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Les bouées de télédétection Argo couvrent les sept mers
L’idée ne manquait pas d’audace. Nombre de pays travailleraient de
concert pour déployer des bouées dérivantes (ou profileurs) flottant
librement sur toutes les mers du monde. Elles recueilleraient à diverses
profondeurs des mesures océanographiques qu’elles transmettraient en temps
réel par satellites, multipliant ainsi les données dont on a besoin pour les
prévisions climatiques, la planification des pêches et d’autres applications
qui restent encore à imaginer. En outre, quiconque disposerait d’un
ordinateur pourrait les interroger gratuitement.
Dans un monde ravagé par les conflits et empêtré dans les obstacles
bureaucratiques, était-il vraiment réaliste d’envisager qu’un projet
empreint d’un tel idéalisme pourrait un jour être pris au sérieux? Aussi
curieux que cela puisse paraître, tout est déjà en marche, puisque plus de
20 pays collaborent au projet circumplanétaire Argo.
La collaboration entre les océanographes et les météorologues ne date pas
d’hier. Elle est essentielle puisque les océans emmagasinent mille fois plus
de chaleur que l’atmosphère. Ils entraînent ainsi des variations
saisonnières du climat comme un réseau de conduites qui transporteraient la
chaleur autour de la planète.
Cependant, aucun pays ne pouvait surveiller l’océan de façon systématique et
avec suffisamment de précision pour en modéliser et en prévoir les
variations. La plupart des relevés étaient effectuée à bord de coûteux
navires de recherche ou à partir de bouées amarrées. Même dans les pays
avancés, les données en provenance des eaux limitrophes demeuraient souvent
sporadiques. Au large des pays en développement elles étaient encore plus
rares, et elles pouvaient être carrément inexistantes sur de vastes étendues
de haute mer, loin des routes de navigation commerciale.
De 1990 à 1997, dans le cadre de l’Expérience sur la circulation océanique
mondiale (WOCE, d’après l’appellation anglaise World Ocean Circulation
Experiment) menée par près de 30 pays, on essaya d’obtenir une meilleure
représentation de la circulation océanique planétaire. Des scientifiques
mirent alors au point des bouées de surveillance des courants qui flottaient
à des profondeurs déterminées et remontaient périodiquement en surface pour
transmettre les données. Vers la fin de cette expérience, les chercheurs
avaient ajouté à leurs instruments des capteurs de température. Les capteurs
de salinité leur emboîteront le pas.
Les scientifiques étudiant les interactions entre l’océan et l’atmosphère
s’intéressèrent bientôt à cette idée qui engendra le concept d’un réseau
permanent de bouées couvrant les océans du globe et constituant la nouvelle
infrastructure de collecte de données fondamentales destinées à plusieurs
fins.
Le Canada s’engagea très tôt dans ce projet. Dès 1998, Howard Freeland, qui
dirige les travaux sur la bioproductivité des poissons et l’état de l’océan
à l’Institut des sciences de la mer (ISM) de Sidney en Colombie-Britannique
participait à la rédaction d’une note d’information décrivant la conception
et la mise en œuvre d’Argo (le nom s’inspire de Jason et des Argonautes de
la mythologie grecque, car les bouées Argo transmettent des données qui
complètent celles fournies par un satellite nommé Jason).
![Largage du premier profileur Argo canadien depuis le J.P. Tully dans le golfe d’Alaska le 9 juin 2001 (photo reproduite avec la permission du Programme Argo canadien).](/web/20071210124652im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/science/Story/story_images/argo_illustration1_bi.jpg)
Largage du premier profileur Argo canadien depuis le J.P. Tully dans le
golfe d’Alaska le 9 juin 2001 (photo reproduite avec la permission du
Programme Argo canadien).
Les dirigeants de certains pays s’affolèrent à l’idée que des bouées
étrangères puissent dériver dans leurs eaux, mais ils furent ralliés par
l’enthousiasme des scientifiques. En janvier 2005, les États-Unis, le
Canada, la France, le Japon, la Russie, l’Inde et d’autres pays avaient
déployé près de 1 600 profileurs. L’objectif du Programme Argo est de
déployer 3000 bouées dérivantes d’ici à 2006, réparties à des intervalles de
trois degrés de latitude et de longitude, soit environ tous les 300
kilomètres.
Quatre fabricants, dont un au Canada, fabriquent les bouées d’une longueur
d’environ un mètre et demi. Lancées à partir des navires ou des avions,
elles s’enfoncent jusqu’à 2 000 mètres dans la plupart des cas, en réglant
leur flottabilité par pompage d’huile entre elles et un réservoir.
Dix jours plus tard, elles remontent à la surface en effectuant des relevés
de la température, de la salinité (qui peut varier selon les chutes de pluie
ou de neige) et dans certains cas de la teneur en oxygène. Les bouées
transmettent leurs données à un satellite puis s’enfoncent de nouveau. Elles
ont une durée de vie de plus de 120 cycles.
Les partenaires du Programme Argo traitent les données et les acheminent en
moins de 24 heures aux réseaux informatiques exploités par l’Organisation
météorologique mondiale et par le projet Argo lui-même. Le Canada a été l’un
des premiers pays à participer à la mise au point d’un logiciel approprié.
Bob Keeley du Service des données sur le milieu marin (SDMM) du ministère
des Pêches et Océans (MPO) coprésidait l’équipe internationale de gestion
des données Argo lors de la prise de décisions majeures sur la circulation
des données
![](/web/20071210124652im_/http://www.dfo-mpo.gc.ca/science/Story/story_images/argo_illustration2_bi.jpg)
Plus de 90 bouées Argo ont été à ce jour déployées par le Canada,
principalement dans les régions représentées, mais aussi dans le nord-ouest
du Pacifique, au large de l’extrémité méridionale de l’Amérique du Sud et
dans l’océan Indien. Les carrés rouges représentent des bouées devenues
inactives. (Carte reproduite avec l’autorisation du Programme Argo
canadien).
Le réchauffement récurrent au large de l’Amérique du Sud, attribuable au
phénomène El Ninõ, a montré comment ce qui se passe dans l’océan peut
influencer le climat à l’échelle planétaire. Par le passé, face aux
changements qui se produisaient dans l’océan, les scientifiques n’avaient
généralement d’autre recours que d’émettre des hypothèses. Aujourd’hui,
l’information coule de source grâce aux bouées Argo qui livrent plus de 100
000 profils par année, lesquels aideront à cerner et à suivre en temps réel
l’évolution des phénomènes océaniques.
De vastes étendues auparavant non surveillées livreront de nouvelles
données. On dit que pour les océans méridionaux entourant l’Antarctique,
Argo fournira en un an plus d’information que toutes les expéditions de
recherche menées jusqu’à maintenant
Argo dévoilera à tous les secrets des océans. Howard Freeland fait observer
que « les jeunes de pays ennemis peuvent sans la moindre inquiétude
consulter les données fournies par les bouées de l’adversaire ». En
partageant davantage d’information, les jeunes scientifiques et leurs
confrères moins jeunes pourront acquérir une bien meilleure connaissance du
fonctionnement de l’océan et de l’atmosphère.
Les scientifiques pensent que le Programme Argo et les données
complémentaires permettront des prévisions climatiques saisonnières plus
exactes jusqu’à un an à l’avance. Naturellement, un élément de probabilité
demeurera, mais même ainsi les prévisions amélioreront les possibilités de
succès de l’espèce humaine dans plusieurs domaines. Si le Programme Argo
livre les résultats attendus, les agriculteurs seront en mesure d’ajuster au
mieux leurs plantations pour obtenir de meilleures récoltes. Les
responsables de la gestion de l’eau en sauront davantage sur
l’approvisionnement et la demande de l’année à venir. Les organismes chargés
des mesures d’urgence auront une meilleure idée des ouragans et des
moussons. Quiconque dépend des changements climatiques saisonniers pourra
planifier ses activités avec davantage de certitude.
Le Programme Argo facilitera la gestion des pêches et l’évaluation des
écosystèmes. Dans le cadre d’une des premières applications, Howard Freeland
et son collègue Patrick Cummins de l’ISM ont utilisé des rapports Argo pour
modéliser la circulation océanique dans le golfe de l’Alaska et évaluer
certains mécanismes qui font que les éléments nutritifs sont entraînés dans
les eaux de surface. Les éléments nutritifs présents dans l’océan, tels les
nitrates, nourrissent le phytoplancton, de la même façon que l’engrais
favorise la croissance des plantes d’un jardin; le plancton alimente à son
tour les poissons et fournit de l’oxygène à tous les autres organismes
vivants.
Les tempêtes hivernales, les remontées d’eau profonde et le mélange de l’eau
influencent tous l’approvisionnement en éléments nutritifs. Les bouées
dérivantes Argo permettent une surveillance précoce des fluctuations qui se
propageront dans la chaîne alimentaire océanique. D’autres applications
océaniques sont prévues, dont le dépistage des polluants et la surveillance
du changement climatique à long terme.
Avec quelque 90 bouées déployées à ce jour dans l’Atlantique Nord, dans le
golfe de l’Alaska, au large de l’Amérique du Sud et dans l’océan Indien, le
Canada se classe au quatrième rang des pays participants. Compte tenu de son
immense littoral et de sa dépendance à l’égard des fluctuations climatiques
saisonnières, le Canada sera à même de tirer parti des précieuses
connaissances découlant du Programme Argo, et il contribuera par ailleurs
avec ses partenaires internationaux à l’enrichissement des connaissances
océanographiques au bénéfice de toute la planète.
Les illustrations sont tirées d’un feuillet d’information diffusé par
l’Institut des sciences de la mer, le SDMM et l’Institut océanographique de
Bedford à Halifax (Nouvelle-Écosse) du MPO; voir
http://www.pac.dfo-mpo.gc.ca/sci/osap/projects/argo/default_f.htm
Ce site Web vous dirigera vers d’autres, dont les sites renfermant des
données sur les bouées dérivantes canadiennes.
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