrangements
d'aménagement des pêcheries devraient réglementer la pêche de manière à éviter
les risques de conflits entre les pêcheurs utilisant des bateaux, engins et
méthodes de pêche de types différents ». C'est particulièrement pertinent dans
le contexte qui nous intéresse et une certaine modération est nécessaire de la
part de tous les intervenants si l'on veut avoir quelque espoir de trouver une
solution à ce problème.
En ce qui concerne la nécessité de préparer un plan d'aménagement, les
directives correspondantes concernant le Code disent que : «...La pêche d'un stock
donné peut être complexe et être composée de plusieurs types de flottilles. Un
plan d'aménagement doit tenir compte de l'incidence de chaque flottille sur les
ressources et de sa propre incidence sur ces flottilles ». Je tenterai
précisément d'examiner la question des incidences réciproques dans les pages qui
suivent, en m'appuyant sur les données disponibles.
On trouvera un dernier extrait des directives concernant le Code dans la case
ci-dessus. Il indique clairement qu'il ne peut y avoir qu'un seul plan
d'aménagement pour un stock et que s'il y en avait deux ou plus, il faudrait
faire en sorte qu'ils soient compatibles.
L'aménagement des pêcheries comporte une série de tâches complexes et très
variées qui consistent notamment à :
- identifier des objectifs (communs) à s'efforcer d'atteindre, en consultant
tous les groupes concernés.
- analyser les données disponibles pour déterminer la situation générale et
l'orientation des recherches ultérieures visant à soutenir les mesures
d'aménagement nécessaires pour atteindre les objectifs.
- élaborer et mettre en oeuvre un plan d'aménagement commun fondé sur les
données les plus exactes disponibles.
- faire en sorte que le stock et son habitat ainsi que son milieu demeurent
productifs.
(Directives de la FAO pour un aménagement responsable des pêcheries.)
Depuis quelques années, la FAO fait la promotion du « principe de précaution
» et il est raisonnable de dire que c'est l'ignorance de ce principe qui est
responsable de l'effondrement de nombreuses pêches.
Le Code et ses directives d'application définissent le principe de précaution
comme « l'application d'une prévoyance prudente » qui requiert, entre autres
choses :
- que l'on prenne en compte les besoins des générations futures et que l'on
évite des changements qui pourraient être irréversibles.
- que l'on identifie au préalable des résultats indésirables et des mesures
nécessaires pour les éviter ou pour y remédier rapidement.
- que l'on entreprenne des mesures correctrices sans retard.
- que l'on accorde la priorité, lorsqu'on a des doutes quant à l'incidence
du plan sur la ressource, au maintien de la capacité productive de cette
ressource.
- que toutes les activités de pêche fassent l'objet d'une autorisation
préalable et d'un examen périodique.
- que l'on établisse un cadre juridique et institutionnel pour l'aménagement
des pêcheries dans lequel s'inscrivent les plans d'aménagement.
Si l'on examine le différend actuel sous l'angle des points 1 à 7, je suppose
que personne ne conteste les points 1 à 3 inclusivement. Le 4e point est une
priorité établie par la décision Marshall. Seuls les 5e et 6e points semblent
être contestables étant donné qu'il y a deux plans de gestion à concilier.
Le problème que pose peut-être la signature d'une entente de pêche avec le
gouvernement fédéral pour la nation de Burnt Church est sa perception d'un
manque de respect mutuel qui se manifeste par la forme de l'entente triennale
proposée plutôt que par son contenu. L'entente devrait peut-être prendre note
des revendications des deux parties et éviter soigneusement d'insinuer qu'un
droit est « concédé » par une partie à l'autre. Le texte proprement dit de
l'entente devrait plutôt être précédé d'un préambule formulé à peu près comme
suit :
« Compte tenu des revendications des deux parties en ce qui concerne la
compétence sur la ressource homard et l'accès à cette ressource dans la zone de
gestion du homard 23 du golfe du Saint- Laurent, l'entente ci-après est signée
pour les trois années qui suivent dans le but d'harmoniser les mesures du plan
de gestion du homard des Mi'kmaqs et de celui du MPO. La nation micmaque de
Burnt Church pêchera avec un permis, avec 300 casiers par permis, au cours de la
pêche de printemps dans la zone 21. Elle fera en outre en sorte que ses
règlements soient compatibles avec ceux qui sont applicables aux pêcheurs non
autochtones et recueillera des données suffisantes sur les prises et l'effort de
pêche; elle appuiera en outre un programme de recherche ayant pour but de
recueillir des informations plus précises sur les prises. La nation de Burnt
Church s'engage à limiter ses prises (ou le nombre de casiers) au cours de la
saison d'automne à (inscrire les chiffres convenus). »
Bien qu'il semble subsister certains points de désaccord entre les parties au
sujet de l'exercice intégral des droits issus de traité, il y a
vraisemblablement des possibilités d'entente sur une période limitée. Ainsi, les
ententes d'une durée de trois ans conclues par le MPO avec les Autochtones
devraient viser à leur accorder une part raisonnable des ressources de homard,
suffisante pour leur assurer une subsistance convenable au moyen des ressources
de homard locales, sans nuire pour autant à la capacité des non Autochtones de
la région de faire de même. Comme le note un feuillet du gouvernement du Canada
intitulé : Jugement Marshall - les mythes et la réalité,
les ententes de pêche ne compromettent en rien les positions du gouvernement ou
des Premières nations. En d'autres mots, les ententes n'exigent pas que les
participants renoncement à leurs positions globales sur la question. Je ne vois
aucune raison de douter de cet énoncé et, sans une acceptation, tacite ou
manifeste, aucune entente ne sera possible.
Aucun des commentaires émis dans le présent rapport ne doit être considéré
comme révélateur d'idées préconçues de l'auteur au sujet du niveau approprié de
partage des ressources. Ma principale préoccupation demeure la gestion et la
conservation appropriées des ressources, de sorte que quiconque capture des
homards dans la baie Miramichi et les environs doit être assujetti à des mesures
de réglementation assurant un partage durable des ressources. Même sur la
scène internationale, les états doivent participer à la cogestion de stocks
communs et ne peuvent procéder unilatéralement! En fait, le droit de la mer
les oblige à se réunir et à mettre en place un mécanisme de gestion du stock
commun. Permettez-moi de signaler qu'il n'est pas inhabituel pour deux entités
politiques (à l'intérieur d'un pays ou entre états) d'avoir des opinions
différentes sur la propriété des ressources ou le droit d'accès. L'une des
exigences fondamentales dans ce genre de situation est d'être disposé à négocier
une entente périodiquement renouvelable d'une durée fixe. Il y a fort à parier
que cette entente ne sera pas la solution optimale souhaitée par les deux
parties (tout comme la plupart des ententes), mais elle devrait supposer un
partage équitable des restrictions entre les deux parties.
Je n'ai pas l'intention de revenir en détail sur les décisions politiques
antérieures qui ont façonné la gestion du homard et sa répartition. Je noterais
cependant que la décision Sparrow de 1990 sur les
droits de pêche à des fins alimentaires et rituelles reconnaissait pour la
première fois la justification d'une telle pêche à l'automne, au large de Burnt
Church. Sa Dernière mise à jour par la décision Marshall (que Burnt Church
considère comme l'ayant rendu désuet) affirme le droit de la collectivité de
participer également à la pêche commerciale. Il est probable, cependant, qu'en
accordant 17 permis de homard, l'intention du MPO était qu'ils soient utilisés
au printemps. Toutefois, il y a au moins trois raisons pour lesquelles l'effort
de pêche de Burnt Churh continue d'être déployé principalement à l'automne et
risque de se perpétuer à moins de changements importants :
- les activités rituelles exigent une consommation limitée de homards en
été.
- les membres les plus démunis de la collectivité ne peuvent participer
qu'avec de petits bateaux à la pêche d'automne, près du rivage.
- on craint les risques d'agression si l'on pêchait en dehors de la baie,
comme l'exigerait la pêche au printemps.
On trouve dans le préambule et le contenu du plan provisoire de gestion de la
pêche préparé par la Première nation Burnt Church des Mi'kmaqs, une « vison du
monde » différente de celle du MPO, mais la plupart des détails techniques sont
les mêmes. Le principal problème, à mon avis, est le niveau d'exploitation
proposé à l'automne dans le plan de Burnt Church et la durée de la saison
d'automne.
Lorsqu'on s'attarde sur les points techniques du plan de Burnt Church, qui
constituent l'objet du présent rapport, malgré les différences quant aux
objectifs de gestion, les démarches sont très semblables, comme on peut le voir
dans le tableau sommaire ci- dessous. Celui-ci constitue un résumé de certaines
des principales caractéristiques du plan, parallèlement à celles du rapport du
Conseil pour la conservation des ressources halieutiques intitulé :
Un cadre pour la conservation des stocks de homard de
l'Atlantique.
|
Plan de Burnt Church |
Cadre du gouvernement du
Canada |
Objectif |
Le principe de prudence doit être appliqué pour
maximiser la conservation de l'espèce et des écosystèmes.
Redonner aux peuples autochtones, que ce soit ou non dans les réserves,
l'accès aux ressources naturelles se trouvant à l'intérieur et à l'extérieur
des réserves, qui étaient leur avant l'arrivée des non Autochtones. |
En vertu du nouveau cadre de conservation, le
Ministre se préoccupe principalement des principes, des buts et des
objectifs de conservation. Les objectifs doivent être définis davantage,
mais il faut une démarche plus prudente. L'effort est trop élevé et le
nombre de homards qui réussissent à s'échapper ainsi que le taux de
production des oeufs sont trop faibles. Les principaux facteurs de gestion
sont une production d'oeufs suffisante, des taux de moralité par pêche
acceptables et une biomasse (exploitable) formée de plusieurs classes d'âge.
L'objectif de production d'oeufs devrait être une augmentation de 5 % de la
population non exploitée. Des réductions importantes de l'effort de pêche
sont recommandées « sur une période donnée ». |
Habitat |
Entre autre, la PNE assurera la protection de
l'habitat marin et favorisera le rétablissement de l'habitat conformément à
sa philosophie traditionnelle. |
Aucune mention particulière de l'habitat. |
Droits d'accès |
Tous les membres de la PNE se partagent
également les ressources et la PNE doit promouvoir l'intérêt collectif. |
Accès limité aux titulaires de permis et un
niveau juste et raisonnable de captures pour les Autochtones. La pêche
illégale et l'amélioration de l'application des règlements sont des
préoccupations importantes. |
Décision au sujet du niveau d'effort actuel? |
- Accès équitable à tous les Mi'kmaqs qui
souhaitent exercer leurs droits issus de traité, mais jusqu'à concurrence de
15 000 casiers au printemps et de 5 600 à l'automne, avec un maximum de 300
casiers et de quatre par homme, femme et enfant de la PNE.
- Toute réduction de l'effort doit venir des non Autochtones à moins qu'un
biologiste autochtone financé par la PNE convienne qu'elle doit s'étendre
également aux Mi'kmaqs.
- La Division de la gestion des ressources naturelles de la NRPA délivrera,
retirera, limitera ou suspendra les permis et étiquettes de pêche.
- Le plan de gestion de la PNE déterminera qui pourra pêcher, où et quand.
Les fonds du MPO proposés pour l'achat de bateaux et de quais serviront à
acheter des permis additionnels qui ne seront pas utilisés - c.-à-d. les
retirer pour réduire l'effort. Saisie des engins en cas d'infraction. |
Deux cent quarante-huit permis retirés sur les
7 850 qui existaient dans les Maritimes et au Québec, pour « faire place » à
un niveau comparable d'effort de pêche des Autochtones.
Les pêcheurs travaillent en partenariat avec le MPO au sein des comités
consultatifs du homard pour établir des mesures détaillées conformes aux
principes et objectifs approuvés par le MPO. |
Relations avec les autres utilisateurs des
ressources |
La PNE reconnaît que le traité de 1760 ne
s'applique pas aux pêcheurs non autochtones.
Une relation mutuellement avantageuse peut être établie entre les pêcheurs
autochtones et non autochtones. |
Le MPO s'est engagé à favoriser l'accès à la
pêche commerciale pour les Autochtones. |
Saison de pêche du homard |
Du 29 avril au 30 juin (61 jours), puis de la
troisième semaine d'août au 31 octobre (78 jours). Fermeture pour la mue en
juillet et au cours des première et deuxième semaines d'août. |
La saison actuelle est du 1er mai au 30 juin
(61 jours) |
Districts de pêche du homard et autres unités
géographiques de réglementation |
Rejeter les limites oppressives des réserves et
les étendues d'eau limitées qui leur sont associées, puisque les droits
issus de traités ne se limitent pas aux confins des réserves. La PNE
réaffirmera son droit particulièrement dans son district traditionnel. |
Il faut conserver la base régionale de gestion
du homard qui tient compte des caractéristiques des populations locales,
mais il subsiste des incertitudes quant au cadre spatial approprié qui
tiendrait compte des caractéristiques géographiques des populations locales.
Sept aires de production du homard (APH) sont recommandées, chacune en
fonction de populations « homogènes » de homard. Les APH ne sont pas
nécessairement des unités de gestion opérationnelle, et les mesures de
gestion utilisées n'ont pas à être uniformisées. |
Pouvoir de gestion |
Un organe judiciaire communautaire prévu par un
tribunal des ressources naturelles. |
Le ministère des Pêches et des Océans |
Autres règlements |
Dispositifs de sortie + panneaux
biodégradables, casiers marqués, taille limitée des casiers, remise à l'eau
des femelles oeuvées marquées d'une encoche |
Dispositifs de sortie + panneaux
biodégradables, casiers marqués, taille limitée des casiers, marquer d'une
encoche 50 % des femelles oeuvées et remettre à l'eau les femelles
recapturées. |
Il pourrait maintenant être utile de mentionner que la démarche de gestion ne
devrait pas viser précisément à maximiser le rendement ou nécessairement à
optimiser le rendement économique. Il a été indiqué précisément que pour la mise
en oeuvre de la décision Marshall, une des priorités devait être de faire en
sorte que les répercussions sur les autres utilisateurs ne seraient pas
excessives, et que l'exercice des droits issus de traités serait soumis à
l'exigence prépondérante de maintenir le potentiel de reproduction future de la
population de homard. Les critères proposés par le CCRH concernant
l'accroissement de la production d'oeufs accordent la même priorité à la
conservation. Puisque le consultant a contribué à promouvoir le calcul des
oeufs/recrues de homard au Canada (Caddy, 1979a), je pourrais difficilement être
en désaccord avec cette méthode, car des critères axés sur le rendement durable
sans tenir compte de la reconstitution du stock, ont de toute évidence mené à
l'épuisement des ressources dans le monde entier. Par ailleurs, comme je
l'indiquerai, il y a différentes opinions actuellement quant à la meilleure
façon d'améliorer le remplacement des ressources par la reproduction.
Dans ce contexte, il est remarquable d'observer la façon dont les
débarquements de homard dans l'Est du Canada, mais aussi aux États-Unis, ont
augmenté jusqu'à atteindre des sommets quasi sans précédent au cours des années
1990, après une centaine d'années ou presque d'exploitation commerciale. La
première baisse pendant les années 1930, après une première pointe,
correspondait à des tendances semblables de la pêche d'autres ressources comme
la morue, dont la diminution n'a jamais pu être substantiellement renversée. Au
cours des années 1960, ce fléchissement est aussi apparu irréversible pour le
homard sur toute la côte atlantique. C'est pourquoi la hausse des débarquements
de homard jusqu'à de nouveaux sommets au début des années 1990 est encore plus
surprenante. Deux points sont surtout dignes de mention. Le premier : la plupart
des pêches aux É.-U. et au Canada, gérées de façon complètement différente, ont
été marquées par une hausse des débarquements au cours des années 1990, même
celles dont les mesures de conservation sont jugées inappropriées. Il existait
et il existe toujours un degré considérable de surcapitalisation pour toutes les
pêches du homard, surtout en ce qui concerne le nombre de casiers utilisés.
Selon les données dont on dispose, cependant, il a fallu qu'il se produise un
autre événement, commun à toutes les ressources de homard, dans l'ensemble de
leur aire géographique.
Il ne faut pas croire pour autant que les changements apportés à la
réglementation ces dernières années n'aient pas été efficaces; au contraire, ils
étaient nécessaires et sans eux, les débarquements auraient certainement été
bien inférieurs. En fait, les pêcheurs non autochtones étalent fièrement, et
avec raison d'ailleurs, leur rôle pour le maintien d'une pêche productive. Ils
mettent en évidence, comme facteurs ayant contribué à la hausse des
débarquements, la réduction du braconnage, la diminution du nombre de casiers et
de pêcheurs illégaux, l'introduction d'orifices de sortie et la légère hausse
des limites de taille. Ce sont certainement des réalisations considérables pour
lesquelles il faut leur donner crédit et qui ont exigé des sacrifices importants
de leur part, dont ils voudraient bien récolter les résultats. Ils s'inquiètent
encore plus lorsqu'ils voient les gains réalisés sur le point de leur échapper à
cause d'événements qui sont entièrement hors de leur contrôle.
Je ne prétends pas savoir quelle proportion de l'augmentation des
débarquements des années 1990 est attribuable à l'amélioration des règlements et
laquelle serait due à des changements biologiques et environnementaux, ainsi que
la contribution relative des différents facteurs aux récentes hausses. En plus
des effets positifs des règlements de pêche, les changements survenus dans le
milieu ainsi qu'une importante réduction de la prédation à l'égard des petits
homards et, partant, de leur taux de mortalité naturelle, attribuables à la
diminution des stocks de poisson de fond depuis les années 1970, pourraient
avoir eu un rôle à jouer. Ce sont là des facteurs connus dont les biologistes
spécialistes du homard se servent pour expliquer les hausses de l'abondance. En
fait, il sera intéressant de voir dans quelle mesure les débarquements de homard
se maintiendront si les stocks de poisson de fond se rétablissent. Ce qui nous
fait croire que le rétablissement n'est pas entièrement dû à la réglementation,
c'est que d'un point de vue scientifique, les hausse prévues devraient à ce
stade être modérées. Elles pourraient être contrebalancées par une probabilité
comparable, d'un point de vue négatif, attribuable à un certain nombre de
facteurs, dont les troubles publics.
Plus précisément, on ne devrait pas supposer que la diminution des prises
dans le Golfe est nécessairement attribuable à la pêche d'automne dans les zones
statistiques 70, 71 et 73. Cependant, il est certain qu'une augmentation
importante des débarquements à l'automne aura des effets sur la pêche du
printemps dans les zones de pêche du homard adjacentes, mais nous ne savons pas
quelle proportion du stock en dehors de la baie est accessible de façon
saisonnière aux pêcheurs Mi'kmaqs à l'automne. Malgré leurs autres différences,
un des principaux objectifs communs à tous les intervenants devrait être de
s'assurer que le taux de reconstitution de la population est maintenu dans la
plus grande mesure possible, afin d'éviter que la pêche dans son ensemble ne
revienne aux faibles niveaux d'exploitation de la période de 1920 à 1970.
L'adoption par le MPO d'un critère minimum pour doubler la production d'oeufs
au sein des populations de homard semble approprié, même si l'objectif paraît
modeste et ne tient pas compte précisément de la viabilité accrue des oeufs
pondus par les grosses génitrices. Un peu plus loin, je proposerai quelques
idées supplémentaires à envisager pour maintenir ou améliorer le recrutement
annuel. Pour le moment, toutefois, je dirai simplement que les récentes
incertitudes concernant les zones 70, 71 et 73 ne sont pas des sources
d'optimisme véritable quant aux niveaux futurs de reconstitution des stocks
puisqu'elles ont sans aucun doute des effets sur le potentiel de reproduction du
stock.
La présente section contient une description du cycle biologique du homard,
réduisant une série complexe de processus physiologiques à quelques paragraphes,
et mettant l'accent un peu moins sur les détails physiologiques et structuraux
que sur le stade et la taille auxquels se produisent les processus en cause.
Elle s'appuie largement sur les rapports de Aiken et Waddy (1980) et de
Chaikelis (1953).
En général, le recrutement des homards au sein de la population exploitable a
lieu aux âges 6 à 9; les homards passent leurs premiers stades benthiques à
s'enfouir dans des crevasses (voir p. ex. Wahle, 1992; Lawton et autres, 2001 et
des études antérieures d'auteurs britanniques sur le homard d'Europe dans le sud
de la mer du Nord - une autre région dominée, comme le sud du Golfe, par des
fonds de sédiments fins). Bien que de nouveaux travaux de recherche en Europe
permettent de déterminer approximativement l'âge du homard au moyen de la
lipofuscine, substance qui s'accumule dans certains organes au cours des mues,
la détermination de l'âge des homards individuels demeure problématique. Ce
qu'on semble observer, c'est qu'il y a un « seuil » marqué de tailles lorsque le
homard, par mue, passe d'une taille inférieure à la limite légale jusqu'à une
taille de conserverie, ce qui signifie qu'il peut être légalement conservé s'il
est capturé.
À ce point, il est donc réaliste et pertinent de parler « d'âge relatif » ou
même plus réaliste encore de diviser la population en groupes selon le « nombre
de mues depuis l'entrée au sein de la population exploitable ». Ces « groupes de
mues » ne sont pas homogènes en âge, mais l'âge et la taille à partir de
l'entrée au sein de la population exploitable deviennent des variables de
contrôle. De fait, cette méthode de calcul au moyen du « nombre de mues depuis
l'entrée au sein de la population exploitable » est la plus pratique et la plus
pertinente sur le plan biologique pour mesurer le temps lorsqu'on met au point
des modèles de la dynamique d'une population de homard (Caddy, 1979a), et c'est
celle que nous utiliserons. Sur ce point, on peut indiquer que l'augmentation
des limites de taille par intervalles de quelques millimètres au lieu de d'une
mue complète d'environ 10 % de la longueur rend le calcul des avantages
quantitatifs de ces hausses très difficile. Puisque l'intervalle de l'intermue
est relativement bien connu, il est possible de le convertir en taux de
mortalité, comme le montre le tableau 1, du moment que l'on a une idée de la
durée de l'intermue. Bien qu'il soit vrai, comme le précise le rapport de 1995
du Conseil pour la conservation des ressources halieutiques, que « ...
l'élaboration de modèles de dynamique des populations comme ceux actuellement
utilisés pour les poissons de fond [ne soit pas possible] ..., il est faux de dire
que des modèles ne peuvent pas ou n'ont pas été utilisés pour la gestion de la
pêche du homard dans le monde. Il y a d'autres méthodes de modélisation de la
pêche des crustacés qui n'ont pas été étudiées à fond pour les homards canadiens
et qui doivent être adaptées au cycle biologique de l'animal en question.
Les femelles matures se distinguent des mâles et des femelles non matures par
leur large abdomen et, tandis qu'elles peuvent atteindre la maturité à une
taille de 59 mm LC dans le sud du Golfe, même lorsqu'elles mesurent en moyenne
plus de 70 à 75 mm LC, seulement 50 % d'entre elles ont atteint la maturité
sexuelle (Lanteigne, et autres, 1998). Ainsi, une proportion importante de
homards de taille légale de la zone de pêche du homard 23 commencent la saison
de pêche du printemps en tant qu'immatures (homard de conserverie) et sont
capturés avant d'avoir eu la chance de devenir adultes et de se reproduire. La
situation est encore plus inquiétante pour une pêche commençant au début de
l'automne, pour les raisons que nous exposerons plus loin.
L'accouplement a lieu peu après la mue de la femelle. Pressentant cette
période, celle-ci quitte son repaire pour chercher le mâle dominant des environs
et s'accoupler avec lui. Les mâles deviennent adultes à une taille inférieure à
celle des femelles et, à 40-45 cm LC, produisent déjà du sperme. Il semble
probable, cependant, que la maturité fonctionnelle, définie comme la capacité de
retourner la femelle sur le dos pour l'accouplement, nécessite un mâle plus gros
ou d'une taille relativement semblable à celle de la femelle, ce qui est
rarement possible si le mâle mesure moins de 65 mm LC. Une capsule, ou
spermatophore, contenant le sperme est transférée au cours de l'accouplement et
conservée par la femelle qui pourra l'utiliser pour féconder les oeufs
immédiatement ou après une période de temps parfois considérable pouvant aller
jusqu'à un an.
La fécondation n'a pas lieu immédiatement, mais peut être retardée même
jusqu'à la prochaine mue ou à l'été suivant l'accouplement. Les chances qu'une
femelle arrivent à pondre ne sont probablement pas très élevées pour les homards
de taille commerciale, au sein des populations fortement exploitées. Le taux de
survie des femelles jusqu'à maturité est faible, tout comme (encore davantage)
jusqu'à la deuxième ponte (rappelez-vous que les femelles peuvent pondre des
oeufs tous les deux ans ou à peu près pendant de nombreuses années si elles ne
sont pas capturées, le nombre d'oeufs viables allant croissant à mesure qu'elles
grandissent). La ponte peut avoir lieu à partir d'un mois environ après la
fécondation, au cours de la même saison, mais dans le Golfe elle est
probablement retardée jusqu'à l'année suivante. Selon Chaikelis, la ponte a lieu
en août (il fait probablement référence aux homards des côtes de l'État de New
York), mais apparemment la ponte a lieu principalement entre juin et septembre
dans les Maritimes. Par conséquent, une importante proportion de homards
femelles capturés et qui ne sont pas rejetés à l'eau tout à fait légalement, ne
portent pas d'oeufs, bien qu'elles aient été fécondées, leurs oeufs n'ayant pas
encore été expulsés et fixés sous l'abdomen. En fait, on se rend compte, à la
dissection, qu'un grand nombre de femelles matures contiennent des
spermatophores qu'il n'est pas possible de voir sans endommager l'animal. Qu'il
suffise de dire que l'un des plus grands inconvénients de la biologie du homard,
du point de vue de la gestion, est qu'il faut à un homard d'Amérique deux ans
pour produire des rejetons! Cependant, aussi difficile que ce soit, il est
essentiel que le système de gestion tienne compte de cet aspect.
À ce stade, précisons que la pratique de certains pêcheurs peu scrupuleux qui
consiste à gratter les oeufs de l'abdomen, peut être décelée au moyen d'une
analyse chimique à cause du produit adhésif laissé sur l'abdomen. Il est
intéressant de noter que les oeufs récemment pondus sont de couleur verte, tandis
que les oeufs « embryonnés », qui sont fixés à l'abdomen et qui sont près
d'éclore, sont bruns. Peu après l'éclosion du dernier lot, la femelle muera de
nouveau, mais la longue période d'interruption de la mue pendant qu'elle porte
les oeufs à l'extérieur, fait en sorte que sa croissance est ralentie par rapport
à celle des mâles.
Les larves planctoniques se tiennent principalement dans les eaux de surface
et traverseront quatre stades larvaires, chacun séparé par des mues, sur une
période de trois à dix semaines, avant de descendre vers le fond au milieu du
stade IV. En général, on croyait, à propos de la production des larves, que
celles-ci ne retournaient pas nécessairement sur les lieux de l'éclosion;
cependant, cette théorie ne semble pas avoir été confirmée scientifiquement et
des groupes de larves de tailles différentes seraient géographiquement
différenciés dans les eaux du golfe du Maine. Certaines études récentes
montreraient que les larves de homard arrivent à se servir de leur migration
verticale et des courants pour demeurer plus ou moins dans la région des aires
de homard. Par conséquent, la « conclusion » mentionnée ci-dessus qui a servi
dans le passé de raisons pour ne pas tenir compte de la contribution au
recrutement des populations locales, peut être mise en doute. On a souvent
supposé que les larves venaient « d'ailleurs », principalement parce qu'il était
pratique de ne pas avoir à tenir compte de la survie des sujets matures. Que ce
soit vrai ou non, ce n'est pas ce qu'on appellerait une démarche prudente! Il
serait sage, dans le cadre des régimes de gestion locaux de grandes régions
comme celles du Golfe, qui englobent probablement une mosaïque de «
métapopulations », que chaque secteur de gestion s'assure indépendamment qu'une
importante proportion de homards survit pour apporter une contribution valable à
la prochaine génération. C'est dire qu'il faut éviter de conclure qu'il n'est
pas important de se préoccuper de ce que les femelles oeuvées et les grandes
femelles locales soient ou non capturées parce qu'une bonne gestion « ailleurs »
sauvera nos ressources!
Des préoccupations ont été exprimées au sujet de la grande proportion de la
descendance des populations de poissons et d'invertébrés fortement exploitées
qui est attribuable à des femelles arrivées à la première maturité sexuelle, à
cause des règlements actuels. Pour le homard, ce n'est pas seulement parce que
la saison de ponte des femelles de première ponte diffère quelque peu de celle
des femelles plus âgées, mais parce que les jeunes femelles sont beaucoup moins
fécondes et produisent des oeufs qui sont moins viables. À cause d'une sélection
naturelle provoquée par la pêche, la dépendance à l'égard des petits homards de
première ponte est une stratégie de pêche qui risque de mener à la sélection de
géniteurs précoces et d'autres organismes associés à une tendance au rachitisme.
Les grandes femelles sont beaucoup plus fécondes que les petites, de sorte
qu'une femelle de 72 mm LC produit environ 5 500 à 6 000 oeufs, tandis qu'une
femelle de 100 mm LC pondra généralement entre 16 000 et 19 000 oeufs, de sorte
qu'en doublant la longueur de la carapace, on augmenterait de huit à neuf fois
le nombre de la progéniture.
La ponte et la fécondation peuvent avoir lieu dès le mois qui suit
l'accouplement et jusqu'à presque un an plus tard. Ensuite, les oeufs sont
conservés sous l'abdomen de la femelle pendant environ un an, de sorte que le
cycle parental complet dure à peu près deux ans, la femelle étant capturable
pendant une saison sur deux. Quelques femelles (apparemment rares dans le Golfe)
pourraient pondre des oeufs deux fois entre les mues, mais cela semble rare et il
s'agirait de très grosses femelles qui muent tous les deux ans ou plus. La
situation des femelles oeuvées est plus favorable quand l'interdiction concernant
les femelles oeuvées est respectée et qu'elles sont remises à l'eau mais, tel
qu'indiqué, c'est le cas de la plupart d'entre elles, à tous les deux ans.
![Fig. 1](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig1_f.jpg)
Fig 1: Montre l'entrée de homards ayant récemment mué au
sein de la population exploitable en été. Puisque la plupart des homards qui ont
été recrutés l'année précédente (75 à 85 %) ont été capturés, les nouvelles
recrues composent la plus grande proportion de la population exploitable. Aucune
autre mue n'aura lieu entre la pêche d'automne et celle du printemps, de sorte
que la pêche d'automne sert de pêche « d'interception », déterminant le nombre
de homards qui survivront jusqu'à la pêche du printemps.
Un résumé des principaux événements saisonniers est illustré ci- Dessous de
façon très schématique à la figure 1. X représente deux homards de taille
inférieure à la limite légale, la femelle commençant la saison printanière avant
son premier accouplement et la ponte ultérieure. (Ceci peut se produire pour
bien des homards l'été suivant l'accouplement et non le même été comme il est
indiqué sur la figure). Puisque de 75 à 85 % des mâles et des femelles non
oeuvées sont capturés avant la fin de la première saison de pêche du homard,
seuls quelques homards survivent et pourront se reproduire. Parmi ceux qui
survivent à leur première année en tant qu'adultes, un très petit pourcentage
survivront à la pêche une deuxième fois. Selon les indications de la pêche de
fond au filet maillant/trémail (Lanteigne et Tremblay, 2001), quelques gros
homards échapperont à la pêche et pourront atteindre une taille à laquelle ils
seront incapables de pénétrer dans la plupart des casiers à homard parce que
l'ouverture mesure 5 ½ po dans la plupart des secteurs. Leur nombre augmentera
dans le secteur avec le temps, puisque le homard peut vivre dix ans et plus et
qu'une grosse femelle produira beaucoup plus d'oeufs qu'une petite. Ces gros
sujets peuvent jouer un rôle important pour la ponte et constituent une forme
d'assurance dans le cadre d'une pêche sans limitation très efficace des prises
ou de l'effort. Je crois que des efforts particuliers devraient être faits pour
les préserver et ajouter à leur population.
Les survivants de la saison de pêche printanière, ainsi que les homards de
taille inférieure à la limite légale qui étaient trop petits pour être gardés au
printemps, migrent vers les eaux côtières où les femelles matures mueront.
Tandis que la carapace est molle, ils s'accouplent. Une grande proportion de
celles qui se sont accouplées et, probablement avant la fin de la saison de
pêche automnale, expulseront leurs oeufs et deviendront des femelles oeuvées.
Actuellement, le règlement exige que les pêcheurs remettent à l'eau des femelles
oeuvées et pratiquent une encoche dans la queue de la moitié d'entre elles.
Puisqu'un homard ainsi marqué devrait être retourné à l'eau, qu'il porte des
oeufs ou non, cette mesure permet théoriquement à une petite proportion de
grosses femelles de se reproduire plus d'une fois. Elle est importante, car même
si une grosse femelle qui a pondu au moins une fois peut avoir été fécondée,
tant qu'elle n'a pas expulsé et fixé ses oeufs sous son abdomen, elle risque
d'être capturée légalement si elle ne porte pas d'encoche dans la queue.
Le fait de s'assurer qu'une petite proportion tout de même importante de gros
géniteurs est maintenue au sein de la population (il nous faut dans ce cas de
gros mâles, puisque les petits mâles adultes sont physiquement incapables de
s'accoupler avec de grosses femelles) constitue une mesure de sécurité pour
l'avenir de la population. La reproduction est répartie dans le temps, se
produisant probablement plus tôt pour les grosses femelles, de sorte que
l'ensemble de la population résistera davantage aux changements
environnementaux, comme de basses températures au printemps, qui retardent
particulièrement la maturité, la mue et l'expulsion des oeufs des femelles qui
s'accouplent pour la première fois. Par exemple, un printemps froid ou un
automne précoce qui abaisse la température de l'eau va probablement réduire le
taux de survie des larves produites vers la fin de l'été qui, selon certains,
proviennent principalement des femelles qui arrivent tout juste à maturité.
Comme on vient de le dire, un règlement qui permet de conserver une bonne
proportion de homards matures âgés contribue aussi à réduire la sélectivité
génétique par la pêche intensive des petits homards précoces. En outre, compte
tenu du plus grand nombre d'oeufs et, peut-être, de la taille et du contenu
vitellin supérieurs, selon certains auteurs, il contribue à une reproduction
plus uniforme puisque les petits et les gros homards ont des stratégies de
reproduction légèrement différentes.
Comme on l'a vu à la figure 1 et d'après d'autres remarques également, la
saison printanière joue un rôle en matière de conservation dans un contexte où
sont à peu près inexistantes les limites flexibles de l'effort de pêche (qui,
d'après la plupart des biologistes spécialistes du homard, est excessif) et où
il n'y a pas de quota. La pêche au printemps restreint l'exploitation du homard
pendant les périodes fraîches de l'année au cours desquelles il n'y a pas de
mue, de sorte que les carapaces sont fermes, que la vulnérabilité est
relativement faible et que les homards sont largement dispersés sur une grande
superficie dans des eaux profondes. Ainsi, ces conditions représentent une forme
« passive » de réglementation qui, malgré l'effort excessif, a permis de
maintenir le stock pendant des années sans crise. En fait, les débarquements ont
augmenté de façon importante depuis les années 1970 et sont maintenant
constitués d'une plus grande proportion de homards de taille commerciale
qu'antérieurement.
Bien que le règlement de pêche actuel puisse sans doute être amélioré de
façon à réduire les risques en diminuant le nombre de casiers utilisés, la
saison printanière permet d'éviter de pêcher le homard au cours des périodes
délicates que sont la mue et l'accouplement. Elle protège également les homards
à carapace molle des dommages causés pendant la manutention et l'expédition et,
dans la plupart des cas, a permis d'obtenir de meilleurs prix sur des marchés
situés loin du point de capture.
Il y a d'autres raisons pour lesquelles la pêche du printemps a été
privilégiée dans bien des secteurs; certaines d'entre elles ont été signalées
par des pêcheurs commerciaux non autochtones. Les pêcheurs côtiers dirigent
souvent leurs efforts vers différentes ressources à différents moments de
l'année : le poisson de fond et le hareng par exemple sont accessibles dans les
eaux peu profondes à l'automne et en été; un grand nombre de casiers déposés au
cours d'une pêche du homard en été et en automne viendraient nuire à ces
activités. Une saison automnale laisserait aussi une longue période d'inactivité
au printemps et au début de l'été quand il n'y a aucune autre pêche importante.
Si l'on examine l'échelle de températures de la mer au printemps et à l'automne,
on se rend compte qu'elles sont différentes, la principale conséquence en étant
qu'au début de la saison printanière, le homard est relativement abondant, mais
moins facile à capturer, tandis qu'au début de la saison automnale, il est
localement très abondant et très facile à capturer. Qu'il devienne moins
vulnérable plus tard au cours de la saison automnale, lorsque la température
s'abaisse, n'a pas beaucoup de répercussions puisque la plupart d'entre eux
auront déjà été capturés comme on peut le voir à la figure 2 pour la pêche dans
le détroit de Northumberland, dans la zone de pêche 25, où l'exploitation
diminue à de faibles niveaux après les deux premières semaines de la saison à
cause du taux initial de capture très élevé.
![Fig 2 a.](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig2a_f.jpg)
Fig 2 a) Tendances historiques des captures dans le
détroit de Northumberland et la zone 23
![figure 2 b.](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig2b_f.jpg)
Fig 2 b) Tendances de la saison de pêche d'automne (ZPH
25) comparativement à la saison printanière
Pour les zones statistiques 70, 71 et 73, la meilleure estimation du taux de
pêche actuellement est celle de la ZPH 23 dans son ensemble au printemps, soit
des captures correspondant à 75 à 85 % du stock au cours d'une saison de 61
jours. Ce résultat est obtenu dans les zones statistiques 70, 71 et 73 par 203
titulaires de permis (dont 17 de Burnt Church), chacun levant généralement 300
casiers par jour. Puisqu'environ 20 % des homards de taille exploitable ont
survécu à la pêche de l'année précédente, la plus grande proportion des captures
chaque année est composée de nouvelles recrues qui ont accédé à la population
exploitable au cours de l'été.
![Fig. 3](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig3_f.jpg)
Fig 3: Illustre le cycle caractéristique de températures
saisonnières dans le sud du Golfe et les deux saisons à l'étude.
Plusieurs facteurs déterminent le niveau de mortalité par pêche et ses
fluctuations d'une saison à l'autre; l'annexe II en donne quelques détails.
Comme on peut le voir à la figure 3, les homards seront très sensibles à la
surexploitation en raison des températures élevées de l'eau qui favorisent
l'activité trophique, les homards se concentrant à forte densité dans des eaux
côtières facilement accessibles. Ils se nourriront activement pour refaire les
réserves d'énergie qu'ils ont dépensées pendant la période antérieure de mue et
de ponte, et leur désir de pénétrer dans les casiers est évident d'après les
inspections par les agents des pêches des captures par casier pendant les
premiers jours de la saison d'automne. Comme on le note à l'annexe I, les
captures par casier atteignent en moyenne de six à neuf fois ce qu'elles sont au
début de la saison du printemps. Un taux aussi élevé que 9:1 ne semble toutefois
pas s'appliquer à toute la saison et Tremblay (2001) a pu déterminer que la
vulnérabilité des femelles était plus grande à la fin du printemps qu'en
septembre; il en va de même pour les femelles de taille commerciale par rapport
aux plus petites.
Les travaux antérieurs sur le comportement du homard de McLeese et Wilder
(1958) (voir la figure 4) ont indiqué que la vitesse de déplacement du homard et
sa vulnérabilité face aux casiers augmentent de façon linéaire avec la
température, conclusion qui a été confirmée par les expériences sur le terrain
de Paloheimo (1963). En théorie, le coefficient de capturabilité peut être
décomposé en valeurs saisonnières selon un certain nombre de facteurs
déterminant le potentiel de capture du homard et l'annexe I propose une démarche
pour ce faire qui donne une valeur pour le ratio q de 5:1. Si l'on tient compte
de toutes les estimations du taux de capturabilité relatif, le ratio le plus
probable pour l'automne et le printemps diminue aux environs de 5:1 à 6:1. Je
préfère faire des calculs avec une échelle de ratio de 2,5:1 à 9:1 pour montrer
les effets de ce facteur, mais donner plus de poids aux valeurs en utilisant 5:1
ou 6:1.
![Fig 4.](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig4_f.jpg)
Fig 4: Illustre l'augmentation de l'activité et de la
vulnérabilité des homards parallèlement à la hausse de température (tiré de
McLeese et Wilder, 1958)
![Fig. 5.](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig5_f.jpg)
Fig 5. Fogarty (1984), montre comment, aux États-Unis, où il n'y a pas de
saison pendant laquelle la pêche du homard est interdite, les débarquements
varient en dents de scie selon la température de l'eau : la plupart des homards
sont capturés pendant l'été-automne tandis qu'ils sont le plus vulnérable.
![Fig. 6.](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig6_f.jpg)
Fig 6: Illustre les concentrations de homards pendant
l'été-automne tandis qu'ils se déplacent vers les eaux côtières plus chaudes.
Cette forte densité les rend plus vulnérables.
Avec deux saisons de pêche au cours de la même année et de nouvelles recrues
qui muent avant la pêche d'automne, mais pas avant celle du printemps, il est
facile de montrer que, du point de vue du rendement et avec le même nombre de
casiers à l'automne qu'au printemps (ce qui n'est pas le cas actuellement), plus
de 80 % des prises annuelles totales de homard se feront au cours de la saison
d'automne. Cette hypothèse semble confirmée même si on adopte un rapport de
capturabilité relativement prudent de 2,5 entre l'automne et le printemps. La
figure 5, tirée de Fogarty (1984) pour la pêche aux États-Unis où il n'y a pas
de période pendant laquelle la pêche est interdite, illustre comment les
débarquements et la température atteignent un sommet parallèlement au cours de
l'été et au début de l'automne. Il est évident alors que s'il n'y avait pas de
saison de pêche du homard, la plupart des prises dans ce secteur se feraient
vers le milieu ou la fin de l'été et à l'automne. Les captures seraient
composées d'une proportion importante de homards à carapace molle, en plus
mauvais état que pendant la pêche du printemps (bien que selon Fogarty, le taux
de prise est inférieur pendant la période de la mue). L'autre danger d'une
saison automnale est que les homards sont concentrés sur une plus petite
superficie, à de fortes densités, et sont donc plus vulnérables, de sorte que le
stock risque d'être gravement décimé si le nombre de casiers est
accidentellement ou délibérément trop élevé.
Tableau 1 : Une simulation permet de suivre un groupe de
homards qui accèdent à la population exploitable à l'automne pour la première
fois, au cours de trois années avec double saison de pêche. On suppose le même
nombre de casiers à l'automne et au printemps (pour les zones 70, 71 et 73)
comme le propose le plan de gestion de Burnt Church. On suppose aussi que la
capturabilité à l'automne est de 2,5 fois celle du printemps (voir les détails
de ces hypothèses à l'annexe 2).
|
Intervalle |
Nombre initial |
Nombre final |
Nombre de captures |
Ratio des captures automne/ printemps suivant |
Saison d'automne (1) |
0,214 |
100 000 |
27 935 |
71 803 |
|
Fermeture en hiver |
0,496 |
27 935 |
26 584 |
|
3,58 |
Saison du printemps (2) |
0,167 |
26 584 |
6 512 |
20 032 |
|
Fermeture en été |
0,126 |
6 512 |
6 430 |
|
|
Saison d'automne (2) |
0,214 |
6 430 |
1 796 |
4 617 |
|
Fermeture en hiver |
0,496 |
1 796 |
1 709 |
|
3,58 |
Saison du printemps (3) |
0,167 |
1 709 |
419 |
1 288 |
|
Fermeture en été |
0,126 |
419 |
413 |
|
|
Saison d'automne (3) |
0,214 |
413 |
116 |
297 |
|
Si l'on applique le même niveau d'effort de pêche et le même nombre de levées
de casiers aux deux pêches, printemps et automne, le pourcentage annuel de
captures de la saison d'automne serait d'environ 80 %. Cette proportion vient
confirmer ce qu'ont indiqué antérieurement les spécialistes du homard, soit que
des saisons au printemps et à l'automne au cours desquelles on utiliserait le
même nombre de casiers, se transformerait en réalité une saison d'automne, parce
que cette dernière est très efficace et permet d'« intercepter » un pourcentage
élevé de homards ayant nouvellement mué, avant la pêche du printemps de l'année
suivante. Bien sûr, il serait possible de réduire le taux d'exploitation à
l'automne en diminuant le nombre de levées de casiers. En fait, le nombre de
casiers utilisés par permis a été établi pour la saison du printemps et, comme
nous l'avons indiqué, devrait être réduit à 50 ou 60 par permis pour la pêche
d'automne si l'on voulait arriver répartir équitablement les prises par permis
au cours des deux saisons.
Il doit être évident, d'après ce qui précède, qu'une pêche commerciale à
grande échelle à l'automne n'est pas compatible avec une pêche semblable au
printemps. Les 5 600 casiers, s'ils sont relevés chaque jour (ce qui n'est
probablement pas tout à fait le cas) pendant la saison d'automne proposée,
entraînerait inévitablement une diminution des captures au cours de la saison
printanière suivante. Évidemment, les pêcheurs non autochtones qui ont adopté
des pratiques de pêche responsables, comme l'aménagement d'orifices de sortie,
la réduction volontaire du nombre total de casiers utilisés à 300, etc., auront
des raisons légitimes d'être préoccupés si ces valeurs sont dépassées, car leurs
permis de pêche du homard (sans parler de l'investissement dans les bateaux) qui
constituent tout au moins des droits de quasi-propriété auront perdu de leur
valeur réelle en quelques saisons.
La mortalité par pêche a été estimée par Lanteigne et autres (1998) à un taux
annuel équivalent à 70 à 85 % aux conditions actuelles de 61 jours de pêche
printanière. Je ne vois aucune raison de mettre en doute cette estimation qui
n'est pas très différente de celle que j'ai trouvée pour les années 1970. Elle
correspond à un nombre approximatif de 300 casiers relevés dans la baie
Miramichi par chacun des 203 titulaires de permis au printemps, ou à 60 900
casiers et à un maximum de 3,776 millions de levées de casiers. La Première
nation Burnt Church propose d'utiliser 15 000 casiers au printemps et 5 600
pendant une saison de 78 jours à compter de la troisième semaine d'août jusqu'à
la fin d'octobre. Le total des casiers prévus pour le printemps par la Première
nation ne pose pas de problème, puisque leurs permis remplacent tout simplement
ceux qui sont retirés aux pêcheurs non autochtones. Les préoccupations viennent
surtout du nombre de casiers utilisés à l'automne. Tel qu'il est indiqué
ci-dessus, à l'automne, une proportion imprécise du nombre de nouvelles recrues
et la proportion relativement faible de homards de taille commerciale qui ont
survécu à la pêche du printemps précédent seront capturés. Ainsi, nous devons
étudier les effets de la saison d'automne proposée sur le nombre de homards
ayant récemment mués et estimer la proportion de survivants qui pourront feront
partie de la population exploitable au printemps suivant.
![Fig. 7.](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig7_f.jpg)
Fig 7 : Illustre les principales zones dans la baie
Miramichi et (7 b) le triangle dans lequel l'effort de Burnt Church a été
concentré en 2001.
Un calcul rapide a été fait au moyen des 5 600 casiers proposés dans le plan
de gestion de Burnt Church, qui seraient utilisés exclusivement pendant la
saison d'automne, en supposant qu'ils soient utilisés n'importe où dans les
zones 70, 71 et 73; les résultats sont indiqués ci-dessous. Rappelons qu'il est
peu probable que les pêcheurs d'automne de la Première nation de Burnt Church
pêchent dans les zones côtières de toutes les zones statistiques 70, 71 et 73 et
au-delà; de fait, leur pêche à l'automne a été surtout confinée aux zones 1 et
2, dans la baie (figure 7a), et il serait probablement impossible d'utiliser
autant de casiers dans le triangle proposé par le MPO l'année dernière (figure
7b). Ainsi, les répercussions réelles de leur pêche peuvent être réduites en
proportion de la superficie des fonds (et probablement de l'aire du stock) où
ils pêchent, par rapport à la totalité de la superficie côtière des zones
statistiques 70, 71 et 73. En fait, les agents des pêches ont observé très peu
d'activité à l'automne de l'autre côté du chenal de Burnt Church, de même que
sur la côte en dehors de la baie.
Tableau 2 : Calcul provisoire du déficit au printemps si
l'on suppose des ratios de vulnérabilité différents en fonction de l'effort
soutenu de pêche aux casiers à l'automne et au printemps, et des proportions
différentes du stock capturable par Burnt Church.
Ratio q : |
Tout le stock entre dans la zone de Burnt
Church à l'automne |
Un tiers du stock entre dans la zone de Burnt
Church |
Un quart du stock entre dans la zone de Burnt
Church |
2,5 : 1 |
40,7 % |
30,3 % |
22,7 % |
6 : 1 |
71,5 % |
33,2 % |
24,8 % |
9 : 1 |
84,8 % |
33,3 % |
24,9 % |
Comme l'indique le tableau 2, selon le facteur d'augmentation de q, ce calcul
pose initialement comme hypothèse, probablement incorrecte, que tous les homards
des zones 70, 71 et 73 se déplacent vers la zone côtière au large de Burnt
Church, et tente ensuite de corriger cette erreur. L'hypothèse incorrecte selon
laquelle tous les homards de la saison printanière dans les zones statistiques
70, 71 et 73 entrent dans la zone exploitée à l'automne par Burnt Church,
signifierait que les captures combinées du printemps suivant dans ces zones
statistiques baisseraient de 41 % si le ratio q était de 2,5. Elles
diminueraient d'à peu près 72 % si le ratio q est de 6 ou plus. Tel qu'indiqué,
cela suppose une situation improbable, soit que tous les homards du printemps
sont visés par l'effort des pêcheurs de Burnt Church, effort qui, actuellement,
est concentré principalement dans une petite portion du nord de la baie
Miramichi. En fait, la pêche ne vise pas tous les homards qui font partie de la
population exploitable au printemps dans les zones statistiques 70, 71 et 73, de
sorte que le déficit sera plus limité. Il est possible de s'attendre à un
déficit printanier du quart ou du tiers des captures du printemps sans pêche
d'automne : les données ne sont pas suffisamment fiables pour être plus
précises. Comme il est indiqué ci-dessus, les résultats dépendent en grande
partie d'hypothèses au sujet de la proportion de homards pêchés au printemps qui
font partie de la population exploitable ciblée par les Mi'kmaqs à l'automne. Il
faut aussi se garder de ne pas choisir l'un ou l'autre des ratios q parce qu'il
contribue à prouver son point : les ratios de 5:1 ou 6:1 semblent les plus
probables.
Un certain nombre de correspondants ont mentionné que les stocks de homards
pouvaient être en période de déclin. C'est ce qui s'est certainement produit au
milieu des années 1990 (figure 2a) et se continue probablement. Dans ce cas,
toute réduction attribuable à une pêche à l'automne pourrait être supérieure à
ce qui est prévu ici ou, vice versa, si le stock augmente en raison
d'améliorations climatiques, la diminution pourrait être moindre. Il faut
comprendre que ce genre de calcul est valable « si toutes les autres valeurs
demeurent constantes », mais sa pertinence à mon avis n'est pas invalidée par
cet aspect. De même, les tempêtes qui ont repoussé les homards vers les côtes à
l'Î.-P.-É. ont été citées au nombre des causes possibles de la baisse en 2001.
Il faut se demander ici si les événements survenus à l'Î.-P.-É. ont un effet sur
les prises dans les zones statistiques 70, 71 et 73 (dans l'affirmative, nous
devons admettre que les aires du stock sont plus grandes que le seul secteur du
Nouveau-Brunswick), mais la réponse ici, à mon avis, est fondamentalement la
même que pour les commentaires sur la tendance à long terme. Il faut être
prudent lorsqu'on explique des changements de la pêche à court terme par des
changements dans les pratiques de gestion.
Si l'on pêche dans les eaux côtières des zones 70, 71 et 73, il y aura
évidemment une incidence importante sur la fécondité de la population selon le
plan de Burnt Church. Ce sera dû, en partie, au taux de mortalité due à la pêche
indiqué au tableau ci-dessus, car le nombre de sujets dans la pêche printanière
sera réduit selon la proportion de la quatrième colonne. L'incidence sur la
fécondité de la population par rapport au taux de survie des femelles (et non
leur production d'oeufs, qui n'est pas évaluée) présentera, en gros, les mêmes
proportions que ci-dessus.
Permettez-moi d'aborder la question de la réglementation selon la taille et
l'âge en général. J'ai, en effet, l'impression que les spécialistes des espèces
ne sont pas conscients, souvent, de la pertinence de l'expérience de la pêche
d'autres espèces et dans d'autres secteurs. En général, la réglementation des
pêches dans l'Atlantique Nord suit la méthode de Beverton et Holt (1956), fondée
sur la taille, qui vise à élever la taille minimale limite et à accroître,
partant, le rendement par recrue, et juge acceptable la pêche après la première
fraie. Les adultes de grande taille et les invertébrés sont visés par
l'exploitation. L'expérience de la pêche dans l'Atlantique Nord, selon ce
paradigme, est en général peu réjouissante, malgré l'imposition de quotas et la
limitation des permis de pêche. Par comparaison, la pêche des juvéniles d'une
espèce s'est maintenue et semble florissante, en dépit de l'absence de contrôle
des prises ou du produit tant que les adultes ne sont pas visés. La pêche au
homard s'en tient en général aux juvéniles. Aussi, selon le paradigme de
Beverton et Holt, son effondrement on aurait déjà dû avoir lieu. La pêche aux
juvéniles que j'ai étudiée récemment est celle de la merluche, en Méditerranée
(Caddy et Seijo, sous presse). J'en parlerai brièvement afin d'illustrer un
autre paradigme, mieux adapté à la pêche des juvéniles.
Notre modélisation des caractéristiques bioéconomiques de la pêche à la
merluche en Méditerranée visait à montrer que la décision de pêcher les femelles
d'un groupe d'âge de cette espèce suppose que leur reproduction a une valeur
moindre que leur valeur au débarquement. Si tel n'est pas le cas, mieux vaut
alors, logiquement, laisser les femelles matures se reproduire et prendre les
juvéniles. Cette approche s'appuie sur des travaux récents, fondés sur l'examen
du contenu de l'estomac des poissons en Mer du Nord et montrant que le nombre de
morts de juvéniles imputable à leur prédation par les plus vieux et d'autres
espèces est plus important que parmi les adultes, de sorte que beaucoup de
juvéniles n'atteignent pas la taille commercialisable. Afin d'évaluer la
contribution à vie d'une cohorte à la reproduction, nous avons additionné, pour
chaque groupe d'âge, la production totale d'oeufs à vie et un vecteur connu de
mortalité imputable à la pêche ou à des causes naturelles. Nous avons ensuite
évalué la proportion de géniteurs d'un groupe d'âge ayant contribué à la
production totale d'oeufs à vie à partir de cet âge par rapport à la production
totale d'oeufs de tous les groupes d'âge de l'espèce.
En supposant que la population soit stable, on peut utiliser une proportion
de la production totale d'oeufs d'un groupe d'âge pour calculer sa valeur
économique en divisant la valeur totale au débarquement de la pêche par le
pourcentage d'oeufs produits, et probablement produits dans l'avenir, par chaque
groupe d'âge. On obtient ainsi la valeur reproductive proportionnelle d'une
femelle de la cohorte évaluée en divisant la valeur de la cohorte par le nombre
d'individus qui la constituent, puis en comparant la valeur reproductive
déterminée d'une génitrice et sa valeur au débarquement. Si sa valeur
reproductive est supérieure, il est alors logique de conserver une bonne partie
des individus de ce groupe d'âge. Dans le cas de la merluche, nous nous somme
aperçu que l'équilibre se situait vers l'âge de 4 à 5 ans, ce qui laisse
supposer qu'il est acceptable de pêcher les femelles juste sous cet âge, alors
que la pêche des femelles plus grosses risque d'entraîner une diminution du
potentiel géniteur non compensé par une augmentation de la valeur au
débarquement. Ce genre d'argument, dira-t- on, n'est pas conforme à certaines
théories de recrutement du stock. Je suppose, néanmoins, qu'on s'entend pour
dire que la production d'oeufs est suffisamment faible dans le cas du homard,
dans les Maritimes, pour qu'une augmentation de celle-ci se traduise, tout étant
égal par ailleurs, par une augmentation linéaire du recrutement. Il me semble
que cette précaution est de mise dans les circonstances.
Je n'ai pas procédé à ce calcul pour la population de homards, car il
faudrait plus de données historiques et chronologiques que celles dont on
dispose, mais il vaudrait la peine qu'on s'en occupe. À première vue, en ce qui
a trait à la composition selon la taille, il est à peu près certain qu'après une
troisième mue dans le secteur de pêche, et peut-être avant, selon le taux de
survie jusqu'à la reproduction, les femelles plus âgées ont plus de valeur comme
reproductrices qu'au débarquement. Autrement dit, leur valeur afin de se
prémunir contre un éventuel déclin des stocks est probablement supérieure à leur
valeur au débarquement. Sans compter qu'elles jouent sans doute un rôle
important, comme mère, en favorisant un recrutement récent de qualité.
Pour déterminer les objectifs de gestion, on a surtout insisté, selon la
théorie traditionnelle de gestion des pêches, sur l'optimisation de l'extraction
de la ressource, en fixant des objectifs de rendement optimal soutenu ou de
rendement économique maximum. Ces objectifs sont propres, d'habitude, à une
gestion descendante, alors que les gouvernements, enclins au paternalisme,
fixent les règles à respecter et surveillent le partage du profit des pêches.
Cette approche est relativement peu féconde, d'autant plus qu'elle oppose les
pêcheurs et le gouvernement et supprime tout incitatif pour les pêcheurs à se
préoccuper de conservation. Résultat, l'effort de pêche continuera de
s'accroître au même rythme que les éventuels intervenants tenteront de
contourner les règlements (effet dit de crémaillère) vu que l'effort est
difficile à contrôler avec l'approche descendante.
La perspective actuelle pour la pêche côtière est plutôt celle d'une approche
ascendante, où les pêcheurs ont leur mot à dire quant à l'exploitation de la
ressource, mais où ils doivent aussi garder à l'esprit le principe de l'équité
entre les générations qu'illustre bien Berkes (1999) en parlant de la
conservation des forêts par les Ménominis. Ses propos pourraient servir de
devise à la pêche au homard : «... N'oublions pas que nous empruntons la forêt
(dans ce cas-ci le homard) à nos petits-enfants. » Nous devons nous demander si
le plan de gestion, axé sur la collaboration, préserve la capacité productive de
la ressource pour les futures générations.
D'autres objectifs conviennent-ils à la gestion de la pêche au homard ? La
priorité pourrait être notamment le maintien d'emplois rémunérateurs pour les
localités côtières. Au Nouveau-Brunswick, la pêche au homard a toujours été une
importante source d'emplois dans les collectivités côtières dans le contexte des
industries fondées sur l'exploitation des ressources.
Parmi les objectifs de gestion des pêches qu'on risque d'oublier, il y a
l'harmonie sociale, surtout lorsque deux groupes et plus partagent la même
ressource. Le conflit actuel en est un bon exemple. D'après mes discussions avec
les deux parties, bien des gens en ont assez de la situation et sont prêts à
faire des concessions raisonnables, sinon à la partie adverse, du moins pour
maintenir la ressource. On peut, toutefois, se demander si deux groupes et plus
peuvent pêcher en harmonie, selon des modes d'exploitation saisonnière ou des
règlements différents ? L'application de la décision dans l'affaire Marshall
afin d'accroître l'accès des Premières nations à la pêche commerciale du homard
passera, à mon sens, par l'élargissement de la pêche au printemps, mais à
condition d'offrir des solutions de rechange appropriées aux pêcheurs privés de
leur gagne-pain, en reconnaissance de leurs droits actuels.
Une pêche importante au homard en automne, telle est ma conclusion, aurait
certainement d'importantes répercussions sociales et économiques et favoriserait
le désordre. Pour préserver l'harmonie sociale, il faut limiter cette pêche et
s'en tenir à une utilisation limitée des produits transformés lorsque cela
favorise l'emploi à Burnt Church, comme dans le cas d'un casse-croûte où on
servirait du homard aux touristes dans la réserve (voir ci-après). L'entente
d'une durée de trois ans avec la nation de Burnt Church en vue de réduire
progressivement la pêche en automne devra prévoir, en compensation, d'autres
sources d'emplois d'ici la délivrance de permis additionnels, en vertu de
l'entente, pour la pêche au printemps. Cela pourrait se faire par la création
d'emplois rémunérés fondés sur l'exploitation des ressources de la baie
Miramichi dont on reparlera plus loin.
Il faut absolument examiner aussi la question des droits d'accès dans un
secteur de pêche limité au cours des discussions et se demander si les droits
accordés doivent être individuels ou communautaires.
L'accès à la ressource de homard est un droit de fait, dans les Maritimes,
lié à une centaine d'années de pêche par les non- autochtones et une période
d'exploitation plus longue encore à petite échelle par les Premières nations.
L'exercice des droits de pêche commerciale s'est déjà fait en collaboration avec
le gouvernement, dans le cadre de comités de gestion du homard, selon une
approche dite de cogestion. Des droits d'accès géographiques sont également
accordés, du moins dans les arrondissements de pêche au homard, aux titulaires
de permis dans chaque arrondissement, mais ils ne font pas l'objet d'une
distinction par zone statistique. La question est de savoir si l'on peut
logiquement envisager des droits sectoriels restreints plus uniformes accordant
aux localités un rôle plus important quant à la façon dont elles pratiquent la
pêche. Si cette approche se concrétise, elle mettra fin à l'inertie qui empêche
les collectivités dynamiques de progresser, sans la « tyrannie des masses » qui
complique le passage à une gestion des ressources communes. Les collectivités
qui désirent investir afin d'accroître la productivité de leurs ressources
doivent pouvoir le faire avec raison, à condition que cela ne nuise pas au
localités voisines. Cela permettrait des activités dans le domaine de
l'exploitation des ressources ou de l'amélioration de l'habitat. On trouvera la
description de ces avantages plus loin dans le rapport.
L'argument qui est opposé à l'amélioration de l'habitat s'appuie sur la
migration du homard, qui limite les avantages à accroître la production locale
ou à accroître la production locale de larves. Malgré les migrations parfois
plus longues des homards adultes, les migrations saisonnières entre les eaux
côtières et le large n'entraînent probablement pas un déplacement indu des
stocks locaux, surtout si des aménagements locaux offrent un refuge au homard.
Ces échanges, fréquents dans les collectivités voisines, sont généralement
réciproques. Pourvu que les migrations soient graduelles, de solides arguments
favorisent l'exercice des compétences locales sur les ressources en eaux peu
profondes, sous la surveillance et avec les conseils du gouvernement. Cela ne
s'applique pas uniquement à la collectivité de Burnt Church, même si tel est
l'objectif principal du présent rapport.
Selon Dick Wilder, principal responsable, des années 1950 jusque dans les
années 1970, de la collecte et de l'analyse des données sur le homard dans les
Maritimes et ayant mené de vastes campagnes de marquage au printemps, la
migration des individus capturés plus d'une fois dans la même saison ou repris
la suivante est relativement faible (Wilder, 1963), leur déplacement étant, en
moyenne, d'environ 7 milles par année. D'autres données, tel l'écart de
croissance entre les homards de l'intérieur et de l'extérieur du détroit de
Northumberland, appuient la thèse voulant qu'une fois le fonds peuplé, les
longues migrations sont relativement limitées dans un secteur de pêche. Cette
expérience présente toutefois un sérieux inconvénient lié au fait que les
déplacements, sauf au printemps, sont impossibles à détecter. Des expériences de
marquage récentes semblent confirmer ces résultats préliminaires, qui indiquent
de très faibles déplacements dans le golfe, accompagnés de migrations
saisonnières entre les eaux côtières et le large.
Des preuves indirectes, confirmées par la pêche d'automne à Burnt Church,
indiquent une migration saisonnière du homard dans les eaux profondes, à la fin
de l'été, suivie d'un retour dans les eaux peu profondes à la fin du printemps,
mais pourquoi ? Dans les eaux profondes du détroit, les migrations sont
peut-être plus marquées, sans doute en partie à cause des sédiments fins du
fonds marin, de sorte que le homard y trouve peu d'endroits où s'abriter, d'où
sa tendance à migrer. De plus, l'état des glaces, en hiver, l'oblige, on
présume, à quitter les secteurs peu profonds du détroit pour les eaux plus
profondes, aux extrémités. On ne sait cependant pas grand chose de la
distribution du homard et de ses activités en hiver, dans le Golfe, ni des lieux
de ponte des homards qui vivent dans le détroit.
Malgré ces mystères, tant que la pêche se fera surtout au printemps, le
homard aura tendance apparemment à rester ou à retourner dans les mêmes secteurs
au fil des ans. Résultat, même si l'on n'a pas repéré de stocks génétiquement
distincts dans le Golfe, il n'y a pas de raison pour ne pas organiser les
secteurs de pêche au homard autour des localités. Pour ce qui est de la
cogestion, Berkes (1999) renvoie au « principe de la subsidiarité » voulant
qu'on s'appuie, le plus possible, sur une gestion locale et que sur la
réglementation gouvernementale qui s'impose. La gestion communautaire permet aux
localités de décider de l'attribution des avantages, conformément aux
orientations techniques du MPO. Le gouvernement pourrait donner ces conseils par
l'entremise des comités régionaux sur le homard suggérés par le CCRH, mais il
faut absolument favoriser la formation de compétences indépendantes. Cette
gestion communautaire différera du système en trois points que décrit le CCRH
dans son rapport :
1) le comité consultatif sur le homard (auquel participe les pêcheurs)
recommande l'adoption de mesures dans la Loi sur les pêches.
2) le gestionnaire régional des ressources (MPO) ébauche un plan de gestion
du homard.
3) le directeur général régional (MPO) approuve le plan.
La gestion communautaire permet diverses approches, dont certaines figurent
dans le rapport technique 404 de la FAO, Use of Property Rights in Fisheries
Management, publié sous la direction de Ross Shotton. Ces approches se
caractérisent par une prise de décision et une planification locales appuyées
par un organe consultatif du gouvernement et accompagnées d'un cadre évitant les
effets négatifs pour d'autres collectivités.
Il faudra faire plus à l'échelle locale si l'on veut que les collectivités ou
d'autres groupes puissent en arriver à une autogestion efficace. (Voir l'étude
de Harvey et Coon réalisée à ce sujet, en 1997, au Nouveau- Brunswick). Faisant
état d'une situation, en Nouvelle-Zélande, où l'on a suivi cette démarche et
restitué aux Maoris une bonne partie de leurs droits de pêche, Harte (2000) fait
observer que les associations de détenteurs de droits ou les groupes de gestion
locaux doivent :
- fixer les objectifs de gestion et les mesures de rendement;
- préciser les règles de gestion et de gouvernance;
- déterminer les services nécessaires (recherche, administration,
surveillance, maintien de la conformité) et passer des ententes de
financement.
Après l'adoption d'un plan de gestion, les détenteurs de droits doivent :
- gérer les mécanismes de prise de décision;
- acquérir des services de recherche;
- gérer l'accès;
- surveiller les pêches;
- offrir des services d&39;information et d'éducation;
- veiller à l'application de règles (nature non criminelle);
- prélever des droits pour financer la gestion.
Il s'agit là, bien entendu, d'un immense défi pour les petites collectivités
locales. Mais une approche de gestion mixte permettant au MPO d'offrir ces
services aux gestionnaires locaux est probablement la bonne façon de faire, si
c'est possible du point de vue administratif.
Est-il avantageux de créer des refuges côtiers pour les femelles oeuvées ?
Nous avons fait observer que la dispersion environnementale peut être la
cause d'un éventuel déclin du recrutement des homards. Il est d'ailleurs
significatif que les homards de la zone 23 soient près de la limite nord de
l'aire de l'espèce. Comme d'habitude pour la plupart des espèces soumises à ces
conditions, la faible température de l'eau (observée plus au sud par Fogarty, en
1984, et imposant une contrainte à la production de homards) risque d'être ici
un facteur déterminant. En effet, le homard passe par quatre stades au cours de
sa vie dans le plancton et s'établit au fonds à son quatrième stade. Les données
collectées par Scarratt (1964) dans le Détroit de Northumberland révèlent un
écart important quant au moment de libération des larves du stade I dans le
plancton. Toutefois, les dates d'occurrence des larves, au stade IV, tendent à
évoluer, comme on peut s'y attendre, vers la fin de la période où l'eau est
chaude. Mon analyse, dans les années 1970, des données de Scarratt en me servant
des résultats de laboratoire d'un des premiers biologistes canadiens à s'être
intéressés aux pêches (Templeman, 1936) portait sur le développement des larves
selon le cycle des températures saisonnières et le nombre de degrés-jours
nécessaire des stades I à IV. Ce nombre permet d'évaluer approximativement la
chaleur dont elles ont besoin à chaque stade de leur développement. On l'obtient
en multipliant le degré de température par le nombre de jours. Cette étude
(Caddy, 1979b) a confirmé que dans bien des cas, au premier stade, les larves
libérées pendant l'été ont besoin pour s'établir au fonds, pendant leur
métamorphose, au milieu du quatrième stade, en raison de la baisse de
température à la fin de l'été, d'un nombre de degrés-jours supérieur à celui qui
leur est offert. Le peu de chance pour les larves libérées à la fin de l'été
d'atteindre le quatrième stade avant la fin de l'été et de venir s'ajouter à la
population résultait de la baisse rapide de température de l'eau à la surface,
après juillet et août.
La température froide de l'eau à la surface, certaines années, peut également
réduire le taux de survie, au premier stade, des larves produites après juin.
Scarratt a montré que la survie des larves varie beaucoup et est maximale les
années où leur production est élevée. L'importante thermocline, au cours des
années chaudes, entre l'eau froide du fond et l'eau chaude de la surface est
également un facteur. Ce qui peut signifier que les femelles vivant dans les
eaux froides, sous la thermocline, ne peuvent savoir si l'eau, à la surface,
présente des conditions optimales pour le développement des larves. Le
développement et la ponte des oeufs risquent donc d'être retardés, en dépit de
conditions propices dans le plancton. Nous pouvons conclure, pour le moment, que
la longue période de libération des larves, l'été, sert de mécanisme de sécurité
en cas de situations de mauvaise prédictabilité quant au moment optimal de leur
libération, qui se traduit par une perte élevée parmi les larves libérées plus
tard dans la saison.
Nous croyons que les grosses femelles libèrent peut-être plus de larves
viables que celles qui en sont à leur première ponte, d'où leur importance,
semble-t-il, les années où la température est sous la moyenne ou lorsque le
printemps retarde. En général, le Golfe semble présenter un avantage en
accélérant le développement des oeufs et des larves, probablement parce que les
femelles porteuses d'oeufs ayant survécu à la pêche du printemps migrent dans les
eaux peu profondes, plus chaudes, au début de l'année. Cela laisse supposer,
pour pousser plus loin l'argument, qu'il est peut-être avantageux, lorsqu'on
rejette les femelles oeuvées à la mer, de le faire dans des eaux peu profondes au
début de la saison, à condition de bien manipuler les adultes et de ne pas
endommager leurs oeufs ou les exposer à de l'eau trop peu saline. L'une des
stratégies d'amélioration possibles de la ressource consisterait pour tous les
ports de pêche à créer une réserve ou un refuge en eau peu profonde (figure 7),
de préférence pas trop loin, pour faciliter la surveillance. Lorsque la
température des eaux côtières commence à se réchauffer, au printemps, on
pourrait alors y placer une certaine proportion de femelles oeuvées à la queue
marquée d'une encoche qui auraient été capturées vers la fin de la sortie, à
condition de le faire sans les exposer trop longtemps à l'air ou à une
température élevée, en rentrant au port. Ces refuges locaux sont faciles à
surveiller pour éviter la pêche illégale et l'on peut accroître leur capacité en
y plaçant des blocs de béton ou des parpaings créant des interstices
correspondant à la taille des grosses femelles.
![Fig. 8](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig8_f.jpg)
Figure 8 - Illustre le risque de diminution du taux de
survie des larves plus tard dans la saison, car elles ont besoin d'une certaine
température pour atteindre le quatrième stade et se métamorphoser. On peut
supposer que la libération des larves plus tôt dans la saison favorise un
meilleur taux de survie (Caddy, 1979 b).
Il est à peu près impossible d'évaluer les avantages nets qu'offre pour la
production de larves ce genre de mesure qui, pour le moment, doit d'abord faire
l'objet d'une étude expérimentale. Le but est d'en arriver à un stade larvaire
précoce et la conservation des femelles oeuvées qui s'ensuit logiquement. On
espère pouvoir réduire, en les plaçant dans un refuge, les captures répétées et
la libération d'individus marqués de grande taille, qui comportent un risque de
mortalité liée à la pêche. Ces réserves pourraient être le centre logique
d'expériences de marquage en été et en automne pour comparer les taux de
mortalité, de capture répétée et de migration des individus qui y vivent avec
ceux qu'on observe dans les secteurs de pêche. L'endroit idéal pour ce type
d'expérience est au large de Burnt Church, avec la participation de la
population locale aux expériences, sous l'égide du MPO.
Comme je l'ai dit, ce genre de stratégie d'amélioration au stade larvaire
doit d'abord être examinée attentivement au cours d'expériences sur le terrain.
Il faut étudier la survie et le moment de ponte des oeufs des femelles oeuvées
retournées au fond, près des côtes, après leur capture, après un séjour dans un
refuge côtier pendant diverses périodes, à différentes températures. Il faut
également comparer le stade de développement des oeufs selon la taille des
femelles et la profondeur où elles vivent.
Le cadre de conservation du CCRH insiste sur la nécessité de créer des
catégories selon une fourchette d'années pour les pêches et sur le fait que la
planification à ce sujet constitue un objectif en soi. Berkes donne l'exemple
d'une pêche où les Autochtones utilisent des filets maillants de deux
différentes grosseurs pour la pêche à l'omble, afin d'épargner les plus gros.
Selon lui, « l'effondrement de cette pêche est lié à deux facteurs : a) la pêche
sélective des plus gros a amené la population à dépendre d'un petit nombre
d'individus ayant l'âge de se reproduire, et b) une mauvaise fraie deux années
ou plus d'affilée ». Une suite d'années de mauvais recrutement comme celle- i ne
s'est pas produite récemment dans bon nombre de pêches au homard, mais on peut
affirmer que la marge de sécurité alors offerte par les individus reproducteurs,
quelle que soit la raison, est relativement faible.
Le marquage et le rejet à l'eau des grosses femelles, l'adoption de limites
de taille maximales pour protéger les grosses reproductrices ainsi que la
création de zones réservées, de refuges et de zones tampon entre les lieux de
pêches des ports voisins sont toutes des idées qui, à mon avis, méritent d'être
étudiées. Cela peut se faire localement avec la participation et le consentement
des collectivités qui accordent à leurs membres un accès exclusif qui justifie
ce genre de dépenses ou de sacrifices. Selon l'argument habituel à l'encontre de
ces activités, leur efficacité est impossible à déterminer, et leur rentabilité
négligeable. À mon avis, mieux vaut d'abord déterminer si elles sont possibles
avant de les rejeter sans en vérifier la valeur. C'est une autre bonne raison
pour suggérer la création de secteurs locaux de gestion du homard, parmi
lesquels certains pourraient être tentés d'essayer des idées que d'autres
collectivités pourraient ensuite examiner et adopter si elles sont convaincues
de leur efficacité.
Des études européennes de micro-marquage des très petits homards montrent que
les juvéniles passent par une phase importante au cours de leur prérecrutement
dans les interstices, sur les fonds couverts de galets, où ils sont à l'abri des
prédateurs. Toutefois, ces fonds sont rares sous la laisse de marée et assez peu
étendus. Si tel est le cas, leur faible superficie constitue peut-être une
entrave à la production de prérecrues, d'autant plus que leur comportement
agressif ne leur permet d'atteindre la densité élevée des langoustes juvéniles
(Arce et autres, 1997). On peut se demander si le fait de déposer des cages en
treillis métallique contenant des matériaux, tels des coquillages de mye, qui
forment de petits interstices sur le fond, à la bonne profondeur, entraînerait
une amélioration. C'est une question qu'on devra étudier dans le cadre d'une
expérience. Dans des endroits comme la baie Miramichi, le facteur contraignant
quant à l'abondance de juvéniles n'est probablement pas la nourriture, car la
baie présente un fort taux d'éléments organiques et de sédiments. (Buckley,
1995).
Comme je l'ai dit, la limite du recrutement tient peut-être à l'absence
d'interstices de la bonne grandeur.
Abordant certaines considérations théoriques, Caddy et Stamatopoulos (1990)
parlent de caractéristiques fractales différentes entre les habitats des
juvéniles et ceux des adultes. Ils proposent une approche expérimentale, dont un
échantillonneur d'interstices, pour détecter les entraves une fois que les
sujets se sont fixés. Il s'agit d'une structure constituée de tuyaux en béton ou
en PVC de diamètres différents, fixée à un cadre et comprenant un nombre donné
d'interstices de dimensions connues. Une inspection périodique permet de
déterminer la fréquence d'occupation des interstices de chaque taille. On peut
présumer que les interstices dont le taux d'occupation est le plus élevé
correspondent à la taille des homards qui manquent d'abris naturels de la même
dimension dans la mer et que cette taille coïncide avec une entrave naturelle à
la production de homards. Selon Beck (1995), cette théorie a donné des résultats
pratiques, en Floride, au cours d'études portant sur le milieu écologique du
crabe caillou et on pourrait l'adapter à une étude expérimentale du homard. De
fait, Lawton et autres (2001) font état pour la baie de Fundy de deux types
d'habitat vital pour le homard : les zones de reproduction où s'établissent les
petits homards, passant leur première saison sur le fond, puis les zones de
fraie en eau peu profonde où migrent les adultes pour se reproduire. La forte
densité de la population de homard dans la baie Miramichi en fait un endroit
idéal pour étudier les besoins en abris et en nourriture de même que
l'éventuelle prédation des juvéniles, d'où son intérêt pour les chercheurs, à
condition qu'il y ait des installations.
En ce qui a trait à la prédation, les études de Hanson et Lanteigne (2000)
indiquent que la morue n'est pas un important prédateur du homard. J'estime
néanmoins qu'il vaut mieux étudier les prédateurs possibles, tel le chaboisseau,
des jeunes homards dans les eaux côtières. Malgré cela, le nombre de gros
prédateurs dans le golfe est actuellement très faible chez les grosses espèces,
telle la merluche blanche, le poisson plat et la morue en raison de l'épuisement
des stocks. Peut-être est-ce une des principales raisons du bon recrutement de
homards ces dernières années. Puisque les zones rocailleuses offrant un abri
contre les prédateurs ne sont pas nombreuses dans bien des endroits, se peut-il
que les juvéniles délogés des interstices à l'issue de combats avec d'autres
juvéniles survivent là où ils auraient servis de pâture, les années où
abondaient les espèces de fonds ? Cette hypothèse est à confirmer, mais il
vaudrait la peine de vérifier dans l'estomac des prédateurs côtiers capturés au
moyen de palangres appâtées avec des homards juvéniles (ou peut-être des
crevettes) dans un habitat de juvéniles, pour voir si l'on peut évaluer leur
prédation. Selon une autre hypothèse, apparemment conforme aux faits, le hareng
serait aussi un prédateur du homard. Nous parlons des larves de homard, car on
sait que le hareng se nourrit, la nuit, dans les cinq mètres supérieurs de la
surface, où sont les larves. Or, le stock de hareng était faible, dans les
années 1990, période où le recrutement de homards était grand.
L'examen de l'estomac de harengs pour voir s'il contient des larves de homard
serait également intéressant.
Dans Sacred Ecology, Fikret Berkes résume quelques principes et approches
traditionnels qu'observent, souvent avec succès, les peuples autochtones dans la
gestion de leurs ressources, spécialement en eaux douces. Bien qu'il ne parle
pas de nette démarcation entre les pratiques autochtones et la science
occidentale, celle-ci procède par analyse réductionniste, en classant les
phénomènes selon de plus petites unités afin de les décrire exactement, sans
égard, en général, pour la situation écologique dans son ensemble. Souvent,
explique-t-il, «... les scientifiques tendent à écarter les explications qui ne
cadrent pas avec les leurs, y compris celles de collègues utilisant d'autres
paradigmes (voir Caddy, 1999). Il fait également observer que les exagérations
quant à la sagesse autochtone ont nui à l'étude des connaissances écologiques
traditionnelles. Autrefois, et encore aujourd'hui, parfois, l'économie
autochtone consistait en ce que nous considérons de nos jours comme une approche
écosystémique, qui perçoit l'environnement comme « un portefeuille de ressources
et de services propices à l'existence ». Par opposition, de poursuivre celui- i,
le colon « a fait de l'environnement un bien et exploité les ressources l'une
après l'autre selon la demande du marché, causant leur épuisement et la
détérioration de l'environnement ». L'histoire des pêches le long de la côte est
de l'Atlantique Nord est à cette image. Ainsi, les changements délétères dans le
secteur de la pêche à la morue qui ont amené le remplacement de la pêche
traditionnelle par la pêche industrielle sont, selon Hutchings (1998), des
indicateurs évidents de l'effondrement des stocks auquel on devait assister.
Voilà peut-être pourquoi faut-il défendre la prudence dans la gestion des
pêcheurs de homard si l'on veut maintenir la productivité de la ressource et
respecter leur opinion, car les Autochtones ne sont pas les seuls à se
préoccuper de l'intégrité de l'écosystème.
Les systèmes d'exploitation à bail des ressources renouvelables locales sont
très fréquents dans les collectivités rurales. Pour le secteur maritime, Christy
(1982) propose que les gouvernements reconnaissent de façon plus explicite les
droits territoriaux d'exploitation par les pêcheurs (TURF) locaux en améliorant
les systèmes de gestion tant au niveau individuel, où certaines pêches au homard
fonctionnent de cette façon, qu'au niveau des collectivités. On part du principe
qu'on peut ainsi trouver l'équilibre entre la ressource et le nombre
d'exploitants. Cette approche existe dans la nature et l'homme n'y fait pas
exception.
La gestion adaptée (Holling, 1978) des ressources naturelles reconnaît que
les écosystèmes évoluent et qu'il leur faut une capacité de récupération pour
éviter leur effondrement ou une perte de productivité. La création de nouveaux
secteurs de gestion locaux permet notamment d'examiner des approches différentes
et de retenir la plus stable ou la plus productive. Avec l'exploitation à bail,
la gestion adaptée permet de comparer diverses approches. Sans doute est-il
important et utile d'ajouter, à propos de la pêche au homard, qu'il n'est
peut-être pas nécessaire de pouvoir faire des prévisions de rendement
quantitatives (cette capacité n'existe pas pour la plupart des pêches), mais de
cerner les processus écosystémiques et de s'y adapter. Si l'on pouvait établir
que la production d'oeufs constitue le facteur contraignant, on pourrait recourir
à une ou plusieurs approches novatrices, telles la création de récifs servant de
refuges, la limite maximale de taille, le marquage et le rejet à la mer des
grosses femelles et la rotation des pêches.
On trouvera ci-après divers modes de gestion du homard possibles, ici ou
ailleurs, dans l'avenir. Si quelques-uns seulement ont une incidence immédiate
sur le règlement du litige de la baie Miramichi, ils présentent néanmoins un
intérêt général.
L'augmentation de la limite minimale de taille est la solution classique,
conformément à Beverton et Holt, et nul doute qu'elle favorise l'augmentation du
rendement et de la production d'oeufs par recrue parmi les individus qui en sont
à leur première mue. Je crains toutefois que cette mesure ne soit inacceptable
pour les pêcheurs pour le moment. Même si elle permet, selon de nombreuses
études, d'accroître le rendement, elle risque en effet d'exercer indirectement
une pression sur les femelles plus âgées, essentielles, à mon avis, au
renouvellement du stock. Pour les Îles-de-la Madeleine, Gendron et Gagnon (2001)
concluent qu'une augmentation de la taille minimale est nécessaire pour doubler
la production d'oeufs par recrue, mais que des mesures pour protéger les grosses
femelles (plus de 127 mm CL) risquent moins de nuire à l'atteinte de l'objectif
: accroître la production d'oeufs.
La seule suggestion que je puisse faire, si l'on opte pour une augmentation
importante de la taille minimale des homards pêchés au printemps au lieu de
l'accroître de quelques millimètres par année pendant plusieurs années, est de
viser une augmentation plus substantielle grâce à une stratégie du genre de
celle qui est exposée plus bas. Étant donné le fort taux d'exploitation, l'ajout
d'au moins une mue est possible en permettant une courte saison de pêche au
printemps, selon l'ancienne limite, au cours de l'année du changement, suivie,
l'année de la mue, d'une courte période de pêche à l'automne selon la nouvelle
limite, puis d'une saison normale l'année suivante, également selon la nouvelle
limite. Sans doute, les revenus seront-ils inférieurs au cours de l'année ayant
deux saisons de pêche et le printemps suivant, mais la perte sera rapidement
compensée l'année suivante. Ce serait une mesure utile pour l'avenir, mais je ne
suis pas convaincu que ce soit la priorité pour le moment.
Selon cette possibilité, un certain pourcentage de homards plus âgés du
refuge échappe aux pêcheurs. Cette approche permet de réduire un peu le taux
d'exploitation sans grande perte de rendement, mais devrait avoir un effet
positif sur la production d'oeufs, et ce même si le nombre de casiers utilisées à
l'extérieur du refuge reste le même. Nous devons connaître, bien entendu, le
taux de migration des homards du refuge vers les lieux de pêche. Puisqu'il
devrait être d'au moins 10 à 20 %, on devrait donc capturer bon nombre de
homards du refuge, mais leur taille et leur rendement individuel seraient
probablement supérieurs à ceux des zones voisines restées ouvertes. Il se peut
donc, dans l'avenir, que la perte de rendement à court terme liée à la
fermeture, disons, de 10 à 20 % des secteurs soit compensée par un taux plus
élevé de homards de premier choix dans les prises. Mieux, il en résultera une
amélioration du recrutement mais aussi, comme le montre une simulation, une
augmentation de la production d'oeufs et, ce qui est peut-être tout aussi
important, de l'âge moyen des géniteurs.
![Fig. 9.](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig9_f.jpg)
Figure 9 - Les endroits où l'effort de pêche est exercé
depuis des ports voisins sont peut-être les plus propices à une fermeture pour
en faire des zones tampons. On pourrait fermer des secteurs faciles à surveiller
sur la côte, près des ports, pour y déposer des femelles oeuvées et y aménager
des récifs artificiels.
La fermeture de zones de pêche n'a pas été très efficace en raison 1) de leur
superficie, 2) de la pêche illégale à l'intérieur de celles-ci et 3) de leur
faible capacité à retenir les homards (Caddy 2000). L'augmentation de la
capacité à retenir les gros homards par l'aménagement de récifs artificiels
servant de refuges est une approche prometteuse. En effet, ces refuges peuvent
servir, selon Caddy et Carocci (1999), au maintien d'une faible population de
gros reproducteurs, mais également de zones tampon entre secteurs où l'effort de
pêche s'exerce depuis des ports voisins. Cela suppose, toutefois, si l'on opte
pour la gestion communautaire, l'autogestion partielle par les pêcheurs locaux
des secteurs fermés, en accord avec le comité de gestion du homard dans
l'arrondissement. On a critiqué cette approche, car les sous-secteurs gérés
localement ne correspondent pas à un stock unitaire - une observation qui
s'applique malheureusement à la plupart des ressources côtières - et exigent une
coordination locale entre les secteurs voisins. Elle se prête néanmoins, comme
je l'ai fait observer, à l'essai de divers modes de gestion et favorise les
activités de mise en valeur.
L'objectif visé par la gestion fondée sur la création de refuges est
d'accroître la proportion de gros homards (et pas seulement des femelles, car il
faut aussi de gros mâles pour l'accouplement). Comme je l'ai suggéré, les
secteurs fermés peuvent servir de zones tampons entre les lieux de pêche des
collectivités ou des ports voisins, qui doivent veiller dans une certaine mesure
à leur intégrité, ou bien des zones exclusives près des ports, là où elles sont
faciles à surveiller (figure 9). On ne doit pas chercher à utiliser les données
actuelles pour évaluer les effets de cette solution. Celle-ci pourra néanmoins
servir à démontrer la possibilité d'accroître considérablement la capacité de
reproduction en ne fermant que 10 à 20 % des secteurs de pêche.
Des variantes de ce genre de mesure seront la meilleure façon d'assurer une
production d'oeufs élevée et viable. Des études récentes menées à l'aide de
trémails (Lanteigne et Tremblay, 2001) montrent la présence d'individus
atteignant 150 mm, trop gros pour entrer dans les casiers. Rejeter à la mer,
comme on le pratique actuellement, des femelles oeuvées est une bonne méthode, et
faire une encoche dans la queue de 50 % des femelles oeuvées favorisera le rejet
des grosses femelles, même non porteuses d'oeufs. D'après Aiken et Waddy (1980),
les petits mâles même matures ne peuvent s'accoupler avec les grosses femelles.
Une réglementation plus simple selon la taille maximale, comme on le voit plus
bas, est néanmoins possible.
La façon la plus facile à appliquer et la plus équitable tout en limitant les
dommages causés par la manipulation des prises même lorsqu'on les remet dans
l'eau serait de limiter la pêche aux homards des trois premières mues ayant la
taille légale. Autrement dit, ne prendre que ceux mesurant 67,5 mm CL et plus ou
ayant mué trois fois dans le secteur de pêche, c'est-à-dire dont la taille est
inférieure ou égale à 106 mm CL ou à peu près, qui ont 50 % de chance de ne
pouvoir entrer dans les casiers. Lanteigne et Tremblay (2001) ont étudié cette
question mais ne suggèrent pas de diamètre pour les cerceaux. Des expériences
seront donc nécessaires à ce sujet, en été, au large de Burnt Church. On ne dit
pas qu'il n'y a pas lieu de continuer à rejeter à l'eau les femelles oeuvées et à
faire une encoche dans la queue des femelles comme mesure d'appoint.
Le principe des récifs artificiels intéresse beaucoup de pêcheurs, mais
encore faut-il faire une distinction entre l'habitat des adultes et l'habitat
qui suit le moment où les jeunes se fixent. En général, on trouve surtout des
sédiments mous dans le sud du Golfe, mais même si les homards savent creuser des
trous dans le fond, ils aiment mieux le faire sous les rochers, sans doute pour
se protéger des prédateurs. On pourrait donc se demander, dans une étude de
marquage, si leur dispersion est une réaction au manque de protection. Les
homards marqués, vivant sur des fonds plats limoneux ou sablonneux, migrent-ils
d'avantage que ceux des fonds rocailleux ? Logiquement, tel devrait être le cas,
mais, à ma connaissance, cela n'a pas été vérifié. Il y aurait des implications
pratiques si une collectivité souhaitait conserver sa population de homard le
plus possible.
L'aménagement de récifs au large des ports (non, j'espère, pas pour la pêche,
mais pour servir de refuges) permettrait-il de garder les homards à l'intérieur
du secteur local ? Voilà une question que le marquage des homards et leur rejet
sur des fonds différents aideraient à résoudre. Pour les adultes, l'utilisation
à cette fin de cailloux naturels sur un fond plat sablonneux ou limoneux n'est
pas très efficace. L'aménagement d'interstices artificiels de dimension égale ou
un peu supérieure à celles des casiers serait sans doute préférable, mais il
faudra des essais préliminaires de formules différentes pour déterminer si ce
serait rentable ou possible. Étant donné l'attrait que présentent les casiers
pour les homards à la recherche d'un abri, il serait intéressant de déposer des
casiers non appâtés à côté de casiers appâtés pour évaluer la proportion de
prises attribuables aux appâts sur des fonds rocailleux et des fonds sans abris,
à titre de comparaison.
Des études récentes sur les stades post-larvaires du homard semblent réserver
des surprises, notamment la présence d'entraves au cours du stade suivant
l'établissement, dans le sud du Golfe, à cause de la rareté de fonds riches en
cailloux formant des interstices et offrant, on l'a vu, un habitat propice aux
juvéniles. Des expériences réalisées à l'aide de casiers métalliques remplis de
coquillages de mye et d'agrégats, déposés dans la zone infralittorale pour
favoriser les premiers stades suivant l'établissement, aideraient à savoir
quelles mesures de mise en valeur éviteraient le risque d'entraves au
recrutement. L'étude de la topographie des territoires du homard dans la baie de
Fundy semble être, dans ce cas-ci, une bonne approche. Pour les crustacés en
général, l'absence d'abris peut retarder la mue et la ponte des oeufs (Beck
1995).
Parmi les surprises, il y aussi le comportement agressif des jeunes individus
pour défendre leur territoire (Paillé et Sainte-Marie, 2001), de sorte que
l'idée d'aménager des habitats pleins de gros interstices pour accroître la
densité de juvéniles risque d'être moins efficace. En effet, un petit homard
agressif peut chasser ceux qui trouvent refuge dans les nombreux trous de ce
genre de dispositif, même s'il mesure environ 500 centimètres. Des abris de la
taille de ceux que recherchent les jeunes langoustes, plus grégaires, dans les
Antilles (Arce et autres, 1997), pourraient accueillir de nombreux juvéniles. Le
comportement agressif des jeunes homards d'Amérique constitue peut-être, en
fait, une entrave en soi, car la lutte pour le territoire risque d'entraîner une
diminution de la densité de juvéniles et son auto-régulation. Si la mise en
valeur est possible, on pourrait jeter des « casetas » de forme carrée ou bien
des agrégats de coquillages ou des collecteurs d'huîtres dans les endroits
sablonneux ou par ailleurs improductifs pour favoriser le recrutement du homard,
afin surtout de vérifier la valeur d'une idée comme piste de recherche. On ne
suggère pas, cependant, de le faire sur une échelle commerciale tant qu'il n'y
aura pas eu d'études pratiques ou bioéconomiques. C'est néanmoins le genre
d'expérience qui pourrait se faire à Burnt Church. Parallèlement, Sainte-Marie
et Chabot (2001) indiquent que les petits homards peuvent occuper de petits
interstices dans les terriers des adultes et se nourrir des restes de leurs
repas. Il n'est pas clair, cependant, si tel est toujours le cas ou s'il y a du
cannibalisme.
![Figure 10.](/web/20071115103837im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/communic/Marshall/related/caddy/images/fig10_f.jpg)
Figure 10 - Différence entre les habitats à faible coefficient fractal
propices à la croissance des adultes (à gauche) et les habitats à fort
coefficient fractal propices à l'élevage des juvéniles (à droite) (Caddy et
Stamatopoulos, 1990).
L'éventuelle capacité d'offrir un habitat au homard n'est pas considérée,
d'habitude, comme une contrainte pour la production, encore que ce genre de
contrainte pour les espèces nichant dans des interstices soit inévitable en
théorie, ainsi que l'indique Caddy (1986) et le décrivent Caddy et Stamatopoulos
(1990) (figure 9). D'autres pêches au homard ont fait l'objet de vastes études
sur le terrain quant à la possibilité d'entraves au recrutement, de sorte que de
plus en plus de faits démontrent l'existence d'entraves et que des mesures sont
en place pour améliorer les pêches par une plus grande abondance d'interstices
ayant les bonnes dimensions. On peut citer l'exemple de la pêche à la langouste,
à Cuba, où l'on utilise quelque 500 000 « casetas », sorte de cabanes à homard
constituées d'une dalle de béton d'un mètre carré maintenue de 5 à 10 cm
au-dessus du fond par une semelle, également en béton (voir à ce sujet Arce et
autres, 1999) et sous lesquelles s'abritent les langoustes (représentées par des
$) :
---------------1 $ $ $ $ 1------------------
Le résultat net a été une pêche qui (si ma mémoire est bonne) est passée, au
début des années 1990, d'environ 3 000 à quelque 10,000 tonnes. Cela ne signifie
pas que cette approche s'applique directement au Homarus americanus, une espèce
capable de nicher sur des fonds de fins sédiments (mais qui aime mieux le faire
sous des saillies ou des bloc rocheux). En même temps, de nouvelles expériences
et des observations sur le terrain permettent d'accumuler des faits quant à la
possibilité d'entraves peu après le recrutement, au fonds. Selon des études
européennes réalisées dans le sud de la mer du Nord, où les affleurements
rocheux sont rares, l'abondance de homards juvéniles est supérieure sur les
fonds couverts de galets offrant des interstices de la bonne grandeur, mais il
s'agit là d'un type de sédiment plutôt rare. Selon Wahle (1992), Rangeley et
Lawton (2001) et d'autres chercheurs, la répartition des sédiments dans la zone
infralittorale semble influer sur les densités de juvéniles. Il se sont servis
de la répartition des cailloux comme indicateur de dimension des abris. On
trouvera particulièrement intéressantes les conclusions des derniers auteurs
cités, selon qui :
- les habitats propices aux homards juvéniles sont répartis selon une large
bande d'échelles spatiales;
- les sous-couches de gravier actuelles se prêtent à des densités
supérieures de petits homards après l'établissement;
- la disponibilité de cailloux et de blocs rocheux offrant un abri diminue
rapidement avec l'accroissement de la taille des homards;
- les sous-couches de gravier sont propices à des densités relativement
élevées de petits juvéniles.
Il est faux, à leur avis, de supposer que tous les types d'habitat ont la
même capacité d'accueil de jeunes homards. Ce qui m'amène à me demander s'il
serait a) possible et b) rentable d'accroître cette capacité dans un secteur
comme celui de la baie Miramichi, où il y a surtout des sédiments fins.
Parmi les questions soulevées par les pêcheurs non autochtones qui me
préoccupent, il y en a une que peu de données permettent de confirmer ou
d'infirmer. Il s'agit de la possibilité que le renouvellement des stocks de
homard soit en partie attribuable à des concentrations de femelles oeuvées dans
les baies ou ailleurs, où l'eau est chaude au printemps et où les larves ont de
meilleures chances de survivre et de rester au même endroit après leur
libération. On a des preuves de concentrations de femelles dans la baie de
Fundy, où la pêche vise les gros sujets matures dont les taux d'exploitation
doivent être supérieurs puisqu'il y a une forte proportion de femelles parmi les
gros homards (ce qui laisse supposer que la proportion de grosses femelles
capturées est un bon indicateur d'exploitation ou de conformité au règlement sur
l'encoche à la queue comme éventuel point de référence limite pour la pêche).
Pour en revenir au secteur sud du Golfe, Lanteigne fait état, dans une
communication individuelle, de concentrations de femelles en été et en automne
commençant au nord de l'Île-du-Prince-Édouard.
Des pêcheurs se disent préoccupés que la baie Miramichi soit le lieu de
libération des larves de homards provenant de secteurs plus vastes que les zones
statistiques 70, 71 et 73. Le déclin des prises printanières, au nord de la baie
Miramichi en remontant vers la baie des Chaleurs, ces deux dernières années, est
lié selon certains avis aux pêches d'automne de 1999 et 2000 dans la baie. Mais
rien ne permet de le confirmer, car il faudrait un marquage d'été dans la baie,
tard en automne, ce que pourrait faire la collectivité de Burnt Church, avec
l'aide du MPO. Je suggère que le MPO achète, dans les deux dernières semaines de
la période de pêche proposée, une grande partie des homards capturés, les marque
puis les rejette dans la mer après avoir noté leur état, leur sexe et leur
taille.
Comme je l'ai dit, on a observé relativement peu de migrations de homards
jusqu'à maintenant dans le Golfe. On peut néanmoins faire remarquer que la
plupart des marquages précédents ont eu lieu dans la même saison de pêche et que
les captures répétées ont eu lieu, évidemment, dans les secteurs où des homards
ont été remis à l'eau la même année ou les années précédentes. Il est
prioritaire de marquer le homard pendant la saison de reproduction, après la
mue, pour déterminer leur dispersion le printemps suivant. L'absence de données
à ce sujet pose un sérieux obstacle à une étude approfondie des effets de la
pêche en automne. Nous comptons sur la collectivité de Burnt Church pour combler
cette lacune et sur le MPO pour coordonner la collecte de données de marquage et
le versement de primes pour les marques récupérées.
On observe des lacunes dans l'information relative à l'effort de pêche, aux
prises par casier, à la composition des prises quant à la taille et au sexe et
ce, même en ce qui concerne les activités de pêche commerciale de pêcheurs non
autochtones à l'extérieur de la baie Miramichi. Par le passé, les pêcheurs
autochtones et non autochtones ont peut-être eu de bonnes raisons de divulguer
l'information avec parcimonie au gouvernement; cependant, il y a peu de chance
que le régime de gestion soit amélioré, voire de réconcilier les différents
groupes, si l'information relative à ces questions n'est pas dévoilée de manière
uniforme.
La modélisation informatique des populations de homards du Canada fait
actuellement appel à un modèle élaboré pour la pêche en Amérique par Fogarty et
Idoine (1999). Tout en étant utile, les modèles conçus pour les territoires où
il n'y a pas de saison de pêche risquent peu de donner des renseignements
détaillés réellement utiles à la gestion. Les avenues pour modéliser les
populations de crustacés par groupes de mue semblent considérables et certaines
approches à cet effet ont été amorcées, mais n'ont pu être complétées au cours
de ce processus de consultation par manque de temps. En utilisant des groupes de
mue au lieu de catégories de taille, il semble possible d'estimer la densité de
la population par analyse rétrospective mise en comparaison avec une analyse des
populations virtuelles fondée sur la taille, et je crois qu'il s'agit d'une
approche à privilégier. Selon moi, les modèles utilisant le nombre d'oeufs par
recrue comportent une importante lacune parce qu'ils n'évaluent pas la qualité
des oeufs produits, qui semblent étroitement liée à l'âge de la mère.
Un commentaire général concernant l'ancienne stratégie de recherche du MPO
dans les zones de pêche du homard au printemps est le manque grave d'information
historique détaillée sur le cycle de vie pendant la saison interdite à la pêche.
Ce manque d'information pendant plus de 60 ans en recherche est à l'origine de
la difficulté d'analyser la façon de répondre à la situation actuelle. Elle
s'explique peut-être en partie par la réticence des communautés de pêcheurs dans
les secteurs de pêche du printemps à accepter que le gouvernement verse dans la
pêche expérimentale de homards hors saison. Les répercussions de l'importante
lacune dans les données se font sentir dans les situations de pêche entièrement
nouvelles comme celle à laquelle nous sommes actuellement confrontés. On pense
par exemple aux expériences de marquage répétées de façon régulière dans les
premières années et la conclusion qu'il n'y a aucune migration du homard. Bien
que ce comportement sédentaire généralisé semble la règle, il aurait été très
utile de consulter les tendances de dispersion des homards (et particulièrement
celle des femelles oeuvées) marqués et relâchés près des côtes à la saison
estivale. Comme on l'a mentionné précédemment, ces expériences devraient faire
partie intégrante d'un protocole de recherche qui serait appliqué selon les
conseils techniques de la collectivité de Burnt Church; le MPO fournirait des
étiquettes et des conseils en matière de marquage et assumerait le coût des
travaux effectués.
Si cette perception des populations de homards dans le Golfe (voulant que les
femelles oeuvées se rassemblent dans les eaux plus chaudes au printemps et en
été) est étoffée par d'autres recherches, elle pourrait remettre en question la
conclusion avancée dans le rapport du CCRH selon laquelle il ne semble y avoir
aucune raison de diviser les stocks de homard du Golfe. À long terme, cela
pourrait signifier d'autres divisions pour les besoins de la gestion. Chez
plusieurs autres espèces, les rassemblements en période de fraie (ou à
l'éclosion des oeufs, dans le cas qui nous occupe) donnent souvent un indice
quant à la composition du stock. La vérification visant à déterminer s'il existe
des zones distinctes de libération de larves (même si, avant de parvenir à
maturité, les stocks issus de la fraie dans le Golfe sont mélangés à la pêche du
printemps) constitue du moins une hypothèse de recherche claire dont les
applications pratiques sont importantes et justifient la tenue d'études
approfondies sur la question.
Une autre opinion qui selon moi rend cette hypothèse encore plus plausible
(et qu'il serait risqué de passer sous silence!) est l'endroit où la température
peut limiter le déplacement des espèces à proximité de la limite nord de leur
aire de distribution. En libérant des larves sur la côte, le taux de croissance
sera accéléré et, espérons-le, augmentera la probabilité de peuplement des
juvéniles avant la fin de la saison estivale. En outre, le fait que les homards
semblent naturellement se rassembler pour libérer des larves dans les baies ou
dans les zones renfermées constitue peut-être une adaptation visant à empêcher
la dispersion excessive pendant la vie larvaire, afin d'accélérer la
métamorphose larvaire et de favoriser de saines conditions d'alimentation étant
donné que la densité du plancton risque d'être plus abondante dans ces régions.
(En passant, l'inquiétude exprimée plus tôt au sujet de l'effet d'une plus
faible salinité dans les eaux peu profondes attribuable, par exemple, à
l'écoulement d'une rivière, risque d'être moins importante pour les larves de
homards qui ont souvent tendance à demeurer dans les eaux de surface où l'effet
de l'eau douce est généralement plus fort.) Il pourrait également être pertinent
d'effectuer des expériences en vivier sur le taux de croissance des oeufs chez
les femelles oeuvées dans des eaux à différentes températures.
Des pêcheurs commerciaux non autochtones ont soulevé l'hypothèse que la baie
Miramichi soit l'un de ces sites de rassemblement pour la libération des larves
et certains pêcheurs croient que le déclin dans le nombre de prises au printemps
dans le secteur Nord le long de la côte se poursuive dans la baie pendant la
saison estivale. Il ne s'agit pour l'instant que d'une hypothèse, mais le
mécanisme proposé mérite d'être étudié attentivement. Le taux élevé de prises
rapporté par les agents des pêches dans la baie Miramichi pendant la saison
estivale pourraient appuyer cette thèse, et il pourrait être possible d'obtenir
une idée globale des tailles de populations éventuelles dans la partie Nord de
la baie en se servant d'une expérience d'épuisement minutieusement élaborée qui
pourrait être menée sous supervision par la communauté des pêcheurs de Burnt
Church. Parallèlement aux observations de la pêche au casier, il semble urgent
d'effectuer un sondage sous-marin à l'intérieur et à l'extérieur de la baie à
des profondeurs de 5 à 10 mètres, en commençant de préférence tard en juillet et
au début d'août, afin d'obtenir des données estimatives indépendantes sur les
densités, la fréquence des tailles et sur le sexe-ratio dans les eaux de fond
pour les mettre en comparaison avec les prises au casier et pour faciliter
l'établissement de prédictions sur les répercussions éventuelles des activités
de pêche de Burnt Church sur la population.
Globalement, je dois conclure que la collectivité de Burnt Church et la baie
Miramichi constituent le lieu central de prédilection pour l'établissement d'un
centre d'étude sur les populations de homard à haute densité pendant l'été. Il
pourrait aussi être possible de mettre en place un programme de recherche
invitant les universitaires en visite à recevoir et à donner de la formation aux
techniciens locaux; cette proposition fera l'objet de discussions plus loin dans
le présent rapport.
Dans son plan de gestion, Burnt Church a mis l'accent sur la nécessité de
conserver l'habitat et l'écosystème du homard; cette volonté semble s'inscrire
dans les croyances des Premières Nations à l'égard de l'importance de vivre en
harmonie avec la nature. La réalité cependant met au jour de graves problèmes
d'emploi et la nécessité de créer des emplois dépasse la question de la gestion
du homard. On propose le scénario suivant et, quoiqu'il semble ambitieux, il
renferme des objectifs atteignables par les Premières Nations dans le domaine de
la recherche marine et permet une contribution éventuelle à la réalisation des
objectifs éducatifs et touristiques dans le Nord du Nouveau-Brunswick. On ne
peut ici qu'effleurer ces idées, mais elles mériteraient de faire l'objet d'une
étude de faisabilité par les parties les plus intéressées.
Il est très souhaitable que les Premières Nations acquièrent des
connaissances plus approfondies sur leurs propres ressources marines, et elles
ont exprimé une volonté dans ce sens dans leur plan de gestion. Je crois qu'il
serait possible d'octroyer des bourses d'études aux personnes qui terminent
leurs études secondaires, mais ces bourses ne pourraient en aider que
quelques-uns; l'acquisition de ces connaissances pourrait passer par d'autres
voies que la filière scolaire régulière. On propose la construction d'une petite
station d'étude sur le terrain dotée d'un laboratoire d'enseignement pouvant
servir de 10 à 15 étudiants à Burnt Church et qui serait entretenue par la
collectivité. Puisque Burnt Church ne compte actuellement aucun biologiste
dûment qualifié, le concept pourrait uniquement fonctionner grâce à la
participation d'une ou de plusieurs universités. On se retrouve devant deux
possibilités : l'université St. Francis Xavier, dont l'Institute for Studies in
Aquatic Resources est accessible aux Premières Nations par Internet, pourrait
offrir de la formation à distance. M. Ian Austin (aiaustin@stfx.ca) pourra
fournir des renseignements plus détaillés. D'autre part, ou parallèlement, le
Laboratoire maritime Huntsman, à St. Andrews, offre un cours et exploite un
laboratoire-aquarium; il pourrait être possible de solliciter son avis. En fait,
la lettre qui se trouve à l'annexe IV suggère la possibilité d'une collaboration
de cette nature. Il faudra au départ faire appel aux services d'un
gestionnaire/biologiste externe, financé par le gouvernement ou embauché à même
les fonds disponibles pour Burnt Church.
Si l'idée progresse vers la réalisation, on pourra demander aux universités
de la région des Maritimes d'offrir des programmes réguliers sur le terrain et
d'offrir de la formation dans différents domaines : l'identification, la
biologie et l'écologie du homard et d'autres ressources marines. Les peuples
autochtones, ainsi que les enfants des pêcheurs non autochtones de la région,
pourraient profiter de cette occasion pour découvrir la faune et les traditions
des Premières Nations. Encore une fois, en collaboration avec le Laboratoire
maritime Huntsman, l'idéal serait de construire et d'entretenir un petit
aquarium public et de permettre aux visiteurs d'admirer des homards et d'autres
espèces marines; les membres de la collectivité devront aussi recevoir une
formation sur l'entretien d'une installation de cette nature. L'établissement
d'une installation de cette nature stimulerait le tourisme au niveau local et
capterait l'intérêt du public en général puisque, comme l'explique M. Costello
du LMH, le homard est une espèce charismatique d'intérêt pour le grand public.
Cette idée laisse également présager certains débouchés pour une partie des
prises pendant la saison d'automne : il pourrait être rentable d'ouvrir une
boutique-cadeaux d'artisanat ainsi qu'un petit café à l'intérieur du complexe
abritant l'aquarium public, et d'aménager quelques pavillons où l'on pourrait
vendre aux visiteurs des fruits de mer et des petits pains garnis de homard par
exemple! Ces ajouts viendraient compléter l'attrait de l'aquarium public,
contribueraient au caractère éducatif et plaisant de l'expérience des touristes
et des résidents de la localité. Si l'on en croit le LMH, le café et la boutique
de cadeaux permettraient chacun de couvrir le tiers des coûts d'exploitation du
complexe.
Les autres possibilités d'emploi seraient rattachées à la petite station
d'observation biologique sur le terrain précédemment mentionnée. L'établissement
d'un centre local pour la conservation des oiseaux et de la faune de l'estuaire
de la Miramichi pourrait également s'inscrire dans le contexte de
l'établissement d'une réserve biosphérique nécessitant la capture réglementée de
certaines ressources. La communauté serait ensuite responsable de former des
gardiens de la faune chargés de superviser les activités touchant l'écosystème
marin côtier ainsi que les terres humides de la région. On pourrait approcher
les groupes de conservation des Maritimes pour jauger leur intérêt à participer
à l'exploitation d'un tel centre; il faudra tout de même envisager de solliciter
le soutien financier du gouvernement pour assurer le démarrage du projet, au
moins pendant les trois premières années d'exploitation.
Mis à part le secteur de la pêche, il faudra identifier les autres solutions
qui s'offrent à la communauté; comme toujours, l'identification de ces solutions
dépend de l'obtention de renseignements de meilleure qualité et, au départ, de
l'expertise de tiers étrangers. Il est recommandé que le Conseil de la Première
Nation Burnt Church prenne les arrangements nécessaires pour scruter Internet
dans le but d'identifier les mesures prises par d'autres Premières Nations pour
favoriser leur mieux-être. Une autre solution provient d'événements comme le
Annual Big Tex Trout Derby accueilli par la Première Nation Red Bank, et des
circuits organisés par le Eel Ground Community Development Centre inc., annoncés
dans le Guide touristique officiel du Nouveau-Brunswick de 2001. Ne serait-il
pas souhaitable de tenir une activité de même nature axée sur la pêche du
homard?
Si des installations accueillant laboratoire et lieu d'hébergement étaient
disponibles, elles pourraient éventuellement établir leur propre site Web pour
décrire les possibilités de recherche qu'offre Burnt Church, et susciter
l'intérêt de chercheurs et d'autres personnes à venir étudier les ressources
locales.
Le consultant a rapidement compris que peu importe la conclusion d'un arbitre
indépendant, il est fort probable que celle-ci ne soit pas accueillie
favorablement par les pêcheurs, qu'ils soient autochtones ou non. Il est peu
probable qu'un « jugement de Salomon » soit d'emblée accueilli par tous, et il
serait présomptueux sur un avis aussi court. Comme dans le cas de toute
négociation, les parties doivent chercher une solution qui conviendra à court et
à moyen terme, et elles doivent comprendre les pertes qui seront assumées à long
terme par toutes les parties concernées si aucun solution n'est trouvée
rapidement. Le MPO n'est nullement dans une position lui permettant d'arbitrer
aisément dans cette affaire pour au moins une raison : la décision Marshall, qui
assure une « subsistance convenable » par la pêche commerciale aux peuples
autochtones, ne peut se traduire aisément en un objectif opérationnel univoque
accepté de tous. Quelle devra être la taille de la part des ressources en homard
du Golfe pour assurer une subsistance convenable à la Première Nation Burnt
Church si l'on se fie à la tentative actuellement en cours pour obtenir l'accès
à d'autres ressources de pêche commerciale? Quelles seront les répercussions
d'une prolongation du droit de pêche de Burnt Church pendant l'automne pour les
pêcheurs non autochtones qui pratiquent déjà la pêche? La présente étude ne peut
arrêter des chiffres sur la question, mais laisse présager des répercussions
considérables.
La promptitude de Burnt Church à jeter un nombre relativement important de
casiers en automne comme suite à la décision Marshall a provoqué une réaction
hostile de la part des pêcheurs non commerciaux. Bien que cette réaction se
comprenne venant d'un groupe qui constate que ses droits ne sont plus protégés
par le gouvernement, et que son moyen d'existence est remis en question, ces
événements n'ont pas créé un climat qui facilite la résolution de cette crise.
Tous doivent néanmoins comprendre que la décision Marshall vise à poursuivre
l'objectif d'accroissement de l'autonomie des Premières Nations, et que la pêche
commerciale est la principale richesse des collectivités côtières de la région.
Il faut reconnaître leur droit d'accès puisqu'il a été injuste jusqu'à présent
qu'ils n'aient pu profiter que d'une mince portion de la principale ressource
naturelle de la région. La question est la suivante : de quelle proportion sera
cette part et aux dépens de qui sera-t-elle octroyée? Le MPO a reçu le mandat
d'intégrer progressivement la collectivité de Burnt Church dans les activités de
pêche commerciale et devra chercher à clarifier la situation puisque les
incertitudes qui règnent quant à la notion de « subsistance » et aux
perspectives à venir sont à l'origine de ce climat de confrontation.
Il va sans dire qu'une participation accrue des Premières Nations aux
activités de pêche prendra un certain temps, et qu'il sera nécessaire de former
des pêcheurs et d'ajuster les plans de gestion des pêches à la nouvelle réalité
découlant de la décision Marshall. Jusqu'à maintenant, le MPO n'a pas empiété
sur les droits des groupes concernés par la pêche en donnant à Burnt Church des
permis de pêche retirés à d'autres, mais on peut supposer que ces permis
visaient essentiellement à être utilisés pour la saison de pêche de printemps.
Certes, l'intégration de certaines dispositions compensatoires pour la perte de
droits d'accès découlant de la détention d'un permis de pêche commerciale à la
suite d'une telle décision est une nécessité pour que la transition se fasse en
douceur.
Quelles que soient les origines du problème, toutes les parties en présence
doivent maintenant sacrifier une certaine partie de leurs attentes et
entreprendre un dialogue réaliste sur la gestion des pêches. L'établissement de
deux plans de gestion différents n'est pas une solution pratique de gestion pour
une même ressource. Il est également clair qu'un droit de pêche illimité pour la
saison été-automne n'est pas compatible avec les activités de pêche qui se
déroulent actuellement au printemps. La saison de pêche du printemps sera la
perdante à l'issue de cette confrontation pour les raisons explicitées dans le
présent rapport. Néanmoins, une pêche d'automne limitée dans la baie Miramichi
semble inévitable et, selon l'avis du consultant, cette limite devrait être
imposée volontairement par les Mi'kmaqs en contrepartie d'un droit d'accès sans
restriction aux pêches du printemps, tout juste à l'extérieur de la baie, qui
serait octroyé aux pêcheurs de homards autorisés.
Lorsqu'on remonte aux droits conférés par traité, les revendications des
Mi'kmaqs à l'égard de leur compétence sur une grande partie des ressources
naturelles des Maritimes et du droit de les exploiter à leur gré constituent
l'un des volets du conflit. Les citoyens canadiens non autochtones provenant des
communautés locales et qui pratiquent la pêche depuis plusieurs générations,
croient que leur droit de pêcher le homard au printemps, comme moyen
d'existence, est brimé en grande partie parce qu'ils considèrent une pêche
saisonnière été- automne inappropriée, dangereuse et non réglementée. La
recherche d'une solution permettant de parvenir à une entente sur les principes
régissant la gestion de la pêche au homard doit, je crois, prendre en
considération les réalités suivantes à court terme :
Une pêche de 5 600 casiers dans la saison d'automne,
comme le propose le plan des Mi'kmaqs, entraînera une chute des prises au
printemps suivant, qui pourrait se manifester par un déclin des débarquements,
de modeste à important. À la lumière des données scientifiques disponibles,
cette chute se situerait entre 25 p. 100 et 30 p. 100, et pourrait varier, à la
hausse ou à la baisse, selon la proportion de stocks dans la zone 23 où Burnt
Church pratique la pêche en automne.
- Certaines raisons expliquent pourquoi l'aire de pêche des Mi'kmaqs risque
d'être confinée à la baie en raison du risque auquel sont confrontés les
pêcheurs de Burnt Church qui pratiquent la pêche à l'extérieur de la baie, ce
que les pêcheurs des collectivités avoisinantes considèrent comme de la pêche
« hors saison ». Au bas mot, le risque est de perdre les casiers placés dans
les lieux de pêche habituellement occupés au printemps par les pêcheurs non
autochtones. À moins que le MPO ne soit chargé de superviser et de protéger
ces casiers 24 heures par jour, pendant la saison proposée de 78 jours, ce qui
engendrerait des coûts plus élevés que ce que rapporte la saison de pêche,
nous nous retrouvons confrontés à un problème de droits territoriaux
d'exploitation par les pêcheurs (TURF). Il s'agit d'un problème propre à la
pêche au homard que l'on trouve ailleurs, qui témoigne d'un degré élevé de
territorialité dans les lieux de pêche utilisés par les participants.
- À la pêcherie de Punta Allen dans le Golfe du Mexique pour la pêche à la
langouste par exemple, le fait de perturber de façon répétitive les engins de
pêche déployés dans les limites des TURF d'un autre pêcheur risque d'entraîner
le boycottage du coupable par la collectivité. Les droits de pêche du homard
ne sont pas uniquement déterminés par les permis, mais aussi selon des
facteurs géographiques. Bien que les peuples autochtones puissent en théorie
exploiter la totalité d'une pêcherie hauturière, il ne serait pas pertinent
d'attribuer une grande partie des droits de pêche existants dans le Golfe du
Saint-Laurent aux Premières Nations éloignées de leur lieu de résidence,
puisque la pêche au homard est une activité limitée par des facteurs
géographiques. Contrairement aux pêches qui se pratiquent avec des engins de
pêche remorqués, l'installation de casiers en haute mer à partir d'une autre
collectivité ne constitue pas une stratégie de pêche judicieuse lorsque les
relations sont tendues, étant donné l'existence de TURF.
- À l'inverse, on peut considérer la pêche à l'intérieur de la baie comme
une manière d'exercer un TURF par la Première Nation Burnt Church. Il est
difficile d'imaginer ce qui pourrait les forcer à renoncer à ce droit qui leur
a été conféré par la décision Marshall, même s'il entraîne des répercussions
négatives sur les pêches du printemps, à moins qu'on ne leur offre certaines
compensations. On constate la présence d'un important rassemblement de homards
dans la baie Miramichi pendant la saison été-automne qui, par la migration
hauturière des survivants à la pêche hauturière le printemps suivant, les
place dans une situation de premier arrivés, premier servis. Leur droit sur le
stock de homards qui viennent de muer risque d'être seulement partiel si les
homards de la baie proviennent uniquement de la région hauturière
immédiatement avoisinante. Toutefois, si la baie Miramichi est le point de
rassemblement d'une unité de population biologique qui s'étend de l'extrémité
Nord du détroit de Northumberland jusqu'à l'extrémité Sud de la baie des
Chaleurs, les effets d'une pêche d'automne non réglementée deviennent plus
graves. J'aborde cette question car des inquiétudes fondées ont été exprimées
en ce sens par des pêcheurs non autochtones.
- Malgré ce qui précède, je crois que l'inquiétude exprimée par les Mi'kmaqs
que j'ai rencontrés, relativement à la survie de la population de homards, les
poussera à collaborer à l'encadrement des pêches sur le littoral, pour qu'elle
se pratique à des niveaux modestes. Cependant, cette collaboration ne sera
possible que dans la mesure où il est clair que cet encadrement ne brime pas
les droits qui leur ont été conférés par traité et qui s'appliquent au-delà de
la région locale. L'encadrement devra également leur assurer une subsistance
modérée provenant de la pêche qui, espérons-le, sera surtout pratiquée au
printemps.
- Si l'on parvient à une entente établie plus ou moins selon les lignes
directrices proposées, il faudra conclure une entente conjointe sur la gestion
des pêches. Celle-ci devra idéalement contenir des dispositions pour préciser
que les activités de pêche et de recherche de la Première Nation Burnt Church
prévoient la tenue des données sur le nombre de casiers utilisés à chaque
jour, la rétention des doubles de bordereaux d'achat pour le homard vendu et
l'ouverture à la discussion avec les représentants du MPO sur les questions
relatives à la conformité et à la recherche.
- Les recommandations particulières en matière de gestion se trouvent dans
le sommaire pour éviter la répétition.
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La formule F = q.f est la formule classique pour calculer le taux de
mortalité attribuable à la pêche, où « » représente l'effort de pêche, estimé
ici selon le nombre de casiers levés pendant la saison ou la durée de la saison
multiplié (*) par le nombre de casiers installés.
On a utilisé deux approches pour estimer les valeurs relatives de la variable
« q » pour les saisons du printemps et de l'automne.
Estimation fondée sur les observations directes.
On peut obtenir une estimation directe de la vulnérabilité relative en
prenant en considération le taux de prises/casiers levés tôt à l'été dans la ZPH
25 quand la saison est ouverte pendant les mois chauds. En supposant que les
densités initiales sont relativement semblables dans les deux zones au début de
la saison (il est probable qu'elles ne le sont plus après le commencement de
l'exploitation), on obtient une estimation par quotient. Celui-ci est comparé au
taux de prises du début de la saison pendant la première semaine de pêche du
printemps dans la ZPH 23. Les indices de vulnérabilité relative suggérés par
cette méthode sont de l'ordre de 2,5 fois plus élevés dans la ZPH 25 au
commencement de la saison.
Les taux de prises ont été établis directement par les agents de pêche à la
baie Miramichi pendant la pêche à des fins alimentaires et rituelles par la PNE,
et ont varié de 5,0 à 8,2 livres/casier levé/jour pour les trois zones. Le
nombre moyen de prises par casier levé au printemps est d'environ 0,9
livres/jour, ce qui suggère un intervalle de variation du ratio q des homards de
5,5 à 9,0 fois plus vulnérables à la pêche en automne qu'au printemps. À partir
de ces observations directes, la vulnérabilité relative pour la saison d'automne
semble être de l'ordre de 2,5 : 1 à 9,0 : 1. L'auteur privilégierait la valeur
médiane de l'intervalle de variation étant donné l'incertitude de la part de
Burnt Church à savoir si toutes les femelles oeuvées et les homards de petite
taille ont été exclus des prises estimées de l'automne.
Une répartition de « q » dans ses composantes :
- La valeur « q » peut être définie comme le taux de mortalité par pêche par
un seul casier, et la variable « qs/qa » représente le ratio entre les
vulnérabilités au printemps et en automne. Nous allons tenter d'établir une
estimation de sa valeur à partir des principes de base. L'une des façons de
décomposer « q » en ces éléments consiste à le définir comme le taux de
mortalité par pêche d'un (1) casier (c.-à-d. quand « f » dans F = qf
représente l'unité). Ainsi, q a (proportionnel à) v.a/A , où « v » représente
la vulnérabilité aux engins de pêche qui est aussi fonction de l'activité, « A
» représente l'aire de distribution de la population et « a » représente la
zone d'attraction en périphérie du casier; en d'autres termes, le périmètre
autour du casier à l'intérieur duquel le homard peut détecter l'appât. Ainsi,
qf/qs = Asvfaf/Afvsas
Bien qu'aucune raison ne semble expliquer pourquoi un homard ne peut détecter
le casier et l'atteindre pendant la journée qui sépare les levées, à la même
distance au printemps, même s'il est plus long de s'y rendre à des températures
plus basses (voir McLeese et Wilder, 1953), nous pouvons probablement éliminer
les variables « a » de l'équation ci-dessus. La zone de stock A sera de plus
petite taille en été, quand la population se déplace vers la côte, que
lorsqu'elle est dispersée dans les eaux plus profondes en haute mer. Si la
valeur « A » est plus faible, la densité sera supérieure en été et l'indice de
vulnérabilité sera plus élevé puisque que Af/As < 1.0.
- Ainsi, si « vs/vf » est fonction de l'activité, qui elle-même est fonction
de la température moyenne des deux saisons, alors vs/vf = Ts/Tf . Tout ce que
nous pouvons avancer pour l'instant est que qf/qs = Asvf /Afvs reçoit, comme
produit des ratios des durées de température moyenne une valeur de Af/As qui
est aussi supérieure à l'unité.
Disponibilité : Au cours des mois de l'été et de
l'automne, la profondeur typique occupée par les homards est située dans la zone
infralittorale alors qu'au printemps, on les trouve dans les eaux plus
profondes, jusqu'à 30 mètres et plus, dans le Golfe. On peut en déduire que la
population se trouve en plus forte concentration plus tard pendant l'année, et
bien qu'il soit difficile de l'estimer plus précisément, les zones relatives ont
été estimées pour la zone qui s'étend de la baie jusqu'à 20 brasses. Le tableau
ci-dessous présente les résultats suivants fondés sur les estimations du SIG des
zones accueillant la plus grande partie des stocks aux deux saisons.
Les superficies (km2) occupées par le stock principal au cours des deux
saisons, selon la gamme des profondeurs privilégiée.
Zone statistique |
Automne -> 5 m. |
Printemps 5 ->20 m. |
Ratio |
71 |
175 |
425 |
2,43 |
73 |
197 |
646 |
3,28 |
Moyenne (2 zones) |
2,9 |
Du printemps jusqu'à la saison été-automne, le ratio A f : As est
approximativement de 1 : 2,9. En d'autres termes, on retrouve le même nombre de
homards à des densités supérieures pendant la saison été-automne alors que leur
concentration est plus forte dans les eaux moins profondes, selon un ratio
d'environ 2,9 : 1 pour les saisons automne : printemps. Ces estimations sont
nécessairement brutes, mais peuvent aisément être précisées par d'autres études.
Température : La température joue un rôle
important dans la régulation de différents aspects du cycle de vie comme la mue
et la reproduction, bien qu'il soit probable que la photopériode ou la durée du
jour soit aussi importante pour déterminer les étapes de l'évolution biologique.
Le tableau suivant indique la température des eaux de fond occupées par les
homards au printemps et pendant la saison été-automne, calculée pour le port le
plus près concernant des données de cette nature, soit Bouctouche. Quant à
l'importance du facteur température, il s'agit probablement de la variable
unique la plus importante pour une espèce à proximité de sa limite de
déplacement nord, et plus particulièrement en ce qui concerne la vulnérabilité
aux casiers, Lochhead explique que « le taux de locomotion est proportionnel à
la température chez les crustacés ». McLeese et Wilder (1958) et Paloheimo
(1963) ont démontré les relations qui existent entre la vulnérabilité et la
température et qui confirment cette assertion. Si l'on se penche sur le cycle
des températures dans le sud du Golfe, tel qu'indiqué par les températures
pendant l'interglacial dans le cas de Le Goulet (image ci-dessous), on peut voir
les saisons proposées dans le plan de Burnt Church comme deux lignes
horizontales, et aussi (juste au- dessus) la saison de pêche dans la ZPH 25.
Saisons proposées pour Burnt
Church |
|
Printemps |
Été-automne |
Degré-jours |
417,3 |
961,1 |
Durée de la saison (jours) |
59 |
77 |
Température moyenne |
7,07° |
12,48° |
Saison estivale (secteur 25) |
|
|
Degré-jours |
|
870,3 |
Durée de la saison (jours) |
|
63 |
Température moyenne |
|
13,81° |
Étant donné que le taux de locomotion des homards est proportionnel à la
température, on pourrait alors s'attendre à ce que la vulnérabilité en soit
directement affectée. Bien qu'il serait souhaitable qu'une étude portant
spécialement sur cette question soit réalisée dans le but de confirmer les
résultats de Wilder-Paloheimo, pour l'instant, la conclusion suggérée est que
l'influence de la température sur l'indice de vulnérabilité pendant les saisons
printemps et automne se situera approximativement dans le ratio des températures
moyennes, ce qui signifie qu'un ratio de près de 1 : 1,76 s'appliquera en ce qui
concerne les niveaux d'activité, et que ce ratio sera augmenté encore davantage,
car la densité côtière est plus élevée en automne dans la baie Miramichi.
En résolvant l'équation pour prendre en considération les effets de la
densité et de la température sur le ratio « q », nous obtenons :
qa/qs = Asva/Aavs = 5.1 . Cette conclusion provisoire semble correspondre aux
données observées, mais devrait faire l'objet d'une expérience. Voilà l'une des
études que je recommande à Burnt Church d'effectuer pendant la saison
été-automne et au printemps : déterminer la densité locale en plongeant à
différentes températures d'eau et en comparant les données aux taux de prises
dans la même zone.
Les hypothèses suivantes sont utilisées pour les besoins d'un calcul simple
portant sur deux saisons, qui s'étendent de l'automne à la fin du printemps
suivant. Nous comparerons l'écart sur le chapitre du nombre de homards en
présumant, dans un premier temps, l'absence de pêche d'automne et, dans un
deuxième temps, la pratique d'une pêche d'automne. Le pourcentage d'écart
correspond à la réduction du nombre de homards une fois rendu à la pêche
printanière.
Nbre maximal de casiers levés par saison = Nbre de permis exploités * Nbre de
casiers par permis * durée de la saison
Nbre réel de casiers levés au printemps utilisés en automne = fs = (qf/qs)*
Aucun casier levé au printemps (ff).
Si le taux de pêche de printemps, Fs, = 8,32,
Le taux de mortalité par la pêche en automne = Fs* (ff /fs)*(qf/qs).
Dans les calculs suivants, nous examinons le sort d'un nombre N0 de homards
qui entrent dans la pêche au début de la saison d'automne, et nous suivons ces
cohortes jusqu'à la fin de la saison du printemps suivant. Comme ces individus
ne croissent pas durant cette période, puisqu'ils ont mué avant la saison, nous
pouvons effectuer les calculs en termes de nombres, car le nombre de sujets est
inchangé et nous pouvons présumer que la sélectivité demeure la même.
Le taux de mortalité est considéré comme instantané; ainsi, le taux de
mortalité par pêche F sur une période de .t an (c.-à-d. environ 61/365 jours
pour la saison du printemps) constitue le taux le plus élevé qui, durant la
courte saison, entraîne le même taux de dépopulation qu'un taux plus faible qui
porterait sur un an. Par exemple, si 75 % des stocks sont pris à la suite de la
pêche à longueur d'année,
F (taux annuel) = [Nbre (nombre initial)-Nbre (nombre final)]/ 1.
Cependant, ce chiffre est artificiel dans la situation actuelle et n'est pas
utile pour les besoins de nos calculs. Il semble plus raisonnable de reconnaître
le taux instantané beaucoup plus élevé relatif à la pêche du homard, qui est
probablement largement supérieur à celui enregistré dans tout autre secteur de
pêche maritime au Canada. Seule la brièveté de la saison empêche que les stocks
de ce type de pêche ne soient épuisés en un an. Ainsi, si la saison .s = 61/365
an, N1/N0 = exp. (-F*.t) = 25/100, une fois résolu (si nous ne tenons pas compte
de M), nous obtenons F = 8. Le taux de mortalité naturelle M est beaucoup plus
faible que le taux F; nous présumons qu'il correspond à environ 0,1 et qu'il
pourrait probablement ne pas en être tenu compte durant la saison de pêche. Bien
que le taux de mort naturelle des gros sujets soit négligeable (les homards sont
censés vivre pendant de nombreuses années, s'ils échappent à la pêche) pendant
la première année de pêche, nous conservons le taux de mort naturelle M = 0,1.
En guise de nombre initial, nous établissons qu'un million de homards sont
exploitables au moment de la pêche d'automne (ce chiffre peut être remplacé par
le nombre réel si celui-ci peut être estimé, p. ex., à l'aide d'une analyse des
cohortes; cependant, nous comparons des nombres de sujets selon une taille
intersaisonnière constante présumée découlant de deux scénarios de pêche; pour
les besoins du présent calcul, le nombre réel n'est donc pas important, puisque
nous examinons des rapports selon deux possibilités de gestion).
Dans le tableau suivant, les valeurs instantanées de F et M sont rajustées en
conséquence selon la durée de la période, p. ex., M' = M* (x/365), x étant une
fraction d'une année.
Prises saisonnières et
survivants |
Sans pêche d'automne |
Pêche d'automne |
I'individus qui entrent dans la pêche d'automne |
N0 |
N0 |
Survivants à la fin de la pêche d'automne ('=78 jours) |
N1=N0*exp(-M') |
N1=N0*(F'/(F'+M'))*(1-exp.(-M'-F')) |
Capture durant la pêche d'automne |
0 |
Cf = N1*(F'/(F'+M'))*(1-exp. (-M'-F')) |
I'individus qui entrent dans la pêche de printemps (''=181
jours) |
N2 =N1*exp. (-M'') |
N2 =N1*exp. (-M'') |
(*) Captures durant la pêche printanière (''' = 61 jours) |
Cs = N2*(Fs/(Fs+M'''))*(1-exp. (-M'''-Fs)) |
Cs = N2*(Fs/(Fs+M'''))*(1-exp. (-M'''-Fs)) |
Écart au printemps en % |
= 100*(Cs - Cs )/Cs |
|
Incidence sur la zone soumise à la pêche
Afin de tenir compte de l'incidence de la pêche sur (par exemple) le tiers du
secteur des stocks durant l'automne, le tiers des recrues de la saison d'automne
est pêché (colonne de droite du tableau ci- dessus) et les deux tiers ne sont
pas pêchés (colonne de gauche). Cependant, à la cinquième étape des calculs, les
prises printanières sont déterminées selon le nombre de survivants découlant des
deux séries de calculs.
Quelques opinions exprimées par Burnt Church
La Bande possède 15 permis de pêche commerciale du homard qui ne sont pas
détenus par les mêmes personnes qui détiennent les permis de pêche été-automne.
On reconnaît que le fait de retarder le commencement de la saison estivale de la
pêche entraînera une diminution des taux de prise : on sait que le homard quitte
la baie à la fin de la saison.
La pêche artisanale pratiquée en automne permet à certains membres de la
communauté d'amasser entre 500 $ et 1 000 $ pour assumer des coûts particuliers
comme l'achat de vêtements aux enfants avant le début de l'école. Si on leur
offrait une solution d'emploi de rechange pendant cette période, ils seraient
prêts à alléger la pression qu'ils exercent sur les ressources. L'une des
solutions consiste à promouvoir les mesures de mise en valeur de l'environnement
et des stocks de homard dans la baie par l'entremise d'un plan de gestion local.
Dans mes rencontres, j'ai pu constater que plusieurs exemples de plans de cette
nature provenant d'autres régions du monde leur ont été présentés.
On propose de mettre sur pied un programme de recherche sur le homard à Burnt
Church au lieu de dépenser 11 M$ pour faire respecter la loi et les règlements.
Les problèmes financiers sont probablement à la base des pressions exercées
dans le but d'accroître les productions de pêche depuis qu'un vérificateur
indépendant a été mandaté par le MAINC pour gérer les comptes de la bande à
cause de l'importance de la charge de la dette.
Il semble qu'en règle générale, Burnt Church préfère pêcher en automne pour
les raisons mentionnées. Par le passé, on pêchait avec de 400 à 500 casiers
pendant l'automne, et plusieurs étaient abandonnés pendant la saison. Quelques
pêcheurs semblent intéressés par la pêche au printemps : ils racontent avoir
pêché à l'aide de 10 casiers au printemps 2001 avec des étiquettes obtenues en
application de droits découlant de traités. Les meilleures prises au début de la
présente saison ont été rapportées à l'extérieur de la baie, à une profondeur
d'environ 100 pieds, car les homards y pénètrent pendant la saison. À l'automne,
des pêcheurs avec de plus gros bateaux ont rapporté plusieurs prises de plus
gros homards à une profondeur d'environ 50 à 60 pieds.
Bien que le nombre total de casiers prévus pour l'automne dans leur plan
s'élève à 5 600, ils restent ouverts à l'idée de moins pêcher. Un nombre de 4
200 correspond à 4 casiers pour chacun des 1 300 habitants de la réserve, mais
le nombre par membre dans la bande pourrait être réduit. Ceux qui ne possèdent
pas de bateau font lever leurs casiers par des parents. Plusieurs membres de la
réserve sont prestataires d'assistance sociale et cette activité leur permet
d'envoyer leurs enfants à l'école, etc. La seule approche équitable consiste à
attribuer un plus petit nombre de casiers par personne en contrepartie de quoi
ils obtiendraient d'autres avantages comme un accès gratuit et complet à
l'extérieur de l'Île Portage au printemps ainsi que d'autres compensations en
matière d'emploi.
Il est évident qu'il règne un manque de confiance de part et d'autre en ce
qui a trait aux données de base et pour cette raison, il est difficile d'établir
le profil exact de la situation. Burnt Church cite certains exemples de la
méconnaissance de l'autre :
- Certains casiers levés à l'extérieur de l'Île pendant l'automne n'ont pas
été installés par Burnt Church, mais plutôt par des braconniers; ainsi, il est
possible que le MPO ait surestimé le nombre de casiers levés par Burnt Church.
- Le MPO risque d'avoir surestimé le nombre de homards capturés par casier
car selon un témoin, les estimations du MPO comprenaient aussi les homards de
taille non réglementaire et les femelles oeuvées; ainsi, on doute de la moyenne
d'automne de 8,17 livres/casier avancée par le MPO - elle est excessive.
- En ce qui concerne la zone 1, on trouve peu de homards à cet endroit : on
en compte en moyenne 2 à 3 par levée et plusieurs sont de petite taille. La
baie en forme de fer à cheval dans la zone 2 est le meilleur endroit. On y a
trouvé plusieurs femelles oeuvées, de petite taille pour la plupart ainsi que
certaines de taille inférieure à la taille réglementaire - jusqu'à 32 dans les
12 casiers mentionnés.
Très peu d'information a été fournie par Burnt Church, car une certaine
partie d'entre eux ont été détruits dans un incendie des bureaux de la bande il
y a deux ans. On a fait mention d'une offre présentée au MPO l'invitant à venir
sur la réserve et à mesurer les prises conjointement avec la bande, mais cette
proposition a été refusée. Burnt Church est prête à recueillir des données plus
complète à l'automne seulement si cet exercice systématique s'inscrit dans le
cadre d'un projet de recherche sur le homard.
En ce qui à trait aux personnes en mesure d'effectuer une étude sous-marine
sur l'efficacité de la pêche au casier, on indique que la réserve dispose de 12
à 20 plongeurs qualifiés.
Ils se disent ouverts à l'idée d'effectuer, volontairement et dans le cadre
de leur exercice de la pêche, le marquage en V des femelles oeuvées dans leurs
activités de pêche et de remettre à l'eau les homards marqués.
En ce qui concerne les zones de pêche, ils respectent pour la plupart les
zones tampons établies par le MPO dans les saisons antérieures de pêche
d'automne, malgré leur désaccord, et croient avoir le droit de pêcher dans
d'autres zones à l'intérieur de la baie et à l'extérieur de celle-ci.
On a également mentionné que toutes les personnes qui ont acheté du homard à
des pêcheurs autochtones l'an dernier font l'objet de poursuites intentées
devant les tribunaux par le MPO. Qui commande ces poursuites et pour quels
motifs? Les poursuites intentées par le MPO à l'encontre des personnes qui ont
acheté du homard auprès de pêcheurs autochtones pendant l'automne sont perçues
comme des moyens indirects de faire entrave aux droits des Autochtones de
s'engager dans des activités commerciales conformément à la décision Marshall;
et les acheteurs risqueraient d'être boycottés par les pêcheurs non autochtones
au printemps et ils ne sont pas prêts à risquer d'autres poursuites et sabotages
de leurs installations par les pêcheurs non autochtones.
Quelques opinions exprimées par des pêcheurs non autochtones
Au printemps, les pêcheurs n'ont pas atteint les 3 000 livres de homard par
pêcheur escomptées et les revenus nets se situaient à environ 23 000 $ par
bateau. Les Pêcheurs unis interviendra de manière concertée dans toutes les
questions relatives à la gestion. Ils ne s'inquiètent pas si le gouvernement
achète à un prix raisonnable, mais pas au prix offert par le MPO pour un permis.
L'une des solutions alternatives consiste à fermer la saison des pêches en
automne. Si l'on ferme la saison de la pêche en automne, tous les pêcheurs
autochtones seront bienvenus à la saison de pêche du printemps et ils ne
subiront aucun harcèlement. En fait, ils indiquent que sur 8 permis de pêche non
autochtones délivrés pour la pêche au quai de Burnt Church, seuls 1 à 2 sont
demeurés dans les limites des îles au printemps.
Bien qu'ils soient prêts à donner une garantie que leurs casiers ne seront
pas touchés, il y a discorde complète quant à l'idée de réserver une zone aux
pêcheurs autochtones, que ce soit au printemps ou en automne. On a exprimé qu'il
y a un besoin d'établir une organisation équitable au sein de la communauté
autochtone, car un grand nombre de membres ont exprimé des inquiétudes quant à
la position actuelle de la Nation à l'égard de la pêche au homard.
Le Syndicat des pêcheurs entrevoit la possibilité de créer 100 emplois dans
le domaine des pêches du homard au printemps une fois que les pêcheurs de Burnt
Church auront reçu les permis encore détenus par le MPO et qu'ils auront
participé à des programmes de formation. D'autres emplois découleront des
activités connexes à pêche commerciale. On indique que la collectivité de Burnt
Church représente une petite partie de population locale par comparaison à Big
Cove qui en représente la moitié. L'harmonie entre les communautés s'en trouve
d'autant plus importante, qu'elles soient ou non autochtones.
Les pêcheurs reconnaissent que Burnt Church a besoin d'installations comme
celles qui existent dans d'autres communauté et que la conclusion d'une entente
avec le MPO profiterait à toutes les parties. Ils suggèrent que Burnt Church
demande la même assistance que celle offerte à d'autres collectivités comme Big
Cove. On aurait avancé des chiffres atteignant de 10 à 15 millions répartis sur
une période de trois ans, consacrés à la création d'emplois. Outre l'aspect
financier, ils s'attendent à ce qu'une telle entente concède plus de 30 permis
de pêche à plein temps à Burnt Church pour la saison de printemps, y compris les
18 permis actuellement détenus par le MPO, soit l'équivalent de quelques 90
emplois. Ils pourraient alors avoir la fierté de pratiquer une pêche encadrée
avec professionnalisme.
Si cette mesure peut contribuer à persuader Burnt Church d'abandonner la
pêche en automne, ils sont disposés à se déplacer plus loin en haute mer tôt au
printemps et, quoiqu'ils s'attendent à revenir sur la côte un peu plus tard, il
n'y aura aucun harcèlement visant les pêcheurs ou les casiers autochtones. Il
n'y aura aucun problème s'ils souhaitent pêcher le long de la côte jusqu'à Baie
St-Anne par exemple.
La devise privilégiée est : « Une saison pour tous ». Ils expliquent qu'il ne
restera pas grand chose au printemps s'il y a une saison de pêche au homard en
automne. Le nombre élevé de casiers installés empêchera le dragage et la pêche
de poissons osseux.
On a fait référence à la saison de 1982 où plusieurs braconniers ont continué
de pêcher pendant la saison de pêche interdite en été-automne à l'intérieur de
la baie (pas particulièrement les Autochtones). Il aura fallu plusieurs années
avant de récupérer le niveau de stock souhaité après l'intervention du MPO dans
l'affaire.
Les pêcheurs sont inquiets parce qu'ils croient que les homards qui migrent
vers la baie sont un amalgame de tous les stocks pêchés à l'extérieur sur une
superficie considérable et croient qu'un pourcentage élevé de homards pénètre
dans la baie depuis chacune des zones de pêche extérieures. En fait, ils
considèrent que la baie Miramichi constitue le principal territoire utilisé pour
la mue et la fraie dans l'ensemble de la région. Au cours des années, ils ont
suivi la migration du homard vers les côtes, jusqu'au chenal principal pendant
la saison du printemps. En fait, ils partent de très loin et pêchent
progressivement vers le chenal jusque dans la baie, et suivent les homards à
l'intérieur. Ils suggèrent que les migrations saisonnières de plus de 17 milles
ne constituent pas un phénomène isolé si l'on considère des éléments comme la
recapture de homards dont les pinces sont attachées qui se sont échappés des
casiers de rétention et ont été repris un peu plus loin par la suite. Ils
suggèrent que la diminution des prises de Neguac jusqu'à 50 milles de la côte
est attribuable à la pêche pratiquée l'automne dernier. Si une saison de pêche
d'automne commence dans une période de deux mois et que le MPO ne prend aucune
mesure, tous les pêcheurs syndiqués s'uniront. Ils savent très bien que cette
mesure ruinera la pêcherie, mais si elle doit être ruinée de toute façon, ils
souhaitent en tirer certains avantages.
Le MPO a avancé que 3 000 casiers ont été mis à l'eau l'année dernière et
qu'ils n'étaient pas tous désignés par des bouées étant donné qu'il était
possible de détecter les anneaux des casiers au moyen des systèmes de pêche au
grappin et de positionnement par satellite (GPS). Les pêcheurs non commerciaux
estiment qu'en automne dernier, 4 000 casiers permettaient de capturer plus de
80 000 livres de homard par jour; cependant, le prix reçu était faible étant
donné la mauvaise qualité des homards et leur faible teneur en chair à cette
période. D'autres estiment que les prises autochtones en automne 1999
s'élevaient entre 300 000 et 1 million de livres dans la baie.
Un certain nombre de pêcheurs de Big Cove seraient venus pêcher dans la baie
à l'automne, ce qui expliquerait les troubles qui ont eu lieu en 1999. D'autres
encore estiment que le nombre total de prises s'élevait à 80 000 livres par jour
ou 560 000 livres/semaine. Si l'on considère le taux élevé de prises observées
en automne au cours d'une saison de 2 mois, on peut croire que ce chiffre
pourrait aisément s'élever à 2 millions de livres. Si le taux d'exploitation se
situe de 75 p. 100 à 85 p. 100 comme l'avancent certains scientifiques, peut-on
déduire que la taille du stock de pêche au début de la saison d'automne serait
d'environ de 2,35 millions de livres? (Cela me semble une déduction tout à fait
raisonnable. JFC). Aucune pêcherie ne peut soutenir une telle pression deux fois
par année sans qu'il y ait déclin des ressources. On signale que cette année,
les prises non autochtones au printemps ont chuté au nord de la baie, mais sont
restées au même niveau de Baie Ste-Anne. S'il en est ainsi, il est intéressant
de mentionner que Burnt Church a pratiqué peu de pêche dans le sud de la baie.
Les pêcheurs non autochtones croient fermement que l'augmentation des
débarquements dans les années 90 était attribuable à l'assouplissement des
règlements comme l'abaissement des limites de casiers, les mécanismes d'évasion,
la diminution du braconnage, l'augmentation de la taille minimale et le gel du
nombre de permis. La taille des anneaux sur les casiers varie entre 5 po et 5,5
po, mais certains casiers utilisés à l'ÎPÉ sont munis d'anneaux de 11 po. On
pourrait envisager de réglementer la taille maximale des anneaux si des études
scientifiques étaient effectuées sur la question. Il n'y aura aucune
collaboration du côté des nouveaux règlements ni des pêcheurs repères tant que
cette crise ne sera pas résolue à leur entière satisfaction. Ils sont d'avis que
l'image du MPO a été ternie dans certaines régions. Ils soulignent également que
les activités de pêche et de vente illégales, ainsi que le non-respect des
règlements augmentent de part et d'autre pendant les périodes d'agitation
publique.
Direction des Sciences du MPO
La Direction des Sciences du MPO s'inquiète qu'aucune information ne soit
rassemblée sur la pêche au homard dans la baie Miramichi. Il n'y a aucune donnée
sur l'effort de pêche (le nombre de casiers mis à l'eau par jour), sur les
prises et leur composition quant à la taille, au sexe et au pourcentage de
femelles oeuvées et de petite taille dans les casiers.
Par conséquent, il nous est difficile de connaître les répercussions de la
pêche au cours d'une année donnée, sinon les considérations générales
mentionnées par M. Caddy. Il faudrait envisager la réalisation d'autres études
biologiques en collaboration avec Burnt Church dans un avenir prochain; le
ministère appuiera certainement les initiatives en ce sens.
FICHE DE TRANSMISSION PAR TÉLÉCOPIEUR
Date : Le 5 juillet 2001
Heure : 16 h 39
Nombre de pages : 3
Destinataire : M. Caddy
No de télécopieur : 915068512387
Expéditeur : Mark Costello
Titre : Directeur exécutif
Société : Centre des sciences de la mer Huntsman
Adresse : 1, ch. Lower Campus
St. Andrews (N.-B.) E5B 2L7
Canada
No de télécopieur: (506) 529-1212
No de messagerie vocale : (506) 529-1224
Message :
M. Caddy,
Vous trouverez ci-joint le programme de cours que nous avons offert à
l'Aboriginal Peoples Council of New Brunswick il y a quelques mois. Ce programme
illustre le type de formation accessible. Le CSMH serait heureux d'offrir ses
cours de formation qui, pour la plupart, peuvent être dispensés à l'interne. De
plus, nous pourrions vous conseiller au sujet de l'établissement d'aquariums, en
vous faisant bénéficier de notre expérience en matière d'aquariums publics et de
recherche et de développement en aquaculture. Lorsque nous avons discuté, j'ai
tout de suite pensé qu'un aquarium spécifiquement consacré à une espèce «
attachante » comme le homard (avec boutiques et comptoirs de restauration)
pourrait attirer des visiteurs de l'est du Canada et des États-Unis.
Recevez, M. Caddy, mes meilleures salutations.
Mark
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
Mark J. Costello, Ph.D.
Directeur exécutif
Centre des sciences de la mer Huntsman
1, ch. Lower Campus
St Andrews (Nouveau-Brunswick)
Canada E5B 2L7
No de téléphone : +1 (506) 529-1224
No de télécopieur : + 1 (506) 529-1212
www.huntsmanmarine.ca
Programme de formation en écologie des pêches l'intention du New Brunswick
Peoples Aboriginal Council
Plan et contenu des cours proposés
But
Communiquer des connaissances pratiques relatives au milieu marin aux membres
du NBAPC, qui possèdent divers niveaux de scolarité, afin qu'ils soient en
mesure d'utiliser les ressources marines d'une manière plus efficace et viable.
Ce type d'utilisation peut englober des entreprises actuelles et nouvelles de
pêche et d'aquaculture. La connaissance de l'incidence du milieu sur ce type de
ressources constitue un facteur essentiel, si l'on veut protéger les ressources
et empêcher l'exploitation non viable.
Durée
- 10 jours de cours à plein temps, au Centre des sciences de la mer
Huntsman, à St. Andrews (N.-B.)
- Il s'agit d'un cours intensif, qui se prolonge souvent en soirée.
Calendrier
Le calendrier doit être souple, afin de tenir compte de l'emploi du temps
variable des membres du NBAPC, ainsi que de celui des instructeurs.
- Première session : fin août 2001, sous réserve de la disponibilité des
parties; les dates précises restent à déterminer.
- Session suivante : fin novembre 2001?
Contenu des cours proposé (nous demandons la
rétroaction des intéressés)
- Introduction au milieu marin (deux jours et demi)
- Habitats écologiques et organismes connexes
- Facteurs et processus écologiques
- Y compris les questions touchant la qualité de l'eau, le cycle nutritif et
le rôle des algues et du plancton
- Biologie et physiologie de base des espèces aquatiques
- p. ex., effets de la température sur l'activité, la croissance et la
reproduction
- Interrelations des organismes au sein des écosystèmes
- Organismes marins - collecte et identification (deux jours et demi)
- Excursions :
- Excursion d'un jour en bateau - échantillonnage d'habitats écologiques et
d'organismes connexes
- Excursion d'une demi-journée à la plage - observation d'habitats
écologiques et d'organismes connexes
- Reconnaissance de la faune et de la flore marines - poissons, invertébrés,
végétaux
- Sensibilisation aux organismes qui ne peuvent être reconnus précisément
sur le terrain et qui exigent un examen en laboratoire ou les compétences de
spécialistes
- Ressources - livres, Internet
- Incidence de l'humain sur le milieu marin (anthropisation) - eaux d'égout,
déchets industriels, dragage, pêche au chalut, aquaculture (deux jours)
- Remise en état de sites endommagés
- Excursion d'un jour en bateau - comparaison entre le plancher océanique
d'un site endommagé et celui d'un site non endommagé
- Introduction à l'aquaculture (deux jours)
- Pratiques et contraintes actuelles en matière d'aquaculture
- Saumon atlantique, moules
- Visites
- Survol de la recherche relative aux nouvelles entreprises d'aquaculture
- Esturgeon, flétan, plie, aiglefin, bar d'Amérique, omble, oursin,
pétoncles
- Introduction à la pêche (un jour)
- Notions de gestion des pêches
- Exemples de pêches locales
- Homards, pétoncles, hareng, fucus
Prochains cours
Il s'agirait de cours plus spécialisés et conçus pour répondre au besoins des
membres du NBAPC. Les besoins détermineraient le contenu des cours et la méthode
pédagogique privilégiée (proportion d'exposés didactiques, de travail en
laboratoire, d'excursions, etc.)
Personnel enseignant
Un coordonnateur de cours dirigera l'organisation des cours et contribuera à
l'enseignement. Un aide-enseignant à plein temps s'occupera de la classe pendant
toute la durée de la formation. Les instructeurs suivants du CSMH devraient être
disponibles :
Mark Costello, Ph.D. - directeur exécutif. M. Costello possède plus de 10 ans
d'expérience de l'enseignement des sciences de l'environnement et de la mer,
notamment l'interaction de l'aquaculture et du milieu, l'écologie marine et
d'eau douce, l'écotoxicologie et la protection de la nature.
Lou Van Guelpen, M.Sc. (coordonnateur de cours) - Conservateur d'ichtyologie
et directeur de la collection du Centre référence atlantique; ichtyologiste.
Mick Burt, Ph.D. - Directeur associé et directeur des programmes de
formation; parasitologiste.
Gerhard Pohle, Ph.D. - Scientifique principal en matière de projets appliqués
et conservateur de la section des invertébrés du Centre référence atlantique;
systématicien en matière de crustacés et écologiste spécialisés dans les
poissons benthiques.
Lynn Lush, M.Sc. - Technicienne en aquaculture.
Brian Glebe, Ph.D. - Directeur du programme d'exploitation des stocks
reproducteurs de saumon atlantique; spécialiste de l'aquaculture.
Tracey Dean, M.Sc. - Coordonnatrice du programme d'éducation du public;
ornithologue.
Derrick Iles, Ph.D. - Scientifique émérite; spécialiste des sciences
halieutiques.
Tanya Leverette, B.Sc. - Adjointe de recherche.
Nous ferons appel à des instructeurs invités du MPO et d'autres organismes,
au besoin.
F4750-010010
John F. Caddy
Via Cervialto 3,
Aprilia
Latina 04011
Italie
Titre du contrat :
L'état des connaissances sur la ressource homard dans la baie Miramichi et
dans les eaux adjacentes. L'entrepreneur doit faire preuve d'une expertise
reconnue en évaluation des ressources marines.
Travaux requis/Mandat
- Examiner les données existantes et les études scientifiques relatives à
l'état des stocks de homard dans la baie Miramichi et la zone de pêche du
homard 23.
- Discuter avec les pêcheurs de la Première Nation Burnt Church et d'autres
pêcheurs commerciaux des répercussions de la pêche de printemps sur les taux
de prises, sur l'abondance et sur la distribution du stock dans la baie
Miramichi et les régions environnantes et explorer les répercussions de la
pêche d'automne sur la conservation.
- Examiner le plan de pêche du homard proposé par la Première Nation Burnt
Church pour l'année 2001 et évaluer les répercussions sur la conservation.
- Identifier toute lacune dans l'information ou les connaissances
relativement à la pêche du homard dans la baie Miramichi et identifier les
études à réaliser en vue de combler ces lacunes.
- Élaborer l'ébauche d'un rapport comprenant une analyse et des observations
d'ici le 13 juillet 2001.
Période visée par le contrat :
Du 19 juin 2001 au 13 juillet 2001, soit une période totale de 25 jours.
à carapace molle |
État d'un homard après la mue. |
abdomen |
Queue articulée du homard, située à l'arrière
de la carapace. |
analyse bioéconomique |
Analyse du rendement des ressources naturelles
fondée sur les caractéristiques biologiques, mais exprimant les rendements
en valeurs monétaires. |
analyse rétrospective |
Dans le secteur de la pêche, technique
d'analyse de données permettant de calculer d'avance les chiffres concernant
la population. |
capacité limite |
Quantité ou le poids de homards que peut
soutenir ou produire une zone déterminée du fond océanique. |
caseta |
« Cabane à homard » artificielle utilisée à
Cuba et au Mexique pour abriter les langoustes ainsi que pour l'exploitation
par les plongeurs. |
coefficient de potentiel de capture (q) -
accroissement du facteur q |
Mesure dans laquelle une unité d'engin de pêche
produit la mortalité - le changement (augmentation) de q qui se produit
durant les saisons plus chaudes dû à une forte densité de homards, à la faim
et à une activité accrue durant cette période de l'année. |
cogestion |
Collaboration entre divers paliers de
gouvernement (p. ex. le village local et le gouvernement fédéral) dans le
cadre de la gestion d'une ressource. |
déficit |
Perte d'avantages futurs résultant d'un acte. |
degrés-jours |
Mesure de la chaleur du milieu pendant la
saison ou pendant l'année, obtenue en additionnant les températures
ambiantes quotidiennes pour la période concernée. |
échelle spatiale |
Échelle à laquelle certains événements se
produisent comme les zones statistiques, les provinces, les pays, le monde,
l'univers, etc., chaque élément ayant des dimensions précises. |
effet de « crémaillère » |
Principe courant en matière de pêche qui
signifie que l'effort de pêche augmente, mais diminue rarement par la suite. |
équité intergénérationnelle |
Façon de gérer une pêche de sorte que les
générations futures aient les mêmes possibilités d'en tirer un moyen de
subsistance qu'aujourd'hui. |
étiquetage - microétiquetage |
Fixer un numéro sur un animal afin de pouvoir
le reconnaître quand il sera capturé à nouveau - en utilisant une minuscule
étiquette. |
étranglement du recrutement |
Carence d'une caractéristique de l'habitat ou
du milieu dont l'espèce a besoin pour compléter son cycle de vie qui fait
qu'un nombre limité de sujets atteignent la maturité. |
expérience d'épuisement |
Observation expérimentale étudiant les
diminutions de prises à la suite de la récolte progressive de sujets. |
fécondité |
Nombre d'oeufs produits ou capacité de
reproduction. |
femelle oeuvée |
Femelle de homard avec des oeufs sous la queue. |
fissures |
Cavités dans ou sous les rochers ou dans le
fond marin où se réfugient des animaux comme les homards. |
fractale |
Type de surface ayant un aspect semblable vu à
divers degrés de grossissement. |
gestion ascendante -gestion descendante |
Gestion due à l'initiative des collectivités
locales. Gestion imposée par le gouvernement. |
gestion communautaire |
Approche démocratique à la gestion en vertu de
laquelle la collectivité locale prend l'initiative d'instaurer des mesures
de gestion. |
habitat |
Cadre de vie d'un animal. |
harmoniser |
Faire en sorte que deux types de règlements ou
de plans de pêche soient compatibles. |
homarus americanus |
Nom latin du homard d'Amérique. |
maturité - maturité fonctionnelle |
Un animal est mature s'il est capable de se
reproduire. Un homard mâle de petite taille peut être arrivé à maturité
sexuelle tout en étant incapable de retourner une femelle sur le dos; par
conséquent, il n'est pas mature fonctionnellement. |
métapopulation |
Population d'animaux constituée de plus petites
populations qui ont des contacts limités entre elles. |
mise en valeur |
Initiatives pour accroître la capacité de
l'habitat de produire des homards. |
modélisation |
Préparation d'un modèle mathématique analogue à
la population. |
mue - à carapace molle |
Action de quitter sa carapace : processus
nécessaire à la croissance des animaux dotés d'une carapace extérieure
rigide. |
plancton |
Petits animaux qui nagent dans les eaux (de
surface) : les larves de homard y passent leur quatre premiers stades de
développement (I à IV). |
produits organiques |
Produits chimiques synthétisés par des
organismes vivants. |
progéniture |
Descendance. |
progéniture |
Génération suivante. |
recrutement |
Nouveaux animaux accessibles en un an, dans ce
cas à la suite de la mue d'été et d'une phase de croissance qui leur fait
atteindre une taille supérieure aux tailles légales minimales. |
refuge |
Partie de l'aire couverte par le homard où les
risques de capture sont les moins grands (ou dispositifs des engins de pêche
permettant aux sujets de certaines tailles de s'échapper). |
régimes d'occupation |
Régimes d'utilisation de l'habitat à proximité
de la collectivité, qui tiennent compte des droits d'utilisation. |
REM (rendement économique maximum) |
Rendement économique maximum obtenu en
pratiquant la pêche sur une population : est atteint à un degré de pêche
inférieur au RMD. |
retardement |
Réduction du taux de croissance et de la taille
maximale due à un surpeuplement ou à une maturité précoce. |
RMD (rendement maximum durable) |
Degré de pêche permettant d'atteindre le
tonnage maximum : si l'effort de pêche est plus intense ou moins intense, le
rendement est inférieur. |
sélection naturelle |
Processus décrit par Darwin en vertu duquel des
causes naturelles (ou des activités étalées sur une longue période comme la
pêche sélective en fonction de la taille) fait acquérir à un animal des
caractères biologiques devenant dominants dans la population, ou moins
courants. |
spermatophore |
Paquet de sperme transmis à la femelle au cours
de l'accouplement des homards, qu'elle garde jusqu'à une ponte ultérieure. |
subsidiarité |
Principe selon lequel un palier de gouvernement
supérieur délègue les pouvoirs en matière de gestion à un gouvernement local
ou à une collectivité locale, ou encore à un autre groupe social. |
taille de l'anneau |
Diamètre intérieur de l'ouverture circulaire à
l'entrée du casier. |
taux de mortalité naturelle - taux de mortalité
par pêche (=m/F) |
Taux de mortalité dû à des causes naturelles
comme la prédation. Taux de mortalité dû à la pêche. |
théorie du stock recrue |
Théorie régissant le nombre de recrues
produites par la génération parentale. |
thermique |
Relatif à la température et à la chaleur. |
travail au noir |
Terme péjoratif utilisé pour parler d'une
personne ayant un emploi à temps partiel (qui pêche sans permis, p. ex.). |
valeur de reproduction |
Valeur qu'a une femelle de homard pour la pêche
en raison des oeufs et des nouvelles recrues qu'elle produit : elle peut être
supérieure à sa valeur marchande. |
vulnérabilité |
État physiologique d'un homard qui le rend plus
ou moins susceptible d'entrer dans un casier. |
Première nation Burnt Church
10, promenade Bayview
Burnt Church (N.-B.)
E9G 2A8
Tél. : (506) 776-1200
Fax : (506) 776-1215
Le 18 juillet 2001
Réponse initiale du chef Wilbur Dedam, de la Première nation Burnt Church, à
l'Ébauche du rapport du 10 juillet 2001, intitulée : L'ÉTAT DES CONNAISSANCES
SUR LA RESSOURCE HOMARD DANS LA BAIE MIRAMICHI ET DANS LES EAUX ADJACENTES;
SUGGESTIONS CONCERNANT LE RÈGLEMENT DU CONFLIT AU SUJET DES SAISONS DE PÊCHE ET
PISTES DE RECHERCHE VISANT À FACILITER LA GESTION DU HOMARD (présentée par J.F.
Caddy, Ph.D., chercheur universitaire, université de Londres, Royaume-Uni)
C'est avec un vif intérêt que mon personnel de soutien et moi-même avons fait
un examen initial du rapport en question. En raison de sa complexité, il y a
lieu de faire de nombreux commentaires préliminaires supplémentaires sur ce
rapport au cours de la semaine ouvrable débutant le 16 juillet 2001, et c'est
précisément ce que j'ai fait. J'ai trouvé ce rapport à la fois intéressant et
discutable. Personnellement, je crois que la principale leçon à en tirer est la
nécessité d'un dialogue sérieux sur la pêche du homard, entre égaux (c.-à-d.
entre le Canada et notre Première nation);
... Le thème qui semble pertinent d'emblée dans le passage ci-dessus (tiré des
directives techniques concernant le Code de conduite pour une pêche responsable
de la FAO, 1999) est la nécessité du respect des connaissances traditionnelles,
mais pour qu'une entente de partage de la ressource soit fructueuse, les deux
parties concernées devraient collaborer à la recherche sur les pêches et à la
collecte de données; il faut que ce soit la base de toute cogestion future de la
ressource homard (p. 22).
... Même sur la scène internationale, les états doivent participer à la
cogestion des stocks communs et ne peuvent procéder unilatéralement. En fait, le
droit de la mer les oblige à se réunir et à mettre en place un mécanisme de
gestion du stock commun. Permettez-moi de signaler qu'il n'est pas inhabituel
pour deux entités politiques (à l'intérieur d'un pays ou entre états) d'avoir
des opinions différentes sur la propriété des ressources ou sur les droits
d'accès. L'une des exigences fondamentales dans ce genre de situation est d'être
disposé à négocier une entente périodiquement renouvelable d'une durée fixe. Il
y a fort à parier que cette entente ne sera pas la solution optimale souhaitée
par les deux parties (tout la plupart des ententes), mais elle devrait supposer
un partage équitable des restrictions entre les deux parties (p. 25).
Je suis fermement convaincu que l'un des principaux obstacles à la conclusion
d'une entente de partage des ressources halieutiques avec le Canada est le
manque de respect du gouvernement fédéral pour le désir de la Première nation de
participer activement à la gestion future de la pêche. Le rapport signale
d'ailleurs ce manque de respect.
... Le MPO n'a pas reconnu le plan de gestion du homard de la nation de Burnt
Church ni les étiquettes de casier distribuées par Burnt Church en application
de ce plan. L'arrestation de pêcheurs autochtones et la confiscation de leurs
engins sont survenues au cours de la pêche d'automne de l'année dernière; des
coups de feu ont été tirés et des membres des deux camps ont subi des blessures
corporelles. Quelques dizaines de millions de dollars ont été dépensés pour la
répression dans une atmosphère digne de celle qui règne dans les états policiers
dans le cadre de certaines opérations (p. 16).
Pourtant, M. Caddy, l'auteur du rapport, signale que la gestion locale de la
pêche par les Premières nations n'est pas un objectif déraisonnable et que
davantage d'aspects du plan de gestion de Burnt Church devraient être respectés
et mis en oeuvre.
... À l'exception de la question de la pêche d'automne, le plan actuel de Burnt
Church contient des dispositions très semblables à celles des plans du MPO, ce
qui simplifie l'harmonisation d'autres dispositions (pp. 8-9).
...étant donné qu'il y a deux plans de gestion à concilier... (p. 24).
... Lorsqu'on s'attarde sur les points techniques du plan de Burnt Church, qui
constituent l'objet du présent rapport, malgré les différences quant aux
objectifs de gestion [par rapport à la politique et au plan du MPO], les
démarches sont très semblables... (p. 26)
En fait, M. Caddy a fait d'excellentes recommandations aux pages 51 à 53 de
l'Ébauche du rapport en vue de faciliter la gestion de la ressource par la
nation de Burnt Church, ce qui inclurait la capacité de notre gouvernement
mi'kmaq de :
- Gérer les mécanismes de prise de décision ;
- Acquérir des services de recherche ;
- Gérer l'accès ;
- Surveiller les activités de pêche ;
- Offrir des services d'information et d'éducation ;
- Veiller à l'application des règles (nature non criminelle);
- Percevoir des droits pour financer la gestion. (pp. 51-53)
Ce sont des questions et une approche dont le MPO a refusé de discuter
sérieusement jusqu'à présent. En outre, M. Caddy, contrairement au MPO, refuse
d'exclure une pêche d'automne pour la nation de Burnt Church :
... une pêche d'automne limitée dans la baie Miramichi semble inévitable... (p.
74)
... Cependant, si l'on accepte le point de vue des deux parties, il serait
peut-être possible d'instaurer deux saisons, mais à la seule condition d'assurer
une surveillance étroite et que ce soit en vertu d'un système d'attribution des
prises par saison, ou par pêcheur, surveillé de près. (p. 10)
Étant donné que M. Caddy recommande l'harmonisation des plans de pêche du
gouvernement fédéral et de la nation de Burnt Church, qu'il favorise une
approche « ascendante » à la gestion des pêches que nous préconisons depuis
longtemps et qu'il considère que notre pêche d'automne est « inévitable » et «
possible », quelles sont ses principales préoccupations et en quoi approuve-t-il
l'approche de la Première nation? Il signale clairement que ... Le principal
problème, à mon avis, est le niveau d'exploitation proposé à l'automne dans le
plan de Burnt Church et la durée de la saison d'automne. (p. 26) Pourtant, si le
gouvernement du Canada était disposé à accepter l'objectif de la Première nation
de planifier et de gérer la ressource halieutique tout en lui accordant les
moyens financiers nécessaires et en consultant les autres parties, un dialogue
fructueux sur le degré de pêche et la durée de la saison ne pourrait être exclu.
Dès le début, la position de la Première nation a été d'élaborer et de présenter
son plan de gestion et d'être disposé à dialoguer avec le MPO sur les
possibilités d'harmonisation de ce plan avec la politique et le plan du MPO,
pour les rendre compatibles. Depuis le début, le MPO rejette cette approche en
insistant sur le fait qu'il est le seul organisme de réglementation et que la
nation de Burnt Church doit accepter le plan fédéral. Nous avons résisté à cette
approche ne nous laissant aucune marge de négociation. Les motifs pour lesquels
M. Caddy recommande une pêche d'automne plus restreinte pour la nation de Burnt
Church sont exposés brièvement dans les pages 3 à 6 de son rapport. Il
recommande une pêche de printemps pour les Indiens. Pourtant, il reconnaît que
les données disponibles sont incomplètes. La magnitude de l'incidence de la
productivité supérieure de la pêche d'automne sur la pêche du printemps suivant
dépend en grande partie de la proportion du stock de homards des zones 70, 71 et
75 qui migrent dans le « triangle » où les membres de la nation de Burnt Church
ont pêché. On ne connaît pas l'importance de cette migration et par conséquent
M. Caddy fait plusieurs « hypothèses » qui n'ont pas été confirmées par la
Direction des sciences. Alors que ses craintes sont fondées, la saison pour
laquelle il recommande l'octroi de fonds à la nation de Burnt Church pour
combler cette carence n'est pas appropriée.
Bien que M. Caddy fasse plusieurs suggestions très pertinentes consistant à
mettre à profit l'intérêt que portent les Premières nations à la préservation du
homard et à la recherche sur le homard pour générer de l'emploi et réduire les
pressions exercées sur ce qu'il considère comme une pêche d'automne intensive,
il attribue beaucoup trop de mérites aux pêcheurs non autochtones pour ce qui
est du maintien et de la mise en valeur de la pêche du homard jusqu'à présent.
Il semble également beaucoup trop enclin à dépeindre la pêche d'automne par les
Premières nations comme une activité perturbatrice qui est actuellement une
source de troubles publics. Je crains que la situation ne soit beaucoup plus
complexe. Le racisme est un facteur qui intervient beaucoup dans la volonté de
contrôler les pêches en forçant les Premières nations à se conformer à des
modèles non indiens, sans leur laisser d'autres options.
En ma qualité de chef et de principal porte-parole pour la nation de Burnt
Church, je ne suis pas insensible aux craintes de M. Caddy qu'une pêche
d'automne intensive, ajoutée à la décision des pêcheurs non autochtones de
pêcher également en automne, risque d'avoir des conséquences catastrophiques
pour le homard de la baie Miramichi. La conservation doit être une priorité
importante. Cependant, le Canada n'obtiendra pas la collaboration des Mi'kmaqs
en matière de conservation tant que les droits et le statut inhérents à la
décision Marshall ne seront pas respectés par le gouvernement fédéral. Le
gouvernement de Burnt Church est un gouvernement à part entière, et il doit être
traité comme tel. Il faut que ce soit un dialogue de « nation à nation ». Les
nations doivent collaborer dans l'intérêt de la conservation. Si le gouvernement
fédéral continue d'opter pour des solutions imposées et des pratiques de
répression aveugle au lieu d'encourager une véritable collaboration,
l'harmonisation et la compatibilité, c'est la conservation qui en souffrira.
Aucun plan de gestion n'est coulé dans le béton. Les quantités de homards pêchés
et la durée de la saison sont des sujets de préoccupation légitimes, mais la
planification, l'administration, la gestion et la mise en application par les
Premières nations le sont également. Toutes les questions doivent être abordées.
Les paramètres d'une pêche d'automne doivent être négociés et pas imposés.
J'estime que, contrairement aux efforts et aux propositions antérieurs,
l'Ébauche du rapport de M. Caddy peut être le point de départ d'un nouveau
dialogue, mais elle ne peut servir à appuyer uniquement la position du MPO ou
celle de la Première nation. C'est un premier pas dans la bonne direction. Nous
devons examiner les problèmes qui ont été soulevés sans toutefois sauter à la
conclusion que l'auteur a trouvé toutes les réponses.
En toute fraternité,
Le chef Wilbur Dedam
Pour la Première nation mi'kmaq de Burnt Church
The Maritime Fishermen's Union Inc.
L'Union des Pêcheurs des Maritimes Inc.
408, rue Main
Shediac (N.-B.)
E4P 2G1
Tél. (506) 532-2485
Télécopieur : (506) 532-2487
mfuupm@nbnet.nb.ca
Le 1er août 2001
M. J.F. Caddy
Via Cervialto 3
Aprilia 04011
Latina
Italie
Monsieur,
Nous avons eu l'occasion d'étudier l'ébauche de votre rapport,
particulièrement le Sommaire, sur lequel portent en grande partie les remarques
ci-dessous. En général, nous croyons qu'il s'agit d'un document utile, dans la
mesure où il permet à l'ensemble des parties intéressées d'examiner les enjeux
dans un cadre défini. De plus, les éléments essentiels du cadre valident les
conclusions tirées depuis longtemps par les pêcheurs, c.-à-d. que « ... si la
pêche d'automne n'est pas réglementée, toute la récolte se fera à l'automne ...
» et que « ... la pêche d'automne est d'une telle efficacité qu'elle risque
d'entraîner une surpêche et une diminution des stocks ... ».
Vous avez raison de souligner le fait que la « vulnérabilité » des homards
d'automne dans la baie est beaucoup plus élevée que durant la saison de pêche
commerciale printanière. Dire de cinq à six fois constitue un bon indicateur;
toutefois, le taux de capture pourrait se révéler largement supérieur, selon la
période et la définition de la zone.
Au point no 6 du Sommaire, vous faites allusion aux « ... zones où le MPO a
permis aux pêcheurs de Burnt Church de pêcher ... ». Cependant, en réalité, la
plupart des activités de pêche menées en 1999 et en 2000 ont défié les
directives du MPO; en outre, les eaux réglementées auxquelles vous faites
référence n'étaient pas clairement définies. Néanmoins, vous avez raison
d'affirmer que « ... l'incidence de la pêche d'automne dépend principalement du
degré de chevauchement spatial de la pêche avec la migration des homards vers
les eaux côtières en été ... ».
Au point no 18, vous soulignez la nécessité de données fiables : au cours de
nos trente années d'expérience, l'efficacité de la gestion n'a pas dépendu des
données qui, selon vous, sont essentielles. Les pêcheurs commerciaux affirment
d'un commun accord que l'élément essentiel consiste à adhérer à l'ensemble de
pratiques de pêche élaborées au fil du temps : p. ex., taille minimale,
protection des femelles oeuvées, dispositifs d'évasion et limites saisonnières.
En outre, on reconnaît de plus en plus la nécessité de protéger les grosses
femelles.
Au point no 21 (également dans le Sommaire), lorsque vous affirmez que « ...
si l'on accepte le point de vue des deux parties, il serait peut- être
possible d'instaurer deux saisons ... », vous omettez de préciser que l'adoption
de deux saisons représente le point de vue d'une des parties seulement, c.-à-d.
les pêcheurs de Burnt Church. Vous soulignez auparavant que la pratique d'une
pêche d'automne importante éliminerait probablement la saison printanière. Par
conséquent, lorsque vous évoquez la « surveillance étroite » et l'« attribution
des prises », vous devez faire allusion à une forme quelconque de pêche
d'automne temporaire restreinte, c'est-à-dire une allocation accordée aux
pêcheurs de Burnt Church, selon une « fraction » de la capture commerciale
anticipée. Nous constatons, aux points nos 28 et 29, que vous proposez que l'on
utilise ce type d'allocation pendant une période de transition, en vertu d'une
entente.
Si l'entente est généralement semblable à celles d'autres bandes (p. ex., la
bande de Big Cove), la bande se verrait accorder de vingt-cinq à trente
exploitations de pêche côtière commerciale. Compte tenu du fait que la bande a
exploité treize permis de pêche du homard durant la saison du printemps 2001, et
compte tenu du « potentiel de capture » du homard d'automne, la pêche temporaire
autorisée, le cas échéant, à l'automne 2001 en vertu d'une entente devrait de
fait être très restreinte. L'acceptation de ce type de pêche restreinte par les
pêcheurs commerciaux dépend entièrement de la crédibilité des dispositions
d'application et de surveillance et de la garantie que l'activité de pêche
relève de permis achetés de pêcheurs commerciaux qui exercent dans le secteur
visé.
En ce qui concerne la section portant sur « l'absence d'une entente de pêche
avec le MPO », nous la considérons comme inutile. Comment ce plan de gestion
d'urgence pourrait-il être plus réalisable que le plan de l'an dernier relatif à
la pêche de subsistance? De plus, vous savez très bien que les pêcheurs de
homard du secteur ne croient pas en la pertinence d'un système de contingents
par bateau; votre proposition d'urgence créerait des divisions entre les
pêcheurs commerciaux qui pêchent du thon, du hareng ou du crabe commun, entre
autres, à l'automne et qui, par conséquent, seraient désavantagés par rapport
aux autres qui ne comptent pas sur ce type de pêche pour compléter leur année.
En outre, la zone d'urgence que vous proposez entrerait en conflit avec des
zones adjacentes qui font également partie de la zone de pêche de homard 23.
Tous les intervenants tentent de trouver d'autres façons d'élaborer un plan
d'urgence. Cette question déborde la portée des présentes remarques.
Enfin, nous tenons à préciser de nouveau que, dans l'ensemble, votre rapport
constitue un document utile et qu'il comporte de nombreux éléments constructifs
qui n'ont pas été soulignés aux présentes. Le rapport principal contient divers
points qui pourraient être contestés; par exemple, le raisonnement que vous
utilisez pour démontrer l'existence de points communs entre le plan des pêcheurs
de Burnt Church et le plan de gestion du MPO est quelque peu exagéré. Le plan
est différent sur le chapitre des éléments fondamentaux, notamment les saisons,
l'autorité en matière de gestion, la délimitation des zones, l'effort de pêche,
l'accès à la pêche, etc. Quoi qu'il en soit, nous sommes conscients que vous
cherchez simplement une solution à l'impasse.
Nous sommes convaincus que les fondements de votre rapport contribueront à
améliorer l'entente entre les parties dans l'immédiat et à long terme.
Recevez, M. Caddy, mes salutations distinguées.
Le Secrétaire exécutif,
Michael Belliveau
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