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Maude
n'avait que neuf ans lorsqu'elle s'est sentie pour la première fois angoissée
à l'idée d'aller à l'école. À la naissance de ses sœurs jumelles six ans auparavant,
sa mère avait décidé de laisser son emploi pendant quatre ans pour élever sa
famille. Son père était travailleur autonome à domicile et un couple de grands-parents
vivaient avec eux. « Il y avait toujours quelqu'un à la maison, se rappelle
Éric le père de Maude. C'était un environnement très stable. »
Il y a trois ans,
sa femme a décidé de reprendre le travail. C'est alors que tout a changé. Les
trois enfants ont ressenti l'angoisse de la séparation, mais c'est Maude qui
en a le plus souffert.
![](/web/20071122021549im_/http://www.canadian-health-network.ca/servlet/BlobServer?blobtable=ImageFile&blobcol=urlpicture&blobheader=image/gif&blobkey=id&blobwhere=1182713579703&blobnocache=true) |
Les choses ont empiré lorsque la famille a déménagé au cours de l’été 2002
et que les enfants ont changé d’école. Jusque-là, Maude avait fréquenté une
petite école privée, près de la maison, et n’avait eu que des enseignantes.
À dix ans, elle entamait sa 4e année dans une école publique au sein
d’une classe de 34 élèves, dont les deux tiers étaient des garçons. Pour
couronner le tout, son enseignant, pour la première fois un homme, mesurait
1,88 mètre et avait la tâche peu enviable d’imposer la discipline.
Environ quatre semaines après la rentrée, Maude a commencé à se plaindre de
maux de tête et de ventre. Au début, ses parents pensaient qu’il s’agissait
de troubles physiques et l’ont amenée voir le médecin. Tous les tests se sont
avérés négatifs. À la mi-octobre, l’école appelait régulièrement Éric en plein
jour pour lui demander de venir chercher sa fille parce qu’elle se plaignait
de maux de tête. Un jour, Maude a fait une crise. Éric vit alors sa fille, jusque-là
plutôt réservée, se déchaîner. « Nous lui disions qu’elle devait aller à l’école.
Elle s’est jetée par terre, en grinçant des dents et en criant. Nous étions
complètement estomaqués. Le lendemain, nous avons demandé de l’aide. »
Angoisse démesurée
Qui d'entre nous ne se rappelle pas d'avoir vécu des périodes stressantes à
l'école? Bien évidemment, nous ne nous rendions pas compte à l'époque qu'un
très grand nombre de nos camarades vivaient exactement la même chose. Il a en
effet été confirmé que certaines situations scolaires particulièrement stressantes
touchent les enfants à des stades prévisibles. Il arrive cependant que certains
jeunes soient si angoissés qu'ils développent une peur de l'école au point de
refuser d'y aller. Dans de tels cas, on recommande aux parents de solliciter
l'aide d'un spécialiste.
Stades prévisibles
Bien que les jeunes puissent être angoissés à
tout moment au cours de leur vie scolaire, certaines périodes
semblent poser plus de difficultés que d’autres.
En première année, par exemple, l’enfant trouve
parfois difficile de faire la transition de la demi-journée
à une journée complète et d’avoir à
s’asseoir sagement à un pupitre. On a constaté
que les élèves de première année sont,
pour un certain temps, déboussolés, désordonnés
et d’humeur grincheuse.
![Image de livres](/web/20071122021549im_/http://www.canadian-health-network.ca/servlet/BlobServer?blobtable=ImageFile&blobcol=urlpicture&blobheader=image/gif&blobkey=id&blobwhere=1184950175907&blobnocache=true) L’entrée au secondaire peut être également problématique. À ce stade, les problèmes
sont plutôt d’ordre social que scolaire. « Dans bien des cas, explique Janet
Morrison, psychanalyste pour enfants à Toronto, les problèmes sont reliés à
un incident désagréable, pas nécessairement à de l’intimidation mais au rejet,
aux taquineries, au fait de ne pas être accepté ou encore d’avoir été lésé profondément
par un copain ou une copine. Les enfants de 12 et 15 ans sont terriblement gênés.
Ils s’imaginent qu’ils sont constamment jugés par les autres et que le monde
entier les scrute à la loupe. »
Mme Morrison connaît des enfants qui ne sont pas allés
à l’école des jours durant parce qu’ils
avaient un bouton ou parce que les vêtements qu’ils portaient
n’étaient pas suffisamment à la mode. « Les règles changent, ajoute-t-elle. Il ne s’agit plus
tout simplement de faire ce que disent les parents ou les enseignants,
mais plutôt justement de ne pas faire ce qu’ils disent.
Le jeune croit sincèrement qu’il ne peut plus compter
sur la famille, qu’il ne peut compter que sur lui-même. » Le défi, et il est énorme lorsqu’on a
12 ou 13 ans, est de se forger une personnalité unique et
d’arriver à se distinguer de la bonne façon.
Selon Mme Morrison, c’est le jeune de 14 ans qui
a le plus grand nombre de problèmes à surmonter. C’est
le point culminant de la conscience de soi et c’est
à cet âge qu’il doit avoir l’air « cool »
et commencer à fréquenter le sexe opposé. « Ils
se sentent tous obligés d’embrasser quelqu’un,
de fumer un joint, de boire de la bière, etc., ajoute Mme Morrison. Les jeunes qui ont beaucoup d’activités arrivent
à ignorer ces pressions pendant quelques années, mais
à 14 ans, c’est carrément impossible. »
En plus des pressions sociales, les jeunes ont bien d’autres
tracas souvent difficiles à cerner. Sharon Dembo, directrice
d’un programme de psychanalyse infantile à Toronto,
a récemment rencontré une adolescente très
performante pour qui le simple fait d’aller à l’école
était devenu quasiment insoutenable. Elle n’arrivait
plus à terminer ses travaux et risquait d’échouer
son secondaire. « Je ne pouvais vraiment pas la catégoriser
d’angoissée, déclare Mme Dembo. J’ai alors
compris qu’à son âge, il s’agissait plutôt
d’un refus ou d’une peur de vieillir, de devenir
indépendante. »
« Ne minimisez pas les symptômes; attaquez-vous au problème. »
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En fait, le refus d’aller à l’école trahit souvent l’angoisse que ressent un
enfant à l’égard d’un problème familial. Le jeune hésite à quitter la maison
à cause d’un divorce ou de la maladie d’un parent, d’une longue période de solidarité
familiale qui suit les vacances d’été par exemple, ou encore à la suite d’un
changement stressant comme un déménagement ou un changement d’école. Mme
Dembo a récemment traité un adolescent qui se sentait écrasé sous le poids des
travaux scolaires. « Il peut s’agir de jeunes très, très intelligents. Ils sont
tout simplement débordés et ils n’arrivent plus à terminer quoi que ce soit,
explique-t-elle. Et si on ne leur prête pas main forte, ils risquent de décrocher.
» Bien sûr, l’angoisse peut également être causée par l’intimidation.
Pour bon nombre de jeunes, la transition ultime s’effectue
entre l’école secondaire et l’université. Mme Morrison ajoute que ce sont souvent les enfants les plus « sages »
et qui ont passé à travers l’école secondaire
sans problèmes qui ont le plus de difficultés à
effectuer le changement. « Ils n’ont développé
aucune forme d’indépendance, déclare Mme Morrison.
Ils ne se sont pas rebellés. Ils n’ont aucune idée
de qui ils sont. » Ils sont seuls pour la première
fois et cela peut être très stressant, particulièrement
pour ceux qui n’ont pas établi leur propre identité,
distincte des parents.
Quand l'angoisse devient-elle problématique?
Les signes et symptômes suivants peuvent laisser présager
des problèmes d'angoisse :
- des maux de tête et de ventre répétitifs
- des plaintes vagues, le désir de rester à la maison, surtout pour les enfants
de 5 à 7 ans et de 11 à 14 ans. Le « malaise » disparaît mystérieusement dès
que l'enfant a la permission de rester à la maison et réapparaît soudainement
le lendemain matin
- la régression, le fait de s'accrocher, la peur de rester seul dans une chambre,
la peur du noir
- les cauchemars et la difficulté à s'endormir
- les crises de colère lorsque l'enfant se rend compte qu'il ne peut rester
à la maison
- la fatigue
- l'humeur grincheuse
- l'indécision
- une crainte excessive qu'on lui fasse du mal ou qu'on attaque un être
cher.
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Que peuvent faire les parents?
Les parents ont parfois de la difficulté à parler des problèmes sociaux et
scolaires avec leurs enfants car ces conversations peuvent leur rappeler de
mauvais souvenirs. Ils perdent patience, se fâchent et leur disent à la fin
de ne pas faire de montagnes avec un grain de sel. Ils sont tout simplement
mal à l'aise. La première chose à faire est d'éviter d'exprimer ses propres
sentiments et de se mettre plutôt à la place de l'enfant.
- « Ayez confiance, les problèmes s’estomperont, conseille Mme
Morrison. Soyez à l’écoute. Les angoisses des enfants sont tout aussi réelles
que celles qu’éprouvent les adultes au sujet de leur carrière ou de ce que
pensent leurs collègues de travail. »
- Si un jeune refuse d’aller à l’école, encouragez-le à y retourner le plus
tôt possible. Plus l’absence est longue, plus le retour est difficile. Les
jeunes enfants en particulier ont besoin de parents attentionnés pour les
diriger sur le bon chemin. « Certains parents transmettent le message Je
suis certain que tout va bien aller alors que d’autres laissent transparaître
leur incertitude, de dire Mme Dembo. Les enfants savent très bien
interpréter le langage corporel. »
- Ne minimisez pas les symptômes et attaquez-vous au problème. Si cela signifie
investir un peu d’argent dans des vêtements ou trouver un bon maquillage pour
couvrir une imperfection, faites-le.
- Aidez-les à trouver des choses qui les intéressent ou les réconfortent,
comme la musique, l’art ou l’exercice. « Les jeunes qui développent des talents
dans les toutes premières années d’école sont avantagés, dit Mme Morrison. Si votre enfant a appris à jouer de la flûte, il aimera faire partie
de l’ensemble musical de l’école. C’est alors son talent qui sera mis en valeur
et non son bouton ou sa coupe de cheveux. »
- Si un enfant croule sous les devoirs, demandez de l’aide des enseignants.
En renseignant l’école sur les efforts qu’il fait, vous évitez que ses actions
soient mal interprétées.
- Lorsque vous avez éliminé le problème d’intimidation de l’équation et que
votre enfant n’arrive plus à faire ses devoirs, qu’il ne veut pas aller à
l’école, qu’il se sent étouffé et que la peur prend le dessus, n’hésitez pas
à demander de l’aide d’un spécialiste.
- Prenez le temps de discuter régulièrement avec votre enfant de l’école
et de ses amis. Non seulement vous pouvez ainsi l’aider à résoudre les problèmes
au fur et à mesure qu’ils se présentent, mais vous lui transmettez également
un important message : vous lui laissez savoir que la communication est toujours
ouverte entre vous et lui.
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