COMMUNIQUÉSLe 10 décembre 1999 (12 h 30 HNE) Nº 267 LE CANADA DÉPOSE UNE NOUVELLE LOI VISANT À METTRE SUR PIED LA COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE Le ministre des Affaires étrangères, M. Lloyd Axworthy, et la ministre de la Justice et procureure générale du Canada, Mme Anne McLellan, ont annoncé aujourd'hui le dépôt devant la Chambre des communes d'un projet de loi visant à créer une nouvelle loi du Parlement intitulée Loi sur les crimes contre l'humanité. La nouvelle loi mettrait en oeuvre au Canada le Statut de Rome de la Cour criminelle internationale (CCI) et remplacerait les dispositions actuelles sur les crimes de guerre qui figurent au Code criminel. « Nous célébrons aujourd'hui la Journée internationale des droits de l'homme, et, selon moi, il n'y a pas de meilleur moment pour déposer ce projet de loi. Lorsque la CCI aura été établie, elle aidera à mettre fin à la culture de l'impunité qui a permis à des auteurs de crimes graves contre les droits de la personne d'échapper à la justice, a déclaré M. Axworthy. Je suis fier du fait que le Canada est le premier pays à adopter des mesures législatives aussi globales. Ce faisant, nous tirons parti du mouvement lancé par les négociations de Rome l'an dernier au sujet de la CCI, et nous nous assurons que le Canada est toujours en tête de ligne pour faire en sorte que la Cour criminelle internationale soit une entité vitale et fonctionnelle. » Le Statut de Rome de la CCI a été adopté par 120 États lors d'une conférence diplomatique internationale qui a eu lieu à Rome en juillet 1998. Le Canada présidait alors l'importante Commission plénière à la conférence qui s'est terminée avec succès. Il joue de nouveau ce rôle aux Nations Unies à New York afin de mettre la touche finale aux détails techniques du fonctionnement de la Cour. Le ministre Axworthy a signé le Statut de Rome au nom du Canada le 18 décembre 1998. La nouvelle Loi sur les crimes contre l'humanité créerait de nouvelles infractions pour génocide, crimes contre l'humanité, crimes de guerre et manquement à la responsabilité de la part de chefs militaires et autres supérieurs. De nouvelles infractions seraient également créées pour protéger l'administration de la justice de la CCI, ainsi que les juges, les fonctionnaires et les témoins. « Le gouvernement du Canada est déterminé à prendre tous les moyens possibles pour traduire en justice les personnes soupçonnées d'avoir commis un génocide, des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, a déclaré la ministre McLellan. Ces modifications renforceraient les fondements législatifs des poursuites pénales au Canada et soutiendraient l'administration de la justice par la CCI. Elles étayeraient également le Programme canadien sur les crimes de guerre et réaffirmeraient l'engagement du Canada envers les Canadiens et la communauté internationale selon lequel le Canada n'est pas, et ne deviendra pas, un refuge sûr pour les criminels de guerre. » La Loi établirait également de nouvelles infractions portant sur les produits de la criminalité et des mécanismes d'exécution des ordonnances de la CCI concernant le blocage et la confiscation des biens. L'argent recueilli serait versé dans un Fonds pour les crimes contre l'humanité établi en vertu de la Loi; il pourrait ensuite être distribué par le procureur général du Canada aux victimes des infractions prévues dans la Loi ou le Statut de Rome. De plus, la Loi sur les crimes contre l'humanité mettrait en oeuvre les obligations du Canada en vertu du Statut de Rome, à savoir de remettre aux autorités les personnes recherchées par la CCI pour génocide, crimes contre l'humanité, crimes de guerre et d'autres infractions prévues dans le Statut de Rome. En outre, une personne faisant l'objet d'une demande de remise par la CCI ne pourrait invoquer une immunité contre l'arrestation ou la remise. La Loi viendrait compléter les modifications récentes à la Loi sur l'extradition, déposées par la ministre McLellan, qui prévoient et facilitent l'extradition de personnes accusées de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre devant des cours et tribunaux criminels internationaux. Les deux ministres ont exprimé l'espoir que les 91 États qui ont déjà signé le Statut de Rome de la CCI le ratifieront rapidement et le mettront en oeuvre. Le Statut entrera en vigueur lorsqu'il aura été ratifié par 60 pays. Le gouvernement du Canada continuera de promouvoir activement une stratégie globale et coordonnée à l'appui de la ratification et de la mise en oeuvre du Statut de la CCI. Les organisations non gouvernementales constituent une partie intégrante de cette stratégie. M. Axworthy a annoncé le financement de deux initiatives importantes visant à promouvoir la ratification de la CCI. Ce financement sera accordé en vertu du Programme de consolidation de la paix et de sécurité humaine du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international. La première contribution de 60 000 dollars vise un projet conjoint du Centre international pour la réforme du droit pénal et la politique de justice criminelle et du Centre international des droits de la personne et du développement démocratique. Ce projet appuiera le développement et la diffusion d'outils pratiques afin d'aider des pays dans les efforts qu'ils déploient en vue de ratifier et de mettre en oeuvre le Statut de Rome de la CCI. La deuxième contribution de 50 000 dollars sera versée à la Coalition des ONG pour l'établissement d'une Cour criminelle internationale. La Coalition entreprend une campagne mondiale afin de sensibiliser les leaders nationaux, les représentants des médias, les parlementaires et la société civile au Statut de Rome de la CCI et pour en promouvoir la ratification. Le financement des initiatives mentionnées ci-dessus est prévu dans le budget fédéral déposé en février 1999 et s'inscrit dans le cadre financier déjà en place. - 30 - Un document d'information figure en annexe. Pour de plus amples renseignements, les représentants des médias peuvent communiquer avec : Debora Brown Cabinet du ministre des Affaires étrangères (613) 995-1851 Le Service des relations avec les médias Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (613) 995-1874 Line Chabot-Racine Cabinet de la ministre de la Justice (613) 992-4621 Marjorie Ward Direction des communications et des services exécutifs Ministère de la Justice (613) 957-4205 Ce document se trouve également dans le site Web du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international à : http://www.dfait-maeci.gc.ca, ainsi que dans le site Internet du ministère de la Justice à : http://canada.justice.gc.ca Document d'information LE CANADA ET LA COUR CRIMINELLE INTERNATIONALE Le Canada a été l'élément moteur derrière l'établissement de la Cour criminelle internationale (CCI), dont le Statut a été adopté à Rome le 17 juillet 1998. La CCI sera la première cour permanente internationale investie de la compétence à l'égard des crimes les plus graves créée aux termes du droit international -- parmi ces crimes figurent le génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre et, lorsqu'une définition acceptable sera adoptée, les crimes d'agression. Le Statut de la CCI entrera en vigueur à l'issue de sa ratification par 60 États. Le Canada a signé le Statut de la CCI le 18 décembre 1998, et il est l'un des nombreux pays à prendre des mesures visant à mettre en oeuvre le Statut dans le cadre de leurs systèmes nationaux de droit. Même si six États ont déjà ratifié le Statut (Fiji, Ghana, Italie, Saint-Marin, Sénégal, et Trinidad et Tobago), les mesures législatives déposées aujourd'hui font que le Canada est le premier pays à présenter des mesures législatives globales de mise en oeuvre. La CCI entend compléter et non remplacer les tribunaux nationaux; par conséquent, elle exercera sa compétence lorsque les tribunaux nationaux ne seront pas en mesure ou ne seront pas disposés à traduire en justice les auteurs des infractions. Le Statut de la CCI prévoit des outils pour s'assurer que la Cour est une institution indépendante et efficace, et il comporte aussi suffisamment de garanties du point de vue de la procédure pour s'assurer qu'elle fonctionne de façon responsable et en application régulière de la loi. Les crimes à l'égard desquels la Cour a compétence sont définis avec soin, conformément au droit international coutumier établi. Le Statut comporte plusieurs dispositions traitant du sort des femmes et des enfants dans les conflits armés. Selon le Statut, le viol, l'esclavage sexuel, et d'autres formes de violence sexuelle, peuvent être considérés comme des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Le Statut reconnaît également que l'enrôlement et l'utilisation des enfants de moins de 15 ans dans les forces armées constitue un crime de guerre. Le Canada est toujours déterminé à jouer un rôle de chef de file pour traduire en justice les auteurs de génocide, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre, peu importe quand et où ces crimes ont été commis. Les modifications s'inscrivent dans l'engagement du gouvernement fédéral à avoir à sa disposition tous les recours possibles pour s'assurer que le Canada n'est pas un refuge sûr pour les criminels de guerre. FAITS SAILLANTS DE LA LOI PROPOSÉE SUR LES CRIMES CONTRE L'HUMANITÉ La nouvelle Loi mettrait en oeuvre au Canada le Statut de Rome de la CCI. Elle remplacerait les dispositions actuelles sur les crimes de guerre figurant dans le Code criminel. La Loi établirait les nouvelles infractions suivantes : • Génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre La nouvelle Loi créerait des infractions pour génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre reposant sur le Statut de Rome. Les dispositions s'appliqueraient aux actes commis au Canada et permettraient au Canada d'instituer des poursuites contre les auteurs de ces infractions ou d'extrader ceux-ci à la CCI pour qu'ils fassent face à des poursuites instituées par la Cour. Les actes de génocide, les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre commis à l'extérieur du Canada seraient définis conformément au droit international existant au moment de leur perpétration et à l'endroit où ils ont été commis, que ce soit dans le passé ou à l'avenir. Dès lors, les auteurs d'un crime de génocide, de crimes contre l'humanité ou de crimes de guerre pourraient être traduits devant la justice peu importe quand ou à quel endroit ces actes ont été posés. • Infractions pour manquement à la responsabilité : chef militaire ou autre supérieur La Loi établirait des infractions pour manquement à la responsabilité de la part des chefs militaires ou des autres supérieurs. Le défaut par un chef militaire ou un autre supérieur d'exercer un contrôle des personnes placées sous son commandement ou son autorité, lorsque ces personnes se rendent coupables de génocide, de crimes contre l'humanité ou de crimes de guerre, pourrait entraîner la responsabilité pénale du chef militaire ou d'un autre supérieur si celui-ci a fait défaut de prendre les mesures visant à empêcher ou à réprimer la perpétration de crime ou à renvoyer le cas aux autorités compétentes pour enquête. • Moyens de défense Les moyens de défense prévus dans le droit canadien et dans le droit international pourraient être invoqués, à quelques exceptions près, par les personnes accusées de génocide, de crimes contre l'humanité, de crimes de guerre ou de manquement à la responsabilité de la part des chefs militaires ou des autres supérieurs. Le respect de la loi en vigueur au moment et au lieu où l'infraction a été commise n'est pas un moyen de défense susceptible d'être invoqué. Le moyen de défense fondé sur les ordres d'un supérieur devrait respecter les dispositions prévues dans le Statut de Rome. De plus, le moyen de défense fondé sur les ordres d'un supérieur ne peut reposer sur une croyance que l'ordre était licite, si la croyance de l'accusé repose sur des informations au sujet d'un groupe identifiable de personnes susceptibles d'encourager des actes inhumains ou des omissions contre le groupe. • Peines et admissibilité à la libération conditionnelle Les peines et les règles d'admissibilité à la libération conditionnelle applicables à une personne déclarée coupable de génocide, de crimes contre l'humanité ou de crimes de guerre à l'issue de la mort intentionnelle seraient les mêmes que celles applicables au meurtre en vertu du Code criminel. Les règles normales de la libération conditionnelle s'appliqueraient à toutes les autres peines. • Infractions portant atteinte à l'administration de la justice de la CCI La Loi prévoit des infractions visant à protéger l'intégrité du processus de la Cour ainsi que les juges et les fonctionnaires de la CCI et les témoins. En particulier, elle prévoit que commet une infraction quiconque pose les actes suivants : entrave à la justice, entrave au travail des fonctionnaires judiciaires, corruption de juge ou de fonctionnaire, parjure, fabrication de preuve ou témoignage contradictoire, et intimidation. Le Code criminel protégerait les témoins ayant déposé devant la CCI et leurs familles contre toutes représailles. Les dispositions pénales s'appliqueraient si les infractions sont commises au Canada ou par un citoyen canadien à l'extérieur du Canada. D'autres infractions prévues au Code criminel s'appliqueraient afin de protéger les juges et les fonctionnaires judiciaires contre tout préjudice lorsque ceux-ci se trouvent au Canada ou à l'étranger. • Infractions concernant les produits de la criminalité La Loi veillerait également à ce que la possession et le recyclage des produits de la criminalité tirés de ces nouvelles infractions soient aussi des infractions. Par conséquent, les produits de la criminalité qui se trouvent au Canada et qui sont tirés de la perpétration des pires actes criminels, notamment le génocide, les crimes contre l'humanité ou les crimes de guerre, pourraient faire l'objet d'une ordonnance de blocage, être saisis ou être confisqués de manière analogue aux produits tirés des autres infractions criminelles commises au Canada. • Fonds pour les crimes contre l'humanité Au Canada, les sommes tirées de la disposition des biens confisqués ou de l'exécution des amendes ou des ordonnances de dédommagement rendues par la CCI seraient versées dans le Fonds pour les crimes contre l'humanité établi en vertu de la Loi. Le procureur général du Canada pourrait verser à même ce fonds des sommes au Fonds en fiducie de la CCI établi en vertu du Statut de Rome ou aux victimes des infractions prévues dans la Loi. • Extradition La Loi sur les crimes contre l'humanité mettrait en oeuvre les obligations du Canada en vertu du Statut de Rome de remettre aux autorités les personnes recherchées par la CCI pour génocide, crimes contre l'humanité et crimes de guerre. La plupart des procédures prévues dans la Loi sur l'extradition s'appliqueraient aux personnes visées par une demande de remise présentée par la CCI. Toutefois, une personne visée par une demande de remise présentée par la CCI ne pourrait invoquer une immunité d'arrestation ou de remise en vertu de la common law ou d'une autre loi aux termes de la Loi sur l'extradition. Les motifs de refus de remise applicables dans les cas d'extradition entre États ne s'appliqueraient pas à une demande de remise à la CCI. • Entraide judiciaire Le Canada pourrait aider la CCI dans le cadre des enquêtes concernant un génocide, des crimes contre l'humanité ou des crimes de guerre de la même façon qu'il aide actuellement d'autres États à mener des enquêtes criminelles normales. La Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle permettrait au Canada d'offrir une aide variée, allant de l'identification des personnes à la cueillette d'éléments de preuve au Canada aux fins d'une poursuite. |