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Ordonnance CRTC 2001-164
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Ottawa, le 26 février 2001 |
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Accès au service UniContact de Bell Canada par les personnes aveugles
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Référence :
8620-S49-01/00 |
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Dans la présente ordonnance, le Conseil
ordonne à Bell Canada d'offrir en média substitut aux personnes aveugles qui
en font la demande les tarifs, modalités et conditions du service UniContact.
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Dans l'ordonnance 2001-163, également publiée
aujourd'hui, le Conseil ordonne à l'ensemble des entreprises canadiennes de
justifier pourquoi elles ne devraient pas être assujetties à la même
obligation de rendre accessible l'information concernant leurs services de
télécommunication (sans fil ou ligne métallique) au détail. |
1. |
Dans une demande qu'il a déposée le 10 juin 2000
en vertu de la partie VII des Règles de procédure du CRTC en matière de
télécommunications, M. Chris Stark a demandé au Conseil d'ordonner à Bell
Canada, lorsqu'elle offre sa gamme de téléphones sans fil UniContact, de
desservir les clients aveugles de façon égale et équitable. M. Stark a
soutenu qu'il a été privé des avantages de la Loi sur les
télécommunications (la Loi) parce qu'il est aveugle. |
2. |
M. Stark a demandé au Conseil d'ordonner à
Bell Canada : |
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a) de fournir aux personnes aveugles (sur
demande), dans ses points de vente au détail, les prix, modalités et
conditions, ainsi que les manuels d'utilisation des combinés, en média
substitut; |
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b) d'offrir un combiné sans fil doté de
fonctions permettant aux personnes aveugles d'accéder à l'information sur
l'écran de la même manière que les consommateurs voyants; |
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c) d'offrir des combinés sans fil avec des
boutons-poussoirs de fonctions de formes diverses, un « point » en relief sur
le bouton-poussoir numéro cinq, davantage d'espace entre les
boutons-poussoirs de même que des boutons-poussoirs de forme concave; |
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d) de former son personnel à servir efficacement
les personnes aveugles et ce, au moyen de matériel de formation que le
Conseil lui demanderait de soumettre à son examen; et |
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e) de s'assurer que ses Centres de services
adaptés détiennent de l'information sur les produits sans fil conçus pour les
personnes aveugles. |
3. |
Bell Canada a déposé une réponse à la demande de
M. Stark le 18 septembre 2000, et aux demandes de renseignements du personnel
du Conseil, le 9 novembre 2000. Le 30 novembre 2000, l'Institut national
canadien pour les aveugles (INCA) a soumis un mémoire auquel Bell Canada a
répliqué le 8 décembre 2000. M. Stark a présenté un autre mémoire le
10 décembre 2000 en réplique à Bell Canada et à l'INCA. |
4. |
Le Conseil a tenu compte de tous les mémoires et
il a examiné les allégations de M. Stark conformément aux pouvoirs que lui
confèrent les articles 27(2) et 24 de la Loi. |
5. |
L'article 27(2) de la Loi prévoit ce qui suit : |
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Il est interdit à l'entreprise canadienne, en ce qui concerne soit la
fourniture de services de télécommunication, soit l'imposition ou la
perception des tarifs y afférents, d'établir une discrimination injuste, ou
d'accorder -- y compris envers elle-même -- une préférence indue ou
déraisonnable, ou encore de faire subir un désavantage de même nature.
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6. |
En vertu de l'article 27(4) de la Loi, il
incombe à l'entreprise canadienne d'établir qu'une discrimination n'est pas
injuste, ou qu'un désavantage n'est pas indu ou déraisonnable. |
7. |
L'article 24 de la Loi prévoit que : |
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L'offre et la fourniture des services de télécommunication par
l'entreprise canadienne sont assujetties aux conditions fixées par le
Conseil ou contenues dans une tarification approuvée par celui-ci.
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Renseignements sur les prix, les modalités et
les conditions |
8. |
Pour ce qui est des renseignements sur les prix,
les modalités et les conditions du service UniContact, Bell Canada a fait
valoir qu'ils sont disponibles auprès de son personnel dans ses points de
vente au détail, par téléphone (au 310-BELL) et par l'intermédiaire de ses
« Centres de services adaptés », créés en vue de fournir de l'information aux
personnes ayant des besoins particuliers (dont les personnes aveugles). La
compagnie a déclaré que son personnel est bien formé pour servir ce genre de
clients. Elle a ajouté que ces renseignements se trouvent sur son site Web,
lequel est compatible avec les logiciels courants que l'industrie met à la
disposition des malvoyants qui utilisent l'ordinateur. Bell Canada a
également fait remarquer que, conformément aux ordonnances Télécom CRTC
96-1191 du 29 octobre 1996 et 98-626 du 26 juin 1998, elle fournit en média
substitut (c.-à-d., braille, gros caractères et disquettes) des états de
compte et des encarts de facturation informant ses clients du lancement de
nouveaux services et de modifications tarifaires aux services actuels. |
9. |
Dans son mémoire, l'INCA a précisé qu'il n'avait
pas fait d'observation sur l'accessibilité du site Web de Bell Canada. |
10. |
Selon M. Stark, il faut que, dans ses points de
vente au détail, Bell Canada offre en média substitut les renseignements sur
les prix, les modalités et les conditions, de manière qu'avant d'acheter, les
personnes aveugles puissent évaluer les différents services et plans
tarifaires. Il a fait valoir que les méthodes que Bell Canada emploie
actuellement pour communiquer les renseignements de ce type aux clients
aveugles, c.-à-d., par Internet sur son site Web ou de vive voix,
complémentent la documentation imprimée mais ne la remplacent pas. Il a
soutenu que, pour comparer les offres, les modalités et les conditions,
l'information verbale n'a pas la même valeur que l'information écrite. Il a
ajouté que les renseignements qu'il a reçus de Bell Canada dans ses points de
vente au détail et au téléphone n'étaient pas satisfaisants et ne comblaient
pas vraiment ses besoins. |
11. |
Le Conseil estime que les clients actuels et
éventuels (la clientèle) doivent obtenir suffisamment de renseignements sur
un service pour pouvoir faire un choix éclairé. À cet égard, il est
fondamental que la clientèle ait accès aux renseignements sur les tarifs, les
modalités et les conditions d'un service, lesquels sont susceptibles d'être
modifiés. Le Conseil s'accorde avec M. Stark pour dire que la clientèle
aveugle est désavantagée du fait qu'elle ne peut obtenir, dans la forme qui
lui convient, les tarifs, modalités ou conditions du service UniContact. Il
conclut que le désavantage est indu et contraire à l'article 27(2) de la Loi.
Il estime donc que Bell Canada doit fournir, dans un délai raisonnable, les
renseignements sur les tarifs, les modalités et les conditions du service
UniContact aux personnes aveugles, dans le média substitut réclamé (c.-à-d.,
braille, gros caractères ou disquette). |
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Formation du personnel |
12. |
D'après le dossier de l'instance, le Conseil est
convaincu que Bell Canada a traité de façon satisfaisante la question de la
formation de son personnel qui répond aux besoins des clients aveugles ou
ayant des besoins particuliers. Bell Canada a ouvert un Centre de services
adaptés à Montréal et à Toronto; les clients de partout au pays peuvent
téléphoner à ces centres, sans frais. |
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Guides de l'utilisateur |
13. |
M. Stark a fait valoir qu'il est essentiel
d'offrir aux personnes aveugles les guides d'utilisation des combinés en
média substitut. Il a déclaré ne pas avoir pu obtenir, aux points de vente au
détail de Bell Canada, une aide suffisante à propos des combinés (p. ex., on
ne l'a pas informé de la documentation offerte sur l'un ou l'autre des
combinés sans fil UniContact), le personnel du Centre de services adaptés lui
ayant indiqué que le service sans fil débordait le cadre de son mandat. |
14. |
Bell Canada a déclaré qu'à compter de novembre
2000, les Centres de services adaptés renseigneront les personnes aveugles au
sujet des services et des fonctions de combinés sans fil. La compagnie a
ajouté qu'au moins un des fabricants de ses combinés sans fil fournit sur
demande un guide de l'utilisateur en média substitut. Elle a fait valoir
qu'ensemble, ses employés au téléphone, aux points de vente au détail et aux
Centres de services adaptés, ainsi que son site Web, constituent une source
d'aide et d'information sur les combinés suffisamment accessible pour que les
personnes aveugles puissent choisir le combiné qui leur convient et
l'utiliser efficacement. |
15. |
Étant donné le peu de renseignements que les
fabricants de combinés fournissent en média substitut, le Conseil estime
raisonnables les mesures que Bell Canada prend pour répondre aux besoins des
personnes aveugles, dans la conjoncture actuelle du marché. Il encourage
Bell Canada à travailler de pair avec les fabricants de combinés pour
élaborer des guides d'utilisation et autres documents pertinents qui soient
accessibles aux personnes aveugles. |
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Fonctions des combinés |
16. |
M. Stark a demandé que le clavier du combiné
soit conçu pour les personnes aveugles (c.-à-d., des boutons-poussoirs de
fonctions de différentes formes, un « point » en relief sur le
bouton-poussoir numéro cinq, davantage d'espace entre les boutons-poussoirs
ainsi que des boutons-poussoirs de forme concave). Il a aussi réclamé que les
renseignements affichés sur l'écran du combiné, comme ceux qui signalent
l'état de la connexion, soient accessibles aux personnes aveugles. Il a fait
valoir que si la personne aveugle n'a pas accès au contenu de l'écran, le
service qu'elle reçoit n'équivaut pas à celui dont jouit l'utilisateur
voyant. |
17. |
Bell Canada a déclaré que la majorité des
combinés associés au service UniContact ont un « point » en relief (sur le
bouton-poussoir du numéro cinq, sur celui d'au-dessus ou sur celui
d'en-dessous), pour faciliter l'orientation tactile des personnes aveugles et
que certains de ces combinés sont dotés de la fonction de composition
accélérée par activation vocale. La compagnie a ajouté que les fabricants
n'offrent tout simplement pas l'équipement qui permettrait aux utilisateurs
aveugles de connaître le contenu intégral de l'écran du combiné. Elle a fait
remarquer qu'elle ne fabrique pas de combinés sans fil et qu'elle dispose de
peu de moyens pour faire modifier le design et les fonctions des combinés par
les fabricants. |
18. |
L'INCA a affirmé que les commandes de fonctions
et les renseignements affichés à l'écran des combinés sans fil posent
d'énormes problèmes d'accessibilité. |
19. |
M. Stark a déclaré que le « point » en relief
devrait se trouver sur le bouton-poussoir du numéro cinq et non pas au-dessus
ou en dessous. En outre, si la composition accélérée par activation vocale
est un dispositif d'accès qui aide les personnes handicapées ayant de la
difficulté à enfoncer les boutons-poussoirs, elle ne permet pas aux personnes
aveugles d'accéder à l'information affichée sur l'écran ou encore d'utiliser
plus facilement les commandes du clavier. |
20. |
Le Conseil estime qu'il n'est pas absolument
nécessaire que le « point » en relief se trouve sur le bouton-poussoir du
numéro cinq pour faciliter l'orientation tactile des personnes aveugles. De
plus, de nombreux combinés sans fil ont des boutons-poussoirs de fonctions de
différentes formes qui favorisent, elles aussi, l'orientation tactile. |
21. |
Le Conseil fait remarquer que, d'après Bell
Canada, les fabricants de combinés n'offrent pas encore de modèle qui traduit
les données numériques à l'écran en média substitut accessible aux personnes
aveugles. Parce que la technologie des combinés est largement et facilement
accessible actuellement, le Conseil estime qu'il ne serait pas raisonnable de
demander à Bell Canada d'offrir des combinés qui, au dire de la compagnie, ne
se trouvent pas sur le marché. Dans les circonstances, le Conseil estime
qu'aucune autre mesure ne s'impose pour l'instant. Cependant, il encourage
Bell Canada à travailler de concert avec les fabricants pour mettre au point
des combinés qui répondraient mieux aux besoins des personnes aveugles. |
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Redressement accordé |
22. |
Compte tenu de ce qui précède et conformément à
l'article 24 de la Loi, le Conseil ordonne à Bell Canada, comme condition
pour fournir son service UniContact, d'offrir, dans un délai raisonnable les
renseignements sur les tarifs, les modalités et les conditions du service
UniContact aux personnes aveugles, dans le média substitut réclamé (c.-à-d.,
braille, gros caractères ou disquette). |
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Secrétaire général |
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Ce document est disponible, sur demande, en
média substitut et peut également être consulté sur le site Internet suivant
: http://www.crtc.gc.ca |