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Comité consultatif canadien de la biotechnologie
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Propriété intellectuelle en biotechnologie et la brevetabilité des formes de vie supérieures - Document de consultation

Table des matières

Introduction et objectif

Contexte éthique

Aperçu
Définitions
Biotechnologie
Brevets
Enjeux de la consultation
Introduction
1. Qu'est-ce qui devrait ou ne devrait pas faire l'objet d'un brevet?
2. Quels mécanismes de régie pourraient être changés?
3. Considérations sociales et éthiques
4. Obligations et compétitivité à l'échelle internationale

Annexe 1 - Glossaire

Annexe 2 - Rapports de recherche

Annexe 3 - Aperçu du projet du CCCB sur la propriété intellectuelle en biotechnologie et sur la brevetabilité des formes de vie supérieures

Annexe 4 - Questionnaire
Partie 1 - Questions particulières
Partie 2 - Autres commentaires


Introduction et objectif

Le Comité consultatif canadien de la biotechnologie (CCCB) est un groupe consultatif indépendant composé de spécialistes et créé dans le but d’aider le gouvernement du Canada à formuler ses politiques stratégiques sur toute une gamme de sujets liés à la biotechnologie. Le CCCB adresse ses conseils au Comité de coordination ministérielle de la biotechnologie (CCMB), lequel est composé des ministres fédéraux de l’Industrie; de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire; de la Santé; de l’Environnement; des Pêches et des Océans; des Ressources naturelles; et du Commerce international.

Les membres du CCCB regroupent des compétences spécialisées dans des domaines aussi divers que les sciences, les affaires, la nutrition, le droit, l’environnement, la philosophie, l’éthique et la défense de l’intérêt public. Ils servent à titre bénévole et à temps partiel. Le Plan de programme 2000 du CCCB publié en février 2000 décrit en détail l’organisation et le mode de fonctionnement du Comité ainsi que son programme d’activités. Publié en février 2001, le premier rapport annuel du CCCB explique plus précisément l’origine et les travaux du CCCB, son rôle permanent de surveillance et de conseil, et les avis qu’il a déjà remis au gouvernement; il ouvre également des perspectives plus vastes sur les progrès réalisés jusqu’à maintenant en biotechnologie. Pour consulter ou obtenir un exemplaire de ces documents, consulter le site Web du CCCB, à www.cbac-cccb.ca. Ces documents peuvent également être obtenus en composant sans frais le 1 866 748-CCCB (2222).

Le CCCB élabore à l’heure actuelle des conseils pour le gouvernement sur la Propriété intellectuelle en biotechnologie et le brevetabilite des formes de vie supérieures. Il aimerait connaître les points de vue des Canadiens à ce sujet, afin de pouvoir en tenir compte lorsqu’il élaborera ses conseils. Le présent document de consultation est un important outil qui lui permettra d’obtenir ces commentaires. Il décrit quatre enjeux clés et pose des questions précises afin de recueillir le point de vue des personnes interrogées. On retrouve ces questions et un espace réservé aux commentaires généraux à l’annexe 4.

Pour aider à diffuser le présent document de consultation, le CCCB fait appel à un réseau d’organismes qui représentent les producteurs, les groupes environnementaux, les consommateurs, les spécialistes de la santé, l’industrie et divers regroupements de citoyens. Le présent document vise avant tout les groupes et les personnes qui ont une certaine connaissance de la propriété intellectuelle en biologie et du brevetage au Canada des formes de vie supérieures et de ses processus, et qui s’y intéressent. Tous les Canadiens qui souhaitent faire part de leur opinion au CCCB peuvent exprimer leur point de vue. Vous pouvez répondre à une ou à plusieurs questions, ou à toutes; les commentaires peuvent être envoyés par une seule personne, par un petit groupe ou au nom d’une entreprise ou d’une association.

Les réponses peuvent être acheminées par voie électronique à l’aide d’un questionnaire en ligne au site http://www.cbac-cccb.gc.ca/IPConsult_fr.htm, ou sur papier, en remplissant le questionnaire qui figure à l’annexe 4 du présent document. Dans ce cas, le questionnaire rempli pourra être transmis par télécopieur, au (613) 946-2847, ou par la poste à l’adresse suivante :

Consultations sur la propriété intellectuelle en biologie et la brevetabilité des formes de vie supérieures Comité consultatif canadien de la biotechnologie
5e étage, bureau 570E
240, rue Sparks
Ottawa ON K1A 0H5

Si vous voulez que vos commentaires arrivent en temps opportun pour être pris en compte, veuillez faire parvenir votre questionnaire dûment rempli au CCCB, au plus tard le lundi 14 mai 2001.

Le processus menant au rapport final à l’intention du gouvernement se déroulera comme suit :

  • En plus des commentaires suscités par le présent document, qu’ils soient reçus par la poste, par téléphone ou par l’entremise du site Web, le CCCB recueille aussi les opinions des Canadiens à l’occasion de tables rondes réunissant des intervenants qui représentent des groupes d’intérêts divers. Les résultats des débats de chaque table ronde ainsi qu’un rapport sommaire de toutes les idées parvenues au CCCB seront mis à la disposition du public, qui pourra les commenter, au site Web du CCCB.

  • Se basant sur les renseignements reçus et sur les rapports de recherche, les études commandées et les derniers sondages d’opinion publique, le CCCB élaborera un rapport destiné au gouvernement, dans lequel le Comité précisera les enjeux, les options et les conséquences, et formulera ses recommandations. Le rapport sera rendu public durant l’été 2001 et les intéressés pourront également l’obtenir sur le site Web du CCCB ou en appelant la ligne téléphonique sans frais du Comité. Le CCCB recueillera des commentaires pendant trois mois après la diffusion du rapport et il les étudiera ensuite afin de déterminer s’il est nécessaire de raffiner ses conseils.

Il convient aussi de souligner que le CCCB tient actuellement des consultations sur la réglementation des aliments génétiquement modifiés. Pour en savoir plus et obtenir de la documentation à ce sujet, s’adresser au CCCB ou consulter son site Web. De plus, à l’automne 2001, le CCCB lancera une initiative de participation des citoyens, laquelle touchera un bon nombre des questions relatives à la propriété intellectuelle en biotechnologie.

Les renseignements concernant les activités du CCCB sont toujours accessibles par l’entremise du site Web et de la ligne téléphonique sans frais du Comité.

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Contexte éthique

Les jugements d’éthique ne sont pas des jugements « autonomes », mais plutôt « toute réflexion faite ». Ce sont des jugements intégrateurs qui tiennent compte de facteurs économiques, politiques, juridiques, scientifiques et autres. À cet égard, l’éthique n’est pas un facteur parmi tant d’autres, mais elle fonde un jugement qui tient compte de tous les facteurs pertinents1. La tâche du CCCB, au moment d’élaborer des recommandations sur la biotechnologie, est d’intégrer ces divers facteurs afin d’en arriver à l’ensemble de recommandations qui sert le mieux l’intérêt public et le bien commun.

Le CCCB voit l’intérêt public comme le critère d’importance absolue pour l’élaboration de bonnes politiques et de bons programmes gouvernementaux. Ce critère englobe, par exemple, la santé et la qualité de vie des citoyens du Canada, la santé de l’environnement, la prospérité de l’économie canadienne, le partage équitable des avantages et des fardeaux, ainsi que la pérennité et la paix de la collectivité mondiale. La primauté de l’intérêt public demande une régie judicieuse, laquelle doit s’appuyer sur l’intégrité et la transparence du fonctionnement, l’indépendance à l’égard de toute influence indue, l’ouverture aux points de vue des Canadiens, la réceptivité aux craintes exprimées par la population et l’intégration réelle de la diversité des intérêts et des priorités de la population canadienne.

Le CCCB a désigné les principes présentés dans le tableau 1 comme le fondement éthique de ses consultations publiques et de son dialogue avec la population canadienne. Il sera heureux de recevoir vos commentaires sur la pertinence de ces principes dans le cadre du dialogue sur les questions d’orientation en matière de propriété intellectuelle en biotechnologie et de brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus connexes.


Tableau 1

Justice L’engagement à veiller à la répartition équitable des avantages et des fardeaux et à faire en sorte que les politiques et les pratiques ne contribuent pas à l’oppression des groupes vulnérables.

Responsabilité
L’engagement à faire preuve de transparence et à être responsable.

Autonomie
L’engagement à promouvoir le choix éclairé et à mettre en place les conditions nécessaires pour permettre aux Canadiens de rester fidèles à leurs valeurs et leurs choix fondamentaux.

Bienfaisance
L’engagement à rechercher le bien des Canadiens et des citoyens du monde entier.

Respect de la diversité
L’engagement à garantir le respect des divers modes et formes de vie.

Connaissance
L’engagement à valoriser à la fois les connaissances scientifiques et les connaissances traditionnelles.

Prudence
L’engagement à faire preuve de prudence lorsque les connaissances sont encore incomplètes.


Au fur et à mesure qu’elle se développe et est peaufinée, l’éthique servira de base d’analyse pour étudier les projets d’orientation stratégique reliée à la biotechnologie.

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Aperçu

Tout débat sur la propriété intellectuelle et la brevetabilité des formes de vie supérieures, et sur les processus en cause, est nécessairement complexe. S’il en est ainsi, c’est dû en partie non seulement au caractère technique de la biotechnologie actuelle, mais aussi aux façons diverses et nombreuses dont les gens perçoivent la propriété intellectuelle et les formes de vie supérieures. Du point de vue juridique, par exemple, il n’y a aucune différence fondamentale entre breveter une forme de vie et n’importe quel autre objet. Si une forme de vie est une invention (selon la définition de la Loi sur les brevets) et qu’elle est déclarée telle, elle est brevetable. Du point de vue de quiconque s’intéresse aux droits de la personne, la question essentielle pourra être celle de l’état de la forme de vie à breveter. Autrement dit, si cette forme de vie a des droits qu’il faut respecter, nous devons agir de sorte qu’ils le soient. Par contre, du point de vue de l’écologiste, la question du brevetage d’une forme de vie, quelle qu’elle soit, pourra être reliée aux répercussions du processus de brevetage et à celles du brevetage en question sur l’environnement.

Tous ces points de vue sont légitimes, mais ils rendent complexe toute discussion des enjeux abordés dans le présent le Document de consultation. Le CCCB s’est efforcé, autant que faire se peut, de décrire les façons d’envisager les enjeux.

Définitions

Voici les définitions de certains termes essentiels dans le contexte du document de consultation :

Biotechnologie — La biotechnologie se définit de diverses façons selon le contexte d’utilisation du terme. Le CCCB définit la biotechnologie comme un ensemble de connaissances techniques concernant les organismes vivants ou leurs parties constituantes et définit la biotechnologie appliquée comme étant l’ensemble des volets de la biotechnologie qui servent à faire des produits et qui sous-tendent des processus qui servent à des fins sociales, scientifiques ou économiques. La Loi canadienne sur la protection de l’environnement définit la biotechnologie comme étant l’« application des sciences ou de l’ingénierie à l’utilisation directe ou indirecte des organismes vivants ou de leurs parties ou produits, sous leur forme naturelle ou modifiée ».

Brevet — Un brevet est un droit d’empêcher toute autre personne de faire, construire, utiliser ou vendre une invention pendant une période de 20 ans à compter de la date du premier dépôt de la demande2. Le fait de détenir un brevet ne permet pas à son détenteur de se servir de l’invention; celui-ci ne peut le faire qu’en l’absence de conflit avec des droits de propriété ou des lois ou règlements empêchant qu’on utilise l’invention. Le brevet permet à son détenteur de céder à un tiers un intérêt partiel ou entier dans l’invention. Les brevets sont conférés pays par pays. Au Canada, ils le sont en vertu de la Loi sur les brevets.

Forme de vie supérieure — La Loi ne reconnaît pas de sens technique à l’expression « forme de vie supérieure ». En langage courant, cette appellation recouvre les végétaux et les animaux3 à l’exception des organismes unicellulaires. Dans le cours de ses délibérations au sujet de la propriété intellectuelle en biotechnologie, le CCCB inclut dans l’expression « forme de vie supérieure » les végétaux et animaux entiers, y compris les primates non humains, et les composants d’un végétal ou d’un animal (organes, tissus, cellules et matériel génétique)4. En raison de la vaste portée de cette définition, il faut presque toujours préciser, selon le thème de la discussion, de laquelle de ces formes il s’agit.

Biotechnologie

L’élaboration d’une politique solide en matière d’utilisation de la biotechnologie relève du défi car la biotechnologie touche à de nombreux domaines d’intérêt public. Et le rythme de plus en plus effréné des découvertes scientifiques donne davantage d’ampleur à ce défi.


Tableau 2

L’industrie canadienne de la biotechnologie

L’industrie canadienne de la biotechnologie comprend quelque 360 entreprises, dont le quart sont inscrites à la bourse. Elle emploie près de 10 000 personnes (et comprend quelque 2 000 postes en attente de candidats qualifiés) et génère des ventes de 1,9 milliard de dollars, dont 40 p. 100 à l’exportation. La plupart des entreprises sont de petite ou moyenne taille, 72 p. 100 d’entre elles employant moins de 50 personnes, 15 p. 100, de 51 à 150 et 13 p. 100, plus de 150. C’est au Québec que se trouve le plus grand nombre d’entreprises de biotechnologie; l’Ontario et la Colombie-Britannique suivent.

Près de 95 p. 100 de ces entreprises font de la recherche en biotechnologie. Leurs dépenses en R-D atteignent les 800 millions de dollars, dont 90 p. 100 sont effectuées dans le domaine de la santé. Plus de la moitié des entreprises utilisent des processus de pointe, dont les technologies à base d’ADN, la bio-informatique, la génomique et la modélisation moléculaire. Près de 10 p. 100 du budget fédéral en matière de recherche est consacré à la biotechnologie. En 1997-1998, le gouvernement fédéral a alloué 314 millions de dollars à la R-D en biotechnologie.

Source: BioteCanada’s Report on the
Road to Success, 2000.


De nombreuses applications de la biotechnologie annoncent d’importantes retombées économiques et sociales dans les domaines de la santé, de l’agriculture, de l’environnement et de l’industrie. Cependant, certaines d’entre elles peuvent poser des risques pour la santé ou l’environnement, ou mettre à l’épreuve les mesures actuelles touchant la protection de la santé ou de l’environnement. Plusieurs applications de la biotechnologie soulèvent de graves questions sociales et éthiques.

L’industrie de la biotechnologie affiche un taux de croissance parmi les plus rapides au monde et la demande mondiale, qui était de 20 milliards de dollars en 1995, devrait plus que doubler pour s’établir à 50 milliards d’ici 20055. Le Canada est en train de devenir un pilier de cette croissance.

Tant au Canada qu’à l’échelle planétaire, c’est dans le domaine de la santé que la biotechnologie a les retombées les plus marquées. Plus de 90 p. 100 des produits de la biotechnologie de pointe sur le marché touchent à la santé. On s’attend à ce que les trois quarts environ de la demande mondiale en biotechnologie continuent d’y être reliée.

La biotechnologie est un domaine très dynamique où des percées voient le jour à un rythme sans cesse croissant. À mesure que se multiplient les applications des innovations en biotechnologie, les brevets revêtiront davantage d’importance pour réussir à tirer parti des avantages de la biotechnologie.

Brevets

Quand la recherche en biotechnologie permet de concevoir un produit ou processus particulier, les chercheurs et/ou les commanditaires tentent souvent d’obtenir des droits de propriété intellectuelle pour protéger l’invention. Quoique tout dépende du type d’invention, le brevet est souvent ce que l’on recherche pour protéger la propriété intellectuelle d’une invention en biotechnologie. Cependant, il y a aussi d’autres formes de protection, soit le droit d’auteur, la marque de commerce, le secret commercial et le certificat d’obtention végétale. Le brevet accorde aux chercheurs (ou à leurs employés) le droit d’empêcher quiconque de fabriquer, utiliser ou exploiter commercialement l’invention en question au Canada pendant une période de 20 ans. Par convention internationale, la personne ou l’entreprise qui dépose une demande de brevet au Canada peut aussi présenter la même demande dans d’autres pays.

Le Canada et ses principaux partenaires commerciaux respectent les conventions internationales sur l’émission de brevets. Quoique chaque pays applique les règlements de façon légèrement différente, les fondements de la protection qu’accorde le brevet demeurent relativement constants partout dans le monde industrialisé. Le Canada accorde des brevets sur des inventions en échange du dévoilement public de la recherche et des données de ces inventions. Pour les fins de la Loi sur les brevets (qui contient ses propres définitions pouvant ou non concorder avec le langage courant), une invention est un produit ou processus qui est nouveau, non évident et utile. Une invention est nouvelle si elle n’a pas été rendue publique avant la date du dépôt de la demande de brevet (sujette à une période de grâce dans certains pays6). Elle est non évidente si elle n’est pas apparente (sans l’aide des renseignements dévoilés dans la demande de brevet) à une personne versée dans l’art ou la science auquel l’invention a rapport. Une invention est utile si elle présente une application industrielle réaliste et substantielle.

La raison traditionnelle donnée pour accorder un brevet à une invention repose sur le fait qu’il apporte un encouragement à ceux qui travaillent en R-D. Le brevet donne à l’inventeur la possibilité d’exploiter son invention commercialement pendant 20 ans à compter du dépôt de la demande de brevet. Cela permet aux créateurs et inventeurs de récolter le fruit de leurs efforts, de recouvrer leur investissement et de réaliser un profit. On estime également que les chercheurs de talent, étant au courant de ces avantages, seront plus enclins à investir temps et argent dans de nouvelles inventions. La demande agréée de brevet doit comprendre, entre autres, de l’information sur la nature et l’utilisation de l’invention. Au Canada, ces renseignements tombent dans le domaine public 18 mois après le dépôt de la demande. Même avant la fin de la période de 20 ans, le public (y compris d’autres chercheurs) peut se servir de l’information ainsi divulguée pour entreprendre d’autres recherches et faire d’autres découvertes.

Les tests de nouveauté, de non-évidence et d’utilité s’appliquent à toute invention, qu’il s’agisse d’une nouvelle trappe à souris, d’un segment d’ADN ou du plus récent dispositif électronique. Malgré la grande diversité de choses qui peuvent être brevetées, il existe certaines exclusions statutaires, dont les règles mathématiques abstraites et les théorèmes scientifiques. Les tribunaux se sont également prononcés sur d’autres exclusions à la brevetabilité, certaines desquelles sont l’objet d’une discussion dans le présent document.

L’une des exclusions reliées aux inventions en biotechnologie porte sur « les matières telles qu’elles existent dans la nature ». Par exemple, il n’est pas possible de faire breveter un gène, une protéine, une cellule ou toute autre matière organique telle qu’il existe dans la nature. Cependant, cela n’empêche pas d’obtenir un brevet sur les produits issus de l’innovation biotechnologie, car la biotechnologie ne se limite pas à expliquer comment les choses fonctionnent dans la nature, elle cherche à exploiter le potentiel des matières biologiques pour faire quelque chose de nouveau. Par conséquent, les chercheurs sortent certaines matières biologiques de leur contexte naturel pour les amener à faire quelque chose de commercialement utile. Dès que le chercheur sort une matière de son milieu naturel, celle-ci pourrait faire l’objet de brevets si elle est nouvelle, non évidente et utile.

Au Canada, les tribunaux se penchent sur la brevetabilité des animaux entiers. Présentement, ils se demandent si les animaux sont inclus dans la définition d’invention brevetable. La Division d’appel de la Cour fédérale du Canada a établi en août 2000 qu’une souris qui avait été génétiquement modifiée par l’université Harvard (la « carcinosouris ») était brevetable au Canada. Le gouvernement a sollicité la permission d’en appeler de cette décision auprès de la Cour suprême du Canada. Si la Cour suprême du Canada tranche cette question, on pourra peut-être mieux saisir les paramètres de brevetabilité des formes de vie supérieures au Canada. Le gouvernement maintient que la Loi sur les brevets en vigueur ne permet pas de breveter des animaux entiers.

L’industrie de la biotechnologie examine présentement divers mécanismes qui permettraient soit d’étoffer soit de remplacer le brevet comme moyen privilégié pour se hisser en tête du peloton technologique dans des marchés spécifiques. Ces avenues comprennent tant des moyens technologiques qui empêchent la reproduction que l’utilisation de technologies de contrôle et la signature d’ententes contractuelles qui permettraient à l’industrie de contrôler l’utilisation faite de la technologie. Tout comme dans le cas des brevets, chacune de ces avenues soulève d’importantes questions socio-économiques et éthiques qu’il faudra examiner.

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Enjeux de la consultation

Introduction

Plusieurs facteurs se sont conjugués au cours des dernières années pour pousser le CCCB à cibler la propriété intellectuelle en biotechnologie et la brevetabilité des formes de vie supérieures comme question prioritaire devant faire l’objet de consultations. L’un des facteurs déterminants découle du fait qu’il n’existe présentement pas de consensus international sur la brevetabilité des formes de vie supérieures et les processus y étant reliés7. Les pays poursuivent leur examen de la portée et la nature du brevetage des formes de vie supérieures dans le cadre de l’entente de l’Organisation mondiale du commerce sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) dont le Canada est signataire. Pour faciliter cet examen, le Canada doit se doter d’une position cohérente et mûrement réfléchie qui tienne compte des points de vue des Canadiens.

L’objectif des présentes consultations du CCCB est de recueillir les points de vue des parties intéressées et du public sur les brevets et la biotechnologie, et d’utiliser ces opinions comme élément essentiel sous-tendant les conseils que le CCCB présentera au gouvernement du Canada. Ces conseils porteront sur deux grands domaines :

  • les initiatives pour accroître la capacité des Canadiens de protéger et d’exploiter les droits de propriété intellectuelle touchant à la biotechnologie d’une façon qui demeurerait socialement responsable;
  • la question de savoirsi toutes les formes de vie supérieures devraient ou non être brevetables au Canada.

Les questions entourant la brevetabilité de matériel biologique en général et les formes de vie supérieures et les processus connexes en particulier sont fort complexes. Afin de bien structurer les discussions, le CCCB a commandé des études (voir l’annexe 2) sur divers sujets touchant aux droits de la propriété intellectuelle applicables aux matières biologiques. Il a également organisé à l’automne 2000 et au début de 2001 des discussions préliminaires avec des représentants de l’industrie de la biotechnologie, des organismes non gouvernementaux et le milieu de la recherche pour cibler les domaines d’intérêt en vue de consultations élargies qui auront lieu au printemps 2001.

Ces consultations élargies comprendront deux volets. L’un portera sur des discussions en table ronde avec des intervenants à Halifax, Montréal, Toronto, Vancouver et Saskatoon à la fin d’avril et en mai 2001. L’autre vise l’apport du public. Jusqu’au 14 mai 2001, ce dernier est invité à présenter des points de vue sur les questions décrites ci-dessous ou d’autres sujets pertinents. Ces soumissions pourront être faites par téléphone, télécopieur, courrier ou courriel selon les indications présentées au début du présent document.

À cet effet, le CCCB a réparti la discussion en quatre thèmes qui couvrent une grande diversité de sujets et de politiques dans le domaine des brevets accordés en biotechnologie. Ces thèmes sont : Qu’est-ce qui devrait ou ne devrait pas faire l’objet d’un brevet?; Quels mécanismes de régie pourraient être changés?; Considérations sociales et éthiques; Obligations et compétitivité à l’échelle internationale. Ces éléments définissent le cadre des discussions sur les choix de valeurs fondamentales en jeu dans le domaine de la biotechnologie et des droits de la propriété intellectuelle, par le truchement de l’examen des avantages et risques relatifs que présentent divers instruments de politique, ainsi que de la formulation de recommandations dans le contexte de ces choix et instruments, et de la proposition d’une démarche à adopter par le Canada à l’égard de ses obligations internationales et du besoin de demeurer compétitif à l’échelle mondiale.

Qu'est-ce qui devrait ou ne devrait pas faire l'objet d'un brevet?

Points de discussion portant sur les exclusions spécifiques et générales de la Loi sur les brevets

Dans le cadre de l’élaboration de sa politique sur la brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus y étant reliés, le Canada doit déterminer à la fois les types de formes de vie supérieures et les processus y étant reliés, s’il en est, qui devraient être sujets à protection par brevet et la mesure dans laquelle le détenteur d’un tel brevet pourra empêcher d’autres personnes de se servir de son invention. Le premier ensemble de questions cherche à déterminer si les formes de vie supérieures et les processus y étant reliés devraient ou non être brevetables et, si oui, s’il devrait y avoir des exceptions à cette règle. Le deuxième ensemble touche à l’utilisation du brevet par des individus autres que son détenteur, sans violation du brevet. Ce sujet est examiné ci-après dans la section intitulée « Utilisation expérimentale ».

La première décision que le Canada doit prendre est de déterminer quelles formes de vie supérieures et quels processus y étant reliés, s’il en est, peuvent être brevetés et lesquels seront exclus en vertu de la Loi sur les brevets. Le Canada doit également décider d’opter soit pour des exclusions spécifiques (c.-à-d., des exclusions visant des matières spécifiques, par exemple des tissus et organes humains, et des processus spécifiques dont ceux servant à modifier l’identité génétique d’animaux qui pourraient leur causer du tort sans qu’il n’y ait de retombées médicales), soit pour des exclusions plus générales qui s’appliqueraient au cas par cas. Les exclusions générales pourraient comprendre une disposition générale d’ « ordre public et de moralité »8 ou l’exclusion plus circonscrite d’inventions qui menacent l’environnement ou la santé humaine, animale ou végétale. Quelle que soit la décision du Canada au sujet de la brevetabilité des formes de vie supérieures, il est généralement accepté que les êtres humains ne puissent ni ne devraient être brevetés. S’il en est ainsi, c’est que les scientifiques ne croient pas que les humains possèdent les qualités nécessaires pour satisfaire aux critères de brevetabilité. Les chercheurs craignent aussi que l’exercice des droits d’un brevet sur un être humain entier ne viole vraisemblablement les droits de la personne.

Si les exclusions spécifiques ont l’avantage d’un plus grand degré de certitude, elles devront être élaborées soigneusement pour éviter qu’en découlent des questions d’interprétation9. Une exclusion générale fondée sur l’ordre public ou la moralité offre plus de flexibilité, mais également moins de certitude. Elle laisserait davantage de latitude au Bureau des brevets et aux tribunaux pour décider de l’application de l’exclusion, et d’aucuns se demandent si de telles décisions doivent relever des fonctionnaires de ce bureau. Selon l’interprétation qu’on en donne, une exception d’ordre public pourrait s’avérer adéquate, mais il faudrait qu’elle soit soigneusement rédigée pour s’assurer que toutes les préoccupations pertinentes sont bien couvertes. Peut-être serait-il préférable que cette détermination ne soit pas trop précise et de se rabattre sur le cas par cas. Cependant, les exclusions générales fondées sur la moralité, sans autre élaboration, n’offrent guère de limpidité ou de certitude. Il reste également à décider si l’interprétation de l’exclusion doit se faire par un organisme autre que le Bureau des brevets.

Le Canada pourrait songer à exclure la brevetabilité de certaines formes de vie supérieures ou des processus y étant reliés par crainte de voir la prolifération des droits conférés par des brevets décourager plutôt que faciliter les recherches menant à des inventions. Certains auteurs ont appelé ce phénomène l’effet « anti-bien public ». L’industrie canadienne de la génétique du bétail pourrait être un secteur que gênerait la prolifération des brevets, car elle est plutôt petite et il y règne présentement un esprit de coopération. Une étude du CCCB a conclu que d’agir ainsi lui imposerait une entrave certaine quant à l’accès à des innovations protégées par des droits de propriété intellectuelle. Il s’ensuivrait peut-être que le Canada perdrait du terrain au profit des grandes multinationales disposant des ressources voulues pour se donner accès à ces innovations.

Pendant le processus d’élaboration des exclusions, il faudra tenir compte des lois commerciales internationales pertinentes. Le Canada a signé l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) et est membre de l’Organisation mondiale du commerce et est sujet aux dispositions de l’ADPIC. Ces accords exigent des États membres qu’ils accordent la protection par brevet à toute invention nouvelle, non évidente et utile sans égard à son lieu d’invention, au domaine technologique et au fait que les produits soient importés ou d’origine locale. Étant donné que l’ADPIC interdit aux États membres d’imposer des conditions additionnelles importantes quant à la brevetabilité, exception faite de la nouveauté, de la non-évidence et de l’utilité (ce que l’ADPIC désigne comme l’applicabilité industrielle), le Canada ne pourrait agir ainsi sans déroger à ses obligations internationales. De plus, comme l’ADPIC exige que tous les domaines technologiques soient traités sur un pied d’égalité devant la loi, aucune exception à la Loi sur les brevets canadienne ne permet d’exclure tout le domaine de la biotechnologie. Cependant, l’ALENA et l’ADPIC permettent aux États membres d’exclure certaines inventions de l’accès au brevet (par exemple, afin de protéger l’ordre public ou la moralité). Les États membres peuvent également exclure des procédures médicales, des animaux ou plantes autres que des micro-organismes, ainsi que des processus essentiellement biologiques touchant à la production de plantes et d’animaux, en autant qu’ils offrent une certaine forme de protection de la propriété intellectuelle dans le cas de variétés. La législation canadienne actuelle en matière de protection des obtentions végétales comprend un système sui generis de protection des variétés conforme à cette exigence.

D’autre part, étant donné que le Canada dépend beaucoup des échanges commerciaux et que les politiques relatives à la propriété intellectuelle et au commerce sont de plus en plus interreliées, le Canada voudra peut-être, lors du processus de détermination des exceptions à la Loi sur les brevets, étudier les options choisies par ses principaux partenaires commerciaux qui exportent et importent des produits de biotechnologie.

Questions:

  1. Le Canada devrait-il permettre le brevetage des formes de vie supérieures? Si oui, existe-t-il des formes de vie supérieures ou des processus y étant reliés que ne devraient pas être brevetables? Pour quels motifs?

Avez-vous d’autres commentaires à ce sujet?

Points de discussion portant sur les exclusions et défenses : méthodes de traitement médical et utilisation expérimentale ou à des fins de recherche

Méthodes de traitement médical — Quoique le Canada ne délivre pas de brevet pour les méthodes chirurgicales ou thérapeutiques visant le traitement de conditions médicales, par exemple une maladie, il accepte de breveter des méthodes de diagnostic touchant à des conditions humaines ou animales, par exemple le vieillissement. La Cour suprême a établi que les méthodes chirurgicales ou thérapeutiques de traitement médical ne peuvent être brevetées parce que ces types de traitements curatifs n’ont pas d’applicabilité industrielle, donc ne satisfont pas à la norme traditionnelle d’utilité d’une invention. Cependant, les méthodes de diagnostic et tout processus n’impliquant pas de traitement comme tel du corps d’un humain ou d’un animal ne sont pas des « méthodes de traitement médical » au sens strict de l’expression et peuvent donc être brevetés. Les nouvelles utilisations thérapeutiques de composés existants sont également brevetables, quoique ces nouvelles utilisations puissent être perçues comme étant essentiellement de nouvelles « méthodes de traitement médical », de même que des objets ou appareils servant à traiter des humains ou des animaux.

Il s’avère compliqué de ne pas considérer des traitements médicaux traditionnels comme des innovations technologiques. Certaines inventions récentes, comme la thérapie génique, ont des caractéristiques qui font en sorte que l’exclusion peut ou ne peut pas s’appliquer. Ainsi, certains éléments de la thérapie génique seraient brevetables (par exemple, les éléments manipulés en 10 dehors du corps), tandis que d’autres pourraient entraîner l’exclusion (par exemple, l’injection dans le corps d’un gène modifié). Il serait donc logique de redéfinir ou préciser le concept d’exclusion se rattachant au traitement médical. Un autre volet de cette exclusion touche au choix entre son explicitation dans la loi, le cas par exemple de la Convention sur le brevet européen, et le recours à l’interprétation judiciaire, le cas au Canada présentement.

Utilisation expérimentale — Le Canada doit décider des circonstances, s’il en est, sous lesquelles quelqu’un pourrait utiliser une forme de vie supérieure brevetée sans enfreindre les droits que confère le brevet. La défense basée sur l’utilisation à des fins expérimentales, ou l’exclusion, a d’abord été présentée devant des tribunaux canadiens pour tenter de répondre à cette question. Il s’agit de rechercher un équilibre entre l’intérêt qu’ont les détenteurs de brevets de commercialiser leurs inventions et les intérêts de la société dans son ensemble d’encourager d’autres recherches. Grosso modo, ce genre de défense permet à des gens autres que le détenteur du brevet de se servir d’une invention brevetée à des fins non commerciales, habituellement de la recherche, ou de s’en servir pour déterminer si l’invention donne les résultats décrits dans le brevet, sans pour autant enfreindre les droits accordés par le brevet. Cependant, l’envergure de la défense basée sur l’utilisation expérimentale n’a pas encore été entièrement cernée. Elle a bien servi en tant que défense contre des poursuites pour empiètement sur des brevets, mais elle ne donne aucun résultat quand des intérêts commerciaux sous-tendent la recherche. Comme la recherche en biotechnologie vise souvent le développement d’un produit commercialement viable, la défense basée sur l’utilisation expérimentale en matière de biotechnologie demeure floue. La portée de cette défense est particulièrement importante dans le cas du brevetage de plantes ou animaux entiers. Étant donné que les cultures et les animaux reproducteurs génétiquement manipulés deviennent souvent des assises à partir desquelles de nouvelles recherches sont lancées, il importe aux chercheurs de ces industries de savoir quelles sont les recherches qu’ils peuvent entreprendre sans violer de brevets.

Aux États-Unis, la défense basée sur l’utilisation expérimentale est plus restreinte qu’au Canada. Elle ne s’applique qu’à des recherches ayant pour objectif une « étude philosophique ». Même si ce concept n’est pas limpide, il ne s’applique probablement qu’aux recherches qui ne pourraient prétendre avoir de potentiel commercial. En vertu des lois des pays membres de l’Union européenne, ce type de défense est plus large, parce qu’il permet non seulement l’ « étude philosophique », mais également les recherches sur l’objet même du brevet. Conséquemment, même une recherche commerciale sur l’invention elle-même (par rapport à une recherche qui ne fait que se servir de l’invention) ne viole pas le brevet de cette invention.

Le Canada pourrait se demander si une défense basée sur l’utilisation expérimentale au sens large s’impose ou si une défense de moindre portée mènerait au meilleur équilibre possible des intérêts des inventeurs et des chercheurs dans le domaine de la biotechnologie. Il doit également se demander si la mise sur pied d’une défense basée sur l’utilisation expérimentale applicable seulement à la biotechnologie serait discriminatoire à son endroit, ce qui violerait des obligations internationales. Si tel était le cas, le Canada pourrait décider de créer une défense basée sur l’utilisation expérimentale générale plutôt qu’une défense ciblant les formes de vie supérieures et les processus y étant reliés. Si le Canada crée une défense basée sur l’utilisation expérimentale pour les inventions en biotechnologie, il voudra peut-être déterminer si la portée de cette défense varierait selon qu’il s’agit, par exemple, de thérapie humaine ou de plantes.

Questions:

  1. La Loi sur les brevets devrait-elle inclure la défense basée sur l’utilisation expérimentale et/ou la méthode de l’exclusion à l’égard des traitements médicaux? La portée de chacune de ces options est-elle suffisante, ou devrait-elle être réduite ou élargie?

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Points de discussion portant sur les exclusions applicables au privilège du producteur, à des obtentions végétales et à des espèces animales

Plantes — La Loi sur la protection des obtentions végétales (LPOV) est une forme de protection de la propriété intellectuelle qui s’applique spécifiquement aux variétés. La Loi accorde au sélectionneur le droit exclusif de vendre et produire une variété particulière aux fins de vendre le matériel de propagation (par exemple, graines et boutures). Elle comprend deux exceptions. La première, le privilège du producteur, est une exception implicite. Celle-ci permet au producteur de conserver et de semer les graines obtenues par la culture de variétés protégées aux fins de ses activités agricoles. Par exemple, un producteur peut semer des graines tirées d’une récolte de blé aux fins d’en vendre le produit comme nourriture, mais il ne peut vendre les graines de sa nouvelle récolte à un tiers qui les sèmera à son tour. Cependant, si le matériel génétique d’une variété protégée est breveté, le producteur pourrait être accusé d’avoir enfreint le brevet en vertu de la Loi sur les brevets, nonobstant le privilège du producteur en vertu de la LPOV. La deuxième exception concerne la recherche. Elle permet à des tiers de se servir de variétés protégées non seulement pour faire de la recherche, comme le permet la Loi sur les brevets, mais aussi pour cultiver et développer de nouvelles variétés à des fins commerciales.

D’aucuns estiment que la protection accordée aux sélectionneurs de plantes en vertu de la LPOV est de portée limitée, en ce qu’elle ne couvre pas le matériel génétique sous-jacent ni ne restreint la commercialisation de parties des variétés, par exemple leurs fruits, racines ou feuilles. Quoique certains observateurs proposent d’étendre la portée du système de brevetage pour englober les plantes et animaux comme tels, d’autres estiment que cela créerait un conflit entre les droits des détenteurs de brevets et ceux des sélectionneurs en vertu de la LPOV.

Il se pourrait que l’ajout d’une exemption au système des brevets touchant aux variétés apporte un élément de solution. Cependant, qu’il s’agisse ou non d’une solution acceptable dépendrait de l’interprétation que les bureaux des brevets et les tribunaux donneraient à la portée d’une telle exemption. Il pourrait également être inacceptable, aux yeux de ceux qui appuient les droits des innovateurs, de choisir le type de protection approprié à leurs innovations. Une solution de rechange serait d’ajouter une disposition sur le privilège des producteurs à la Loi sur les brevets.

Le système canadien de protection des obtentions végétales offre un système sui generis de protection de la propriété intellectuelle touchant aux variétés tout en étant conforme aux obligations internationales du Canada. Sur le plan international, les droits des sélectionneurs ont d’abord été reconnus en 1961 par la Convention internationale pour la protection des obtentions végétales (Convention UPOV). Le Canada a ratifié la version de 1978 de la Convention UPOV. En 1991, la Convention UPOV a été amendée pour permettre aux pays de se doter de la protection que confèrent le brevet et la variété et d’étendre la portée de la Convention UPOV « essentiellement aux variétés et aux matières récoltées », deux changements importants par rapport à la version précédente de la Convention UPOV. Plusieurs nations ont modifié leurs lois pour se conformer à la Convention de 1991, quoique quelques pays seulement (incluant les principaux partenaires commerciaux du Canada) aient ratifié cette convention. Le projet de loi C-8010, déposé à la Chambre des Communes en 1999, comprenait des amendements qui auraient permis au Canada de ratifier le texte 1991 de la Convention UPOV, mais ce projet de loi est mort au feuilleton. Présentement, le Canada respecte la Convention UPOV de 1978.

Certaines organismes environnementaux estiment que la protection des variétés est préférable à la protection par voie de brevets. Ils trouvent que les brevets encouragent la concentration de technologies de base touchant aux plantes entre les mains de quelques compagnies seulement. Comme ces compagnies vendent un éventail limité de semences, moins de variétés seraient cultivées. Ces organismes craignent que cela ne diminue la diversité des plantes récoltées dans le monde, ce qui réduirait la résistance inhérente des récoltes aux ravageurs. Ils croient que la protection des variétés est préférable, étant donné qu’elle conduit à une moindre concentration des technologies de base.

Le Canada pourrait songer à refondre la LPOV actuelle pour qu’elle soit compatible avec la législation actuelle sur les brevets, compte tenu de l’environnement scientifique et technologique d’aujourd’hui et des préoccupations socioéconomiques actuelles des Canadiens au sujet de la biotechnologie. Le Canada pourrait considérer harmoniser la Loi sur les brevets avec la LPOV de sorte que l’exemption du privilège du producteur soit semblable dans les deux cas. Il pourrait également songer à créer une obligation légale entre l’exercice de certains droits conférés par brevet et la protection des obtentions végétales, comme c’est le cas en Europe. (Cela exigerait, par exemple, qu’un chercheur qui incorpore du matériel génétique breveté dans une variété protégée doive verser une redevance pour commercialiser la variété modifiée et/ou les graines qui en résulteraient). Le Canada pourrait également considérer réinscrire les parties pertinentes de l’ancien projet de loi C-80 à l’ordre du jour.

Animaux — La protection des espèces animales est une question plus difficile à trancher que celle de la protection de variétés vu l’absence d’accords ou de consensus internationaux à ce sujet. Ce manque de consensus a des fondements scientifiques. Les animaux tendent à avoir une variation génétique bien supérieure à celle des plantes. Les races de bétail se fient exclusivement à la reproduction sexuée et présentent un éventail significatif de variation génétique, ce qui rend la transmission stable de toute séquence génétique à leurs descendants d’autant plus imprévisible. Dans son étude de l’exemption de variétés animales, le Canada pourrait envisager d’adopter une définition du concept d’espèce animale.

Le maintien de la santé de populations animales dépend d’un échange constant de gènes et de combinaisons génétiques variées pour conserver la diversité génétique et éviter la consanguinité. On a soulevé des craintes que certaines populations de bétail d’élevage manquent de diversité génétique. La brevetabilité d’animaux donnerait le droit d’empêcher que des tiers élèvent certains animaux et leurs descendants à moins de verser des redevances. Il serait peut-être souhaitable que le Canada examine les conséquences du fractionnement de troupeaux d’élevage (selon que les éleveurs consentent à payer des redevances ou non), y compris les incidences sur le degré de variation génétique et les découvertes scientifiques.

Les associations d’éleveurs régis par la Loi sur la généalogie des animaux investissent de fortes sommes pour tester les jeunes animaux. Comme les améliorations génétiques sont cumulatives, les investissements consentis à l’échelle d’une espèce entière sont justifiés. Cependant, des considérations financières pourraient se traduire par l’achat de plusieurs taureaux ou verrats de grand calibre par des entreprises de biotechnologie cherchant à créer leurs propres fondations. Le Canada pourrait considérer qu’il y a interface entre la Loi sur les brevets (dans un contexte où l’on pourrait obtenir un brevet sur un animal) et la Loi sur la généalogie des animaux.

Questions:

  1. La Loi sur les brevets devrait-elle inclure le privilège du producteur et/ou accorder une exemption pour certaines obtentions végétales ou espèces d’animaux?

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2. Quels mécanismes de régie pourraient être changés?

Points de discussion portant sur les mesures législatives, politiques ou jurisprudentielles

La Loi sur les brevets établit les grandes règles qui s’appliquent au brevetage, tandis que l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) interprète et administre la Loi. En cas de différend quant au sens de la Loi ou à son application à une invention donnée, la Cour fédérale du Canada et, en dernier recours, la Cour suprême du Canada tranchent la question. Étant donné la nature fort générale et non circonscrite de la Loi sur les brevets, les tribunaux jouent présentement un rôle de premier plan dans la définition des limites de cette loi et de la portée des droits qu’elle confère. Dans sa décision sur la carcinosouris de Harvard à l’été 2000, la Cour fédérale d’appel a déclaré que c’était ultimement au Parlement que revenait la responsabilité de définir les limites de la Loi sur les brevets en matière de biotechnologie.


Tableau 3

Le 3 août 2000, la Cour fédérale d’appel a conclu qu’un brevet devrait être accordé à l’Université Harvard pour la création de la carcinosouris. Elle a trouvé que la formulation actuelle de la Loi sur les brevets permet le brevetage de mammifères non humains génétiquement modifiés pour fin d’études de carcinogenèse.

En septembre 2000, le CCCB a remis un mémoire consultatif au CCMB déclarant qu’il appuyait la décision de la Cour fédéral d’appel selon laquelle c’était au Parlement, non aux tribunaux, de formuler la politique du Canada en matière de brevetage des formes de vie supérieures (et la distinction entre formes de vie supérieures et inférieures). Le CCCB a noté que les lois du Canada devraient refléter les valeurs sociales et que les Canadiens n’avaient pas encore eu l’occasion de débattre de la gamme des questions morales, éthiques et sociales en jeu. Ce mémoire soulignait l’intention du CCCB de lancer un tel débat au printemps de 2001.

Le CCCB a invité le gouvernement du Canada à prendre « toutes les mesures raisonnables et réalistes » pour faciliter une étude parlementaire de cette question. À cet effet, une majorité des membres du CCCB ont enjoint le gouvernement fédéral à demander au Parlement de modifier la Loi sur les brevets pour interdire explicitement, sur une base intérimaire et en attendant que l’étude parlementaire soit terminée, le brevetage de classes spécifiques de formes de vie supérieures, dont les primates, le corps humain et certaines espèces végétales. D’autres préconisaient plutôt de conseiller au gouvernement fédéral d’en appeler de la décision auprès de la Cour suprême du Canada. Le 2 octobre 2000, les avocats du gouvernement, représentant le commissaire des brevets, ont déposé une demande pour avoir la permission d’en appeler de la décision à la Cour suprême du Canada.


La Loi sur les brevets se constitue par l’interprétation qu’en font les tribunaux et par des amendements législatifs. Chaque démarche présente des avantages et des désavantages. Par exemple, la démarche judiciaire exigerait que les individus lésés assument le fardeau de monter et de présenter leur cas. Le fait de trancher chaque cas au mérite entraîne de l’incertitude. La démarche judiciaire s’accompagne de délais plus longs que ceux des changements législatifs proposés par un gouvernement proactif. Cependant, la flexibilité de la démarche judiciaire offre un avantage par rapport à la démarche législative, parce qu’il pourrait être difficile de rédiger un amendement législatif qui puisse donner les résultats escomptés et anticiper tous les problèmes possibles, surtout dans un domaine qui affiche une croissance rapide et une variabilité extrême comme la biotechnologie.

Les tribunaux ont exprimé une réticence à s’ embarquer sur le terrain de l’examen éthique d’une demande de brevet dans le cadre législatif actuel. Conséquemment, en fonction du fait que certains sujets devraient être exclus de la protection qu’offre un brevet ou qu’une clause d’ordre public ou de moralité devrait être incorporée à la Loi sur les brevets, le recours aux tribunaux ne donne guère de résultats satisfaisants. Ainsi, si l’on décide que les exclusions devraient englober ces concepts, il faudra poser des gestes législatifs.

Somme toute, le Canada dispose d’une gamme d’instruments pour concrétiser ses objectifs de politique. Ces instruments se définissent pour les besoins de la cause comme suit, quoiqu’un amalgame de ces instruments s’avère non seulement possible, mais probable :

Politique du Bureau des brevets — L’OPIC pourrait élaborer des directives quant à la brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus y étant reliés, et à l’application d’une clause d’ordre public ou de moralité, advenant qu’une telle clause soit adoptée. Le United States Patent and Trademark Office publie des directives d’examen non exécutoires, mais qui permettent d’aider les gens voulant déposer une demande de brevet à saisir l’interprétation que ce bureau fait de la législation qui le gouverne.

Modification législative de la Loi sur les brevets et de ses règlements (voir 1. Qu’est-ce qui devrait ou ne devrait pas faire l’objet d’un brevet?) — Par voie législative, le Canada pourrait ajouter à la Loi sur les brevets soit des exclusions spécifiques quant à la brevetabilité, soit une disposition générale touchant l’ordre public ou la moralité. Si tel était le cas, la législation pourrait également préciser la procédure en vertu de laquelle les inventions seraient évaluées quant à leur conformité à cette disposition.

Nouveaux instruments législatifs — Le Canada pourrait se doter d’un système législatif particulier pour traiter des craintes éthiques et autres de nature non commerciale ayant trait aux brevets en biotechnologie. Par exemple, cette législation pourrait donner naissance à un nouvel organisme administratif qui examinerait de telles questions.

Judiciaire : Confier aux tribunaux le soin de faire respecter les valeurs canadiennes à l’aide d’instruments actuels — Les tribunaux pourraient continuer à appliquer la Loi sur les brevets par l’entremise des causes portées devant eux au cours des prochaines années. De ce processus naîtrait un ensemble de règles cohérentes et flexibles touchant la brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus y étant reliés.

Questions:

  1. Le Canada devrait-il maintenir le partage actuel des responsabilités entre le Parlement, l’Office de la propriété intellectuelle du Canada et les tribunaux? Ou une nouvelle façon de procéder servirait-elle mieux les Canadiens? Si oui, quelle devrait-elle être?
  2. Quelle est la meilleure solution pour composer avec les valeurs et questions entourant la brevetabilité en biotechnologie : législation et règlements, lignes directrices et codes de conduite, ou interprétation judiciaire?

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3. Considérations sociales et éthiques

Points de discussion sur les considérations sociales et éthiques

Chaque société a ses propres perspectives éthiques et sociales que sous-tendent des valeurs. Celles-ci sont souvent exprimées dans des instruments juridiques, réglementaires et politiques. Le Canada possède déjà des exemples de lignes de conduite en matière d’éthique et d’outils y étant reliés, qui ont des répercussions en biotechnologie11. Cependant, certains aspects de la biotechnologie, dont le clonage, peuvent soulever de nouvelles questions sociales et éthiques. Ce qui donne lieu aux questions suivantes : Le Bureau des brevets devrait-il être neutre en matière d’éthique? Ou devrait-il jouer un rôle dans la détermination de ce qui est ou n’est pas brevetable à la lumière de préoccupations éthiques?

D’aucuns suggèrent d’ajouter une disposition d’ordre public ou de moralité à la Loi sur les brevets du Canada12. Plusieurs points sont ainsi soulevés. L’un des problèmes touche à l’envergure de l’exclusion. Selon les termes qu’on utilisera, une telle disposition pourrait empêcher le brevetage d’un ensemble plus ou moins circonscrit d’inventions. Deuxièmement, l’utilisation commerciale de l’invention peut changer au fil des ans. Comment le système de brevetage composerait-il avec une utilisation subséquente qui contreviendrait à l’ordre public et la moralité seulement après l’émission d’un brevet? Dans cette même veine, comment le système des brevets composerait-il avec la découverte d’une nouvelle utilisation découlant d’une invention pour laquelle on avait déjà refusé un brevet en vertu de cette disposition? Troisièmement, comme un brevet ne permet pas automatiquement à son détenteur d’exploiter une invention, l’exploitation commerciale peut, et cela est fréquent, être réglementée en vertu d’autres textes de loi applicables au domaine en question. Quatrièmement, même si le brevet est refusé, l’invention pourrait se retrouver dans le domaine public, ce qui permettrait à n’importe qui de l’exploiter commercialement, malgré l’entorse à l’ordre public ou la moralité.

Une deuxième question touche à la détermination des valeurs sociales qui devraient être incorporées à une disposition d’ordre public ou de moralité. Comme la jurisprudence de l’Office européen des brevets l’illustre, il s’agit d’une question compliquée, qui varie de cas en cas et pour laquelle il n’existe pas de solution limpide.

Une troisième question concerne l’identité de l’organisme administratif qui devrait veiller au respect de la disposition d’ordre public ou de moralité. Si la demande de brevet est rejetée parce qu’on va à l’encontre de la disposition d’ordre public ou de moralité, l’examinateur de brevets pourrait bien être la première personne à porter jugement sur l’applicabilité de cette disposition. Il faudrait se pencher sur la pertinence d’accorder ou non à une entité administrative indépendante le pouvoir de prendre de telles décisions. Cette entité pourrait, par exemple, examiner les préoccupations éthiques touchant à un éventuel brevet avant ou pendant que l’OPIC examine la demande du point de vue technique. Dans un tel cas, l’OPIC n’accorderait de brevet que si l’invention a franchi avec succès les examens technique et éthique. D’autre part, il pourrait être judicieux de ne soulever les questions d’ordre public et de moralité que dans le cadre d’une procédure d’opposition (une procédure en vertu de laquelle quelqu’un s’oppose à un brevet accordé). Si cette voie devait être retenue, le Canada devrait élaborer un mécanisme d’opposition.

Il y a aussi la question de choisir l’organisme qui devrait entendre les appels en matière de brevets. À l’Office européen des brevets, la décision par la division d’examen de refuser d’émettre un brevet relève de la Commission technique des appels. Au Canada, une décision concernant une demande de brevet peut être portée devant le conseil des appels pour les brevets et ensuite devant la Cour fédérale. Cependant, comme le cheminement des litiges est généralement long, il faudrait peut-être étudier d’autres mécanismes de résolution des différends.

Lorsqu’il élaborera sa position sur cette question, le Canada pourrait se pencher sur des méthodes permettant de répartir équitablement les risques et les avantages que génère la technologie. Cela pourrait comprendre l’élaboration de normes industrielles sur le partage des avantages ou l’imposition d’obligations législatives pour partager les retombées, ainsi que veiller à ce que ceux qui ont participé ou fourni du matériel utilisé par la technologie en tirent des avantages équitables. En avril 2000, le Comité d’éthique de l’Organisation du génome humain (HUGO) a rendu public un énoncé sur le partage équitable pour chercher à déterminer s’il fallait répartir les profits que pourraient générer les entreprises commerciales, les gouvernements et les institutions de haut savoir quand il y a participation de communautés ou populations spécifiques, et comment s’y prendre. Il recommandait, entre autres, que tous les humains aient accès aux retombées de la recherche en génétique; que les chercheurs entreprennent des discussions au préalable avec les communautés ou populations quant au partage des retombées; que les chercheurs s’assurent que les besoins en santé de la communauté sont satisfaits, même en l’absence de profits; et que les entités profitables consacrent de 1 à 3 p. 100 des profits annuels nets à des programmes de santé ou humanitaires.

La question du partage des retombées a été soulevée par quelques pays en développement lors de discussions qui ont mené à l’adoption de la Convention sur la diversité biologique en 1992. Ces nations ont soutenu que comme l’industrie se sert de plantes et d’animaux de ces pays pour développer des médicaments, des cultures et des troupeaux reproducteurs génétiquement modifiés, l’industrie devrait donner à ces pays quelque chose en retour. Ils ont également déclaré que l’industrie devrait faire de même si elle se sert du savoir-faire traditionnel de gens vivant dans ces contrées. L’industrie se sert de connaissances accumulées au fil des ans par les habitants de ces pays pour aider à identifier des plantes et animaux possédant certaines propriétés médicinales ou des plantes qui résistent particulièrement bien à certains ravageurs. Cela permet à l’industrie de centrer sa recherche sur des plantes et animaux qui ont de meilleures chances de mener à des produits utiles. L’industrie réussit ainsi à faire de grandes économies d’argent et de temps pendant ses recherches. Certains pays en développement estiment que l’industrie devrait partager ces profits avec eux.

Plusieurs personnes se sont dites préoccupées par le fait que la délivrance de brevets à des plantes et à des animaux ne puisse amoindrir le respect porté à la nature et à l’environnement. Puisque les brevets encouragent l’industrie à commercialiser ses inventions, on craint que l’industrie traite les plantes, les animaux et les êtres humains comme des objets de commerce ou des objets ayant un potentiel de commercialisation. Ainsi, au lieu de traiter avec respect les plantes, les animaux et les êtres humains, nous pourrions les considérer tout simplement comme une autre ressource destinée à la consommation humaine.

Questions:

  1. La Loi sur les brevets est-elle le meilleur outil pour s’occuper de questions sociales ou éthiques nées des innovations en biotechnologie? Si non, comment et/ ou où ces questions devraient-elles être abordées?
  2. La Loi sur les brevets du Canada devrait-elle comprendre une exclusion d’ordre public ou de moralité? Si oui, quelle devrait être la portée de cette disposition? Quelle entité administrative devrait être chargée de son application? Cette exclusion devrait-elle être évaluée pendant l’examen de la demande ou seulement plus tard par une procédure d’opposition?

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4. Obligations et compétitivité à l'échelle internationale

Points de discussion portant sur les obligations internationales et la réputation du Canada en matière de brevets

Le Canada est signataire de plusieurs conventions internationales touchant à la biotechnologie, à la propriété intellectuelle, au commerce international, à la diversité biologique et aux droits de la personne. Chacune de ces conventions a été rédigée pour répondre à un besoin précis. Puisque la biotechnologie recoupe un si grand nombre de facettes de la vie, plusieurs conventions ont des incidences sur sa réglementation.

Les négociateurs veillent tout particulièrement à assurer l’uniformité des obligations contenues dans les diverses conventions. Il peut cependant subsister quelques divergences entre les objectifs visés par ces conventions. Par exemple, la Convention sur la diversité biologique dispose d’un cadre d’action permettant de protéger la diversité biologique de la planète en accordant le droit à chaque pays de contrôler l’accès à ses ressources biologiques. Bien que cette convention n’empêche pas la délivrance de brevets à des ressources biologiques, certains croient qu’il y a une discordance inhérente entre la Convention et les droits de propriété intellectuelle. Par ailleurs, certaines conventions se complètent, telles celles sur le commerce international. Depuis l’entrée en vigueur de l’ADPIC, la violation de certains règlements sur la propriété intellectuelle peut entraîner des sanctions commerciales.

Dans l’élaboration de sa position sur la brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus y étant reliés, le Canada devra tenir compte des contraintes qui lui sont imposées par ses obligations internationales. Lorsqu’un conflit est perçu entre l’esprit de deux conventions, comment le Canada devrait-il régler ce conflit tout en respectant ses propres lois?

L’interaction entre les nombreuses obligations du Canada peut, selon certains, ne pas lui donner suffisamment de latitude pour bien traiter les questions entourant la brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus y étant reliés. Dans ce cas, le Canada peut avoir à renégocier certaines obligations internationales. À titre d’exemple, s’il conclut que la meilleure solution à ces questions est de créer des droits propres à la biotechnologie, il devra peut-être (selon la nature de ces droits) négocier tout d’abord une exemption dans le cadre de l’ADPIC pour permettre à des pays d’adopter, dans certaines conditions, des mesures discriminatoires à l’endroit de la biotechnologie.

LE CCCB a entendu différents points de vue sur la mesure dans laquelle le Canada respecte ses obligations internationales actuelles. Le gouvernement du Canada maintient que le pays se conforme de façon continue à ses engagements internationaux. Cependant, certains représentants de l’industrie disent que le Canada a la réputation à l’étranger de ne pas manifester la volonté de respecter ses engagements internationaux en matière de protection par brevet13; que les entreprises trouvent difficile de convaincre des sièges sociaux d’investir en R-D au Canada parce que les politiques touchant aux brevets semblent injustes; et que le Canada envoie peut-être un message indirect aux investisseurs étrangers et à leurs sociétés affiliées que la biotechnologie — et donc les investissements — ne sont pas bien protégés dans ce pays. Certains représentants d’organismes non gouvernementaux, par contre, soulèvent des craintes, y compris celles voulant que l’élargissement des régimes de propriété intellectuelle pour englober les formes de vie supérieures et les processus y étant reliés puisse accélérer la consolidation des fournisseurs de graines et réduire davantage le contrôle des ressources génétiques commerciales. Ils soutiennent que le Canada est perçu par les pays en développement et les peuples autochtones comme étant en trop bons termes avec l’industrie de la biotechnologie.


Tableau 4

Au cours de discussions entre les représentants de l’industrie et le CCCB en vue de préparer les consultations publiques, les représentants de l’industrie ont souligné que les délais pour obtenir un brevet sont plus longs au Canada que dans d’autres pays, même dans le cas où la demande de brevet porte sur le même objet que les brevets accordés par ses principaux partenaires commerciaux. Au Canada, les demandes de brevets sont examinées en moyenne 22 mois après leur dépôt officiel. À cela s’ajoute les délais encourus à la suite du dépôt de la demande conformément au Traité de coopération en matière de brevets. En tout, le délai entre la conception et l’octroi du brevet est d’environ quatre ans. Selon ces représentants, un examen plus rapide permettrait d’attirer plus facilement les investisseurs. Plus le temps écoulé entre le dépôt et la délivrance d’un brevet est long, plus les détenteurs potentiels d’un brevet doivent attendre avant d’attirer des investisseurs, et moins rentable et attrayante sera l’invention à mesure que la période d’exclusivité tire à sa fin. Les représentants ont aussi souligné qu’il n’existe aucune ligne directrice sur les critères servant à obtenir des brevets.


Points de discussion portant sur le manque d’uniformité des pays industrialisés et ses incidences

Une recherche que le CCCB a commandée sur les brevets et la biotechnologie a fait ressortir plusieurs exemples de manque d’uniformité entre pays industrialisés, et entre le Canada et d’autres pays industrialisés, quant à la brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus y étant reliés. Il s’agit entre autres des points suivants :

  • À l’encontre du Canada où la question générale de décider si les formes de vie supérieures sont des inventions brevetables est débattue devant les tribunaux, tant les États-Unis que l’Europe accordent des brevets aux formes de vie supérieures. Les États-Unis s’y sont pris par le truchement d’interprétations judiciaires, tandis que l’Europe est passée par voie législative pour clarifier le concept de brevetabilité des formes de vie supérieures.
  • Les principaux partenaires commerciaux du Canada disposent tous d’un mode de rétablissement de la durée de validité du brevet pour dédommager l’industrie de la perte de période de commercialisation subie pendant que l’invention était examinée quant à sa sécurité. Le Canada ne s’est pas doté d’un tel mécanisme.
  • Le Canada n’a pas émis de directives quant à la norme d’utilité et à la description touchant aux séquences d’ADN. Les États-Unis l’ont fait explicitement par l’entremise du United States Patent and Trademark Office. Le manque de directives et la nature émergente de la biotechnologie ne permettent pas de déterminer si les concepts d’utilité et de description sont semblables dans tous les pays industrialisés.
  • Contrairement à ses principaux partenaires commerciaux, le Canada n’a pas ratifié la Convention UPOV de 1991.
  • Contrairement à l’Europe, mais comme aux États- Unis, le Canada ne dispose pas de règles limpides quant à la portée et à l’application de la défense basée sur l’utilisation expérimentale ou l’exclusion.
  • Tout comme en Europe, la portée de l’exclusion du traitement médical au Canada n’est pas claire. Ce problème ne se pose pas aux États-Unis étant donné que cette exclusion n’y existe pas.

Quoique le Canada puisse trouver avantageux de choisir, à l’égard de la propriété intellectuelle, une démarche différente de celle de ses principaux partenaires commerciaux, la recherche que le CCCB a commandée suggère que les exemples de manque d’uniformité illustrés ci-dessus puissent désavantager le Canada. Il pourrait s’agir d’une chute des investissements étrangers et, partant, du développement en biotechnologie. Néanmoins, certains représentants de l’industrie ont noté que le Canada demeure un bon endroit où faire de la recherche à cause de son système de soins de santé et du niveau supérieur d’éducation et de savoir-faire. De plus, il se peut que l’on exagère la portée des conséquences économiques découlant d’une faiblesse par rapport aux régimes de propriété intellectuelle des principaux partenaires commerciaux du Canada, étant donné que le marché canadien pour les produits de la biotechnologie n’est généralement pas assez grand pour repousser des décisions d’investissement en R-D.

Questions:

  1. Dans quelle mesure, le cas échéant, l’esprit de chacune des obligations internationales du Canada se contredisent-elles quant à la brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus y étant reliés? Comment le Canada devrait-il régler un tel conflit?
  2. Y a-t-il des contraintes à la mise en oeuvre par le Canada d’une politique optimale à l’égard de la brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus y étant reliés ? Si oui, comment le Canada devrait-il résoudre ce problème?
  3. Le Canada est le seul pays du G-7 qui ne permet pas le brevetage des formes de vie supérieures. À quel point cela joue-t-il contre la compétitivité du Canada en tant que pays où faire de la R-D en biotechnologie?
  4. Le Canada devrait-il changer certains éléments de son système de propriété intellectuelle pour aider son industrie de la biotechnologie à devenir plus compétitive? Si oui, quels changements devrait-il préconiser?

Avez vous d’autres commentaires à ce sujet?

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Annexe 1 - Glossaire

ADN — acide désoxyribonucléique, l’empreinte génétique de la plupart des organismes vivants qui permet de coder les protéines

ADPIC — Entente sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce en vertu de l’Organisation mondiale du commerce

ALENA — Accord de libre-échange nord-américain

Brevet — droit, accordé en vertu de la Loi sur les brevets, qui empêche toute autre personne de faire, d’utiliser ou d’exploiter commercialement une invention pendant une période de 20 ans à compter de la date du dépôt de la demande de brevet

Certificat d’obtention — droit exclusif de commercialiser et de cultiver un cultivar

Clause d’ordre public ou de moralité — disposition qui permet de refuser d’accorder un brevet en invoquant le fait que l’utilisation commerciale de l’invention puisse causer de l’agitation ou des désordres publics importants ou qu’elle violerait des normes fondamentales et partagées

Défense basée sur l’utilisation à des fins expérimentale — droit limité qui permet aux chercheurs d’utiliser ou de copier une invention brevetée sans enfreindre la loi

Directive de l’U.E. — Directive de l’Union européenne sur la protection juridique des inventions biotechnologiques

Invention — chose ou une façon de faire qui est nouvelle, non évidente et utile

LPOV— Loi sur la protection des obtentions végétales

Méthodes de traitement médical — méthodes utilisées pour traiter des conditions médicales ou pathologiques, par exemple une maladie

Non-évidence — caractère attribué à une invention qui n’est pas apparente pour une personne versée dans l’art ou la science auquel l’invention a rapport

Nouveauté — caractère attribué à une invention qui n’a pas été rendue publique dans des documents pertinents (sujette à une période de grâce)

OMC — Organisation mondiale du commerce

OPIC — Office de la propriété intellectuelle du Canada

Privilège du producteur — droit limité qui permet aux producteurs d’utiliser des graines et/ou des rejetons d’animaux reproducteurs sans enfreindre les droits conférés par brevet ou par la protection des obtentions végétales

Séquence d’ADN — séquence d’acides nucléiques qui peut ou non coder une protéine

sui generis — en ce qui concerne la protection des obtentions végétales, système judiciaire spécialisé et unique distinct de la Loi sur les brevets

UPOV — convention internationale sur la protection des obtentions végétales.

Utilité — caractère attribué à une invention qui présente une application industrielle réaliste, substantielle et que l’on peut reproduire.

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Annexe 2 - Rapports de recherche

A Summary of Principal Ideas Arising from Research Papers Not Addressed in the Biotechnological Intellectual Property and Patenting of Higher Life Forms Consultation Document 2001, by the Canadian Biotechnology Advisory Committee.

Impact of Canada’s Patent System on the Ability of Publicly Funded Organizations to Transfer, and Private Sector Firms to Commercialize Biotechnological Inventions, by Tom Clarke, Stargate Consultants Ltd, Nanaimo, British Columbia. A Brief History of the Canadian Patent System, by Vic Duy, Consultant, Ottawa, Ontario.

Intellectual Property Protection for Biotechnological Innovations, by Mona Frendo, Legal Analyst, Corporate Governance Branch, Industry Canada, Ottawa, Ontario. The Use of Animals in Scientific Research and as Sources of Bioengineered Products, by Dr. Clément Gauthier and Dr. Gilly Griffin, Canadian Council on Animal Care, Ottawa, Ontario.

EU Directive and the Legal Protection of Biotechnological Inventions, by Dr. Richard Gold, Assistant Professor, Faculty of Law, University of Western Ontario, London, Ontario; Assistant Professor, Senior Fellow, Einstein Institute for Science, Health & the Courts; Research Associate, Health Law Institute, University of Alberta; and Alain Gallochat, Advisor, French Ministry of Research, France.

Patents in Genes, by Dr. Richard Gold, Assistant Professor, Faculty of Law, University of Western Ontario, London, Ontario; Assistant Professor, Senior Fellow, Einstein Institute for Science, Health & the Courts; Research Associate, Health Law Institute, University of Alberta.

Patenting Life Forms: An International Comparison, by Dr. Richard Gold, Assistant Professor, Faculty of Law, University of Western Ontario, London, Ontario; Assistant Professor, Senior Fellow, Einstein Institute for Science, Health & the Courts; Research Associate, Health Law Institute, University of Alberta.

Alternatives to the Use of Animals for Research, Testing and as Sources of Bioengineered Products, by Dr. Gilly Griffin and Dr. Clément Gauthier, Canadian Council on Animal Care, Ottawa, Ontario.

The Interface of Biotechnology Patents and Competition Law, by Warren Grover, Q.C., Barrister and Solicitor, Blake, Cassels and Graydon, Toronto, Ontario.

Intellectual Property Rights in Biotechnology: The Economic Argument, by Dr. Ron Hirshhorn, Hirshhorn Consulting Inc., Nepean, Ontario; and Jock Langford, Economist, Corporate Governance Branch, Industry Canada, Ottawa, Ontario. (Pending)

Innovation in the Livestock Industry, by Dr. Robert Kemp, RAK Consulting Ltd, Lethbridge, Alberta.

Biotechnology, Ethics and Government: A Synthesis, by Dr. Michael McDonald, Director, Centre for Applied Ethics, University of British Columbia, Vancouver, British Columbia.

New Enclosures: The Impetus for and Potential of Alternative Mechanisms for the Protection of Biotechnological Innovations, by Patrick Mooney, Rural Advancement Foundation International (RAFI), Winnipeg, Manitoba.

Patenting of Biotechnological Innovations Concerning Animals and Human Beings, by Ted Schrecker, Consultant, Ted Schrecker-Research and Consulting, Montreal, Quebec; and Alex Wellington, Department of Philosophy, Ryerson Polytechnic University, Toronto, Ontario.

Patenting of Higher Life Forms and Human Biological Materials, by Ted Schrecker, Consultant, Ted Schrecker- Research and Consulting, Montreal, Quebec; and Alex Wellington, Department of Philosophy, Ryerson Polytechnic University, Toronto, Ontario.

Towards an Adequate Ethical Framework for Setting Biotechnology Policy, by Dr. Susan Sherwin, Munro Chair in Philosophy, Department of Philosophy, Dalhousie University, Halifax, Nova Scotia.

International Obligations for Intellectual Property and Biotechnology, by Sanjay Venugopal, Legal Analyst, Corporate Governance Branch, Industry Canada, Ottawa, Ontario. (Pending)

Human Rights Issues in Patenting of Higher Life Forms — The Role of the Canadian Charter of Rights and Freedoms, by Barbara von Tigerstrom, Professor of Law, Health Law Institute, University of Alberta, Edmonton, Alberta.

Human Rights Issues Related to the Patenting of Human Biological Materials, by Barbara von Tigerstrom, Professor of Law, Health Law Institute, University of Alberta, Edmonton, Alberta.

Economic Profile of the Biotechnology Sector, by Kenneth White, Acton, White and Associates, Manotick, Ontario.

CBAC Hearings 2000/2001:

Summary Report of the President/CEO Industry Hearing to CBAC, September 29, 2000, rapporteur Dr. Richard Gold, Assistant Professor, Faculty of Law, University of Western Ontario, London, Ontario; Assistant Professor, Senior Fellow, Einstein Institute for Science, Health & the Courts; Research Associate, Health Law Institute, University of Alberta.

Summary Report of the Non-Governmental Organization (NGO) Hearing to CBAC, November 22, 2000, rapporteur Dr. Richard Gold, Assistant Professor, Faculty of Law, University of Western Ontario, London, Ontario; Assistant Professor, Senior Fellow, Einstein Institute for Science, Health & the Courts; Research Associate, Health Law Institute, University of Alberta.

Summary Report of the Scientific Researcher On-line E-forum, February 5-9, 2001, rapporteur Dr. Richard Gold, Assistant Professor, Faculty of Law, University of Western Ontario, London, Ontario; Assistant Professor, Senior Fellow, Einstein Institute for Science, Health & the Courts; Research Associate, Health Law Institute, University of Alberta.

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Annexe 3 - Aperçu du projet du CCCB sur la propriété intellectuelle en biotechnologie et sur la brevetabilité des formes de vie supérieures

Lorsqu’il a créé le CCCB, le gouvernement du Canada a reconnu que le Canada se devait d’être compétitif à l’échelle internationale tout en tenant compte de préoccupations d’ordre éthique et social dans sa démarche touchant la biotechnologie. Le CCCB reconnaît que ces deux préoccupations fondamentales sont présentes lorsqu’il est question de la protection de la propriété intellectuelle des inventions en biotechnologie, surtout de la brevetabilité des formes de vie supérieures. Il a donc mis sur pied un projet spécial pour examiner la propriété intellectuelle et la brevetabilité des formes de vie supérieures. Le Comité a cerné cinq domaines d’étude sur lesquels porteront ses travaux :

  • Comment le régime canadien de protection de la propriété intellectuelle se compare-t-il à ceux des autres grands pays industrialisés?
  • Dans la mesure où le régime de protection de la propriété intellectuelle des formes de vie supérieures du Canada diffère des systèmes des autres pays, quelles conséquences cette divergence pourrait-elle avoir pour le Canada?
  • Comment le régime canadien actuel de protection de la propriété intellectuelle influe-t-il sur l’industrie qui met au point et exploite les innovations en biotechnologie, et effectue de la recherche à leur sujet?
  • Quels changements est-il souhaitable d’apporter au régime, le cas échéant, d’un point de vue scientifique, économique ou éthique?
  • Quels facteurs sociaux et éthiques, le cas échéant, devraient être intégrés à la conception et à la mise en oeuvre d’un régime canadien de protection de la propriété intellectuelle des formes de vie supérieures? Comment devraient-ils être intégrés?

Deux événements ont amené le CCCB à s’intéresser à la question de savoir si les formes de vie supérieures devaient être brevetées, et suivant quelle procédure. Le premier fut la décision rendue en 1998 par la Cour fédérale, Section de première instance, voulant qu’une souris génétiquement modifiée ne pouvait faire l’objet d’un brevet en vertu de la Loi sur les brevets du Canada. (Cette décision a été entendue en appel par la Division d’appel de la Cour fédérale du Canada qui a conclu en 2000 que la souris pouvait faire l’objet d’un brevet.) Le gouvernement du Canada a depuis lors sollicité la permission d’en appeler de cette décision auprès de la Cour suprême du Canada. Le deuxième événement fut le début de l’examen, en 1999, des dispositions de l’ADPIC (l’entente de l’Organisation mondiale du commerce sur les droits de propriété intellectuelle) qui portent sur le brevetage de plantes et d’animaux (cet examen se poursuit).

Cueillette de renseignement. Depuis 1999, le CCCB a commandé une série de rapports de recherche pour étudier en profondeur les questions susmentionnées. Il a aussi tenu trois audiences avec des parties intéressées – l’industrie, les organismes non gouvernementaux et les scientifiques – au cours desquelles il a recueilli les points de vues de ceux qui sont le plus reliés et touchés par le brevetage dans le domaine de la biotechnologie. Le Comité a aussi passé en revue les sondages d’opinion publique pertinents.

Analyse des enjeux. Après avoir étudié les rapports qu’il a commandés, les commentaires des parties intéressées et les sondages d’opinion, le Comité a rédigé quatre questions qu’il aimerait débattre plus en profondeur. Elles sont :

  • Que devrait englober l’expression formes de vie supérieures? La définition pourrait inclure les organismes vivants (les animaux non humains, les plantes, ainsi que les organes et autres éléments constitutifs du corps) de même que les matériaux dérivés de ces organismes.
  • Quels sont les avantages et les désavantages de recourir à des amendements législatifs plutôt qu’à l’interprétation juridique de la Loi sur les brevets ou à des lignes directrices de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada?
  • Les préoccupations d’ordre éthique et sociales devraient-elles être traitées en fonction de l’octroi de droits de propriété intellectuelle à des formes de vie supérieures? Si oui, de quels mécanismes le Canada devrait-il se doter pour traiter ces préoccupations dans le cadre de ses lois sur la propriété intellectuelle? Ces questions devraient-elles être du ressort de l’Office de la propriété intellectuelle du Canada ou d’une entité distincte?
  • Quelle position le Canada devrait-il adopter sur le plan international au sujet de la brevetabilité des formes de vie supérieures? Quelle position devrait-il défendre pour concilier les objectifs stratégiques des divers traités internationaux sur la propriété intellectuelle, l’environnement, et les droits sociaux et économiques?

Consultations. Le CCCB a établi que pour l’aider à formuler ses conseils au gouvernement du Canada sur ces enjeux, il doit d’abord consulter les Canadiens au moyen de divers mécanismes. Le premier de ces mécanismes est le présent document de consultation. Le CCCB tiendra aussi des discussions en table ronde avec des intervenants multiples en avril et en mai 2001. Il invite le grand public à lui faire parvenir ses commentaires, au plus tard le 14 mai 2001, sur les questions soulevées dans le document de consultation, par la poste, en composant le numéro sans frais du CCCB ou en consultant son site Web. Pour appuyer les discussions, le CCCB a aussi préparé un résumé des principalux concepts émanant des mémoires de recherche qui ne pas abordés dans son document de consultation 2001, mais qui sont importants pour bien comprendre les enjeux de la propriété intellectuelle reliés à la biotechnologie et à la brevetabilité des formes de vie supérieures.

Rapport au gouvernement. Une fois que le CCCB aura complété les discussions en table ronde et qu’il aura reçu les commentaires du grand public, il préparera un rapport à l’intention du gouvernement du Canada sur les droits de propriété intellectuelle et la brevetabilité des formes de vie supérieures. Ce rapport sera rendu public durant l’été 2001 et les intéressés pourront l’obtenir en consultant le site Web du CCCB ou en appelant la ligne téléphonique sans frais du Comité. Le CCCB recueillera des commentaires pendant trois mois après la diffusion du rapport et il les étudiera ensuite afin de déterminer s’il est nécessaire de raffiner ses conseils.

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Questionnaire

Veuillez utiliser ce questionnaire pour fournir vos réponses aux questions posées dans le présent document de consultation.
Pour commencer, prière de fournir les renseignements qui suivent.

Veuillez indiquer à quel titre vous répondez (veuillez cocher une des cases suivantes) citoyen(s) canadien(s) intéressé(s).

citoyen(s) canadien(s) intéressé(s)
représentant(s) de l’industrie oevrant dans le domaine de la biotechnologie
représentant(s) d’un organisme non gouvernemental à but non lucratif
étudiant(s)
spécialiste(s) du milieu juridique
milieu universitaire ou chercheur(s)
autre intérêt en propriété intellectuelle biotechnologique et ou en brevetabilité des formes de vie supérieures

Veuillez indiquer votre niveau de connaissance sur la propriété intellectuelle en biotechnologie et la brevetabilité des formes de vie supérieures

peu élevé
moyen
très élevé

Soumettez-vous le questionnaire au nom d’un groupe ou d’un organisme?

Si oui, au nom de combien de personnes?

Si non, veuillez indiquer votre âge

25 ans ou moins
de 26 à 45 ans
de 46 à 65 ans
plus de 65 ans

Partie 1 — Questions particulières

Qu’est-ce qui devrait ou ne devrait pas faire l’objet d’un brevet?
1. Le Canada devrait-il permettre le brevetage des formes de vie supérieures? Si oui, existe-t-il des formes de vie supérieures ou des processus y étant reliés qui ne devraient pas être brevetables? Pour quels motifs?

2. La Loi sur les brevets devrait-elle inclure la défense basée sur l’utilisation expérimentale et/ou la méthode de l’exclusion à l’égard des traitements médicaux? La portée de chacune de ces options est-elle suffisante, ou devrait-elle être réduite ou élargie?

3. La Loi sur les brevets devrait-elle inclure le privilège du producteur et/ou accorder une exemption pour certaines obtentions végétales ou espèces d’animaux?

Avez vous d’autres commentaires à ce sujet?

Quels mécanismes de régie pourraient être changés?
4. Le Canada devrait-il maintenir le partage actuel des responsabilités entre le Parlement, l’Office de la propriété intellectuelle du Canada et les tribunaux? Ou une nouvelle façon de procéder serviraitelle mieux les Canadiens? Si oui, quelle devrait-elle être?

5. Quelle est la meilleure solution pour composer avec les valeurs et questions entourant la brevetabilité en biotechnologie : législation et règlements, lignes directrices et codes de conduite, ou interprétation judiciaire?

Avez vous d’autres commentaires à ce sujet?

Considérations sociales et éthiques
6. La Loi sur les brevets est-elle le meilleur outil pour s’occuper de questions sociales ou éthiques nées des innovations en biotechnologie? Si non, comment et/ou où ces questions devraient-elles être abordées?

7. La Loi sur les brevets du Canada devrait-elle comprendre une exclusion d’ordre public ou de moralité? Si oui, quelle devrait être la portée de cette disposition? Quelle entité administrative devrait être chargée de son application? Cette exclusion devrait-elle être évaluée pendant l’examen de la demande ou seulement plus tard par une procédure d’opposition?

Avez vous d’autres commentaires à ce sujet?

Obligations et compétitivité à l’échelle internationale
8. Dans quelle mesure, le cas échéant, l’esprit de chacune des obligations internationales du Canada se contredisent-elles quant à la brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus y étant reliés? Comment le Canada devrait-il régler un tel conflit?

9. Y a-t-il des contraintes à la mise en oeuvre par le Canada d’une politique optimale à l’égard de la brevetabilité des formes de vie supérieures et des processus y étant reliés? Si oui, comment le Canada devrait-il résoudre ce problème?

10. Le Canada est le seul pays du G-7 qui ne permet pas le brevetage de formes des vie supérieures. À quel point cela joue-t-il contre la compétitivité du Canada en tant que pays où faire de la R-D en biotechnologie?

11. Le Canada devrait-il changer certains éléments de son système de propriété intellectuelle pour aider son industrie de la biotechnologie à devenir plus compétitive? Si oui, quels changements devraitil préconiser?

Avez vous d’autres commentaires à ce sujet?

Partie 2 — Autres commentaires

Veuillez inscrire ici vos autres commentaires et observations.






1 Voir la référence à l’article du Dr Michael McDonald à l’annexe 2.

2 Plus spécifiquement, les brevets dont la demande a été déposée le 1er octobre 1989 ou après donnent droit à une protection par brevet de 20 ans à compter de la date du premier dépôt.

3 Bien que les êtres humains soient des animaux, la grande majorité des juristes ne croient pas, en général, qu’un être humain entier soit brevetable.

4 Même s’ils ne sont pas couverts par la définition de « forme de vie supérieure », les procédés d’utilisation de ces formes de vie pour fabriquer un produit ou fournir un service sont aussi éventuellement admissibles à brevet. Il convient de souligner que certains procédés faisant appel à des végétaux ou à des animaux se limitent à laisser la nature faire son travail, alors que d’autres comportent des interventions humaines.

5 Assumer le leadership au prochain millénaire, Comité consultatif national de la biotechnologie, sixième rapport, Industrie Canada, 1998.

6 Quoique les lois nationales diffèrent sur la nature et la durée de la période de grâce, la Loi sur les brevets du Canada prévoit une période de grâce d’un an en ce qui a trait aux divulgations faites par l’inventeur ou par quelqu’un par l’entremise de l’inventeur.

7 Tous les grands partenaires commerciaux du Canada accordent actuellement des brevets sur des animaux entiers (sauf les êtres humains) et des végétaux entiers et sur un bon nombre entiers de composants des animaux et des végétaux, et aussi sur certains des processus faisant appel à des végétaux ou des animaux, mais leur méthode est différente. Le Canada et tous ses grands partenaires commerciaux accordent actuellement des brevets concernant du matériel génétique, qu’il soit d’origine animale, végétale ou humaine.

8 La directive européenne relative à la protection juridique des inventions biotechnologiques, par exemple, comprend une disposition d’ordre public ou de moralité qui permet de refuser d’accorder un brevet en invoquant le fait que l’utilisation commerciale de l’invention puisse causer de l’agitation ou des désordres publics importants ou qu’elle violerait des normes européennes fondamentales et partagées. L’ordre public peut comprendre, mais sans s’y limiter, la nécessité de protéger certaines valeurs fondamentales, la vie humaine, animale ou végétale, la santé, ou le besoin d’éviter de causer de sérieux torts à l’environnement. Une exclusion basée sur l’ordre public ou la moralité est discutée plus en détail dans la section intitulée « Considérations sociales et éthiques ».

9 Par exemple, lorsque l’on exclut un « être humain », il faut d’abord arrêter la définition d’un être humain. Ce faisant, nous devrons nous demander si les embryons humains ou des animaux comprenant un nombre important de gènes humains sont de fait des êtres humains.

10 Une loi pour refondre et unifier certaines lois portant sur la nourriture, les denrées agricoles, les denrées aquatiques et les facteurs de production agricole, pour amender la Loi sur l’Agence canadienne d’inspection des aliments, la Loi sur les sanctions administratives pécuniaires en matière d’agriculture et d’agroalimentaire, la Loi sur la santé des animaux, la Loi sur la protection des plantes et la Loi sur la protection des obtentions végétales, et pour abroger et amender d’autres lois en conséquence.

11 Par exemple, il existe des codes d’éthique qui s’appliquent aux pratiques médicales et aux recherches impliquant des humains et des animaux; diverses lois et politiques qui couvrent la vie privée et la confidentialité des renseignements personnels; et des codes de conduite professionnelle et industrielle.

12 European and Asian patent offices have this power; Canadian, U.S. and Australian offices do not. All countries agree that “ordre public” and morality are important; they differ only as to whether these concerns should be addressed within patent law or through specific laws and regulations.

13 Les bureaux des brevets en Europe et en Asie disposent de ce pouvoir; ceux du Canada et des États-Unis, non. Tous les pays conviennent que l’ordre public et la moralité sont importants; ils diffèrent seulement sur la question de savoir si cela relève d’une loi sur les brevets ou de lois et règlements spécifiques.

http://cccb-cbac.ca


    Création: 2005-07-13
Révision: 2005-07-13
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