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Discours et interviews
le 24 octobre 2001
Préserver une voix distinctive pour les Canadiens
Note pour une allocution de Robert Rabinovitch, Président-directeur général de Radio-Canada à l'Institut C.D. Howe Toronto (Ontario)
Mais
parlons d'abord de CBC/Radio-Canada Télévision
: - Deux réseaux nationaux de
télévision conventionnelle, un français et l'autre anglais.
Radio
: - Quatre réseaux de radio nationaux,
deux en français et deux en anglais.
Services
spécialisés :
Artv | Tous
ces services sontconçus dans l'optique d'élargiret de réaliser notre
mandat | Documentary
Channel | Country
Canada | - Galaxie,
notre service audio numérique, offre
30 chaînes de musique continue.
-
Radio
Canada International (RCI), notre service radiophonique sur ondes courtes, émet
en sept langues : français, anglais, arabe, russe, chinois, espagnol et ukrainien.
Nouveaux
médias : - Des
sites Internet primés :
-radio-canada.ca -cbc.ca.
-
Des sites
interactifs novateurs pour les jeunes : - Radio
Three, qui comprend trois sites :
- NewMusicCanada.com
- JustConcerts.com - 120seconds.com - qui vient de remporter
le prestigieux Prix Italia
- bandeapart.fm
- intégré à la Radio et à la Télévision françaises.
-
Silenceoncourt.tv,
une nouvelle plate-forme multimédia consacrée aux courts métrages.
-
CBC/Radio-Canada
est aussi l'un des premiers fournisseurs d'information qui a recours aux systèmes
sans fil.
- Nous
sommes le premier conglomérat canadien de communications; nous touchons
les Canadiens au moyen de plus de 20 plates-formes.
- Nous
fonctionnons comme une entreprise en réseau. Aujourd'hui, lorsque vous regardez
ou que vous écoutez des reportages en provenance de l'Afghanistan ou du Pakistan,
vous voyez une entreprise intégrée au travail. Chaque journaliste fait son reportage
en français et en anglais, à la Radio et à la Télévision. De cette manière, nous
réduisons nos coûts et nous améliorons la couverture des événements.
-
Rarement,
l'importance de notre rôle a-t-elle été plus évidente que le 11 septembre 2001
et dans les semaines qui ont suivi cette effroyable tragédie.
-
Au cours
de la semaine du 11 septembre, des millions de Canadiens se sont tournés vers
CBC/Radio-Canada, comme ils le font habituellement dans les périodes de crise
et de liesse.
- Et,
en période de crise, les Canadiens veulent avoir un point de vue canadien sur
les événements.
- Ils
savent l'importance d'avoir de bons journalistes canadiens sur le terrain
et dans le monde entier, qui permettront au public de comprendre ce qui se passe.
-
Notre
couverture médiatique a fait l'objet d'éloges tant au Canada qu'à l'étranger pour
son traitement informé, respectueux et juste des événements. D'ailleurs, les chiffres
parlent d'eux-mêmes.
- Le
11 septembre 2001, environ 1,7 million de Canadiens en moyenne ont regardé la
Télévision anglaise et CBC Newsworld, aux heures de grande écoute, plus que chez
tous les autres radiodiffuseurs canadiens et loin devant CNN (1,2 million).
-
Du 11
au 13 septembre, la Télévision française de Radio-Canada et le RDI combinés ont
touché 75 % de l'auditoire francophone dans tout le Canada.
- Les
reportages de la Télévision anglaise ont été diffusés aux états-Unis (Newsworld
International, C-Span et même Home Shopping Channel), atteignant
ainsi plus de 80 millions de téléspectateurs.
- Le
signal de Radio-Canada a été retransmis par TV5 Monde, qui a quadruplé sa part
d'audience pendant les événements.
- À
un moment ou à un autre, les émissions de la Radio anglaise et de la Radio française
ont été relayées par le NPR et Radio France.
- La
fréquentation du site cbc.ca a plus que doublé depuis le 11 septembre :
3,3 millions de pages ont été vues la semaine dernière, d'une durée moyenne de
23 minutes!
- Les
Canadiens ont de quoi être fiers de leur radiodiffuseur public.
-
Grâce
à CBC/Radio-Canada, une voix et un point de vue canadiens se sont faits entendre
au pays comme à l'étranger.
Notre
rôle dans le système de radiodiffusion - Le
système canadien de radiodiffusion est fondé sur un partenariat entre les secteurs
public et privé.
- Le
radiodiffuseur public agit comme un complément du secteur privé, car il peut prendre
des risques que les sociétés privées ne peuvent se permettre.
-
Toutefois,
la radiodiffusion publique est-elle véritablement pertinente dans le contexte
actuel de la mondialisation?
- La
réponse est oui. L'aspect financier de la production d'émissions fait en sorte
que le secteur public est appelé à jouer un rôle essentiel : celui de préserver
un espace canadien dans le nouvel environnement médiatique.
- Dans
une étude commandée par la BBC, on a énoncé plusieurs raisons pour lesquelles
il est nécessaire de préserver un secteur public solide dans le système de radiodiffusion.
-
En tant
qu'économiste, je dirais que la plupart ont trait à la notion de lacunes du marché
: le marché ne pourra offrir à lui seul des services de radiodiffusion de la qualité
qu'exigent et que doivent obtenir les citoyens.
En
tant que radiodiffuseur public, nos priorités en matière de programmation
sont les suivantes : - Faire
de la Télévision de Radio-Canada un télédiffuseur national véritablement distinctif.
-
Une
programmation distinctive, de grande qualité, diffusée sur toutes les plates-formes.
-
Une programmation
qui reflète toutes les régions, y compris le Nord canadien, les sert et s'en inspire.
Ainsi, seule CBC/Radio-Canada
-
Excellence
dans la programmation jeunesse :
- Un
journalisme crédible, fouillé et indépendant :
- Axé
sur le pourquoi plutôt que sur le quoi.
- Un
journalisme qui privilégie davantage l'enquête :
- La
tradition et la force de CBC/Radio-Canada;
- Une
démarche risquée et coûteuse.
- Une
couverture internationale d'envergure :
- Une
perspective canadienne distinctive sur les événements mondiaux;
-
Des émissions
spéciales marquantes, qui rassemblent les Canadiens :
- Une
programmation culturelle :
- Opening
Night à la Télévision anglaise, une émission de deux heures sans publicité
sur les arts de la scène, qui en est à sa deuxième saison.
-
Susciter
l'émergence de nouveaux talents. Depuis la création de NewMusicCanada.com,
800 nouveaux groupes ont présenté 10 000 chansons.
- Prendre
des risques qu'aucun autre radiodiffuseur ne peut prendre : Innovation Zone -
une nouvelle émission de fin de soirée, qui sera lancée à l'automne 2002, véritable
vitrine des nouveaux talents et des nouvelles idées (diffusée à la Télévision
anglais et dans le site Web).
CBC/Radio-Canada
s'est aussi fermement engagée à être une société bien gérée et à optimiser ses
actifs afin de les réinvestir dans la programmation. - Dans
cette optique, nous considérons toutes les activités non fondamentales comme des
sources potentielles de recettes.
- Notre
objectif : Exploiter les " briques et le mortier " afin de dégager des
ressources pour la production de contenu.
- Lorsque
l'occasion se présente, nous vendons des actifs non fondamentaux :
- Par
exemple, Newsworld International : investissement initial de 10 millions, vendue
75 millions (un profit appréciable);
- Nous
avons signé un contrat de service pour offrir des services d'information et toucher
de nouveaux auditoires.
- L'an
dernier, nous avons créé une Division immobilière à part entière pour assurer
la gestion d'espaces totalisant 5 millions de pieds carrés et générer des recettes
grâce à la vente ou à la location des espaces inutilisés.
-
Jusqu'à
présent, la stratégie est payante. Récemment, nous avons conclu des contrats importants
aux Centres de radiodiffusion de Toronto et de Regina. Ces seules transactions
rapporteront six millions de dollars par an, et ce n'est qu'un début. Bien d'autres
transactions sont en préparation.
- L'an
dernier, nous avons mis en vente
2 500 émetteurs. Étant donné
la dépréciation du secteur des technologies et de la bourse, nous n'avons pas
pu les vendre à leur juste valeur.
- Toutefois,
nous nous sommes engagés à optimiser la valeur de ces actifs en appliquant un
nouveau modèle de gestion.
Partenariats
et alliances : la clé de notre avenir - En
nouant des alliances stratégiques, nous toucherons un auditoire plus vaste, nos
optimiserons nos investissements, nous atténuerons les risques et nous créerons
de nouvelles sources de recettes.
- Nous
sommes fiers des trois nouveaux services spécialisés de télévision lancés cet
automne :
- Artv, en partenariat
avec BCE, entre autres.
- The Canadian
Documentary Channel et Country Canada, en partenariat
avec Corus
- Toutes ces initiatives sont
issues de partenariats et sont conformes à notre mandat.
-
Nous
avons signé notre premier contrat d'importance avec la presse écrite, en l'occurrence
avec Gesca, qui publie La Presse, entre autres, créant ainsi un partenariat
en vue de produire et de distribuer un nouveau magazine télé dans 650 000 foyers
au pays.
- Dans
le climat économique actuel, le travail en partenariat joue un rôle important
dans la façon de faire des affaires.
- Toutefois,
quelles que soient les sommes que nous pourrons dégager, elles ne seront pas suffisantes
compte tenu de la portée de notre mandat et de l'aspect financier de la production
d'émissions canadiennes.
Existe-t-il
un marché pour les émissions à contenu canadien? C'est-à-dire,
des thèmes canadiens qui s'adressent à des Canadiens et qui portent sur des Canadiens
- Non
seulement sommes-nous convaincus qu'il existe un marché, mais nous avons prouvé
qu'une programmation judicieuse peut remporter un succès phénoménal.
-
Prenons
l'exemple de l'émission Le Canada : Une histoire populaire/Canada: A People's
History. Nous avons consacré plus de 25 millions de dollars à la conception
d'une épopée bilingue sur l'histoire du Canada.
- Aucun
télédiffuseur privé n'aurait pu se permettre de prendre un tel risque : 32 heures
de programmation documentaire, sans pause publicitaire, pendant deux ans.
-
Jusqu'à
présent, 15 millions de Canadiens ont regardé la série.
- Deux
ouvrages de référence illustrés (la version anglaise est déjà en tête des meilleures
ventes d'ouvrages documentaires), des vidéocassettes et des DVD complètent la
série.
- L'an
dernier, trois millions de pages vues dans le site cbc.ca.
-
Volet
pédagogique : cassettes vidéo + guides de l'enseignant sont offerts dans 90 %
des écoles publiques du Canada.
- Voilà
l'un des exemples les plus révélateurs de ce qu'est la radiodiffusion publique.
-
La viabilité
de la programmation canadienne ne devrait toutefois pas être seulement mesurée
à l'aune d'émissions spéciales telles que Le Canada : Une histoire populaire/Canada:
A People's History.
- CBC/Radio-Canada
a investi régulièrement dans la programmation canadienne, et cela s'est révélé
payant.
- La
part d'audience des émissions canadiennes diffusées aux heures de grande écoute
parle d'elle-même : en 2000-2001, huit des 10 émissions canadiennes
de divertissement les plus populaires en anglais étaient diffusées à la Télévision
anglaise de Radio-Canada.
- Au
cours de la même saison, neuf des séries dramatiques et de divertissement canadiennes
les plus populaires de la Télévision française de Radio-Canada ont attiré
plus d'un million de téléspectateurs chacune.
- Non
seulement investissons-nous dans la production d'émissions canadiennes, mais nous
les diffusions aux heures de grande écoute, tous les soirs de la semaine, sur
toutes les plates-formes.
- Nous
pouvons en conclure que CBC/Radio-Canada propose plus d'émissions canadiennes
que tout autre télédiffuseur conventionnel et que ses émissions
canadiennes attirent le plus grand auditoire.
- Ne
soyons pas naïfs toutefois. Si CBC/Radio-Canada est en mesure de réaliser ces
émissions, c'est grâce au financement alloué par le Parlement, qui nous permet
de prendre davantage de risques. De plus, notre motivation première n'est pas
de gagner de l'argent.
- Notre
motivation, en qualité de radiodiffuseur public, est de produire des émissions
de qualité, qui portent sur des Canadiens et qui s'adressent uniquement aux Canadiens.
Nous pouvons nous permettre le luxe de nous concentrer sur le Canada, sur son
identité et sur ses valeurs.
- Les
radiodiffuseurs privés doivent se concentrer sur le rendement du capital investi
(RCI) ou sur les bénéfices avant intérêts, impôts et amortissement (BAIIA). Pour
réaliser ce rendement, ils doivent comprimer leurs coûts et maximiser leurs recettes.
-
Les sociétés
qui investissent des milliards de dollars de l'argent de leurs actionnaires se
doivent de réaliser un taux de rendement intéressant aux yeux de ces derniers.
-
Mais
l'aspect financier de la programmation canadienne ne permet pas de dégager
un taux de rendement acceptable. Le taux de rentabilité ne peut être pris en compte.
-
Il existe
un marché pour de bonnes émissions canadiennes - Da Vinci's, This Hour Has
22 Minutes, Air Farce en sont des exemples -, mais selon les normes du secteur
privé, ce marché est limité.
- La
production d'émissions à contenu canadien coûte cher par rapport à l'achat d'émissions
américaines; en réalité, c'est du dumping. Par exemple :
- Les
droits de radiodiffusion simultanée d'une comédie de situation populaire américaine
coûtent en moyenne entre 100 000 dollars et 125 000 dollars par heure;
les séries les plus populaires permettent de réaliser des recettes de l'ordre
de 350 000 dollars à 400 000 dollars par heure - soit trois à quatre fois leur
coût d'achat.
- Les
coûts de production d'une dramatique canadienne d'une heure peuvent atteindre
plus de
1 million de dollars, dont près du quart sont assumés
par le radiodiffuseur.
- Or,
une série dramatique canadienne à succès permet seulement de réaliser des recettes
de l'ordre de 65 000 dollars à 90 000 dollars par heure.
- Ainsi,
le radiodiffuseur paie 250 000 dollars pour une dramatique canadienne, vend au
plus 90 000 dollars de publicité, ce qui lui fait une perte d'environ 160 000
dollars.
- Une
entreprise qui continuerait de perdre de l'argent à ce rythme ne tarderait pas
à mettre la clé sous la porte. C'est la réalité à laquelle sont confrontés les
radiodiffuseurs privés qui souhaitent faire affaire au Canada.
-
Les radiodiffuseurs
privés et les producteurs indépendants produisent tous des émissions de qualité.
Mais pour les radiodiffuseurs privés, du point de vue des affaires, il relève
du bon sens d'importer et de diffuser en simultanée des émissions américaines,
et d'insérer les émissions canadiennes dans des cases horaires qui produiront
le moins d'effets négatifs possibles.
- La
demande d'émissions à contenu canadien est supérieure dans le marché francophone,
mais la réalité économique reste la même : la production d'émissions canadiennes
coûte cinq fois plus cher que l'acquisition de produits américains ou étrangers
doublés.
- Compte
tenu de cette réalité, serait-il raisonnable de produire des émissions canadiennes
À moins d'y être obligé - c'est-à-dire, s'il ne s'agissait pas d'une condition
de licence?
- La
réponse, du point de vue des affaires - et les radiodiffuseurs privés sont des
entreprises dont les investisseurs attendent qu'elles maximisent la valeur de
leur investissement - est résolument NON.
Alors
que pouvons-nous faire? - Les
contribuables financent les radiodiffuseurs pour produire des émissions canadiennes
au moyen d'avantages fiscaux considérables, qui feraient pâlir d'envie n'importe
quelle industrie, ainsi que par l'intermédiaire de subventions du FCT.
-
De nos
jours, les contribuables canadiens subviennent en grande partie au financement
des radiodiffuseurs publics et privés pour la commandite ou l'achat d'émissions
canadiennes. Les contribuables couvrent plus de 50 % de ces coûts directement
ou indirectement.
- Par
ailleurs, il ne semble pas que ces fonds contribuent à augmenter l'écoute d'émissions
à contenu canadien.
- Bien
que l'offre d'émissions canadiennes soit en hausse et que le nombre de chaînes
numériques ait augmenté considérablement, le taux d'écoute des émissions canadiennes
stagne à environ 9 %.
- Plus
troublant encore, les dernières statistiques du CRTC indiquent que la part d'auditoire
des émissions canadiennes aux heures de grande écoute est en baisse dans le secteur
privé - et ce, malgré certaines offres louables.
- En
réalité, seuls la Télévision anglaise de Radio-Canada et CBC Newsworld ont affiché
une augmentation de l'auditoire d'émissions canadiennes aux heures de grande
écoute parmi les diffuseurs de langue anglaise.
- Malgré
les dégrèvements fiscaux et les subventions, les émissions canadiennes distinctives
ne constituent pas une solution viable pour les radiodiffuseurs privés.
-
Par conséquent,
les radiodiffuseurs privés et les producteurs indépendants sont contraints de
produire des émissions destinées à l'exportation pour rester en affaires.
-
Et pour
pouvoir s'exporter, la télévision canadienne doit renoncer à être distinctive
et à présenter des thèmes canadiens.
- À
ce moment-là, rien ne distingue plus les produits canadiens des produits américains.
-
En d'autres
termes, la production télévisuelle devient une question de politique industrielle
et non plus culturelle.
Penser
différemment - Au
cours des 43 dernières années de réglementation du contenu canadien, des études
et des initiatives de tout ordre se sont efforcées de stimuler la production et
l'écoute d'émissions canadiennes sur les chaînes de télévision privées.
-
Aucune
de ces mesures n'a permis d'augmenter l'écoute des émissions canadiennes.
-
Le message
semble clair. Malgré les subventions phénoménales de l'état, l'approche actuelle
ne fonctionne pas.
- Nous
devons réexaminer le rôle de la réglementation du contenu canadien pour les radiodiffuseurs
privés.
- L'idée
n'est pas nouvelle. Il y a quinze ans, un groupe en faveur du contenu canadien
à la télévision avait énoncé une proposition radicale et novatrice devant le Groupe
de travail Caplan-Sauvageau.
- Le
groupe proposait de limiter les exigences en matière de contenu canadien pour
les radiodiffuseurs privés et de taxer leurs recettes afin d'utiliser les sommes
ainsi prélevées pour le financement d'émissions canadiennes.
- Cette
proposition n'a jamais été envisagée sérieusement. On l'a même rejetée, la qualifiant
de cynique.
Conclusion
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