Conseil national de recherches Canada / National Research Council Canada
Conseil national de recherches Canada / National Research Council Canada Gouvernement du Canada
Aller au contenu principalAller à la navigation de la sectionAller à la navigation principale Conseil national de recherches Canada / National Research Council Canada
Conseil national de recherches Canada / National Research Council Canada
  
À notre sujet
Vue d'ensemble du CNRC
Mandat
Le CNRC@90
Capsules sur le CNRC
Prix du CNRC
Publications générales du CNRC
Vérification et évaluation
Version imprimable Version
imprimable

Concurrence économique mondiale

 
 
Table des matières
 
 

Table des matières

 
 

Auteurs

 
 

Avant-propos

 
 

Présentation sommaire

 
 

Le contexte mondial dans lequel nous évoluons

 
 

Les problématiques mondiales

 
 

Concurrence économique mondiale

 
 

Rôle évolutif des S-T

 
 

Conclusion

 
 

Évolution du système du marché mondial

Aujourd'hui, l'argent, la technologie et les matières premières traversent les frontières nationales de plus en plus rapidement. Le commerce mondial a connu une croissance, passant de 580 milliards de dollars américains en 1980 à 6,3 billions de dollars américains en 2004, soit onze fois plus1. Le commerce devrait poursuivre sa croissance impressionnante, augmentant de 80 % d'ici 2020 par rapport aux niveaux de 20002. Nous nous trouvons au sein d'une période de changements importants quant à la forme, la structure et la dynamique de l'économie mondiale. La période s'échelonnant entre 2005 et 2020 sera caractérisée par une démographie en évolution et en migration, par des mouvements importants à l'égard des marchés des biens et services et par des cycles de vie accélérés pour les produits ou services. Pour atteindre l'excellence compte tenu de ces réalités de marché émergentes, les organisations doivent faire preuve d'agilité et d'adaptabilité, elles doivent gérer avec compétence leur propriété intellectuelle et opter pour des activités de distribution à l'échelle mondiale. Le libre flux de l'innovation et des capitaux décidera de la réussite ou de l'échec d'industries et de nations.

L'expansion des économies de l'Inde et de la Chine présente un défi fondamental à la viabilité économique continue de pays dits de « puissance moyenne » tels que le Canada. D'ici 2020, compte tenu des tendances actuelles, la Chine possédera une économie dont l'envergure sera comparable à celle des États-Unis. L'Inde arrivera à ce niveau vers les années 2040 et la Russie pourrait refaire surface comme intervenant important. Certains prédisent une guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis; ils anticipent que le commerce mondial deviendra beaucoup plus vulnérable à la situation politique en Chine et en Inde ainsi qu'à la relation entre la Chine, l'Inde, les États-Unis et l'Union européenne. Ils font valoir aussi que davantage de pays « transféreront à l'étranger » la production élémentaire et évolueront vers une production davantage à valeur ajoutée au fil du temps. Les nations commerçantes traditionnellement fortes, telles que le Royaume-Uni et la France, s'affaibliront. Toutefois, ce remaniement de l'équilibre du pouvoir et l'existence d'un « plus grand gâteau à l'échelle mondiale » dans l'ensemble présentent des occasions intéressantes pour le Canada en raison de ses richesses exceptionnelles en ressources naturelles, soit l'eau, l'énergie, les minéraux et les terres arables.

La place qu'occupe un pays dans ce nouvel ordre mondial dépend énormément de son bien-être social et économique. Présentement, environ les deux tiers de la population mondiale vivent dans des pays liés à l'économie mondiale. Les pays qui n'y sont pas raccordés continueront à souffrir – p. ex., l'Afrique subsaharienne qui, présentement, possède la plus grande portion de personnes vivant de moins d'un dollar par jour. Même d'ici 2020, les avantages de la mondialisation ne se feront pas ressentir à l'échelle mondiale. L'écart s'élargira entre les pays qui en tirent parti (sur les plans économique, technologique et social) et les nations sous-développées. Les plus grands avantages devraient échoir à des pays qui ont accès à de nouvelles technologies et qui les adoptent. De plus en plus, il existe une reconnaissance plus ferme que les S-T sont nécessaires pour la survie dans le monde et heureusement, il y a une reconnaissance également que les économies plus fortes doivent utiliser leurs capacités (p. ex., les S-T) pour venir en aide aux nations moins fortunées et combler les nombreux « fossés » qui divisent le monde.

Même si la mondialisation procure de nouvelles sources de concurrence et des débouchés sur le marché, la libéralisation du processus commercial est difficile et lente. L'Organisation mondiale du commerce (OMC), qui regroupe 140 membres et s'occupe d'une vaste gamme de problèmes, devient de plus en plus bureaucratique et lente. Nous pouvons nous attendre à une augmentation des différends commerciaux et des contestations du régime de l'OMC/GATT tout au long de la période s'échelonnant entre 2005 et 2020 (60 différends importants en 2005). Certains croient que les ONG tels que l'OMC, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI) auront moins d'importance à l'avenir puisque la mondialisation sera de plus en plus menée par « les personnes qui comprennent le monde plat, qui s'adaptent rapidement à ses processus et technologies et qui commencent à aller de l'avant – sans traités ni conseils de la part du FMI. Ils représenteront chaque couleur de l'arc-en-ciel et proviendront de chaque recoin du monde3 ».

Le contexte canadien

Le Canada est une nation commerçante, une caractéristique qui est fondamentale à son identité et à sa place dans le monde – il est fortement dépendant de la façon dont fonctionne le monde ainsi que des priorités et mesures prises dans d'autres pays. L'une des dynamiques mondiales les plus fondamentales est l'émergence de l'économie fondée sur les connaissances, de concert avec l'expansion de la Chine, de l'Inde, du Brésil et du Mexique. L'évolution de la structure des puissances économiques présente un défi fondamental à la viabilité économique continue de pays de « puissance moyenne » tels que le Canada.

La libéralisation des marchés internationaux présente à la fois des débouchés et des défis pour le Canada. Nous sommes présentement le cinquième exportateur et importateur de biens et services en importance au monde. Le pourcentage de notre PIB qui dépend du commerce est plus élevé que celui de toute autre nation membre de l'OCDE. Plus de 80 % de nos exportations sont destinés aux États-Unis. L'économie canadienne continuera à être dominée par le marché nord-américain pour l'avenir prévisible. Toutefois, la dépendance des Nations Unies à l'égard des prêts étrangers a créé un déséquilibre mondial qui, selon les suggestions de certains, pourrait donner lieu à une position davantage protectionniste adoptée par les États-unis – ce qui pourrait avoir des répercussions importantes pour l'économie canadienne.

En accédant aux marchés de l'exportation mondiaux, le Canada se rend vulnérable à la concurrence internationale accrue à l'égard des capitaux, de la main-d'oeuvre et de la part des marchés. Nous faisons face à la convergence de défis qui découlent de notre dépendance actuelle de l'activité de fabrication, de la croissance importante du bassin de fabrication de la Chine, de l'élargissement des accords de libre-échange, de l'émergence de l'économie fondée sur les connaissances en Inde et du désir de la part de ces deux pays de créer une propriété intellectuelle nouvelle et d'accéder à un palier supérieur dans la chaîne de récupération des plus-values (dans des industries aussi diverses que les télécommunications et les produits pharmaceutiques).

Une surdépendance à l'égard des marchés américains au moment où les marchés mondiaux importants auront connu une évolution considérable constituerait une stratégie économique dangereuse pour les entreprises canadiennes. Le Canada devra s'ajuster à ces mouvements et explorer de nouveaux marchés d'exportation tels que la Chine, l'Inde, le Brésil et le Mexique. Le Canada devra également s'adapter aux perturbations soudaines des courants commerciaux compte tenu de la possibilité que surviennent des différends commerciaux ou des modifications soudaines des conditions politiques dans des marchés importants en émergence. Le Canada est confronté à la possibilité réelle qu'il devienne insignifiant, voire même sans pertinence aucune, sur le marché mondial. D'ici 2050, le Canada fera un apport de moins de 1 % au PIB mondial, tandis que la Chine, l'Inde et les États-Unis, produiront 63,5 % à eux trois. Il nous faudra travailler fort afin d'assurer notre statut dans le monde4.


Top of page

Problématiques industrielles

Avantages économiques tirés des S-T

Au fur et à mesure que l'économie mondiale effectue la transition entre une économie fondée sur les ressources et une économie fondée sur les connaissances et au fur et à mesure que les emplois dans le secteur de la fabrication connaissent une migration de plus en plus importante des pays industrialisés vers des pays en développement, les pays industrialisés doivent optimiser l'avantage qu'ils tirent de leur potentiel de création de connaissances. En conséquence, il existera une exigence croissante que les S-T et l'innovation procurent des avantages économiques au-delà de la simple élaboration de nouvelles technologies ou même de leur application à de nouveaux produits et services, allant jusqu'à la diffusion durable de ces nouvelles applications sur le marché. Ce n'est qu'à ce moment que les nouvelles technologies pourront relever les défis du jour et procurer des rendements économiques et sociaux pour leurs concepteurs.

Facteurs touchant le rendement de l'industrie

Un examen des facteurs qui touchent le rendement de l'industrie canadienne indique la forte influence de facteurs économiques sur les affaires. Au nombre de ces facteurs, il y a la concurrence de la part de pays fournisseurs à faibles coûts tels que la Chine, l'incidence de l'augmentation des coûts des intrants et les changements des tendances concurrentielles au sein de l'industrie. Toutefois, les préoccupations environnementales ont une importance croissante dans le cadre du rendement sectoriel, notamment des préoccupations concernant les émissions dangereuses, la régie environnementale, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et les mouvements plus généraux vers une production durable. Un certain nombre de facteurs importants sur le plan de la société ont également fait leur apparition, y compris l'influence d'une société vieillissante sur les tendances d'achats, l'augmentation de la sécurité après le 11 septembre 2001 et les changements que suscite l'omniprésence de renseignements et de communications. Le graphique ci-dessous illustre l'importance relative de ces facteurs sur divers secteurs industriels. Il est à observer que les S-T n'ont pas été cernées comme moteur important pour le secteur des services. Ce vaste secteur effectue officiellement peu de R-D et possède un processus d'innovation qui est alimenté par l'adaptation technologique et l'évolution au niveau de l'organisation.

Relative Influence of External Factors

Graphique montrant l'importance relative de facteurs externes sur divers secteurs industriels.

Source: Trade Performance of Canadian Manufacturing 2000-2004 - Special Study for NRC

Tendances commerciales en évolution

Une analyse a été effectuée afin d'établir de quelle façon les parts du marché nord-américain ont évolué au cours des dernières années et de savoir si, en particulier, les pays dont le coût de la main-d'oeuvre est plus faible, soit la Chine, le Mexique et la Corée du Sud, en ont tiré parti. Les résultats de l'analyse indiquent que la Chine a remporté une part de marché considérable en Amérique du Nord et que tous les autres pays en ont perdu. Une analyse menée en 2004 par Industrie Canada indiquait que la pénétration des exportations chinoises se produisait dans des secteurs où il existait une production canadienne limitée et vice-versa. Dans le secteur de la haute technologie, la part de la Chine a augmenté de 11 % tandis que le Canada a perdu 3 %, la Corée et le Mexique ayant chacun perdu 1 %.

Proportion des importations américaines en haute technologie selon le pays d'origine

Graphique montrant les gains enregistrés par la Chine sur le marché alors que tous les autres pays affichent un recul

Source: .

Investissement en R-D et capacité de réception

Un investissement privé/public en R-D de l'ordre de 70/30 est considéré un bon point de référence au sein des pays de l'OCDE. Comparé à ce point de référence, l'investissement privé en R-D au Canada est bien plus faible (53 %) et en déclin tout comme le nombre de entreprises qui effectuent de tels investissements, malgré le fait que le Canada bénéficie d'un des régimes fiscaux de R-D les plus généreux. En 2001, le Canada ne possédait que 228 entreprises « chefs de file en R-D », lesquelles comptaient pour presque 80 % des investissements en R-D du secteur privé canadien. Cette tendance se poursuivra jusqu'en 2020, ce qui exercera une pression sur les installations de R-D bénéficiant d'un financement public. En outre, au fur et à mesure que moins de personnes sont actives au sein de la main-d'oeuvre , la proportion des économies réalisées baissera. McKinsey & Co., entre autres, prédit un déclin important de capitaux de lancement disponibles à compter de 2010 ainsi qu'une chute prononcée par la suite5. Toutefois, se dresser contre le « tsunami » qu'est la mondialisation est illusoire. Plutôt, il nous faut réagir au contexte dans lequel nous évoluons, s'y adapter, faire preuve de souplesse et trouver les meilleures voies qui s'ouvrent à nous pour l'avenir. Fort heureusement, les êtres humains font preuve de résilience et ont plusieurs cordes à leur arc.

Le secteur privé au Canada est dominé par les PME, dont 98 % possèdent moins de 100 employés. Même si les PME peuvent se montrer souples, réceptives et adaptables, elles ont généralement une capacité de réception limitée en vue d'absorber les avantages que procurent la R-D et sont dotées d'une capacité restreinte d'adaptation à la libéralisation rapide de l'économie. La réalité selon laquelle la composition économique du Canada repose sur les PME doit influencer la manière dont nous abordons le système d'innovation et la commercialisation technologique.

Chaînes d'approvisionnement mondiales

Les entreprises individuelles ne se livrent plus concurrence mutuellement. La concurrence s'opère maintenant au niveau des chaînes d'approvisionnement. Les chaînes d'approvisionnement mondiales constituent la force dominante des affaires aujourd'hui et il est primordial que les entreprises participent à une chaîne. Toutefois, il existe certains secteurs, tels que les aliments et les marchandises, où les chaînes d'approvisionnement fonctionnent comme un oligopole (soit un marché partagé par un faible nombre d'intervenants importants), ce qui impose des modalités commerciales difficiles à des fournisseurs de moindre envergure. La participation à de telles chaînes procure des avantages aux PME, qu'elles évoluent au sein du secteur de l'agroalimentaire, des aéronefs ou des automobiles. Toutefois, les PME doivent également composer avec une panoplie de problèmes, notamment les exigences liées à l'agrément, la protection de la propriété intellectuelle, le respect des exigences en matière d'interopérabilité des TI au sein de la chaîne, la menace qu'une chaîne d'approvisionnement importante réduise le nombre de fournisseurs, ainsi que l'internationalisation des chaînes d'approvisionnement qui, souvent, exige qu'une production locale soit établie partout où l'entreprise importante établit une production importante (p. ex., le secteur automobile). En outre, les clients d'envergure exigent le partage des risques quant à l'élaboration des produits, rejetant sur les PME de plus en plus de fonctions alors que celles-ci ne disposent pas nécessairement de capacités sur le plan de la R-D ou de l'élaboration de produits.

Grappes

L'une des réalités qui caractérisent une économie axée sur les PME est que l'écosystème nécessaire pour leur essor exige une forte concentration régionale ou axée sur des grappes; en effet les PME ne disposent habituellement pas d'activités distribuées géographiquement. Au cours de la période s'échelonnant entre 2005 et 2020, nous assisterons à une aller et venue des grappes. Certaines croîtront tandis que d'autres seront en déclin. Il sera difficile de choisir des « gagnants et perdants ». Ce que l'on sait, toutefois, c'est que les grappes attirent tant du personnel hautement qualifié (PHQ) que des capitaux et deviennent un moyen efficace d'assurer la durabilité d'un secteur industriel au fil du temps6. Par exemple, il existe une solide grappe dans le secteur automobile située dans le Sud de l'Ontario, qui fournit un bassin de main-d'oeuvre ainsi qu'un accès efficace aux marchés et aux capitaux. Même si toutes les entreprises ne seront pas « liées à une grappe », il existera une concentration croissante d'industries au sein de grappes.

Ce qui changera entre 2005 et 2020, c'est la nature régionale de ces grappes. Présentement, la perception est que l'avantage concurrentiel est lié aux facteurs régionaux, soit un accès local à la R-D ciblée, à un PHQ et à l'infrastructure connexe. Au fur et à mesure que la fabrication a davantage lieu en Inde, en Chine, au Mexique (processus que l'on appelle « impartition à l'étranger » ) et dans d'autres pays et que les connaissances atteignent les quatre coins du globe plus rapidement par l'entremise de technologies omniprésentes et sémantiques, les grappes auront une portée de plus en plus mondiale et formeront un réseau ou une « constellation » de centres de compétence mondiaux.

Productivité

La productivité façonnera la position concurrentielle des nations et une faible productivité engendrera des niveaux de vie inférieurs plus rapidement que par le passé. La productivité canadienne est en déclin et se classe présentement 13e au monde (un déclin par rapport à la deuxième place qu'occupait le Canada auparavant) selon l'OCDE (données de 2004), passant d'une croissance moyenne de 4 % par an au cours de la période comprise entre 1946 et 1973 à 1,4 % au cours de la période comprise entre 1973 et 2003.

Selon Statistique Canada, en 2004, les entreprises canadiennes ont affiché leur pire rendement pour ce qui est de la croissance de productivité de la main-d'oeuvre en huit ans. Le graphique ci-dessous (publié par Statistique Canada) compare les taux de croissance de la productivité entre les États-Unis et le Canada au cours de la période comprise entre 1991 et 2004. Alors que les États-Unis augmentent leur productivité, le Canada accuse de plus en plus de retard.

Aucun gain de productivité pour le Canada en 2004

 Graphique montrant l'absence de gains au niveau de la productivité au Canada en 2004

Source: Statistique Canada

Pour ce qui est de secteurs industriels choisis, le graphique suivant7 compare les gains et les pertes de productivité de la main-d'oeuvre8 pour les années 1997 et 2001. Il est à observer que les secteurs affichant une plus faible productivité sont ceux au sein desquels il existe une proportion plus importante d'entreprises de moindre envergure, lesquelles, en moyenne, consacrent aux investissements en R-D environ un tiers de ce que font les entreprises américaines comparables.

Niveau de productivité de la main-d'oeuvre au Canada (États-Unis = 100)
Graphique comparant les gains et les pertes en productivité de la main d'oeuvre au Canada de 1997 à 2001

Source: Statistique Canada

Productivité – secteur de la fabrication

La croissance de la productivité de la main-d'oeuvre au sein du secteur canadien de la fabrication, terrain de bataille par excellence pour la concurrence internationale féroce, a été considérablement moindre que celle des États-Unis depuis 1995, se situant aux alentours de 75 % de la productivité aux États-Unis9. De récentes estimations provenant du Conference Board du Canada évaluent l'écart de productivité entre le Canada et les États-Unis à 6 000 $US par Canadien en raison d'une plus faible productivité de la main-d'oeuvre et d'investissements moindres en R-D et en immobilisations qu'aux États-Unis. L'augmentation importante qu'a connue le dollar canadien dernièrement par rapport à la devise américaine s'est soldée par une érosion considérable de la position sur le plan des coûts des exportateurs canadiens, en général, et des fabricants, en particulier.

Le secteur américain de la fabrication se préoccupe également de sa place au sein de cette économie mondiale, compte tenu de la concurrence sans précédent à l'échelle mondiale pour les capitaux et les marchés. Comme les marchandises fabriquées constituent l'essentiel du commerce international, la concurrence est particulièrement forte. Pris dans leur ensemble, les effets de la technologie et de la mondialisation accélèrent les pressions concurrentielles poussant à la réduction des coûts et à l'augmentation de la productivité. L'innovation au niveau des produits, des processus et des services est devenue un facteur déterminant du succès10

Dans le cadre du défi lancé au sein de l'industrie canadienne, la « productivité » n'a pas suscité un intérêt très élevé. Les secteurs industriels examinés, à l'exception des industries de l'acier ou de la transformation, avaient plutôt tendance à percevoir des questions comme la compétitivité au niveau du coût, l'augmentation des coûts des intrants et la concurrence comme des préoccupations plus essentielles11. Il importe de souligner, toutefois, que cette perception de la productivité se rapporte à l'ensemble de l'industrie canadienne et que certaines industries constituent des concurrents efficaces et productifs. Par exemple, l'industrie automobile, les industries de métaux primaires, ainsi que l'industrie du bois et du papier obtiennent toutes un bon rendement tandis que les industries des ordinateura, des instruments et des textiles obtiennent un très faible rendement.

Le Centre d'étude des niveaux de vie a proposé six politiques afin d'améliorer la productivité au Canada, notamment les suivantes :

  1. la recherche d'un milieu macroéconomique qui accorde une forte priorité au plein emploi;
  2. la promotion de la diffusion de nouvelles technologies;
  3. la promotion de marchés concurrentiels, particulièrement dans le secteur du marché des produits;
  4. l'évolution de la main d'oeuvre se consacrant à des activités à faible productivité vers des activités à forte productivité;
  5. l'investissement dans l'enseignement postsecondaire;
  6. la réduction des heures de travail.

L'écosystème de l'innovation canadien

Il existe des preuves solides que l'expertise du Canada en sciences et en technologie est de premier ordre et productive12. Nous disposons également de régimes de crédits d'impôt efficaces et généreux, qui appuient l'innovation. Le milieu de la R-D canadien est actif, complexe mais non ciblé puisque nous ne disposons pas d'une stratégie claire et explicite en matière de sciences et de technologie. En outre, le Canada ne possède pas de pratiques en matière d'innovation qui permettent d'augmenter les investissements en R-D du secteur privé et qui appuient les flux de capitaux de risque. Par conséquent, les S-T du Canada sont fortement axées sur les conséquences publiques et sociales des investissements dans l'innovation. Cette situation peut ne pas convenir, compte tenu de la perspective à long terme de l'économie canadienne et de la compétitivité en déclin du pays.

Le Canada fait preuve d'une mauvaise coordination parmi les intervenants sur le plan de la politique en matière d'innovation, tant pour ce qui est des provinces que du gouvernement fédéral. La politique, la stratégie et l'exécution en matière d'innovation manquent d'orientations; il y a en effet trop d'intervenants à l'oeuvre qui suivent des plans et des politiques différentes et parfois contraires. Dans les économies axées sur l'innovation en croissance rapide (p. ex., la Finlande et le Japon), l'intégration, la convergence et l'orientation constituent les mots clés des mesures prises. Ces notions doivent devenir une réalité au Canada où, à présent certains progrès limités se réalisent lentement.

Le système d'innovation canadien fait également face au défi que représentent les pénuries de personnel hautement qualifié (PHQ) à tous les stades du processus d'innovation, ce qui a une incidence sur le progrès économique. Le Canada se classe 14e parmi les pays de l'OCDE pour ce qui est de la gestion (les activités et la stratégie de sociétés axées sur l'amélioration de l'entreprenariat et de la productivité); il dispose de moins de travailleurs en S-T que plusieurs autres économies évoluées; et il lui manque des gestionnaires de fonds de capitaux de risque chevronnés. Au nombre des autres difficultés, il y a l'obtention du financement providentiel, les coûts de l'obtention de l'accès aux marchés, la propriété intellectuelle, le climat et la culture commerciaux et la réglementation.

En raison de sa main-d'oeuvre vieillissante, des taux élevés de retraite prévus et du fait qu'il continue d'accuser un retard par rapport aux pays chefs de file de l'OCDE pour ce qui est des diplômes en sciences et en génie et en diplômés au niveau du doctorat (moins de 1 % des finissants à l'université se sont vu octroyer un diplôme de doctorat en 2000)13 , le Canada deviendra de plus en plus dépendant de l'immigration pour combler ses besoins en compétences spécialisées et alimenter la croissance de sa main-d'oeuvre à long terme14.
En conséquence, le fait d'attirer et de conserver des travailleurs scientifiques, techniques et en génie poseront un défi particulier puisque les possibilités sur le marché du travail qui s'offrent aux diplômés en sciences et en génie ne sont ni nombreuses ni variées, principalement en raison du faible niveau de capacité de recherche et d'innovation au sein du secteur privé canadien15. Le Canada sera tenu de se fier à des compétences étrangères qui proviendront vraisemblablement de la Chine, de l'Inde, du Pakistan, des Philippines et d'autres économies en transition (l'Inde et la Chine produisent actuellement un cinquième de l'approvisionnement mondial en diplômés de niveau doctoral en sciences et en génie). Même si les compétences étrangères peuvent pallier les pénuries en matière d'approvisionnement dans les pays de l'OCDE, y compris le Canada, il peut ne pas s'agir d'une solution de rechange permanente ou acceptable à un investissement national axé sur la main-d'oeuvre en sciences et en technologie.

En résumé, nous pouvons affirmer que, à moins de changements considérables et systémiques apportés aux pratiques en matière d'innovation du Canada, le rythme et le contenu de l'innovation économique au Canada poseront problème. En particulier, il nous faut réagir à une culture en matière d'innovation pour l'an 2020 dotée des caractéristiques suivantes :

  • des conditions commerciales et économiques difficiles, caractérisées par de fortes tensions entre nations commerçantes importantes en émergence et nations traditionnelles;
  • de nouvelles innovations en matière de produits, qui transforment considérablement des industries et des services publics d'envergure, lesquelles nécessitent des organisations souples, s'adaptant facilement et dotées de compétences solides et efficaces en matière de direction et de gestion;
  • des ressources limitées en matière de capitaux de risque, qui subissent les contraintes imposées par les exigences de systèmes sociaux clés, notamment les soins de santé, la durabilité environnementale et les transports;
  • une rude lutte permanente pour les compétences, qui transformera la nature des pratiques en matière de travail et de retraite, ce qui mènera à une forte dépendance à l'égard de l'immigration;
  • de nouveaux genres de grappes innovatrices, lesquelles ont recours à des réseaux mondiaux et à une technologie répandue afin de s'assurer un avantage concurrentiel et de gérer des chaînes d'approvisionnement efficaces à l'échelle internationale;
  • des régimes réglementaires lents et en mode de « rattrapage »;
  • une préoccupation culturelle au sujet de l'équilibre entre l'innovation sociale et économique, en raison des problèmes croissants associés au climat, à la durabilité environnementale et à la vulnérabilité économique. Des pressions politiques s'exerceront en vue d'augmenter le financement social pour l'innovation tout en assurant un rendement économique.

Previous | Next


1 - Long Term Global Challenges for Europe, publié en mars 2005  http://www.hm-treasury.gov.uk/documents/...  (disponible en anglais seulement)

2 - Mapping the Global Future, Report of the National Intelligence Council's 2020 Project, http://www.foia.cia.gov/2020/2020.pdf  (disponible en anglais seulement)

3 - The World is Flat, Thomas Friedman, 2005

4 - Estimations de Goldman Sachs. Voir : Crane, D (2005) Canada in a Shifting World. Foreign Affairs Canada.

5 - Farrell, D., Ghai, S. and Shavers, T. (2005), The Demographic Deficit – How Aging will Reduce Global Wealth. McKinsey Quarterly, 8 avril 2005.

6 - Solvell, O., Lindqvist, G. et Ketels, C (2003), The Cluster Initiative Greenbook (polycopie).

7 - Statistique Canada

8 - Statistique Canada définit la productivité de la main-d'oeuvre comme les extrants, mesurés en PIB réel par heure travaillée.

9 - Voir : Andrew Sharpe The Canada-US Manufacturing Productivity Gap – An Overview, Centre d'étude des niveaux de vie (polycolie).

10 - Manufacturing in America : A comprehensive Strategy to Address the Challanges to US Manufacturers, Département américain du commerce, janvier 2004

11 - 2020: Façonner notre avenir, Manufacturiers et exportateurs du Canada, 2004

12 - En fonction d'évaluations de la productivité de la recherche menées par l'OCDE.

13 - Developing Highly Skilled Workers: Review of Canada, Rapport de l'OCDE, 2004

14 - ibid.

15 - ibid.


Date de publication : 2005-09-16
Haut de la page