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La lutte contre les envahisseurs dans le Golfe

Les biologistes de l’habitat Nathalie Simard et Michel Gilbert font habituellement leurs prélèvements dans l’estuaire et le golfe du Saint-Laurent, mais ils ont cette fois-ci jeté leur filet à plancton ailleurs – dans les réservoirs de ballast d’un énorme minéralier qui fait la navette entre le Québec et l’Europe.

Michel Gilbert et Sven Neulinger prélèvent des échantillons d’eau de ballast à l’aide d’un filet à plancton à bord du Berge Nord.
Michel Gilbert et Sven Neulinger prélèvent des échantillons d’eau de ballast à l’aide d’un filet à plancton à bord du Berge Nord.

L’échantillonnage se fait dans le cadre d’un projet de recherche visant à réduire le risque d’introduction d’espèces non indigènes en eaux canadiennes par les eaux de ballast. Rien que dans les Grands Lacs, plus de 160 organismes étrangers ont été introduits. La célèbre moule zébrée, qui fut transportée de la mer Noire dans un réservoir de ballast, envahit le fond des lacs, les quais et les coques de bateau tel un tapis vivant et elle a causé à ce jour des dommages de plusieurs milliards de dollars.

Il est souvent difficile de lutter contre les espèces aquatiques envahissantes et presque impossible de les éradiquer. Mieux vaut miser sur la prévention pour éviter leur introduction ou au moins retarder leur propagation tout en améliorant nos connaissances et en recherchant des méthodes de contrôle.

Le golfe du Saint-Laurent est un milieu particulièrement hospitalier pour les organismes de la mer du Nord, de la mer Baltique et de la côte est des États-Unis. Des scientifiques de l’Institut Maurice-Lamontagne (IML) à Mont-Joli (Québec) et du Centre des pêches du Golfe (Nouveau-Brunswick) en évaluent actuellement les risques et cherchent des mesures de prévention.

Chaque année, près de 2 000 bâtiments entrent dans le Golfe, et leurs eaux de ballast peuvent contenir des espèces envahissantes. La plupart des navires qui traversent l’océan respectent les directives facultatives (censées devenir obligatoires) qui les incitent à changer les eaux de ballast en haute mer avant d’entrer dans le Golfe. Mais à quel point cette précaution s’avère-t elle efficace?

À bord du minéralier Berge Nord, Nathalie Simard et Michel Gilbert de l’IML ont évalué l’efficacité de deux méthodes de remplacement des eaux de ballast et recueilli des données pertinentes. Mme Simard a également évalué les risques liés à l’utilisation du chenal Laurentien, situé dans la partie centrale du Golfe, comme zone alternative pour remplacer les eaux de ballast lorsqu’une tempête ou d’autres raisons empêchent de le faire en haute mer. Sa recommandation : utiliser le moins possible le chenal Laurentien.

Chris McKindsey, chercheur à l’IML, tenant un spécimen d’algue verte Codium fragile (courtoisie de Philippe Archambault).
Chris McKindsey, chercheur à l’IML, tenant un spécimen d’algue verte Codium fragile (courtoisie de Philippe Archambault).

En plus des réservoirs, des engins et des coques de navires et embarcations, les espèces envahissantes peuvent être amenées dans nos eaux par le commerce des espèces d’aquarium, la pêche, l’aquaculture voire les seaux à appâts. Toutefois, les trois espèces envahissantes du Golfe les plus préjudiciables – une algue verte, un crabe et une ascidie – ont probablement été transportées par une embarcation. L’algue verte, appelée communément doigt noirou ou voleur d’huîtres, est connue sous le nom scientifique de Codium fragile.

L’excroissance qu’elle forme sur la coquille de l’huître ou de la moule empêche ces espèces de filtrer leur nourriture. Cette algue emprisonne tellement de bulles de gaz qu’elle peut flotter et déplacer les mollusques. Installée dans la région depuis 1996, l’algue verte infeste les mollusques sauvages et d’élevage de l’Île-du-Prince-Édouard et des rives du Golfe en Nouvelle Écosse et au Nouveau Brunswick. Elle a été observée aux îles de la Madeleine pour la première fois en 2003.

Le crabe vert (Carcinus meanas) a été vu pour la première fois en 1995 sur la rive du Golfe en Nouvelle-Écosse. Il s’est ensuite propagé au sud-est du Nouveau-Brunswick, sur la côte est de l’Île-du-Prince-Édouard et récemment aux îles de la Madeleine. Ce prédateur dominant se nourrit de plusieurs espèces, dont la palourde et la moule, et il a probablement contribué au déclin de l’industrie de la mye au Maine dans les années 50.

D’autres espèces pourraient faire des dégâts, mais l’ascidie plissée (Styela clava), dont la présence remonte au moins à 1998, constitue à ce jour la plus redoutable. Elle est en effet un véritable fléau pour l’industrie mytilicole de l’Île-du-Prince-Édouard, la plus importante en Amérique du Nord.

Les mytiliculteurs élèvent les mollusques dans des « boudins » qui sont constitués de filets tubulaires suspendus dans la colonne d’eau. L’ascidie infeste la coquille des moules, nuit à la fixation des larves, accapare l’espace et la nourriture, complique la manipulation et la transformation et entraîne des dépenses qui grugent les profits.

Dans un effort collectif, les biologistes du ministère des Pêches et des Océans (MPO) et les gestionnaires de l’aquaculture de la région du Golfe, épaulés par le gouvernement de l’Île-du-Prince-Édouard, le Collège vétérinaire de l’Atlantique et l’industrie aquacole, tentent de maîtriser l’ascidie plissée, qui envahit le quart des 16 baies mytilicoles de l’île.

Après avoir répertorié les zones infestées, le MPO a essayé avec ses partenaires de limiter le déplacement des mollusques. La transformation des moules infestées ne peut s’effectuer que dans quatre usines autorisées, où l’on prend des mesures pour éviter que l’ascidie ne se propage par le rejet des eaux usées.

Les chercheurs s’efforcent de trouver des moyens d’enrayer la propagation à l’échelle locale, notamment à l’aide de produits chimiques. « Nous pouvons trouver

L’ascidie plissée sur des boudins et des bouées.
L’ascidie plissée sur des boudins et des bouées.

des méthodes, mais l’industrie exige à la fois qu’elles soient peu coûteuses et non polluantes », explique Thomas Landry, chef de la section de la productivité des mollusques de la Région du Golfe.

Entretemps, les travaux se poursuivent sur d’autres espèces envahissantes. Les chercheurs du MPO préviennent Transports Canada des dangers présents à bord des bateaux et ils joignent leurs efforts à ceux des responsables provinciaux, des universités, du secteur privé et du ministère de l’Environnement du Canada, organisation responsable des espèces envahissantes.  Le personnel et les partenaires du MPO sensibilisent également l’industrie et le grand public à l’aide de séances d’information, de bulletins, de brochures, de panneaux indicateurs installés sur les quais et de publications dans Internet.

Pour la biologiste Nathalie Simard de l’IML « la solution se trouve dans la prévention ». Il faut donc éviter de rejeter les organismes contenus dans les embarcations commerciales et récréatives, les remorques, les engins ou autres. Les aquaculteurs, les pêcheurs, les transformateurs et les citoyens eux mêmes peuvent tous aider à lutter contre les espèces envahissantes. Leur vigilance permettra de les détecter et leur prudence permettra d’éviter qu’ils ne se propagent.

Pour en apprendre davantage et obtenir la liste des mesures à prendre pour lutter contre les espèces envahissantes, consultez http://www.glf.dfo-mpo.gc.ca/sci-sci/inva-enva/index-f.html.
 

   

   

Dernière mise à jour : 2007-11-15

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