Discours et interviews
le 5 octobre 2000
Gestion de culture ou culture de gestion ? Le double défi de Radio-Canada
Allocution prononcée par Madame Guylaine Saucier, Président du Conseil d'administration de Radio-Canada, à l'occasion
du Colloque de l'Ordre des administrateurs agréés du Québec, à Montréal
Bon après-midi, mesdames et messieurs,
Me voici de retour au pays — et
en très bonne compagnie — après un séjour inspirant à Sydney. Nous sommes réunis
aujourd'hui pour discuter du rôl e du nouveau manager et pour mieux cerner
l'art complexe de la gestion. Ayant été témoin de l'ultime gestion de
la volonté et du corps qu'accomplissent les athlètes olympiens, j'ai
tendance à aborder la question sous l'angle de la concurrence, de la performance
et de l'engagement.
Je veux vous parler de
concurrence car les managers de Radio-Canada ont un rôle unique à jouer dans un
univers télévisuel régi par des compétiteurs féroces. Je veux aussi vous parler
de performance, car la qualité de nos produits et la force de notre réputation
reflètent une gestion courageuse. Je veux finalement vous parler d'engagement,
car chez nous comme ailleurs, le succès est tributaire de la loyauté des troupes.
Pour
ce faire, j'aimerais prendre un petit détour et vous expliquer en quoi ce
point de vue s'accorde bien avec mon expérience personnelle en gestion, qui
prend racine au sein du secteur privé. En effet, dans ce milieu exigeant et compétitif,
la réussite dépend avant tout de l'ardeur des adversaires, du talent des dirigeants
et de la loyauté du personnel. C'est une réalité que j'ai découverte
assez tôt dans la vie.
En effet, c'est en
1975 que le destin m'a lancé un premier défi, la mort subite de mon père m'ayant
rudement propulsée dans l'arène commerciale. Fraîchement diplômée des Hautes études
commerciales, je me retrouvais donc, à 29 ans, à la barre d'une entreprise plutôt
« masculine », celle de la transformation du bois. L'entreprise familiale
comptait alors 329 employés et affichait un chiffre d'affaires de 17 millions
de dollars. Quatorze ans plus tard, j'y étais toujours, gérant maintenant la deuxième
plus grande entreprise du genre au Québec. Lorsque j'ai décidé de vendre
la société en 1989, 1 200 employés travaillaient pour le Groupe Gérard Saucier
et le chiffre d'affaires s'élevait à 85 millions de dollars.
C'est
dans ce contexte que j'ai appris la valeur de l'engagement, la nécessité
de la logique et l'importance d'une vision éclairée. Ce sont des leçons
personnelles que je n'ai jamais oubliées.
Suivant
la vente de l'entreprise familiale, j'ai décidé d'appliquer mes connaissances
à la régie d'autres entreprises en siégeant sur plusieurs conseils d'administration
dont ceux de Nortel, de Petro-Canada, de la Banque de Montréal et de la Banque
du Canada. En tant que femme d'affaires, j'étais vivement intéressée à participer
à la gestion de sociétés prestigieuses et à découvrir d'autres facettes du jeu
administratif. Je savais aussi que mes compétences et mon engagement envers des
pratiques transparentes et saines m'aideraient à faire évoluer ces sociétés.
Ayant
grandi au sein d'une entreprise soumise aux caprices des marchés, j'étais
convaincue que la réussite passait par la quête d'excellence... et que l'excellence
était toujours au service de l'effort.
Malgré
tout, je vous avoue que la présidence du Conseil d'administration de Radio-Canada
ne figurait pas dans mon profil de carrière. Mais si l'offre m'a surprise,
elle m'a également flattée puisqu'il s'agissait d'un poste hautement visible
et plutôt novateur. C'était aussi une occasion unique d'appliquer ma
propre recette de gestion efficace à l'une des plus importantes institutions
culturelles du pays.
Premier défi : la
gestion de culture
Vous savez, Radio-Canada
a été fondée à une époque très semblable à la nôtre, au moment même où l'arrivée
de nouvelles technologies allait repousser pour toujours les frontières du savoir.
à l'instar de l'Internet et de l'univers multi-canaux, ce phénomène
devait bouleverser les modes de communications, les loisirs, la culture collective,
et profondément modifier le mode de vie et la façon de penser de la population
canadienne. De fait, l'avènement d'un système de radiodiffusion véritablement
canadien en 1936 allait nous permettre de nous définir davantage comme peuple
et d'établir, sur nos ondes, une véritable tradition orale trempée aux valeurs
locales et linguistiques.
Au fil des décennies,
Radio-Canada a constitué un miroir de la culture d'ici et une scène où s'exprimer.
La Société est aussi devenue le tremplin et le mentor de nombreuses générations
de créateurs, de journalistes et d'artistes. En français comme en anglais, ses
produits visuels et sonores ont imposé des normes d'excellence universelles en
matière de programmation, de journalisme et de qualité de la langue en ondes.
Le personnel de Radio-Canada poursuit depuis toujours une démarche collective
qui vise à promouvoir et à favoriser l'identité canadienne, sous toutes ses facettes;
qui permet aux Canadiens des quatre coins du pays de mieux se connaître; qui célèbre
la diversité nationale, perçue comme un élément rassembleur.
Traditionnellement,
les managers de Radio-Canada ont surtout été des journalistes, des réalisateurs,
des intellectuels dont l'oeuvre reflétait des valeurs parfois uniques, parfois
communes, acquises au fil des expériences de production. Ce sont eux qui ont défini
et ancré les grandes valeurs « radio-canadiennes » : l'intégrité journalistique,
la diversité, la créativité, l'excellence.
Les
premières réductions budgétaires graves, en 1985, ont fortement ébranlé la barque
et forcé une première remise en question des grandes hypothèses. Par vagues successives,
les compressions ont inondé la Société et érodé, petit à petit, le moral des employés,
particulièrement celui des managers. Qui d'autre aurait pu survivre à l'assaut
féroce dont nous avons été victimes : des réductions budgétaires de l'ordre
de 30 pour cent et la suppression de 3 000 postes en 3 ans?
Malgré
tout, les grandes valeurs de la Société ont prévalu. En dépit des compressions,
des licenciements, des fermetures de stations, Radio-Canada a continué de fournir,
dans les deux langues officielles et dans huit dialectes autochtones, des services
radiophoniques, télévisuels et électroniques à plus de 30 millions de Canadiens.
Nous avons repoussé les frontières des nouveaux
médias avec Galaxie, le premier service audio payant qui diffuse, depuis 1997,
trente canaux de musique sans publicité par satellite et par câble. Nos chaînes
spécialisées, comme RDI et Newsworld, ont porté la programmation de nouvelles
24 heures sur 24 vers de nouveaux sommets de popularité. Nos explorations au niveau
de la radio audionumérique, tout comme la vigueur et la popularité de nos sites
Web, confirment bien que n'avons pas perdu notre sens de l'innovation
et de l'aventure.
Deuxième défi :
La culture de gestion
C'est donc
dans un climat mixte de création et de démoralisation que j'ai fait mon entrée
à Radio-Canada, en mars 1995. À cette époque, on assistait à un véritable revirement
des modes de gestion au pays, tant au sein des institutions publiques que privées.
Partout, les gestionnaires et les conseils d'administration se souciaient davantage
des questions de transparence, d'imputabilité et de responsabilité. On cherchait
le sens profond de la bonne gouvernance. C'est dans ce contexte que j'ai
trouvé ma place à Radio-Canada.
Immédiatement,
j'ai constaté des différences notoires entre les modes de gestion d'un organisme
« public » et d'une entreprise « privée ». Ici, la planification des affaires
semblait plus réactionnelle que proactive. Elle ciblait surtout le futur immédiat
et semblait dépendre des politiques culturelles et fiscales de l'heure.
Dans
un premier temps, il fallait comprendre la nature et le schème de pensée des managers
actuels qui présidaient aux destinées du radiodiffuseur public. Vous savez, Radio-Canada
vit une situation unique puisque ses gestionnaires ne sont généralement pas des
diplômés des HEC ou d'autres grandes écoles de commerce. Il s'agit avant
tout de créateurs, particulièrement des réalisateurs, qui ont franchi au mérite
les échelons administratifs jusqu'à occuper des postes de haute responsabilité.
Cette
situation présente à la fois des avantages et des inconvénients. Fait exceptionnel
au sein d'une grande entreprise, la plupart de nos gestionnaires ont une
connaissance intime du produit. Ils souscrivent et contribuent pleinement à la
mission culturelle de Radio-Canada. Par conséquent, leurs décisions de gestion
reposent sur des critères autres que la rentabilité pure. On ne manie pas la production
d'une série télévisée sur l'histoire du Canada ou la commande d'une
pièce de théâtre à de jeunes dramaturges comme on vend des puces électroniques
ou des polices d'assurances.
Ce phénomène
comporte une difficulté intrinsèque que nous n'avons pas encore résolue et
qui est liée à la mesure de la réussite. Car s'il est facile et concret de
mesurer le taux de ventes de puces électroniques ou de polices d'assurances,
les gestionnaires de Radio-Canada ne s'entendent toujours pas sur les critères
d'évaluation du rendement à appliquer. Comment vérifier l'atteinte des
résultats lorsque la définition même du succès ne fait pas l'unanimité?
Dans
une entreprise ordinaire, on définit l'efficacité des managers en se basant
sur la courbe de profits ascendante, sur la vitesse d'expansion et sur le
positionnement privilégié au sein du marché. Il s'agit d'éléments mesurables,
quantifiables, qui s'alignent facilement sur papier. Les choses se passent
différemment au sein d'une entreprise culturelle. Sur quoi doit-on fonder
les réussites de Radio-Canada? Sur nos cotes d'écoute? Sur le nombre de Gémeaux
et autres grands prix que nos émissions et artisans remportent? Sur les ordonnances
et les déclarations du CRTC? Quels produits devons-nous évaluer en premier? La
radio, la télévision, les productions françaises ou anglaises, les chaînes d'information,
les canaux spécialisés, les diffusions sur les nouveaux médias? Une production
haut de gamme qui rafle plusieurs prix internationaux mais qui ne s'avère
pas rentable à produire doit-elle constituer une réussite ou un échec aux yeux
des gestionnaires?
Puisque la mission première
de Radio-Canada ne consiste pas à réaliser des profits mais à refléter les divers
aspects de la réalité canadienne, on peut se demander si l'efficience budgétaire
compte autant que l'excellence artistique dans la balance. Mon instinct de
comptable et mes années d'expérience en gestion dictent qu'il faut trouver
un point d'équilibre, mais au prix de quels compromis? Il est particulièrement
difficile de gérer la création lorsque les ressources financières sont grandement
limitées... et les ressources créatrices quasiment illimitées! Lorsque les managers
calculent avec la tête, mais gèrent avec le coeur. Tout comme nous savons que
les années de vache grasse ne reviendront plus, nous avons confiance que la créativité
et l'esprit d'innovation qui animent nos gestionnaires continueront
de se renouveler.
Dans ce contexte hybride, vous
conviendrez comme moi que le rôle des managers n'est pas de tout repos. Alors
que Radio-Canada affiche une solide culture d'entreprise ancrée dans une
tradition et une réputation d'excellence, ses cadres n'arrivent toujours
pas à souscrire à une culture de gestion collective uniforme. Si la grande majorité
sont hautement éduqués, leur formation en gestion n'est pas toujours à point.
Par ailleurs, la main-d'oeuvre qu'ils gèrent est également diversifiée.
Il s'agit de personnes hautement créatives et connaissantes, de journalistes,
de réalisateurs, d'auteurs, de techniciens, dont les expériences professionnelles
et le cheminement de carrière sont souvent uniques. Harnacher le talent, rentabiliser
la création, créer un climat de gestion axé sur la responsabilisation et l'innovation,
motiver les managers, tels sont les grands défis de gestion que Radio-Canada doit
maintenant relever.
Comment relever ce
double défi?
Malgré cette dichotomie,
Radio-Canada a réussi à survivre aux compressions successives parce que ses managers-créateurs
ont su trouver des solutions novatrices aux problèmes urgents. Ils ont été appuyés
dans cette tâche par des conseils d'administration hautement motivés et des
présidents dévoués qui ont tout fait, à tout moment, pour sauver les meubles.
Là encore, la richesse des individus et l'éventail des compétences reflètent
bien le fascinant dilemme création/gestion qui confronte Radio-Canada.
La
composition même du conseil d'administration de Radio-Canada réfléchit cette
réalité, puisqu'il réunit une brochette d'expertise, soit celle d'avocats,
de communicateurs, de comédiens, de politiciens, de médecins et bien, sûr, de
quelques gestionnaires et comptables « pure laine ».
Il
y a un an, la Société s'est lancée, avec ses gestionnaires, dans un exercice
minutieux dans le but de cerner les grands attributs du manager idéal. Cette démarche
a permis d'identifier sept qualités fondamentales auxquelles tous les administrateurs
devraient aspirer. Ces dernières permettraient de maximaliser toutes les ressources
humaines, culturelles et financières de Radio-Canada et de les ancrer dans une
nouvelle culture de gestion. J'aimerais vous en faire part car j'ai
confiance en la capacité de nos cadres de réaliser leur plein potentiel.
Dans
un premier temps, nos gestionnaires doivent être des penseurs stratégiques. En
ce sens, ils doivent savoir pousser la réflexion au-delà du quotidien et avoir
une vision claire de ce que la Société peut et doit être. Pour y arriver, ils
doivent établir des liens entre le passé et l'avenir, et entre tous les grands
courants qui peuvent nous affecter. Ils doivent suivre de près les dernières tendances
et être à l'affût de toutes les possibilités qui se présentent. Dans un contexte
idéal, les penseurs stratégiques doivent aussi être capables de créer eux-mêmes
des occasions et d'établir les stratégies nécessaires pour les soutenir,
les enrichir et les prolonger.
L'avenir de
Radio-Canada repose également entre les mains d'innovateurs. Notre nouvelle
génération de gestionnaires doit être instigatrice de changement et être en mesure
d'ajuster sa vision aux caprices d'un avenir instable. Une telle entreprise
suppose la collaboration et la consultation, pour que cette vision prenne son
envol et devienne une destinée collective. Dans un contexte idéal, les innovateurs
reconnaissent l'inspiration des autres et parviennent à jumeler les bonnes
idées et les pensées visionnaires pour créer des grands projets d'ensemble.
C'est
aux motivateurs que revient la tâche de dénicher et de faire fleurir nos meilleurs
talents. Qu'il s'agisse de recruter la bonne personne ou de l'apparenter
au bon poste, nos gestionnaires doivent avoir une connaissance intime des besoins
de l'employeur et des aspirations professionnelles des employés. Ils doivent
déblayer la piste, trouver les candidats de choix et favoriser les comportements
gagnants pour garantir aux personnes qui oeuvrent à Radio-Canada un milieu de
travail stimulant et pertinent. Dans un contexte idéal, les motivateurs permettent
à tous leurs employés de se surpasser, d'élargir leurs horizons et de s'épanouir
aux plans professionnel et humain.
Radio-Canada
compte aussi rebâtir son avenir sur les épaules de nombreux partenaires. Nos gestionnaires
doivent se voir comme des partenaires à part entière qui colligent tous leurs
atouts pour le plus grand bien collectif. Ils doivent entretenir des rapports
productifs et particuliers avec une variété de groupes et de personnes. Leurs
actions doivent viser des résultats précis et être assez saisissants pour influencer
le cours des gestes et des pensées. Dans un contexte idéal, les partenaires adoptent
une vision circulaire qui intègre tous les angles de Radio-Canada et qui se prolonge
au-delà d'une émission, d'un projet ou d'un service pour englober
l'ensemble des activités de la Société.
Par
ailleurs, Radio-Canada doit pouvoir miser sur des solutionneurs de problèmes capables
de scruter la recherche et de glaner l'information nécessaire pour identifier
les problèmes et trouver des pistes d'action. Loin de constituer un geste
solitaire, la résolution de problèmes se veut une activité communautaire où l'on
passe au crible de l'expérience chaque solution possible.
Dans
un contexte idéal, les solutionneurs de problèmes sont des organisateurs hors
pair et des vérificateurs futés qui conjuguent la réalité en termes logiques,
selon une approche hautement méthodique.
À titre
d'organisme branché sur les communications, Radio-Canada valorise hautement
le rôle des communicateurs qui définissent et font connaître ses orientations,
ses stratégies et sa vision. La communication efficace suppose une oreille attentive,
une ouverture d'esprit et un engagement ferme envers l'intégrité et
la transparence. Elle vise l'élaboration d'objectifs de rendement clairs
et de systèmes de rétroaction efficaces. Dans un contexte idéal, les communicateurs
sondent constamment l'opinion des autres et appliquent les résultats au développement
stratégique des personnes et des programmes.
Finalement,
les gestionnaires de Radio-Canada doivent être de véritables rassembleurs capables
de bâtir des équipes et de susciter l'enthousiasme face aux objectifs et
aux projets de groupe. Ils doivent pouvoir gérer des équipes réelles ou virtuelles
et produire des résultats percutants dans un contexte de travail difficile ou
impersonnel. Ils doivent aussi examiner à la loupe les conflits qui surgissent
et insister pour qu'ensemble, les coéquipiers trouvent des solutions communes.
Dans un contexte idéal, les rassembleurs sont des architectes de l'interaction,
des pivots naturels autour desquels évoluent des équipes compétentes et des gestionnaires
audacieux qui savent prendre des décisions difficiles et en gérer les conséquences.
Comme vous le constatez, la liste est longue
et ambitieuse. Pourtant, elle est tout sauf irréaliste. Beaucoup de nos managers
affichent déjà beaucoup de ces qualités et bien d'autres : l'ingéniosité,
l'ouverture d'esprit, la confiance en soi, la polyvalence, la générosité.
Depuis un an, Radio-Canada déploie des efforts
particuliers pour aider ses gestionnaires à parfaire leur formation à plusieurs
niveaux : techniques budgétaires, résolution de conflit, gestion du changement
et quoi encore. C'est ainsi qu'environ 300 cadres ont pu assister aux
ateliers intensifs de cinq jours offerts dans le cadre du réputé Niagara Institute
Leadership Development Program. Ce programme novateur mise sur la rétroaction
des collègues, des supérieurs et des subalternes pour identifier les forces et
les failles de chaque manager participant et pour lui tracer une piste d'action
concrète et détaillée. On multiple également les ateliers spécialisés, les choix
de cours, sans compter l'accès, au moyen d'Intranet, à des outils de
gestion et à des solutions qui font de nos managers des autodidactes avertis.
J'aime croire que cette panoplie de ressources leur permettra d'obtenir
en un temps record un MBA de Radio-Canada!
Puisque
nos gestionnaires sont source de fierté, nous les encourageons de plus en plus
à faire valoir leurs compétences sur la place publique. En effet, une fonction
de gestion qui me tient particulièrement à coeur touche la responsabilité sociale
des managers.
Je suis convaincue du rôle crucial
que les administrateurs peuvent jouer dans leur environnement social. Puisque
ce rôle constitue un choix personnel, nous devons convaincre nos gestionnaires
de franchir les cadres de l'entreprise pour s'engager dans leur milieu.
Radio-Canada constitue un riche bassin d'expertise. Nos gestionnaires et
notre personnel créent des produits qui reflètent tous les grands courants de
pensée, suscitent la discussion et favorisent l'échange. Qu'ils siègent
sur des conseils d'administration, qu'ils donnent des conférences, qu'ils
appuient de nobles causes, qu'ils participent à des comités, qu'ils
éduquent la jeunesse, nos managers sont équipés pour enrichir le débat.
Peu
importe où ils évoluent, les bons gestionnaires affichent une capacité d'adaptation
peu commune, qu'il s'agisse du milieu des affaires, de l'éducation,
de la culture ou autre. Leurs connaissances et leurs expériences sont transmissibles
et adaptables. En ce sens, ils doivent être généreux et sensibles face à leur
rôle social. C'est ce genre d'ouverture et d'engagement que j'encourage
fortement au sein de Radio-Canada et que je vous invite, vous aussi, à jouer.
Au-delà de nos tâches courantes de gestion, nous sommes tous en mesure d'ajouter
notre voix au chapitre.
Conclusion
L'époque
du gestionnaire hyper-spécialisé opérant en vase clos est révolue. Pour remettre
les pendules à l'heure, nous devons remanier les hypothèses traditionnelles,
élargir les champs d'action et rétablir le sentiment de confiance et de fierté
des cadres en leur confiant de nouveaux défis. Cela suppose un leadership visionnaire
et des outils de pointe. La direction de la Société doit être à l'affût de techniques
prometteuses pour rehausser les compétences, alimenter la motivation et accroître
la production. Nous devons affermir notre démarche en faveur de la formation et
du perfectionnement, miser davantage sur la collégialité des tâches et la participation
inter-paliers.
Vous savez, Radio-Canada s'est
toujours positionnée aux limites de la modernité. Sur le plan de la production,
nos premières ne se comptent plus. Être à l'avant-plan des dernières technologie
est devenu une position naturelle et c'est tant mieux. Il faut maintenant
faire de même avec nos gestionnaires. Encourager l'innovation, stimuler la création,
prendre des risques, apprendre de nos erreurs, offrir aux gens la possibilité
de réussir et de se surpasser. On croirait une liste tirée d'un manuel des HEC!
Dans mon cas, ce sont les leitmotivs qui m'ont
soutenue pendant toute ma carrière et dans tous les milieux. Qu'il s'agisse de
gérer la coupe d'arbres dans le Nord ou d'enraciner la culture d'entreprise
à Radio-Canada, ils se sont avérés pertinents à tout coup. Cette expertise, j'entends
la retrouver à tous les échelons de gestion de Radio-Canada. Des gestionnaires
en pleine possession de leurs moyens sauront établir un climat de travail positif,
dynamique et propice à la réussite. Et puisque le succès attire le succès, nous
pourrons miser sur une relève de haut calibre, au fur et à mesure que des leaders
éclairés céderont la place au sang neuf.
À Sydney
comme ici, les défis ne manquent pas. Malgré les obstacles et quelques détours,
Radio-Canada se classe toujours en tête de peloton. Notre rôle unique dans l'édification
du pays demeure incontestable. De par nos produits d'information, de culture,
de variétés et de sports, nous sommes la mémoire collective et le premier témoin
de la nation. Il s'agit d'un héritage que nos managers et nos dirigeants
doivent sauvegarder à tout prix. Plus encore, il s'agit d'une responsabilité
qui nous anime et nous motive depuis plus de soixante ans. Et ça, selon moi, nous
vaut sûrement la médaille d'or!
Merci beaucoup
et bonne fin de colloque.
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