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Comité consultatif canadien de la biotechnologie
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Brevetage des formes de vie supérieures et enjeux connexes : Sommaire des commentaires - réponses du CCCB au Rapport provisoire

Résumé de commentaires

Réactions au rapport provisoire du CCCB sur la propriété intellectuelle en biotechnologie et la brevetabilité des formes de vie supérieures

Le 6 juin 2002
Document préparé par le
Comité consultatif canadien de la biotechnologie

Le présent document rend compte de la vaste gamme de points de vue et d’opinions offerts au Comité consultatif canadien de la biotechnologie (CCCB) en réaction aux ébauches de recommandations contenues dans son rapport provisoire sur la brevetabilité des formes de vie supérieures. La majorité des personnes qui ont répondu à l’invitation du CCCB et ont fait part de leurs réactions avaient des intérêts particuliers à l’égard de la biotechnologie. Il s’agissait pour la plupart de membres de l’industrie de la biotechnologie, d’utilisateurs de ces technologies, de chercheurs industriels ou universitaires ou de bailleurs de fonds pour la recherche en biotechnologie. Le lecteur devra se rappeler que ce groupe de personnes ne constitue pas un échantillon aléatoire de la population canadienne. L’appui ou l’opposition à l’une ou l’autre des opinions exposées dans le présent document ne représente donc pas nécessairement le sentiment des Canadiens et des Canadiennes en général.

Malgré ces limites, les réactions reçues ont aidé à élaborer les recommandations à intégrer à notre rapport final, en nous permettant de mieux comprendre le vaste éventail des opinions concernant les enjeux abordés dans le rapport provisoire. À notre avis, ces opinions offrent une occasion importante de contre-vérifier les résultats de nos recherches et de nos consultations antérieures, et elles sont aussi le reflet de notre engagement à la transparence et à la consultation. Comme nous le faisions remarquer dans le rapport lui-même, les réactions des intervenants nous ont aidés à peaufiner nos recommandations et à donner plus de subtilité à l’analyse de ces recommandations.

En conséquence, tout en mettant les lecteurs en garde contre une lecture du présent document comme s’il donnait un aperçu révélateur de l’opinion actuelle de la population canadienne au sujet des enjeux abordés dans le rapport provisoire, nous croyons que le présent document offre un résumé utile des préoccupations soulevées par la question de la brevetabilité des inventions biologiques.

Démarches pour aborder les considérations sociales et éthiques

Statu quo : Aucun rôle pour le système de brevets

Les enjeux éthiques et sociaux continuent d’être abordés par le biais des mécanismes existants, dont le projet de loi sur la reproduction humaine assistée; le droit criminel; le droit de la concurrence; les règlements afférents à la Loi sur les aliments et drogues; les exigences imposées aux bailleurs de fonds et aux associations professionnelles concernant le respect de l’éthique dans le traitement des humains et animaux utilisés comme sujets de recherche, etc. Les enjeux nouvellement cernés continueraient d’être traités par les entités compétentes telles que le Parlement, les conseils subventionnaires et les conseils d’éthique des établissements hospitaliers, ce qui mènerait éventuellement à la promulgation de lois ou de règlements nouveaux ou à d’autres réactions pertinentes.

Cette option n’entraîne aucun changement à apporter à la Loi sur les brevets ou à son application, et elle offre ainsi l’avantage de la continuité, de la stabilité et de la prévisibilité, des conditions hautement valorisées par le monde des affaires. Elle présente cependant un désavantage en ce que des inventions qui soulèvent des inquiétudes sociales et éthiques semblables mais découlent d’autres champs d’activité ne seraient peut-être pas traitées de la même façon que les inventions de la biotechnologie.

Ajustement : Rôle limité pour le régime des brevets

Lorsque des préoccupations de nature sociale et éthique ont déjà été traitées dans le contexte des lois et des règlements ou par d’autres moyens, les décisions prises peuvent mener au refus, à la suspension ou à la restriction d’un brevet. Le régime de brevets pourrait demeurer prévisible (comme dans l’option du statu quo) en ce que les décisions sociales et éthiques déjà prises seraient connues des titulaires potentiels de brevets. L’uniformité du traitement accordé par le régime de brevets et par les décisions prises dans d’autres instances légales ou réglementaires peut également être perçue comme un avantage. Le désavantage principal tient à la nature réactive de l’option d’ajustement.

Adaptabilité : Rôle élargi pour le régime des brevets

Cette option est celle qui offre la plus vaste gamme de moyens pour tenir compte des considérations d’ordre social et éthique dans le contexte même du régime de brevets1. Un des avantages particuliers de cette option est que les enjeux tout nouveaux, qui n’ont pas encore été soumis à d’autres mécanismes de contrôle social, pourraient être réglés par le refus ou la restriction d’un brevet. Toutefois, cette qualité d’adaptation à des progrès nouveaux fait également intervenir une notion d’incertitude et d’imprévisibilité dans le régime de brevets, ce qui pourrait nuire à l’innovation et à l’investissement au Canada.


Ces trois démarches pouvant servir à aborder les préoccupations sociales et éthiques qui sont soulevées par la brevetabilité des formes de vie supérieures ou y sont liées, ont fait l’objet d’une description détaillée dans le rapport provisoire. Nous demandions aux lecteurs si cette description constituait une façon utile d’analyser la question et aussi de nous dire laquelle de ces trois démarches leur semblait la plus apte, en toute probabilité, à régler les enjeux qui les préoccupaient le plus.

Les personnes qui ont répondu conviennent généralement que ces démarches générales correspondent aux solutions de politique officielle dont le Canada peut se prévaloir. Toutefois, cette entente globale mise à part, nos correspondants diffèrent considérablement quant à leur démarche préférée. La plupart optent pour le statu quo ou pour l’adaptabilité, et même la majorité de ceux qui appuient ostensiblement la démarche d’ajustement favorisent, en réalité, la mise en place d’un mécanisme plus ouvert.

Tout en prévenant le lecteur de ne pas interpréter les réactions reçues comme l’expression de l’opinion des Canadiens dans leur ensemble, ou même d’un segment de la population canadienne, il convient de souligner que les réactions provenant de l’industrie préconisent fortement l’option du statu quo. Les personnes en faveur de cette démarche affirment que la Loi sur les brevets n’est pas l’instrument qui convient pour aborder les valeurs sociales et éthiques et que le Parlement dispose de meilleurs instruments, tels que les règlements et autres mesures législatives, pour pallier aux possibles effets négatifs de nature sociale et éthique de la brevetabilité des inventions de la biotechnologie. Certains sont d’avis que la brevetabilité des formes de vie supérieures ne crée aucun problème social, même s’ils conviennent que l’exploitation des inventions technologiques ainsi brevetées pourrait, à l’occasion, soulever des préoccupations.

D’autre part, la plupart des intervenants appartenant aux universités, à la fonction publique, aux organismes non gouvernementaux et ceux sans affiliation particulière favorisent la démarche d’adaptabilité. Selon eux, la brevetabilité des formes de vie supérieures a des répercussions directes et importantes qui ne peuvent être abordées qu’en ajoutant à la Loi sur les brevets un mécanisme axé sur l’éthique. Ces personnes ont tendance à préconiser l’instauration d’un processus d’examen éthique en parallèle au processus d’examen des demandes de brevet, et la création d’un groupe d’experts autonomes qui siégerait comme un tribunal distinct du Bureau des brevets et rendrait des décisions concernant les incidences sociales et éthiques d’une invention. Ils affirment aussi que leur position s’aligne sur celle exprimée dans les mesures législatives des grands partenaires commerciaux du Canada au sujet des brevets, et qu’elle ne devrait donc pas nuire à la recherche-développement au pays.

Réactions aux recommandations provisoires

  1. Le CCCB recommande que la que la Loi sur les brevets soit modifiée afin d’y inclure la déclaration suivante : Aucun brevet ne peut être accordé à l’égard d’un être humain à quelque étape que ce soit de son développement.

Cette recommandation reçoit l’appui unanime de toutes les personnes qui ont réagit au rapport provisoire. Un seul intervenant s’y oppose, non par principe mais en raison de la difficulté de définir la signification de termes tels que « être humain » et « à quelque étape que ce soit de son développement ».

Bien que suscitant un appui unanime, cette recommandation fait aussi l’objet de critiques considérables en raison de son manque de clarté. De quelque milieu qu’ils viennent, les intervenants soulignent l’importance de préciser la portée de l’exception concernant les êtres humains. La plupart font remarquer la nature illimitée des termes « être humain » et « à quelque étape que ce soit de son développement », et l’un d’entre eux signale que l’expression « être humain » comprend les aspects métaphysiques de l’existence humaine et qu’elle est donc beaucoup trop englobante.

Quoi qu’il en soit, les intervenants ne s’entendent pas sur la façon de clarifier le sens des expressions mentionnées. Certains souhaitent que l’exclusion s’applique seulement aux corps humains entiers, et d’autres voudraient que l’on exclue de la portée du droit des brevets les gènes humains et d’autres matières humaines. Les intervenants de l’industrie sont les plus nombreux à s’opposer à ce que l’exclusion s’étende au-delà des corps humains entiers, alors que les personnes appartenant aux universités, à la fonction publique, aux organismes non gouvernementaux et celles sans affiliation particulière sont les plus enclines à vouloir élargir la portée de l’exclusion à toute une gamme de matières humaines.

Certains intervenants, surtout ceux du secteur agricole, sont d’avis qu’il ne relève pas de leurs compétences d’offrir des commentaires sur cette recommandation.

  1. Le CCCB recommande que les formes de vie supérieures (plantes, graines et animaux non humains) qui satisfont aux critères de nouveauté, de non-évidence et d’utilité soient reconnues brevetables, sous réserve des limites imposées par les recommandations 3, 4 et 5 aux droits des brevets relatifs à ces formes de vie supérieures.

Les opinions relatives à cette recommandation sont nettement divisées selon qu’elles proviennent de l’industrie de la biotechnologie ou des milieux de l’agriculture et des organismes non gouvernementaux. Alors que les intervenants de l’industrie et des universités préconisent l’extension de la protection par brevet aux plantes et aux animaux, ceux qui utilisent les plantes et les animaux à des fins agricoles, et ceux qui redoutent la brevetabilité des plantes et des animaux à cause de ses incidences possibles sur l’environnement et le monde en développement, manifestent une forte opposition à cette recommandation.

Les intervenants de l’industrie font valoir le point de vue selon lequel, sans les brevets, ils seraient incapables d’investir dans les travaux de recherche-développement nécessaires à la mise en marché d’une gamme élargie de plantes et d’animaux. À leur avis, les brevets auront des effets positifs à la fois pour l’industrie de la génétique animale et pour l’environnement. Ils estiment aussi que si le Canada veut conserver sa position concurrentielle parmi ses grands partenaires commerciaux, il doit étendre la protection des brevets aux plantes et aux animaux tout en permettant aux créateurs de variétés végétales de demander des garanties en vertu de la Loi sur la protection des obtentions végétales.

Les personnes qui s’opposent à la brevetabilité des plantes et des animaux avancent des raisons nombreuses et diverses. Certains croient, par exemple, que le fait de breveter des plantes et des animaux est moralement répréhensible, surtout lorsqu’on tient compte de l’exclusion des êtres humains de toute protection par brevet. D’autres soutiennent que le régime de brevets, dans sa forme actuelle, est incapable d’aborder comme il convient la nature des inventions biotechnologiques et que, par conséquent, les plantes et les animaux ne devraient pas être brevetables.

L’opposition la plus virulente à la brevetabilité des formes de vie supérieures provient des intervenants des industries de la génétique animale et de l’élevage. Ceux-ci affirment que les brevets visant des animaux sont tout particulièrement inconvenants puisque la plus grande partie de la valeur d’un animal ne tient pas au gène particulier introduit par le titulaire du brevet, mais plutôt à la constitution génétique globale de l’animal, laquelle est le fruit de longues années de sélection et d’amélioration par les éleveurs. Ces personnes soulignent qu’en reconnaissant le fait qu’un brevet s’appliquera même à la progéniture porteuse d’une infime fraction des gènes originaux de l’animal, on se rend compte que ce genre de brevet représente une manne incroyable pour l’industrie de la biotechnologie, mais au dépens des secteurs de l’élevage et de la génétique. Finalement, elles soutiennent que les brevets nuiront profondément à l’industrie canadienne de l’élevage, laquelle, comme ils le font remarquer, est plus grande en importance que celle de la biotechnologie au Canada.

  1. Le CCCB recommande qu’une disposition sur le privilège des agriculteurs soit intégrée à la Loi sur les brevets pour spécifier que les agriculteurs ont le droit de conserver et de replanter des graines provenant de plantes brevetées ou de reproduire des animaux brevetés à condition, respectivement, que les générations descendantes de plantes ne soient pas vendues comme matériel reproducteur commercial et que le créateur d’un animal génétiquement modifié ne voit pas baisser la valeur commerciale de l’animal en question.

La plupart des personnes appuyant l’extension de la protection des brevets aux plantes et aux animaux sont opposées à l’inclusion d’un privilège de l’agriculteur, soutenant qu’une telle disposition détruirait le caractère incitatif de la protection offerte par les brevets. Leur position tient, pour l’essentiel, à ce que les titulaires de brevets sur des animaux et des plantes doivent recevoir la même protection que celle accordée aux détenteurs de brevets des autres secteurs. À leur avis, l’inclusion d’un privilège de l’agriculteur créerait une catégorie distincte de personnes autorisées à violer les droits d’un titulaire de brevet concernant un végétal ou un animal. Certains intervenants de l’industrie font remarquer qu’une telle disposition aurait pour effet de limiter la protection du brevet à une seule génération de végétal ou d’animal, ce qui, de leur point de vue, ferait monter le prix des graines de semence pour les agriculteurs et diminuerait la qualité des graines produites au Canada. Les intervenants de l’industrie affirment également que la présence d’une exemption de privilège de l’agriculteur dans la Loi sur les brevets aurait des répercussions différentes de celles des dispositions analogues de la Loi sur la protection des obtentions végétales.

La plupart des intervenants opposés à la brevetabilité des plantes et des animaux, y compris les membres d’organismes non gouvernementaux qui ont réagi au rapport provisoire, ne se prononcent pas sur la question du privilège de l’agriculteur, puisque ce privilège serait inutile en l’absence de brevets visant des plantes ou des animaux. Cependant, certains approuvent la disposition en question, soutenant qu’elle est nécessaire pour empêcher l’extension exagérée des droits de brevet aux générations futures de la plante ou de l’animal breveté. Ils rappellent que le secteur agricole est plus grand en importance que celui de la biotechnologie et ils préviennent le gouvernement qu’il ne serait pas sage d’accorder tant de droits au secteur de la biotechnologie que celui de l’agriculture s’en trouverait menacé.

Les personnes interrogées appartenant à la fonction publique et aux universités appuient l’inclusion d’un privilège de l’agriculteur dans la Loi sur les brevets au Canada.

  1. Le CCCB recommande que la Loi sur les brevets comprenne des dispositions qui mettront les contrevenants innocents à l’abri de poursuites pour violation de brevet lorsqu’il y a dissémination naturelle ou accidentelle de graines brevetées ou de matériel génétique breveté, ou insémination d’une bête par un animal breveté.

Les avis sont très partagés au sujet de cette recommandation. On observe même une division assez remarquable au sein du groupe d’intervenants de l’industrie de la biotechnologie. Certains croient qu’il serait préférable de traiter les cas de propagation accidentelle de plantes ou d’animaux en se basant sur le droit de l’environnement, la négligence selon la common law ou le droit civil en matière d’obligations. Ces intervenants soutiennent que l’inclusion de la disposition recommandée rendrait difficile l’exécution des droits des brevets concernant des plantes et des animaux, et d’autres se disent disposés à accepter une telle disposition à condition que l’exclusion soit décrite en langage clair (par exemple, en remplaçant « naturel ou accidentel », par « fortuit ») et que la personne se prévalant de la disposition soit tenue de donner des preuves scientifiques à l’appui de sa revendication.

Les intervenants du milieu de l’agriculture, de leur côté, déclarent que la disposition recommandée est une nécessité logique, compte tenu de la nature de la production agricole et de la difficulté d’empêcher des cultures brevetées de pousser spontanément.

  1. Le CCCB recommande que le Canada participe activement aux négociations internationales (telles que celles en cours dans le cadre du Protocole pour la biosécurité) sur les questions de responsabilité et de recours lorsqu’il y a dissémination naturelle ou accidentelle de graines brevetées ou de matériel génétique breveté, ou insémination d’une bête par un animal breveté.

Toutes les personnes qui ont répondu conviennent que le Canada devrait participer aux négociations internationales sur les questions de responsabilité à l’égard des organismes génétiquement modifiés. Un certain nombre font remarquer que, du point de vue de la personne victime du dommage, le fait que la plante, l’animal ou le matériel génétique en cause soit breveté ou non n’a aucune importance.

Certains intervenants soutiennent que le Canada devrait prendre la tête du mouvement dans ces négociations et qu’il devrait se doter de stratégies internes permettant de traiter d’abord le problème de la propagation accidentelle.

  1. Le CCCB recommande que la Loi sur les brevets soit modifiée afin d’y inclure une exception dans les cas d’utilisation pour la recherche et l’expérimentation. La disposition devrait stipuler qu’il n’y a pas violation de brevet lorsqu’on se sert d’un procédé breveté ou d’un produit breveté dans le but (a) d’entreprendre une étude privée ou non commerciale, ou (b) d’étudier la matière d’une invention brevetée afin d’en examiner les propriétés, de l’améliorer ou de créer un nouveau produit ou procédé. En formulant cette disposition, il faudrait veiller à éviter les différences possibles entre les incidences qu’elle pourrait avoir sur les diverses technologies ou les divers secteurs économiques.

Tous les commentaires sauf un sont en faveur d’une exemption pour usage expérimental, mais certains intervenants de l’industrie de la biotechnologie préféreraient que cette question soit réglée par les tribunaux, et non par le Parlement. Ces derniers s’appuient sur l’alinéa 55.2(6) de la Loi sur les brevets, lequel stipule que la jurisprudence canadienne contient toujours une exemption canadienne pour usage expérimental, et ils récusent le besoin de préciser encore plus cette question. Certains affirment que, de toute manière, la plupart des titulaires de brevet ne feraient pas valoir leurs droits à l’encontre d’entités non commerciales qui effectuent des recherches. Par ailleurs, les intervenants du secteur des plantes et des graines de semence croient que la présence d’une exemption pour la recherche et l’expérimentation dans la Loi sur la protection des obtentions végétales commande l’ajout d’une disposition semblable à la Loi sur les brevets, si les plantes deviennent brevetables.

D’autres intervenants de l’industrie de la biotechnologie et ceux de la fonction publique, des organismes non gouvernementaux, des universités et du monde professionnel sont tous d’accord avec cette recommandation. Un représentant de l’industrie soutient que l’exception ne doit pas être interprétée comme s’appliquant aux éléments brevetés intégrés à un produit final, et un universitaire réclame que l’exception s’applique à l’utilisation d’une invention à des fins didactiques.

Un intervenant a fait remarquer que le Canada n’a pas adopté complètement la formulation de l’exception telle qu’elle existe en Europe. Pour ce faire, selon lui, il faudrait remplacer par « et » le « ou » du sous-alinéa a). Cette même personne souhaite aussi l’inclusion de précisions claires selon lesquelles le sous-alinéa b) ne permettrait pas d’utiliser un outil de recherche sans détenir une licence à cette fin.

  1. Le CCCB recommande que les conseils subventionnaires fédéraux, le Comité national de l’éthique dans la recherche sur les humains et les autres organes compétents en la matière étudient des mécanismes de partage des bienfaits à tirer de recherches (et de leur exploitation commerciale) avec les collectivités ou les populations qui participent aux recherches en question.

En général, les intervenants appuient cette recommandation, mais ils trouvent que sa formulation manque de précision. Certains proposent de renforcer la recommandation en demandant au CCCB d’insister pour que les conseils subventionnaires de la recherche et les autres organismes compétents ne se limitent pas à étudier des options, mais élaborent effectivement des politiques régissant le partage des bienfaits de la recherche. Ils demandent également au CCCB de mieux définir le concept de connaissances traditionnelles. D’autres intervenants soutiennent qu’il faut porter une attention toute spéciale à la Convention sur la biodiversité et à ses dispositions concernant l’obtention du consentement éclairé des détenteurs de connaissances traditionnelles.

Un seul intervenant de l’industrie de la biotechnologie s’oppose à la recommandation parce que, selon lui, tout partage direct des avantages ne doit pas enlever la valeur des brevets. Il soutient que les collectivités et les populations tirent déjà des bienfaits de la recherche en ayant accès aux résultats et aux produits qui en découlent. Un autre intervenant défend le point de vue contraire en affirmant que les titulaires de brevet devraient être obligés de réserver une part des profits tirés de l’exploitation commerciale de telles innovations et de l’investir dans des recherches visant à améliorer la santé des collectivités participantes.

  1. Le CCCB recommande que le Canada appuie le travail entrepris au sein de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) par le groupe de travail sur les ressources génétiques, les connaissances traditionnelles et le folklore pour déterminer si, et comment, une forme de propriété intellectuelle pourrait servir à protéger les connaissances traditionnelles.

Cette recommandation suscite peu de commentaires, mais certains intervenants voudraient que l’on examine l’interaction entre les droits de brevet et l’article 8(j) de la Convention sur la biodiversité, lequel demande aux pays membres de préserver et de promouvoir les connaissances traditionnelles. L’un de ces intervenants rappelle qu’un débat est en cours, dans le contexte de la Convention, sur la possibilité que la question des connaissance traditionnelles soit abordée par le groupe de travail spécial à composition non limitée sur la mise en oeuvre de l’article 8(j) et des dispositions connexes, et le groupe de travail spécial à composition non limitée sur l’accès et le partage des bienfaits. Certains intervenants de l’industrie sont d’avis que la question de la brevetabilité des connaissances traditionnelles est sans intérêt pratique, puisque les critères prescrits par la Loi sur les brevets (nouveauté, utilité et non-évidence) ne seraient pas respectés par les connaissances traditionnelles, lesquelles, de par leur nature même, ne sont pas nouvelles.

  1. Le CCCB recommande que l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (OPIC) explique clairement que la description de l’état actuel des connaissances, ou « antériorité », comprenne autant que possible, dans les demandes de brevet, les connaissances traditionnelles rendues publiques par transmission orale ou publication écrite.

Cette recommandation suscite des opinions diverses. Certains intervenants de l’industrie de la biotechnologie ne croient aucunement justifié de déroger à la pratique actuelle concernant les connaissances traditionnelles, et affirment qu’il serait à la fois irréalisable et injuste d’obliger spécifiquement les déposants de demande de brevet à divulguer les connaissances traditionnelles qu’ils ont pu exploiter. Les règles actuelles concernant les demandes de brevet n’obligent pas à présenter un dossier d’antériorité complet. De l’avis de ces intervenants, compte tenu de la nature souvent intangible des connaissances traditionnelles, il serait difficile pour un déposant de trouver, et encore plus difficile de décrire avec la moindre exactitude les connaissances traditionnelles dont il s’est servi. Le fardeau ainsi imposé causerait un préjudice indu aux déposants de demande de brevet en biotechnologie.

Ce point de vue n’est pas partagé par tous les intervenants de l’industrie de la biotechnologie. L’un d’entre eux juge que la recommandation est valable.

Par ailleurs, les détenteurs de connaissances traditionnelles n’appuient pas tous cette recommandation. Selon l’un d’eux, aussi longtemps que l’on aura pas déterminé qui contrôle et possède les connaissances traditionnelles, celles-ci ne devraient pas être mises à la disposition du public, afin d’éviter qu’elles soient prises et exploitées sans la permission de la collectivité qui les a produites et sans lui en procurer les avantages en découlant.

  1. Le CCCB recommande que soit lancé un programme de recherches systématiques au sujet des incidences des brevets de biotechnologie sur les services de santé. Il s’agirait d’étudier, entre autres choses :
    • l’effet incitatif ou dissuasif des brevets d’invention biotechnologique sur l’exécution de travaux de recherche fondamentale et appliquée concernant les aspects préventifs, diagnostiques, thérapeutiques et épidémiologiques des soins de santé et de leur prestation
    • l’effet des brevets sur les incitatifs et sur la capacité des titulaires de brevet ou des compagnies à commercialiser leurs inventions et à les mettre ainsi à la disposition du système de soins de santé
    • l’effet du brevetage des inventions biologiques sur le coût net des soins de santé; ces recherches comprendraient des analyses comparées des coûts et des avantages de méthodes biotechnologiques et de solutions de rechange
    • l’effet du brevetage des inventions biologiques sur les facteurs autres que le coût qui influent sur l’accessibilité d’innovations importantes en matière préventive, diagnostique et thérapeutique
    • les méthodes permettant d’aborder les préoccupations relatives aux incidences du coût des inventions nouvelles sur le système de soins de santé; il faudrait, par exemple, étudier les questions touchant les permis, l’accès obligatoire, les groupes importants d’acheteurs et procéder à une estimation de la valeur médicale et sanitaire qui justifie le recours aux formulaires provinciaux et les autres mécanismes semblables utilisés à l’endroit d’autres types de technologie médicale
    • l’effet des obligations internationales du Canada sur les diverses options à envisager pour traiter les incidences des brevets de biotechnologie sur le système de soins de santé
    • la question de savoir si les brevets de biotechnologie ou de biologie comportent des caractéristiques justifiant qu’ils soient traités différemment de ceux des autres inventions brevetées servant aux soins de santé.

Les commentaires reçus portent sur un certain nombre d’enjeux relatifs aux soins de santé, aux politiques et aux processus.

Un seul intervenant, de l’industrie de la biotechnologie, se prononce contre cette recommandation. La plupart des intervenants, qu’ils représentent l’industrie de la biotechnologie, les groupes d’utilisateurs, les organismes non gouvernementaux, les universités ou la fonction publique, considèrent que la recherche recommandée est importante. Toutefois, certains intervenants soulignent que cette recherche doit être objective, basée sur la science et réalisée en coordination avec les parties concernées. Un intervenant demande au CCCB de se pencher sur la question de déterminer quelle entité gouvernementale ou autre devrait financer cette recherche.

Un certain nombre de commentaires proposent d’autres questions sur lesquelles faire porter la recherche recommandée, notamment celle à savoir si le Canada s’est occupé suffisamment de la recherche sur les déterminants sociaux de la santé. Certains proposent aussi d’étudier les effets des brevets dans le secteur agricole, surtout sur le plan de l’accès et des coûts. Certains autres sont d’avis que la recherche doit être exécutée à l’échelle nationale, et font remarquer que l’Ontario a apporté une contribution importante à ce débat dans son rapport préconisant une démarche coordonnée pour étudier les répercussions du dépistage génétique et du brevetage du vivant sur l’avenir des soins de santé.

Le seul représentant de l’industrie qui soit opposé à cette recommandation s’en justifie par la crainte qu’elle ne retarde la mise en oeuvre des autres recommandations du CCCB. Selon lui, les brevets de biotechnologie ne devraient pas recevoir un traitement différent de celui des autres brevets d’invention et toute recherche qui serait supprimée à cause de ces brevets pourrait amener les intervenants du secteur à se tourner vers d’autres marchés. Par ailleurs, un membre d’un organisme non gouvernemental se dit étonné que le CCCB formule quelque recommandation que ce soit au sujet de la brevetabilité des formes de vie supérieures alors qu’il n’existe aucune recherche au sujet des incidences que le brevetage des plantes et des animaux pourrait avoir sur les soins de santé.

  1. Le CCCB recommande que l’OPIC élabore et rende publiques des directives explicatives concernant les inventions biologiques. Ces directives devraient être mises à jour de façon régulière et fournir des paramètres raisonnables aux demandeurs et aux examinateurs, y compris sur les sujets suivants :
    • l’interprétation des critères d’émission d’un brevet (c’est-à-dire, nouveauté, non-évidence, utilité et envergure de l’application) en ce qu’ils s’appliquent aux matières vivantes et aux inventions biologiques;
    • la façon dont des connaissances traditionnelles rendues publiques par transmission orale doivent être décrites dans le cadre de l’exposé de l’état de la technique (voir aussi la recommandation suivante);
    • la procédure à suivre par les déposants de demande de brevet de même que les échéances de base pour chaque étape de la demande.

Toutes les personnes qui ont réagi à cette recommandation lui donnent leur appui en affirmant qu’elle rehausserait la transparence du régime de brevets ainsi que la clarté et l’uniformité du processus, tant pour les déposants que pour les examinateurs de demandes. Quelques intervenants réclament la mise à jour permanente de toute directive formulée, et la participation du public à cette mise à jour. Certains proposent que l’OPIC émette des lignes directrices pertinentes par le biais du Recueil des pratiques du Bureau des brevets.

  1. Le CCCB recommande que l’OPIC élabore, rende publiques et mette à jour périodiquement des normes de service, basées sur les pratiques exemplaires internationales, concernant le traitement des demandes de brevet.

Les personnes qui commentent cette recommandation sont en sa faveur. Un intervenant fait remarquer qu’il faudra donner à l’OPIC les ressources financières nécessaires pour se conformer aux normes de rendement, quelles qu’elles soient.

  1. Le CCCB recommande que l’OPIC rende compte périodiquement de son rendement en rapport avec ces normes et avec les mesures prises pour s’y conformer, par exemple, l’accroissement des capacités et/ou des compétences à la disposition de l’Office.

Les personnes qui commentent cette recommandation sont en sa faveur. Un intervenant fait remarquer que l’OPIC présente déjà une partie de cette information dans son rapport annuel.

  1. Le CCCB recommande que le Canada travaille en faveur d’une harmonisation plus poussée des politiques et des procédures relatives aux brevets, à l’échelle internationale.

Les intervenants appuient cette recommandation, mais un représentant d’une association professionnelle soutient que l’harmonisation ne devrait pas signifier forcément que le Canada doit souscrire à une démarche uniforme en tout. Selon cette personne, dans toutes les négociations qui auront lieu, le Canada devrait veiller aux intérêts des inventeurs canadiens et de la population canadienne. Un membre d’un organisme non gouvernemental affirme que le Canada ne devrait pas « harmoniser » ses normes avec celles des États-Unis, mais plutôt, au moment de définir sa position, considérer les effets de la Convention sur la biodiversité et ceux des accords commerciaux internationaux. Un intervenant de l’industrie de la biotechnologie est d’avis que le Canada devrait adopter une procédure de prolongation de la durée d’un brevet qui soit semblable à celles utilisées en Europe pour tout ce qui a trait aux délais imposés par la réglementation.

  1. Le CCCB recommande que le Canada ratifie aussitôt que possible le Traité sur le droit des brevets, lequel précise des exigences formelles relatives au dépôt d’une demande de brevet et au maintien d’un brevet.

Tous les intervenants favorisent cette recommandation.

  1. Le CCCB recommande que l’OPIC établisse une procédure permettant de contester un brevet en invoquant qu’il est invalide ou de nul effet, c’est-à-dire, que l’invention ne répond pas aux critères de brevetabilité, que le brevet demandé est d’une portée exagérée, que le brevet a été obtenu parce que le déposant a caché des renseignements importants ou qu’il a sciemment fourni des renseignements destinés à tromper. Pour être efficace, il est essentiel que la nouvelle procédure soit plus rapide, moins lourde et moins coûteuse que les méthodes actuelles.

Cette recommandation reçoit l’appui général de la plupart des intervenants de l’industrie de la biotechnologie, des groupes d’utilisateurs et des organismes non gouvernementaux. Compte tenu de l’expérience passée des autres pays en matière de procédures de contestation, plusieurs intervenants soulignent l’importance de veiller à ce que le processus soit véritablement rapide et peu coûteux. Les représentants d’associations professionnelles, tout particulièrement, insistent sur l’importance de mettre en oeuvre une procédure claire et pratique. Ils demandent plus de précisions sur le mode de fonctionnement de la procédure prévue, par exemple : Qui serait autorisé à déposer une contestation? Qui pourrait témoigner devant les tribunaux chargés de trancher au sujet de la contestation? Y aurait-il une période pendant laquelle le public pourrait donner son avis? Certains proposent que la procédure de contestation puisse être invoquée avant et après la délivrance d’un brevet.

Deux représentants de l’industrie de la biotechnologie s’opposent à cette recommandation, faisant valoir que les mécanismes actuels prévus par la Loi sur les brevets sont suffisants.

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1 Bien que qualifiée d’adaptabilité, cette option n’ouvre pas la porte à toutes les possibilités, mais elle est plutôt limitée par la portée de la disposition d’ordre public ou de bonnes moeurs, laquelle, de son côté, doit concorder avec les paramètres établis dans l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce de l’Organisation mondiale du commerce.

http://cccb-cbac.ca


    Création: 2005-07-13
Révision: 2006-06-22
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