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Poissons et vies aquatiques

Le monde sous-marin

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Le Saida

La vie n'est pas facile dans les eaux froides de l'Arctique. Les poissons n'y sont pas aussi abondants ni aussi variés qu'au sud. L'un de ces rudes habitants du Grand Nord est le saida (Boreogadus saida), petite espèce apparentée à la morue et classée dans la famille des gadides comme plusieurs autres espèces du genre. Bien qu'il ne fasse pas l'objet de pêche commerciale au Canada, le saida joue un rôle clé dans le régime alimentaire de plusieurs mammifères marins, d'oiseaux de mer et de poissons de l'Arctique.

Description

Le saida possède un corps long, très effilé vers la queue, et peut atteindre jusqu'à 38 cm, mais dépasse rarement 30 cm. Bien qu'il ressemble à d'autres membres de la famille de la morue, tels que la morue de roche, l'aiglefin et le poulamon, on peut facilement le distinguer de ces derniers par son corps plus mince, sa queue nettement fourchue, sa mâchoire inférieure débordante et le très petit barbillon de sa mâchoire inférieure.

Le dos et la partie supérieure des côtés sont brunâtres dans l'ensemble et parsemés de nombreux petits points noirs. Le dessous est argenté. Les nageoires sont foncées, presque noires, avec une étroite bordure pâle. Une ligne latérale pâle court des deux côtés du corps de la tête à la queue. Les écailles sont très petites.

Distribution

On trouve le saida tout autour du pôle. Ce poisson a été observé plus au nord que tout autre, soit par 84°42' de latitude nord. Il habite les mers arctiques au nord de la Russie, de l'Alaska, du Canada et du Groenland. En eaux canadiennes, on peut l'observer dans la mer de Beaufort, l'archipel arctique, la baie d'Hudson, la baie Baffin, le long de la côte du Labrador et de la côte est de Terre-Neuve ainsi que dans les secteurs est et nord des Bancs de Terre-Neuve. On en a vu errer à l'occasion dans le golfe Saint-Laurent.

On croit que la température optimale de survie du saida se situe entre 0 et 4°C, bien que les biologistes de la côte est du Canada l'aient surtout observé dans des eaux de température inférieure à 0°C et souvent à proximité de glaces en dérive. On a remarqué que sa taille diminue au fur et à mesure que l'on descend vers le sud. Au large du secteur nord du Labrador, sa longueur varie en moyenne de 25 à 30 cm, tandis que dans le secteur sud, elle est de 10 à 25 cm et au large de la côte est de Terre-Neuve, de 10 à 18 cm.

On peut observer le saida près du littoral parmi les banquises et au large, à des profondeurs de plus de 900 m. Des expéditions de pêche exploratoire ont révélé qu'au large du nord du Labrador et de l'île Baffin, les meilleures prises des chaluts à panneaux se faisaient par 100 à 250 m de fond à des températures de -1.4 à 0.6°C. Au large du secteur sud du Labrador et nord de Terre-Neuve, les prises étaient plus petites et se trouvaient pour la plupart à des profondeurs de 200 à 300 m, là où la température du fond varie de - 1.2 à 3.6°C. À l'automne, on a observé que les saidas se rassemblaient en grand nombre et se déplaçaient vers les eaux côtières.

Cycle biologique

Les saidas mâles et femelles parviennent à maturité lorsqu'ils atteignent environ 20 cm, soit vers l'âge de trois ans. Dans les eaux boréales canadiennes, on croit que le frai a lieu tard l'automne et en hiver. Au large du nord de la Russie, il se produirait en janvier et en février.

Les gonades du saida mâle mature sont relativement grosses et représentent environ 10% du poids total. Les femelles arrivées à maturité produisent des oeufs d'un diamètre variant de 1.5 à 1.9 mm. Lors du frai annuel, elles libèrent de 9,000 à 21,000 oeufs, comparativement à une moyenne de deux à cinq millions dans le cas de la morue et de 1,800,000 pour l'aiglefin. Le frai a lieu sous la couche de glace de l'Arctique et la fertilisation est externe, c'est-à-dire que la femelle dépose ses oeufs dans la mer où ils sont fertilisés par la laitance du mâle.

Le saida est le principal consommateur de plancton (organismes microscopiques de nature végétale et animale) dans les mers arctiques. Contrairement à la morue, qui est un poisson de fond, il se nourri rarement d'organismes qui vivent sur le fond, mais plutôt de ceux qui forment le plancton en suspension dans les couches supérieures.

Les petits saidas (4 à 6 cm) se nourrissent principalement d'oeufs et de larves de copépodes et d'amphipodes adultes, qui sont tous deux de très petits crustacés. Le régime alimentaire des saidas de taille intermédiaire, soit de 8 à 12 cm de longueur, se compose de copépodes, d'amphipodes et d'euphausiacés, crustacés ressemblant à des crevettes. Quant aux individus de plus de 12 cm, ils mangent des copépodes, des amphipodes et des chétognathes. Les gros saidas, en plus d'affectionner le plancton, ont des instincts quelque peu cannibales et se nourrissent des membres plus petits de leur espèce.

Le poids de ce poisson est lié à sa longueur. Un individu mesurant 10 cm pèse environ 10 g, un de 20 cm, environ 70 g, et un de 28 cm, environ 180 g.

Il peut également y avoir une corrélation entre l'âge et la longueur, bien qu'on ait remarqué que les saidas de l'océan Arctique croissent habituellement plus lentement que ceux de la côte du Labrador. En général, ils mesurent environ 9 cm à un an, 15 cm au début de leur deuxième année et 20 cm à trois ans. Leur rythme de croissance semble diminuer légèrement après la troisième année, les poissons de quatre ans mesurant seulement 22 cm en moyenne et ceux de cinq ans, 25 cm.

Les saidas ont une courte vie. Des expéditions scientifiques au large de la côte du Labrador ont révélé que les individus les plus âgés n'avaient que six ans. On a déterminé leur âge en comptant les anneaux qui s'ajoutent chaque année aux os de l'oreille, tout comme on évalue l'âge d'un arbre en additionnant les anneaux de la souche.

Population

Les connaissances actuelles ne permettent pas d'évaluer la population de saidas de l'Arctique canadien. Les données obtenues lors des expéditions de pêche exploratoire au large du secteur nord du Labrador en septembre 1978, laissent supposer qu'il en avait à ce moment plusieurs centaines de milliers de tonnes à cet endroit.

Les enquêtes menées en 1978 à l'aide d'écho-sondeurs dans une zone d'environ 18,000 milles carrés, au large de la partie sud du Labrador et nord de Terre-Neuve, donnent à croire qu'il y avait alors environ 100,000 tonnes de saidas, pour la plupart des jeunes de l'année.

Cette augmentation récente de la population de saidas dans la région de Terre-Neuve et du Labrador a pu venir des conditions de l'environnement dans l'Arctique et être de courte durée: les indices d'abondance, depuis 1979, indiquent d'ailleurs que le nombre de saidas a diminué.

Importance biologique

Comme d'autres environnements marins, les eaux arctiques servent d'habitat à un système d'organismes complexes, dont un grand nombre influe directement ou individuellement sur certaines autres formes de vie. Deux points importants différencient les ressources marines de l'Arctique de celles des zones plus tempérées: une moins grande diversification des espèces et un niveau de reproduction inférieur. La perte d'une seule espèce pourrait gravement perturber la chaîne alimentaire, entraînant des changements radicaux sur de nombreux plans. La disparition du saida des zones boréales pourrait s'avérer catastrophique, car il constitue un élément important du régime alimentaire de nombreuses espèces de mammifères marins, d'oiseaux de mer et de poissons.

Le narval, par exemple, en fait son ordinaire: on a déjà trouvé les restes de quelque 64 saidas dans l'estomac d'un seul individu. Le béluga et le phoque annelé s'en nourrissent aussi quelquefois, et il constitue une source alimentaire essentielle des oiseaux de mer, surtout les marmettes. Une étude a révélé qu'au cours d'une période de 35 jours au moins 1,4 million de saidas (et l'on pourrait probablement multiplier ce nombre par 10) avaient été consommés par des oiseaux de mer posés en bordure de 125 km de glace fixée.

On a observé des morues se nourrissant de grandes quantités de saidas au large du nord-est de Terre-Neuve, au début du printemps. L'omble chevalier, le turbot du Groenland et le saumon de l'Atlantique en mangent aussi à divers moments. On ne sait pas encore si le saida fait concurrence au capelan pour trouver sa nourriture mais, de façon générale, il se tient dans des eaux plus froides que ce dernier. On a toutefois déjà observé les deux espèces dans la même zone, au large de la côte nord-est de Terre-Neuve et sud du Labrador, et de grandes quantités de saidas ont été prises de façon accidentelle au cours de la pêche automnale hauturière du capelan.

Valeur commerciale

Bien que les pêcheurs canadiens ne prennent pas de saidas à des fins commerciales, les chalutiers soviétiques en capturent en grand nombre, de façon accidentelle, au large du Labrador, en pêchant le capelan. En Russie, où il jouit d'une excellente réputation, il est exploité commercialement et présenté sur le marché sous plusieurs formes.

L'expansion de la pêche commerciale du saida au Canada pourrait s'avérer non viable pour les pêcheurs de la côte est en raison de la présence sporadique de l'espèce dans cette zone. De plus, toute pêche commerciale devrait être étroitement surveillée vu l'importance primordiale de ce poisson dans la chaîne alimentaire de l'Arctique canadien.

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Dernière mise à jour : 2006-06-06

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