TABLE DES MATIÈRES
Le lundi 7 avril 1997
Projet de loi C-369. Motion visant à la deuxième lecture 9351
M. Mills (Broadview-Greenwood) 9355
Projet de loi C-46. Reprise de l'étude de la motion de deuxième lecture 9359
M. Mills (Broadview-Greenwood) 9369
M. White (Fraser Valley-Ouest) 9370
M. White (Fraser Valley-Ouest) 9374
M. White (Fraser Valley-Ouest) 9379
M. White (Fraser Valley-Ouest) 9379
M. White (Fraser Valley-Ouest) 9380
Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 9383
Mme Tremblay (Rimouski-Témiscouata) 9383
Projet de loi C-395. Adoption des motions de présentation et de première lecture. 9386
Adoption de la motion 9386
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais) 9389
Projet de loi C-46. Reprise de l'étude de la motion dedeuxième lecture 9389
Suspension de la séance à 16 h 57 9401
Reprise de la séance à 17 h 21 9401
Adoption de la motion; deuxième lecture du projet de loi et renvoi à un comité 9405
Projet de loi C-27. Étude à l'étape du rapport 9405
Le président suppléant (M. Milliken) 9406
Reprise de l'étude de la motion sur le budget 9411
Adoption de la motion par 117 voix contre 48 9411
Rejet de la motion d'amendement par 112voix contre 47 9412
Rejet de la motion par 135 voix contre 23 9413
Reprise de l'étude de la motion et de l'amendement 9413
Rejet de l'amendement par 116 voix contre 23 9413
Rejet de la motion par 128 voix contre 24 9414
9351
CHAMBRE DES COMMUNES
Le lundi 7 avril 1997
La séance est ouverte à 11 heures.
_______________
Prière
_______________
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[
Français]
M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans,
BQ) propose: Que le projet de loi C-369, Loi modifiant le Code
criminel (jeux et paris), soit maintenant lu une deuxième fois et
renvoyé à un comité.
-Monsieur le Président, le 12 mars dernier, je me présentais
devant le Sous-comité des affaires émanant des députés pour
présenter un projet de loi d'initiative privée qui aurait permis
l'ouverture des casinos à bord des bateaux de croisière qui
naviguent sur le Saint-Laurent et les Grands Lacs.
Ce projet de loi n'était pas une fantaisie du député fédéral de
Beauport-Montmorency-Orléans, mais bien un besoin exprimé,
après une longue consultation, auprès des dirigeants des ports, des
organismes du milieu et des municipalités environnantes du
Saint-Laurent. Plusieurs conseils municipaux sont même allés
jusqu'à adopter des résolutions appuyant le projet de loi C-369. Je
n'en nomme que quelques-unes, et non les moindres: la Ville de
Québec, la Ville de Beauport, dans mon comté, la Ville de
Charlesbourg et la Ville de l'Ancienne-Lorette. Mes consultations
se sont aussi orientées vers les armateurs, les organismes
promouvant la navigation sur le Saint-Laurent et les associations
touristiques.
Comme vous le savez, un projet de loi ne se prépare pas sans
l'aide de consultants et de spécialistes en législation. Ces derniers
ont effectué les recherches nécessaires et m'ont appuyé dans la
préparation du projet de loi que je présente aujourd'hui à la
Chambre des communes. Ce projet était donc sérieux, bien préparé
et nécessaire à tous les intervenants du milieu.
Pourtant, le Sous-comité des affaires émanant des députés,
composé majoritairement de députés de l'autre côté de la Chambre,
n'a pas cru bon d'accepter le projet de loi C-369 comme pouvant
faire l'objet d'un vote par les représentants du peuple, soit les
députés de cette Chambre.
(1110)
Je me permets quand même d'exposer le bien-fondé de ce projet,
si ce n'est pour convaincre les députés d'en face, à tout le moins
pour renseigner la population sur les agissements pas toujours
compréhensibles du parti au pouvoir.
Le projet de loi C-369 demande de modifier le Code criminel à la
section «jeux et paris» pour permettre à toute personne, à bord d'un
navire de croisière internationale naviguant dans les eaux
canadiennes, de mettre sur pied et d'exploiter un casino pour les
passagers du navire, lorsque certaines conditions sont remplies.
Il y en a quatre très importantes que nous pourrions citer.
Premièrement, la croisière effectuée par le navire ne doit pas
constituer du cabotage, donc du transport à l'intérieur des eaux
uniquement. Deuxièmement, le casino ne doit pas être accessible
aux passagers du navire dans l'heure précédant l'arrivée du navire à
un port canadien. Troisièmement, le casino n'est pas accessible
lorsque le navire est accosté dans un port canadien. Quatrièmement,
le casino n'est pas accessible dans l'heure suivant le départ du
navire d'un port canadien.
Vous comprendrez que les demandes faites dans ce projet de loi
privé ne viennent pas bouleverser le Code criminel canadien, mais
proposent simplement quelques amendements pour améliorer le
développement économique.
Tous les députés présents dans cette Chambre, et vous
remarquerez qu'ils ne sont pas très nombreux, savent ou devraient
savoir que le Code criminel actuel permet l'ouverture des casinos en
eaux internationales seulement. Cela veut dire, en clair, que tout
navire qui opère un casino et qui veut se rendre dans les villes
longeant le Saint-Laurent et les Grands Lacs doit le fermer lorsqu'il
croise l'île d'Anticosti.
Pourtant, le Saint-Laurent et les Grands Lacs représentent un
plan d'eau majestueux qui se compare aux plus grands fleuves du
monde. Le Saint-Laurent n'est ni une mer, ni une rivière. C'est un
spectacle qui évoque la puissance et la grandeur, et qui colle très
bien à l'image générale du Canada et de ses grands espaces. La
possibilité d'y voir des baleines ajoute à cet aspect féerique.
Le Saguenay, quant à lui, est un fjord saisissant qui offre aux
croisiéristes une expérience visuelle exceptionnelle. Avec ses
falaises escarpées, il donne l'occasion aux voyageurs de
s'approcher de cette nature déchirée et puissante.
La ville de Québec constitue, d'après plusieurs enquêtes, l'escale
préférée des croisiéristes sur cette route. Avec ses quais à deux pas
de l'arrondissement historique et touristique, avec le Château
Frontenac qui impose sa présence et avec ses environs uniques,
Québec constitue un point fort orienté sur la culture et l'histoire
dans un
9352
environnement accueillant. D'ailleurs, Québec est la seule ville
fortifiée d'Amérique du Nord reconnue par l'UNESCO comme
faisant partie du patrimoine mondial.
La ville de Montréal, port d'embarquement et de débarquement,
offre une expérience urbaine unique en Amérique du Nord: une
métropole dynamique qui a un cachet très particulier. Montréal peut
combler aussi bien le tourisme religieux que le tourisme à la
recherche de night life, le connaisseur d'art, l'amateur de sports, le
promeneur curieux et l'avide consommateur.
En fait, le Saint-Laurent offre une grande variété d'attraits tant
naturels qu'humains. Mais cette variété possède un fil conducteur
unique: le fait français. Le Saint-Laurent propose aux Américains
une expérience de dépaysement dans un cadre sécurisant.
De plus, les infrastructures d'accueil des navires de croisière
sont, dans le Saint-Laurent, très adéquates. Les quais de Québec et
de Montréal sont situés dans les secteurs des vieux ports, à
proximité des arrondissements touristiques. Les croisiéristes
apprécient particulièrement la propreté des lieux.
Le produit Saint-Laurent représente, tant pour la clientèle que
pour les armateurs, une destination sûre, complètement à l'abri du
terrorisme. En plus, les villes de Québec et de Montréal offrent aux
visiteurs un sentiment de sécurité que les citoyens américains
recherchent activement en vacances.
Les efforts de concentration entre les deux grands points
d'attraction du Saint-Laurent et entre les ports et les villes de la
route New York-Montréal ont donné, au cours des dernières
années, des résultats probants au niveau de la notoriété de la zone de
déploiement auprès des armateurs.
(1115)
Les statistiques démontrent que les armateurs considèrent que les
casinos leur rapportent 15 p. 100 de leur revenu. Étant dans
l'impossibilité de les opérer pendant plusieurs heures, sinon
quelque deux jours lorsqu'ils empruntent le fleuve Saint-Laurent et
son golfe, plusieurs préfèrent privilégier un autre port de mer que
ceux desservant les villes situées le long du Saint-Laurent et des
Grands Lacs.
De plus, lorsqu'un touriste prend des renseignements pour
effectuer une croisière et qu'il s'avère qu'il est un adepte des
casinos, il préfère s'embarquer vers un port de mer ne comportant
pas cette restriction de fermeture du casino pour plusieurs jours.
L'industrie des croisières vit à la jonction des industries
touristiques et maritimes. Elle a la particularité d'être une industrie
en forte croissance, ce qui lui accorde un statut particulièrement
intéressant pour les intervenants touristiques et maritimes, d'autant
plus que ceux-ci connaissent au Québec une certaine stagnation
dans leur secteur respectif.
Le produit de vacances-croisière connaît une popularité
spectaculaire partout dans le monde et, singulièrement, en
Amérique du Nord. En effet, depuis 1970, alors qu'on dénombrait
500 000 croisiéristes, l'industrie nord-américaine des croisières a
connu une croissance supérieure à 800 p. 100 pendant cette période.
Le taux de croissance annuel moyen de 9,4 p. 100 par année de
1980 à 1992 a permis à l'industrie d'atteindre les 4,3 millions de
passagers en 1992. Et en 1993, les statistiques démontrent qu'il a
dépassé les 4,7 millions.
La croisière a donc réussi à s'imposer sur le marché comme une
valeur sûre. Toutes les associations internationales prévoient que la
clientèle des croisières devrait atteindre les 8 millions de passagers
annuellement à la fin du siècle, et ce, malgré un certain
fléchissement de la croissance de la demande qui devrait diminuer
de 1,4 p. 100 par année au cours des prochaines années.
Le potentiel du marché des croisières est donc énorme, en
particulier si l'on tient compte du fait que seulement 5 à 6 p. 100 des
Américains ont déjà fait l'expérience d'une croisière. D'ici à deux
ans, on estime que ce marché représentera 50 milliards de dollars à
l'échelle mondiale. Un marché touristique de cette envergure
suscite, il va sans dire, une concurrence féroce entre les zones de
croisière.
L'évolution du marché du Saint-Laurent ne suit
malheureusement pas le rythme de développement des marchés
nord-américains. Le fleuve Saint-Laurent constitue un tronçon clé
dans la zone de croisière Canada-Nouvelle-Angleterre. Les
océaniques y naviguent principalement entre New York et
Montréal, sur un circuit de sept jours. Le Saguenay, Québec et
Montréal sont les points d'attraction qui déterminent le circuit dans
le Saint-Laurent. La zone de déploiement
Canada-Nouvelle-Angleterre, avec ses 420 415 jours-couchettes,
ne représente que 1,2 p. 100 du marché total des croisières qui
atteindra, dans deux ans, 50 millions de jours-couchettes.
La route dont fait partie le Saint-Laurent ne détient qu'une très
petite part du marché et se situe en fait au douzième rang des routes
de croisière. Cette position est même menacée par les efforts
soutenus et structurés que font le Sud-Est asiatique, l'Australie, la
Nouvelle-Zélande et l'Extrême-Orient.
Lorsque l'on regarde l'évolution du trafic dans le Saint-Laurent
depuis 1980, on note une croissance régulière avec deux années
particulièrement bonnes. Ces anomalies statistiques sont liées
directement au fait que la route est considérée comme
particulièrement sécuritaire. Rappelons-nous la saison 1987, qui a
été très bonne pour nous parce qu'elle a suivi l'attentat terroriste en
Méditerranée de l'Achille Lauro. En 1991, l'année a été très bonne,
parce qu'il y a eu la guerre du Golfe.
Avec ces deux années records, les statistiques nous démontrent
que le taux de croissance moyen annuel sur le Saint-Laurent se situe
autour de 4,7 p. 100. Par contre, le taux a été nettement moins bon
que celui de l'industrie en général, soit 9,4 p. 100.
(1120)
Lorsque l'on scrute les statistiques pour l'ensemble de l'industrie
en Amérique du Nord, on se rend bien compte que le Saint-Laurent
progresse deux fois moins rapidement que l'ensemble du marché.
Une enquête sommaire auprès des décideurs des lignes maritimes
présente deux handicaps: la température et l'impossibilité d'ouvrir
les casinos. C'est ce qu'on appelle les deux irritants au
développement de la route du Saint-Laurent. La température, il est
bien
9353
difficile de la changer, mais si on levait l'autre irritant, par
l'adoption de ce projet de loi, je pense que l'on mettrait les chances
de notre côté.
L'impact économique des croisières est un élément de
développement essentiel pour les villes situées le long du
Saint-Laurent. Une étude menée à Montréal en 1991 a établi la
dépense moyenne par passager à 113 $ et à 100 000 $ par navire,
soit des dépenses totales de 5,3 millions de dollars pour les
croisiéristes, et de4,1 millions pour les opérateurs de navires.
Les revenus du gouvernement du Québec pour ces dépenses
s'établissent à 1,4 million de dollars et à 700 000 $ de revenus pour
le gouvernement fédéral. Outre les retombées en argent sonnant et
en emplois directs et indirects, les croisières dans le Saint-Laurent
génèrent des retombées non mesurables mais tout aussi importantes
pour la rentabilité des entreprises de l'industrie touristique.
Je cite quelques exemples: le cycle de déploiement des navires,
soit l'automne, représente une saison privilégiée pour les croisières
dans le Saint-Laurent, et à cela s'ajoute l'attrait des couleurs
d'automne, particulièrement au mois d'octobre. En effet, le gros de
l'achalandage se produit en septembre et en octobre, allongeant
ainsi une saison touristique estivale souvent trop courte et
permettant indirectement aux compagnies d'autobus, aux
restaurants, aux attractions et aux musées d'obtenir de meilleurs
rendements. On pourrait citer aussi les pilotes du Saint-Laurent, qui
ont été défendus par le Bloc québécois au sujet du maintien du
pilotage pour des raisons particulièrement environnementales, qui,
eux aussi, pourraient y voir leur compte par le développement du
marché de l'industrie de la croisière.
En commercialisant activement les forces du Saint-Laurent
comme destination et en éliminant l'irritant que représente la
fermeture des casinos, le Saint-Laurent devrait pouvoir atteindre
des taux de croissance similaires et peut-être même supérieurs au
taux de croissance global de l'industrie. Les enquêtes informelles
auprès des armateurs sont très concluantes. La législation sur les
casinos est l'obstacle numéro un à une présence plus active des
navires de croisière dans le Saint-Laurent.
Vous comprendrez que les lignes maritimes soient très réservées
face à cette problématique puisqu'elles ne veulent pas dévoiler à
leur clientèle que les casinos représentent une source de revenu de
15 p. 100 de leur chiffre d'affaires. Elles sont plus enclines à laisser
voir à leur clientèle que les casinos existent pour permettre aux
croisiéristes de se distraire, s'ils le désirent.
Un changement de la législation permettant des casinos sur le
Saint-Laurent aurait plusieurs effets positifs dont le premier et le
plus important est d'accroître le trafic et d'augmenter les retombées
économiques et fiscales, soit une évaluation de 215 millions de
dollars pour les deux prochaines années.
Comme vous le savez, tous les bateaux empruntant le
Saint-Laurent doivent obligatoirement être pilotés et menés à bon
port par des pilotes aguerris qui sont encadrés par la Corporation des
pilotes du Bas-Saint-Laurent, comme j'en parlais tout à l'heure.
Imaginez le nombre d'emplois créés et sauvegardés pour les pilotes
du Saint-Laurent si un tel amendement permettait d'augmenter de
10 p. 100 le nombre de bateaux sur le Saint-Laurent.
Une étude démontre que si nous conservons le statu quo, en l'an
2000, nous aurons un peu plus de 50 000 passagers, alors que si
nous modifions la loi, il nous serait possible d'atteindre au-delà de
101 000 passagers pour la grande région de Québec et pour le
Saint-Laurent. Ceci s'explique par le fait que les premières années,
le Saint-Laurent rattraperait le temps perdu avec une augmentation
de 20 p. 100 par année, et les autres années, il croîtrait au rythme de
l'ensemble de l'industrie des croisières au niveau international.
Si le projet de loi que je présente aujourd'hui n'est pas repris par
le gouvernement actuel, ayant été considéré comme ne pouvant pas
faire l'objet d'un vote par le Comité des affaires émanant des
députés, je vous expose les effets négatifs du statu quo. Le statu quo
priverait d'abord le Québec et le Canada de revenus importants dans
la mesure où celui-ci condamne le Saint-Laurent à un taux de
croissance du trafic de croisière bien en deçà du taux de croisière
dans le monde.
Le statu quo marginalise le Saint-Laurent, puisqu'il s'agirait du
seul fleuve de cette importance dans le monde où les casinos sont
interdits sur les croisières océaniques.
(1125)
Le statu quo envoie un message non équivoque aux armateurs de
croisières océaniques qui ne sont pas vraiment les bienvenus dans le
Saint-Laurent. Les ports et les offices de tourisme travaillent
activement pour attirer les lignes, mais le gouvernement fédéral
n'en veut pas. Le statu quo envoie un message aux armateurs sur le
fait que le Canada est un pays surréglementé qui ne peut adapter sa
réglementation aux réalités économiques quotidiennes.
De plus, le statu quo confirme que l'application de la loi fédérale
peut être très différente, selon que la façade maritime est Halifax ou
Vancouver.
En conclusion, comment la population du Québec peut-elle
comprendre que ce qui est permis dans le Pacifique à partir de
Vancouver ne le soit pas sur le Saint-Laurent? Par contre, les
Québécoises et les Québécois comprendront bien que si le Québec
était souverain, il posséderait tous les leviers politiques pour
décider de son avenir économique, ce qui ne semble pas être le cas à
l'intérieur de la fédération canadienne.
À plusieurs reprises, les Québécoises et les Québécois ont dit au
Canada anglais qu'ils désiraient, comme le disait Jean Lesage, être
«maîtres chez eux». Et le Canada anglais répond: «What does
Quebec want?» Eh bien, ce que nous voulons, c'est pouvoir assurer
notre développement économique avec les outils nécessaires, ce qui
est impossible actuellement, car ils sont contrôlés par des décideurs
qui ne semblent pas vouloir laisser le Québec se développer, comme
il pourrait le faire s'il était souverain. Je viens d'en donner un autre
exemple déterminant.
[Traduction]
M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de
la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le
Président, le Canada est le seul pays au monde à posséder deux
voies maritimes très fréquentées par les navires de croisière
interna-
9354
tionaux et donnant accès à ses eaux intérieures. Ces cours d'eau sont
le fleuve Saint-Laurent et le passage intérieur de la côte ouest.
Lorsqu'ils quittent les eaux internationales pour entrer dans le
fleuve Saint-Laurent, les navires de croisière internationaux
empruntent les eaux intérieures du Canada. À partir de l'île
d'Anticosti, ces bateaux naviguent dans des eaux provinciales.
Les navires de croisière internationaux qui empruntent le passage
intérieur entre la partie continentale de la Colombie-Britannique et
l'île de Vancouver effectuent habituellement un voyage aller-retour
entre Vancouver et l'Alaska. Selon l'interprétation canadienne du
droit de la mer, les bateaux qui naviguent dans le passage intérieur
se trouvent en eaux intérieures américaines ou canadiennes. Ils
n'empruntent pas les eaux internationales.
Toujours selon l'interprétation canadienne du droit de la mer,
l'Arctique canadien constitue, quoiqu'il soit moins fréquenté, une
troisième voie pouvant donner lieu à une navigation importante de
navires de croisière internationaux dans des eaux intérieures
canadiennes.
Plusieurs autres ports ou voies de navigation canadiens
demeurent accessibles aux navires de croisière internationaux
pendant les saisons favorables. Cela supposerait moins de
navigation en eaux intérieures, notamment les eaux provinciales.
Les casinos embarqués équipés de machines à sous font partie
des loisirs que les navires de croisière internationaux offrent à leurs
passagers. Ce derniers semblent d'ailleurs beaucoup les priser.
Comme les casinos embarqués assurent des revenus aux
compagnies maritimes, la possibilité d'exploiter un casino à bord
les influencera vraisemblablement dans le choix de leurs itinéraires
de croisière.
De leur côté, les localités portuaires du Canada attendent avec
impatience les retombées en matière de tourisme et d'industrie que
les navires de croisière pourraient amener, sans oublier que les
passagers des navires de croisière pourraient revenir, en voiture ou
en avion, pour visiter la région.
Je suis sûr que le gouvernement du Canada est conscient de
l'intérêt que présente cette possibilité de croisières internationales
qui tient grandement à coeur aux localités portuaires. Il importe de
noter qu'il y a eu plusieurs autres demandes d'exploitation de
maisons de jeu privées à des fins commerciales dans les eaux
intérieures du Canada, sur des navires qui ne font pas de croisières
internationales.
(1130)
Je crois que la question des maisons de jeu commerciales privées
dans les eaux intérieures mérite considération et devrait être étudiée
attentivement. On ne devrait pas se limiter aux navires effectuant
des croisières internationales.
Les dispositions du Code criminel sur les jeux de hasard se
trouvent à la partie VII. On peut dire, dans l'ensemble, qu'elles
interdisent toute forme de jeu de hasard, à part celles que le code
autorise précisément.
L'article 207 précise une exception aux infractions énumérées à
l'article 206, soit que les provinces et les territoires peuvent
exploiter un grand nombre de types de loterie, à l'exception des
appareils à sous. Ces types de loterie autorisés ne peuvent être mis
sur pied qu'à l'intérieur d'une province ou d'un territoire ou, s'il
existe une entente de coopération, dans l'autre province ou territoire
partie à l'entente.
Il semble que le gouvernement provincial puisse actuellement
exploiter un casino avec appareils à sous sur un navire se trouvant à
l'intérieur des eaux provinciales, mais que les jeux de dés n'y soient
pas autorisés. Toutefois, une province ne peut posséder
d'installations de ce genre dans les eaux canadiennes, si elles ne
sont pas de compétence provinciale.
De la même manière, une province peut délivrer une licence pour
la tenue d'une loterie à l'intérieur des eaux provinciales, mais cette
licence ne peut s'appliquer à des installations se trouvant dans des
eaux intérieures qui ne sont pas de compétence provinciale.
À l'heure actuelle, les dispositions du Code criminel n'autorisent
pas la tenue de jeux de hasard privés à des fins commerciales, sauf à
très petite échelle et seulement lorsque la province ou le territoire a
obtenu une licence à cette fin. En vertu de l'article 207 du Code
criminel, le montant à payer pour participer à une loterie
commerciale privée autorisée ne doit pas dépasser deux dollars et la
valeur du prix ne doit pas dépasser cinq cents dollars. Très peu de
provinces autorisent les loteries commerciales privées.
Aux termes de l'alinéa 202(1)b) du Code criminel, l'importation
au Canada de machines ou de dispositifs de jeu ou de pari constitue
une infraction. Les dispositions du Code criminel relatives au jeu
prévoient une exception dans le cas de l'importation de matériels de
jeu dans le cadre d'une loterie légitime comme une loterie
provinciale ou autorisée par une province, mais aucune exception
similaire dans le cas de l'exploitation non réglementée, à des fins
commerciales, de casinos privés sur les navires de croisières
internationales. Il semble que même si les matériels de jeu ne sont
pas exploités durant la navigation dans les eaux canadiennes, tout
navire de croisière internationale navigant dans les eaux
canadiennes qui est doté de machines à sous ou d'un casino enfreint
techniquement les dispositions du Code en vigueur.
Comme nous le savons tous, il incombe au procureur général de
chaque province de faire appliquer le Code criminel et d'engager
des poursuites pour toute infraction à ses dispositions.
À mon avis, l'amendement au Code criminel proposé dans le
projet de loi C-369 va au-delà de la légalisation de la présence de
matériels de jeu sur les navires de croisières internationales lorsque
ces navires se trouvent dans les eaux canadiennes. Les changements
proposés dans le projet de loi C-369 modifieraient
substantiellement les dispositions du Code criminel relatives au jeu.
Le projet de loi C-369 propose des changements qui auraient
pour effet de légaliser l'exploitation non réglementée à des fins
commerciales d'un casino privé sur un navire de croisière
internationale se trouvant dans les eaux canadiennes. Cela diffère
notablement de l'approche que la province de Québec désire
prendre si le
9355
Code criminel est modifié pour permettre les casinos sur les navires
de croisière internationale pendant qu'ils sont dans nos eaux
intérieures.
En 1996, la province de Québec a adopté une mesure législative
qui permet la création de licences provinciales pour les casinos
commerciaux à bord des navires de croisière internationale pendant
qu'ils sont dans les eaux provinciales. Ces licences seraient
accordées aux navires qui font des croisières internationales. Le
Québec reconnaît qu'avant de pouvoir mettre en place sa mesure
législative il faudra une modification aux dispositions du Code
criminel concernant les jeux.
Un des principaux problèmes de la légalisation du jeu, c'est de
s'assurer de l'intégrité des exploitants. Une réglementation est donc
nécessaire. La réglementation ferait en sorte qu'il y ait des
vérifications des antécédents des exploitants, des fournisseurs, des
investisseurs et des principaux employés. Elle prévoirait également
des systèmes de surveillance, notamment pour empêcher toute
tricherie et pour qu'il y ait un système de vérification en place.
Le projet de loi C-369 permettrait les casinos non réglementés
dans les eaux canadiennes. Il ne traite pas de la question de
l'intégrité du jeu offert.
Le deuxième aspect notable du projet de loi C-369 est
l'élargissement de l'étroit créneau qui existe pour le jeu privé au
Canada. Ce créneau est actuellement si étroit que l'approche du
Canada est simplement de légaliser les grands casinos exploités et
autorisés par une province ou un territoire. Pratiquement tous les
bénéfices du jeu au Canada sont utilisés à des fins publiques, soit
par l'intermédiaire d'organismes de charité soit directement sous
forme de recettes de l'État.
(1135)
La situation au Canada est radicalement différente de celle aux
États-Unis où les bénéfices des casinos vont à des intérêts privés,
l'État ne profitant que de l'impôt sur ces bénéfices. Le projet de loi
C-369 entraînerait une modification importante de la politique en
matière de jeux qui ne devrait être envisagée qu'après une étude
attentive des répercussions.
Le troisième aspect notable du projet de loi C-369 serait
l'introduction du mot «casino» dans le Code criminel. Le terme
casino, qui n'est pas défini dans le projet de loi C-369, le sera dans
le règlement qui sera proclamé par le procureur général du Canada
dans les six mois suivant l'entrée en vigueur de la loi. On suppose
que, en laissant au procureur général le soin de définir ainsi le sens
du terme casino, on lui donne toute latitude d'énumérer les
multiples formes de jeux qui peuvent être offertes dans un casino.
Il semblerait que les paquebots de croisière internationale voient
dans les machines à sous l'élément central des casinos qu'elles
exploiteraient à bord. Il serait concevable que, du fait que le projet
de loi permet au procureur général de définir le terme casino, ce
dernier autorise, sur les paquebots de croisière internationale,
certaines formes de paris pour lesquelles les provinces ne peuvent
accorder de permis, comme c'est le cas des machines à sous, ou qui
sont interdites dans les provinces, telles que les dés.
J'ai un certain nombre d'autres réserves que le temps ne me
permet pas d'expliquer. Toutefois, comme on l'a déjà dit, nous
sommes plutôt en faveur d'une révision en profondeur des
dispositions du Code criminel régissant les jeux dans les eaux
canadiennes.
Nous remercions le député d'avoir proposé ce projet de loi pour
faire avancer l'étude de ce dossier.
M. Dennis J. Mills (Broadview-Greenwood, Lib.): Monsieur
le Président, je voudrais tout d'abord féliciter le député de
Beauport-Montmorency-Orléans d'avoir soulevé cette question.
Il y a quelques semaines, j'ai parrainé le projet de loi d'initiative
parlementaire C-353, qui proposait de modifier le Code criminel
afin d'établir un règlement régissant les jeux de hasard sur Internet.
Tous les députés à la Chambre savent bien que le réseau Internet
offre la possibilité de participer à des jeux et paris à l'échelle
internationale sans réglementation aucune.
Durant la première heure de débat sur mon projet de loi, tous les
députés, tant ceux du Bloc québécois que ceux du Parti réformiste et
du Parti libéral, ont convenu de renvoyer le projet de loi au Comité
de la justice en vue d'une évaluation en profondeur.
Alors que j'écoutais le député parler de son projet de loi ce matin,
il a proposé de modifier le Code criminel afin d'autoriser les jeux et
paris et l'exploitation d'un casino complet sur les paquebots de
croisière qui naviguent sur le Saint-Laurent et les Grands Lacs. Je
ne peux m'empêcher de constater certaines similitudes entre ce
projet et le projet de loi C-353.
Il est important que tous les députés à la Chambre et toute la
population comprennent pourquoi nous nous intéressons à ce
secteur de l'économie que constituent les jeux de hasard.
L'industrie des jeux et paris a littéralement explosé récemment, non
seulement parce que les gens aiment parier et profiter des diverses
possibilités du jeu, mais aussi parce que, dans le cadre de
l'économie mondiale, le secteur touristique prend de plus en plus
d'ampleur. Pour bon nombre de pays, le tourisme est le facteur qui
assure la viabilité de leur économie. Au cours des quatre ou cinq
dernières années, des députés de la Chambre des communes ont, en
manifestant leur appui, encouragé le gouvernement à quadrupler le
budget publicitaire de Tourisme Canada. Ils comprennent que c'est
dans l'intérêt public puisqu'un grand nombre d'emplois sont
tributaires du tourisme.
(1140)
De nos jours, le tourisme est une industrie compétitive. Par
tourisme, on n'entend plus aujourd'hui le fait qu'un couple ou une
famille fasse un voyage dans une autre région du pays ou parte en
vacances à l'autre bout du monde. Le tourisme est aujourd'hui lié, à
bien des égards, au monde des affaires. En effet, il y a dans notre
économie des secteurs où de grandes associations cherchent à
joindre l'utile à l'agréable quand elles tiennent leurs congrès et
leurs foires commerciales.
C'est ainsi que, chaque année, les Shriners se réunissent à Las
Vegas et que plusieurs autres congrès y ont lieu. Bien des villes et
des pays veulent accueillir de tels congrès. La concurrence est vive.
Lorsqu'il s'agit de choisir une ville, les organisateurs de congrès ne
s'intéressent pas uniquement aux hôtels, aux centres de congrès et
9356
aux installations pour foires commerciales. Ils prennent également
en compte l'aspect des loisirs. Ils songent à ce qu'on appelle le
théâtre de participation. Ils envisagent les manifestations sportives
auxquelles il serait possible de participer. Ils pensent aussi aux jeux.
Dans son projet de loi, le député de
Beauport-Montmorency-Orléans insiste, cela va de soi, sur le
Québec, mais il n'exclut pas les Grands Lacs. Je l'ai constaté dans
ses observations. Il a été très catégorique quand il a dit que, en
permettant des casinos à bord des paquebots de croisière
internationale, on augmenterait considérablement l'activité
touristique dans la région de Charlevoix, à Québec et ailleurs.
Lorsque ces navires de croisière jettent l'ancre à proximité de ces
lieux, les touristes qui débarquent ont l'habitude de dépenser
beaucoup d'argent. Ils dépensent beaucoup dans les restaurants.
Parfois, ces voyageurs sont tellement fatigués d'être à bord du
navire qu'ils aiment bien passer trois ou quatre jours à terre. Les
localités qui les accueillent profitent donc d'énormes retombées
économiques.
Je suis d'accord avec le secrétaire parlementaire du ministre de la
Justice pour dire que cette question doit faire l'objet d'une approche
globale. Je n'ai rien contre cela. Je n'estime pas moins que les
parlementaires doivent saisir l'occasion. Nous devrions faire en
sorte que la composante réglementaire du projet de loi du député
puisse être étudiée dans son intégralité. Le secrétaire parlementaire
du ministre de la Justice a parlé de la tenue d'enquêtes et de la
nécessité de contrôler les activités de tous les intervenants. Voilà qui
est impératif, si l'on veut protéger le consommateur.
J'estime également que, si un paquebot de croisière
internationale pénètre dans nos eaux, les eaux qui relèvent tant du
Canada que d'une province, il doit être assujetti à une forme de taxe
quelconque. Le trésor public doit y trouver son compte.
(1145)
Les exploitants de ces navires de croisière seraient heureux de
négocier une sorte de droit. Même si les jeux et les paris ne sont pas
réglementés, nous savons tous que cette activité existe. Il n'y a pas
un seul navire de croisière au monde où les passagers ne s'adonnent
pas au jeu. De toute évidence, cette activité n'est pas légale, mais les
gens s'y livrent entre eux. C'est comme les preneurs de paris ou les
jeux clandestins.
J'ai toujours été d'avis que nous, en tant que législateurs,
sommes dans une bien meilleure position pour élaborer un cadre
général de réglementation de tout ce secteur qu'est le jeu. Je crois
également que le gouvernement du Canada doit se préoccuper à
nouveau de comprendre ce secteur. Si cela suppose que nous
modifiions le Code criminel pour autoriser les jeux de dés, nous
devrions le faire.
Voyons ce qui se passe au casino de Windsor, un des centres de
jeux les plus rentables actuellement au Canada. Nous savons que,
dans un avenir assez rapproché, le casino de Windsor devra
affronter une vive concurrence du centre de jeux de Détroit.
Contrairement au casino de Windsor, celui de Détroit offrira des
jeux de dés. Le casino de Windsor subira donc le contrecoup de ces
jeux. C'est un autre secteur où nous devons examiner très
attentivement le Code criminel pour nous assurer que les jeux de dés
font partie de la réglementation.
En 1979, le premier ministre de l'époque, Joe Clark, a
essentiellement cédé à chacune des provinces la responsabilité des
jeux, qui incombait jusqu'alors du gouvernement fédéral. Nous
savons évidemment pourquoi les provinces protègent les jeux
comme la prunelle de leurs yeux. C'est parce qu'ils rapportent des
recettes énormes. Si nous essayons de priver les provinces de ces
recettes, elles opposeront une certaine résistance.
Le projet de loi parrainé par le député de Beauport offre une
occasion de faire du très bon travail dans toute l'industrie du
tourisme, et je le félicite de sa contribution.
[Français]
M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le
Président, il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi
C-369 présenté par mon collègue, le député de
Beauport-Montmorency-Orléans. Avant de débuter, j'aimerais
faire quelques commentaires sur l'exposé des deux derniers
intervenants.
Le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice s'est perdu
dans un dédale de législations, de loteries privées, de surveillance
de loteries, de toutes sortes de choses qui pourraient être
subreptices, qui pourraient être illégales. À ce moment-là, il a fait
un geste de non-acceptation, en disant qu'il fallait étudier le projet
de loi dans son ensemble, car c'était comme une sorte de danger
public.
L'autre député libéral de la région de Toronto a dit que c'était une
initiative intéressante de la part de mon collègue de
Beauport-Montmorency-Orléans, mais que par contre, cela
ouvrait essentiellement le débat. On n'a pas du tout traité de la
question de fond, mais on a dit savoir que sur certains bateaux de
croisière, les armateurs maintiennent les casinos ouverts comme les
paris illégaux, etc.
Cela n'est pas vraiment le sujet du débat. Ce que le député de
Beauport-Montmorency-Orléans a très clairement exprimé,
c'est que dans la circulation maritime et les croisières qui se font
dans les eaux internationales, il y a des permis de casinos à
l'intérieur de ces mêmes bâtiments. La comparaison par rapport au
Code criminel canadien se fait en fonction de certains ports de
l'Atlantique ou du Pacifique. Lorsqu'un bateau de croisière se
dirige vers Vancouver, il est dans les eaux internationales, et une
heure ou une heure et demie plus tard, il accoste au quai de
Vancouver. Cela est vrai aussi pour Halifax ou Saint-Jean.
La différence, c'est que les bateaux de croisière qui sillonnent le
Saint-Laurent le font pour toutes les raisons exprimées par mon
collègue de Beauport-Montmorency-Orléans, soit pour la beauté
majestueuse du fleuve, le fait de voir des baleines et même, à
certaines occasions, des bélugas qui sont en voie d'extinction,
l'immensité du fjord du Saguenay et les féeries de l'automne.
(1150)
De plus, les bateaux de croisière internationale naviguent près
d'un millier de kilomètres sur le fleuve Saint-Laurent et, durant
toute cette période, ils ne peuvent ouvrir leurs casinos. Tout ce que
le projet de loi du député de Beauport-Montmorency-Orléans
9357
demande, c'est de permettre l'utilisation du casino lorsque le navire
est à une heure de l'amarrage ou de l'accostage. Cette législation ne
se compare pas avec celle de Vancouver ou d'Halifax, parce que
c'est à l'intérieur des terres canadiennes.
On voit vraiment ce qui se produit dans la fédération canadienne,
où on veut instaurer une législation unique et entière pour
l'ensemble du pays, alors que, clairement, l'économie ou
l'accessibilité ou même les richesses naturelles ne sont pas les
mêmes. Le projet de loi proposé par mon collègue est clairement
spécifique au fleuve Saint-Laurent, si l'on veut, mais il peut aussi
être assujetti aux Grands Lacs. Il est certain que si ce projet de loi
était adopté, peut-être que certains bateaux de croisière se
rendraient aussi jusqu'aux Grands Lacs, lors de croisières un peu
plus longues.
Il ne faut pas constamment mentionner, comme le député de la
région de Toronto le disait, que cela peut occasionner certains
problèmes législatifs. Il a même mentionné la législation de la
province de Québec qui autorise l'exploitation de casinos sur des
bateaux de croisière internationale. Malheureusement, on vit dans
un système fédéral, et cela relève de la loi fédérale, le Code
criminel. Dès qu'un bateau de croisière pénètre dans les eaux
côtières canadiennes, on doit fermer le casino.
Le député de la région de Toronto a mentionné qu'il savait, ou
qu'il avait entendu dire qu'on pouvait opérer les casinos même si la
loi ne le permettait pas. Il s'agit alors de revenus perdus pour le
gouvernement. En même temps, en ce qui a trait à la promotion de
ces croisières, pour les bien nantis qui les font, il s'agit d'un attrait
additionnel de savoir que, tout en longeant le Saint-Laurent sur une
période de près de 1 000 kilomètres, ils peuvent quand même, après
avoir admiré les beautés du paysage, pouvoir s'adonner à certains
jeux au casino. C'est la seule et unique demande du député de
Beauport-Montmorency-Orléans.
Je voudrais faire un lien avec le programme du Parti libéral qui,
tout au long de la dernière campagne électorale, et encore
maintenant, a dit: «jobs, jobs, jobs». Il faut dire que l'attrait
touristique amène un volume supérieur de croisiéristes dans le port
de Québec. La ville de Québec a d'ailleurs appuyé cette démarche
par une résolution, et bientôt, ma collègue de Québec défendra elle
aussi ce dossier. La ville de Charlesbourg a également appuyé, par
une résolution, le projet de loi de mon collègue.
Il est clair que si de nombreux bateaux de croisière se rendent
dans les ports de Montréal et de Québec ainsi que dans le fjord du
Saguenay, des emplois directs et indirects seront créés. On a
mentionné tout à l'heure le pilotage. On peut aussi mentionner que,
lorsque les croisiéristes descendent dans des villes, comme
Montréal et Québec, ils dépensent des sommes d'argent qui
profitent à l'économie.
En voyant les députés du Parti libéral, au Sous-comité des
affaires émanant des députés, ne pas accepter même que le projet de
loi de mon collègue puisse faire l'objet d'un vote et qu'on le renvoie
aux calendes grecques pour en faire une étude générale, j'ai de la
difficulté à comprendre qu'on veuille créer des «jobs, jobs, jobs». Je
pourrais même appeler cela un certain acharnement thérapeutique,
quand on pense aux propositions du ministre des Pêches qui, dans
son projet de loi sur la Garde côtière, nous propose des tarifs
supplémentaires pour le dragage ou pour les services de la Garde
côtière. C'est peut-être, encore une fois, pour nuire à l'économie
touristique par rapport aux bateaux de croisière.
En terminant, je veux seulement dire qu'il est clair que,
lorsqu'une loi fédérale, qu'elle relève du Code criminel, de
l'environnement ou d'un autre domaine, se veut une entité
territoriale complète, il est assuré qu'en certains endroits, cela peut
nuire. Il est clair que sur le plan touristique, pour ce qui est de la
région du Saint-Laurent et de la province de Québec, ce projet de loi
nuit à l'attrait touristique et aux retombées économiques.
(1155)
C'est la raison pour laquelle mon collègue de
Beauport-Montmorency-Orléans a proposé ce projet de loi et
j'ose croire que les députés d'en face en feront, non seulement
l'étude, mais qu'ils voudront bien l'étudier pour qu'il devienne un
projet de loi faisant l'objet d'un vote.
[Traduction]
M. Roger Gallaway (Sarnia-Lambton, Lib.): Monsieur le
Président, je suis heureux d'appuyer l'objectif de ce projet de loi et
de féliciter le député de Beauport-Montmorency-Orléans de
l'avoir présenté.
L'industrie des jeux est sans aucun doute celle qui a la plus forte
croissance en Amérique du Nord à l'heure actuelle. Il est temps que
nous, à la Chambre des communes, commencions à examiner
sérieusement les répercussions que cela peut avoir sur l'économie
des ports des Grands Lacs et sur le Saint-Laurent. Il est également
temps pour nous d'examiner la façon dont on peut utiliser de façon
plus efficiente la voie maritime, le Saint-Laurent et les Grands Lacs.
Il est temps d'exploiter les possibilités dont on profite déjà dans le
sud des États-Unis ainsi que sur sur la côte ouest des États-Unis et
du Canada.
La petite ville de Skagway en Alaska a une population de 712
habitants. C'est le terminal septentrional des bateaux de croisière le
long de la côte ouest. Cette petite localité a imposé une taxe de vente
municipale sur tous les produits et services et l'année dernière, elle
a perçu quelque 42 millions de dollars, ce qui représentait 4 p. 100
de tout l'argent dépensé par les passagers des bateaux de croisière,
car il n'y a aucune autre façon de rejoindre cette localité.
À bien des égards, la voie maritime est sous-utilisée. Nous
savons quelle industrie connaît la plus forte croissance et que les
sociétés qui exploitent des navires de croisière dans le sud des
États-Unis durant l'hiver adoreraient pouvoir naviguer sur les
Grands Lacs durant l'été.
Comme un de nos collègues l'a signalé, c'est une occasion
d'employer des gens. Selon les estimations que j'ai pu obtenir de
croisiéristes, quatre navires d'une capacité de 600 à 700 passagers
qui sillonneraient les Grands Lacs créeraient 10 000 emplois en
Ontario et au Québec durant la saison. Cette saison est très brève,
mais il y a quelque 80 millions d'Américains, à une journée de
route, qui aimeraient pouvoir faire une croisière sur le
Saint-Laurent et les Grands Lacs.
C'est une mesure législative sérieuse. Les Américains sont sur le
point de modifier leur loi sur les eaux territoriales. Ils sont disposés
à discuter de la loi Johnson pour ce qui est des navires de croisière
9358
offrant un service transfrontalier. Les Grands Lacs relèvent de la
compétence du gouvernement fédéral. Le moment est venu d'agir
pour établir une industrie qui va créer de l'emploi et aura d'énormes
retombées dans le secteur du tourisme.
Comme on l'a déjà dit, un ancien premier ministre a déjà
beaucoup cédé, mais les eaux relèvent encore de notre compétence.
[Français]
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le
Président, je ne pense pas avoir le temps de parler de toutes les
facettes de ce projet de loi. Cependant, en tant que députée du comté
de Québec, je me sens directement concernée par ce projet de loi qui
concerne l'opération des casinos sur des bateaux de croisière sur le
fleuve Saint-Laurent.
Je me sens concernée, parce qu'il y a un impact économique
majeur pour le comté de Québec. Vous savez que nous avons été
élus, ici à la Chambre des communes, pour défendre les intérêts du
Québec et les intérêts de nos commettants et commettantes. Ce
projet de loi est un exemple concret de ce que peut faire le Bloc
québécois, c'est-à-dire faire bouger les choses.
Chaque année, on sait que des milliers de dollars sont perdus,
faute d'avoir accès à une clientèle qui ne choisit pas ces destinations
parce que, présentement, le Code criminel ne permet pas aux
bateaux de croisière d'opérer des casinos.
(1200)
C'est un projet de loi sur lequel on a beaucoup tergiversé au cours
des sept dernières années, alors que ce projet de loi aurait dû être
adopté. De plus, j'aimerais souligner, je ne sais si je peux le faire, la
mauvaise foi du ministre de la Justice, parce que, lors de certaines
questions posées par mon collègue de
Beauport-Montmorency-Orléans, le ministre disait qu'il
consulterait et que, s'il y avait une demande officielle de la part du
ministre québécois, il verrait à modifier la loi.
D'autres questions ont amené aussi des réponses un peu floues de
la part du ministre. Présentement, il est en train de consulter et
d'examiner. Je pense qu'il y a assez d'intervenants dans ce dossier
qui ont exprimé leur souhait et leur volonté, et je vais en nommer
quelques-uns: les armateurs, les associations touristiques, les
organismes de promotion de la navigation, les dirigeants des ports
nationaux et les municipalités des villes du Saint-Laurent, dont
celle de Québec. Le conseil municipal a adopté une résolution
demandant que la loi soit modifiée.
Je pense que le ministre tergiverse, je ne sais pas si on peut
appeler cela de la mauvaise foi, mais le gouvernement du Québec a
adopté une loi qui permet que des casinos opèrent sur les bateaux de
croisière naviguant sur le Saint-Laurent. Je me pose la question à
savoir pourquoi ce projet de loi n'a pas été accepté comme pouvant
faire l'objet d'un vote par les députés de ce Parlement, qui sont en
majorité des députés du Parti libéral, au Comité des affaires
émanant des députés.
Je ne peux que déplorer ce manque de volonté politique du
gouvernement d'en face. On sait que cela a un impact économique
majeur sur le développement économique des villes du
Saint-Laurent. On peut évaluer à 50 milliards de dollars les
retombées économiques à venir. Seulement 5 ou 6 p. 100 des
Américains ont fait cette expérience et c'est une valeur sûre que de
pouvoir compter sur cette manne économique.
La ville de Québec, dans mon comté, est une ville touristique qui
a toutes les infrastructures pour recevoir ce type de clientèle. C'est
un marché qui est en pleine expansion et si la loi était modifiée, on
pourrait prévoir une croissance économique de 10 p. 100 par année.
On passerait de 40 000 passagers pour atteindre 95 000 passagers,
soit des retombées économiques de 215 millions de dollars. On sait
qu'à Vancouver, on peut compter sur 701 000 passagers, avec des
retombées économiques proportionnelles à l'achalandage.
Pourquoi les villes du Saint-Laurent ne pourraient-elles pas avoir
droit aussi à une partie de cette clientèle? Est-ce que cela fait partie
de la mauvaise volonté du gouvernement de ne pas changer la
législation qui permettrait aux bateaux de croisière d'ouvrir leurs
casinos, soit une heure avant l'arrivée ou une heure après leur départ
des différents ports des villes du Saint-Laurent?
Dans différents endroits au Canada où il y a des ports, nous
sommes en eaux internationales, donc, il n'y a pas de problème pour
certains ports du Canada. Cependant, il y a un problème, parce qu'à
partir de l'île d'Anticosti, on ne permet pas d'exploiter des casinos
sur le Saint-Laurent. Que fait la clientèle qui est adepte du casino?
Elle choisit de ne pas venir dans le Saint-Laurent pour passer ses
vacances sur un bateau de croisière.
Je pense qu'on a fait état de toutes les retombées économiques, et
mes collègues l'ont fait ce matin. J'appuie ce projet de loi, en
espérant que le gouvernement nous donnera raison et qu'il
l'acceptera. Je sais que le projet de loi de mon collègue de
Beauport-Montmorency-Orléans ne peut faire l'objet d'un vote,
mais ce que je souhaite, c'est que le gouvernement, après les
nombreuses consultations qui semblent très longues, le milieu s'est
déjà prononcé là-dessus, ne devrait pas tarder à donner une réponse
positive.
Dans ce projet de loi, il y a des objectifs qui sont réalistes et nous
souhaitons que le gouvernement aille dans la bonne voie, qu'il
modifie la législation pour nous permettre de doubler ce
développement économique.
(1205)
On dit que 20 p. 100 d'augmentation par année serait réalisable,
selon certains spécialistes, alors, je me demande pourquoi il faut
encore marginaliser l'activité du Saint-Laurent et, par conséquent,
toute l'industrie touristique de la région de Québec. Je pense que
dans ce dossier, le bon sens est de permettre l'exploitation des
casinos par l'adoption d'un tel projet de loi.
Je sais que ce projet de loi ne peut faire l'objet d'un vote, mais si
on pouvait revenir en arrière, pourquoi ce projet de loi ne pourrait-il
pas l'être? Si le ministre donne raison au Bloc québécois dans ce
dossier, il finira par présenter son propre projet de loi. Alors,
pourquoi le retarder? Je pense qu'on a déjà assez perdu d'argent en
retombées économiques pour toutes les villes du Saint-Laurent, et
en particulier celle de Québec. Je demande donc à ce gouvernement
de bouger très rapidement.
9359
Le président suppléant (M. Milliken): La période prévue pour
l'étude des affaires émanant des députés est maintenant expirée et
l'ordre est rayé du Feuilleton.
L'honorable député de Beauport-Montmorency-Orléans
invoque le Règlement.
M. Guimond: Monsieur le Président, je demande le
consentement unanime de la Chambre afin qu'on m'accorde une
minute de prolongation du débat pour pouvoir donner un droit de
réplique.
Le président suppléant (M. Milliken): Consent-on
unanimement à la proposition de l'honorable député?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. Milliken): Je lui accorde donc une
minute.
M. Guimond: Monsieur le Président, je remercie les collègues
du parti ministériel.
Mes collègues et moi-même avons tenté de démontrer que le
projet de loi d'initiative privée C-369 est indispensable au
développement des ports du Saint-Laurent et à l'économie en
général des villes le bordant.
Nous avons aussi démontré à cette Chambre que ce projet de loi
n'est pas pour faire de la politique, mais pour permettre à
l'économie québécoise de se développer, comme dans tous les coins
du Canada.
Je demande à mes collègues d'en face d'oublier pour un moment
la partisanerie politique-on aura l'occasion de faire de la
partisanerie politique lors de la prochaine campagne électorale-et
de faire de ce projet de loi un cas de conscience. Pourquoi empêcher
toute une région de se développer strictement pour des motifs
politiques?
Au nom du Bloc québécois et de la population du Québec
desservie tant par les représentants du Bloc québécois que par ceux
des autres partis, je demande aux collègues de cette Chambre
d'accepter que ce projet de loi fasse l'objet d'un vote libre. Je
demande le consentement unanime de cette Chambre pour que ce
projet de loi fasse l'objet d'un vote.
Le président suppléant (M. Milliken): La Chambre
consent-elle unanimement à ce que le projet de loi proposé par
l'honorable député fasse l'objet d'un vote?
Des voix: Oui.
Des voix: Non.
Le président suppléant (M. Milliken): Il n'y a pas de
consentement unanime.
9359
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[
Traduction]
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 4 février, de la
motion: Que le projet de loi C-46, Loi modifiant le Code criminel
(communication de dossiers dans les cas d'infraction d'ordre
sexuel), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.):
Monsieur le Président, je suis heureuse de participer à ce débat. Au
cours des dernières semaines, le Comité de la justice, que je préside,
a entendu une série de témoins concernant le projet de loi C-46. Le
comité continuera de tenir des audiences sur cette mesure, si elle lui
est renvoyée aux fins d'étude.
Les membres du comité ont déjà entendu de nombreux témoins,
aussi bien des gens qui appuient le projet de loi que d'autres qui s'y
opposent et qui s'en inquiètent. Les audiences du comité ont été
marquées par un esprit d'ouverture et d'équité, et elles nous
permettent maintenant de commenter, le cas échéant, les
amendements qui devraient y être apportés.
Nous avons entendu des représentants de centres d'aide et
d'écoute en cas d'agression sexuelle, des victimes, des avocats de la
défense et un groupe qui dit croire en l'existence du syndrome de la
mémoire fictive. Je reviendrai là-dessus un peu plus tard dans le
débat. En somme, nous avons pu jeter un coup d'oeil sur toutes les
questions que ce projet de loi soulève.
Je crois toutefois que plusieurs questions sont passées inaperçues
dans le débat, notamment le fait qu'aucune disposition du projet de
loi C-46 n'interdit la communication de dossiers. D'ailleurs, les
modifications proposées établissent clairement que le juge du
procès peut ordonner à une tierce partie de communiquer des
dossiers à un accusé.
(1210)
Il est ici question de dossiers que possède une tierce partie et qui
renferment des renseignements personnels sur la victime. Le projet
de loi prévoit clairement que le juge peut ordonner à la tierce partie
de communiquer les dossiers en question. Il établit simplement les
critères à observer aux fins d'une telle ordonnance.
À cette fin, le projet de loi énonce les règles à suivre et exige que
l'accusé explique comment les dossiers demandés pourraient avoir
une incidence sur une question soulevée au cours du procès.
L'accusé ne peut pas se contenter, par exemple, d'établir des
hypothèses sur la pertinence que pourraient avoir ces dossiers.
L'accusé doit pouvoir faire plus que cela. Il doit énoncer les motifs
sur lesquels il se fonde pour démontrer que les dossiers sont
vraisemblablement pertinents.
Ces modifications établissent clairement que le fait de formuler
certaines assertions n'est pas suffisant pour franchir l'étape
préliminaire. En soi, une assertion n'est rien d'autre qu'une
déclaration non étayée. Un accusé ne peut se contenter de dire: «J'ai
besoin du
9360
dossier médical de la plaignante parce que celui-ci pourrait être
utile.» L'accusé doit faire plus que de formuler une telle
déclaration.
D'aucuns soutiennent que cette exigence place l'accusé dans une
impasse, en ce sens que ce dernier peut ne pas être capable d'établir
que de tels dossiers sont vraisemblablement pertinents, étant donné
qu'il ne sait pas quels renseignements y sont contenus.
Il doit satisfaire à un processus en deux étapes. L'accusé doit
d'abord démontrer que les dossiers sont vraisemblablement
pertinents. Deuxièmement, plusieurs des assertions auxquelles je
fais allusion, et qui sont faites sans être étayées, ne suffisent pas à
démontrer qu'un dossier est vraisemblablement pertinent. Il
s'ensuit que l'accusé doit simplement faire un pas de plus lorsqu'il
formule une telle assertion.
Je ne suis pas d'accord pour dire que l'accusé se trouve dans une
impasse. Si la loi n'imposait pas un critère de pertinence
vraisemblable relativement à la communication de dossiers, ce
serait une chasse ouverte. L'accusé pourrait obtenir ces dossiers tout
simplement en en faisant la demande. Selon moi, ce n'est pas ce que
les Canadiens veulent, et il n'est pas nécessaire que l'accusé ait
automatiquement accès à ces documents pour sa défense.
Si un accusé a effectivement une défense face aux accusations
portées contre lui, par exemple s'il n'a pas eu de contact avec la
plaignante, s'il pense que la plaignante était consentante, s'il fait
valoir que l'incident ne s'est pas produit, alors il se doit de préparer
sa défense de façon appropriée. L'accusé ne devrait cependant pas
avoir carte blanche pour consulter des dossiers afin d'y trouver un
moyen de défense lui permettant d'attaquer la réputation ou la
crédibilité du plaignant ou de l'intimider au point de l'amener à
retirer les accusations.
Je ferai également remarquer qu'il est question en l'occurrence
de dossiers personnels établis par des tiers qui sont venus en contact
avec le plaignant, notamment des conseillers, des enseignants, des
médecins, qui n'ont aucune obligation de communiquer ces
dossiers à l'accusé, sauf dans le cadre de ce processus.
Je le répète, le projet de loi énonce plusieurs affirmations que
l'accusé ne peut se contenter d'invoquer pour établir que le dossier
est vraisemblablement pertinent. La nécessité d'exprimer
clairement ces affirmations insuffisantes a été soulignée au cours du
processus de consultation et fait bien comprendre pourquoi ces
modifications s'imposent.
L'accusé ne répondra pas au critère de la pertinence
vraisemblable des dossiers pour les faire communiquer au juge d'un
procès pour examen en tendant de démontrer par des affirmations
sans fondement que les dossiers sont pertinents. L'accusé doit en
effet énoncer les motifs sur lesquels il se fonde pour démontrer en
quoi ou pourquoi les dossiers sont vraisemblablement pertinents
quant à un point en litige.
L'accusé ne peut pas se contenter de prétendre qu'on devrait lui
communiquer les dossiers concernant le plaignant simplement
parce qu'ils existent ou parce qu'ils sont susceptibles de contenir
une déclaration antérieure incompatible ou parce qu'ils pourraient
se rapporter à la crédibilité du plaignant ou du témoin ou parce
qu'ils sont susceptibles de contenir des allégations quant à des abus
sexuels commis par d'autres que l'accusé. Il s'agit là de motifs
insuffisants. Il s'agit simplement d'affirmations que la loi ne
permet pas de faire afin qu'on ne puisse pas fonder sur des
suppositions une demande de communication de dossiers. Notre loi
ne permettra pas de procéder à l'aveuglette à cet égard. Si le projet
de loi permettait à un accusé de deviner pourquoi les dossiers
pourraient être pertinents, on communiquerait des dossiers dans
tous les cas et le projet de loi n'aurait servi à rien.
Ce n'est pas qu'on ne puisse pas faire des affirmations en soi.
L'accusé doit cependant pouvoir les justifier. Par exemple, si
l'accusé peut établir à la satisfaction du juge de première instance
que les dossiers sont vraisemblablement pertinents parce qu'ils
révèlent une déclaration antérieure contradictoire, le juge peut
décider que le dossier sera examiné.
(1215)
Il n'est pas interdit à la défense d'affirmer l'existence d'une
déclaration antérieure incompatible, ni de mener un
contre-interrogatoire au sujet de cette déclaration, parce que le juge
pourrait, dans ces circonstances, faire produire les dossiers.
Un député qui a pris part à ce débat a soulevé la question des
dossiers sur la thérapie qui a fait remonter les souvenirs à la surface.
Il a été avancé que ces dossiers seraient interdits si le projet de loi
était adopté. Ce n'est tout simplement pas vrai. Cette opinion repose
sur une mauvaise compréhension de la loi et de son mode de
fonctionnement.
Certaines critiques tiennent au fait qu'une seule disposition est
mal interprétée, sans qu'il soit tenu compte des dispositions
connexes ni de l'ensemble du projet de loi. Le député a fait porter
toute son attention sur le paragraphe 278.3(4) qui énumère une liste
d'assertions qui, en soi, n'établiront pas la probabilité de pertinence
des documents. C'est ce dont nous discutions. Selon ce député, il
sera impossible à l'accusé de se défendre, à cause de cette liste,
surtout lorsque les allégations concernent des agressions sexuelles
qui ont eu lieu il y a très longtemps, mais qui n'ont été dénoncées
que récemment parce qu'une personne à recouvré certains
souvenirs.
Une vive controverse entoure la question de la mémoire
retrouvée ou de la mémoire fictive. Les psychiatres et autres
spécialistes du domaine de la santé ne peuvent s'entendre sur la
façon dont ces souvenirs sont conservés, réprimés, récupérés ou
suggérés. Le projet de loi C-46 n'a pas pour but de résoudre la
controverse. Il ne vise même pas à l'aborder.
Il n'interdira pas la communication de dossiers traitant de la
question. Il n'accordera pas de traitement spécial aux dossiers qui
porteraient sur la mémoire de personnes en cause. Comme pour tous
les autres dossiers demandés, il incombera à l'accusé d'établir la
pertinence de ce genre de dossiers.
Un des orateurs précédents a peut-être quitté la Chambre en ayant
l'impression que d'innombrables Canadiens font face à des
accusations d'infractions sexuelles fondées sur des allégations
obtenues à la suite de traitements controversés, y compris de
techniques de rappel de mémoire. C'est absolument faux. Il y a bien
eu certains cas, mais les tribunaux ont pris soin de reconnaître la
faiblesse de ces preuves.
Il ne faut surtout pas oublier l'un des principes du droit de la
preuve, selon lequel la couronne assume le fardeau de la preuve et
9361
doit donc prouver toutes les facettes d'un délit criminel hors de tout
doute raisonnable. Il s'agit d'un critère élevé, parfois impossible à
atteindre dans des cas d'infractions sexuelles, surtout lorsque les
crimes ont été commis il y a très longtemps.
De plus, il faut faire confiance aux procureurs de la couronne.
Des accusations ne sont pas portées uniquement en fonction
d'allégations. La couronne doit être convaincue qu'il existe des
preuves suffisantes qui viennent appuyer les allégations. Ne
pensons pas qu'il suffit à une personne d'affirmer qu'elle a été
victime d'une agression pour que des accusations soient portées.
Les dossiers d'un thérapeute ou d'un psychiatre concernant la
remémoration peuvent faire l'objet d'une demande de
communication de dossiers. Pour obtenir ces dossiers, l'accusé doit
simplement établir, à la satisfaction du juge, je le répète, que les
dossiers sont probablement pertinents à sa défense, parce qu'ils
portent sur un aspect particulier du procès ou remettent en question
certains témoignages.
Il est bien évident qu'un accusé ne peut pas affirmer que des
dossiers médicaux, thérapeutiques ou psychiatriques sont
nécessaires parce que ceux-ci peuvent révéler qu'un souvenir
revient ou est faux. Ces questions ne se posent pas dans tous les cas.
Si les allégations ont trait à des événements qui se sont passés il y a
longtemps et n'ont été révélés qu'après la thérapie, il sera question
au procès de la capacité du plaignant de se rappeler les événements.
Cela ne fait aucun doute. Dans de tels cas, l'accusé peut demander
que des documents soient communiqués en justifiant la
communication de ces documents plutôt que de supporter des
affirmations non justifiées.
On oublie qu'il y a toutes sortes d'occasions pour une
divulgation. La Couronne a l'obligation de divulguer en entier la
déclaration du plaignant. En outre, d'habitude dans ces cas-là, il y a
une audience préliminaire qui permet à la défense d'aller au fond de
ces affirmations en interrogeant ses propres témoins ou ceux de la
Couronne.
L'accusé peut présenter les fondements probatoires nécessaires
pour la demande en faisant allusion à l'audience préliminaire aux
faits exposés par des médecins, par d'autres spécialistes ou par la
plaignante elle-même concernant la nature de la thérapie ou du
traitement. N'oublions pas que rien, dans le projet de loi C-46,
n'empêche l'accusé de citer à comparaître toute personne
susceptible de fournir un témoignage pertinent et de lui poser des
questions pertinentes. Un accusé peut toujours citer à comparaître
un médecin qui a traité la plaignante. Un accusé peut aussi, au cours
de l'enquête préliminaire et au procès, contre-interroger la
plaignante sur son souvenir des événements et sur la nature de la
thérapie.
Lorsque des souvenirs qui refont surface poseront vraiment un
problème et que l'accusé pourra citer des renseignements fournis à
l'enquête préliminaire ou dans des affidavits d'autres spécialistes à
l'appui de l'affirmation, je prévois que que les dossiers peuvent être
pertinents en la matière. Puis, le juge peut décider d'examiner les
dossiers après avoir tenu compte des autres éléments que le projet
de loi l'oblige à considérer. La liste des motifs insuffisants
mentionnés dans le projet de loi n'empêchera pas un juge
d'examiner les dossiers si l'accusé a démontré le bien-fondé de son
affirmation sur leur pertinence.
(1220)
Le projet de loi C-46 exige seulement que le juge examine
attentivement les demandes de dossiers personnels une fois que
l'accusé a établi la pertinence de ces derniers. Le projet de loi établit
clairement que les affirmations non étayées de l'accusé ne suffiront
pas à satisfaire aux critères concernant la pertinence vraisemblable
du dossier aux fins de la preuve. Le projet de loi énumère des motifs
qui, en soi, sont insuffisants, qui sont présentés à titre d'exemples et
qui font ressortir certaines des raisons pouvant être invoquées
lorsqu'on s'interroge sur le contenu des dossiers. La règle
sous-jacente, toutefois, c'est que l'accusé doit toujours exposer les
motifs sur lesquels il se fonde pour faire valoir que les dossiers sont
vraisemblablement pertinents. Cette règle sous-jacente s'applique à
tous les dossiers visés par la définition, y compris ceux qui
concernent une thérapie liée à la mémoire.
Le projet de loi C-46 règle, d'une manière juste et équitable, la
question de la production des dossiers dans les procès concernant
des infractions d'ordre sexuel. Le projet de loi n'empêchera pas la
production de dossiers, mais il garantira que les seuls dossiers
produits soient ceux qui sont vraisemblablement pertinents. Il fera
en sorte que les juges prennent soigneusement en considération les
droits tant de l'accusé que du plaignant. Le problème des avocats de
la défense qui ont tendance à demander des dossiers personnels pour
miner la crédibilité d'autrui n'est pas un problème uniquement
canadien. Je sais que l'on constate la même tendance dans presque
tous les États américains, au Royaume-Uni, en Australie et en
Nouvelle-Zélande.
Les solutions proposées dans les autres États varient. Certains
ont opté pour des privilèges d'origine législative qui visent certains
dossiers et communications. Nous n'avons pas retenu cette
solution. D'autres ont opté pour une demande de production de
dossier. Ce que tous ont en commun, c'est qu'ils ont reconnu la
nécessité de concilier le droit à la protection des renseignements
personnels et le droit de présenter une défense complète et, lorsque
des dossiers personnels constituent un enjeu, la nécessité pour
l'accusé de prouver leur pertinence vraisemblable.
Les dispositions législatives que nous proposons règlent le
problème d'une manière juste, équitable et exhaustive. J'insiste sur
le fait que le projet de loi n'empêchera pas la production de dossiers.
On pourra encore produire des dossiers. J'insiste aussi sur le fait que
le projet de loi n'empêchera pas non plus la convocation de témoins
susceptibles d'avoir des renseignements pertinents par rapport à ces
dossiers. Pareils témoins seront encore contraignables. Le projet de
loi garantit simplement que les seuls dossiers qui seront produits
seront ceux qui sont vraisemblablement pertinents et que les juges
prendront soigneusement en considération les droits aussi bien de
l'accusé que du plaignant, avant la production de tels dossiers.
M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le
Président, j'ai écouté avec grand intérêt les observations les
observations de la députée de Windsor-Sainte-Claire.
Ce projet de loi est fondamentalement vicié à cause de la
mauvaise interprétation de la portée de certains mots que la députée
de
9362
Windsor-Sainte-Claire a utilisés. Elle a dit que le projet de loi ne
prévoit aucune interdiction en ce qui concerne la production de
dossiers. Elle a ajouté qu'avec les modifications proposées au Code
criminel, le projet de loi énonce les critères dont le juge doit tenir
compte pour déterminer si les dossiers doivent être produits.
Plus tard, elle a dit qu'il y a des règles sous-jacentes que l'accusé
doit respecter afin d'avoir accès aux dossiers ou afin que le juge
demande les dossiers auxquels l'accusé souhaite avoir accès.
Lorsque l'on établit des règles ou des critères par lesquels des
dossiers doivent être produits ou non, on dresse des interdictions. La
meilleure façon d'aborder la question de la production de dossiers
consiste à laisser cela à la discrétion des juges, et non pas à établir
des règles qui sont en fait des interdictions, des raisons interdisant la
production de documents demandés par l'accusé.
N'est-il pas vrai que si l'accusé ne satisfait pas aux règles
sous-jacentes de ces critères telles qu'énoncées dans le projet de loi
C-46, le juge interdira la production des dossiers? N'est-ce pas là
une interdiction?
Mme Cohen: Monsieur le Président, on joue un petit jeu
sémantique intéressant ici. Il est important de comprendre que les
juges ne font pas les lois dans le vide. Si le projet de loi est adopté,
nous allons influencer sur la façon dont les juges prennent des
décisions dans les salles d'audiences. C'est ainsi que sont les
choses, il n'y a là rien d'extraordinaire ou de nouveau. C'est ce que
nous faisons ici. Nous adoptons des lois.
Les juges ne peuvent pas faire des lois dans le vide. Ils ne peuvent
pas se prononcer sur des éléments de preuve en ne s'appuyant sur
rien.
(1225)
Il existe depuis un certain temps un problème dans les causes
d'agressions sexuelles. En raison des lacunes du droit de la preuve,
l'évolution de ce type de causes devant les tribunaux a laissé aux
défenseurs les coudées franches dans la conduite de leur défense.
Par conséquent, les tribunaux, sans que ce soit nécessairement
volontaire, passent outre au droit à la vie privée des plaignants, des
victimes et d'autres témoins.
Tout ce que le projet de loi vise, c'est à établir des structures et
des lignes directrices pour orienter les juges. Il ne s'agit pas
d'interdire, mais d'affirmer que le droit à la vie privée des
personnes qui portent plainte doit être respecté et que nous allons
instaurer un juste équilibre entre les droits des plaignants et ceux
des accusés. Il s'agit de laisser quand même toutes les possibilités
voulues à la défense.
Les opposants au projet de loi oublient qu'il sera encore possible
de citer comme témoin le médecin dont ils veulent examiner les
dossiers. Il sera encore possible d'interroger ce médecin et le
psychiatre ou le conseiller au sujet de la plaignante et de la nature du
traitement subi ou des événements.
Cependant, la défense n'aura plus directement accès aux dossiers
médicaux. Elle ne pourra plus consulter ces dossiers sans avoir
établi qu'elle a de bonnes raisons de le faire. Il ne s'agit pas
d'affirmer en termes absolus que cet examen est nécessaire, mais de
démontrer qu'il peut être utile. C'est là un juste équilibre. Il ne faut
pas oublier que les gens qui se présentent devant un tribunal ou qui
logent une plainte à la police ont droit à la protection de leur vie
privée.
Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.):
Monsieur le Président, je remercie la députée pour son discours. En
examinant le projet de loi, je constate qu'il y a une question que
vous n'avez pas abordée dans vos remarques.
Le Président: À l'ordre. Je sais qu'il est parfois difficile pour les
députés de se remettre dans le bain. Tous les députés voudront bien
s'adresser à la présidence.
Mme Hayes: Monsieur le Président, la députée a mentionné que
les dossiers des tiers pouvaient être communiqués si, après examen,
le juge du procès décidait qu'ils répondaient aux critères établis.
Pourrait-elle préciser si ce processus s'applique seulement aux
dossiers des tiers? Ou ai-je lu dans le projet de loi qu'on peut aussi
se servir de ce processus pour empêcher la communication des
dossiers de la Couronne?
Mme Cohen: Monsieur le Président, cette question crée une
certaine confusion. Je remercie la députée de l'avoir soulevée.
D'après mon expérience, il arrive de temps en temps que les
dossiers des tiers se retrouvent entre les mains de la Couronne à la
suite de l'enquête policière. Par exemple, la victime peut avoir dit à
la police de s'adresser à son travailleur social, à son psychiatre ou à
qui que ce soit d'autre. Ces renseignements se retrouvent alors dans
le dossier de police, auquel la Couronne a accès.
Il n'en demeure pas moins que ce sont des déclarations de tiers, et
ces renseignements doivent donc être examinés en fonction des
critères établis. Le fait que ces dossiers appartenant à des tiers se
soient retrouvés entre les mains de la police ou de la Couronne ne
veut pas dire que la défense peut s'en servir à sa guise. Ils doivent
être examinés par le juge en fonction des critères établis dans le
projet de loi.
(1230)
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, la
députée a déclaré, en réponse à une question, que les juges ne
légifèrent pas dans le vide.
Je voudrais que la députée me dise si, en définitive, les juges font
des lois. En affirmant que les juges ne font pas de lois dans le vide,
elle suggérait qu'ils légifèrent en utilisant l'information dont ils
disposent. Je voudrais connaître le point de vue de ma collègue.
Mme Cohen: Monsieur le Président, j'ai l'impression de me
retrouver à l'école de droit. Le député soulève un bon argument. Les
législateurs font les lois et les juges les interprètent, mais lorsqu'il
existe un vide législatif parce que le législateur n'a pas indiqué
9363
clairement l'intention de la société, les juges sont amenés à
interpréter la loi.
Les précédents découlent de précédents et c'est pourquoi le
législateur doit s'assurer que la loi produit les résultats qu'il en
attend dans les cours de justice et dans la vie courante des gens
qu'elle régit.
Un très important débat a présentement cours au sujet de ce qu'on
appelle souvent les lois faites par les juges. Il serait préférable de
tenir un débat général sur la question à un autre moment. Le
problème est que les tribunaux ont poussé l'interprétation des lois
tellement loin que cela a soulevé un tollé dans la population. Nous
avons perdu de vue l'équilibre entre les droits privés et les droits
publics, entre les droits des plaignants et ceux des accusés.
Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.):
Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole
aujourd'hui pour parler du projet de loi C-46, qui porte sur la
communication de dossiers dans les cas d'infraction d'ordre sexuel.
Alors que je réfléchissais à ce projet de loi, un symbole m'est
apparu à l'esprit. Ce symbole est celui-là même de la justice qui
représente une femme portant une balance. Cette balance sert à
peser les faits et à faire la part entre les droits de l'accusé et ceux de
la victime. Tous les gens sont égaux devant la loi.
Cette balance correspond dans mon esprit aux lois que nous
mettons au point dans cet endroit. Ces lois devraient être conçues de
façon à être justes. Elles devraient être impartiales. Elles devraient
être conçues sans référence à des cas spécifiques de façon à servir
les intérêts de tous.
La femme représentée dans ce symbole a les yeux bandés pour
indiquer que la justice devrait être rendue en toute impartialité. Que
les règles devraient être les mêmes pour tous.
Dans notre système, les droits de l'accusé et les droits des
victimes sont de plus en plus en conflit. Le but du système judiciaire
lui-même fait l'objet d'un débat public. Vise-t-il à protéger les
citoyens respectueux des lois ou à réadapter les criminels? Quelles
doivent être les priorités de notre système judiciaire?
À mesure que le poids fait pencher la balance en faveur des droits
de l'accusé par rapport à ceux du public, nous constatons une
absence de responsabilité, une hausse de la criminalité, une hausse
du nombre de victimes et nous voyons les victimes abandonnées à
elles-mêmes, voire souvent victimisées une seconde fois.
Le Parti réformiste estime que le but de la justice est de servir
tous les Canadiens, d'être un facteur de dissuasion destiné à lutter
contre la criminalité, de faire en sorte que les personnes qui
enfreignent les lois répondent de leurs actes, et de protéger les droits
des victimes. Bref, de faire en sorte que nos rues soient plus sûres,
de veiller à la sécurité des familles et des Canadiens.
Le projet de loi C-46 traite de la poursuite de la justice dans les
cas d'infraction d'ordre sexuel. Il cherche à établir un juste milieu
entre le droit du plaignant à sa vie privée et le droit de l'accusé à un
procès équitable et à la révélation de tous les faits.
(1235)
Dans ce débat particulier, la discussion porte aussi sur le droit à
l'égalité du plaignant quels que soient sa race ou son sexe, par
exemple.
Il a été difficile d'établir cet équilibre dans la loi canadienne sur
la protection des victimes de viol, conçue pour éviter aux victimes
de faire l'objet d'un contre-interrogatoire au sujet de leurs
expériences sexuelles antérieures. Cette loi laisse aux juges le soin
de décider s'il sera permis d'interroger la victime à ce sujet.
À l'origine, la loi autorisait un homme accusé d'agression
sexuelle à contre-interroger sa présumée victime, en faisant porter
ses questions sur les relations antérieures et les antécédents sexuels
de celle-ci. Les modifications apportées en 1992 à l'article 276,
qu'on appelle communément la loi sur la protection des victimes de
viol, faisaient en sorte que, dans la plupart des cas, le comportement
sexuel passé des présumées victimes n'était pas considéré. La
décision de permettre la présentation de preuves de cet ordre était
prise par le juge lors d'une audience privée tenue au début du
procès.
Toutefois, contrairement à ce qu'on attendait, ce changement a
entraîné des demandes de consultation de dossiers de counselling et
d'autres documents confidentiels. Les centres de counselling ont été
assiégés de demandes des tribunaux. Ils ont donc commencé à
réduire le volume des dossiers conservés. Certains ont été détruits.
Des mandats ont été contestés à grands frais. Évidemment, les
victimes évitaient les poursuites, pare qu'elles ne voulaient pas que
leur vie privée soit étalée au grand jour.
En décembre 1995, une décision de la Cour suprême a établi
qu'une personne accusée d'agression sexuelle ne pouvait faire
produire des documents «que dans les cas susceptibles d'être
pertinents». Par conséquent, des travailleurs tels des médecins, des
prêtres, du personnel médical et des psychologues pouvaient
remettre des dossiers aux agresseurs présumés.
Le projet de loi C-46 limite fortement la possibilité que l'accusé
ait accès aux dossiers de la présumée victime, dans une affaire
d'agression sexuelle. Les demandes de communication de dossiers
sont étudiées par le juge responsable du procès; le projet de loi
prévoit deux étapes au processus.
Tout d'abord, l'accusé doit prouver que le dossier existe,
expliquer les motifs pour lesquels il en demande la communication,
et préciser qu'il renferme des renseignements pertinents à sa
défense.
La deuxième étape consiste en un examen des dossiers par le
juge, qui détermine quelles pièces seront communiquées, compte
tenu des exigences de protection des renseignements privés.
Comme on l'a précisé, les dossiers dont nous parlons sont tant les
dossiers du ministère public que ceux d'une tierce partie, ce qui va
directement à l'encontre de la décision rendue par le Cour suprême
en 1995.
Ma collègue a dit que, aux termes du processus décrit dans le
projet de loi C-46, les dossiers pouvaient être communiqués. Mais
le seront-ils vraiment avec tous ces freins et tous ces contrepoids? Il
n'est pas interdit de produire les dossiers, mais est-ce que
l'imposition de ces règles et de ces critères ne revient pas en fait à
interdire la communication des dossiers?
Au fur et à mesure que je passais en revue ces questions, d'autres
me venaient à l'esprit. Elles allaient des priorités du système judi-
9364
ciaire à la priorité qui est accordée par le système, soit à la
plaignante soit à l'accusé. Le système pourrait-il avoir une
incidence sur la réticence des citoyens à porter des accusations?
Il y a aussi la question de savoir qui est la victime. Dans le cas
présent, si le processus ne permet pas que justice soit rendue, la
victime est-elle la plaignante ou l'accusé?
Autre question: le processus judiciaire et le principe de base en
droit selon lequel on est présumé innocent tant qu'on n'a pas été
reconnu coupable.
Autre question encore: le rôle du ministère public et la
responsabilité de l'accusateur lorsque le ministère public prend sa
place.
Il y a trois autres définitions et applications. Où en est la
jurisprudence en ce qui concerne la définition et l'application des
accusations d'agression sexuelle? Où en est la jurisprudence
canadienne en ce qui concerne la définition et l'application du droit
à la vie privée? Où en est la jurisprudence canadienne en ce qui
concerne la définition et l'application du droit à l'égalité? Le projet
de loi C-46 suscite toutes ces questions.
Un grand nombre d'entre elles ont déjà fait l'objet de discussions
lors de débats précédents. La question de la protection de la
plaignante qui porte de fausses accusations est particulièrement
importante. On peut se trouver devant deux situations.
(1240)
D'une part, la fausse accusation sans intention. Comme l'a
expliqué succinctement le député de Hamilton-Wentworth, il
s'agit du syndrome de la mémoire fictive. Je ne répéterai pas les
arguments déjà énoncés.
D'autre part, la fausse accusation avec intention. J'y reviendrai
plus tard lors d'un bref exposé sur le projet de loi S-4, qui pourrait
protéger les particuliers contre toute fausse accusation avec
intention.
Une deuxième question soulevée durant les débats antérieurs est
celle des droits des victimes. Bien entendu, cet aspect est prioritaire
pour notre parti. Il arrive trop souvent que des victimes soient à
nouveau victimisées par notre système judiciaire. Nous avons
observé, au cours des dernières semaines, le triste échec du Parti
libéral qui avait l'occasion de modifier le système de justice pénal
en abrogeant l'article 745. L'article 745 autorise les détenus à
demander une libération conditionnelle anticipée après 15 ans
d'incarcération dans le cas des meurtres au premier degré. Nous
avons vu récemment des victimes être victimisées à nouveau car
elles ont dû revivre l'horreur d'un drame pour satisfaire aux
exigences de l'assassin de leurs enfants, qui était encore une fois le
point de mire.
Le parti qui forme le gouvernement du Canada aurait pu appuyer
l'abrogation de cet article du Code criminel. Il aurait pu servir
l'intérêt des Canadiens, mais il a choisi de ne pas le faire.
Le plus grand affront fait aux résidents de la
Colombie-Britannique est venu des députés libéraux de cette
province qui ont choisi de ne pas appuyer l'abrogation de l'article
745. Un meurtrier de leur propre région a de nouveau fait parler de
lui. C'était un affront aux sensibilités non seulement des victimes,
mais de toute la population de la province.
L'intention déclarée du projet de loi que nous considérons
aujourd'hui est louable, puisqu'on cherche à mieux protéger les
victimes d'agression sexuelle et leur assurer un meilleur traitement
par le système judiciaire, en éliminant des obstacles qui les
empêchent de porter plainte.
Toutefois, je m'interroge sur ce que fait le gouvernement, sur son
efficacité et sur sa sélectivité. Comme on peut le voir avec l'examen
de l'article 745 et la priorité que le gouvernement accorde à cette
mesure, les modifications proposées aux lois sont souvent faites
pour servir des fins politiques plus que les intérêts des vraies
victimes, qu'ils s'agisse des accusés ou de ceux qui les accusent. Un
excès de mesures législatives ne sert pas nécessairement les
Canadiens dans leur ensemble.
Aujourd'hui, je voudrais me concentrer sur trois domaines de
discussion: la définition de l'agression sexuelle en droit canadien,
les préoccupations du gouvernement libéral en ce qui concerne la
vie privée et les droits spéciaux fondés sur un désavantage
historique.
Premièrement, la définition de l'agression sexuelle que propose
le gouvernement libéral a été modifiée en 1988. Le projet de loi
C-15 présenté par le gouvernement conservateur redéfinissait
l'agression sexuelle et, en même temps, ramenait l'âge de
consentement de 16 à 14 ans.
Je voudrais dire à la Chambre que les victimes les plus tragiques
d'agression sexuelle sont justement les enfants de 14 et 15 ans qui
sont exploités par des proxénètes adultes et que nos lois ignorent
virtuellement. La prostitution infantile au Canada déchire les
familles et détruit la vie de jeunes personnes. De toute évidence, ce
n'est pas une priorité pour le gouvernement libéral.
Lorsque j'ai interrogé le ministre de la Justice le 3 mars, il m'a
donné une réponse équivoque à cette question et ne s'est pas montré
prêt, c'est évident, à apporter les changements voulus. Il a fait fi de
la recommandation des gouvernements provinciaux et de
l'incrédulité de la population lorsqu'elle a compris que l'âge requis
pour consentir au Canada était 14 ans. En fait, le ministre libéral de
la Justice a aggravé la situation en refusant de contester la décision
qu'une cour de l'Ontario a rendue en 1995 et qui élargissait, en fin
de compte, la définition du consentement d'enfants âgés de 14 ans à
des relations sexuelles pour inclure des relations homosexuelles.
Non seulement les libéraux ne sont pas disposés à protéger nos
jeunes, mais ils vont donner davantage de possibilités aux
prédateurs sexuels de détruire la vie de nos jeunes et ne pas
demander des comptes à ceux qui détruisent ainsi la vie de ces
jeunes dans leur intérêt personnel.
(1245)
Prenons ensuite la protection de la vie privée par le
gouvernement libéral. En parcourant récemment le pays pour faire
suite aux craintes exprimées par la population au sujet du manque
de respect de la vie privée, le comité des droits de la personne a pu
constater que la population est extrêmement mal protégée en ce qui
concerne la protection de la vie privée au Canada. La Loi sur la
protection des renseignements personnels n'est pratiquement pas
appliquée et ne
9365
touche que le secteur public. D'autres gouvernements, dans d'autres
pays, ont beaucoup d'avance sur nous à ce sujet. La population
canadienne n'est pas très bien servie en ce qui concerne la
protection des renseignements personnels.
On constate un scepticisme général face à l'invasion de la vie
privée par le secteur privé et le secteur public. Les règles sur la
protection de la vie privée sont subjectives et vont dans le sens des
priorités du gouvernement.
La Loi sur l'équité en matière d'emploi viole la vie privée des
entreprises en assujettissant leurs plans d'entreprise à un examen.
D'un autre côté, dans le cadre des audiences des réfugiés, le
gouvernement a décidé que les dossiers concernant les personnes en
cause ne seront pas transmis au comité d'examen.
Dans ma circonscription, la dernière enquête auprès des ménages
effectuée par le gouvernement, c'est-à-dire le recensement détaillé,
prévoit des sanctions sévères contre les gens qui refusent de remplir
le questionnaire. Pourtant, ce questionnaire viole la vie privée des
Canadiens et, à l'heure actuelle, on le conteste devant les tribunaux
de la Colombie-Britannique à la suite de craintes que l'on a au sujet
de la protection des renseignements personnels.
Je voudrais attirer l'attention de la Chambre sur la façon dont le
gouvernement traite le droit à la vie privée des enfants. Je vais vous
citer un rapport d'un comité gouvernemental, à Beijing, dans lequel
on dit que les défenseurs des droits de la personne ont salué avec
joie la percée canadienne à Beijing, alors qu'on reconnaît
maintenant le droit des enfants de prendre leurs propres décisions. Il
est question du droit d'un enfant de se renseigner sur des questions
comme le contrôle des naissances par opposition aux droits des
parents d'empêcher l'accès à des sujets dans lesquels ils ne croient
pas. Nous mettons en opposition les droits des enfants et ceux des
parents en nous appuyant sur le droit des enfants à la protection des
renseignements personnels.
J'ai entendu parler l'autre jour de la question du droit à la
protection des renseignements personnels pour les enfants en foyers
nourriciers, soit une question de compétence provinciale, mais cela
montre comment les gouvernements peuvent utiliser ces questions à
leurs propres fins. En Colombie-Britannique, il est illégal pour un
parent de famille d'accueil d'inspecter la chambre de l'enfant qui
lui a été confié afin de trouver des armes ou des drogues. Les
gouvernements veulent protéger les enfants contre les parents mais
non contre ceux qui veulent profiter d'eux.
Dans le projet de loi C-46, on restreint l'accès aux dossiers des
plaignants dans les cas d'infraction d'ordre sexuel. De nos jours,
nous reconnaissons la nature délicate des événements qui peuvent
entourer ces crimes, ainsi que les traumatismes qui peuvent
s'ensuivre, et nous sommes conscients de la nécessité de protéger,
dans une certaine mesure, la vie privée des personnes visées.
Cependant, je pense que nous devons également reconnaître la
vulnérabilité de l'accusé si les accusations sont fausses, mais qu'il
est impossible de les contester. La crédibilité du plaignant est un
facteur important dans toutes les procédures juridiques.
Le projet de loi C-46 précise toutefois que le fait que le dossier
soit susceptible de contenir une déclaration antérieure incompatible
faite par le plaignant n'est pas un motif suffisant pour avoir accès au
document. Dans le passé, les avocats de la défense pouvaient
montrer que le plaignant avait menti auparavant. Pour que le
système juridique soit équitable, il faut que tous les intervenants
soient traités sur le même pied et que chacun d'entre eux ait des
comptes à rendre.
Le projet de loi C-46 va également empêcher l'accès aux dossiers
de la Couronne et pas simplement à ceux des tierces parties. Il s'agit
d'une mesure unique qui établit un précédent dans le système de
justice. Cela suppose un traitement spécial. On accorde des droits
spéciaux au plaignant et on nie les mêmes droits à l'autre partie.
Je tiens à signaler à la Chambre qu'on ne peut connaître la
victime jusqu'à ce qu'on ait prouvé la culpabilité de l'accusé. La
victime en l'occurrence peut être le plaignant ou l'accusé. Nous
ignorons qui pourrait être victime de la procédure tant que justice
n'est pas rendue.
(1250)
J'ai déjà mentionné le projet de loi S-4. Il crée trois nouvelles
infractions au Code criminel. Commettrait une infraction
quiconque fait une déclaration qu'il sait fausse, hors de la présence
du tribunal. Constituerait une infraction le fait d'engager ou de
poursuivre des procédures principalement motivées par le souci
d'intimider ou de léser un tiers. Constituerait également une
infraction le fait de tromper sciemment le tribunal.
Le projet de loi introduit le concept de la responsabilité de
l'accusé dans la procédure. De plus, il fait ressortir la nécessité, et je
reprends ici les paroles de l'auteur de ce projet de loi, de «maintenir
le principe selon lequel la vérité est essentielle au déroulement de la
procédure judiciaire et cruciale pour les intérêts de la justice». Le
projet de loi a été proposé au nom des personnes dont la vie a été ou
pourrait être détruite par de fausses accusations. Je sais que, dans
ma circonscription, la réputation, la famille, la carrière de
quelqu'un peut être détruite par de fausses déclarations. Aucun
tribunal ne saurait réparer le tort qui aurait été fait. Nous devons
nous assurer que l'on voie à la protection de tous les citoyens dans
l'application de nos lois.
La mesure législative est fondée sur le droit à l'égalité,
notamment l'égalité des races et des sexes. C'est un thème cher au
gouvernement libéral. Il est tenu compte du fait que certains
groupes ou catégories ont, historiquement, été désavantagés.
Ces arguments ont suscité des mesures législatives telles que la
Loi sur l'équité en matière d'emploi qui accorde des droits spéciaux
dont des quotas de recrutement pour les femmes ou les minorités
visibles par exemple. Comme nous l'avons vu dans la société, des
politiques de ce genre donnent lieu à une discrimination à rebours
sur le marché du travail. Nous devons nous assurer de ne pas rétablir
l'équilibre de la justice en adhérant aux mêmes principes. Tout
comme nous ne pouvons pas compenser les actes de discrimination
commis dans le passé en nous en prenant simplement à ceux qui
faisaient de la discrimination, nous ne pouvons ni ne devrions
compenser les actes d'injustice commis dans le passé en créant un
système qui sera injuste.
Aujourd'hui, mes préoccupations portent surtout sur la définition
d'agression sexuelle et sur l'absence de protection que le
gouvernement offre à nos citoyens les plus vulnérables, les enfants,
ensuite, sur le caractère capricieux de la politique du gouvernement
libéral concernant la protection de la vie privée et sa manière
sélective de réagir dans différents secteurs de compétence et, enfin,
sur la tendance troublante et destructrice du gouvernement libéral à
accorder des droits spéciaux en raison de désavantages subis dans le
passé.
Le gouvernement libéral est reconnu pour appliquer une
politique de justice partiale, axée sur son programme. Je reviens au
9366
symbole de la justice véritable. Le gouvernement doit le maintenir
dans l'intérêt de tous les Canadiens. Le projet de loi exige des freins
et des contrepoids pour assurer l'équité du système et des
modifications pour garantir la présomption d'innocence de
l'accusé, principe fondamental dans nos lois canadiennes, de sorte
qu'il y ait un équilibre entre la protection de la vie privée du
plaignant et le droit de l'accusé à un procès équitable.
M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le
Président, je remercie la députée de Port Moody-Coquitlam pour
l'excellent discours qu'elle a prononcé, dans lequel elle a fait part
de réserves très importantes à l'égard de ce projet de loi.
Je voudrais lui communiquer une information. Selon
l'Association canadienne des avocats de la défense, si ce projet de
loi était adopté dans sa version actuelle, des innocents risquent de se
retrouver en prison. La raison, c'est que le projet de loi limite les
dossiers que l'accusé peut obtenir du fait qu'il prévoit des
interdictions qui visent les documents que le juge peut ordonner à
une tierce partie de fournir. Ces limites, ou lignes directrices, dont
la députée de Port Moody-Coquitlam a fourni des exemples,
restreignent vraiment la possibilité que l'accusé ait un procès
équitable parce que le juge n'a pas le pouvoir illimité de déterminer
quels dossiers il peut exiger de la tierce partie.
(1255)
La députée de Port Moody-Coquitlam a fait valoir un argument
intéressant en soulignant que la justice est représentée par une
femme, ce qui est assez pertinent ici. Si le projet de loi était adopté,
ce serait terrible que des innocents aillent en prison.
Rappelons-nous que le symbole de la justice est une femme.
Néanmoins, je voudrais savoir si la députée croit qu'en principe,
en tant que législateurs, nous devrions toujours protéger les droits
des innocents plutôt que le droit des Canadiens à la protection de la
vie privée. À son avis, qu'est-ce qui est plus important?
Mme Hayes: Monsieur le Président, la réponse à la question est
intéressante. Le fait que le Conseil canadien des avocats de la
défense croit effectivement que, à cause de cette mesure, des
innocents iront en prison est très préoccupant et reflète certaines
préoccupations que j'ai formulées dans mon exposé.
Compte tenu des besoins conflictuels existants, et certainement
depuis que je suis arrivée ici et que je participe à divers comités et
débats à la Chambre, le conflit au niveau des droits dans la société
canadienne est une question de plus en plus d'actualité. Il existe des
droits fondamentaux, et le droit d'établir son innocence dans le
cadre du processus judiciaire devrait être un droit prioritaire pour
tous les Canadiens. Le système judiciaire sert à protéger ceux qui
sont innocents et respectueux des lois.
Ma préoccupation-et, de toute évidence, je ne suis pas la seule à
penser ainsi-c'est que ce projet de loi pourrait bafouer les droits de
ceux qui sont innocents. Cette question me préoccupe énormément
et elle devrait préoccuper le gouvernement, même si cela n'est
peut-être pas le cas. Quoi qu'il en soit, elle devrait certainement
préoccuper les Canadiens. Je remercie le député de sa question.
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, je
voudrais poser une question à la députée de Port
Moody-Coquitlam à propos d'une manifestation qui a lieu
aujourd'hui devant le Parlement.
La mère et la grand-mère de Sylvain Leduc, tué brutalement à
Ottawa en octobre 1995, ont pris la tête d'une manifestation de
protestation qui est sur le point de commencer au moment où je vous
parle. Les deux femmes réclament l'abrogation de la Loi sur les
jeunes contrevenants. Elles affirment que l'équilibre du système
judiciaire a été complètement faussé à la suite des changements que
les gouvernements libéraux et conservateurs ont apportés depuis
trente ans.
Elles estiment que les sentences qui ont été prononcées à la fin de
la semaine dernière à l'issue du procès pour le meurtre brutal de leur
fils et petit-fils ne correspondent absolument pas à ce qu'elles
auraient dû être. Cela n'envoie pas le bon message. On ne retire pas
de la circulation ceux qui ont commis un crime aussi atroce. La
sentence qui a été rendue permettra à l'un des quatre auteurs du
crime de circuler librement, ou du moins d'être remis
immédiatement en liberté, tandis que les autres le seront très
bientôt. Certains le seront dans quelques mois, et celui qui a été
trouvé coupable d'homicide involontaire le sera d'ici un an et
quelque.
Il n'y a clairement plus aucun équilibre entre la protection des
droits de la victime, c'est-à-dire la famille, les parents et les amis du
jeune garçon qui a été tué, et la protection des droits du criminel.
La députée a abordé cet aspect, mais j'aimerais qu'elle nous en
parle davantage. Je voudrais tout particulièrement qu'elle établisse
un lien entre ce fait et la situation que nous observons, au point où
les victimes doivent organiser une manifestation devant le
Parlement pour essayer d'attirer l'attention publique sur ce
problème.
(1300)
Mme Hayes: Monsieur le Président, je remercie le député de sa
question. Dans les politiques du gouvernement, qu'il s'agisse de la
Loi sur les jeunes contrevenants ou de l'article 745, on remarque
une absence totale de soutien pour les droits des victimes dans
toutes les mesures législatives. Cela me porte à dire que le
gouvernement a trop longtemps fermé les yeux sur ce qui se passe
aux portes mêmes du Parlement parce qu'il est obnubilé par son
propre programme politique, qui semble plus axé sur la protection
des droits du criminel et la mise en place d'un système qui fait
disparaître toute notion de blâme et de responsabilité. Il vise plutôt à
faciliter la libération anticipée de personnes qui ont commis des
crimes horribles, et les victimes et leurs familles devront revivre ce
cauchemar. Il se soucie davantage de l'auteur du crime que de ceux
qui doivent en subir les conséquences.
C'est un thème qui revient couramment. C'est un exemple de
programme qui sert non les intérêts supérieurs de la population,
9367
mais ceux de groupes particuliers, au nom d'une idée étrange selon
laquelle le criminel doit avoir préséance sur le système. Les
Canadiens n'en sont pas là. Ce n'est pas non plus la position du Parti
réformiste.
La priorité du système de justice doit être le citoyen respectueux
des lois. Il devrait garantir la sécurité des citoyens respectueux des
lois en rendant nos quartiers sûrs pour nos familles, nos enfants et
leurs enfants. C'est ce que nos politiques garantiraient, de façon que
les Canadiens puissent vivre dans un pays plus sûr et plus fort.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le
Président, je remercie la députée pour son discours. Notre collègue
pourrait peut-être aborder une question qui a été soulevée par des
députés des deux côtés de la Chambre et qui a trait au syndrome de
la mémoire fictive ou au syndrome de la remémoration. Ces
syndromes, selon certains, représenteraient un aspect délicat du
projet de loi concernant la communication de dossiers.
L'Association des psychiatres du Canada a fait une mise en garde
à ce sujet. Elle a fait savoir que nous devons nous montrer très
prudents lorsque nous communiquons des dossiers, à cause de cette
technique de remémoration, où un adulte, sous traitement, peut se
remémorer son passé et trouver une explication à son comportement
actuel, fondée sur un souvenir qu'il avait du mal à se rappeler.
L'association a certaines réserves au sujet de la fiabilité de ces
techniques de remémoration. Elle craint notamment qu'on puisse
faire dire des choses aux patients. La question préoccupe-t-elle la
députée ou a-t-elle, comme moi, rencontré à son bureau des gens qui
sont très inquiets et qui nous exhortent à agir avec prudence, parce
que des vies peuvent être inutilement perturbées lorsque ces
techniques de remémoration donnent des résultats fautifs?
Mme Hayes: Monsieur le Président, je remercie mon collègue
pour sa question. Il y a eu, dans ma circonscription, des causes où
des accusations ont été portées, puis se sont ultérieurement révélées
fausses, à cause justement du syndrome de la mémoire fictive. Cela
a littéralement déchiré des familles.
Ces questions ont fait l'objet de nombreuses études aux
États-Unis. Des mises en garde ont été faites un peu partout en
Amérique du Nord, car des allégations de ce genre peuvent être très
destructrices si elles ne sont pas bien examinées et confirmées dans
le cadre de notre système de justice. Je me demande si le projet de
loi prévoit les vérifications qui s'imposent.
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Monsieur le Président, en
ce qui concerne le projet de loi C-46, je vais commencer par
présenter quelques observations sur le projet de loi lui-même. Puis
je m'attarderai sur la question du manque d'équilibre entre les
droits de l'accusé et du criminel et les droits de la victime dans notre
système judiciaire. Puis, je parlerai de la prévention de la
criminalité et du dossier libéral en la matière, dont il n'est
absolument pas question dans ce projet de loi ni dans aucun autre
mesure législative dont s'est occupé le présent gouvernement.
(1305)
Je vais me pencher sur ces trois points. Je vais commencer par
quelques observations sur le projet de loi C-46, Loi modifiant le
Code criminel (communication de dossiers dans les cas d'infraction
d'ordre sexuel).
Ce projet de loi vise à renforcer la protection de la vie privée et
des droits à l'égalité des plaignants, dans les poursuites intentées
pour divers délits d'ordre sexuel, en limitant le pouvoir des avocats
de la défense de demander que soient communiqués et divulgués
des documents privés comme des dossiers médicaux, des dossiers
de counselling ou des dossiers de thérapie. Tel est l'objet du projet
de loi.
Ce projet de loi n'est pas sans bien-fondé et je vais l'appuyer à la
deuxième lecture au moins. J'attends que le comité adoucisse
certaines répercussions possibles de ce projet de loi avant de
pouvoir dire que je l'appuierai à la troisième lecture.
Il faut voir quels amendements seront apportés à l'étape du
rapport. Il est à espérer que nous aurons alors une meilleure idée de
ce que ce projet de loi fera au juste. Toutefois, ce projet de loi n'est
pas sans mérite. Je l'appuierai donc à l'étape de la deuxième lecture.
Je ne parlerai pas longtemps du projet de loi lui-même. Je préfère
parler des modifications du système judiciaire en général, des
points dont ce projet de loi ne traite pas.
Dans le passé, les avocats de la défense demandaient des dossiers
privés comme des dossiers psychiatriques, d'aide sociale, d'emploi,
de counselling. Il semble que certaines personnes ne signalent pas
les agressions sexuelles dont elles sont victimes de crainte de voir
divulgués pareils dossiers personnels.
Voilà ce qui se produit. Il y a eu des réserves exprimées en ce
sens. Il y a probablement beaucoup d'agressions sexuelles qui n'ont
pas été signalées à cause de cela. Il faut donc prendre des mesures
afin d'éviter que la production de pareils dossiers ne soit
ultérieurement considérée comme une entrave aux conseils et à
l'aide fournis aux victimes dans les centres de soutien. Voilà qui
explique en partie la nécessité de prendre des mesures à cet égard.
Le Parti réformiste appuie les dispositions législatives qui
protègent davantage les citoyens respectueux des lois et les victimes
de crimes. Nous appuyons le principe du projet de loi.
Ultérieurement, je parlerai plus en détail de certaines de nos
réserves à ce sujet.
Nous sommes aussi conscients de la tradition de longue date qui
existe dans le système juridique canado-britannique et en vertu de
laquelle un accusé doit pouvoir se défendre, d'une manière
exhaustive et juste, des accusations qui pèsent contre lui. Il y a
évidemment les arguments que font valoir les opposants au projet
de loi.
Ceux-ci craignent que l'adoption du projet de loi n'empêche
l'accusé d'avoir un procès équitable. C'est une préoccupation
sérieuse. Les opposants soulèvent des questions qui méritent d'être
posées. À mon avis, nous n'avons pas encore la réponse à bon
9368
nombre d'entre elles. Cependant, nous devons toujours tenir compte
de la protection des droits de l'accusé.
C'est une question d'équilibre. J'en reparlerai davantage plus
tard. À mon avis, dans notre système de justice, l'équilibre entre les
droits des accusés, des criminels, de ceux qui ont été reconnus
coupables d'un crime, d'une part, et ceux des victimes, d'autre part,
laisse beaucoup à désirer. Il n'y a pas d'équilibre.
Aujourd'hui, je parlerai beaucoup de cela. Il me reste toutefois
d'autres observations à faire sur le projet de loi lui-même. La
députée de Port Moody-Coquitlam a déjà abordé cette question.
Dans certains cas d'agression sexuelle, l'accusé est un ex-conjoint
ou un conjoint de la personne qui dépose une plainte en justice.
Dans certains cas, nous avons constaté que des accusations étaient
portées uniquement pour procurer un avantage supplémentaire à
l'une des parties dans une querelle relative à la garde d'un enfant.
Nous apprenons de plus en plus que ces accusations sont
fréquemment non fondées.
(1310)
Le député a posé la question: qui est la vraie victime dans ces
cas-là? Compte tenu de l'incidence de plus en plus grande de
fausses accusations qui sont portées, nous devons veiller à ce que
personne n'en souffre jusqu'à ce que les accusations soient
prouvées. C'est un problème dont d'autres députés parleront
sûrement.
Je voudrais aborder deux questions qui sont liées à ce projet de
loi. La première a trait à l'équilibre dans notre système judiciaire ou
au manque d'équilibre entre les droits des victimes et ceux des
accusés. La seconde concerne la prévention du crime et l'inaction
du gouvernement en cette matière.
Le gouvernement a dit qu'il agirait, mais il n'a rien fait de
vraiment efficace. Je vais présenter certaines des propositions du
Parti réformiste à cet égard, mais avant je parlerai de l'équilibre
dans notre système judiciaire.
De façon générale, il n'y a pas de véritable équilibre entre les
droits des accusés et ceux des victimes. Dans les années 70, les
gouvernement libéraux ont, de propos délibéré, modifié cet
équilibre. Les droits des victimes et la protection de la société ne
sont plus la priorité dans notre société. En conséquence, la
protection des accusés et des criminels est davantage prioritaire
dans notre système judiciaire. Il est clair que l'équilibre est rompu.
Il importe de rétablir l'équilibre qui existait avant que les
gouvernements conservateurs et libéraux le rompent.
Dans les années 70, un solliciteur général libéral a dit que
pendant trop longtemps la principale priorité du système de justice
avait été la protection de la société et que les droits et la protection
des criminels n'étaient pas assez prioritaires. Les changements
apportés depuis montrent que c'est ce que pensaient vraiment les
libéraux. Ils l'ont démontré dans les lois à maintes reprises. Ils ont
déformé ce que les Canadiens considèrent comme un équilibre qui
convient.
Plusieurs projets de loi adoptés par le gouvernement actuel ont
aggravé le déséquilibre entre la protection de la société et les droits
des criminels.
Le projet de loi C-65 vise à protéger les espèces animales et
végétales menacées. L'intention est bonne. Personne ne dira que ce
n'est pas la chose à faire. Toutefois, j'ai quelques réserves à
formuler à l'égard du projet de loi. L'une d'elles a trait à un manque
d'équilibre. Une deuxième a trait au fait que le projet de loi sur les
espèces menacées ne prévoit en fait aucune compensation pour les
propriétaires terriens et les usagers si l'on détermine qu'une espèce
menacée vit sur les terres en cause.
(1315)
D'après le texte actuel du projet de loi, la protection d'espèces
menacées pourrait leur coûter très cher s'ils ne reçoivent aucune
indemnisation. Si les amendements proposés sont adoptés,
l'indemnisation ne se fera que dans le cadre d'un processus
assimilable à des dons de charité. Aucune indemnisation n'est donc
prévue, ce qui pourrait imposer un fardeau financier très lourd aux
propriétaires ou aux utilisateurs de terrains.
Une autre préoccupation, c'est la nature interventionniste très
marquée du projet de loi. Cela est très fréquent de la part du
gouvernement actuel. Pourtant, ce qu'il faut, c'est de la
collaboration. Nous avons constaté que les propriétaires et les
utilisateurs de terrains collaborent volontairement à la protection
des espèces menacées au Canada.
On se préoccupe aussi de l'équilibre entre les droits de la société
et les droits de l'accusé et du criminel. Ce qui est intéressant dans le
projet de loi, c'est qu'un citoyen pourra en accuser un autre de
causer du tort à une espèce menacée en gardant l'anonymat. La
personne qui porte les accusations peut demander que son nom ne
soit pas divulgué et, aux termes du projet de loi, la personne accusée
n'aura jamais le droit de savoir le nom de cette personne ou d'y être
confrontée au tribunal. C'est là le genre de projet de loi que nous
présente le gouvernement. Nous ne pouvons pas accepter cela. Nous
avons vu le même genre de mesures législatives permettre des abus
contre les droits des citoyens et souvent contre des citoyens
respectueux des lois. Par exemple, le projet de loi C-68 sur les
armes à feu porte atteinte aux droits et aux libertés des citoyens
canadiens respectueux des lois. Nous voyons de telles mesures
législatives très interventionnistes comme ce projet de loi et, pour
leur faire contre-poids, on n'a que des mesures législatives de
portée très restreinte comme le projet de loi C-46.
J'appuierai le projet de loi parce qu'il présente certains
avantages, mais j'attendrai l'examen final pour prendre une
décision définitive.
Depuis 1993, les libéraux n'ont rien fait pour rétablir l'équilibre
du système de justice. Ils ont empiré les choses, contrairement à ce
que réclament les Canadiens. Si les libéraux faisaient ce que
réclament les Canadiens, nous n'aurions pas vu aujourd'hui ce qui
est arrivé avec la mère et la grand-mère de Sylvain Leduc, qui a été
sauvagement assassiné à Ottawa en octobre 1995. On laisse les
9369
victimes, c'est-à-dire la mère et la grand-mère, essayer de rétablir
l'équilibre dans la détermination de la peine et de faire valoir leurs
droits.
Les jeunes contrevenants qui commettent des crimes crapuleux
retrouvent très vite leur liberté. Cela ne contribue certainement pas
à dissuader les gens de commettre des crimes semblables. Nous ne
faisons certainement rien non plus pour protéger la société en
imposant à ces meurtriers des peines si peu sévères. Nous ne
verrions pas ce genre de chose si notre système de justice était
équilibré, ce qui n'est manifestement pas le cas.
Cela étant dit, je crois qu'il est important de préciser ce que le
Parti réformiste ferait à cet égard. Notre programme pour un
nouveau départ contient une série de propositions qui aideraient à
rétablir cet équilibre. Premièrement, il faut reconnaître que notre
système de justice est déséquilibré et que, dans certains cas, il
penche davantage en faveur des droits des criminels qu'en faveur
des droits des victimes.
(1320)
Une façon de rétablir l'équilibre serait d'avoir une déclaration
des droits des victimes, comme mon collègue de Fraser
Valley-Ouest l'a proposé. Cette idée est bien reçue et appuyée par
les Canadiens et par la Chambre. Il existe un document où sont
énumérés dix droits précis que devraient avoir les victimes. Même
si cette idée a été appuyée par la Chambre il y a presque un an déjà, y
compris par le parti ministériel, rien n'a encore été fait à cet égard.
Il reste encore un an et demi avant que le gouvernement ne soit
obligé de tenir des élections, mais je suis certain que rien ne serait
fait avant le déclenchement des élections. C'est très malheureux.
Cela montre que le gouvernement n'accorde pas une grande
importance à la nécessité de rééquilibrer notre système de justice.
Je vais vous lire certains des points que renferme la déclaration
des droits des victimes et qui aiderait à rétablir l'équilibre et à
donner aux victimes certains droits. Tout d'abord, nous voulons que
les victimes aient le droit d'être informées à chaque étape du
processus, y compris en ce qui concerne les services disponibles.
Ordinairement, cela ne se fait pas. L'accusé est toujours informé. Le
criminel, celui qui a été reconnu coupable d'un crime, est toujours
informé.
Je ne sais pas combien de recours judiciaires a eus Clifford
Olson, ce meurtrier en série. Il en a plusieurs en cours actuellement
et il connaît ses droits.
M. White (Fraser Valley-Ouest): Plus de trente.
M. Benoit: Cela en dit long sur l'absence d'équilibre dans notre
système. Pourquoi un tueur en série aussi sadique que Clifford
Olson a-t-il accès au système judiciaire aux frais des contribuables?
Il s'agit visiblement de requêtes frivoles. Où est donc l'équilibre
dans notre système? Les Canadiens en ont assez de cela et ils ont
bien raison. Le député de Fraser Valley veut remédier à cette
situation en donnant au moins autant de droits aux victimes qu'aux
meurtriers et aux accusés.
Deuxièmement, la victime aurait le droit d'être informée de la
situation du délinquant tout au long de la procédure, notamment,
mais non exclusivement, des projets de remise en liberté de ce
dernier. Le bon sens le veut. Comment croire qu'un individu qui a
commis un crime très grave contre quelqu'un puisse être libéré à
l'insu de sa victime? La victime qui est directement concernée sera
inquiète de la libération possible d'un individu qui peut récidiver.
Les parents et les proches de la victime seront également
préoccupés.
Troisièmement, nous voulons que la victime ait le droit de choisir
de faire une déclaration écrite ou verbale aux audiences de
libération conditionnelle, avant la détermination de la peine et lors
de l'examen judiciaire.
On me fait signe que mon temps de parole est terminé. J'ai encore
beaucoup à dire sur cette question et j'ai l'intention d'y revenir d'ici
au déclenchement des élections et tout au long de la campagne
électorale, à l'instar de mes collègues réformistes et de tous les
Canadiens qui s'intéressent à la politique. Cette question
constituera un enjeu majeur aux prochaines élections. Le
déséquilibre actuel est absolument inacceptable.
Une voix: Quelles élections?
M. Benoit: Les élections qui auront lieu d'ici un an et demi. La
loi l'exige, à moins que le député ne croie que nous devions annuler
la tenue d'élections et opter pour un système antidémocratique.
Mais je suis sûr que ce n'est pas ce qu'il préconise.
En terminant, j'accorderai mon appui au projet de loi à l'étape de
la deuxième lecture. Attendons de voir ce qui ressortira de l'étude
en comité. Nous en apprendrons davantage sur la portée réelle de
certains aspects du projet de loi qui renforceront les droits des
accusés. Ainsi, personne ne m'accusera ou n'accusera le Parti
réformiste de ne s'intéresser qu'aux droits des victimes et de la
société. Nous nous préoccupons également des droits des victimes.
Nous l'avons toujours été. Aussi, j'accorde mon appui au projet de
loi parce qu'il contribuera à protéger ces droits.
(1325)
M. Dennis J. Mills (Broadview-Greenwood, Lib.): Monsieur
le Président, les généralisations irréfléchies des députés réformistes
qui nous reprochent de ne pas défendre les droits des victimes sont
très injustes.
Il est tout à fait juste que nous ayons ici un débat constructif. Je
respecte le fait que le Parti réformiste a toujours fait du déficit et de
l'ordre public son principal cheval de bataille.
Le ministre de la Justice a modifié ces quatre dernières années
plus de lois qu'il n'en a été modifié dans toute l'histoire de notre
pays. Les députés d'en face parlent toujours de manque d'équilibre.
Ils nous reprochent toujours vouloir défendre les droits des
criminels par rapport à ceux des victimes. Je représente une
circonscription du centre-ville de Toronto,
Broadview-Greenwood. C'est là que se trouve la plus grande
prison du pays.
Les questions d'ordre public, de criminalité et de délinquance
juvénile tiennent une place essentielle dans ma collectivité. Nous
avons fait de grands progrès dans ce domaine ces quatre dernières
années. Que le Parti réformiste fasse une affirmation aussi générale,
9370
qu'il reproche au gouvernement de ne pas s'intéresser aux questions
d'ordre public, c'est déformer la vérité. Lors des prochaines
élections, nous dresserons la liste détaillée de toutes les lois qui ont
été modifiées.
Cette mesure législative est-elle parfaite? Je ne dis pas qu'elle le
soit. Que ce soit dans n'importe quel domaine, je n'ai jamais vu une
seule mesure législative qui le soit. Nous devons tous faire des
compromis, mais le gouvernement ne fait en aucun cas passer les
droits des criminels avant ceux des victimes.
M. Benoit: Monsieur le Président, c'est tout à fait déplorable
d'entendre le député faire de tels commentaires. Il a fait preuve de
bon sens, par le passé, dans plusieurs domaines, mais pas cette fois.
Il ne peut pas réellement croire ce qu'il dit. Je suppose qu'il le croit,
mais je trouve cela tellement surprenant.
Le ministre de la Justice a modifié beaucoup de lois, mais il n'a
évidemment fait que des retouches insignifiantes. Il n'a pas fait les
changements nécessaires. J'ai trois exemples précis de lacunes qui
font que la loi n'assure pas l'équilibre souhaitable.
Premièrement, où est notre convention sur les droits des
victimes? Une motion du député de Fraser Valley-Ouest a été
adoptée à la Chambre il y a environ un an. Où est la loi qui doit y
donner suite? Le processus n'est même pas commencé. On le
reporte sans cesse. C'est clair que le gouvernement n'appuie pas ce
principe.
Deuxièmement, où est la loi qui empêcherait Clifford Olson de
présenter une demande de libération conditionnelle anticipée? Où
est la loi qui empêcherait Clifford Olson d'intenter plus de 30
procès aux frais des contribuables? Où est cette loi? Elle n'existe
pas. Le député devrait avoir honte.
Troisièmement, où est la loi qui éviterait à la famille de Sylvain
Leduc de manifester devant la Chambre des communes pour obtenir
les changements qui rétabliraient l'équilibre du système de justice
pénale?
(1330)
Où est cette loi? Elle n'existe pas, et c'est pourquoi cette
manifestation a lieu. C'est triste, et c'est incroyable de voir ces
enjeux rester en suspens tandis que les députés libéraux affirment
avoir fait beaucoup de choses à ce chapitre. Quand on regarde les
faits, c'est frustrant. Il faut faire quelque chose, en parler ne suffit
pas.
M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, c'est avec plaisir que je prends la parole pour commenter
le projet de loi C-46 et pour reconnaître qu'il a pour objet de
renforcer la protection des droits des plaignants à la vie privée et à
l'égalité dans les poursuites pour une variété de délits sexuels. Je
pense qu'à cet égard, le gouvernement est sur la bonne voie.
Comme je suis l'auteur de la déclaration nationale des droits des
victimes, dont il a été question ici, j'aimerais préciser certaines
choses à ce sujet et remettre mon collègue libéral, le député de
Broadview-Greenwood, sur le droit chemin en ce qui concerne la
déclaration des droits des victimes.
À mes yeux, et à ceux des Canadiens d'un bout à l'autre du pays,
les droits des victimes ne sont pas des modifications à la loi. Ce
n'est pas le rafistolage de certains détails de la loi sur le contrôle des
armes à feu. Ce ne sont pas des changements mineurs à la Loi sur les
jeunes contrevenants. Ce ne sont pas des modifications à la Loi sur
la libération conditionnelle. Ce sont des droit précis que les gens
réclament du fait que, dans ce pays, la justice criminelle-comme
on l'appelait-est devenue une industrie pour les avocats.
Je peux vous donner toutes sortes d'exemples. J'ai assisté à de
nombreuses audiences de la Commission des libérations
conditionnelles, à de nombreuses audiences de détermination de la
peine, et ainsi de suite. J'étais présent à Vancouver lorsque, insulte
ultime pour les victimes, l'auteur d'une série de meurtres commis
dans ce pays-je parle d'Olson-ayant eu droit à une audience en
vertu de l'article 745, a débattu des termes de sa peine avec le juge.
C'était tout à fait révoltant.
Permettez-moi de vous donner une idée du problème en ce qui
concerne les droits des victimes. Je pense que le gouvernement les
considère presque comme des privilèges. C'est le genre de situation
où le gouvernement décide qu'il va vous accorder quelques droits, il
va même aller jusqu'à modifier la législation pénale, le Code
criminel, et il va vous dire en quelque sorte qu'il s'occupe de vous.
Ce n'est pas ce que veulent ces gens.
Ils veulent un droit uniforme dans tout le pays, qui leur permette
de savoir à quoi s'attendre. Qu'ils sachent qu'en tant que victime ils
ont des droits, tout comme les criminels en ont aujourd'hui. C'est
tout ce qu'ils demandent. Ce n'est pas beaucoup demander. Le
gouvernement devrait résoudre cela rapidement. Il aurait pu le faire
il y a trois ans, ou même l'an dernier, après que le ministre de la
Justice eut dit, le 29 avril, qu'il était d'accord avec cela. Il aurait pu
agir l'automne dernier, l'hiver passé. Je crois savoir que nous en
parlerons demain. Le ministre sait, comme moi, que demain il sera
trop tard. Le gouvernement va déclencher des élections et il ne fera
rien.
Lorsque le député dit que le ministre de la Justice a modifié plus
de mesures législatives que quiconque auparavant, il a peut-être
raison, mais il ne voit pas que ce n'est pas ce que nous recherchons.
Je vais vous donner un exemple. Le gouvernement a présenté le
projet de loi C-41 sur les condamnations avec sursis. J'ai assisté il y
a quelques semaines à une audience résultant d'un appel d'une
condamnation avec sursis. Les arguments des avocats de la défense
étaient consternants. Il se trouve que la condamnation avec sursis
n'existe nulle part ailleurs. C'est une innovation du ministre de la
Justice. C'est l'argument que j'ai entendu en cour de la part des
avocats de la défense et de la couronne, je suppose donc que c'est
vrai.
(1335)
La condamnation avec sursis signifie que vous restez en liberté, à
condition de ne pas récidiver. C'est aussi simple que cela.
Dans la collectivité où j'habite, Darren Ursel a rencontré une
jeune mère de deux enfants dans un restaurant. Il l'a invitée à boire
un coke. Une fois dans la voiture, derrière le restaurant, il a
verrouillé les portières, basculé le dossier du siège où elle s'était
assise et
9371
déchiré ses vêtements. Ne pouvant pas bander, il l'a violée avec le
manche d'une raquette, en avant et en arrière, la déchirant
gravement. Elle a souffert 90 minutes avant de réussir à s'échapper.
Ce n'est pas lui qui l'a laissée partir.
Devant le juge Harry Boyle, qui a prononcé le jugement, il a
déclaré qu'il avait été tendre par moments. Il s'agissait de sa
première condamnation et il regrettait beaucoup ses actes. C'est ce
qu'il a dit au juge. Grâce à notre ministre de la Justice, il a obtenu
une condamnation avec sursis. Cela signifie qu'il ne sera pas
incarcéré. Je crois bien que c'est la première fois de ma vie que je
vois une chose aussi terrible. Le prévenu a été exempté de
l'emprisonnement et a profité d'une condamnation avec sursis.
Ne le refaites plus; c'est ce qu'on lui dit. S'il récidive, peut-être
vont-ils agir. Il était libre le lendemain. En fait, lors de l'appel, ce
scélérat était tout souriant dans la salle d'audience.
Voilà le genre de modifications qui sont présentées à cette
Chambre. Durant l'instruction de l'appel, j'ai entendu les avocats
de la défense dire au tribunal que les libéraux favorisaient ce genre
de condamnation avec sursis parce que nos prisons sont surpeuplées
et qu'ils veulent incarcérer le moins possible de prévenus.
Par ailleurs, j'ai entendu bien des femmes de tous les coins du
pays demander: «Comment se fait-il qu'ils peuvent violer des
femmes, les sodomiser et ne pas être incarcérés?» Franchement, de
telles mesures nous ramènent vingt ans en arrière et incitent les
femmes à se taire, comme elles le faisaient auparavant dans ce
genre d'affaires. Si elles subissent des agressions, comme celle
infligée par Darren Ursel, elles refuseront d'exposer au grand jour
leur vie privée si elles savent que les coupables ne seront pas punis.
Voilà pourquoi toute la situation est restée cachée pendant tant
d'années. Dans ce pays, la peine doit être proportionnelle au crime.
J'entends souvent les libéraux dire qu'ils se préoccupent des
droits des victimes; si tel est le cas, j'aimerais bien savoir comment
on peut expliquer une condamnation avec sursis dans une cause
comme celle de Darren Ursel. Je présenterai cette semaine à la
Chambre une pétition portant 13 000 signatures de citoyens qui
croient que cette façon de faire est tout à fait injuste. Je suis aussi de
cet avis.
Par conséquent, ne me dites pas que notre ministre de la Justice a
présenté plusieurs projets de loi et que vous vous préoccupez des
droits des victimes. Je ne vois rien de tout cela dans les
condamnations avec sursis. C'est également le cas de la jeune dame
à laquelle j'ai eu le plaisir de parler à un certain nombre de reprises.
Il en va de même de la prochaine femme ou de la prochaine jeune
fille victime du même sort.
C'est ce qu'il y a de mal à essayer de lier les droits des victimes à
des modifications au système de justice. On peut remonter au projet
de loi C-45, qui retire le droit automatique de présenter une
déclaration de la victime sur les répercussions du crime dans le
cadre d'une audience ayant pour but de déterminer si les auteurs
d'infractions graves peuvent avoir droit à une libération anticipée
après 15 ans. Cela est également répréhensible.
Nous avons lutté pendant trop d'années pour que des gens
puissent s'exprimer, pour qu'ils aient le droit de le faire. Même
aujourd'hui, lorsque j'écoute des audiences de détermination de la
peine, etc., je constate qu'on supprime certains passages de
déclarations de victimes sur les répercussions du crime parce que la
défense juge que cela pourrait nuire à la réputation de l'accusé. De
plus, cela s'est produit dans une affaire où le bon accusé avait battu
à mort à coups de bâton une jeune femme de ma circonscription en
la frappant à 26 reprises. Il ne voulait pas qu'on puisse entendre les
déclarations des survivants de la victime dans le cadre de la
détermination de la peine. Il avait déjà été reconnu coupable.
(1340)
Nous devons donc nous demander ce que les gens réclament au
juste. Ils ne veulent pas toute une série d'autres modifications au
droit pénal. Même si c'est peut-être un souhait qu'ils ont, ce n'est
certes pas l'objectif d'une déclaration des droits des victimes.
Je suis tout à fait consterné par les avocats de la défense, surtout
par certaines des observations qu'ils font au sujet des victimes et de
leurs droits. Je vais vous faire quelques citations à ce sujet. Si vous
pensez vraiment que c'est la voie dans laquelle notre pays devrait
aller, vous devriez alors voter pour les libéraux. Dans le cas
contraire, vous devriez envisager d'autres solutions.
Écoutez ce qu'un avocat de la défense a dit des victimes: «On ne
peut jamais parler de victime. Il s'agit simplement d'un état
d'esprit.» Un autre a affirmé que les victimes veulent que quelqu'un
d'autre règle leurs petits problèmes.
Un autre encore a déclaré que la déclaration de la victime sur les
répercussions du crime ne servent qu'à laisser les victimes
décharger leur bile sur quelqu'un et qu'on devrait les interdire.
Recevons-nous le message? Au Canada, cela fait longtemps qu'il
n'est plus question de justice pénale. Nous sommes confrontés à une
industrie juridique. Permettez-moi de poursuivre.
Un criminologue a déclaré que les groupes de défense des droits
des victimes n'étaient plus utiles, qu'ils voulaient simplement que
le droit pénal se limite à des mesures punitives plutôt que des
mesures d'adaptation. Cette affirmation est tout à fait fausse. Je n'ai
pas encore rencontré une victime qui cherchait à obtenir
simplement des mesures punitives. Tout ce qu'elles voulaient,
c'était que justice leur soit faite.
Les gens de l'Ontario, au moment même où une grande bataille
se prépare sur la scène politique, devraient prêter l'oreille à ceux qui
parlent de ce qui est juste et des changements qui s'imposent. Le
gouvernement se fiche des droits des victimes. «Les victimes ne
devraient pas avoir le droit de faire des présentations devant un juge
parce que cela donnerait lieu à un système judiciaire arbitraire.»
C'est tout à fait faux, et cela sort de la bouche d'un autre
criminologue. Je pourrais encore citer bien d'autres extraits, mais je
pense m'être bien fait comprendre.
Les victimes ne sauraient se contenter de légères retouches à la
loi concernant la justice criminelle ou, comme on dit aujourd'hui, le
Code criminel. Elles souhaitent des droits clairement définis qui
s'appliquent à notre société tout entière, de Terre-Neuve à la Co-
9372
lombie-Britannique. Monsieur le Président, combien de temps me
reste-t-il encore?
Le président suppléant (M. Milliken): Sept minutes.
Une voix: Une minute.
M. White (Fraser Valley-Ouest): Un député libéral voudrait
limiter mon temps de parole à une minute. N'en déplaise au député,
il me reste sept minutes et il n'aura pas d'autre choix que d'écouter.
Je tente de faire valoir que cette question va au-delà de la ligne de
parti. Quelque chose ne va pas dans ce pays. Les victimes ont des
droits et il faut les faire respecter. Il ne s'agit pas de privilèges qu'un
gouvernement accorde au peuple.
Penchons-nous sur les valeurs fondamentales, sur les droits
fondamentaux que nous souhaitons voir respectés dans l'ensemble
du pays. Pourquoi ne pas définir le mot «victime»? J'ai rendu visite
à des gens peu de temps après qu'une jeune femme de ma
circonscription a été assassinée. Sa maman, Sue Simmons, était très
mal en point, on le serait à moins. Sian a été assassinée, tuée par
balle. Chris, le père de Sian, ne pouvait pas obtenir de l'aide pour
Sue, la mère, parce qu'elle n'était pas considérée comme une
victime. On prétendait que la victime, c'était Sian et uniquement
Sian. C'est tout à fait faux. S'il s'agit de ma fille, de mon fils, de ma
femme, je suis également une victime.
(1345)
Le gouvernement ne parvient pas à comprendre l'ampleur du
phénomène. Il s'aggrave rapidement en raison du taux de
criminalité.
J'ai rencontré cinq parents samedi. Ils m'ont raconté que trois
contrevenants avaient essayé de faire monter deux jeunes filles dans
une voiture. Les victimes, c'étaient les deux jeunes filles, leurs
parents, leurs amis et le reste. Le gouvernement est d'avis qu'un
crime ne fait qu'une ou deux victimes. Or, en réalité, tous ces gens
sont des victimes.
Les libéraux sont en difficulté. Ces gens se joignent à des groupes
revendiquant les droits des victimes. Les libéraux ne comprennent
pas pourquoi on fait tout ce bruit, mais ils le devront, parce que les
victimes ont besoin de ces droits.
Les victimes doivent être informées de leurs droits. Cela tombe
sous le sens. Inutile de donner plus d'explications. Alors, pourquoi
ne pas l'indiquer dans le projet de loi?
J'ai entendu un avocat dire que cela coûterait plus d'argent.
Qu'on prenne un peu d'argent chez les détenus. Qu'on prenne
quelques-unes des subventions que le gouvernement accorde à ses
amis pour se faire réélire. L'argent devrait être investi au bon
endroit.
Les victimes devraient avoir le droit d'être informées de la
situation du contrevenant tout au long du processus. Qu'y a-t-il de
mal à cela? Elles devraient savoir où il est incarcéré, où il s'établira
à sa sortie et quand il le fera. Elles devraient connaître les conditions
de sa mise en liberté.
Je pourrais raconter à la Chambre des histoires d'horreur sur ce
qui se passe lorsque que le contrevenant, après être sorti de prison et
avoir changé son nom, apparaît sur le seuil de la porte de sa victime
et la bat sauvagement, alors qu'elle ignorait totalement qu'il était en
liberté conditionnelle.
Les victimes doivent avoir le droit de présenter un nombre
illimité de déclarations de victime, qu'elles soient orales ou écrites,
aux audiences de détermination de la peine et aux révisions
judiciaires. Le gouvernement leur a enlevé ce droit qu'elles avaient
d'office avec le projet de loi C-45.
À Vancouver, j'ai vu les parents des victimes de Clifford Olson
demander le droit de présenter une déclaration de victime. Pour
l'amour du ciel, comment sommes-nous tombés aussi bas? Nous
devrions avoir honte.
Les victimes devraient être informées en temps opportun de
l'intention du ministère public de négocier un plaidoyer avant qu'il
ne soit présenté à la défense. Qu'y a-t-il de mal à cela? Combien de
fois avons-nous entendu dire que des gens se sont présentés devant
un tribunal pour apprendre que l'accusation était changée et qu'il
n'était plus question de meurtre au premier degré, mais
d'agression? Au lieu d'une peine d'emprisonnement à perpétuité, il
n'était plus question que d'une peine de deux ou trois ans.
Il faut traiter décemment les victimes et écouter ce qu'elles ont à
dire. Elles devraient avoir le droit de savoir si la personne reconnue
coupable d'une agression sexuelle est atteinte d'une maladie
transmissible sexuellement. Qu'y a-t-il de mal à cela?
Dans ma circonscription, Tasha aurait bien voulu être au courant.
Elle a été violée par un individu qui n'est même pas un citoyen
canadien. Il a aujourd'hui quitté le pays, Dieu merci! Nous ne
devrions pas avoir à demander ce genre de choses ni à aller en prison
pour le quémander; cela devrait être un droit. On ne devrait pas
modifier le Code criminel en conséquence, mais simplement
énoncer ce droit, le proclamer.
(1350)
La victime devrait savoir pourquoi la police a décidé de ne pas
porter des accusations. Elle devrait être protégée contre toute
personne qui tente de l'intimider, de la harceler ou de s'opposer à
ses droits. Dès qu'une victime porte plainte, la police devrait donner
suite à des accusations de violence conjugale. Ce n'est pas trop
demander au Canada. Je ne comprends vraiment pas les hésitations
du gouvernement libéral en place à cet égard.
M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président,
j'ai écouté attentivement les propos du député de Fraser
Valley-Ouest. Il ne fait aucun doute que, de tous les députés de la
Chambre-non pas seulement de notre parti, mais bien de la
Chambre-notre collègue est celui qui a fait le plus pour porter la
question des victimes et de leurs droits à l'attention des Canadiens,
et ce depuis peut-être 25 ans, et je l'en félicite.
Il est intéressant de constater que, en plus du projet de loi C-46,
déposé par le ministre de la Justice et intitulé Loi modifiant le Code
criminel (communication de dossiers dans les cas d'infraction
d'ordre sexuel), le Feuilleton d'aujourd'hui renferme d'autres
mesures législatives émanant du ministre de la Justice, soit le projet
de loi C-27, Loi modifiant le Code criminel (prostitution chez les
enfants, tourisme sexuel impliquant des enfants, harcèlement
criminel et mutilation d'organes génitaux féminins), et le projet de
loi C-55, Loi modifiant le Code criminel (délinquants présentant un
risque élevé de récidive), la Loi sur le système correctionnel et la
mise en
9373
liberté sous condition, la Loi sur le casier judiciaire, la Loi sur les
prisons et les maisons de correction et la Loi sur le ministère du
Solliciteur général.
Il est particulièrement intéressant de noter que les projets de loi
C-27 et C-55, qui englobent un grand nombre de questions visées
par le Code criminel, sont en fait des projets de loi omnibus.
Qu'est-ce que cela signifie? Je suis convaincu que cela signifie que
des élections s'en viennent. Le ministre de la Justice est en train
d'essayer de faire le ménage. Les projets de loi C-27 et C-55 sont
des projets de loi omnibus qui englobent une foule de détails dont le
ministre aurait pu et aurait dû s'occuper depuis trois ans et demi.
Qu'est-ce que le ministre a plutôt choisi de faire? Il a décidé de
présenter ces mesures à la toute dernière minute, juste avant le
déclenchement d'élections. Par conséquent, lorsque je regarde le
projet de loi C-46, que je vois que le ministre de la Justice s'est enfin
décidé à présenter cette mesure, et que je constate, comme l'a
souligné le député de Fraser Valley-Ouest, qu'on a laissé languir sa
motion visant à adopter une déclaration des droits des victimes, je
me demande si les modifications au Code criminel renfermées dans
les projets de loi C-46, C-27 et C-55 sont plus importantes que la
motion présentée par le député à la Chambre pour que celle-ci
adopte une déclaration des droits des victimes, de telle sorte que les
victimes dans notre pays aient leur mot à dire devant les tribunaux,
qu'elles aient un certain statut dans le cadre du processus judiciaire.
Il ne fait aucun doute dans mon esprit que le ministre fait preuve
d'un cynisme éhonté. Il fait le ménage à la toute dernière minute.
J'aimerais que le député de Fraser Valley-Ouest nous fasse part
de son opinion. Il me semble que le ministre de la Justice a eu tout le
temps voulu pour prendre ces initiatives. Il me semble qu'il a eu
toutes les occasions voulues pour faire avancer les choses
relativement à une déclaration des droits des victimes. Pourtant,
malgré le fait que des élections s'en viennent, celui-ci ne fait
toujours rien à cet égard.
(1355)
Le ministre a pris le temps de faire son ménage et de présenter à
la dernière minute des mesures qui touchent d'autres questions.
J'aimerais que le député nous donne son point de vue. Le fait que le
ministre de la Justice n'ait pas, depuis longtemps déjà, donné suite à
la motion du député en faveur d'une déclaration des droits des
victimes défie toute logique.
M. White (Fraser Valley-Ouest): Monsieur le Président, je
remercie mon collègue de sa question. Son observation est très
juste.
On m'a prévenu vers la fin de la semaine dernière que le Comité
de la justice discutera de la déclaration des droits des victimes
demain, de 15 h 30 à 17 h 30. Je disposerai d'une heure pour faire un
exposé et répondre aux questions des membres du comité, et les
défenseurs des droits des victimes auront une heure eux aussi pour
faire leur exposé. Une heure pour parler des victimes devant un
comité, et c'est tout.
Il y a plus de victimes au Canada que le gouvernement veut bien
le comprendre. Pourquoi ne pas recueillir leur opinion sur cette
question importante? Parce que le gouvernement n'en a pas envie.
Voilà pourquoi je soutiens qu'il s'agit d'une question importante, et
je le dis spécialement aux gens de l'Ontario, où une bonne partie de
la prochaine campagne électorale se disputera, et plus spécialement
aux jeunes, dont certains connaissent des victimes et se demandent
pourquoi telle ou telle chose ne se fait pas. Il faut nous atteler à cette
tâche, et la mener à bien. Nous ne devrions jamais insulter ainsi les
victimes en leur donnant une heure à la Chambre des communes,
moins le temps réservé aux questions, soit donc 40 minutes
probablement, pour discuter de cette question. Tout cela,
simplement pour que le ministre de la Justice puisse dire, pendant la
campagne électorale, que les libéraux se sont occupés de la
question. Voilà à quoi se résume tout cet exercice. Cela est injuste et
trompeur.
Cela n'est pas passé inaperçu. Comme l'a dit mon collègue, telle
est exactement la situation. Le gouvernement propose toutes sortes
de modifications pour remonter avant les élections la cote du
ministre de la Justice qui est à la baisse. Il y a une chose que les gens
ne comprennent pas, cependant: ces modifications que l'on propose
d'apporter à la loi doivent être examinées au comité, puis revenir à
la Chambre pour la deuxième et la troisième lectures, et ainsi de
suite. Tout cela n'ira cependant nulle part. Quand les élections
seront déclenchées, le projet mourra au Feuilleton.
Nous devons nous préoccuper de l'avenir, et l'avenir commence
avec les enfants, les victimes et les personnes âgées, dont beaucoup
sont victimes de crimes.
Le Président: Comme il est presque 14 heures, nous passons
maintenant aux déclarations des députés.
______________________________________________
9373
DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
[
Traduction]
M. Ron Fewchuk (Selkirk-Red River, Lib.): Monsieur le
Président, c'est avec grand plaisir que je prends aujourd'hui la
parole pour féliciter les participants au Forum pour jeunes
Canadiens.
Depuis 1976, le Forum a donné à plus de 10 000 jeunes
Canadiens et à leurs enseignants l'occasion de discuter avec des
décideurs importants, d'observer le fonctionnement du
gouvernement et de reproduire les procédures du gouvernement.
Bref, ce projet leur permet d'apprendre ce qu'est le Canada et ce que
veut dire être Canadien.
Le mercredi 19 mars, j'ai eu le plaisir de rencontrer Rebecca
Ann, une participante de la circonscription de Selkirk-Red River,
et de dîner avec elle. Je la félicite, elle et ses camarades, de leur
intérêt et du dynamisme avec lequel ils veulent devenir les leaders
de notre pays.
9374
[Français]
M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans,
BQ): Monsieur le Président, voilà 17 ans que les bahaïs de la
République islamique d'Iran sont systématiquement persécutés,
harcelés et victimes de discrimination, la seule et unique raison
invoquée étant leur conviction religieuse.
Le document officiel dans lequel le gouvernement iranien énonce
une politique coordonnée pour venir à bout de la question bahaï est
toujours en vigueur.
(1400)
L'étranglement économique et la répression sociale de cette
communauté se poursuivent rapidement. Il semble que les pressions
augmentent constamment et que le gouvernement iranien soit en
train d'imposer petit à petit et systématiquement des restrictions et
limitations à la vie de la communauté bahaï d'Iran.
La communauté bahaï ne menace en rien les autorités du pays
puisque les principes de leur foi exigent obéissance à leur
gouvernement, abstinence dans la politique partisane et interdiction
de toute forme de violence. Qu'attend donc le gouvernement libéral
actuel pour dénoncer cette situation inacceptable?
* * *
[
Traduction]
M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, beaucoup d'avocats s'opposent à ce que les victimes
participent aux procédures judiciaires pour les raisons suivantes.
Premièrement, cette participation ouvre un nouveau front sur
lequel le délinquant doit se défendre.
Deuxièmement, elle compromet l'indépendance des juges, qui ne
peuvent résister à la charge émotive et aux pressions politiques.
Troisièmement, elle fait ressortir des faits qui n'ont rien à voir
avec la cause du délinquant.
Quatrièmement, elle nuit au délinquant parce que les victimes
risquent d'encourager l'imposition de peines spéciales.
Cinquièmement, je crois savoir que les avocats disent que cette
participation est injuste pour les contrevenants parce que certaines
victimes risquent d'être très éloquentes.
Les droits des victimes ne sont pas un privilège qu'il faudrait
quémander à un gouvernement quel qu'il soit. Ce sont des droits.
Comme le droit d'être informé rapidement des détails, lorsque le
ministère public entend négocier un plaidoyer, avant que des
propositions ne soient faites à la défense, et le droit pour la victime
de choisir entre une déclaration faite de vive voix ou par écrit.
Ce sont les droits de la victime qui doivent avoir la priorité, pas
ceux du criminel.
Le Président: Je remarque que le député a une nouvelle coupe de
cheveux.
* * *
M. Sarkis Assadourian (Don Valley-Nord, Lib.): Monsieur le
Président, l'équipe de Brampton qui a participé au Défi des
pompiers a remporté le championnat du monde de 1997. Sous la
direction de l'entraîneur, Doug Comeau, l'équipe, formée du
capitaine Peter Reid, de Mark Evans, de Dan Rowland, de Garry
Wilton et de Rob Wolfeld, a remporté ce concours d'habileté.
Le Défi des pompiers est l'un des concours les plus exigeants et
les plus éreintants, qui met à l'épreuve les compétences, la force et
l'endurance des participants. Grâce aux techniques de sauvetage
qu'elle maîtrise, l'équipe de Brampton a prouvé qu'elle parvient à
se dépasser et à exceller dans l'exercice d'un des métiers les plus
dangereux qui soient.
Félicitations à l'équipe de Brampton qui a remporté les grands
honneurs de ce Défi des pompiers.
Je tiens également à féliciter les membres de l'équipe canadienne
féminine de hockey, qui a remporté la médaille d'or au championnat
du monde pour une quatrième année de suite. Bravo pour votre beau
travail. Nous sommes convaincus que vous remporterez encore
beaucoup de succès.
* * *
M. Harbance Singh Dhaliwal (Vancouver-Sud, Lib.):
Monsieur le Président, si je prends la parole aujourd'hui, c'est pour
faire part à mes collègues de bonnes nouvelles au sujet d'ententes
intervenues récemment entre le gouvernement de la
Colombie-Britannique et le gouvernement fédéral.
Le mois dernier, les deux parties ont réglé leur différend au sujet
du critère de résidence. La Colombie-Britannique se verra
rembourser 26,6 millions de dollars en paiements de transfert. Par
esprit de collaboration, le gouvernement provincial supprimera son
critère de résidence de trois mois.
L'entente va alléger les pressions financières que subit la
Colombie-Britannique par suite de l'arrivée de nombreux
Canadiens des autres provinces. En outre, la Colombie-Britannique
recevra au total 67,2 millions de dollars de plus pour
l'établissement des immigrants au cours des trois prochaines
années, compte tenu du coût considérable que cela représente pour
la province.
Ces deux initiatives témoignent du solide partenariat qui unit la
Colombie-Britannique et le gouvernement fédéral et du fait que le
gouvernement fédéral répond aux besoins des
Britanno-Colombiens.
* * *
Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le
Président, je suis heureuse de prendre la parole à la Chambre
9375
aujourd'hui pour annoncer l'établissement d'un partenariat entre
l'Hospice Association of Ontario et Glaxo Wellcome, une société
pharmaceutique située dans ma circonscription.
Les 78 centres de soins de l'Ontario offrent aux personnes
atteintes de maladies graves et en phase terminale la possibilité
d'être soignées à domicile. La demande de soins au niveau de la
collectivité continue d'augmenter. On estime que les centres de
soins sont les plus grands fournisseurs de services directs dans le
secteur des soins de santé sans but lucratif de l'Ontario.
La survie des centres de soins de l'Ontario dépend de l'aide
fournie par des sociétés comme la Glaxo et de la conclusion
d'accords de partenariat avec ces dernières. L'engagement de la
Glaxo à l'égard des centres de soins est conforme à la
recommandation formulée par les participants au Forum national
sur la santé et selon laquelle le parrainage du secteur privé est une
ressource précieuse pour les collectivités.
* * *
[Français]
M. Bernard Deshaies (Abitibi, BQ): Monsieur le Président, le
Bloc québécois félicite chaleureusement aujourd'hui l'équipe
féminine canadienne de hockey qui a remporté hier le Championnat
mondial de hockey féminin disputé à Kitchener, Ontario.
(1405)
En remportant ce championnat, l'équipe canadienne est
demeurée invaincue puisqu'elle a remporté un quatrième tournoi
consécutif.
Donc, toutes nos félicitations, en particulier à Nancy Drolet qui, à
12 minutes 59 secondes de la période de prolongation, a marqué le
but vainqueur, complétant ainsi son tour du chapeau.
Le Bloc québécois tient également à souligner la performance de
Nathalie Lambert, Isabelle Charest, Christine Boudrias, Annie
Perreault et Catherine Dussault pour leur médaille d'argent par
équipe au Mondial de Séoul de patinage de vitesse sur courte piste.
Le Bloc québécois salue toutes ces femmes dont les succès
sportifs sont le résultat d'entraînements réguliers et ardus qui ont
porté fruit.
* * *
[
Traduction]
Mme Sharon Hayes (Port Moody-Coquitlam, Réf.):
Monsieur le Président, hier soir, en période supplémentaire, à
Kitchener, en Ontario, l'équipe canadienne a marqué le but
victorieux contre celle des États-Unis, le Canada remportant ainsi le
championnat mondial de hockey féminin.
Nous nous joignons à tous les Canadiens pour féliciter les jeunes
femmes de l'équipe canadienne qui ont fait preuve de ténacité, de
courage et d'un véritable esprit sportif dans l'atteinte de leurs
objectifs.
Après avoir reçu leurs médailles d'or, les joueuses ont entonné
l'Ô Canada, de la ligne bleue, en se tenant par les épaules. Voilà
l'hommage qu'ont rendu à leur pays ces jeunes femmes qui nous ont
permis d'être fiers et unis en cette occasion inoubliable.
Puissions-nous continuer de célébrer leurs succès en attendant
qu'elles participent, l'an prochain, au tournoi olympique qui se
tiendra à Nagano!
* * *
M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Monsieur le Président, dans
les journaux de ce matin, on lit que le neveu du premier ministre,
l'ambassadeur du Canada aux États-Unis, a déclaré qu'il n'y avait
pas de différends sérieux entre le Canada et les États-Unis qui
puissent compliquer la visite du premier ministre à Washington.
Tout baigne dans l'huile, à son avis.
Je suppose que les négociations sur le traité du saumon du
Pacifique, qui sont dans une impasse depuis des années et qui, selon
les indications, ne déboucheront pas d'ici à l'ouverture de la pêche,
ne sont pas importantes pour les libéraux. Je suppose que les
violations flagrantes de la souveraineté canadienne par les
Américains et le refus de ces derniers de renoncer à la loi
Helms-Burton ne sont pas un grave problème pour les libéraux. Je
suppose que les attaques que les Américains continuent de lancer
contre notre industrie forestière ne sont pas non plus un problème
sérieux.
Nous savons de même que les attaques américaines contre les
politiques culturelles du Canada en vertu des dispositions
commerciales internationales ne sont pas non plus un problème
sérieux pour les libéraux parce que le neveu du premier ministre a
dit que le différend qui menace l'industrie canadienne du magazine
tout entière était trois fois rien.
J'espère que le premier ministre trouvera le temps, entre les
séances de photo préélectorales, de faire son travail et défendre le
Canada et ses intérêts à Washington.
* * *
M. Bob Kilger (Stormont-Dundas, Lib.): Heureux de vous
voir de retour, monsieur le Président. Nous sommes tous au courant
de l'immense succès d'Équipe Canada. Dans ma circonscription,
Stormont-Dundas, le principe qui sous-tend les missions d'Équipe
Canada a été adopté pour faire la promotion de la croissance
économique de la ville de Cornwall et des comtés unis de Stormont,
Dundas et Glengarry.
La Chambre de commerce de Cornwall, les gens d'affaires
locaux et les dirigeants de la collectivité se sont unis pour former
l'Équipe Cornwall. Imaginez, 150 professionnels des secteurs
public et privé travaillant ensemble pour faire la promotion des
avantages de Cornwall.
9376
[Français]
L'objectif principal d'«Équipe Cornwall» est d'introduire et
d'encourager les futurs investisseurs à considérer Cornwall comme
un environnement économiquement sain pour investir et s'établir
en affaires.
[Traduction]
J'ai récemment assisté au lancement officiel d'Équipe Cornwall.
L'énergie, l'enthousiasme et le dévouement que manifestent les
membres de l'équipe sont rafraîchissants et encourageants. Je suis
fier d'être membre de cette équipe, dont la mission consiste à
stimuler la croissance et le développement de Cornwall,
Stormont-Dundas et Glengarry.
Bon succès à l'Équipe Cornwall.
* * *
Mme Jean Augustine (Etobicoke-Lakeshore, Lib.):
Monsieur le Président, aujourd'hui est la Journée mondiale de la
santé. Je prends la parole pour féliciter le gouvernement pour les
efforts qu'il déploie dans le domaine de la santé au Canada.
Nous avions promis un forum national sur la santé. Ce forum a
récemment annoncé ses recommandations, qui ont été intégrées au
budget de 1997. Nous avons stabilisé le Transfert canadien en
matière de santé et de programmes sociaux à 25 milliards de dollars
par année. Nous avons prévu 300 millions de dollars pour financer
de nouvelles initiatives dans le domaine de la santé au cours des
trois prochaines années. De cette somme, 150 millions serviront à
aider les provinces à mettre en oeuvre de nouveaux programmes
dans des domaines comme les soins à domicile et
l'assurance-médicaments.
Nous avons prévu 100 millions de dollars pour les programmes
d'action communautaire s'adressant aux enfants et pour le
Programme canadien de nutrition prénatale. Le gouvernement reste
attaché aux valeurs et aux principes de la Loi canadienne sur la
santé. Nous ne compromettrons pas le système en accordant des
réductions d'impôts générales comme le proposent nos opposants.
Il ne fait aucun doute que notre système de santé public constitue
une grande réalisation du Canada et que le gouvernement actuel
s'efforcera de le préserver.
En cette Journée mondiale de la santé, prenons un engagement en
faveur de ce système.
* * *
(1410)
[Français]
M. Mark Assad (Gatineau-La Lièvre, Lib.): Monsieur le
Président, il est aberrant de voir les séparatistes se scandaliser des
montants dépensés par le gouvernement fédéral en faveur de l'unité
nationale, de la coopération entre les provinces et du bilinguisme,
quand on sait qu'Ottawa doit dépenser des dizaines de millions de
dollars pour les salaires, frais de personnel et de bureau, frais de
recherche, de voyages, etc., pour permettre à 50 députés bloquistes
de la Chambre des communes de promouvoir le séparatisme24 heures par jour.
C'est comme si la communauté catholique finançait et
entretenait à grands frais et déploiement médiatique une
congrégation d'athées.
Ces prétendus gardiens des «intérêts supérieurs du Québec» ne
sont que de cyniques exploiteurs de la démocratie canadienne. Les
électeurs, je l'espère, vont mettre fin à cette situation aux
prochaines élections.
* * *
M. Benoît Sauvageau (Terrebonne, BQ): Monsieur le
Président, on célébrait récemment, et avec tristesse, le premier
anniversaire de la Loi Helms-Burton. Malgré toutes les pressions de
la part de l'opposition officielle pour que le gouvernement fasse
déclarer illégale cette loi, le gouvernement canadien n'a rien fait
pour forcer les Américains à changer de comportement.
Le Bloc québécois déplore l'inaction du gouvernement dans ce
dossier. Par crainte des Américains, les libéraux refusent toujours
de contester la Loi Helms-Burton devant un comité spécial de
l'ALENA, tel qu'il est habilité à le faire depuis juillet 1996.
Maintenant que le gouvernement ne peut plus se réfugier derrière
la plainte de l'Union européenne à l'OMC pour refuser une plainte
en vertu de l'ALENA, le ministre du Commerce international
aura-t-il enfin le courage de mettre en oeuvre le seul moyen efficace
pour contester cette loi à portée extraterritoriale et mettre enfin un
terme à cette violation de la souveraineté commerciale du Canada?
* * *
[
Traduction]
M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, la
campagne électorale des libéraux a vraiment commencé. Le p'tit
gars de Shawinigan s'envole vers Washington pour sa tournée
Kodak pré-électorale.
Le premier ministre pense peut-être qu'il peut redorer son image
ternie en posant main dans la main avec M. Clinton. Et pourquoi pas
une partie de golf tant qu'à y être? Le président étant blessé, ce
serait peut-être la meilleure chance qu'aurait le premier ministre de
gagner quelque chose en 1997.
Les Canadiens sont assez intelligents pour savoir quel est le but
réel de ce voyage. Lorsque le premier ministre ne crée pas
d'emplois, lorsqu'il coupe dans les soins de santé et lorsqu'il
maintient les impôts à un niveau élevé, il ne peut simplement pas
s'attendre à tout arranger en faisant prendre sa photo et en arrachant
quelques touffes de gazon avec le président.
Les conservateurs ont déjà essayé cette stratégie et elle n'a pas
fonctionné pour eux. C'est maintenant au tour des libéraux de
l'essayer, mais ils n'auront pas plus de succès que leurs
prédécesseurs. Au moins nous savons que, libéraux ou
conservateurs, c'est
9377
du pareil au même. La seule différence, c'est que Mulroney
préférait la pêche au golf.
Il ne reste plus au premier ministre qu'à sourire aux
photographes.
* * *
[
Français]
M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.):
Monsieur le Président, contrairement à leurs voisins américains, les
Canadiens ont toujours inhumé leurs compatriotes morts à la guerre
dans des cimetières situés près des endroits où ils sont tombés.
Leurs noms sont gravés sur des monuments commémoratifs érigés
partout dans le monde, notamment à Vimy et à Beaumont-Hamel.
Ici, au Canada, on trouve des monuments commémoratifs érigés
à la mémoire des Canadiens morts à la guerre un peu partout, dans
les grandes villes comme dans les petites localités. Nous passons
devant sans trop y prêter attention, mais ces symboles sont des
témoins silencieux de notre passé et nous rappellent le sacrifice de
ceux qui périrent pour l'amour de leur pays et de la liberté.
Je suis heureux de pouvoir affirmer que ces monuments de pierre
ne constituent pas notre seul témoignage de reconnaissance. Au
Québec, des villes portent le nom de lieux de combat de la Première
Guerre mondiale, comme Ypres et Vimy, et bon nombre de lacs et de
rivières s'appellent Arras, Verdun, Armentières et Amiens.
Je pense qu'il ne saurait y avoir d'hommage plus approprié que
de commémorer ainsi le sacrifice des Canadiens morts à la guerre
afin d'honorer à perpétuité ceux qui donnèrent leur vie pour leur. . .
Le Président: Je regrette d'interrompre l'honorable député. La
parole est au député de Peterborough.
* * *
[
Traduction]
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président,
les jeunes sont la priorité du programme de planification de
l'emploi du gouvernement fédéral. Les programmes d'emploi pour
les jeunes, notamment le programme Service jeunesse Canada, le
Programme Jeunes stagiaires et le Plan d'action national pour
l'emploi d'été ont permis à des milliers de jeunes Canadiens
d'acquérir une expérience professionnelle depuis 1994. La création
d'un club pour garçons et filles à Norwood, dans la circonscription
de Peterborough est l'un des résultats de ces programmes.
La stratégie d'emploi des jeunes, créée cette année, permettra à
de jeunes Canadiens de sortir du cercle vicieux où, faute
d'expérience, ils n'ont pas accès à des emplois et faute d'emploi, ils
ne peuvent acquérir de l'expérience.
La stratégie d'emploi des jeunes aidera des jeunes à obtenir un
premier emploi en permettant de créer des stages dans l'industrie de
croissance, d'améliorer les programmes qui vont déjà bien et
d'assurer un meilleur accès à l'information.
(1415)
Les jeunes ont besoin d'emplois et le Canada a besoin de leur
énergie et de leurs talents. La stratégie d'emploi des jeunes vise à
donner aux jeunes l'expérience et l'information précieuses dont ils
ont besoin pour commencer leur vie professionnelle sur un bon
pied.
Le Président: Je voudrais faire une brève déclaration au sujet de
la période des questions.
[Français]
Récemment, les lignes directrices guidant le Président lors de la
période des questions orales ont fait l'objet de questions de votre
part. En particulier, le Comité de la procédure et des affaires de la
Chambre a procédé à l'examen de la règle précisant que l'on ne
peut, lors de la période des questions orales, anticiper le sujet d'un
débat déjà prévu à l'ordre du jour.
[Traduction]
Dans son 61e rapport déposé à la Chambre des communes le21 mars dernier, le comité a recommandé l'abolition de cette ligne
directrice. La présidence, qui est à votre service, entend se
conformer à cette recommandation. Aussi, à compter de
maintenant, les questions et réponses ne seront plus jugées
irrecevables parce qu'elles anticipent sur un article de l'ordre du
jour.
Je remercie les députés.
Des voix: Bravo!
______________________________________________
9377
QUESTIONS ORALES
[
Français]
M. Gilles Duceppe (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le
Président, le ministre de la Justice déclarait, la semaine dernière,
qu'il jugeait que la collaboration du gouvernement du Québec
n'était pas adéquate dans le dossier d'une loi anti-motards.
Or, dans une lettre envoyée le 3 avril dernier par son homologue
de Québec, on constate tout le contraire. Québec a fait état de trois
scénarios concrets discutés avec les fonctionnaires fédéraux et
visant à neutraliser les bandes de motards criminalisés et à mettre
un terme à cette guerre qui a déjà causé le décès de plusieurs
personnes. Deux rencontres entre fonctionnaires fédéraux et
québécois se sont déjà tenues sur cette base, et une troisième est
prévue aujourd'hui même.
Le ministre reconnaît-il que le Québec fait actuellement tout ce
qui est en son pouvoir pour trouver une solution et que, finalement,
c'est lui, le ministre fédéral de la Justice, qui bloque le dossier en
essayant de faire porter le poids de son inaction par le ministre
Bégin?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, à mon avis, au
nom du gouvernement du Canada, il ne s'agit pas d'une querelle de
juridiction, mais il s'agit plutôt d'une question touchant à la sécurité
des Québécois et des Canadiens.
9378
Il y a presque trois semaines, je suis allé à Québec pour rencontrer
mes homologues et également les maires de la région de Québec
pour discuter de leurs inquiétudes. Ils ont demandé des
changements au Code criminel. Depuis ce jour, j'ai travaillé pour
répondre à ce besoin.
J'ai créé, au ministère de la Justice, un groupe de travail spécial
afin de traiter de cette question de façon urgente. Nous avons
maintenant examiné et étudié toutes les alternatives pour rendre le
Code criminel plus efficace, plus puissant afin d'aider les forces
policières dans leur lutte contre le crime organisé.
Ça, c'est notre objectif, non celui d'avoir des querelles de
juridiction entre les paliers de gouvernement, mais vraiment celui
de traiter la substance de la question, c'est-à-dire de rendre les lois
du Canada plus efficaces pour pouvoir aider les corps policiers.
M. Gilles Duceppe (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le
Président, je me demande bien qui a parlé de querelle de juridiction.
Nous, du Bloc québécois, avons demandé au ministre d'intervenir,
parce que le Code criminel relève d'Ottawa, que l'on sache. On n'a
jamais parlé de querelle de juridiction.
Ce qu'on dit au ministre, c'est qu'il a eu toute la collaboration de
Québec dans ce dossier et que les scénarios proposés par le
gouvernement du Québec peuvent l'aider à déposer des
amendements au Code criminel, si seulement le ministre a la
volonté d'agir. Est-ce que le ministre s'attend à ce que Québec fasse
le travail à sa place? C'est ça, la question.
(1420)
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Non, monsieur le Président. J'attends ce
que tous les Canadiens attendent, c'est-à-dire que chaque niveau de
gouvernement prenne ses responsabilités pour rendre la société plus
sûre.
À titre de ministre fédéral de la Justice, c'est à moi qu'incombe le
Code criminel, mais c'est à la province d'administrer la justice,
selon la Constitution du Canada. Nous avons tous les deux une
partie de cette responsabilité.
Je suis très heureux de travailler avec mon homologue québécois.
Je l'ai rencontré, comme je l'ai dit, il y a trois semaines. Depuis des
années et au cours des dernières semaines, nous avons eu des
rencontres avec les fonctionnaires sur ce sujet important. La
semaine prochaine, nous avons l'intention d'annoncer les mesures
que nous allons proposer pour atteindre les objectifs que nous avons
en commun avec le gouvernement du Québec.
M. Gilles Duceppe (chef de l'opposition, BQ): Monsieur le
Président, si le ministre est très heureux de travailler avec son
homologue québécois, il devrait en informer son attaché de presse
qui ne dit pas la même chose. Il devrait aussi faire remarquer à son
attaché de presse que le loi française ne date pas de 1936, mais de
1992. Les chiffres ont la même valeur dans les deux langues
officielles.
Quand le ministre nous dit qu'il déposera des amendements au
Code criminel, ou au projet de loi C-17, ou qu'il proposera une
nouvelle loi, la semaine prochaine, est-ce qu'il s'engage-et nous,
on peut s'engager à le faire-à faire en sorte que ce projet de loi soit
adopté avant le déclenchement des prochaines élections?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je suis très
heureux d'apprendre que le député est d'accord avec une approche
urgente ici à la Chambre des communes.
Mais en ce qui concerne mes relations avec M. Bégin, le ministre
de la Justice du Québec, c'est vrai que la semaine dernière, j'ai été
déçu des réponses de M. Bégin à mes demandes. J'ai demandé
seulement qu'il précise sa position en ce qui concerne une loi
antigang. J'ai posé des questions légales, j'ai demandé des avis
juridiques, l'opinion des avocats de son ministère. Je n'ai pas
encore reçu de détails. Alors, je suis déçu.
Écartez ce jeu politique, écartez tout cela, parce que l'intérêt
véritable, c'est d'avoir un Code criminel plus efficace pour aider les
corps policiers et c'est ça, l'objectif du gouvernement du Canada.
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ):
Monsieur le Président, de toute évidence, on le voit encore
aujourd'hui, le ministre a décidé de faire de la petite politique avec
ce dossier et de créer une diversion médiatique pour cacher son
manque de volonté politique.
Loin de se contenter de faire quelque chose pour régler le
problème de la guerre de motards criminalisés, il déforme
volontairement les propositions concrètes et réalistes du
gouvernement du Québec.
Compte tenu que le projet de loi C-17, Loi modifiant le Code
criminel, qui n'est toujours pas adopté et qui est censé régler une
partie du problème, le ministre accepte-t-il toute la collaboration de
l'opposition officielle pour modifier ce projet de loi à l'étape où il
en est présentement dans cette Chambre, afin d'y inclure un des
trois scénarios proposés par le gouvernement du Québec?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, premièrement,
comme je l'ai dit, j'ai demandé depuis des jours à M. Bégin de
préciser sa position. Ces propositions faites par mon homologue
québécois sont vagues et générales. J'ai des questions juridiques à
poser.
Je pense que ce qui est très important, dans tout cela, c'est
d'éviter une situation par laquelle nous allons adopter une loi qui,
après six mois, sera rejetée ou annulée par les tribunaux.
(1425)
Une telle approche donnerait seulement de faux espoirs aux
Québécois et aux Canadiens. On doit adopter une loi efficace, mais
également valide et constitutionnelle. Alors, comme je l'ai dit, nous
avons l'intention, la semaine prochaine, d'annoncer les mesures
que nous allons proposer, et je suis très heureux d'entendre le
député du Bloc québécois dire qu'il est prêt à travailler avec nous
d'une façon urgente.
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ):
Monsieur le Président, cela fait deux ans qu'on réclame cette loi-là
du ministre, il devrait peut-être suivre et présenter des lois plus
réalistes.
9379
J'aimerais rappeler au ministre qu'il est le gardien du Code
criminel et le gardien également de la Charte canadienne des droits
et libertés, et si, avec ses centaines d'avocats et les millions de
dollars qu'il dépense dans son ministère, il n'est pas capable de
présenter une loi qui passera le test de la Charte, ce n'est pas le Bloc
québécois et le gouvernement du Québec qui ont un problème, c'est
le ministre de la Justice qui l'a.
Compte tenu de ce qu'il vient de mentionner, compte tenu des
pourparlers qu'il a avec le gouvernement du Québec depuis deux et
trois séances, est-ce qu'il s'engage, avec les modifications qu'il
s'apprête à déposer, qu'il dit s'apprêter à déposer, à ce que ces
modifications répondent à l'un des trois scénarios du gouvernement
du Québec et aux quatre critères élaborés par le gouvernement du
Québec pour faire échec à la guerre des motards? Et surtout,
s'engage-t-il à ce que cette législation soit sanctionnée, adoptée et
mise en vigueur avant le déclenchement des prochaines élections
fédérales?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, j'ai passé
beaucoup de temps, depuis ma réunion avec M. Bégin, à rencontrer
les gens impliqués dans ce dossier, c'est-à-dire les maires de la
région de Montréal, du Québec, et les chefs de police. J'ai
également parlé avec les maires et les chefs de police d'ailleurs au
pays, parce que c'est une question qui touche les intérêts des
Canadiens de partout au pays. On peut trouver les gangs et le crime
organisé dans d'autres villes aussi.
Aujourd'hui, je m'engage à produire, la semaine prochaine, les
propositions et les mesures proposées par ce gouvernement qui
seront efficaces, qui seront également valides et constitutionnelles.
* * *
[
Traduction]
M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre de la Justice.
Il a fallu un an et des élections fédérales imminentes pour que le
ministre de la Justice découvre enfin les droits des victimes.
Pendant trois ans et demi, les décisions du gouvernement libéral ont
été contre les victimes et leurs familles. Maintenant que les
sondeurs des libéraux disent à ces derniers que c'est une question
importante, le ministre de la Justice est impatient de suivre le
mouvement.
Voici ma question au ministre de la Justice. Pourquoi a-t-il fallu
qu'une année s'écoule après notre premier débat sur les droits des
victimes à la Chambre et que des élections générales soient
imminentes pour que le gouvernement libéral se rende enfin compte
qu'une mesure comme la déclaration des droits des victimes
proposée par les réformistes aurait dû être adoptée depuis
longtemps?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, il est regrettable
que le député soit devenu si cynique après avoir passé si peu de
temps sur la scène politique nationale. Il est aussi malheureux que le
député refuse aussi de reconnaître tant de choses.
Le député parle des victimes. En juin 1994, lorsque nous avons
étudié le projet de loi C-68 à la Chambre, le parti du député a fait la
sourde oreille à tous ceux qui sont venus ici lui demander de se
joindre au gouvernement afin de faire quelque chose pour les
victimes d'armes à feu, les enfants, les maris, les femmes, les pères
et les mères tués par des armes à feu.
Lorsque le gouvernement a proposé de modifier la Loi sur les
jeunes contrevenants afin de permettre, pour la première fois, les
déclarations de victimes dans les tribunaux pour adolescents, le
parti du député a voté contre ces modifications.
Enfin, lorsque le gouvernement a proposé, dans le projet de loi
C-41 sur la détermination de la peine, que les victimes aient droit à
un dédommagement afin de pouvoir récupérer ce qu'elles avaient
perdu, le parti du député a voté contre cette mesure. C'est le
gouvernement qui défend les droits des victimes dans ce pays.
(1430)
M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, pardonnons-lui, car il ne sait pas ce qu'il dit.
L'article 3 de notre déclaration des droits des victimes garantit le
droit de la victime de faire une déclaration à toute audience de
libération conditionnelle ou de révision judiciaire. Le ministre de la
Justice, qui prétend se préoccuper tellement des droits des victimes,
a glissé dans le projet de loi C-45 une disposition qui supprime le
droit automatique à une déclaration de la victime jusqu'en l'an
2012.
Comment le ministre de la Justice peut-il prétendre être un ardent
défenseur des droits des victimes lorsque sa mesure législative sur
la libération anticipée prévue à l'article 745 du Code criminel donne
plus de droits aux meurtriers comme Clifford Olson et Paul
Bernardo qu'à leurs victimes? Comment peut-il expliquer cela?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, c'est facile de
faire de beaux discours sur les droits des victimes, mais c'est une
autre paire de manches que de produire des mesures législatives qui
font vraiment une différence dans la vie des victimes. C'est
exactement ce que le gouvernement a fait.
Il y a une douzaine d'exemples de gestes concrets que le
gouvernement a posés pour aider les victimes. Il y a par exemple le
projet de loi C-46, dont le but est précisément d'assurer la
confidentialité des dossiers privés des victimes dans les cas
d'infraction d'ordre sexuel.
Permettez-moi de répondre à la question précise soulevée par le
député, c'est-à-dire le rôle des victimes aux audiences tenues en
vertu de l'article 745. Le gouvernement croit et je crois aussi que les
victimes devraient avoir un rôle à jouer à ces audiences. C'est
d'ailleurs pour cette raison que nous avons proposé il y a trois ans
dans le projet de loi C-41 que ce droit soit donné aux victimes.
Le député et son parti ont voté contre le projet de loi C-41. Depuis
le dépôt du projet de loi C-41, la Cour suprême du Canada a rendu
un jugement qui reconnaît que, selon la common law, la
participation des victimes est laissée à la discrétion des juges.
9380
Si le député estime que toute disposition du projet de loi C-45
nuit à la participation des victimes à de telles audiences, je serai
heureux de me joindre à eux pour y apporter les modifications
nécessaires. En fait, la semaine dernière. . .
Le Président: Le député de Fraser Valley-Ouest.
M. Randy White (Fraser Valley-Ouest, Réf.): Monsieur le
Président, c'est bien d'avoir la chance de placer un mot. D'après
cette réponse, je suis convaincu que le ministre de la Justice ne
comprend pas la question.
Si les libéraux étaient sérieux au sujet des droits des victimes, ils
auraient donné suite aux documents que nous avons déposés et
débattus à la Chambre le 29 avril dernier ou ils auraient fait quelque
chose dès leur accession au pouvoir il y a trois ans et demi.
Les victimes devraient passer en premier. Elles devraient passer
avant les criminels. Elles devraient passer avant les lois sur la
protection de la vie privée, avant la Loi sur l'accès à l'information et
avant les intérêts politiques du Parti libéral du Canada.
Je pose la question directement au ministre de la Justice
aujourd'hui: fera-t-il passer les victimes en premier? Fera-t-il
passer, dans les mesures législatives, les droits des victimes avant
ceux des criminels reconnus?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, non seulement je
peux dire que nous le ferons, mais je peux dire que nous l'avons déjà
fait. Pourtant, chaque fois que nous avons présenté des mesures
législatives visant à protéger les droits des victimes, les réformistes
ont trouvé des raisons de voter contre ces mesures.
Comme je le disais avant que le député ne place son mot, je lui ai
déjà dit ainsi qu'à ses collègues que je serai heureux d'apporter les
modifications nécessaires au projet de loi C-45 en collaboration
avec eux s'ils croient que de telles modifications montreraient
encore plus clairement que les victimes devraient avoir un rôle à
jouer aux audiences en vertu de l'article 745. En fait, j'ai écrit au
collègue du député la semaine dernière pour exposer clairement ma
position à cet égard.
Travaillons ensemble. Si le député croit que les choses peuvent
être plus claires, je serai heureux de travailler avec lui et avec les
autres partis à la Chambre pour atteindre cet objectif.
N'oublions jamais que le parti qui a toujours défendu les
victimes de crime à la Chambre, non pas avec des belles paroles,
mais bien avec des mesures concrètes. . .
(1435)
Le président: Les questions et réponses risquent d'être un peu
longues en ce retour de congé.
* * *
[
Français]
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le
Président, depuis plusieurs mois, le Bloc québécois affirme que le
gouvernement n'a pas fait le ménage dans sa propre cour, mais qu'il
a pelleté plus de la moitié de ses réductions de dépenses dans la cour
des provinces.
Récemment, le chat est sorti du sac, et pas n'importe lequel.
Devant un comité de l'autre Chambre, le président du Conseil du
Trésor a été obligé d'admettre, avec toute la candeur qu'on lui
connaît, que le gouvernement atteindrait moins de la moitié des
engagements contenus dans le budget de 1995 en matière de
réduction des dépenses des ministères fédéraux.
Ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor:
Reconnaît-il enfin qu'à partir de son propre constat, c'est-à-dire
avec des dépenses pour les ministères fédéraux réduites de 9 p. 100
en trois ans plutôt que 19 p. 100 tel que promis, ce sont les provinces
qui ont fait la majeure partie du travail et qui ont absorbé, par un
pelletage en règle, plus de la moitié des coupures de son
gouvernement?
L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et
ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le
Président, tout d'abord, je n'ai rien admis de tel.
J'ai revu la transcription des délibérations du comité du Sénat, et
ce que j'ai dit, et ce que je répète, si vous prenez la base correcte, qui
est 1993-1994, jusqu'à la fin de la révision des programmes, qui est
1998-1999, la réduction des dépenses des ministères du
gouvernement est de 14 p. 100, alors que la réduction des transferts
aux provinces est de 9,9 p. 100. Par conséquent, le gouvernement
fédéral s'est donné un fardeau de 40 p. 100 plus élevé que ce qu'il a
imposé aux provinces.
M. Yvan Loubier (Saint-Hyacinthe-Bagot, BQ): Monsieur le
Président, ce n'est pas une interprétation de ce qu'il a dit, c'est une
interprétation de ce que nous avons lu. En 1995, le ministre des
Finances parlait d'une réduction de 19 p. 100 des dépenses et,
aujourd'hui, ce ministère n'a réduit ses dépenses que de 9 p. 100
pour le présent exercice en trois ans. C'est ça, le constat qu'on fait.
On comprend mieux maintenant pourquoi le ministre des
Finances s'est acheté des bottes de travail en 1994. Ce n'était pas
pour créer de l'emploi, c'était pour se comporter en véritable
opérateur de pelle mécanique dans la cour des provinces. C'est ça,
la réalité.
De plus, je demande au président du Conseil du Trésor s'il
reconnaît que son gouvernement s'est comporté en mauvais
gestionnaire et qu'à cause de lui, le déficit du gouvernement du
Québec prévu pour le présent exercice serait de 60 p. 100 inférieur
s'il n'y avait pas eu ces coupures sauvages dans la cour des
provinces.
L'hon. Marcel Massé (président du Conseil du Trésor et
ministre responsable de l'Infrastructure, Lib.): Monsieur le
Président, les chiffres contenus dans le budget de 1995 sont
entièrement validés. La réduction dans les dépenses des ministères
est exactement comme on l'avait indiqué, c'est-à-dire tout près de
19 p. 100, et elle l'est tout simplement parce qu'on a ôté l'argent
dans les budgets des ministères. Les coupures ont donc été mises en
place de façon intégrale.
9381
Lorsque le ministre des Finances et moi-même avons publié un
communiqué de presse, il y a quelques jours, nous avons indiqué
exactement comment réconcilier les chiffres contenus dans le
budget de 1995 avec les chiffres actuels. Il n'y a aucun doute, encore
une fois, que non seulement nous avons fait les coupures que nous
avions indiquées dans le budget de 1995, mais également, que les
dépenses des ministères ont été coupées comme on l'avait indiqué.
La réconciliation des chiffres se fait par le biais de programmes
qui ont été approuvés dans des budgets ultérieurs à 1994-1995.
C'est une réconciliation qui est indiquée, de façon très claire, dans
les tableaux que le ministre des Finances et moi-même avons
publiés. J'espére que le critique financier de l'opposition puisse au
moins lire ces chiffres-là.
* * *
[Traduction]
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, les
victimes de la criminalité estiment que le ministre de la Justice les a
trahies. Il les a trahies avec le projet de loi C-41, lorsqu'il leur a
refusé le droit de faire des déclarations orales. Il les a trahies avec le
projet de loi C-45, lorsqu'il leur a nié le droit inconditionnel de faire
des déclarations orales de quelque sorte aux audiences de libération
conditionnelle.
Ma question au ministre de la Justice est la suivante: pourquoi
a-t-il ajouté à la souffrance des victimes? Pourquoi a-t-il refusé aux
victimes, notamment aux familles des victimes d'Olson, le droit
systématique d'être entendues dans le cadre des audiences prévues à
l'article 745?
(1440)
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, une chose que je
peux affirmer, c'est que le député ne parle décidément pas au nom
des victimes. Quand les victimes examinent le bilan du
gouvernement, ils constatent qu'une douzaine de mesures
législatives ont été améliorées dans l'intérêt des victimes.
Pour ce qui est de l'article 745, comme je l'ai déjà dit à mon
collègue, le projet de loi C-41 prévoit un rôle pour les victimes aux
audiences. Puis, la Cour suprême a rendu un jugement indiquant
clairement que la common law le permettait.
Si mon collègue pense qu'une partie du projet de loi C-45 devrait
être modifiée de façon à être plus claire, et je lui ai déjà dit par écrit
que je me ferais un plaisir de travailler à cela avec lui, au lieu de
nous servir toutes ces envolées théâtrales et toutes ces belles
paroles, le député ferait mieux de voir avec nous à l'amélioration
des lois dans l'intérêt des victimes.
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, c'est
sûr que nous devons retravailler ce gâchis du ministre de la Justice.
Avec le projet de loi C-41, il a donné aux victimes le droit de faire
une déclaration écrite et, avec le projet de loi C-45, il leur a enlevé
ce droit. C'est ainsi que nous parlons maintenant du gâchis du
ministre de la Justice.
Le ministre et le gouvernement ont affirmé que, si l'on faisait en
sorte que le projet de loi C-45 soit appliqué rétroactivement, il
pourrait être contesté en vertu de la charte. Pourquoi le ministre
s'inquiéterait-il d'une possibilité de contestation? Il doit y être
habitué.
On a déjà contesté la constitutionnalité du projet de loi C-68 du
ministre de la Justice. La disposition du projet de loi C-41 du
ministre de la Justice sur les condamnations avec sursis est aussi
contestée devant les tribunaux en Colombie-Britannique, en
Ontario et en Alberta. Les contribuables ont dû débourser 1 million
de dollars à cause du fiasco des Airbus attribuable au ministre et ils
pourraient maintenant devoir payer plusieurs millions de plus à
cause de l'affaire de l'aéroport Pearson.
Donc, pourquoi le ministre n'est-il pas disposé à faire une erreur
en faveur des victimes, même si cela devait être contesté devant les
tribunaux? Quels droits sont les plus importants pour lui, ceux du
tueur d'enfants Clifford Olson ou ceux des familles de ses victimes?
L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur
général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, compte tenu de
tout ce qui accable le député, sa détestable incapacité de faire la
distinction entre des situations différentes doit être un poids terrible
pour lui. Ça se sent dans les questions qu'il pose à la Chambre.
C'est vrai que le projet de loi C-68, sur le contrôle des armes à
feu, est contesté devant les tribunaux. Aucun jugement n'a été rendu
encore, parce que le procès n'a pas eu lieu. J'ose affirmer au député
qu'il peut se rassurer sur la constitutionnalité et la validité de cette
loi. C'est ce que nous défendrons au tribunal.
Au sujet des victimes, j'aimerais rappeler au député la position
que je lui ai fait valoir la semaine dernière. S'il croit que le projet de
loi C-45 peut être amélioré d'une manière ou d'une autre pour
permettre aux victimes de participer aux audiences tenues en vertu
de l'article 745, il peut venir nous en parler et nous travaillerons
ensemble pour assurer ce résultat. Qu'il épargne ses discours
partisans et tendancieux à la Chambre des communes et qu'il
travaille avec nous à l'amélioration de cette mesure.
* * *
[
Français]
M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense
nationale.
Le 27 mars dernier, la juge de la Cour fédérale, Mme Sandra
Simpson, déclarait illégale la décision du gouvernement d'imposer
une limite de temps à la Commission royale d'enquête sur la
Somalie, compte tenu de l'étendue de son mandat. En réponse à ce
jugement, le ministre maintenait sa décision et poussait l'arrogance
jusqu'à modifier le mandat de la Commission pour enquêter sur ce
qui s'est passé en Somalie avant que les troupes canadiennes n'y
débarquent.
9382
En coupant court illégalement aux travaux de la Commission et,
par la suite, en restreignant son mandat, le ministre tente-t-il de
protéger, non seulement l'establishment militaire, mais aussi
certains amis libéraux proches du pouvoir, comme par exemple M.
Bob Fowler, ex-sous-ministre de la Défense et actuel ambassadeur
canadien à l'ONU?
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président,
dans sa question, l'honorable député indique que la Cour fédérale a
déterminé que la procédure que le gouvernement avait suivie n'était
pas appropriée. Dans cette décision, la cour a indiqué comment on
devait faire pour s'assurer que la Commission d'enquête ne fasse
rapport que des sujets étudiés.
Évidemment, on voulait mettre la situation au clair pour éviter
qu'il y ait confusion dans le sens que le gouvernement demande aux
commissaires de faire rapport et de tirer des conclusions sur des
situations qu'ils n'avaient pas vérifiées, étudiées et entendues lors
des témoignages. C'est ce qu'on a fait.
(1445)
M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le
Président, de toute évidence, l'actuel ministre de la Défense a subi
les mêmes pressions de l'establishment militaire que son
prédécesseur démissionnaire.
Le ministre admet-il que sa décision scandaleuse de modifier le
mandat de la Commission laissera sans réponse plusieurs questions
fondamentales, celles-là même qui sont à l'origine de la mise en
place de la Commission d'enquête?
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président,
la Commission d'enquête a maintenant passé plus de deux ans à
étudier les éléments des incidents en Somalie qu'elle a considérés
comme étant prioritaires.
Comme je l'ai soutenu à maintes reprises, je n'ai jamais
commenté le calendrier de travail de la Commission ni la façon dont
elle s'est organisée pour faire comparaître des témoins et pour
entendre divers témoignages.
Après deux ans, au-delà de 125 témoins et quelque 100 000
pages de documents, je suis, comme tous les Canadiens, en attente,
avec beaucoup d'anticipation, du rapport et des conclusions de la
Commission d'enquête qui aura sans doute à amener des
suggestions qui seront très viables et dans un délai tel qu'on pourra
s'en servir.
[Traduction]
M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, lorsque
le tribunal a dit aux responsables de l'enquête sur la Somalie qu'ils
avaient tout à fait le droit d'enquêter sur le meurtre de Shidane
Arone et les tortures qui lui ont été infligées, ainsi que sur le
camouflage de ces faits par Ottawa, le gouvernement a modifié le
mandat de la commission pour que les Canadiens n'apprennent pas
la vérité.
Puisque cacher la vérité et modifier la loi pour protéger les amis
du Parti libéral font maintenant partie de la politique du
gouvernement, promet-il de publier. . .
Le Président: Chers collègues, nous ne devrions pas prêter des
intentions à quiconque, ni dans le préambule de la question ni dans
la question. J'aimerais donc que le député passe immédiatement à
sa question.
M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, dans le tome II de
son livre rouge, le gouvernement libéral va-t-il publier la vérité telle
que les Canadiens l'ont entendue pendant l'enquête sur la Somalie,
afin qu'ils sachent vraiment à quoi s'en tenir sur le système de
valeurs du gouvernement?
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président,
je tiens à dire à mon collègue que la décision de la Cour fédérale
indique clairement que le gouvernement devrait préciser, sans la
moindre équivoque, ce que nous pensions avoir fait dans notre
requête originale mettant fin aux travaux de la commission fin juin,
c'est-à-dire demander aux membres de la commission de faire
rapport uniquement sur les questions qu'ils auront étudiées ou
qu'ils estimeront devant faire l'objet d'un rapport.
Donc, ce qui va se passer, c'est que, à la fin du mois de juin, après
deux ans d'audiences, 125 témoins, et des centaines de milliers de
pages de documents, la commission d'enquête sur la Somalie fera
rapport sur les questions qu'elle aura pu évaluer et dont les
commissaires estiment qu'elles sont suffisamment importantes
pour faire l'objet d'un rapport.
M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, il y a
deux ans, l'ancien ministre s'est levé à la Chambre pour déclarer
que nous allions faire toute la lumière sur cette situation, que nous
allions trouver la vérité.
La promesse s'adressait à la population canadienne et à nos
troupes sur le terrain qui essaient de faire leur travail. Le ministre a
promis qu'il irait jusqu'au sommet et qu'il découvrirait la vérité. On
apprend maintenant qu'ils vont modifier le mandat de la
commission.
Étant donné son terrible bilan de promesses non tenues et son
manque de respect flagrant pour les audiences judiciaires et les
organismes quasi judiciaires, pourquoi les Canadiens devraient-ils
accorder leur confiance à ce gouvernement?
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président,
je sais que le député et son parti appuient sans réserve et depuis
longtemps le système de justice et l'appareil judiciaire du Canada.
Au cours des trois dernières années, nous avons à maintes reprises
entendu les réformistes proclamer leur respect pour notre système
judiciaire.
Si le député veut savoir ce que pensent les Forces canadiennes
des décisions du gouvernement, je lui propose de faire preuve de
courage et de visiter les bases militaires pour. . .
Des voix: Oh, oh!
Le Président: À l'ordre. Le député de Davenport.
9383
(1450)
L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre des Pêches et des
Océans. Des groupes écologistes demandent au gouvernement de
faire du plus vaste canyon sous-marin de la côte est, un véritable
Grand Canyon sous-marin, la première zone de protection marine
du Canada.
Est-ce que le ministre va agir rapidement, grâce aux pouvoirs que
lui donne la nouvelle Loi sur les océans, pour désigner cette région
biologiquement riche et diversifiée comme la première zone de
protection marine du Canada?
L'hon. Fred Mifflin (ministre des Pêches et des Océans, Lib.):
Monsieur le Président, le député sait que l'adoption de la Loi sur les
océans, qui porte principalement sur la conservation et
l'environnement, permet la création de zones de protection.
Dans ce but, et avant même l'adoption de la loi, j'ai rencontré des
représentants de Patrimoine Canada et j'ai passé une journée avec
eux à discuter de cette question. J'ai également consulté de
nombreux pêcheurs de l'est du Canada.
Suite à cela, il y a un mois environ, j'ai fait une déclaration avec
la ministre du Patrimoine canadien qui doit effectivement conduire
à la désignation d'une zone de protection marine sur la côte est, à
titre d'essai. Nous pourrons alors mettre sur pied une politique et
établir des critères d'évaluation pour nous assurer que le système
pourra fonctionner.
Je suis sûr qu'en ce qui concerne ce canyon, le député sera
heureux de savoir que j'ai eu des conversations à ce sujet avec le
Fonds mondial pour la nature, la semaine dernière. Une fois la
politique établie, je suis sûr que cet endroit sera notre première
priorité.
* * *
[
Français]
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ):
Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la
Défense nationale.
Quand le ministre de la Défense nationale tente de justifier sa
décision de mettre un terme à la Commission d'enquête sur la
Somalie, sa seule excuse est toujours de dire que la Commission a
duré trop longtemps et qu'elle coûte trop cher. Et cela, même si la
juge Sandra Simpson considère que les commissaires se sont
acquittés avec diligence de leur devoir.
Puisque le mandat de la Commission se limite dorénavant à
expliquer ce qui s'est passé avant l'arrivée des troupes canadiennes
en Somalie, le 10 janvier 1993, comment les publics canadien et
québécois sauront-ils exactement ce qui s'est passé le 16 mars 1993,
quand un jeune Somalien a été torturé à mort?
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président,
dans la décision du juge de la Cour fédérale, il était clair que
certaines options ont été données au gouvernement pour être sûr
qu'on ne demanderait pas aux commissaires de faire rapport à
propos de situations qu'ils n'avaient pas étudiées.
Évidemment, cela avait plein de bon sens qu'on ne demande pas
à des gens de faire rapport au sujet d'éléments qu'ils ne connaissent
pas. Cependant, l'honorable députée n'est sans doute pas sans
savoir que le mandat qui a été donné aux commissaires par le
gouvernement indique clairement qu'ils doivent faire rapport sur ce
qui s'est produit avant les incidents en Somalie et tous autres
éléments sur lesquels ils se sentent en mesure de pouvoir
commenter ou arriver à des conclusions.
Mme Suzanne Tremblay (Rimouski-Témiscouata, BQ):
Monsieur le Président, en limitant le mandat de la Commission, le
ministre est très conscient qu'il limite aussi l'action de l'enquête.
Ils ne pourront pas faire la lumière sur des choses aussi importantes,
entre autres, que les 60 documents qui sont disparus des archives de
l'ancien sous-ministre de la Défense nationale, M. Fowler. Ça, c'est
écarté.
Comment le ministre peut-il encore défendre sa décision de
mettre un terme à l'enquête, alors que nous ne saurons jamais quels
étaient les documents si compromettants que l'ex-sous-ministre,
actuel ambassadeur, a fait disparaître?
L'hon. Douglas Young (ministre de la Défense nationale et
ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président,
j'ai beaucoup de respect pour l'honorable députée, mais elle vient
de faire une allégation à l'effet qu'un sous-ministre aurait commis
certains actes.
À mon avis, elle devrait réfléchir avant de répéter de telles
allégations à l'extérieur du Parlement du Canada, parce que
suggérer qu'un acte de ce genre ait été perpétré par un fonctionnaire
qui, à ce moment-là, travaillait sous la tutelle d'un ministre de la
Défense nationale qui est par la suite devenu premier ministre du
Canada, est quand même une chose assez sérieuse. Si l'honorable
députée a des connaissances à cet effet, je suis certain qu'elle
voudra poursuivre ces allégations à l'extérieur de la Chambre.
* * *
[
Traduction]
M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président,M. Ted Weatherill, président du Conseil canadien des relations du
travail, a réclamé du gouvernement fédéral 21 000 $ pour des
dépenses qu'il avait effectuées en tant que membre d'une
organisation privée établie aux États-Unis, ni plus ni moins.
9384
(1455)
Il ne s'agissait pas de frais de voyage et de réception ordinaires. Il
a dépensé 733 $ à Paris pour un souper pour deux. La famille
canadienne moyenne ne dépense pas autant pour son épicerie en un
mois.
Ma question s'adresse au président du Conseil du Trésor. Quand
a-t-on adopté la politique de faire payer aux contribuables les frais
extravagants de voyage et de réception d'une personne nommée par
favoritisme politique quand il ne voyage même pas pour le compte
du gouvernement?
L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader
adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.):
Monsieur le Président, j'ai lu l'article dans le Citizen d'Ottawa. On
a demandé au vérificateur général d'examiner les notes de frais de
M. Weatherill.
M. John Williams (St-Albert, Réf.): Monsieur le Président,
j'espère bien que le vérificateur général va examiner cette note de
frais et les autres dont nous avons parlé au fil des ans, et qu'il les
jugera toutes inacceptables. On ne peut continuer de tolérer ce type
de choses.
Des enfants souffrent de la faim au Canada alors que M.
Weatherill et d'autres comme lui dépensent sans compter. Il a
dépensé 148 000 $ pour des repas sur une période de huit ans.
Imaginez, 148 000 $ pour une personne. C'est dégoûtant.
Pourquoi le président du Conseil du Trésor a-t-il laissé ces abus
se poursuivre au cours des trois ans et demi que son gouvernement
est au pouvoir? Va-t-il se débarrasser de ces gens qui profitent de
nominations politiques et abusent de la confiance qu'on leur fait?
L'hon. Alfonso Gagliano (ministre du Travail et leader
adjoint du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.):
Monsieur le Président, le député devrait attendre le rapport du
vérificateur général avant de tirer des conclusions.
Des voix: Oh, oh!
M. Gagliano: Si nos vis-à-vis écoutaient, ils apprendraient
peut-être quelque chose. Le problème avec les réformistes, c'est
qu'ils veulent gagner sur tous les tableaux. S'ils n'avaient pas fait
de l'obstruction systématique pour retarder l'adoption du projet de
loi C-66, qui crée un nouveau Conseil canadien des relations
industrielles, nous aurions pu régler ce problème immédiatement au
lieu d'attendre. Ils ne peuvent gagner sur les deux tableaux.
* * *
[
Français]
M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président,
ma question s'adresse au premier ministre suppléant.
Aujourd'hui a lieu à Washington une rencontre entre le président
américain et le premier ministre israélien. À cette occasion, ils
discuteront du sauvetage des pourparlers sur la dernière phase des
accords d'Oslo avec les Palestiniens.
Puisque Israël tente de gagner du terrain en poursuivant la
colonisation juive dans le but de jouir d'une position de force dans
les négociations à venir avec l'autorité palestinienne, le premier
ministre suppléant convient-il qu'une telle stratégie mène à un
cul-de-sac qui bloque le processus de paix plutôt que de le relancer?
L'hon. Don Boudria (ministre de la Coopération
internationale et ministre responsable de la Francophonie,
Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre du Canada est bel
et bien à Washington, accompagné du ministre des Affaires
étrangères. Je suis sûr que le député d'en face voudra attendre la
conclusion de la visite à Washington pour être capable d'évaluer
tous les dossiers qui auront été soulevés par le premier ministre.
À Washington, le premier ministre a l'intention de soulever
nombre de dossiers avec son homologue américain. Je suis fier qu'il
ait entrepris cette visite. Il a l'intention de soulever des dossiers
portant sur les réfugiés, sur le Moyen-Orient, des dossiers de tous
ordres avec son homologue américain.
* * *
[
Traduction]
M. Jim Gouk (Kootenay-Ouest-Revelstoke, Réf.): Monsieur
le Président, le ministre des Transports a annulé le contrat de
l'aéroport Pearson qui aurait entraîné des déboursés de l'ordre de
800 millions de dollars, sans qu'il en coûte un sou aux contribuables
canadiens.
Après quoi, les avocats du ministre ont déclaré sous serment
devant un tribunal que, si le contrat avait été maintenu, les
entrepreneurs auraient perdu de l'argent.
Voici ma question au ministre: étant donné que lui et
l'administration aéroportuaire qu'il a récemment mise en place
dépensent plus de 3 milliards de dollars en frais d'avocats, de
règlements, d'indemnités pour frais de location, d'achat de
l'aérogare 3, sans compter le mirobolant plan de dépenses de la
nouvelle administration aéroportuaire, le ministre peut-il expliquer
aux contribuables canadiens comment il se fait qu'il est dans
l'intérêt des contribuables d'affecter 3 milliards de dollars à un
projet qui, de l'aveu même de son ministère devant un tribunal,
aurait fait perdre de l'argent si on y avait investi 800 millions de
dollars?
(1500)
L'hon. David Anderson (ministre des Transports, Lib.):
Monsieur le Président, le député et son parti ne sont jamais parvenus
à saisir les circonstances entourant le dossier Pearson.
Lorsque nous avons formé le gouvernement en 1993, nous avons
examiné l'accord Pearson de concert avec le consortium privé et
avons établi que ce n'était pas dans l'intérêt public, mais dans
l'intérêt du secteur privé.
Par la suite, nous avons créé une société sans but lucratif qui
regroupe les divers intérêts de la collectivité. Et c'est ainsi qu'est
née la GTAA qui s'occupe maintenant de l'aménagement de
l'aéroport Pearson.
9385
L'aménagement de l'aéroport Pearson sera assurée directement
par l'administration locale au sol à Toronto. Il ne sera plus question,
pour le gouvernement fédéral, d'anticiper ou de donner des
instructions à la GTAA.
Si le député veut savoir comment M. Turpen, le
président-directeur général, entend aménager l'aéroport Pearson,
c'est à lui qu'il devrait adresser ses questions.
* * *
[
Français]
Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Monsieur le
Président, ma question s'adresse au ministre de la Coopération
internationale.
Lors des derniers jours, les médias rapportent qu'environ 120
réfugiés hutus meurent chaque jour dans l'est du Zaïre. Des milliers
de personnes attendent de l'aide humanitaire. Qu'entend faire le
gouvernement pour venir en aide à ces gens?
L'hon. Don Boudria (ministre de la Coopération
internationale et ministre responsable de la Francophonie,
Lib.): Monsieur le Président, je suis sûr que, comme moi, tous les
Canadiens ont été choqués et déçus de cette scène des derniers jours
où on a vu des centaines de réfugiés rwandais dans l'est du Zaïre
périr et souffrir.
Toutefois, le gouvernement du Canada se réjouit de la décision
prise par les rebels du Zaïre de donner accès au Haut-commissariat
de l'ONU pour les réfugiés pour qu'il puisse porter secours aux
réfugiés.
Il me fait plaisir d'annoncer à cette Chambre et à mes collègues
que le Canada accordera une contribution de l'ordre de trois
millions de dollars au Haut-commissariat de l'ONU pour les
réfugiés afin d'assister au rapatriement chez eux des réfugiés de la
région de Kisangani, au Rwanda.
* * *
[
Traduction]
M. Len Taylor (The Battlefords-Meadow Lake, NPD):
Monsieur le Président, au début de son mandat, le gouvernement
avait promis d'adopter une loi sur les espèces en péril.
Deux différents ministres de l'Environnement se sont engagés
dans un processus de consultations étendues et transparentes qui a
pris de l'ampleur et ont par la suite rédigé une mesure législative en
ce sens. Ces derniers temps, le Comité de l'environnement s'est
beaucoup déplacé dans le pays pour discuter de cette mesure
législative avec la population.
Il semble maintenant que le gouvernement discute à huis clos de
l'avenir du projet de loi sur les espèces en péril. Je demande à la
secrétaire parlementaire du ministre de l'Environnement de nous
dire s'il est vrai que le ministère des Pêches et des Océans tente
d'extirper l'essentiel de cette nouvelle mesure législative.
L'hon. Herb Gray (leader du gouvernement à la Chambre des
communes et solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le
Président, je voudrais répondre à cette question en tant que leader
du gouvernement à la Chambre.
Je prévois que la Chambre sera saisie de ce projet de loi sous peu.
Nous pourrons alors vérifier le bien-fondé des reproches que font
les partis d'opposition, notamment le NPD, en voyant s'ils
s'entendront pour que nous adoptions très rapidement cette
importante mesure législative.
* * *
Le Président: J'ai l'honneur de déposer le rapport du
bibliothécaire parlementaire pour l'exercice financier se terminant
le 31 mars 1996.
______________________________________________
9385
AFFAIRES COURANTES
(1505)
[Traduction]
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le
Président, conformément au paragraphe 198(3) de la Loi électorale
du Canada et au paragraphe 32(2) du Règlement, je dépose, dans les
deux langues officielles, copies des modifications apportées
récemment au Tarif des honoraires d'élections fédérales.
Conformément au paragraphe 32(5) du Règlement, ce document
devrait être réputé renvoyé en permanence au Comité permanent de
la procédure et des affaires de la Chambre.
* * *
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le
Président, j'ai le plaisir de déposer, dans les deux langues
officielles, quelques décrets annonçant les nominations faites par le
gouvernement.
Conformément au paragraphe 110(1) du Règlement, ces décrets
sont renvoyés d'office aux comités permanents énumérés dans la
liste jointe.
* * *
[
Français]
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le
Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai
l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse
du gouvernement à 77 pétitions.
9386
M. Michel Guimond (Beauport-Montmorency-Orléans,
BQ): Monsieur le Président, à titre de président du Comité
permanent des comptes publics, j'ai l'honneur de présenter devant
cette Chambre le cinquième rapport du Comité permanent des
comptes publics qui a procédé à l'étude du chapitre 14 du Rapport
du vérificateur général déposé en septembre 1996 et qui traitait de la
qualité des services.
Je voudrais simplement souligner qu'à titre de membres du
comité, nous avons à coeur de nous assurer que le gouvernement
fournit des services d'une valeur maximale en échange de l'argent
qu'il perçoit par le biais des impôts et d'autres droits versés par les
Canadiens et les Canadiennes. Nous devons également nous assurer,
en tant que parlementaires, que les personnes chargées des fonds
publics soient tenues responsables d'une utilisation judicieuse de
ces fonds, conformément aux politiques adoptées par le Parlement.
En terminant, conformément à l'article 109 du Règlement, le
comité demande au gouvernement de déposer une réponse globale
au présent rapport.
* * *
[
Traduction]
Mme Rose-Marie Ur (Lambton-Middlesex, Lib.) demande à
présenter le projet de loi C-395, Loi modifiant la Loi sur les
banques.
-Madame la Présidente, je suis heureuse de présenter ce projet
de loi d'initiative parlementaire, qui vise à modifier la Loi sur les
banques afin d'améliorer la communication des renseignements
entre les banques et leurs clients.
Au Canada, il y a des banques qui offrent des avantages à certains
de leurs clients. Par exemple, certaines banques réduisent les frais
de service pour les jeunes et les personnes âgées. Malheureusement,
la plupart des clients des banques ignorent totalement les avantages
auxquels ils ont droit.
Le projet de loi que je parraine corrigerait cette situation,
puisqu'il obligerait les banques à informer leurs clients des
avantages auxquels ils ont droit. De plus, en vertu de ce projet de loi,
les banques ne pourraient imposer des frais en cas de comptes
inactifs, à moins d'en aviser leurs clients par écrit au moins 30 jours
à l'avance.
Dans l'ensemble, ces dispositions amélioreraient la protection
des clients des banques canadiennes.
(Les motions sont adoptées, le projet de loi est lu pour la
première fois et l'impression en est ordonnée.)
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la
Présidente, si la Chambre y consent, je propose:
Que la liste des membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de
la Chambre soit modifiée comme suit: Roger Pomerleau remplace Madeleine
Dalphond-Guiral.
(1510)
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Le
secrétaire parlementaire a-t-il le consentement unanime de la
Chambre pour proposer la motion?
Des voix: D'accord.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Plaît-il à
la Chambre d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
(La motion est adoptée.)
* * *
M. Janko PeriG
(Cambridge, Lib.): Madame la Présidente,
conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai l'honneur de
présenter à la Chambre trois pétitions.
Dans la première, 180 habitants de ma circonscription de
Cambridge font part à la Chambre de leurs préoccupations à l'égard
du caractère sacré de la vie.
Les pétitionnaires prient le Parlement de veiller au maintien des
dispositions actuelles du Code criminel du Canada interdisant l'aide
au suicide et de ne pas sanctionner l'aide au suicide ou l'euthanasie.
M. Janko PeriG
(Cambridge, Lib.): Madame la Présidente, les
400 Canadiens qui ont signé la deuxième pétition croient
fermement que nos lois sur l'âge du consentement devraient être
conçues pour protéger les enfants contre l'exploitation et la
violence sexuelle.
Par conséquent, les pétitionnaires prient le Parlement de modifier
le Code criminel afin de fixer à 18 ans l'âge du consentement, sauf
dans le cas d'une relation entre gens mariés.
M. Janko PeriG
(Cambridge, Lib.): Madame la Présidente,
dans la troisième pétition, 270 électeurs de ma circonscription,
Cambridge, font part à la Chambre des inquiétudes qu'ils éprouvent
à l'idée que le gouvernement provincial assumera la responsabilité
de l'administration et du financement des logements sociaux, y
compris des coopératives d'habitation actuellement visées par les
programmes de logement fédéraux.
9387
C'est pourquoi les pétitionnaires demandent que la négociation
en matière de logement social en Ontario s'effectue de concert avec
les intervenants en matière de coopératives d'habitation.
Je suis totalement d'accord avec les pétitionnaires.
M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Madame la Présidente,
j'ai l'honneur de présenter une pétition signée par plusieurs
centaines de résidants de Peterborough, qui sont préoccupés par la
question des coopératives d'habitation.
Le gouvernement fédéral est en train de négocier avec toutes les
provinces afin de se charger de l'administration des logements
sociaux. La province de l'Ontario n'a pas respecté les accords
légaux de mise en oeuvre qu'elle a signés et celle-ci a publiquement
déclaré vouloir se débarrasser des logements sociaux.
Les pétitionnaires font valoir que le secteur des coopératives
d'habitation est une entité unique, distincte de tous les autres types
de logements sociaux. Par conséquent, ils demandent au Parlement
de reconnaître le secteur des coopératives d'habitation comme une
entité unique, distincte de tous les autres types de logements
sociaux, et ils demandent aussi au Parlement d'envisager
sérieusement le transfert de l'administration des coopératives
d'habitation à une organisation non gouvernementale, ainsi que le
propose la Fédération de l'habitation coopérative du Canada.
Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Madame
la Présidente, conformément à l'article 36 du Règlement, je suis
heureuse de présenter d'autres pétitions exhortant le gouvernement
à démontrer son engagement envers l'éducation et l'alphabétisation
en éliminant la taxe de vente sur les ouvrages de lecture.
En tant que porte-parole du Parti réformiste pour les questions
concernant l'alphabétisation, je suis d'accord avec les Canadiens
pour dire que ceux-ci ne devraient pas avoir à payer une taxe pour
lire.
Les pétitions proviennent de Prince George, Quesnel, Grand
Forks, Vancouver, Whistler, Surrey et de nombreuses autres régions
de la Colombie-Britannique.
Mme Jean Augustine (Etobicoke-Lakeshore, Lib.): Madame
la Présidente, je suis heureuse de présenter un certain nombre de
pétitions, conformément à l'article 36 du Règlement.
Comme ils sont en faveur de l'alphabétisation, les pétitionnaires
croient que l'alphabétisation et la lecture sont essentielles pour
l'avenir du Canada et qu'exonérer les imprimés de la TPS
contribuera à promouvoir l'alphabétisation au Canada.
Les pétitionnaires demandent donc au Parlement de faire en sorte
que les imprimés ne soient pas taxés dans le cadre de la taxe de
vente harmonisée.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la
Présidente, j'ai plusieurs pétitions à présenter.
La première a trait à l'avortement et au caractère sacré de la vie.
Les pétitionnaires souhaitent que l'on apporte des modifications au
Code criminel afin d'accorder aux êtres humains non encore nés la
protection dont jouissent les êtres humains déjà nés.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la
Présidente, j'ai trois autres pétitions qui portent toutes sur des
questions de justice.
La première réunit quelque 250 signatures de pétitionnaires qui
veulent que l'on augmente les peines minimale et maximale
punissant l'infraction de balade dans une voiture volée ou de vol de
voiture, comme je préfère l'appeler.
(1515)
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la
Présidente, la deuxième pétition réunit un millier de signatures et a
trait à la nécessité de protéger les chiens policiers. Il n'y a que 275
chiens policiers au Canada et le dressage de chacun d'eux coûte
environ 40 000 $. Les pétitionnaires souhaitent qu'on impose des
peines plus rigoureuses à ceux qui tuent un chien policier pour
tenter d'échapper à la justice. Je suis d'accord.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la
Présidente, j'ai 2 700 autres signatures, portant à environ 33 000 le
nombre de signatures de pétitionnaires qui demandent à la Chambre
des communes d'apporter plusieurs modifications au Code criminel
afin de permettre la surveillance après la détention des délinquants
sexuels, la publication d'avis annonçant la remise en liberté de
délinquants sexuels et la création à leur égard d'un registre avec
leurs empreintes digitales; ils demandent en outre qu'on modifie la
Loi sur le casier judiciaire afin d'interdire le pardon dans le cas des
personnes trouvées coupables de délits sexuels contre des enfants et
ainsi de suite. Quelque 33 000 personnes ont demandé au
gouvernement de prendre rapidement des mesures pour remédier à
ce problème.
M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Madame la Présidente, j'ai
le devoir et l'honneur de prendre la parole en vertu de l'article 36 du
Règlement pour présenter une pétition au nom d'habitants de
Kamloops, qui demandent au Parlement d'exhorter le
gouvernement du Canada à collaborer avec les gouvernements
provinciaux pour améliorer la qualité du réseau routier canadien. Ils
souhaitent que ce travail débute en 1997.
M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Madame la Présidente, j'ai
une autre pétition à présenter. Elle porte à plus 19 000 le nombre de
pétitionnaires qui demandent au gouvernement fédéral de révoquer
sa décision de congédier 10 000 travailleurs qui distribuent de la
publicité postale, d'ordonner à la Société canadienne des postes de
continuer à distribuer ce courrier et à offrir des services de
messagerie pour pouvoir améliorer le service postal en zone rurale,
étendre les services de distribution par facteurs et créer des emplois
dans les bureaux de poste.
Les pétitionnaires exhortent aussi le gouvernement fédéral à tenir
sa promesse de créer des emplois en soutenant les efforts que
déploie le Syndicat des postiers du Canada en vue d'élargir les
services et de protéger et créer plus d'emplois dans les services
postaux.
9388
M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Madame la Présidente, une
autre pétition vient des habitants de Kamloops et d'un certain
nombre de localités avoisinantes. Ils soulignent à quel point il est
important de soustraire les livres et autres publications à la TPS.
Les pétitionnaires affirment que l'éducation et l'alphabétisation
sont cruciales pour le développement de notre pays et que la taxe
existante est rétrograde. Ils exhortent la Chambre à abolir
complètement la TPS, surtout en ce qui concerne les livres.
M. Nelson Riis (Kamloops, NPD): Madame la Présidente, un
certain nombre de mes électeurs qui étaient très occupés pendant le
congé de Pâques demandent au gouvernement du Canada de revoir
sa décision d'accorder des prêts à la Chine pour qu'elle puisse
acheter des réacteurs et du matériel nucléaires au Canada. Ils croient
qu'il serait plus judicieux d'utiliser ces garanties de prêts de plus
d'un milliard de dollars pour aider les Canadiens.
M. Gordon Kirkby (Prince-Albert-Churchill River, Lib.):
Madame la Présidente, j'ai l'honneur de présenter, en vertu de
l'article 36 du Règlement, une pétition signée par des habitants
d'Etobicoke, de Whitby, de Mississauga, d'Oakville, de
Georgetown, de Scarborough, de Toronto, de Brampton et d'autres
villes.
Les pétitionnaires demandent au Parlement d'exhorter le
gouvernement fédéral à s'allier aux gouvernements provinciaux
pour commencer à améliorer le réseau routier national dès 1997.
M. Gordon Kirkby (Prince-Albert-Churchill River, Lib.):
Madame la Présidente, j'ai aussi une pétition signée par des
habitants de certaines villes, comme Etobicoke, Mississauga et
Toronto, et d'autres localités qui prient le Parlement d'appuyer sans
équivoque l'élargissement de l'OTAN de façon à permettre à tous
les pays de l'Europe centrale et orientale qui désirent se joindre à
l'organisation de le faire, sans qu'aucun n'en soit exclu d'office.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la
Présidente, j'ai trois pétitions à présenter aujourd'hui. La première
est signée par des habitants de Powell River, en
Colombie-Britannique. Les pétitionnaires veulent attirer l'attention
de la Chambre sur le fait que les policiers et less pompiers risquent
quotidiennement leur vie pour offrir les services d'urgence dont
tous les Canadiens ont besoin. Ils précisent également que, dans
bien des cas, les familles des pompiers ou des policiers tués dans
l'exercice de leurs fonctions sont souvent laissées sans moyens
financiers suffisants pour respecter leurs obligations.
Les pétitionnaires exhortent donc le Parlement à établir un fonds
d'indemnisation des agents de la sécurité publique, qui recevrait des
dons et des legs destinés aux familles de policiers et de pompiers
tués dans l'exercice de leurs fonctions.
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la
Présidente, la deuxième pétition est signée par des habitants de
Kitchener, en Ontario. Les pétitionnaires désirent attirer l'attention
de la Chambre sur le fait que diriger un foyer et prendre soin des
enfants d'âge préscolaire est une profession honorable qui n'est pas
reconnue à sa juste valeur dans notre société.
Par conséquent, ils prient le Parlement de poursuivre des
initiatives visant à aider les familles qui choisissent de s'occuper, à
la maison, d'enfants d'âge préscolaire, de malades chroniques, de
personnes âgées et de personnes handicapées.
(1520)
M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Madame la
Présidente, la dernière pétition provient de Pembroke, en Ontario.
Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le
fait que la consommation de boissons alcooliques peut entraîner des
problèmes de santé ou diminuer les capacités d'une personne et
notamment sur le fait qu'il est possible de prévenir totalement le
syndrome de l'alcool chez le foetus ainsi que d'autres anomalies à
la naissance liées à l'alcool en évitant de consommer de l'alcool
pendant la grossesse.
Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement
d'adopter une mesure législative visant à rendre obligatoire
l'apposition sur les contenants de boissons alcooliques d'étiquettes
mettant en garde les futures mères et autres consommateurs contre
les risques associés à la consommation d'alcool.
Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest, Lib.): Madame la
Présidente, c'est avec plaisir que je présente une pétition signée par
un certain nombre de Québécois, qui signalent au Parlement que le
pays risque d'être déchiré par des factions régionales.
Les pétitionnaires demandent au Parlement de déclarer et de
confirmer immédiatement. . .
[Français]
-que le Canada est indivisible, que les frontières du Canada et de
ses provinces et territoires, ainsi que ses eaux territoriales, ne
peuvent être modifiées, que ce soit par tous les citoyens canadiens,
en vertu de leur droit de vote tel que garanti par la Charte
canadienne des droits et libertés ou par le mode de révision, tel que
stipulé dans la Constitution canadienne.
* * *
[
Traduction]
M. Paul Zed (secrétaire parlementaire du leader du
gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Madame la
Présidente, je demande que toutes les questions restent au
Feuilleton.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais):
D'accord?
9389
Des voix: D'accord.
* * *
[
Français]
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): J'ai
l'honneur d'informer la Chambre que M. René Laurin, député de la
circonscription électorale de Joliette, a été nommé membre du
Bureau de régie interne en remplacement de Mme Dalphond-Guiral,
députée de la circonscription électorale de Laval-Centre.
______________________________________________
9389
INITIATIVES MINISTÉRIELLES
[
Traduction]
La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi
C-46, Loi modifiant le Code criminel (communication de dossiers
dans les cas d'infraction d'ordre sexuel), soit lu pour la deuxième
fois et renvoyé au comité.
Mme Daphne Jennings (Mission-Coquitlam, Réf.): Madame
la Présidente, je prends la parole aujourd'hui sur le projet de loi
C-46, Loi modifiant le Code criminel (communication de dossiers
dans les cas d'infraction d'ordre sexuel).
Les victimes d'agression sexuelle hésitent souvent à porter
plainte, probablement de crainte que ne soient divulgués, pour leur
plus grand embarras, des dossiers personnels. Nous pouvons
comprendre cela, mais certaines accusations sont bien réelles et très
tragiques. Des vies peuvent être ruinées avant même d'avoir eu la
chance de débuter.
La question que nous devons poser aujourd'hui est de savoir si
des personnes hésitent à porter plainte parce qu'elles sont
intimidées par le caractère public des procédures judiciaires. C'est
un fait que la personne qu'on accuse d'un délit, quel qu'il soit, mais
surtout un délit sexuel, va se défendre. Et elle ne le fera évidemment
pas avec des gants blancs.
Jusqu'à maintenant, les avocats de la défense ont demandé des
dossiers portant sur le passé de la victime afin d'aider leur client en
noircissant la victime et en essayant d'annuler la crédibilité de
celle-ci. Il s'agit notamment de dossiers psychiatriques, d'aide
sociale, d'emploi, de counselling et d'autres documents très privés.
Peu d'entre nous veulent voir leur vie privée exposée au grand
jour. On estime que la crainte que des dossiers aussi personnels
soient divulgués est une des raisons pour lesquelles les victimes
d'agression sexuelle ne portent pas plainte. Plus, la crainte que de
tels dossiers ne soient un jour exigés nuit au processus de
counselling et d'assistance qu'offrent les centres d'aide aux
victimes.
Nous appuyons pour la plupart les droits des victimes, mais nous
ne le faisons pas de la bonne façon. Souvent, au cours du
counselling, la victime craint d'en dire trop au cas où ce serait
divulgué. En fait, lorsqu'il a pris la parole au sujet du projet de loi
C-46, le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice nous a
demandé de songer au scénario suivant.
Une personne qui a été agressée sexuellement reçoit du
counselling d'un centre d'aide aux victimes d'agression sexuelle.
La thérapeute prend note des séances où la plaignante est affolée et
se demande si elle est pour quelque chose dans son agression. Les
notes reflètent la perception et le souvenir de la thérapeute et pas
nécessairement ce que la victime a effectivement dit.
Il ne s'agit pas d'un compte rendu textuel de la conversation ni de
déclarations. Pourtant, l'avocat de la défense peut essayer de
consulter ces notes à la recherche de ce qu'il considère comme une
déclaration incohérente. La personne qui a déposé une plainte en
justice peut avoir suivi une thérapie à cause d'une dépression, d'une
agression sexuelle qu'elle a subie il y a longtemps, dans son
enfance, ou de l'agression qui fait actuellement l'objet
d'accusations au criminel.
(1525)
Il ne suffit pas de se préoccuper des droits des victimes. Il faut
aussi veiller à ce que, dans l'exercice de ses droits, la victime soit
encore mieux protégée, de manière à ce que toute information
personnelle à son sujet soit examinée très attentivement et ne soit
communiquée que si elle est réellement pertinente dans le cadre du
procès qui se déroulera ensuite.
Les droits de la victime sont depuis longtemps un élément
fondamental du programme électoral du Parti réformiste.
Évidemment, nous appuierions un projet de loi qui protège mieux
les citoyens respectueux des lois et les victimes de crimes. Nous
appuyons donc le principe du projet de loi à l'étude. J'ai malgré tout
encore des réserves au sujet de l'engagement du gouvernement par
rapport aux droits des victimes.
Cependant, nous devons aussi tenir compte de la tradition de
longue date qui existe dans le système de justice de notre pays et de
la Grande-Bretagne et qui vise à protéger les droits de tout individu.
Cela confère donc à l'accusé le droit de pouvoir se défendre d'une
manière exhaustive et équitable des accusations qui pèsent contre
lui. Comment pouvons-nous, en tant que législateurs, nous assurer
que les dispositions du projet de loi dont nous sommes saisis ne
portent pas atteinte au droit à une défense exhaustive et équitable?
Une agression sexuelle est une infraction très grave que les
victimes doivent pouvoir déclarer sans craindre de voir leur vie
personnelle divulguée publiquement. Cependant, nous devons aussi
reconnaître qu'il y a eu des cas où les accusations d'agression
sexuelle n'étaient pas fondées. Le projet de loi dont nous sommes
saisis doit tenir compte de deux intérêts concurrents ou opposés.
Il faut protéger les véritables victimes d'infractions d'ordre
sexuel et leur éviter de subir un nouveau viol en voyant leur vie
personnelle et leurs pensées intimes étalées publiquement parce que
la défense fouille dans les dossiers pour tenter de trouver des détails
personnels fâcheux, mais non pertinents.
Dans le même ordre d'idée, des personnes ont été accusées à tort
et doivent pouvoir se prévaloir de toutes les ressources disponibles
pour blanchir leur réputation. Comme vous pouvez le constater,
madame la Présidente, les tenants des deux camps ont des
arguments solides à faire valoir. Le projet de loi C-46 nous donne
9390
l'occasion d'examiner de très près les droits de toutes les parties et
de rechercher un juste équilibre à cet égard.
C'est une rencontre que j'ai eue avec un habitant de ma
circonscription, tout de suite après mon élection en 1994, qui
expliquent mes vives inquiétudes quant à la possibilité que
quelqu'un puisse être accusé à tort. Un homme et sa femme ont senti
le besoin de raconter leur histoire à une personne qui avait certains
pouvoirs, en l'occurrence, moi, leur députée. Même après avoir été
inculpé et trouvé coupable et après avoir purgé sa peine, cet homme
clame son innocence. La prétendue agression sexuelle est censée
avoir eu lieu durant les années 60, lorsque cet homme vivait dans le
nord de la Colombie-Britannique. La prétendue victime a décidé de
rompre le silence lorsqu'elle avait 31 ans et elle a accusé l'homme
en question de l'avoir agressée sexuellement lorsqu'elle avait sept
ans. À l'époque, l'auteur de l'infraction était marié à la tante de la
victime.
Sa femme de l'époque a dit qu'il ne pouvait avoir commis cette
infraction. L'accusé a expliqué qu'au moment des prétendues
agressions, il n'était pas encore rentré à la maison après son quart de
travail. La plaignante a toutefois présenté le témoignage d'une
compagne de classe de l'époque qui a déclaré que les agressions
avaient eu lieu après l'école. La victime n'avait pas eu une vie facile
non plus. Il semble qu'elle avait de graves problèmes de
toxicomanie lorsque les accusations ont été portées.
À la suite de cette affaire, il y a eu de nombreuses questions
graves qui ont été soulevées et qui ont amené des avocats et des
professeurs de droit à s'interroger sérieusement sur la suite des
événements et sur le fait que l'obligation redditionnelle du système
judiciaire a laissé à désirer. À cause de cela, l'électeur de ma
circonscription a été trouvé coupable en 1989 et il a été condamné.
Il a fait trois ans de prison. Il m'a dit qu'il aurait pu obtenir une
libération conditionnelle après six mois s'il avait admis sa
culpabilité. Au contraire, il a toujours dit qu'il était innocent. Il a été
libéré d'un pénitencier à sécurité minimum en avril 1992. Cet
homme a-t-il eu un procès équitable? Est-il en fait une victime? Il y
avait des problèmes avec l'agent des libérations conditionnelles. Il
y avait des problèmes quant au traitement des droits du délinquant
selon la loi. Était-il une victime du système judiciaire?
L'homme que j'ai rencontré à mon bureau était accablé par ce qui
lui arrivait, mais il ne s'est pas laissé abattre, malgré les
permissions de sortir pour une journée ou pour Noël qu'il aurait pu
obtenir s'il avait joué le jeu du système. Il ne voulait pas
abandonner. Même s'il était un bon prisonnier et s'il travaillait bien
en prison, il n'a jamais obtenu de congé pour bonne conduite. Il a
purgé la totalité de sa peine et a toujours clamé son innocence.
Face à un cas pareil, il faut s'arrêter et réfléchir. Est-il possible
qu'il y ait des erreurs judiciaires? Est-il possible que cet homme soit
complètement innocent, ce qui ferait de lui une victime du système?
Je me préoccupe peut-être trop des droits des accusés, mais c'est
parce que le système judiciaire présente bien des lacunes et que nos
juges ne sont pas parfaits. Ils ne sont qu'humains. Nombre d'entre
nous se demandent comment un juge peut accuser une enfant de
trois ans d'être sexuellement agressive et la blâmer pour ses propres
agressions sexuelles? Quelle sorte de juge a pu prononcer un tel
jugement? Cela laisse songeur.
(1530)
Dernièrement, un homme qui a poignardé sa femme à plusieurs
reprises, ce qui a entraîné sa mort, devant les enfants de cette
dernière a été jugé non coupable pour cause d'ivresse. L'alcoolisme
est une maladie, et non pas une excuse. Quelle sorte de juge a permis
que l'on invoque l'ébriété pour la défense de cet homme, jugé que
l'état d'ébriété pouvait être invoqué à titre de défense et ajouté cet
argument dans son jugement?
Quand est-ce que tout le monde sera tenu responsable de ses
actes? Cela semble si simple, mais nous éprouvons encore
beaucoup de difficulté à faire en sorte que tous soient tenus
responsables de leurs actes, sans excuses. La question qu'il faut se
poser en cette matière, c'est, en dépit des lacunes de notre système
judiciaire ou peut-être à cause d'elles, celle de savoir si ce projet de
loi établit un équilibre qui convient entre des intérêts divergents,
soit la protection des victimes et les droits des accusés?
En vertu du projet de loi, l'accusé devra se soumettre à un
processus à deux étapes pour obtenir la communication de dossiers
personnels de la partie demanderesse ou d'un témoin dans des
causes d'agression sexuelle. L'accusé devra d'abord convaincre le
juge que les dossiers seront vraisemblablement pertinents au procès
ou à la compétence d'un témoin à comparaître. Toutes les parties
ont la possibilité de s'opposer à la demande de l'accusé. L'audition
se fait à huis clos.
Si le juge décide que le dossier peut être utile dans la cause
entendue, il ordonne de présenter ce dossier pour examen afin de
déterminer si, oui ou non, il peut servir. Même si le juge rend une
décision permettant à l'accusé de consulter une partie du dossier ou
la totalité, il peut poser des conditions. Ce dossier ne peut pas servir
lors d'autres audiences.
Il convient à nouveau de souligner que les plaignants ne sont pas
tous de véritables victimes. Nous savons que des plaintes frivoles
ou calomnieuses ont été portées et certains d'entre nous savent que
ces accusations peuvent découler d'une affection appelée syndrome
de la mémoire fictive. J'ai entendu un député libéral rapporter
certains faits et citer quelques chiffres sur ce syndrome ce matin.
Dans certains cas, des parents vieillissants sont accusés
d'agressions sexuelles ayant apparemment eu lieu 30 ou 40 ans
auparavant, mais dont les prétendues victimes ne se sont pas
souvenu avant d'avoir suivi certaines thérapies, c'est-à-dire avant
d'avoir obtenu «de l'aide». Il y a de plus en plus de raisons de croire
que ces souvenirs réprimés pendant 20, 30, 40 ans ou encore plus,
sont très peu fiables. Il est très important de faire corroborer ces
accusations avant de les accepter.
On peut s'inquiéter du pouvoir discrétionnaire accordé aux juges.
Il convient de souligner que les juges doivent justifier leurs
ordonnances de production de dossiers ou leur refus d'accorder de
telles ordonnances.
9391
J'ajoute que les motifs donnés par les juges doivent s'appuyer sur
des faits et ne pas reposer uniquement sur leurs impressions. Je
donne cette précision en m'appuyant sur mon expérience
personnelle. J'ai été victime d'un tribunal. Dans mon cas, il
s'agissait d'un tribunal civil et pas d'un tribunal pénal. Quoi qu'il en
soit, il se peut que notre système juridique connaisse certains
problèmes et les juges ne sont pas le moindre de ces problèmes.
Dans notre cas, nous avions vendu une maison familiale en 1980
pour acheter une petite entreprise sous séquestre. À l'origine, nous
avions souscrit une police d'assurance correspondant à ce qui
semblait être la valeur du marché. Avec la croissance de
l'entreprise, nous avons augmenté le montant des primes
parallèlement à l'augmentation de sa valeur. Nous avons un jour fait
évaluer l'entreprise par un hôtelier d'expérience et son évaluation
correspondait à celle de l'évaluation de la compagnie d'assurance.
En raison de maladie dans la famille, nous avons vendu notre petite
entreprise à une valeur inférieure à la valeur du marché.
Un an et demi plus tard, les acheteurs ont eu des problèmes.
L'entreprise ne fonctionnait plus et ils ont arrêté de nous faire les
paiements. Ils ont essayé de revendre et ils ont même fait appel à un
évaluateur commercial qui leur a donné une valeur beaucoup plus
élevée que le prix que nous avions demandé. Nous nous sommes
adressés aux tribunaux et nous avons obtenu un jugement ordonnant
aux acheteurs de nous verser le solde dû sur le prix de vente.
À l'époque, le juge s'était arrêté uniquement aux faits et a
protégé nos droits, comme on pouvait s'y attendre. Nous avons
obtenu un jugement en notre faveur. Afin de nous empêcher de
toucher notre argent, les acheteurs nous ont accusés d'avoir conclu
la vente de l'entreprise sous de fausses représentations. Les faits
prouvaient évidemment le contraire, mais le couple a réussi à nous
mettre les bâtons dans les roues pendant quelques années et à nous
empêcher de profiter du jugement rendu en notre faveur.
En trois ans, nous avons eu recours à trois avocats. Le premier a
été radié du barreau, le deuxième a été congédié et nous avons perdu
le troisième, faute d'argent pour le payer. Nous avons donc dû
assurer notre propre défense au cours d'un procès qui a duré huit
jours devant la Cour suprême de Colombie-Britannique.
Trois jours avant le début du procès, l'avocat du demandeur nous
a offert 50 000 $ et a proposé de laisser tomber les accusations si
nous reprenions l'hôtel. La procédure a cependant débuté. Le
nouveau juge n'appréciait pas la présence de profanes sans avocat à
son tribunal. Je ne fabule pas. Deux juges à la retraite et deux
éminents avocats de Vancouver à qui nous avons fait lire le
jugement nous l'ont confirmé.
(1535)
Le juge n'avait pas l'intention de laisser un profane gagner contre
un éminent avocat. Il a jugé que nous avions vendu l'hôtel trop cher,
bien que toutes les preuves fournies aient démontré le contraire. Il a
dit que nous aurions dû le vendre beaucoup moins cher que sa valeur
marchande, nous a pris 50 000 $ et a confirmé le jugement rendu.
Le juge a fondé sa décision sur son opinion et non pas sur les
faits. Nous ne pouvions plus, dès lors, obtenir gain de cause en
appel. Il semble qu'un juge puisse tout se permettre dans son propre
tribunal. C'est une expérience atroce. Les juges ne sont pas
responsables de leurs actions et nous ne pouvons faire appel que sur
la base des motifs donnés à l'appui de la décision. Si le juge se fonde
sur sa propre opinion plutôt que sur les faits, il n'y a pas moyen de
gagner un appel. Nous avons dû accepter la décision.
Nous avons récupéré notre affaire. L'autre couple a tout perdu, ce
qu'il méritait, mais le public a dû payer la facture pour un procès
inutile qui a coûté des années de travail aux tribunaux et une somme
fantastique aux contribuables.
Quel genre de juge porterait une telle atteinte à nos droits? Au
civil, des milliers de plaintes sont portées chaque année contre des
avocats et des juges membres du barreau de Colombie-Britannique.
Je peux seulement parler du barreau de la Colombie-Britannique,
mais j'imagine que dans toutes les provinces, le système judiciaire
fait l'objet de milliers de plaintes.
Je répète donc encore une fois que, en ce qui concerne le projet de
loi C-46, on se dira inquiet de la discrétion laissée aux juges. Il est
bon de mentionner que le juge doit motiver sa décision d'ordonner
ou de refuser la communication d'un dossier. Les motifs devront
être portés dans le procès-verbal ou être données par écrit.
Encore une fois, j'insiste pour que ces motifs soient fondés sur
les faits qui ont été communiqués. Je demande aux députés d'en
face de bien veiller dans le projet de loi C-46 à ce que le juge soit
tenu de motiver sa décision sur la base des faits et non pas de son
opinion.
Ce projet de loi prévoit aussi le droit d'appel. Cela ouvre aussi la
porte à certains abus. Il faut veiller à ce qu'il y ait véritablement
droit d'appel.
D'une façon générale, ce projet de loi vise à établir un juste
compromis entre deux très importants droits de la personne.
Espérons que ce projet de loi a le mérite qu'il prétend avoir, qu'il est
vraiment juste pour les victimes et que c'est le début de la
reconnaissance des droits des victimes, un début sur lequel nous
pouvons nous fonder pour améliorer la situation jusqu'à ce que les
préoccupations du Parti réformiste soient réglées, jusqu'à ce que
nous ayons adopté à la Chambre toutes les mesures législatives
nécessaires pour protéger les droits des victimes. Alors, les victimes
sauront qu'elles comptent, qu'elles nous tiennent à coeur, quand
quelque chose de terrible arrive à leur famille. Les membres de la
famille sauront alors qu'ils sont aussi des victimes, et que nous
pouvons tenir compte de leurs droits.
La motion d'initiative parlementaire que je présente, la motion
no 267, qui fera l'objet d'une dernière heure de débat demain, traite
aussi, indirectement, de cette question. Mais le fait est que des
projets de loi d'initiative parlementaire présentés et adoptés à la
Chambre à l'étape de la deuxième lecture sont renvoyés au comité
et il arrive que les membres du comité les rejettent, souvent sans
même donner de raisons, comme ce fut le cas pour le mien. Le
comité ne donne pas de raisons. On ne discute pas au comité des
9392
témoignages entendus, et les projets de loi ne sont pas renvoyés à la
Chambre.
C'est très important que la Chambre reconnaisse le droit des
députés élus de donner suite aux voeux de leurs électeurs et
d'obtenir que, quand la Chambre s'entend pour renvoyer leurs
projets de loi au comité, celui-ci le renvoie à son tour en donnant les
raisons de ses conclusions.
Si le Comité de la justice ou tout autre comité saisi du projet de
loi veut le rejeter, c'est très bien, mais il doit justifier sa décision à la
Chambre. Nous devons comprendre ses motifs. Le cycle de la
démocratie doit être suivi au complet.
Des cas de violence sexuelle se sont produits dans ma
circonscription, comme dans bien d'autres. Le cas que je veux
porter à l'attention des députés est celui d'une jeune femme
handicapée. Elle est atteinte de paralysie cérébrale et en chaise
roulante, mais elle a eu le courage de dénoncer l'agression. Elle
était bien entourée au moment du prononcé de la sentence; j'y étais
moi-même. Elle était la victime, et l'homme qu'elle accusait a été
reconnu coupable. Toutefois, il est toujours au Canada, même si ce
n'est pas un Canadien. Il n'a pas été renvoyé dans son pays. Nous
suivons l'affaire.
(1540)
Il y a des enjeux que nous devons tous considérer très
sérieusement. Dans le cas projet de loi C-46, qui contribuera selon
moi à améliorer la situation des deux côtés, j'espère quand même
que les libéraux examineront très sérieusement les amendements
proposés.
M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de
la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Madame la
Présidente, je remarque avec intérêt qu'à maintes reprises les
réformistes se lèvent pour demander quand nous allons prendre la
défense des victimes et de leurs droits ou quand nous allons à
chaque fois donner la priorité aux droits des victimes. Je crois que
c'est ce qu'ils ont dit aujourd'hui.
Ce projet de loi est un bon exemple du genre de mesure
législative que le gouvernement a proposées pour aider les victimes
pendant le processus judiciaire et pour garantir que leur vie privée
ne soit pas envahie sans motif valable. Je n'arrive pas à comprendre
pourquoi les réformistes, alors que nous prenons des mesures
concrètes en faveur des victimes, s'évertuent à répéter: «Mais il faut
quand même s'assurer que l'accusé ait toujours droit à une défense
pleine et entière.» Pourquoi cette préoccupation pour les droits des
accusés, particulièrement alors qu'il s'agit de délits sexuels sur la
personne de femmes et d'enfants? Pourquoi ce manque de logique?
Mme Jennings: Madame la Présidente, je remercie le secrétaire
parlementaire de sa question.
Tout d'abord, ce qu'il a dit n'est pas tout à fait exact. Nous
sommes très préoccupés par les droits des victimes. Nous tenons à
ce que les libéraux y donnent suite.
Honnêtement, j'ai dit aujourd'hui à la Chambre que je
reconnaissais que le gouvernement proposait ce projet de loi dans le
but de venir en aide aux victimes et j'espère que c'est ce qui va se
passer. Je ne peux cependant pas laisser passer cette question sans
faire remarquer au député que le gouvernement a eu maintes et
maintes fois l'occasion d'abolir l'article 745 du Code criminel.
M. Kirkby: Répondez à ma question.
Mme Jennings: Je réponds à la question du député et je suis
désolée s'il était absent avant, lorsque j'y ai répondu.
Clifford Olson a maintenant l'autorisation de poser des questions
aux familles de ses victimes. Le gouvernement avait toute latitude
de l'en empêcher. C'est bien triste. Je ne comprends pas comment le
gouvernement peut justifier son inaction. Il aurait pu le faire. Un de
ses députés, qu'il a évincé depuis, avait même déposé un projet de
loi d'initiative parlementaire, lequel a été enterré par le comité, tout
comme le mien d'ailleurs. Ce député le sait bien, il était membre du
comité.
Comment le député peut-il poser une telle question?
M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Madame la
Présidente, un peu plus tôt au cours du débat, j'ai mentionné que le
projet de loi C-46 interdit à un accusé de se procurer des
informations pertinentes pour sa défense. D'autres ont soutenu que
le projet de loi n'établit pas une interdiction, mais plutôt une limite
et que mon point n'était qu'une simple question de sémantique.
J'aimerais attirer l'attention de la Présidente sur certaines
définitions que l'on trouve dans le Nouveau Petit Robert. Selon le
dictionnaire, «interdire» signifie «défendre, proscrire» et «limite»
signifie «ligne qui sépare, point qu'on ne peut ou ne doit pas
dépasser». Quant à «restreindre», ce mot veut dire «renfermer dans
des limites plus étroites».
À mon avis, le point que j'ai soulevé n'est pas une simple
question de sémantique. Il se situe plutôt au coeur même du débat.
Si nous parlons de limiter le droit d'un accusé de se défendre et de
prouver ou de démontrer son innocence, les mots limites et
interdictions sont synonymes. Nous limitons le droit d'un accusé de
se défendre et nous risquons d'emprisonner un innocent.
Nous devrions considérer qu'il est prioritaire de prévenir toute
situation de ce genre.
(1545)
Mme Jennings: Madame la Présidente, malheureusement, je
n'ai pas entendu les propos précédents du député. Je croyais avoir
très clairement exprimé ma pensée lorsque j'ai dit, durant mon
discours, que les accusés devaient avoir droit à un procès juste et
équitable et avoir accès à toutes les données requises pour obtenir
un procès équitable.
9393
J'ai mentionné le cas d'un habitant de ma circonscription.
D'après ce que je connais de la nature humaine, et après avoir parlé
à cet homme, je suis convaincue qu'il est innocent. Malgré tout, il a
été accusé, trouvé coupable et incarcéré pendant trois ans.
Comme le député, je sais que les mots ont une grande
importance. J'espère que mon commentaire est satisfaisant.
M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.):
Madame la Présidente, la députée réformiste croit-elle que c'est un
hasard que ce projet de loi reconnaisse certains droits aux victimes?
Est-ce un hasard si on le présente à la veille d'élections générales?
Pourquoi, à son avis, les Libéraux n'ont-ils fait aucun cas des
droits des victimes pendant trois ans et demi? Pourquoi faut-il des
élections pour qu'ils présentent quelques projets de loi avantageux
sur le plan politique? Sont-ils en train de tirer parti des victimes
pour des raisons politiques?
Mme Jennings: Madame la Présidente, je remercie le député de
Prince George-Bulkley Valley de sa question.
Il semblerait que ce soit le cas. Malheureusement, pendant trois
ans et demi, le gouvernement ne s'est pas occupé de faire adopter un
projet de loi sur les droits des victimes mais, tout d'un coup, alors
que des élections approchent, on nous sert le le projet de loi C-46.
Le gouvernement n'a fait aucun cas des droits fondamentaux des
victimes. Une fois de plus je ne peux que répéter combien le cas de
Clifford Olson est outrageant.
Les élections générales sont imminentes. Nous savons tous que
les droits des victimes auraient dû être discutés bien avant. Il y a eu
plusieurs cas graves où nous avons demandé l'aide du Parlement.
Les victimes ont manifesté sur la colline pour avoir de l'aide.
Il semble que le gouvernement libéral ait décidé d'agir un peu,
mais sans aller assez loin pour résoudre le problème. Cela
m'inquiète beaucoup et c'est quelque chose que je constate dans
toutes les mesures législatives.
Dans toutes les mesures présentées par le ministre de la Justice,
je m'aperçois que le but semble être de fournir du travail aux
avocats. C'est ce que révèle l'examen de toutes les mesures
adoptées depuis que je suis ici.
M. Art Hanger (Calgary-Nord-Est, Réf.): Madame la
Présidente, je suis très heureux de prendre part à ce débat sur le
projet de loi à l'étude.
Il convient de noter, comme l'a fait remarquer la députée de
Mission-Coquitlam, que les questions relatives aux victimes
prennent de plus en plus d'importance dans le discours du Parti
libéral. Le projet de loi C-46 profite quelque peu aux victimes,
surtout les victimes d'agression sexuelle.
Avant d'entrer dans les détails, je voudrais revenir sur une
question qui a été posée aujourd'hui au ministre de la Justice
relativement aux victimes. Bien sûr, le ministre de la Justice en a
profiter pour donner une réponse-fleuve.
Nous, de ce côté-ci de la Chambre, et les spectateurs avons eu
droit à une longue dissertation du ministre de la Justice sur ce que
son parti a fait pour venir en aide aux victimes au cours de ses trois
ans et demi de pouvoir. Le ministre de la Justice a évoqué plusieurs
projets de loi qui auraient été introduits, paraît-il, pour venir en aide
aux victimes de crimes.
Il a mentionné le projet C-41 qui accorde aux victimes le droit de
faire des déclarations avant le prononcé de la sentence. Cela
représente un enjeu très important pour les victimes. Les victimes
doivent avoir voix au chapitre devant les tribunaux. La question
n'est pas là. Cependant, ce n'est pas le cas dans notre système
actuel.
(1550)
Le ministre de la Justice a proclamé que les libéraux avaient
donné aux victimes le droit de présenter leurs déclarations devant
les tribunaux. Presqu'au même moment, le projet de loi C-45 a été
adopté et celui-ci abolissait ce droit. Le tribunal se retrouve dans la
même situation qu'il était auparavant. La victime n'a plus ce droit,
car c'est au juge de décider. Il peut décider s'il y a lieu de permettre
à la victime de présenter sa déclaration.
J'ai me suis rendu à des audiences de requêtes présentées en vertu
de l'article 745, qui ont trait à la libération anticipée d'individus
ayant commis un meurtre au premier degré, et j'ai pu constater que
les victimes ont vraiment du mal à s'y faire entendre.
Le juge peut modifier la déclaration de la victime. Il lui dit ce
qu'elle peut ou ne peut pas dire, alors que l'accusé peut intervenir au
banc des témoins pour exposer clairement tous ses sentiments et
même reconstituer les événements qui ont conduit à son
emprisonnement. C'est ce que le jury entend. On n'a pas vraiment
l'occasion de faire subir un contre-interrogatoire à l'accusé car le
procès est terminé depuis longtemps et les témoins ne sont plus là
pour confirmer ou infirmer les faits.
Le ministre de la Justice a parlé du projet de loi C-68 et de ses
répercussions positives pour les victimes. Quelles sont-elles? Le
projet de loi s'ingère beaucoup dans la vie des citoyens respectueux
des lois. Il va créer davantage de victimes au lieu d'aider les
victimes. On vient s'ingérer dans la vie d'honnêtes propriétaires
d'armes à feu et pourtant, le ministre de la Justice prétend vouloir
appuyer les victimes. Je voudrais savoir comment le projet de loi
sur le contrôle des armes à feu va limiter l'utilisation d'armes à feu
pour commettre des crimes. Nos vis-à-vis ne nous ont pas encore
donné une réponse plausible.
Le ministre de la Justice a parlé du projet de loi C-55, qui porte
sur l'incarcération des délinquants dangereux et violents. Le fait est
que les délinquants violents profiteront encore de libérations
conditionnelles. Comme on l'a déjà signalé, ils pourront à nouveau
victimiser la collectivité. Aux termes du projet de loi C-55, qui était
censé se montrer sévère envers les criminels, les délinquants
violents et dangereux profiteront encore de libérations
conditionnelles.
J'hésite à parler de certains autres projets de loi qui sont censés
être favorables aux victimes. Avec les cinq projets de loi que j'ai
mentionnés, il y a plus de chances que les gens deviennent victimes
de crimes maintenant qu'avant l'arrivée des libéraux au pouvoir.
Le projet de loi C-46 est censé renforcer la protection des
renseignements personnels et le droit à l'égalité des plaignants dans
le
9394
cadre d'un éventail d'infractions d'ordre sexuel. Des améliorations
s'imposent, sans aucun doute, dans ce domaine. Cependant, je mets
en garde nos vis-à-vis, y compris le ministre de la Justice. Il arrive
parfois que des gens prétendent faussement avoir été victimes
d'agressions sexuelles. Des témoins, même des experts témoignant
dans le cadre de procès pour agressions sexuelles, pointent du doigt
l'accusé, alors que ces témoins experts ont déjà été eux-mêmes des
agresseurs sexuels.
(1555)
Quels en seraient les résultats? Dans ces cas, un innocent serait-il
jeté en prison à la suite de la déposition d'un témoin expert? Je ne
crois pas que le ministre de la Justice ou le groupe d'avocats qui
relèvent de lui ont vraiment réfléchi à quelques-unes de ces
situations. De fausses accusations sont portées très fréquemment.
Lorsqu'il s'agit de certaines accusations de violence sexuelle qui
sont portées, il faut avouer que les plaignants ne sont pas tous de
véritables victimes. J'ai pu m'en rendre compte au cours de
certaines de mes enquêtes en tant qu'agent de police. Des enfants,
des hommes et des femmes ont porté de fausses accusations de
violence sexuelle. Ces enquêtes sont difficiles à mener. Il est encore
plus difficile de présenter tous les renseignements. Par contre, j'ai
été témoin de plaintes très légitimes et, parfois, malheureusement,
d'aucune condamnation par le tribunal.
Par mesure de précaution, il est toujours bon d'avoir des preuves
corroborantes dans les cas d'accusations de violence sexuelle. Je me
rappelle une enquête portant sur des enfants et un membre très en
vue de la communauté, une personne de prestige. L'accusation avait
été portée par une jeune dame, une dizaine d'années après
l'infraction. Ce n'est pas qu'elle avait oublié l'incident, mais il
s'était produit et avait eu un effet psychologique sur elle. De toute
évidence, il était enfoui au fond de sa mémoire. Grâce à une
thérapie, elle s'en est souvenu et l'a signalé au service de police.
L'enquêteur doit décider s'il doit dévoiler le nom de toute
personne de prestige, en raison des graves conséquences que cela
pourrait avoir sur sa vie personnelle. Ce serait épouvantable. Toute
sa vie serait ruinée. J'ai déjà vu cela.
Une accusation a été portée. L'enquêteur a décidé de publier le
nom de l'agresseur, de la personne très en vue qui avait commis
l'acte. Certains membres de la collectivité ont protesté
vigoureusement: «Comment osez-vous faire cela sur la foi d'une
seule personne?»
Bien sûr, les enquêteurs sont bien formés. Il y en a de très bons.
Certains manquent d'expérience, mais il existe d'excellents
enquêteurs en matière d'agressions sexuelles criminelles. Des
affirmations importantes qui revenaient dans la déclaration de la
femme ont incité les enquêteurs à dévoiler le nom de l'agresseur.
Plusieurs douzaines d'autres noms se sont rajoutés. Des personnes
de tous âges avaient été agressées par cet individu au fil des ans.
La fin de cette histoire indique clairement qu'il doit y avoir une
enquête sérieuse et des enquêteurs qualifiés. Tous les
renseignements qui peuvent être assemblés doivent être fournis au
tribunal. Ils doivent être déposés pour qu'il y ait un
contre-interrogatoire. Ils devraient notamment faire la lumière sur
le passé de ceux qui portent plainte. On ne doit pas interdire cela
tout à fait.
(1600)
Cet incident a fait suite à la condamnation de l'accusé. Certaines
personnes ont refusé d'admettre qu'il était coupable d'une telle
infraction et elles en sont encore convaincues.
L'accusé a fini par plaider coupable à des accusations et il a purgé
sa peine. Je dirais que justice a été faite, sauf qu'il a bénéficié d'une
libération anticipée. Un agresseur est un agresseur et je suis d'avis
que les renseignements à son sujet doivent être connus.
Passons maintenant à la possibilité qu'il y ait une fausse
déclaration. Il est arrivé que certains accusent des enseignants, des
ministres du culte et d'autres personnes qui occupent des postes en
vue dans la société, plusieurs années après la date où les incidents
allégués se seraient produits. Les accusateurs ont parfois des passés
douteux. Certains auraient même fait part de fabulations qui
pourraient certes se rapporter aux incidents en cause. Je pense qu'il
est prudent alors de restreindre la communication de ces
renseignements, parce qu'ils pourraient faire la différence entre une
condamnation et un acquittement.
Dans sa version actuelle, le projet de loi comporte deux
garanties, de sorte qu'en examinant le dossier d'un individu, on
serait en droit de poser la question suivante: le juge devrait-il avoir
le dernier mot pour décider si les renseignements doivent remonter
plus loin dans le temps? Suite à certaines remarques de la députée de
Mission-Coquitlam au sujet des décisions et des opinions
formulées par certains juges, j'ai une réserve importante, puisque
c'est le juge qui déterminerait s'il est justifié de présenter en preuve
les antécédents d'un témoin donné.
Ce juge, ainsi que l'a mentionné la députée de
Mission-Coquitlam, a certainement fait naître une autre
préoccupation. Est-ce que chaque juge est apte à décider de ce qui
est pertinent et de ce qui ne l'est pas? Il existe une norme, qui a été
expliquée par la procureure qui a comparu devant le comité. Il s'agit
de la pertinence vraisemblable. Il est nécessaire de déterminer si
cette norme est suffisante. La préoccupation formulée par cette
avocate avait trait au fait qu'il n'existe pas de définitions suffisantes
en ce qui a trait à la pertinence des antécédents ou des dossiers de
certains témoins. Au bout du compte, celle-ci disait que pour ce qui
est des tribunaux, la décision sera prise comme si de rien n'était.
En d'autres mots, parce que la notion de pertinence n'est pas
définie comme elle le devrait, les tribunaux inférieurs continueront
de fonctionner comme si rien n'avait changé, sauf rares exceptions,
lorsque la Couronne ou la défense en appellera de la décision rendue
en s'adressant à la cour d'appel et en allant jusqu'en Cour suprême.
9395
Ce point de vue est celui d'une procureure qualifiée qui s'occupe
de réunir les arguments nécessaires pour défendre ou protéger les
innocents. Cette façon de procéder sous-entend aussi qu'une
protection et un devoir de diligence sont nécessaires de la part de
l'accusé, parce qu'au bout du compte la poursuite et la défense
poursuivent le même but, ou du moins le devraient, puisque tel est
l'idéal auquel devraient aspirer nos tribunaux. Ce but commun
consiste à établir la culpabilité ou l'innocence de l'accusé.
(1605)
L'avocate dont nous rapportons les propos est très préoccupée
par le fait que la définition de la notion de pertinence vraisemblable,
en ce qui a trait aux antécédents et aux dossiers de témoins, sera
laissée à la discrétion d'une personne, à savoir le juge qui examinera
la demande de communication de dossiers. La procureure craint que
cette façon de faire ne donne pas les résultats voulus.
J'ai écouté un certain nombre de témoins et je dois dire que, selon
moi, le témoignage de cette avocate était le plus pertinent. Son
témoignage était celui qui traitait le plus directement des lacunes du
projet de loi C-46.
À cet égard, je peux vous dire que le Parti réformiste a
soigneusement examiné cette mesure. Nous avons un certain
nombre de préoccupations et de réserves relativement à ce projet de
loi, particulièrement en ce qui a trait aux dossiers des personnes
appeler à témoigner. Cela dit, nous appuyons la mesure législative à
ce stade-ci. Toutefois, je tiens à signaler que toute la question des
témoins, et aussi celle d'un accusé qui témoignerait en cour et qui
porterait des accusations contre des personnes, n'est pas traitée de
façon exhaustive dans le projet de loi C-46.
M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Madame la Présidente, je
commencerai par énoncer les valeurs que défend le Parti réformiste,
au cas où des députés d'en face ne comprennent pas.
Le Parti réformiste est en faveur d'un système judiciaire qui fait
passer le châtiment du crime et la protection des citoyens
respectueux des lois ainsi que de leur propriété avant tous les autres
objectifs. Le Parti réformiste demande également qu'on aide
davantage les victimes de la criminalité.
L'examen du projet de loi révèle qu'il ressemble à beaucoup
d'autres que nous voyons à la Chambre. Il part d'un bon principe et
comporte un certain nombre de très bons éléments que nous
pourrions appuyer très facilement. Il renferme cependant tout un tas
de mièvreries, et c'est là que réside tout le problème, surtout quand
il est question de notre système judiciaire. Il y a tellement de choses
qui n'y figurent pas et tellement de termes flous dont
l'interprétation est laissée aux bureaucrates et aux tribunaux. Voilà
en quoi consiste le problème et ce que les gens de la rue disent du
système judiciaire.
L'examen de la mesure à l'étude révèle le même genre de
problème. Nous voulons nous assurer que nous ne créons pas de
nouvelles victimes. Nous voulons nous assurer que les victimes sont
protégées tout en veillant au respect des droits de l'accusé. C'est
évidemment ce qu'un système judiciaire est censé faire.
Or, la confiance dans le système judiciaire n'est pas possible. Je
tiens vraiment à le souligner dans toute la mesure de mes
possibilités. Comme les députés le savent, je ne suis pas le
porte-parole de mon parti en matière de justice et je ne siège pas non
plus au comité de la justice, mais, ces deux dernières semaines, il est
survenu dans ma circonscription un événement qui fait comprendre
mieux que n'importe quoi d'autre ce que les gens pensent du
système judiciaire et la complète exaspération qu'ils ressentent à
son égard.
Je voudrais commencer par établir le contexte de sorte que les
députés puissent comprendre ce que les habitants de ma
circonscription et moi avons connu et l'exaspération que nous
inspire le système judiciaire. Cela pourrait se produire dans la
circonscription de n'importe qui, dans n'importe quelle région du
Canada, mais c'est là un exemple concret de ce qui m'est arrivé.
(1610)
Un pédophile devait être remis en liberté dans notre ville. Au
départ, nous ne devions pas savoir qui c'était, ni où il allait habiter,
dans quel quartier de la ville. En raison de certaines circonstances
que je vais expliquer, il a été décidé de publier sa photo et divulguer
son nom.
Cet homme avait déjà commis neuf infractions. Il s'agissait d'un
pédophile et, je le répète, il avait purgé toute la peine qui lui avait
été imposée à sa neuvième condamnation. Il avait entrepris un
programme de réadaptation, mais il en a été retiré parce que les
autres participants et les moniteurs le jugeaient trop violent.
Ce pédophile avait donc purgé sa peine, et tous pouvaient
connaître l'opinion d'un certain nombre de personnes. Les
dirigeants de la prison disaient qu'il récidiverait probablement. La
psychiatre partageait cet avis et estimait qu'il y aurait une dixième
victime. La commission des libérations conditionnelles pensait
qu'il récidiverait. Son ex-femme avait la même opinion.
La GRC a déclaré, devant un gymnase bondé de parents, que cet
homme récidiverait et que chaque fois, ses crimes devenaient plus
violents. La GRC a dû dire aux deux ou trois cents jeunes parents
qui étaient là que nous aurions une dixième victime.
Je n'ai jamais été aussi fier d'un groupe de toute ma vie, quand je
songe à l'émotion qui animait tous ces gens. C'étaient leurs enfants
qui risquaient de devenir les prochaines victimes.
Ils ont manifesté de la compassion pour cet homme. Ils ne
voulaient pas se comporter en justiciers. Ils ne parlaient pas de le
chasser de la ville. Ils demandaient ce que la société et le
gouvernement faisaient pour des gens comme lui.
La réponse, bien sûr, c'est qu'il avait purgé sa peine. Malgré les
risques de récidive, il fallait le relâcher. J'ignore si je pourrais être
aussi calme et rationnel que l'ont été ces parents, réunis dans cette
salle, vers 5 heures de l'après-midi. Nombre d'entre eux sont venus
au gymnase de l'école tout de suite après le travail, certains
accompagnés par leurs jeunes enfants. Ils ont demandé: «Que
pouvons--
9396
nous faire?» La GRC leur a répondu que l'homme en question allait
récidiver et qu'ils devaient inculquer des notions de prudence à
leurs enfants.
Beaucoup d'entre nous ont des enfants. Cet homme s'attaque aux
enfants de trois à six ans. Les petites filles de trois à six ans. Ils
veulent inculquer aux enfants de trois ans des notions de sécurité.
Ces enfants ont tout leur avenir devant eux. Si vous dites la vérité
à un enfant et lui interdisez de parler aux étrangers, en lui expliquant
les risques auxquels il s'exposerait, cela pourrait le perturber pour
le reste de sa vie.
Les jeunes de trois ans ne se rappellent pas tout ce que peuvent
leur dire leurs parents. Quelle est la solution, alors? Bien des gens
ont demandé aux agents de la GRC s'ils pouvaient faire quelque
chose. Ils ont répondu qu'ils ne pouvaient rien faire, sauf faire
respecter la loi.
Les dirigeants politiques peuvent-ils agir, eux? Ils peuvent
adopter des lois. Peuvent-ils protéger nos enfants contre l'auteur de
neuf infractions qui est relâché parmi nous? Peuvent-ils faire
quelque chose? Peuvent-ils discuter avec le ministre de la Justice et
lui expliquer la situation?
(1615)
D'ici la fin de la journée, le gouvernement devrait avoir reçu 175
lettres rédigées par des parents du quartier d'Oriole Park, un tout
petit secteur de la ville de Red Deer. Ces 175 parents ont un message
à transmettre. Ils réclament des mesures concrètes. Ils ne peuvent
accepter que nous refusions d'agir. Ils ne le toléreront plus.
En fin de compte, nous avons diffusé la photo du récidiviste. Cela
ne se fait pas souvent, mais nous l'avons fait. Les autorités
policières ont offert de montrer aux parents comment inculquer des
notions de sécurité à leurs enfants et de se rendre dans chacune des
écoles. Je n'oublierai jamais toutefois la peur réelle que je pouvais
lire dans les yeux de ces parents. J'ose espérer que le ministre de la
Justice et les membres du Comité de la justice tiendront compte de
la peur éprouvée par ces gens. Il n'y a pas que la personne agressée
qui est victime. Je considère que tous les membres de cette localité
sont désormais victimes de notre système de justice.
Le système de justice doit être réformé. Il doit être modifié. Il
doit tenir compte des désirs de la population.
J'ai ici une lettre qui résume probablement tout ce qui s'est dit à
la Chambre aujourd'hui. La lettre me vient d'une jeune adolescente
de cette collectivité. J'ai modifié certaines petites choses dans sa
lettre, comme son nom et son adresse, pour la protéger. Elle m'a
toutefois donné la permission de lire sa lettre qui décrit, à mon avis,
exactement ce que les gens pensent de notre système de justice et de
ces prédateurs sexuels.
Elle écrit: «Il est 5 h 30 du matin. Je n'ai pas très bien dormi. Et
vous? Comment voulez-vous que je puisse dormir la nuit en sachant
qu'un dangereux criminel vit dans notre région? C'est vrai, Kevin
Valley vit dans notre région.
«Le plus terrifiant, c'est qu'il est sorti de prison deux jours plus
tôt que prévu. Où est-il aujourd'hui? Personne ne le sait de façon
certaine à part sa mère et lui-même.
«Ce qui me fait vraiment flipper, c'est que la police et son
thérapeute savent que c'est un homme très dangereux. C'est un
homme instable. Ils savent qu'il récidivera et ils disent qu'il finira
probablement par tuer quelqu'un. S'il est aussi dangereux que cela,
pourquoi diable le libère-t-on dans la collectivité, surtout dans le
quartier où il vit, à trois pâtés de maisons d'une école primaire?
«Il y a plus d'enfants dans ce quartier aujourd'hui qu'il n'y en
avait il y a trois ou quatre ans. Cet homme doit être placé dans un
établissement psychiatrique et non relâché dans ma communauté.
«Il y a 12 ans, lorsque mes parents ont acheté notre maison, qui
aurait pu dire que le quartier allait devenir aussi dangereux? Nous
ne pouvons pas sortir dans le jardin à cause d'un féroce berger
allemand qui, d'après ses propriétaires, risque de sauter par-dessus
la clôture. Voici que nous avons dans notre quartier un pédophile
des plus répugnants peut-être doublé d'un tueur.
«Vous ne pouvez pas savoir à quel point c'est effrayant.»
N'oubliez pas que cette lettre vient d'une adolescente. Elle ajoute
ceci: «Je ne me sens plus en sécurité à l'extérieur de chez moi. Tout
le quartier a dû changer sa façon de vivre vendredi, lorsque nous
avons appris que Valley avait été libéré de Bowden. Il faut
verrouiller les portes, surtout si l'on est seule à la maison, garder les
stores fermés la nuit et ne pas répondre à la porte le soir si l'on est
seule à la maison sauf si l'on attend quelqu'un.
«Il nous faut redoubler de prudence, mais ce ne sont là que
quelques-unes des nouvelles règles de conduite qu'il nous faut
suivre. Il faut aussi éviter d'emprunter les ruelles, s'assurer de
rentrer avec des amis après la tombée de la nuit, et que la personne
qui nous reconduit en voiture attende que nous soyons en sécurité
dans la maison avant de repartir.
(1620)
«Cela vous semble-t-il une façon de vivre agréable? D'après moi,
ça ne l'est pas du tout. Une homme obtient une deuxième
chance»-en fait, c'est sa neuvième-, «mais tous les autres
perdent leur liberté. C'est une bonne affaire pour Valley, mais pas
pour le reste de la population.
«Une autre chose qui me fait peur, c'est quand je suis seule à la
maison le soir. Tous les bruits me font sursauter, surtout s'ils
viennent de l'extérieur. La maison ne m'a jamais semblé aussi
étrange qu'hier soir quand j'étais seule.
«Le soir, quand la sonnette retentit, je sursaute. C'est
complètement ridicule. Dieu que je suis heureuse qu'Oriole Park
soit un quartier si sûr où on peut laisser jouer ses enfants en sachant
qu'un homme représentant un danger rôde quelque part dans le
voisinage. Cela me rassure tellement.
«Pourquoi notre système judiciaire ne peut-il pas aller plus loin?
Pourquoi attend-on que les criminels récidivent ou tuent quelqu'un,
c'est-à-dire au moment où il sera trop tard, pour les enfermer? Cette
9397
crapule que l'on n'a pas pu réhabiliter et qui a purgé sa peine est
libéré parce qu'il a payé sa dette envers la société.
«Essayez donc de dire cela aux parents et aux êtres chers des
personnes qui seront tuées ou molestées par cet individu dans un
proche avenir. Tout cela parce que la loi dit qu'il a purgé sa peine et
qu'on ne peut pas le garder en prison plus longtemps.
«C'est vraiment rassurant quand on sait que Valley va
probablement commettre d'autres meurtres. Comment
pouvons-nous dormir la nuit? La justice n'a tenu compte que d'une
seule personne quand elle a laissé cette crapule sortir de prison; elle
n'a pas pensé à la population de Red Deer, notamment aux résidents
d'Oriole Park. Peut-être que notre bien-être ne compte pas pour la
justice. Mais pourquoi attendre que cet individu commette un
nouveau meurtre?
«Mes parents nous disaient toujours à nous, leurs enfants- j'ai
un frère aîné et une soeur cadette-qui avons grandi dans ce
quartier, de dire non aux drogues. Les drogues ont été fort
populaires à l'école. Et maintenant, nous devons nous préoccuper
de cette crapule dans notre quartier. J'aimerais mieux que l'on
m'offre de la drogue que de voir cet individu dans notre quartier.
«Si cet individu est potentiellement dangereux, cela signifie-t-il
qu'il porte une arme à feu, un couteau, voire les deux? C'est
intéressant, n'est-ce pas?
«Cette crapule ne mérite pas de réintégrer la société. Il ne mérite
pas de revenir dans notre quartier. Il doit être institutionnalisé.
Enfermez-le quelque part et jetez la clé.»
J'ai lu la lettre au complet parce que j'ai parlé à son auteur.
Comme je l'ai dit, il s'agit d'une jeune adolescente. Cela résume
bien ce que j'ai entendu. J'ai parlé à des parents qui se demandent
pourquoi le système de justice pénale ne fonctionne pas. De toute
évidence, c'est le cas à bien des endroits. Il y a une foule de raisons
pour lesquelles nous ne faisons pas confiance au système de justice
pénale. J'en ai seulement mentionné quelques-unes, et nous
pourrions parler de ce sujet encore longtemps, mais je sais que je ne
puis le faire.
Si j'avais à énumérer certaines causes, le projet de loi C-68 serait
du nombre. Il y a bien des gens qui sont en faveur du contrôle des
armes à feu. Cependant, la façon dont le projet de loi a été conçu, les
dispositions concernant la perquisition et la saisie, les décrets du
conseil et le fait que personne n'affirme que le projet de loi enrayera
la criminalité nous ont amenés à nous interroger sérieusement sur la
valeur du système de justice et sur le jugement du ministre.
Je me suis grandement intéressé à l'enquête sur la Somalie. Une
juge a décidé que la commission pouvait examiner tous les aspects
et qu'elle devait, une fois pour toutes, faire la lumière sur ces
événements afin que nous puissions passer à autre chose. Par la
suite, le ministre de la Défense a toutefois dit qu'il fallait modifier
le mandat de la commission, que celle-ci n'irait pas au fond de
questions comme la torture, le meurtre et la possibilité de
camouflage. Il a dit que la commission ne se pencherait sur aucun de
ces aspects et que le gouvernement modifierait simplement son
mandat. Le gouvernement a donc modifié la loi de manière à ce que
la commission d'enquête ne tire pas les conclusions qui
s'imposaient naturellement. L'avenir que l'on entrevoit lorsque ce
genre de situation se produit, que les gouvernements ne se
conforment pas au système de justice et qu'ils vont jusqu'à le
modifier si une décision ne leur plaît pas, est fort inquiétant.
(1625)
Les gens ont aussi été touchés par les affaires Olson et Bernardo
et par l'histoire de l'article 745. Pourquoi ne pas avoir modifié la loi
il y a trois ans, de manière à priver des individus comme Olson de la
possibilité de comparaître devant un juge?
Les nominations à la commission des libérations conditionnelles
qui, depuis des années, sont des nominations politiques nous
amènent à nous interroger sur notre système de justice, tout comme
le refus du gouvernement de modifier en profondeur la Loi sur les
jeunes contrevenants.
Ce que je veux dire, c'est que la population a perdu confiance
dans le système, et pas uniquement dans le système de justice. À
l'édifice Pearson aujourd'hui, j'ai pris connaissance d'un rapport
révélant ce que les Canadiens et les étrangers pensent de notre pays.
Évidemment, nous savons tous ce que nous pensons du Canada.
C'est le meilleur pays du monde. Nous voulons le protéger, mais il
comporte de nombreux éléments à remanier. Seulement 51 p. 100
des Canadiens se disent satisfaits du gouvernement. Ce sont là les
résultats d'un sondage mené par le gouvernement. Quelque 49 p.
100 des Canadiens ne sont pas satisfaits du gouvernement.
Nous avons un problème qui, tôt ou tard, se traduira par de
l'apathie. Les gens vont finir par ne plus croire au système. Lorsque
cela se produira, la démocratie sera vraiment en danger.
M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Madame la Présidente,
j'ai écouté avec beaucoup d'intérêt les observations du député. J'en
retiens surtout qu'il a pris le temps de lire la lettre. Si je dis cela,
c'est parce que tous les députés réformistes croient que l'on trouve
plus de bon sens dans n'importe quel café moyen qu'à la Chambre
des communes.
La lettre pose des défis très intéressants. Les libéraux ne liraient
jamais ce genre de lettre à la Chambre des communes. Elle présente
le point de vue légitime d'un jeune de la circonscription du député.
Si cette circonscription était représentée par un libéral-et certains
volatiles auraient certainement les dents très longues si cela se
produisait-nous pouvons être certains que la Chambre n'aurait
jamais entendu parler de cette lettre et des sentiments de la
population de cette circonscription.
Comment se fait-il que, lorsque nous parlons du système de
justice pénale, comme aujourd'hui, nous n'entendons jamais un
point de vue équilibré? Comment se fait-il que nous obtenons
toujours la version totalement homogénéisée du ministère de la
Justice qui finit par rendre tout à fait insignifiants les instruments
dont nous avons besoin pour rétablir un juste équilibre au sein de
notre société?
9398
L'auteure de la lettre a présenté une préoccupation très grave que
l'on observe dans toutes les circonscriptions, que les libéraux
veuillent bien l'admettre ou pas.
J'aimerais que mon collègue nous dise par quels moyens
pratiques et concrets nous pourrions commencer à régler le
problème soulevé. Je ne veux pas qu'il expose la position de notre
parti, mais qu'il nous fasse part de réflexions logiques qui
permettraient d'amorcer un dialogue avec les Canadiens, car c'est
ce que veut faire le Parti réformiste: tenir compte des idées des
Canadiens afin que la Chambre des communes prenne tout son sens.
(1630)
M. Mills (Red Dear): Madame la Présidente, la chose est très
claire. Il ne s'agit pas d'une question politique, mais d'un sujet qui
préoccupe tous les Canadiens. J'ai tiré un exemple dans ma
circonscription, mais j'aurais pu prendre n'importe laquelle des 301
circonscriptions en exemple.
Nous devons trouver une réponse. Nous devons, à long terme,
essayer de voir ce qui a permis à notre société d'engendrer des
individus de ce genre. Au besoin, il faut remonter jusqu'à la
naissance et tenir compte de tout ce qui peut se produire. Les parents
doivent recevoir un apprentissage pour éviter à la société de créer
des victimes et des criminels. En gros, nous devons assurer une
planification à long terme et remonter aux origines pour voir ce qui
a dérapé et comment la société a pu engendrer des individus pareils.
Nous devons aussi trouver une réponse dans l'immédiat pour cet
individu qui a commis neuf délits. Tout le monde affirme qu'il
récidivera. Je suis sûr qu'il n'aime pas que tout le monde parle de lui
et affirme qu'il commettra de nouveaux crimes. Il doit se sentir
soumis à une surveillance extrêmement lourde. Nous pourrions
demeurer discrets et ne pas en parler, mais ce ne serait pas la bonne
attitude car cet individu à récidivé neuf fois. Nous devons nous
protéger contre lui. Nous ne pouvons pas, pour sa protection, le
remettre en liberté.
Cela ne signifie pas qu'il faille construire des prisons et laisser
les détenus y moisir. Nous devons faire preuve de compassion. Il
faut trouver une solution. Nous ne pouvons pas laisser aller les
choses. Les gens nous reprochent de ne pas faire notre travail. Ils
nous accusent tous, les 295 députés, de ne pas prendre nos
responsabilités quand des choses semblables se produisent.
M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Madame la Présidente, je
remercie le député de Red Deer pour son intervention
d'aujourd'hui.
Le député a dit qu'il nous fallait régler certaines choses dès
maintenant, mais qu'il nous fallait aussi considérer ce qui, dans le
passé de la personne, en avait fait un criminel. Autrement dit, quelle
est la cause du crime? Les libéraux et les conservateurs nous ont
tellement tenu de propos de la sorte, au fil des ans, que je me sens
malade quand j'entends parler des causes de la criminalité et de la
nécessité de considérer les causes d'un crime. Mais je crois que
nous devons le faire.
Les documents sur lesquels nous allons appuyer notre campagne
traitent de toute la question des causes de la criminalité. Nous
reconnaissons que la famille doit être considérée comme une
priorité absolue. Nous disons que le rôle de parent a beaucoup de
valeur et que la loi doit en tenir compte. Nous disons qu'il faut
adopter un degré de tolérance zéro en matière de violence familiale.
Nous disons qu'il faut prendre des mesures très fermes pour contrer
la pornographie et la prostitution juvéniles. Nous avons aussi pris
d'autres positions.
Le député peut-il nous en dire davantage sur la manière de traiter
des causes de la criminalité, à son avis?
M. Mills (Red Deer): Madame la Présidente, comme je l'ai dit,
les personnes de cet acabit ne doivent pas être réinsérées dans la
société et c'est malheureusement un problème auquel nous devons
nous attaquer sans attendre.
Le gros problème? C'est que c'est un processus à long terme.
Comme le député l'a dit, nous devons revenir à la famille, aux
valeurs familiales. Il y a, à l'autre endroit, un projet de loi qui
interdit de donner une fessée. Cela montre que la façon de penser
des libéraux est à l'origine de nos problèmes. Nous devons faire des
changements dans l'intérêt de la famille. Nous pourrions envisager
des déductions fiscales en faveur de l'un des deux parents ou de
celui qui reste à la maison pour s'occuper des enfants, de façon que
les parents ne soient pas obligés tous les deux d'aller gagner de
l'argent à l'extérieur. Nous devons faire quelque chose parce que ça
ne va pas dans notre système.
(1635)
Je n'ai certes pas la réponse à toutes les questions, mais nous
examinons les possibilités. Nous disons qu'il faut mettre l'accent
sur la famille, qu'il faut mettre l'accent sur les enfants quand ils
sont jeunes. Nous devons examiner notre système d'éducation.
Nous devons nous efforcer ensemble d'améliorer le système et
mettre de côté la politique partisane.
M. Dick Harris (Prince George-Bulkley Valley, Réf.):
Madame la Présidente, c'est un plaisir d'être de retour aujourd'hui à
Ottawa et de prendre part au débat sur certains des problèmes qui
assaillent notre pays. Je suis heureux de voir tant de réformistes et si
peu de libéraux à la Chambre aujourd'hui. Ils sont peut-être tous en
train de regarder leur chef jouer au golf à la télévision en circuit
fermé.
La présidente suppléante (Mme Ringuette-Maltais): Je
demanderais au député de se garder de mentionner les députés qui
ne sont pas à la Chambre.
M. Harris: Je m'excuse. Avant d'être élus, en 1993, les
réformistes avaient dit à leur électorat que, si le gouvernement
proposait un projet de loi qui méritait d'être appuyé, nous
l'appuierions. Même si la fréquence avec laquelle le gouvernement
fédéral propose une bonne mesure législative est la même que celle
avec laquelle les comètes traversent le ciel, ce projet de loi vaut la
peine d'être appuyé. Ce n'est peut-être qu'une coïncidence que la
comète Hale-Bopp soit visible en ce moment et que nous soyons
saisis d'une bonne mesure législative fédérale.
9399
Je lui fais sans doute trop honneur en disant qu'elle est bonne.
Elle est acceptable, car elle contribue à changer la façon dont le
dossier d'une victime peut être utilisé dans un procès.
Le projet de loi C-46 a pour objet d'essayer de parvenir à un juste
équilibre entre les droits de la victime et les droits de l'accusé dans
le cadre de poursuites pour délit sexuel. Auparavant, lors d'un
procès de ce genre, les avocats de la défense demandaient souvent à
voir le dossier psychiatrique de la plaignante, les rapports de la
Société d'aide à l'enfance, de l'assistance sociale, son dossier
scolaire, ses relevés d'emploi ainsi que son journal personnel.
Il ne fait aucun doute que, ici comme dans bien d'autres pays,
certains avocats sans scrupules ont profité de leur privilège pour
demander ces dossiers et instruire la cause non pas en essayant de
prouver l'innocence de leur client, mais en tentant de discréditer le
plaignant au moyen des éléments trouvés dans ces dossiers. Pour
des crimes de ce genre, cette façon de procéder de certains avocats
de la défense n'est pas populaire. Lorsque les avocats de la défense
demandent à voir ces dossiers, c'est parfois pour assurer une
défense complète et équitable à l'accusé. Trop souvent, cependant,
ils utilisent ces informations pour attaquer directement,
méchamment et cyniquement les plaignants qui sont victimes des
crimes de ce genre, ce qui est tout à fait répréhensible. C'est l'une
des raisons pour lesquelles les Canadiens font moins confiance aux
avocats qu'aux politiciens, particulièrement les politiciens du Parti
libéral.
(1640)
Cela explique aussi pourquoi certaines victimes d'agression
sexuelle hésitent à intenter des poursuites judiciaires. Elles savent
comment les choses se passent devant les tribunaux. Elles ont vu,
dans les journaux et les médias, des cas où les plaignantes ont été
cruellement attaquées par des avocats de la défense ayant obtenu
des dossiers datant de nombreuses années, demandé que le tribunal
en tienne compte et décrété qu'une personne n'était pas crédible à
cause d'événements survenus il y a 32 ans.
Les avocats attaquent sans relâche, peu importe que les preuves
contre leur client soient écrasantes ou non. Ils savent qu'en fondant
la défense de leur client uniquement sur les preuves, ils risquent de
perdre leur cause. Par conséquent, ils attaquent et utilisent les
dossiers des plaignants sans aucun scrupule.
Il faut donc promulguer une loi pour équilibrer le droit d'un
accusé à une défense complète et équitable et le droit de la victime
au respect de sa vie privée. À mon avis, le droit de la victime est de
toute première importance dans ce cas.
Le projet de loi C-46 vise l'équilibre en établissant une procédure
en deux étapes pour la communication des dossiers aux avocats de
la défense. L'avocat d'un plaignant obtient le droit de s'opposer à
certains arguments durant les audiences à huis clos. Si le juge est
satisfait, l'argument est formulé par l'accusé et les ordonnances
peuvent être émises. Si le juge n'est pas convaincu que certains
documents soient utiles à l'affaire, il peut refuser qu'ils soient
présentés.
Dans notre système judiciaire, les accusés ont droit à un juste
procès. Malheureusement, la plupart des procès sont loin de rendre
justice et d'être justes, en particulier du point de vue des victimes.
Ayant vécu la 35e législature, je sais que les droits des victimes
ne sont pas une chose que le gouvernement libéral comprend et qu'il
est prêt à considérer.
Le Parti réformiste, par contre, a pressé le gouvernement libéral
et le ministre de la Justice, depuis trois ans et demi, de prendre des
mesures à l'égard des droits des victimes. Nos suggestions, nos
commentaires et notre projet de loi d'initiative parlementaire sur ce
sujet sont tombés dans l'oreille de sourds de l'autre côté de la
Chambre.
C'est donc à la veille d'élections, par pure coïncidence bien sûr, à
la 11e heure, que le gouvernement libéral et le ministre de la Justice
reconnaissent qu'il y a des victimes de crimes dans notre société. Ils
vont soudainement devenir les champions de ces victimes.
Je dis que ce n'est pas rendre justice aux victimes. Je dis que c'est
de l'exploitation, car, s'il n'y avait pas eu d'élections, le ministre de
la Justice n'aurait pas abordé la question. Toutefois, il sait que le
Parti réformiste a réussi à traiter efficacement de cette question et à
sensibiliser le public, lui démontrant le manque d'empathie du
ministre de la Justice. Il sait, les stratèges libéraux savent et les
gestionnaires de la campagne libérale savent qu'ils leur faut
démontrer qu'ils essaient de faire quelque chose et donner l'illusion
qu'ils agissent.
Cette semaine, le ministre de la Justice et le gouvernement libéral
vont essayer de démontrer qu'ils sont les champions des droits des
victimes, mais la population canadienne est suffisamment
intelligente pour ne pas être dupe. Ils ne vont pas se laisser éblouir
par ce miroir aux alouettes du gouvernement libéral et du ministre
de la Justice.
(1645)
En ce qui concerne les initiatives parlementaires, voici un bon
exemple qui montre que les libéraux n'accordent pas assez
d'importance aux victimes de crimes au Canada. En février dernier,
la Chambre a adopté ma motion d'initiative parlementaire, la
motion M-78, qui a pour objectif de dissuader encore davantage les
gens de conduire avec des facultés affaiblies. Elle a été adoptée par
la Chambre en février.
Il s'agit d'un crime qui cause 1 800 morts par année, qui fait
quelque 90 000 blessés par année et coûte aux Canadiens des
milliards de dollars parce que des gens conduisent avec des facultés
affaiblies. Il n'y a pas assez de mesures de dissuasion et les
gouvernements n'ont pas cherché à remédier à cette situation
jusqu'à maintenant.
Cette motion est sur une tablette quelque part. Une motion qui
porte sur un crime tout à fait évitable, une motion qui touche un
crime responsable de quelque 1 800 morts par année, soit quatre
fois et demie plus de gens que le meurtre, une motion qui a trait à un
crime qui fait quelque 90 000 blessés par année au Canada et qui
entraîne de terribles difficultés pour les victimes reste sur une
9400
tablette, car le gouvernement libéral n'a pas le courage de s'attaquer
à ce problème. Voilà pour ce qui est de la reconnaissance des droits
des victimes au Canada. Cela montre bien à quel point le ministre de
la Justice se préoccupe des victimes de crimes. Les Canadiens ne se
laisseront pas tromper par ce miroir aux alouettes qu'on va nous
présenter.
En ce qui concerne la motion M-78, ce ne sera pas la première
fois que le gouvernement libéral fait fi de la volonté du Parlement
lorsqu'il s'agit de renforcer le système de justice et de donner la
priorité aux victimes.
La Chambre a adopté un projet de loi d'initiative parlementaire
dont la présidente du Comité de la justice se rappelle, j'en suis sûr,
le projet de loi C-226, qui aurait aboli l'article 745 du Code criminel
et qui aurait nié ainsi aux tueurs la possibilité d'obtenir une
libération conditionnelle anticipée. Personne à la Chambre ne peut
oublier l'adoption du projet de loi C-226. Personne ne peut
l'oublier, mais beaucoup de députés, y compris le ministre libéral de
la Justice et la présidente libérale du Comité de la justice, peuvent
facilement en faire fi. Ils ne peuvent l'oublier, mais ils peuvent n'en
tenir aucun compte.
Une fois que la Chambre a adopté ce projet de loi, sur les
directives du ministre de la Justice, il est resté en suspens au Comité
de la justice pendant environ deux ans. On ne l'a jamais étudié
même si c'était la volonté de la Chambre, même si des millions de
Canadiens de tout le pays voulaient qu'on mette en oeuvre ce projet
de loi. En fin de compte, le comité a essayé d'éliminer le projet de
loi tout simplement. Il a essayé de s'en défaire, mais il a échoué
dans sa tentative. Laissée en suspens, la mesure législative ne sera
jamais renvoyée au comité puisque telle n'est pas la volonté du
ministre de la Justice ni, probablement, celle des députés libéraux
qui siègent au sein du comité de la justice.
L'adoption du projet de loi correspondait à la volonté du
Parlement. Le fait que c'était la volonté du Parlement importe peu.
Le fait que c'était la volonté du Parlement ne change rien à l'affaire
pour le ministre libéral de la Justice parce que cela ne cadre pas avec
la doctrine libérale qui veut que les individus ne soient pas tenus
responsables des actes qu'ils commettent parce que c'est la société
qui les a ainsi faits.
À toutes les victimes de la criminalité, à toutes les personnes qui
craignent pour leur sécurité, à tous les citoyens respectueux de la loi
qui se préoccupent de la sécurité de leur famille et de leurs enfants,
je rappellerai ceci. Il y a quelques mois à peine, le ministre de la
Justice a déclaré à la Chambre que le principal souci de la justice
pénale doit être la réadaptation et la réinsertion des criminels dans
la société.
(1650)
Ce sont les termes mêmes qu'il a employés à la Chambre. Le
Canadien moyen qui réclame que le châtiment corresponde au
crime, cela ne compte pas. La protection de notre société, cela ne
compte pas. Les droits des victimes, cela ne compte pas.
Ce qui compte, c'est la doctrine du ministre de la Justice et de ses
amis du secteur nord de York, à Toronto, qui se réunissent pour
siroter un cappuccino tout en déplorant que la société est trop
sévère, persuadés qu'ils sont que les criminels sont l'oeuvre de la
société et qu'en conséquence ils ne devraient pas être malmenés
ainsi. Mais le reste, cela ne compte pas.
Il n'est pas étonnant que le projet de loi C-226 n'ait pas eu
beaucoup d'effet lorsque la Chambre l'a adopté. Il ne correspond
pas à la doctrine du ministre de la Justice et d'un grand nombre des
libéraux d'en face.
Les groupes de défense des droits des victimes ont pleinement
appuyé le projet de loi C-226, mais cela importe peu au ministre de
la Justice. Cela importe peu au président du Comité de la justice à
majorité libérale. Des Canadiens de toutes les régions étaient au
réseau de télévision nationale pour implorer le ministre de la Justice
d'examiner ce projet de loi, mais c'est sans importance.
Des habitants de Winnipeg St. James ont déclaré aux médias
qu'ils voulaient que l'article 745 du Code criminel soit abrogé, mais
leur député a dit essentiellement à la Chambre qu'il lui importait
peu que ses électeurs voulaient cette abrogation. Cela lui est égal.
Selon lui, le ministre de la Justice a dit que cela ne se produirait pas
et comme c'est un bon libéral, il est certain que cela ne se produira
pas.
Pour éviter la critique, le ministre de la Justice a présenté
quelques mesures boiteuses à l'égard de la modification de l'article
745; on exige seulement que les tueurs surmontent quelques
obstacles de plus avant de pouvoir demander une libération
anticipée.
Ces mesures sont bonnes. Une des modifications ferait en sorte
que les tueurs en série qui ont commis des meurtres après 1997
n'auraient pas droit à une révision judiciaire aux termes de l'article
745. Ce n'est pas mal. Sont actuellement en prison plusieurs tueurs
en série qui ont parfaitement le loisir de dépenser l'argent des
contribuables et de faire revivre le cauchemar aux familles des
victimes de crime. Comme le fait actuellement Clifford Olson. Ce
projet de loi ne les vise pas.
Le ministre de la Justice dit qu'il ne peut pas le faire, car il y
aurait contestation judiciaire. Il m'importe peu qu'il y ait une
douzaines de contestations judiciaires. Clifford Olson ne devrait pas
avoir le droit de demander une libération anticipée et les libéraux
d'en face le savent fort bien.
Ils ont présenté une mesure insensée et c'est pourquoi le Parti
réformiste l'a rejetée. Elle était insensée et ne reflétait pas du tout la
volonté des Canadiens. Voilà pourquoi le Parti réformiste l'a
rejetée.
Les libéraux prétendent que les réformistes se prononcent
toujours contre les bonnes mesures qu'ils proposent. Quand ils
proposeront quelque chose de solide, nous l'approuverons. Mais le
projet de loi dont nous sommes maintenant saisis ne va pas assez
loin.
9401
Les libéraux ont amplement eu le temps de s'occuper des droits
des victimes depuis leur élection en 1993, mais ils n'ont rien fait.
Maintenant qu'il y a des élections en vue, ils s'y mettent. Ils veulent
nous faire marcher à la carotte et nous faire croire dans leurs bonnes
intentions.
C'est insensé. Les libéraux se sont amusés avec des
modifications concernant la détermination de la peine et ils ont
présenté une disposition portant inversion du fardeau de la preuve
aux termes de la Loi sur les jeunes contrevenants, afin que ces
derniers soient traduits devant des tribunaux pour adultes. Au bout
du compte, justice n'est pas faite.
(1655)
Nous pourrions discourir longtemps sur la condamnation à
l'emprisonnement avec sursis. En voilà une belle. En Alberta, un
homme a tenté de tuer sa femme à l'aide d'un fusil. Heureusement,
il l'a manquée. Il a été condamné à une peine ridicule qui consiste à
accomplir des travaux communautaires.
En Colombie-Britannique, un homme qui a été reconnu coupable
d'avoir agressé sexuellement la gardienne de 11 ans une fois par
semaine pendant trois ans, a lui aussi été condamné à une ridicule
peine d'emprisonnement avec sursis typique des libéraux.
Une condamnation avec sursis de deux ans a également été
imposée à un homme de la Colombie-Britannique qui avait violé
une femme dans son auto, parce que ce genre de peine est conforme
à la philosophie des libéraux.
La façon dont le gouvernement libéral traite les victimes d'actes
criminels au Canada est une farce. L'approche compatissante que
les libéraux adoptent pour punir des criminels est également risible.
Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.):
Madame la Présidente, j'espérais entendre le député nous dire si les
réformistes appuient ou non le projet de loi C-46.
C'est à ni rien comprendre. Le projet de loi C-46 est une
importante mesure qui traite de questions qui préoccupent
énormément les victimes, compte tenu du nombre de crimes de ce
genre et du nombre ayant fait l'objet de poursuites. Dans la majorité
des cas, les victimes sont des femmes.
Le député pourrait-il nous dire s'il va voter de la même façon
dans le cas du projet de loi C-46 qu'il l'a fait dans le cas du projet de
loi sur les armes à feu, auquel il s'est opposé malgré le fait que
toutes les victimes tenaient à cette mesure, qu'il l'a fait dans le cas
du projet de loi C-41, auquel il s'est opposé malgré le fait que les
victimes tenaient à cette mesure, et qu'il l'a aussi fait dans le cas
d'autres initiatives que nous avons prises? Le député va-t-il voter en
faveur du projet de loi C-46, ou va-t-il s'y opposer?
M. Harris: Madame la Présidente, si la députée avait écouté mes
propos, elle m'aurait clairement entendu dire que j'ai l'intention
d'appuyer le projet de loi C-46.
Cela dit, ce projet de loi est loin d'être une importante mesure. Si
c'est une initiative importante aux yeux de la députée libérale, qui
préside le Comité de la justice, alors notre pays est dans un pétrin
bien plus grand qu'on ne le croyait.
(La séance est suspendue à 16 h 57.)
La séance reprend à 17 h 21.
Le président suppléant (M. Milliken): Avant l'interruption,
c'est le député de Prince George-Bulkley Valley qui avait la
parole. Il répondait à une question. Je l'invite à reprendre le cours de
sa réponse.
M. Harris: Monsieur le Président, la présidente du Comité de la
justice m'a demandé si nous appuyons le projet de loi C-46. J'ai
répondu que cette mesure n'était pas dénuée de mérite et que nous
allions tout probablement l'appuyer. La députée m'a ensuite
demandé pourquoi nous n'avions pas appuyé le projet de loi C-68. Il
y a une énorme différence de crédibilité entre ces deux questions.
Je tiens à dire très clairement à la présidente du Comité de la
justice et à tous les députés libéraux que le Parti réformiste n'a pas
appuyé le projet de loi C-68 parce que c'était une mesure législative
complètement superflue. Elle n'avait aucune valeur. Nous avons
l'habitude d'appuyer des projets de loi qui ont de la valeur, mais
celui-là n'en avait aucune.
Des députés du Parti réformiste, moi-même y compris, sont
intervenus jour après jour à la Chambre durant le débat du projet de
loi C-68 en implorant le ministre de la Justice et tous les députés
libéraux de nous donner une preuve tangible que cette mesure
contribuerait à mettre fin à l'utilisation criminelle d'armes à feu et à
combattre la criminalité au Canada. S'ils avaient été capables de le
faire, nous aurions peut-être appuyé le projet de loi. Cependant,
dans toutes les heures de débat consacrées au projet de loi C-68, le
ministre de la Justice a été incapable de répondre à cette question. Il
a été incapable de fournir la moindre preuve que le projet de loi de
réglementation des armes à feu serait le moindrement bénéfique
pour le pays ou empêcherait de commettre un seul crime à l'aide
d'une arme à feu.
Tout le monde au Canada sait que c'est parce que les citoyens
respectueux des lois ne commettent pas de crimes à l'aide d'armes à
feu. Ce sont les filous qui commettent les crimes. Il n'y a pas un seul
filou au Canada qui ne se foute pas complètement du projet de loi de
réglementation des armes à feu du ministre libéral de la Justice.
Il a donc été incapable de répondre à cette question, comme à
beaucoup d'autres d'ailleurs. Aujourd'hui, le député de Crowfoot
lui a posé d'excellentes questions pendant la période des questions,
mais il a été incapable d'y répondre.
Comme nous l'avons fait tant de fois au nom des Canadiens, nous
avons posé des questions pertinentes, réfléchies, sur des questions
de justice, au nom des victimes du crime, au nom des citoyens
respectueux des lois, mais le gouvernement libéral est perdu
quelque part dans l'espace avec la comète de Hale-Bopp et ne vit
pas dans le même monde que nous en ce qui a trait à la justice.
(1725)
M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Monsieur le
Président, c'est un plaisir de prendre part au débat sur ce projet de
loi. Je vais tout de suite mettre la présidente du Comité de la justice
à
9402
l'aise: je prévois appuyer ce projet de loi lorsqu'il sera mis aux voix.
Ce type de projet de loi, qui porte sur la production de dossiers dans
les causes d'infraction sexuelle, vise à trouver un compromis entre
des intérêts divergents sur un sujet important. Je dirai cependant à la
présidente du Comité de la justice que ce n'est pas ce genre de
mesure qui va garantir une plus grande sécurité aux femmes, aux
enfants, aux familles, dans leur foyer. J'ignore ce qui va se passer,
mais c'est un projet que nous pouvons appuyer parce qu'il porte sur
la très importante question des dossiers dans les procédures sur des
infractions sexuelles.
Il ne fait pas de doute que, de tous les crimes commis au
Canada-il y en a beaucoup et aucun n'est particulièrement joli-,
ceux qui inspirent le plus de craintes à tous sont les crimes de nature
sexuelle. Ce n'est pas un hasard si, dans le monde entier, lorsqu'une
armée envahit un autre pays, elle saccage, vole et brûle des maisons,
et si, lorsqu'elle veut avilir des gens, les traiter comme moins que
des humains, elle se livre à des crimes sexuels. Cela s'est vu
récemment en Europe. Chose certaine, en Afrique et ailleurs, c'est
très courant dans les guerres. Ce qui en fait des guerres contre
l'humanité, c'est la nature avilissante des crimes sexuels.
Le projet de loi vise donc un certain équilibre en ce qui concerne
le droit du prévenu de contre-interroger son accusateur. Par le passé,
les avocats fouillaient parfois en tous sens dans le passé de la
victime. Au lieu de chercher une information liée au sujet et à la
cause, ils fouinaient un peu partout, demandaient des journaux, des
lettres. On va fouiller dans le passé des gens, même s'il n'a rien à
voir avec la cause qui est entendue, dans le but tout simplement de
semer la peur chez la personne qui subit un contre-interrogatoire.
Le projet de loi cherche à créer l'équilibre entre la nécessité de
protéger le plaignant contre ceux qui cherchent la petite bête et le
respect du droit de l'accusé de dire: «Un instant, je suis innocent et
je réclame le droit d'interroger les témoins.» C'est donc l'équilibre
entre ces intérêts contraires que cherche à créer la mesure
législative.
Au Canada et ailleurs, des gens ont été accusés à tort d'agressions
sexuelles. Il convient donc de permettre aux inculpés de se défendre
et d'utiliser tous les recours possibles, y compris les
contre-interrogatoires, pour faire éclater la vérité, but ultime de
toute procédure juridique. Il semble que ce projet de loi réussisse à
trouver cet équilibre. À l'instar de tous les projets de loi, il n'est pas
parfait, mais comme la perfection échappe à la plupart d'entre nous,
je dirai que le projet de loi est assez bon pour que nous y accordions
notre appui.
Permettez-moi de formuler certaines réserves au sujet de la
communication de certains dossiers que, je l'espère, le ministre
parviendra à surveiller au moyen du règlement et de l'application de
la loi. Au mois de septembre 1996, j'ai envoyé une lettre au ministre
au sujet de ce projet de loi. Je lui parlais d'un de mes électeurs qui
est venu me voir à mon bureau pour me parler de ce qu'on appelle la
technique de remémoration qu'utilisent certains psychiatres et
thérapeutes pour éveiller certains souvenirs enfouis dans le
subconscient de leurs patients afin de les examiner à la lumière de
certains faits récents.
(1730)
Un des enfants de cet électeur prétendait avoir été agressé
sexuellement il y a 30 ou 40 ans. L'intéressé n'en avait aucun
souvenir, mais son thérapeute l'avait convaincu que l'agression
avait eu lieu et qu'il devait, par conséquent, porter des accusations
contre l'auteur du crime, dans ce cas-ci, son père.
L'Association des psychiatres du Canada nous a prévenu du
problème réel que pourrait provoquer la communication de tels
dossiers dans une cause criminelle. Beaucoup de documents
donnent à penser que le rappel de souvenirs de ce genre n'est
souvent qu'une invention de la part de la prétendue victime.
L'accusé n'a aucun moyen de se défendre.
Parfois, il n'y a pas d'autres témoins, et 30 ou 40 années de
silence ont passé entre le délit supposé et le soudain rappel des faits.
Il n'est dès lors pas étonnant qu'un père soit venu demander à mon
bureau quels étaient ses recours, comment il pouvait se défendre
contre une accusation complètement inattendue. J'ai demandé au
ministre de répondre à ces préoccupations en rapport avec le projet
de loi C-46 et les prétendus souvenirs retrouvés.
La sixième recommandation de l'Association des psychiatres du
Canada est que les rapports de souvenirs retrouvés qui incriminent
d'autres personnes soient utilisés avec un soin particulier. Le
ministre ne m'a pas encore dit comment au juste il entend utiliser
cette partie des dossiers «avec un soin particulier». J'espère qu'il
me le dira avant que ce projet de loi ne soit adopté. Je le lui ai
demandé il y a déjà six ou huit mois et il ne m'a pas encore répondu.
On me dit qu'il a neuf mois de retard dans son courrier. Cela fait
maintenant six ou huit mois que je lui ai posé des questions plutôt
importantes auxquelles et je n'ai toujours pas reçu de réponse alors
que nous devons nous prononcer sur ces projets de loi. J'espère que
le ministre répondra rapidement.
Il y a ensuite la question des dossiers des prédateurs sexuels. J'ai
présenté un projet de loi d'initiative parlementaire par suite des
pétitions signées par quelque 33 000 personnes que je présente
depuis quelques mois au sujet de la conservation des dossiers des
personnes qui ont commis des délits sexuels.
À l'heure actuelle, ces dossiers sont versés dans ce qu'on appelle
le CIPC et font partie d'un fichier accessible, par exemple, par les
garderies et les personnes qui travaillent avec les enfants qui
veulent savoir si la personne qui leur demande un emploi a un casier
judiciaire.
Le problème avec le projet de loi d'initiative parlementaire que
j'ai présenté, c'est que les délinquants sexuels réhabilités voient
leur casier retiré du réseau informatique du CIPC. Je demande au
ministre de voir si cela est bien sage. Il me semble que le casier
judiciaire de quelqu'un qui a commis un délit sexuel, surtout contre
des enfants, devrait rester quelque part dans le système et cela,
même si ce délinquant est ultérieurement réhabilité.
9403
Il n'est pas nécessaire que tout le monde le sache, mais il faut
certes garder ce dossier de telle sorte que si quelque chose arrive à
un moment donné, si le délinquant en question est à nouveau accusé
d'un délit, on sache que son dossier n'est pas vierge. Il y a un prix à
payer lorsqu'on est reconnu coupable d'un délit et il faudrait
notamment, à mon sens, que son dossier reste en mémoire et soit
accessible par les parties intéressées.
(1735)
J'ai dit tout à l'heure que les crimes d'ordre sexuel sont les plus
odieux qui soient parce qu'ils privent de leur dignité les êtres qui en
sont victimes. Les auteurs de ces crimes considèrent leurs victimes
comme des objets et veulent les dégrader. Les victimes subissent
souvent des sévices physiques. Quant aux préjudices sur le plan
émotif, ils touchent non seulement la victime, mais aussi sa famille
et ses collègues de travail. La population de ma ville, Abbotsford, a
été ébranlée de la sorte lorsque celui qu'on a appelé le meurtrier
d'Abbotsford rôdait après avoir assassiné une femme et en avoir
laissé une autre pour morte. La situation a dégénéré à tel point que
personne ne voulait assister à des manifestations sportives de peur
d'y laisser sa vie. Même les étudiants des écoles secondaires avaient
reçu instruction de ne pas aller à l'extérieur à moins d'être en grand
nombre et de se tenir ensemble. Cela peut semer la terreur à
l'échelle d'une ville.
Même si le projet de loi dont nous sommes saisis et qui concerne
la communication de dossiers dans les cas d'infraction d'ordre
sexuel est relativement facile à appuyer, le gouvernement a encore
beaucoup à faire pour protéger et améliorer les droits des victimes.
Pour une raison ou une autre, le gouvernement semble hésiter à
s'attaquer sévèrement aux crimes les plus odieux. Je ne sais pas
pourquoi il refuse de réserver à pareils crimes le sort qu'ils méritent
et de traiter leurs auteurs comme les animaux qu'ils sont. S'ils
doivent être gardés en captivité pour un certain temps, alors qu'on
les garde en captivité! Souvent, ils ne peuvent être traités. Ce sont
des repris de justice. Parfois, ils ne sont arrêtés qu'après avoir
agressé de nombreuses victimes et anéanti bien des familles. À mon
avis, le gouvernement ne prend pas ce problème assez au sérieux.
Je vais parler encore une fois d'un cas qui s'est produit dans ma
circonscription. Un individu du nom de Darren Ursel a gardé une
femme de ma région prisonnière dans une voiture et il l'a agressée
sexuellement pendant 90 minutes avec le manche d'une raquette de
racketball. Il a terrorisé cette femme pendant 90 minutes. On ne
peut qu'imaginer la brutalité et l'horreur de ce crime et des
dommages physiques qu'il a causés.
Cet individu, Darren Ursel, a été arrêté et, à son procès, le juge
Harry Boyle a dit qu'étant donné que l'accusé n'avait pas de casier
judiciaire et qu'il avait exprimé du remords pour son crime, il
prononcerait une sentence conditionnelle contre lui. L'accusé n'a
donc pas été en prison et il a été libéré le même jour.
Qu'est-ce que je suis censé dire à cette femme à propos du
caractère abominable de ce crime quand on lit dans les journaux que
le juge a déterminé que l'accusé avait exprimé des remords et que,
partant, il pouvait être libéré le jour même? Que suis-je censé dire à
cette femme qui vient me voir ou à ceux qui la connaissent et
viennent me voir?
Je puis dire à la Chambre ce qui est en train de se passer. Dans ma
région, il y a une autre femme que je connais qui a commencé à faire
circuler une pétition pour destituer ce juge. Elle est tellement
outrée, comme le sont les habitants d'Abbotsford et de Chilliwack.
Ils sont tous tellement outrés qu'ils estiment que ce juge ne mérite
plus de siéger. Comment peut-on dire que si un accusé présente ses
excuses, la question est réglée? Quel crime doivent commettre ces
pervers pour aller en prison?
Comme je l'ai mentionné, il s'agit du pire des crimes. La
personne en cause peut ne jamais se rétablir sur le plan
psychologique et sa famille peut être détruite. Qui sait quels effets
ce crime aura sur les êtres chers et les proches de la victime? Toute
une population se barricadera parce que cet individu sera remis en
liberté le lendemain. Quelle atrocité faut-il commettre pour que cela
soit considéré comme grave dans notre pays? Qu'y-a-t-il de pire que
cela? Qu'y a-t-il de pire, à part le meurtre? Je ne sais pas à quoi le
gouvernement s'attend. Qu'attend le gouvernement pour considérer
ce crime comme sérieux?
(1740)
C'est là que je vois un problème. Le projet de loi est peu de chose.
Il est facile de l'appuyer. Alors, finissons-en. Cependant, quand je
vois des cas comme celui-ci, quand je vois tellement de vies
ruinées, je constate que l'appui du ministre fait défaut. En fait, sa loi
a permis la prononciation d'une sentence conditionnelle à l'endroit
de cet individu, et je ne vois aucune compassion là-dedans. Je ne
vois aucune compassion pour la victime. Je suis outré que le juge ait
dit: «Puisque vous regrettez, vous n'irez pas en prison.»
Un de mes collègues de Prince George-Peace River m'a raconté
l'histoire d'un homme qui, après avoir été libéré de prison, a
conduit 400 milles pendant la nuit pour se rendre à l'endroit où
vivait sa femme, dont il était séparé. Il a enfoncé la porte, l'a violée
et l'a laissée pour morte sur le plancher de la cuisine. Le juge a
décidé que la famille serait trop perturbée si cet homme était mis en
prison car il lui serait alors impossible de verser sa pension
alimentaire. On l'a donc laissé libre.
Que doit-on conclure d'une telle histoire? Personnellement,
j'estime que cela veut dire qu'un crime de nature sexuelle n'est pas
trop grave. La première infraction est sans conséquence, elle ne
compte pas. Après cela, les délinquants ont intérêt à faire attention
car ils ont un casier judiciaire. Cependant, la première infraction ne
compte pas vraiment. Même si cet individu a battu sa victime à coup
de manche de raquette de racketball cela ne compte pas. Il n'y a pas
de problème. C'est, à mon sens, le signal que ces décisions
envoient.
Cela donne à entendre que la vie d'une victime peut être détruite.
La victime devra peut-être passer le reste de sa vie sur le divan d'un
9404
psychiatre ou d'un psychologue, mais cela n'a aucune importance,
car la première infraction ne compte pas. Les victimes n'ont qu'à se
le tenir pour dit et à essayer de continuer à vivre normalement. C'est
complètement débile. C'est là un message idiot à donner à une
victime dont le sort est banalisé par le système de justice.
La plupart, mais non la totalité, des victimes d'infractions
d'ordre sexuel sont de sexe féminin. Comme nous le voyons trop
souvent à la télévision, de jeunes garçons aussi sont agressés. On dit
à ceux qui ne sont pas assez forts pour se défendre que leur sort n'a
pas d'importance. C'est ce que je pense, et je crois bien avoir raison.
Ces victimes ne peuvent pas se sauver, elles ne peuvent pas se
défendre par la force des bras, elles ne peuvent pas échapper à leurs
agresseurs qui sont parfois des gens qui abusent de leur situation
d'autorité pour les forcer à commettre des actes sexuels qu'elles ne
veulent pas commettre.
Quel message les lois actuelles envoient-elles au public? Que les
agressions sexuelles ne sont pas si graves que cela. Il faut hausser
les épaules et accepter que, bien que ce soit malheureux pour la
pauvre personne malchanceuse qui a été victime d'une agression, ce
sont des choses qui arrivent dans notre société. Il faut être
compréhensif envers l'auteur du crime parce qu'il n'a qu'à
exprimer du remords pour être libéré. C'est inacceptable.
Dans ma circonscription, la différence entre il y a quatre ans,
lorsque j'ai commencé à faire campagne, et aujourd'hui, c'est que
presque partout où je vais maintenant il y a un signe sur la porte qui
dit: «Cet endroit est patrouillé par une agence de sécurité privée. Cet
endroit est protégé par un système d'alarme.» Les portes sont
toujours verrouillées. Souvent, les gens n'ouvrent même pas. Tout
cela a changé en trois ou quatre ans seulement.
Les libéraux peuvent bien dire que la criminalité est à la baisse,
mais ce n'est tout simplement pas vrai. Entre 1960 et 1995, le taux
de crimes de violence est passé de 200 pour 100 000 à 1 000 pour
100 000. Et le pire, c'est que de nombreux crimes ne sont jamais
déclarés. Les gens disent: «Si cet homme qui a commis une
agression très grave contre une femme est libéré le lendemain, que
feront les policiers si je déclare une simple agression sans gravité»,
si je peux appeler cela ainsi? «Ils riront de moi.»
(1745)
Les crimes graves doivent être traités avec sérieux, mais ils ne le
sont pas dans nos lois actuelles. Cela doit changer. Le Parti
réformiste fera passer les droits des victimes en premier. Il est grand
temps que le gouvernement libéral agisse à cet égard. Le projet de
loi C-46 est facile à appuyer. Commençons par traiter les crimes
graves avec tout le sérieux qu'ils méritent.
M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président,
j'ai trouvé intéressant ce qu'a dit le député au sujet de
l'augmentation de la criminalité et des statistiques. J'ai également
trouvé intéressant que le secrétaire parlementaire du ministre de la
Justice lance alors que la criminalité avait effectivement diminué.
Il y a des réalités et des perceptions et ni les unes ni les autres ne
concordent avec ce qu'a dit le secrétaire parlementaire. Les chiffres
et les statistiques peuvent être interprétés de bien des façons. Les
libéraux ont tout fait pour interpréter les statistiques à leur avantage,
mais d'une façon qui ne correspond pas nécessairement à la réalité.
J'ai pris la parole trois fois aujourd'hui. Chaque fois, je pose la
même question. Il y a 50 circonscriptions au Canada et les électeurs
semblent trouver le moyen de parler à leurs députés. Ces mêmes
députés reviennent ensuite à la Chambre et répètent à leurs
collègues ce que les gens disent un peu partout, dans les restaurants,
sur la rue ou dans leurs foyers. Je ne puis croire que les
préoccupations dont nos électeurs nous font part, car nous les
écoutons, ne soient pas les mêmes que ce que les députés libéraux
entendent de la bouche de leurs propres électeurs. C'est tout à fait
inconcevable et incroyable. Pour une raison ou pour une autre, les
députés libéraux ne font pas écho à cette réalité à la Chambre. Il est
évident qu'ils n'en ont pas fait part au ministre de la Justice.
Le Parti réformiste a examiné cette question et c'est pourquoi le
point no 4 de notre programme consiste à remettre le Canada sur
pied en rétablissant la sécurité dans les lieux publics. C'est une
nécessité.
Le projet de loi est un pas dans la bonne direction. Nous félicitons
le ministre de la Justice d'avoir fait ce pas, mais nous dénonçons le
fait que ce ne soit que l'un des très nombreux pas qu'il aurait dû
faire depuis longtemps.
Le Parti réformiste ferait pencher la balance du bon côté. Nous
ferions pencher la balance en faveur des droits de victimes et des
citoyens respectueux de la loi, au détriment des droits des criminels.
Nous ne pouvons pas comprendre pourquoi le ministre de la
Justice, qui a la capacité de faire les changements essentiels pour
assurer la sécurité des gens, ne fait pas ce qu'il a à faire. Nous ne
comprenons pas pourquoi il procède par petites demi-mesures.
Les libéraux semblent être en bonne voie de déclencher des
élections inutiles. Je crois que le premier ministre en fera l'annonce
le 26 avril pour qu'elles aient lieu le 2 juin. Nous ne comprenons
vraiment pas, et la plupart des Canadiens ne comprennent vraiment
pas non plus, pourquoi les libéraux agiraient ainsi. Ils ont la
majorité et le mandat de gouverner, mais ils convieraient la
population aux urnes le 2 juin.
Comme il y aura sans doute des élections, le député de Fraser
Valley-Est devra se présenter contre un pauvre candidat qui servira
de chair à canon au nom des libéraux dans sa circonscription. A-t-il
la moindre idée de ce que ce pauvre candidat pourra dire pour
justifier le fait que notre ministre de la Justice nous ait fait faire ce
genre de progrès? Le ministre a eu trois ans et demi pour agir. Il a
bâclé son travail, se contentant d'apporter des améliorations à la
miette.
(1750)
Le député a-t-il une idée de ce que ce candidat libéral pourrait
dire pour essayer de défendre le ministre de la Justice?
9405
M. Strahl: Monsieur le Président, dans un sens, mon adversaire
libéral me rend un peu nerveux. C'est le maire de Chilliwack. Il peut
faire appel aux votes des détenus, car ils peuvent voter. Peut-être
recueillera-t-il là quelques milliers de voix.
Cependant, je ne le crois pas en raison de ce que le maire de
Chilliwack a dit lorsqu'il s'est porté candidat. Il est maintenant le
candidat officiel du Parti libéral. Monsieur le Président, vous
voudrez écouter ce qu'il a dit, car il sera candidat avec vous aux
prochaines élections. Il a dit qu'il fallait abroger l'article 745 et que,
en tant que député libéral, il ferait tout pour voir à son élimination. Il
a dit que non seulement Clifford Olson ne devrait jamais revoir la
lumière du jour, mais que tous les pédophiles devraient être pendus
jusqu'à ce que mort s'ensuive.
M. Abbott: Vous plaisantez.
M. Strahl: Non, pas du tout. C'est un libéral.
M. Benoît: Il a vraiment dit ça.
M. Strahl: Il l'a dit. C'est intéressant. Tous les pédophiles
devraient être suspendus à une corde jusqu'à ce que mort s'ensuive,
et pas seulement Clifford Olson. Ils devraient être rassemblés. Ce
serait le grand ménage des prisons. N'est-ce pas intéressant?
Il y a une nouvelle philosophie libérale. Faire campagne à gauche
et gouverner à droite, mais il ne veut pas seulement pendre Clifford
Olson, une mesure qui rallierait peut-être beaucoup de gens. Il veut
en plus que l'on rassemble tous les pédophiles et qu'on les jette dans
le vide d'une hauteur de six pieds pour voir combien d'entre eux
s'en sortiront.
Je lui ai demandé s'il savait ce qui arrive quand les gens arrivent à
Ottawa avec ce genre d'idée géniale. On en parle une fois et leur
compte est bon. On les met à l'écart, pratiquement aux oubliettes.
C'est ce qui arrive à un libéral qui propose de telles idioties.
C'est intéressant. Non seulement il veut ramener la corde pour
ces criminels, mais, dans la circonscription d'à-côté, ce qui était
Fraser Valley-Ouest, le député va se mesurer à quelqu'un du nom de
Peter Warkentin, un bon libéral. Le candidat a déclaré qu'il allait
travailler à l'abolition de l'article 745, parce que c'est ce que veut la
population.
M. Abbott: Vous plaisantez.
M. Strahl: Non, non. Nous commençons un crescendo. C'est
magnifique. Bien entendu, ils peuvent dire ce qu'ils veulent, en tant
que candidats, mais ils savent bien que rien ne passera avec l'actuel
ministre. Celui-ci rit à la face de ceux qui demandent l'abolition de
l'article 745.
Lorsque M. Gary Rosenfeldt m'a appelé à mon bureau, la
dernière semaine où nous étions ici, il m'a demandé de maintenir
les pressions sur le ministre. Or, il est tellement coupé de la réalité
qu'il pense qu'il a raison. Il déclare aux victimes de Clifford Olson
qu'il est regrettable qu'Olson les raille, mais qu'il faut qu'elles le
supportent, parce que les choses sont ainsi. Il essaie de blâmer le
Parti réformiste et d'autres.
La roue tourne. Dans ses propres rangs, au moins deux en
Colombie-Britannique, le Parti libéral a des membres qui ont trouvé
leur chemin de Damas. Ils demandent l'abolition de l'article 745.
L'un au moins a demandé qu'on pende non pas seulement les
mendiants, mais les pédophiles.
Un membre du conseil scolaire m'a rejoint pour me dire qu'il
était un agent de libérations conditionnelles et qu'il supervisait
quelque 60 pédophiles dans la collectivité. Il se demandait si le
maire local allait les rassembler et procéder à une pendaison
publique. Qu'est-ce qu'ils ont ces libéraux?
Je vais vous dire ce qu'ils ont. Ils sont prêts à dire n'importe quoi
si cela peut les aider à se faire élire. Une fois installés de ce côté de
la Chambre, ils feront tout ce qu'ils voudront. Les Libéraux ne
s'intéressent absolument pas aux droits des victimes et à la vraie
justice. Selon eux, on peut laisser passer une première infraction
d'ordre sexuel. Voilà comment les Libéraux traitent les gens.
(1755)
C'est pourquoi les électeurs de ma circonscription écrivent des
lettres à l'éditeur pour dire: «Il est grand temps. Si vous voulez vous
présenter comme candidat libéral, vous devez agir comme un
Libéral. Ce genre d'idiotie ne vous mènera nulle part.» Vous ne
pouvez pas gagner des votes en menaçant de pendre tous les
citoyens de la ville, tout en sachant que le ministre de la Justice vous
dira d'être docile, de vous taire et de rester dans votre coin».
Le président suppléant (M. Milliken): La Chambre est-elle
prête à se prononcer?
Des voix: Le vote.
Le président suppléant (M. Milliken): Plaît-il à la Chambre
d'adopter la motion?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. Milliken): En conséquence, le
projet de loi est renvoyé au Comité permanent de la justice et des
questions juridiques.
(La motion est adoptée, le projet de loi est lu pour la deuxième
fois et est renvoyé à un comité.)
* * *
[
Français]
La Chambre passe à l'étude du projet de loi C-27, Loi modifiant
le Code criminel (prostitution chez les enfants, tourisme sexuel
impliquant des enfants, harcèlement criminel et mutilation d'orga-
9406
nes génitaux féminins), dont le comité a fait rapport avec une
proposition d'amendement.
La motion no 1 sera débattue et mise aux voix. Nous passons donc
au débat sur la motion no 1.
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ) propose:
Motion no 1
Que le projet de loi C-27, à l'article 1, soit modifié par suppression des lignes 18 à
29, page 3 et des lignes 1 à 6, page 4.
-Monsieur le Président, il me fait plaisir de voir que le
gouvernement a décidé de ramener le projet de loi C-27 à la
Chambre pour en finaliser l'étude et en faire l'adoption.
Pourrait-on demander un peu de calme de la part des députés
réformistes, afin que je puisse faire mon discours? On les a écoutés
sagement, mais le débat est fini maintenant.
Il s'agit d'un projet de loi qui comporte trois volets: le tourisme
sexuel et la prostitution chez les enfants, le harcèlement criminel et
la mutilation d'organes génitaux féminins. Je pense que c'est un
projet de loi qui va dans la bonne direction, mais je déplore que le
gouvernement n'ait pas accepté toutes nos suggestions qui étaient
toutes fondées sur des remarques faites par des témoins qui ont
comparu devant le comité.
J'ai moi-même déposé ici deux projets de loi privés sur le
tourisme sexuel et sur les mutilations des organes génitaux qui
reflétaient un peu plus la volonté des témoins entendus.
Le Bloc québécois propose aujourd'hui un amendement
important au volet du tourisme sexuel du projet de loi C-27. Ce que
le Bloc québécois vise avec cet amendement, c'est de faire
disparaître du projet de loi une disposition toute neuve qui ne
figurait pas au texte original et qui a été amenée, comme ça, en
douce, au comité permanent, à l'étape de l'étude article par article
du projet de loi.
Encore une fois, le gouvernement est arrivé à la dernière minute,
sans aucun préavis, pour nous imposer une mesure qui modifie
considérablement la portée du projet de loi original. J'aimerais que
l'on examine ce petit tour de force ou le petit tour de passe-passe
qu'on a essayé de faire.
Tout d'abord, j'aimerais rappeler que les nouvelles dispositions
sur le tourisme sexuel ont comme objectif de permettre de
poursuivre au Canada les citoyens canadiens qui vont à l'étranger
pour abuser sexuellement d'enfants, parce qu'ils savent très bien
qu'ils ne risquent guère d'être poursuivis, et encore moins d'être
punis.
Comme la population canadienne et québécoise ne tolère pas que
des citoyens exploitent des enfants à des fins sexuelles, que ces
enfants vivent au Canada ou ailleurs, on s'apprête à modifier la loi
canadienne pour y inclure une exception aux règles habituelles et
pouvoir punir ceux et celles qui agissent ainsi à l'extérieur de nos
frontières. Il s'agit, comme on peut le voir, d'une mesure qui vise à
envoyer un message clair à tous les Canadiens. Ce message est clair:
ne touchez pas aux enfants; le respect des enfants et l'intégrité
physique de ceux-ci nous tiennent à coeur.
Je disais qu'il s'agit d'une mesure exceptionnelle. Elle est
exceptionnelle en ce sens que, dans les règles habituelles de droit,
chaque pays est souverain sur son territoire et un autre pays ne peut
se mêler de ce qui se passe sur ce territoire.
(1800)
C'est donc dire que dans le cas qui nous préoccupe actuellement,
celui où un Canadien va dans un autre pays pour exploiter
sexuellement un enfant, il reviendrait aux autorités des pays où se
déroule le crime d'intenter une poursuite. Malheureusement,
plusieurs des pays où le tourisme sexuel impliquant des enfants se
pratique à grande échelle n'ont pas de lois efficaces, n'ont pas la
main-d'oeuvre nécessaire ou n'ont pas la volonté politique de faire
cesser ces abus.
C'est pourquoi le Canada prend ses responsabilités et donne
enfin suite à ses engagements internationaux par rapport aux droits
des enfants. Par ce projet de loi, le Canada veut se doter de mesures
qui lui permettront de poursuivre ici ses citoyens qui se seront payé
une petite excursion. Nous sommes d'accord avec le principe, mais
voilà que le gouvernement introduit une disposition dont le résultat
sera contradictoire avec le but recherché.
La disposition qu'on trouve à l'article 1 du projet de loi
modifierait l'article 7 du Code criminel pour prévoir une procédure
à suivre dans le cas d'abus sexuels d'enfants commis à l'étranger.
En vertu de ce nouvel article, pour qu'il puisse y avoir une poursuite
au Canada, il faudrait que le pays où s'est produite l'infraction fasse
une demande officielle au ministre de la Justice du Canada et que ce
dernier accepte d'intenter des poursuites.
Quand on connaît un peu le phénomène du tourisme sexuel, on
voit tout de suite que cette proposition est aberrante. Comment
penser qu'un des pays du tiers monde, lieu de prédilection de ce
genre de pratique, demandera à un autre gouvernement étranger
d'intenter des poursuites à sa place? Comment penser que ces pays,
même s'ils n'ont pas les lois, la main-d'oeuvre ou tout simplement
la volonté politique nécessaire pour protéger leurs enfants, vont
avouer à la face du monde entier leur incapacité ou leur manque de
volonté à agir? C'est probablement beaucoup.
Tout cet effort de législation aura été vain, puisqu'il est de
connaissance publique que le tourisme sexuel avec des enfants a
pris une ampleur démesurée à cause de la tolérance ou du manque de
ressources des pays hôtes. Ces pays ne sont sûrement pas prêts à
s'humilier et à demander à un gouvernement étranger de rendre
justice à leur place. Les seuls cas où ces dispositions pourraient
fonctionner, à mon humble avis, c'est quand la victime et le
criminel sont Canadiens.
Il va alors de soi que n'importe quel pays verra alors le
bien-fondé de laisser le gouvernement canadien s'occuper de
l'affaire. Dans les autres cas, on peut fort aisément deviner que rien
ne changera et que les enfants continueront à être victimes de
l'exploitation sexuelle de touristes en mal de sensations fortes. Mon
projet de loi ne comportait pas de telles demi-mesures. Il était clair
et direct. Il
9407
aurait fait en sorte que des poursuites soient intentées, peu importe
la bonne volonté d'un gouvernement étranger. Mais voilà, je crois
que c'était trop demander.
Au nom de la sacro-sainte souveraineté des États, la motion
adoptée par le gouvernement vient assurer l'impunité pour des
crimes envers les enfants, les mêmes enfants que le Canada s'est
solennellement engagé à protéger dans divers textes internationaux.
Voilà bien comment ce gouvernement respecte ses engagements.
Donc, mon amendement verrait à éliminer cette contrainte
procédurale et permettrait au projet de loi d'atteindre vraiment son
objectif qui a été visé par ce Parlement, soit la protection des
enfants.
Je vous invite à voter en faveur de l'amendement du Bloc
québécois pour ainsi mieux protéger tous les enfants au Canada et à
l'étranger.
[Traduction]
M. Gordon Kirkby (secrétaire parlementaire du ministre de
la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le
Président, cette motion a pour objet de supprimer deux
prescriptions de la procédure relative aux poursuites intentées, au
Canada, dans les cas d'agressions sexuelles commises par des
Canadiens à l'étranger. Comme il a été mentionné, le projet de loi
C-27 vise à permettre d'intenter des poursuites au Canada contre
des citoyens canadiens qui obtiennent, moyennant rétribution, les
services sexuels d'un enfant, une pratique connue sous le nom de
tourisme sexuel impliquant des enfants.
Or, après les témoignages entendus au Comité de la justice et des
questions juridiques, le comité a modifié le projet de loi de façon à
permettre d'intenter des poursuites au Canada contre des citoyens
canadiens qui se livrent à l'exploitation sexuelle d'enfants à
l'étranger. Cette nouvelle modification exige deux conditions
préalables à la poursuite au Canada d'un Canadien qui exploite
sexuellement un enfant à l'étranger, que l'on ne trouve pas dans les
cas d'infractions liées au tourisme sexuel impliquant des enfants.
(1805)
Premièrement, une demande doit être faite par l'État étranger où
le délit aurait été commis et, deuxièmement, il faut obtenir le
consentement du procureur général de la province visée. Les deux
conditions préalables sont essentielles si le Canada veut exercer sa
compétence extraterritoriale. La motion propose de supprimer ces
deux exigences procédurales.
Le Comité de la justice et des questions juridiques a entendu des
témoins relativement à l'importance de ces dispositions. Elles sont
nécessaires pour deux raisons. La première raison est qu'intenter
des poursuites au Canada à l'égard de délits commis à l'étranger est
contraire au principe qui veut qu'un pays a compétence sur les délits
commis sur son territoire. On accepte une entorse à ce principe
lorsqu'une convention internationale l'exige ou lorsque le droit
international coutumier le permet ou lorsqu'il y a consensus
international, comme dans le cas du tourisme sexuel.
On s'entend de plus en plus pour donner aux États la possibilité
de poursuivre leurs ressortissants qui participent à du tourisme
sexuel impliquant des enfants. On peut le constater à la suite de la
rédaction d'un protocole optionnel qui vient s'ajouter à la
Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant et qui
concerne la vente des enfants, ainsi que la pornographie et la
prostitution infantines. Le Canada joue à cet égard un rôle actif,
mais cela ne touche pas les agressions sexuelles contre les enfants.
Le protocole optionnel ne porte que sur deux infractions
sexuelles relatives aux enfants, la pornographie et la prostitution
infantines. À ce stade-ci, on ne traite pas des autres infractions
sexuelles contre les enfants. On a adopté la déclaration et le plan
d'action pertinent dans le cadre du Congrès mondial contre
l'exploitation sexuelle des enfants dont le gouvernement suédois
était l'hôte en août 1996. On s'est également penché sur la
prostitution et la pornographie infantines. L'absence d'un
consensus international sur la compétence extraterritoriale des pays
dans le cas d'agressions sexuelles sur les enfants commis dans un
pays étranger montre bien l'importance d'avoir des exigences
procédurales pour respecter les principes juridictionnels voulus.
Le maintien d'exigences supplémentaires en matière de
procédure peut également s'expliquer pour des raisons de
souveraineté et pour des raisons pratiques. La requête de l'État
étranger montre que cet État souhaite poursuivre l'auteur de
l'infraction et garantit au Canada que l'État étranger va coopérer
pour faciliter la poursuite de l'auteur de l'infraction par le Canada.
Sans une requête de l'État étranger et en l'absence d'une
coopération essentielle, le Canada ne pourrait envoyer des agents
dans un État étranger pour interroger des témoins et recueillir des
preuves. La coopération de l'État étranger s'impose pour recueillir
les preuves nécessaires à la poursuite.
En conclusion, je crois que ces exigences en matière de
procédure sont essentielles pour que l'amendement du comité
donne des résultats. Pour ces raisons, je n'appuie pas la motion.
M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, le
projet de loi C-27 recevra évidemment l'appui de notre caucus.
Nous pensons que ce projet de loi renferme des dispositions qui
vont dans la bonne direction.
Je crains vraiment que le Canada ne puisse garantir l'application
de mesures législatives en cas d'infractions commises à l'extérieur
de son territoire. C'est pourquoi je suis disposé à recommander à
mon caucus d'appuyer l'amendement que nous débattons
aujourd'hui.
Pour quelles raisons devrait-on appuyer cet amendement et quel
est réellement l'objet de cet amendement? Cet amendement
supprimerait les paragraphes 4.2 et 4.3 du projet de loi.
(1810)
Le paragraphe 4.2 est rédigé comme suit:
Il ne peut être engagé de procédures relativement à un acte commis par action ou
omission qui, s'il était commis au Canada, constituerait une infraction aux articles
151, 152, 153, 155 ou 159, aux paragraphes 160(2) ou (3) ou aux articles 163.1, 170,
171 ou 173 que si une demande est présentée au ministre de la Justice du Canada par
a) tout fonctionnaire consulaire ou agent diplomatique accrédité auprès du
Canada par l'État sur le territoire duquel l'infraction a été commise ou
9408
b) tout ministre de cet État communiquant avec lui par l'intermédiaire des agents
diplomatiques de Sa Majesté dans cet État.
Et le paragraphe (4.3) se lit ainsi:
Les procédures visées au paragraphe (4.2) ne peuvent être engagées qu'avec le
consentement du procureur général.
C'est-à-dire le procureur général de la province où vit l'individu
contre lequel des poursuites sont intentées.
Premièrement, cela amènerait le ministre de la Justice du Canada
à s'immiscer dans un secteur de compétence que la Constitution
reconnaît habituellement aux provinces, celui d'intenter des
poursuites au criminel. Cela donnerait au ministre de la Justice
beaucoup de poids dans les poursuites concernant des infractions au
Code criminel. La division des pouvoirs serait alors en cause. En
fait, je devrais peut-être dire que nous verrions alors une atteinte à la
répartition des pouvoirs. Nous assisterions à l'effondrement de la
répartition des pouvoirs entre ceux qui font les lois au Canada et
ceux qui sont censés les appliquer.
Tout à coup, le ministre de la Justice deviendrait un intervenant
clé, non seulement pour ce qui est d'élaborer des lois, mais aussi
pour intenter, en vertu de la loi, des poursuites au criminel. À mon
avis, ce n'est pas souhaitable, et nous devons éviter que ne se
produise pareil effondrement de la répartition des pouvoirs existant
dans une démocratie.
Deuxièmement, je doute fort que nous puissions intenter avec
succès des poursuites relativement à une infraction commise dans
un autre pays. Comment ferons-nous? Comment obtiendrons-nous
dans notre pays les preuves permettant d'intenter des poursuites
avec succès? Si c'est le ministre de la Justice qui détermine s'il y a
suffisamment de preuves pour intenter des poursuites au criminel,
nous heurterons-nous aux mêmes délais que ceux qui présentent une
demande au ministre de la Justice, en vertu de l'article 690 du Code
criminel, parce qu'ils estiment qu'une erreur judiciaire a été
commise? Il y a une foule de demandes qui ont été présentées au
ministre de la Justice en vertu de l'article 690 et, dans certains cas, il
lui a fallu des années pour évaluer les nouvelles preuves et rendre
une décision.
Nous avons été récemment témoins de deux affaires qui ont
traîné durant des années et au sujet desquelles le ministre de la
Justice a fini par se prononcer. L'un de ces exemples est l'affaire
King, l'autre, l'affaire Beaulieu. Il y a aussi une demande qui a été
présentée en vertu de l'article 690 il y a au moins quatre ans et que le
ministre de la Justice étudie encore. Les raisons de ce délai restent
inconnues.
Le ministre de la Justice devra-t-il se prononcer sur chaque
affaire qui pourrait découler de l'adoption de ces nouvelles
dispositions législatives? C'est absolument insensé. De plus, le
ministre de la Justice ne pourra agir que lorsque la demande
émanera non pas de vous, monsieur le Président, ou de moi ou de
quiconque s'adonne à être témoin d'un crime. Non. Il faudra que la
demande soit présentée par un fonctionnaire consulaire ou un agent
diplomatique accrédité auprès du Canada. Par conséquent, si je suis
témoin d'une infraction commise à l'endroit d'un enfant en pays
étranger, je ne peux pas porter cette affaire à l'attention des autorités
canadiennes. Je ne peux même pas, de mon propre chef, la porter à
l'attention du ministre de la Justice.
En vertu de cette loi, nous devons porter cela à l'attention du
ministre de la Justice par l'intermédiaire d'un fonctionnaire
consulaire ou d'un agent diplomatique accrédité auprès du Canada
par l'État où l'infraction est commise. Si nous ne pouvons pas
procéder ainsi, nous pouvons veiller à ce qu'un ministre de cet État
communique avec le ministre par l'intermédiaire d'un représentant
diplomatique du Canada accrédité auprès de cet État.
Les députés savent-ils à quoi cela va nous mener? Ça fait bien,
cela montre que nous prenons des mesures contre ces touristes en
quête d'enfants à exploiter sexuellement, contre ces gens qui vont à
l'étranger pour exploiter sexuellement les enfants d'autres pays.
(1815)
Je dis moi que, si le ministre de la Justice est encore ici dans cinq
ans et qu'on lui demande combien de poursuites ont abouti ou
combien de plaintes ont été enregistrées dans ce pays à la suite de
cette mesure législative, le chiffre sera pratiquement zéro.
Pourquoi? À cause des restrictions étroites imposées sur les
poursuites, qui empêchent ces dernières d'aboutir. Il ne s'agit pas
seulement de la difficulté de produire des preuves. Allons-nous
faire venir la victime ici? Allons-nous payer des frais énormes pour
faire venir les témoins ici? Comment allons-nous nous y prendre?
Ce n'est là qu'une partie du problème. Lorsque les données d'une
plainte auront franchi toutes les étapes et franchi toutes les
conditions rigoureuses, lorsque le ministre de la Justice aura dit au
procureur général de la province où habite l'accusé ou la personne
visée: «procédez et portez des accusations», une erreur aura été
commise. Cela ne produira aucun résultat.
Une fois encore le gouvernement crée un écran de fumée et
prétend qu'il prendra des mesures vigoureuses à l'égard d'une
situation très difficile, à l'égard de comportements que tous les
Canadiens honnêtes réprouvent et dédaignent.
Nous sommes prêts à appuyer ce projet de loi dans l'espoir que
nous nous trompons quant à la difficulté de sa mise en oeuvre et
quant à la possibilité d'intenter des poursuites fructueuses. Nous
sommes disposés à appuyer ce projet de loi, mais je refuse
d'appuyer la partie du projet de loi qui accorde au ministre de la
Justice le dernier mot quant aux poursuites judiciaires intentées en
vertu de cette loi. Pourquoi Pourquoi devrions-nous faire confiance
au jugement du ministre de la Justice, alors que l'on constate un
manque de jugement et de bon sens dans la plupart des mesures
législatives qu'il a présentées et les autres décisions qu'il a prises?
Comment pouvons-nous faire confiance au jugement d'un
ministre de la Justice qui donne aux victimes le droit de faire une
déclaration dans le projet de loi C-41 et retire ce droit dans le projet
de loi C-45? Comment pouvons-nous faire confiance au jugement
d'un ministre de la Justice qui déclare à la Chambre qu'il a consulté
régulièrement les procureurs généraux des provinces dans la
préparation du projet de loi C-68, alors que ceux-ci ont dit au comité
9409
qu'ils n'avaient jamais été consultés? Comment pouvons-nous faire
confiance au ministre de la Justice et respecter son jugement?
J'appuie l'amendement visant à retrancher du projet de loi ce
pouvoir spécial accordé à un ministre de la Justice dont le jugement,
au cours de ces trois dernières années et demie, s'est révélé peu sûr
et dénué de sens commun.
Je ne saurais accepter que le ministre de la Justice s'arroge ce
pouvoir qui n'est pas sans rappeler celui qu'il s'est attribué à l'égard
de nombreux projets de loi imposés au moyen de décrets. Il
n'obtiendra pas mon appui relativement à l'octroi d'un tel pouvoir
qui pourrait empêcher toute poursuite ou toute plainte d'aller plus
loin que son cabinet ou son bureau. Je n'y souscrirai pas.
[Français]
M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ):
Monsieur le Président, voici un bon cas où l'opposition bloquiste a
contribué d'une façon hors du commun à améliorer un projet de loi
ou même à imposer sa vision sur certaines sujets.
J'en profite pour féliciter la députée de Québec, qui a été une des
personnes qui ont amorcé tout ce débat relatif au tourisme sexuel, à
l'excision et à d'autres sujets connexes du projet de loi C-27.
Mais comme c'est fréquent chez le Parti libéral d'en face, il a
fallu que l'opposition prenne l'initiative et lui présente des projets
de loi privés afin de le faire réagir. Le projet de loi C-27 en est un
exemple frappant: la députée de Québec a proposé une série de
projets de loi dont, entre autres, celui sur le tourisme sexuel, sur la
portée extraterritoriale également du tourisme sexuel, pour que le
gouvernement bouge.
(1820)
La députée de Québec ne s'est pas seulement contentée de
présenter un projet de loi, étant donné que le gouvernement déposait
lui-même le projet de loi C-27, qu'on étudie actuellement, la
députée, ainsi que l'opposition officielle, a suivi les travaux du
comité de façon très assidue. À la suite des témoignages entendus, il
y a certaines choses que le projet de loi n'atteignait pas et on a tenté
de collaborer avec le gouvernement, de présenter des amendements
pour faire en sorte que le projet de loi C-27 se rapproche le plus
possible des objectifs qu'on voulait se donner dans les projets de loi
d'initiative privée que la députée de Québec avait déposés, entre
autres, relativement au tourisme sexuel.
Des témoins sont venus dire que la législation présentée par le
gouvernement libéral n'allait pas assez loin, qu'on devait
véritablement renforcer le projet de loi si on voulait toucher
l'objectif précis qui était, entre autres, la protection des enfants
abusés sexuellement dans des pays du tiers monde, il faut le dire.
Malgré l'appui que nous avons obtenu de certains groupes de
femmes, de certains groupes à caractère social, certains juristes
même, c'est à la dernière minute que le gouvernement libéral a
apporté des modifications pour tenter de répondre aux
revendications du Bloc québécois. Mais même avec les
modifications du gouvernement, présentées à la dernière minute,
celles-ci ne respectent pas l'esprit et l'objectif qu'on voulait donner
au tourisme sexuel.
C'est pour cela qu'encore une fois, l'opposition officielle s'est
sentie obligée, par esprit professionnel, de présenter à la Chambre
une modification sur la portée extraterritoriale. J'invite les députés
du gouvernement à réfléchir très honnêtement avant de se
prononcer favorablement ou contre la modification présentée par la
députée de Québec dans un contexte global de l'application de cette
loi.
Dans certains pays du tiers monde, des pays d'Asie, en Inde, le
tourisme sexuel est une industrie très, très lucrative. Avec les
modifications de dernière minute du gouvernement, malgré ces
modifications de dernière minute, il faut bien comprendre que le
pays dans lequel il se fait du tourisme sexuel doit faire la demande
au Canada, pour que le procureur général du Canada poursuive
l'individu ayant commis l'infraction dans un autre pays.
Dites-moi dans quel pays où on sait qu'il y a du tourisme sexuel,
dans les pays où on le tolère, on fera cela. Il y a même des pays,
selon les témoins entendus, qui favorisent le tourisme sexuel,
compte tenu que c'est payant pour l'économie locale. Comment
voulez-vous que ces pays-là, avec la disposition qui est devant nous,
fassent eux-mêmes la demande au gouvernement du Canada pour
poursuivre quelqu'un qui a pratiqué ce tourisme sexuel dans leur
pays? Personne ne le fera. Bien souvent, ce sont des pays qui
encouragent le tourisme sexuel.
L'objectif de la modification présentée par la députée de Québec
est de donner l'initiative au gouvernement canadien de poursuivre
lui-même les individus qui commettent l'infraction. Je comprends
qu'il y a tout l'esprit de territorialité et d'extraterritorialité.
Cependant, il faut voir l'objectif de la loi. L'objectif est de protéger
les jeunes.
Encore là, j'ai entendu plusieurs jeunes venir témoigner en
comité pour nous dire comment ces personnes s'y étaient prises
pour en abuser sexuellement. Bien souvent, ce sont des gens du
Canada qui vont dans des pays étrangers, et ce sont des gens qu'ils
connaissent qui vont abuser sexuellement de ces enfants, de ces
jeunes femmes et de ces jeunes hommes.
Je pense que la modification présentée par la députée n'a qu'un
seul et unique objectif, c'est de protéger davantage les enfants. S'il
y a un problème en ce qui concerne l'application, on s'en chargera
au fur et à mesure, mais il faut au moins donner la possibilité, aider
les familles, aider les victimes, donner la possibilité au procureur
général du Canada de prendre l'initiative et de poursuivre ceux qui
ont abusé sexuellement des enfants, et qui vivent même du tourisme
sexuel.
(1825)
En terminant, j'invite les députés du parti gouvernemental à lire
très attentivement la modification à ce projet de loi, qui est très
courte, mais de façon globale. S'ils avaient le temps aussi, il
faudrait peut-être qu'ils lisent certains témoignages de jeunes qui
sont venus témoigner au Comité permanent de la justice et des
questions juridiques pour se plaindre de la finalité et de l'objectif
qui n'est pas atteint dans le projet de loi C-27 que nous avons devant
nous et qui est présenté par le parti gouvernemental.
9410
Je pense qu'il faut voter en faveur de la modification de la
députée de Québec, puisqu'elle vient combler un manque frappant
dans la rédaction apportée par le gouvernement libéral. Dans le
projet de loi C-27, comme dans plusieurs autres projets de loi, on se
rend compte que le gouvernement dépose une série de
modifications, il dépose un projet de loi et, à la suite d'une série de
témoignages de personnes qui se présentent devant le comité, il
propose d'amener plusieurs modifications. C'est comme si on
déposait un projet de loi et qu'on ne connaissait pas les
conséquences de ce projet de loi, ou bien qu'on déposait un projet de
loi et qu'on n'avait pas évalué toutes les possibilités qui s'ouvraient
avec le projet de loi.
Si on l'a fait pour plusieurs autres articles, je pense qu'on a
cependant omis de modifier cet article-là et d'aller aussi loin que la
proposition de la députée de Québec suggère. C'est pourquoi le
Bloc québécois va naturellement voter en faveur de cette
modification au projet de loi C-27 et que je demande au
gouvernement de l'étudier très sérieusement. J'espère qu'il votera
également en faveur de la modification, avec l'opposition officielle,
afin d'améliorer le projet de loi et de l'aider à atteindre l'objectif
qu'il poursuivait, c'est-à-dire la protection des enfants.
[Traduction]
M. Jim Abbott (Kootenay-Est, Réf.): Monsieur le Président,
dans une certaine mesure, ce projet de loi me fait effectivement
penser au tourisme. Loin de moi l'intention de traiter cette question
à la légère, car elle est extrêmement sérieuse. L'industrie du
tourisme sexuel est un fléau épouvantable qu'il faut enrayer par tous
les moyens. Or, ce projet de loi n'y parviendra pas.
Le projet de loi me rappelle une certaine époque où je visitais un
coin de l'Angleterre et où j'ai vu une véritable et authentique
armure complète. De toute évidence, si quelqu'un était allé livrer
une bataille vêtu de cette armure, il aurait bénéficié d'une certaine
protection. Assez curieusement, environ un an plus tard, je me suis
trouvé dans un musée de cire ou quelque chose du genre à Victoria,
en Colombie-Britannique. Là encore, j'y ai vu la même armure
complète. La seule différence, c'est que celle-ci était en plastique.
Imaginons un retour à l'époque du roi Arthur, n'y aurait-il pas
une différence si l'on se battait en armure véritable ou simplement
revêtu d'une simili-armure en plastique? La personne revêtue d'une
armure en plastique serait mortellement blessée dès le premier
coup.
Il en va de même avec ce projet de loi. On peut le comparer à une
armure. Selon les apparences, cette disposition devrait être efficace,
elle devrait fonctionner. Cependant, elle est comme toutes les autres
attrapes que ce gouvernement ne cesse de proposer.
Sauf erreur, à un autre moment de votre vie, monsieur le
Président, vous étiez avocat et peut-être l'êtes vous encore. À ce
titre, vous savez que, lorsque des éléments de preuve doivent être
rassemblés dans un autre pays, il y a des modalités à observer,
n'est-ce pas? Qui pourra établir clairement que les éléments de
preuve sont authentiques? Qu'en est-il de la différence entre les
lois? Qu'en est-il de la différence en ce qui a trait à la norme de la
preuve entre les deux systèmes judiciaires, entre le pays où
l'infraction est commise et celui où la décision serait rendue?
Ce projet de loi n'est rien d'autre qu'une armure en plastique, et
c'est tout à fait typique des libéraux que de dire que cette mesure se
veut un pas dans la bonne direction.
Le projet de loi C-27 dont nous sommes saisis, qui traite entre
autres de la prostitution chez les enfants, du tourisme sexuel
impliquant des enfants, du harcèlement criminel et de la mutilation
d'organes génitaux féminins, n'est rien d'autre que de la poudre aux
yeux lancée par le ministre de la Justice, qui a rassemblé tous ces
éléments disparates, de façon à pouvoir dire: «Vous voyez, nous
avons essayé. Nous avons fait un pas dans la bonne direction.»
Ce projet de loi est une armure en plastique qui ne résisterait pas à
une contestation faite par un avocat fraîchement admis au Barreau.
Comment peut-on avoir une cause solide, ainsi que l'a souligné le
député de Crowfoot, lorsqu'une personne qui est témoin de ce
tourisme sexuel doit en informer une autre qui, à son tour, doit en
informer le ministre de la Justice? Puis, le ministre de la Justice doit
en informer ses fonctionnaires, qui doivent ensuite rédiger des
lettres. Et Dieu sait où cela peut nous mener si le ministère de la
Justice se met à écrire des lettres, comme on a pu le constater dans
l'affaire Airbus.
Les lettres sont envoyées dans le pays où l'infraction présumée
aurait été commise. Les destinataires examinent ces lettres et
essaient de décider ce qu'il y a lieu de faire. Puis, ils se mettent
peut-être à la recherche de témoins pour tâcher de réunir des
éléments de preuve. Il n'y en aurait pas beaucoup entourant ce genre
d'affaire. La preuve une fois établie, elle sera transmise au Canada,
où un avocat fraîchement émoulu du barreau aura tôt fait de la
démolir. Ce n'est rien de plus que de l'art plastique. . .
Le président suppléant (M. Milliken): À l'ordre. Le whip en
chef du gouvernement invoque le Règlement.
M. Kilger: Monsieur le Président, d'ici 15 minutes, les députés
seront convoqués à la Chambre pour se prononcer sur des votes par
appel nominal différés. J'ai eu des entretiens avec les représentants
des autres partis et nous en sommes arrivés à une entente. Je tiens à
les remercier de leur coopération. Lorsque nous serons réunis pour
tenir les votes par appel nominal différés, la première question que
nous inviterons la présidence à mettre aux voix portera sur la
motion no 15 des voies et moyens du gouvernement concernant le
budget.
Le président suppléant (M. Milliken): Suivront les deux
motions d'initiative parlementaire M-31 et M-277, dans cet ordre.
Est-ce d'accord?
Des voix: D'accord.
Le président suppléant (M. Milliken): Il en est ainsi ordonné.
9411
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 21 mars, de la
motion: Que la Chambre approuve la politique budgétaire générale
du gouvernement.
Le président suppléant (M. Milliken): Comme il est 18 h 30, la
Chambre passe au vote différé sur la motion des voies et moyensno 15. Convoquez les députés.
(1900)
(La motion, mise aux voix, est adoptée.)
(Vote no 281)
POUR
Députés
Adams
Alcock
Anderson
Arseneault
Assadourian
Augustine
Baker
Bakopanos
Barnes
Bélair
Bélanger
Bellemare
Bertrand
Bevilacqua
Bodnar
Bonin
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Byrne
Calder
Campbell
Catterall
Clancy
Cohen
Collenette
Cowling
Cullen
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dion
Discepola
Dupuy
Easter
English
Fewchuk
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Godfrey
Graham
Guarnieri
Harvard
Hickey
Hubbard
Irwin
Jackson
Karygiannis
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Lincoln
Loney
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Manley
Marleau
Massé
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
O'Brien (London-Middlesex)
O'Reilly
Paradis
Parrish
Patry
Peric
Peters
Peterson
Pettigrew
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robillard
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Shepherd
Sheridan
Simmons
Steckle
Stewart (Northumberland)
Szabo
Thalheimer
Ur
Valeri
Vanclief
Verran
Wells
Whelan
Young
Zed-117
CONTRE
Députés
Abbott
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Bachand
Bellehumeur
Benoit
Bhaduria
Brien
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Cummins
de Savoye
Deshaies
Duceppe
Epp
Gagnon (Québec)
Gauthier
Guay
Guimond
Hanger
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hayes
Hermanson
Jacob
Johnston
Kerpan
Landry
Laurin
Marchand
Mercier
Mills (Red Deer)
Nunez
Paré
Picard (Drummond)
Ramsay
Ringma
Rocheleau
Sauvageau
Schmidt
Solberg
Stinson
Strahl
Taylor
Tremblay (Lac-Saint-Jean)
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Venne
White (Fraser Valley West/Ouest)
Williams -48
DÉPUTÉS «PAIRÉS»
Assad
Asselin
Axworthy (Winnipeg South Centre/Sud-Centre)
Bélisle
Bergeron
Canuel
Collins
Comuzzi
Crawford
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
Dubé
Duhamel
Dumas
Easter
Eggleton
Fillion
Finestone
Gaffney
Godin
Harb
Harper (Churchill)
Hopkins
Iftody
Lalonde
Lebel
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Marchi
Martin (LaSalle-Émard)
Ménard
Pomerleau
Rock
Serré
Sheridan
Stewart (Brant)
Tremblay (Rosemont)
Walker
Le Président: Je déclare la motion adoptée.
______________________________________________
9411
INITIATIVES PARLEMENTAIRES
[
Traduction]
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 12 mars, de la
motion et de la proposition d'amendement.
9412
Le Président: Conformément à la motion adoptée le mercredi 12
mars, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal sur la
motion M-31 des initiatives parlementaires.
Le vote porte sur la proposition d'amendement.
Comme le veut la pratique, le vote se fera rangée par rangée, en
commençant par le motionnaire, puis en poursuivant avec ceux qui
sont en faveur de la motion et qui siègent du même côté que le
motionnaire. Nous passerons ensuite aux députés qui appuient la
motion, mais qui siègent de l'autre côté de la Chambre. En suivant
le même ordre, nous enregistrerons après cela les députés opposés à
la motion.
(1905)
(La motion, mise aux voix, est rejetée.)
(Vote no 282)
POUR
Députés
Abbott
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Bachand
Bellehumeur
Benoit
Brien
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Cummins
de Savoye
Deshaies
Duceppe
Epp
Gagnon (Québec)
Gauthier
Guay
Guimond
Hanger
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hayes
Hermanson
Jacob
Johnston
Kerpan
Landry
Laurin
Marchand
Mercier
Mills (Red Deer)
Nunez
Paré
Picard (Drummond)
Ramsay
Ringma
Rocheleau
Sauvageau
Schmidt
Solberg
Stinson
Strahl
Taylor
Tremblay (Lac-Saint-Jean)
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Venne
White (Fraser Valley West/Ouest)
Williams -47
CONTRE
Députés
Adams
Alcock
Anderson
Arseneault
Assadourian
Augustine
Baker
Bakopanos
Barnes
Bélair
Bélanger
Bellemare
Bevilacqua
Bhaduria
Bodnar
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Byrne
Calder
Campbell
Catterall
Clancy
Cohen
Collenette
Cowling
Cullen
DeVillers
Dhaliwal
Dingwall
Dion
Discepola
Dupuy
Easter
English
Fewchuk
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Godfrey
Graham
Guarnieri
Harvard
Hickey
Hubbard
Irwin
Jackson
Karygiannis
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Lincoln
Loney
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Manley
Marleau
McCormick
McGuire
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
O'Brien (London-Middlesex)
O'Reilly
Paradis
Parrish
Patry
Peric
Peterson
Pettigrew
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robillard
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Shepherd
Sheridan
Simmons
Steckle
Stewart (Northumberland)
Szabo
Ur
Valeri
Vanclief
Verran
Wells
Whelan
Young
Zed-112
DÉPUTÉS «PAIRÉS»
Assad
Asselin
Axworthy (Winnipeg South Centre/Sud-Centre)
Bélisle
Bergeron
Canuel
Collins
Comuzzi
Crawford
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
Dubé
Duhamel
Dumas
Easter
Eggleton
Fillion
Finestone
Gaffney
Godin
Harb
Harper (Churchill)
Hopkins
Iftody
Lalonde
Lebel
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Marchi
Martin (LaSalle-Émard)
Ménard
Pomerleau
Rock
Serré
Sheridan
Stewart (Brant)
Tremblay (Rosemont)
Walker
Le Président: Je déclare la proposition d'amendement rejetée.
Le prochain vote porte sur la motion principale.
(1915)
(La motion, mise aux voix, est rejetée.)
9413
(Vote no 283)
POUR
Députés
Abbott
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Benoit
Chatters
Cummins
Epp
Hanger
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hayes
Hermanson
Johnston
Kerpan
Mills (Red Deer)
Ramsay
Ringma
Schmidt
Solberg
Stinson
Strahl
Taylor
White (Fraser Valley West/Ouest)
Williams-23
CONTRE
Députés
Adams
Alcock
Anderson
Arseneault
Assadourian
Augustine
Bachand
Baker
Bakopanos
Barnes
Bélair
Bélanger
Bellehumeur
Bellemare
Bevilacqua
Bhaduria
Bodnar
Boudria
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Byrne
Calder
Campbell
Catterall
Chrétien (Frontenac)
Clancy
Cohen
Collenette
Cowling
Cullen
de Savoye
Deshaies
DeVillers
Dhaliwal
Dion
Discepola
Duceppe
Dupuy
Easter
English
Fewchuk
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier
Godfrey
Graham
Guarnieri
Guay
Guimond
Harvard
Hickey
Hubbard
Irwin
Jackson
Jacob
Karygiannis
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Lastewka
Laurin
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Lincoln
Loney
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Manley
Marchand
Marleau
McCormick
McGuire
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Mercier
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Nunez
O'Brien (London-Middlesex)
O'Reilly
Paradis
Paré
Parrish
Patry
Peric
Peterson
Pettigrew
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robillard
Rocheleau
Sauvageau
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Shepherd
Sheridan
Simmons
Steckle
Stewart (Northumberland)
Szabo
Tremblay (Lac-Saint-Jean)
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Ur
Valeri
Vanclief
Venne
Verran
Wells
Whelan
Young
Zed-135
DÉPUTÉS «PAIRÉS»
Assad
Asselin
Axworthy (Winnipeg South Centre/Sud-Centre)
Bélisle
Bergeron
Canuel
Collins
Comuzzi
Crawford
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
Dubé
Duhamel
Dumas
Easter
Eggleton
Fillion
Finestone
Gaffney
Godin
Harb
Harper (Churchill)
Hopkins
Iftody
Lalonde
Lebel
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Marchi
Martin (LaSalle-Émard)
Ménard
Pomerleau
Rock
Serré
Sheridan
Stewart (Brant)
Tremblay (Rosemont)
Walker
Le Président: Je déclare la motion rejetée.
* * *
La Chambre reprend l'étude, interrompue le 19 mars, de la
motion et de l'amendement.
Le Président: Conformément à l'ordre adopté le mardi 18 mars
1997, la Chambre passe maintenant au vote par appel nominal sur la
motion M-277, sous les initiatives parlementaires.
Le vote porte sur l'amendement.
(1920)
(L'amendement, mis aux voix, est rejeté.)
(Vote no 284)
POUR
Députés
Bachand
Brien
Chrétien (Frontenac)
de Savoye
Deshaies
Duceppe
Gagnon (Québec)
Gauthier
Guay
Guimond
Jacob
Landry
Laurin
Marchand
Mercier
Nunez
Paré
Picard (Drummond)
Rocheleau
Sauvageau
Tremblay (Lac-Saint-Jean)
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Venne-23
9414
CONTRE
Députés
Abbott
Adams
Alcock
Anderson
Assadourian
Augustine
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Baker
Bakopanos
Barnes
Bélair
Bélanger
Bellemare
Benoit
Bhaduria
Bodnar
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Byrne
Calder
Campbell
Catterall
Chatters
Clancy
Cohen
Collenette
Cowling
Cullen
Cummins
DeVillers
Dhaliwal
Discepola
Dupuy
Easter
English
Epp
Fewchuk
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Godfrey
Graham
Guarnieri
Hanger
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hayes
Hermanson
Hickey
Hubbard
Jackson
Johnston
Karygiannis
Kerpan
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Kraft Sloan
Lastewka
Lee
Lincoln
Loney
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Manley
Marleau
McGuire
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Mills (Red Deer)
Minna
Mitchell
Murphy
O'Brien (London-Middlesex)
O'Reilly
Paradis
Parrish
Patry
Peric
Peterson
Pettigrew
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Ramsay
Reed
Regan
Richardson
Ringma
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robillard
Schmidt
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Shepherd
Sheridan
Simmons
Solberg
Steckle
Stewart (Northumberland)
Stinson
Strahl
Szabo
Taylor
Vanclief
Whelan
White (Fraser Valley West/Ouest)
Williams -116
DÉPUTÉS «PAIRÉS»
Assad
Asselin
Axworthy (Winnipeg South Centre/Sud-Centre)
Bélisle
Bergeron
Canuel
Collins
Comuzzi
Crawford
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
Dubé
Duhamel
Dumas
Easter
Eggleton
Fillion
Finestone
Gaffney
Godin
Harb
Harper (Churchill)
Hopkins
Iftody
Lalonde
Lebel
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Marchi
Martin (LaSalle-Émard)
Ménard
Pomerleau
Rock
Serré
Sheridan
Stewart (Brant)
Tremblay (Rosemont)
Walker
Le Président: Je déclare l'amendement rejeté.
Le vote suivant porte sur la motion principale.
(1925)
[Français]
M. Landry: Monsieur le Président, je demande que vous
considériez que j'ai voté comme mon parti. J'étais à ma siège,
excusez-moi.
[Traduction]
M. McTeague: Monsieur le Président, je voulais vous demander
conseil au sujet de la validité de ce vote étant donné que le
motionnaire n'a pas jugé bon d'être présent.
Le Président: Ce vote est parfaitement conforme au Règlement,
car il s'agit d'un ordre de la Chambre. Je rappelle très gentiment aux
députés qu'il ne faut jamais signaler l'absence d'un ou d'une
collègue.
(La motion, mise aux voix, est rejetée.)
(Vote no 285)
POUR
Députés
Abbott
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Benoit
Chatters
Cummins
Epp
Hanger
Harper (Simcoe Centre)
Harris
Hayes
Hermanson
Johnston
Kerpan
Mills (Red Deer)
Ramsay
Ringma
Schmidt
Solberg
Steckle
Stinson
Strahl
Taylor
White (Fraser Valley West/Ouest)
Williams-24
CONTRE
Députés
Adams
Alcock
Anderson
Arseneault
Assadourian
Augustine
Bachand
Baker
Bakopanos
Barnes
Bélair
Bélanger
Bellemare
Bevilacqua
Bhaduria
Bodnar
Boudria
Brien
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Byrne
Calder
Campbell
Catterall
Chrétien (Frontenac)
9415
Clancy
Cohen
Collenette
Cowling
Cullen
de Savoye
Deshaies
DeVillers
Dhaliwal
Dion
Discepola
Duceppe
Dupuy
Easter
English
Fewchuk
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gagliano
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gagnon (Québec)
Gallaway
Gauthier
Godfrey
Graham
Guarnieri
Guay
Guimond
Hickey
Hubbard
Irwin
Jackson
Jacob
Karygiannis
Keyes
Kilger (Stormont-Dundas)
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Landry
Lastewka
Laurin
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Lincoln
Loney
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Manley
Marchand
Marleau
McCormick
McGuire
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McWhinney
Mercier
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Nunez
O'Brien (London-Middlesex)
O'Reilly
Paradis
Paré
Parrish
Patry
Peric
Peterson
Pettigrew
Phinney
Picard (Drummond)
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Regan
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Robichaud
Robillard
Rocheleau
Sauvageau
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Sheridan
Simmons
Stewart (Northumberland)
Szabo
Tremblay (Lac-Saint-Jean)
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)
Ur
Valeri
Vanclief
Venne
Verran
Wells
Whelan
Young -128
DÉPUTÉS «PAIRÉS»
Assad
Asselin
Axworthy (Winnipeg South Centre/Sud-Centre)
Bélisle
Bergeron
Canuel
Collins
Comuzzi
Crawford
Crête
Dalphond-Guiral
Daviault
Debien
Dubé
Duhamel
Dumas
Easter
Eggleton
Fillion
Finestone
Gaffney
Godin
Harb
Harper (Churchill)
Hopkins
Iftody
Lalonde
Lebel
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Marchi
Martin (LaSalle-Émard)
Ménard
Pomerleau
Rock
Serré
Sheridan
Stewart (Brant)
Tremblay (Rosemont)
Walker
Le Président: Je déclare la motion rejetée.
[Français]
Comme il est 19 h 30, la Chambre s'ajourne jusqu'à 10 heures
demain, conformément à l'article 24(1) du Règlement.
(La séance est levée à 19 h 31.)