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La prospection sismique nuit-elle aux baleines et aux poissons?
Tous les nageurs connaissent l’étonnante efficacité de la propagation du
son dans l’eau : lorsque quelqu’un à une certaine distance de vous frappe
deux roches ensemble, vous avez l’impression que cela se produit tout près
de vos oreilles. De nombreuses créatures marines émettent des sons et y
réagissent, en particulier les baleines qui vocalisent pour chanter,
communiquer et naviguer.
Que se passe-t-il lorsque des bruits produits par les humains se mêlent aux
sons de la mer? Les millions de moteurs de bateaux, les hélices géantes des
navires, les équipements sonar militaires et commerciaux, les activités de
construction en milieu côtier et les foreuses des plates formes de forage
pétrolier en mer émettent tous des bruits dans l’océan. Et depuis quelques
décennies, on s’inquiète de plus en plus de la prospection pétrolière
effectuée à l’aide de méthodes sismiques.
Cette approche consiste à remorquer une batterie de canons à air qui tirent
des coups d’air comprimé, créant des impulsions sismiques qui pénètrent dans
le fond marin. Les échos enregistrés par des hydrophones renseignent les
géologues sur la nature du fond marin et la probabilité qu’il renferme du
pétrole.
Les conservationnistes et les pêcheurs commerciaux craignent que les
impulsions sismiques ne nuisent à la vie marine. Des chercheurs de
l’Institut océanographique de Bedford (IOB), situé à Halifax (Nouvelle
Écosse), se penchent sur la question dans deux zones marines de
l’Atlantique, l’une connue pour sa beauté et sa diversité, et l’autre, pour
la richesse de ses ressources halieutiques.
La première zone, désignée le Gully, se trouve à environ 150 milles marins
au large de Halifax, juste à l’est de l’île de Sable, connue comme le «
cimetière de l’Atlantique » en raison des nombreux naufrages qui s’y sont
produits. L’importance écologique du Gully, profonde échancrure du rebord de
la plate forme continentale, lui confère un autre type de renommée.
M. Kenneth Lee (Ph.D.), directeur du Centre de recherche environnementale
sur le pétrole et le gaz extracôtiers (CREPGE), décrit le Gully comme un «
Grand Canyon sous-marin ». D’une longueur de 65 kilomètres, le Gully abrite
des plantes à profusion et bon nombre de coraux d’eau profonde et offre un
habitat essentiel pour de nombreuses espèces de poissons et de mammifères
marins, notamment la baleine à bec commune, une espèce en voie de
disparition. En 2003, le ministère des Pêches et des Océans (MPO) a désigné
le Gully comme la première zone de protection marine (ZPM) du Canada.
![La baleine à bec commune.](/web/20071210125932im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/science/Story/story_images/bottlenose.jpg)
La baleine à bec commune.
Bien que son statut de ZPM protège le Gully contre la prospection pétrolière
et gazière, des relevés sismiques effectués à proximité peuvent émettre des
ondes sonores dans la zone. C’est la question que l’étude du CREPGE aborde.
« Ailleurs au monde, des millions de dollars sont consacrés à l’étude de la
prospection sismique et ont permis de montrer que celle-ci a des effets dans
certaines conditions, affirme M. Lee, mais les études effectuées ailleurs ne
répondent pas à toutes nos questions régionales.
« La propagation du son dans l’eau varie selon la température de l’eau, le
modelé du fond et d’autres facteurs. Il peut être difficile d’évaluer les
effets sur les divers stades de différentes créatures. Notre étude
accumulera des données sur des effets précis dans notre région. »
Le CREPGE coordonne les recherches du MPO sur la prospection en mer et fait
appel à des scientifiques de tous les coins du pays. Pour le projet sur
Gully, M. Lee a réuni des chercheurs de l’Institut des sciences de la mer
(Sidney, Colombie Britannique), de l’Institut Maurice Lamontagne (Mont-Joli,
Québec), du Marine Institute de Terre Neuve et d’autres centres privés ou
universitaires. Des recherches en mer ont été menées en 2003, avant et après
des relevés sismiques commerciaux à proximité.
M. Lee explique : « Nous avons relevé la présence de baleines à bec communes
pour compléter les données antérieures sur leur abondance et leur
répartition. Nous avons observé des rorquals à bosse, des rorquals bleus,
des rorquals communs, des cachalots macrocéphales, des dauphins et des
phoques et avons enregistré leurs vocalisations ainsi que d’autres sons
marins en conditions naturelles. Nous avons ainsi fourni à la communauté
scientifique une grande quantité de nouvelles données de référence. Ensuite,
nous avons surveillé ce qui se passe durant les activités de prospection
sismique. Les sociétés d’énergie ont des modèles de propagation du son. Il
nous faut valider l’efficacité de ces modèles pour la région et déterminer
les effets généraux de la prospection sismique. »
Les chercheurs se sont servis de sismomètres de fond marin et d’hydrophones
pour mesurer les sons. Ils ont mis au point de nouveaux instruments pour
surveiller le bruit et les vocalisations d’animaux marins. Ils ont également
fait des observations visuelles de mammifères marins. L’étude a permis de
cataloguer de multiples aspects de la propagation du son et du comportement
des poissons et des mammifères.
![Mouillage d’un sismomètre de fond marin à partir d’un navire du MPO pendant le projet sur le Gully. (photo du MPO)](/web/20071210125932im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/science/Story/story_images/seismometer.jpg)
Mouillage d’un sismomètre de fond marin à partir d’un navire du MPO
pendant le projet sur le Gully. (photo du MPO)
Les chercheurs n’ont observé aucun changement significatif dans la
répartition générale des baleines du Gully durant les relevés sismiques. M.
Lee précise : « Nous n’avons pas exclu tous les effets possibles, mais nous
n’avons trouvé aucune indication des effets les plus redoutés, comme des
baleines qui quitteraient la région. »
« Nous poursuivons l’évaluation des modèles des sociétés d’énergie et nos
recherches sur des effets subtils de la prospection sismique. »
L’étude sur le Gully a permis d’établir un cadre solide pour des recherches
futures. « Nous avons une meilleure idée des questions à poser et de la
façon d’y répondre », indique M. Lee.
L’autre grande étude du CREPGE dans l’Atlantique a été menée au large de la
côte ouest de l’île du Cap Breton, où se trouvent certaines des plus riches
pêcheries de crabes des neiges du monde.
Depuis que l’Office Canada-Nouvelle Écosse des hydrocarbures extracôtiers a
autorisé les relevés aux canons à air dans la région, les pêcheurs
commerciaux craignaient que cela n’ait des effets néfastes. En effet, des
expériences de laboratoire antérieures portaient à croire que des sons à
haute énergie pourraient nuire à la reproduction des crabes.
M. Mikio Moriyasu (Ph.D.), du Centre des pêches du Golfe (Moncton, Nouveau
Brunswick), a dirigé l’étude du CREPGE de 2003 sur le crabe dans la région.
Les chercheurs ont capturé des crabes femelles et en ont placé certains sur
le trajet de relevés sismiques et les autres dans un secteur témoin sans
prospection sismique. Les niveaux sonores ont été mesurés au moyen de
sismomètres de fond marin.
Les chercheurs ont évalué la physiologie des crabes immédiatement après les
relevés sismiques, puis encore quelques mois plus tard. Tous les crabes ont
survécu, et aucun dommage évident n’a été observé sur les crabes, ni sur
leurs oeufs ou leurs larves.
« Cela semble rassurant, affirme M. Lee, mais des observations préliminaires
semblent montrer des dommages cellulaires chez certains crabes de la zone de
prospection sismique. Nous cherchons à déterminer, par des expériences de
laboratoire, si ces dommages sont attribuables aux canons à air ou à une
autre cause. »
Comme le projet sur le Gully, l’étude sur le crabe a permis aux chercheurs
d’élaborer les protocoles pour poser des questions plus précises sur les
préoccupations actuelles et nouvelles concernant la prospection sismique.
Outre la poursuite des travaux dans ces deux régions, le CREPGE évalue les
effets de la prospection sismique sur le homard, à Terre Neuve, et sur des
espèces d’eau douce du fleuve Mackenzie, dans les Territoires du Nord Ouest.
Ces projets fourniront des données concrètes, fiables et éprouvées sur
l’exploration sismique au Canada et ses effets et aideront le gouvernement à
établir des lignes directrices en matière de prospection sismique.
Ces travaux ne constituent qu’une partie de la longue liste de projets du
CREPGE. « Nous fonctionnons comme un centre de recherche virtuel au sein du
MPO, affirme M. Lee, et, de concert avec les autres centres de recherche du
Ministère, des universités et des institutions provinciales, nous pouvons
réunir de nombreux chercheurs talentueux pour répondre aux questions. »
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