Que veut-on dire lorsqu'on parle de viol? Le viol désigne habituellement
des rapports sexuels ou la pénétration forcés. Le terme
viol, cependant, n'est pas un terme du droit canadien. Dans le Code criminel,
le mot viol a été remplacé par le terme agression sexuelle.
L'agression sexuelle désigne toute forme de contact à caractère
sexuel non désiré entre des personnes. La force a donc moins
d'importance que le consentement.
L'agression sexuelle peut survenir entre partenaires sexuels, amis, connaissances
ou étrangers, et dans les fréquentations.
L'agression sexuelle, cela peut arriver à n'importe qui...
- Un homme peut agresser sexuellement une femme
- Une femme peut agresser sexuellement une femme
- Un homme peut agresser sexuellement un homme
- Des mineurs peuvent agresser sexuellement d'autres mineurs
- Les personnes âgées peuvent être agressées
sexuellement - par des gens de tout âge
- Une personne peut agresser sexuellement son conjoint ou sa conjointe
- L'agression sexuelle peut se produire dans le cadre de fréquentations
- Les parents ou parents-substituts peuvent agresser sexuellement les
enfants
Le viol commis par une connaissance de la victime est la forme d'agression
sexuelle la plus courante, suivi de près par les agressions sexuelles
dans les fréquentations ou commises par d'autres partenaires.
La plupart des agresseurs sexuels sont des hommes. Diverses raisons peuvent
pousser quelqu'un à l'agression sexuelle - la principale étant
le désir de pouvoir et de contrôle. Contrairement à la croyance
populaire, les violeurs ou les personnes qui agressent sexuellement des adultes
ne sont pas atteints d'une maladie mentale ou « en manque de sexe » .
Bon nombre des agresseurs sont mariés ou fréquentent quelqu'un.
L'agression sexuelle est-elle fréquente?
Au Canada, on estime qu'une femme sur quatre et qu'un homme sur dix de plus
de 18 ans seront agressés sexuellement au cours de leur vie.
L'étude sur la violence faite aux femmes menée par Statistique
Canada en 1993 révèle qu'un tiers de toutes les femmes interrogées
avaient été agressées sexuellement et qu'un quart de toutes
les femmes avaient déjà été agressées sexuellement
par leur conjoint ou partenaire. Cette conclusion suggère que chez les
femmes interrogées, l'agression sexuelle par un partenaire était
encore plus susceptible de se produire que l'agression physique ou l'abus.
L'agression sexuelle est beaucoup plus fréquente qu'on ne le croit.
Malheureusement, le fait que ces crimes soient souvent passés sous silence
rend la nature et l'étendue du problème très difficiles
à comprendre. Par exemple, les chercheurs de Statistique Canada ont estimé
dans un rapport de 2001 que moins de 10 % des agressions sexuelles contre des
personnes de plus de 15 ans étaient signalées aux services de
police canadiens, et que la police n'était informée que de 1 %
de tous les viols par une connaissance.
Que dit-on sur l'agression sexuelle dans le droit canadien?
Le Code criminel du Canada est un répertoire des infractions dont on
peut être accusé et pour lesquelles on peut être traduit
en justice dans un tribunal canadien. L'agression sexuelle est classée
selon le degré de gravité dans le Code (article 271) :
- 1er degré : Agression sexuelle - Contact sexuel
avec une personne non consentante. Les auteurs d'une agression sexuelle au
1er degré sont passibles d'un emprisonnement maximal de
dix ans. Sur plus de 24 000 agressions sexuelles signalées à
la police en l'an 2000, 98 % ont été qualifiées
d'agressions sexuelles au 1er degré.
- 2e degré : Agression sexuelle armée, menaces
à une tierce personne ou infliction de lésions corporelles.
- 3e degré : Agression sexuelle grave - Représente
les cas les plus extrêmes où la victime est blessée, mutilée
ou défigurée, ou sa vie est mise en danger (CC 273).
L'agression et l'exploitation sexuelles des moins de 14 ans sont également
illégales, bien que ces crimes ne soient pas qualifiés d'agression
sexuelle. Les personnes qui se livrent à une activité sexuelle,
quelle qu'en soit la forme, avec des personnes qu'on considère incapables
de donner leur consentement peuvent être accusées d'infraction
sexuelle. D'autres types d'agressions ou de voies de fait peuvent figurer au
Code criminel sous un nom différent. Ceux-ci comprennent l'exploitation
sexuelle et l'inceste, l'agression physique armée ou non, et le harcèlement
criminel. Ces infractions, comme l'agression sexuelle, sont contraires à
la loi.
Et si mon partenaire est plus vieux que moi? Les rapports sexuels avec un
mineur sont-ils illégaux?
Le Code criminel (article 150.1) établit l'âge de consentement
à 14 ans. Cela signifie qu'en vertu de la loi, on considère que
les moins de 14 ans ne sont pas en mesure d'accorder leur consentement à
une activité sexuelle, un point c'est tout. Par conséquent, toute
forme de rapport sexuel avec une personne de moins de 14 ans est illégale.
Cela comprend les attouchements, l'incitation à des contacts sexuels
et l'inceste (rapports sexuels avec un parent par le sang). Le fait de croire
qu'une personne avait plus de 14 ans ou qu'elle consentait aux rapports sexuels
ne constitue pas un moyen de défense contre de telles accusations.
De plus, une personne atteinte d'une déficience mentale ou physique,
quel que soit son âge, peut ne pas être en mesure de donner son
consentement à l'activité sexuelle.
Dans le cas des adultes, l'affaiblissement des facultés ou la croyance
au consentement (Code criminel canadien, article 273.2) ne constituent pas des
moyens de défense contre une accusation d'agression sexuelle. Cela signifie
que si l'accusé croyait que le plaignant avait consenti à l'activité
sexuelle mais n'a pas pris les mesures raisonnables pour s'assurer du consentement
à l'activité, ses actes peuvent constituer une agression sexuelle.
De même, si une personne croyait à tort, en raison de l'affaiblissement
volontaire de ses facultés, de son insouciance ou d'un aveuglement volontaire,
que l'autre partie avait consenti aux rapports sexuels, elle peut être
coupable d'agression sexuelle.
Si les facultés d'une personne ont été affaiblies à
son insu - c'est-à-dire qu'elle a été droguée ou
forcée à boire - on ne peut considérer qu'elle a donné
son consentement. Toute activité sexuelle dans de telles circonstances,
que la personne soit consciente ou non, est également illégale.
Quelles sont les « drogues du viol » ?
Tel qu'il a été discuté plus tôt, les gens connus
d'une victime potentielle posent le plus grand risque d'agression sexuelle.
Bien des gens perdent leurs inhibitions au cours des réceptions ou d'autres
rassemblements où il y a consommation d'alcool et(ou) de drogue. L'alcool,
par exemple, est reconnu depuis longtemps comme un « lubrifiant social » car beaucoup de gens se sentent plus détendus et plus sociables
lorsqu'ils boivent. Aujourd'hui, cependant, les « drogues du viol »
présentent une nouvelle menace grave et vont beaucoup plus loin que faire
perdre la timidité de ceux qui les consomment. Au cours de rendez-vous,
et dans les discothèques et les raves, ces drogues sont de plus en plus
utilisées pour agresser sexuellement les victimes vulnérables
aux facultés affaiblies. Pour cette raison, bon nombre de drogues sont
qualifiées de « drogues d'agression » . Elles comprennent les
suivantes :
- Rohypnol (nom de marque; nom générique flunitrazépam)
- Sédatif similaire au Valium, mais beaucoup plus puissant. Le Rohypnol
peut rendre inconscient et provoquer des pertes de mémoire, la décontraction
des muscles et la faiblesse. L'effet peut se manifester dans la demi-heure
qui suit la consommation et durer pendant des heures. Certaines victimes d'agression
sexuelle par intoxication au Rohypnol se réveillent à un endroit
complètement différent de l'endroit où elles se rappellent
avoir été des heures auparavant, sans aucun souvenir de ce qui
s'est passé pendant qu'elles étaient inconscientes.
- GHB ou ecstasie liquide - Aussi appelé « love drug » .
Le GHB est populaire aux raves et aux concerts parce qu'il procure à
l'utilisateur un sentiment de tranquillité, éveille sa sensualité
et lui fait perdre ses inhibitions. L'effet de cette drogue peut durer très
longtemps et, à fortes doses, la drogue peut provoquer un sommeil profond
spontané.
- Kétamine - Tranquillisant pour les animaux pouvant causer
des hallucinations, la dissociation et la perte de mémoire.
D'autres drogues, qui sont peut-être mieux connues, peuvent également
être utilisées pour rendre une personne vulnérable à
l'agression sexuelle :
- Alcool - Drogue aux propriétés sédatives; consommé
en grandes quantités, l'alcool peut entraîner la septicémie,
des lésions cérébrales et organiques, et même la
mort
- Hallucinogènes (par exemple LSD, champignons magiques)
- Narcotiques (y compris les analgésiques vendus sur ordonnance)
- « Aphrodisiaques »
- Somnifères ou autres médicaments sur ordonnance
Quel est l'effet de ces drogues?
Prises seules, la plupart de ces drogues sont puissantes et peuvent avoir des
effets secondaires néfastes. Certaines ont des conséquences qui
peuvent être mortelles, même à petites doses. Lorsqu'elles
sont consommées avec de l'alcool, même la plus courante de ces
drogues peut avoir des effets imprévisibles et dangereux - voire mortels.
Toute substance qui a le pouvoir d'altérer la conscience, le jugement
et la capacité fonctionnelle peut être utilisée pour faciliter
l'agression sexuelle. Il est donc essentiel de savoir exactement ce que vous
consommez et quoi faire en présence de telles substances.
Quoi faire si vous croyez avoir été drogué et agressé
sexuellement :
- Rendez-vous dans un endroit sûr et, si vous le pouvez, dites-le immédiatement
à quelqu'un en qui vous avez confiance. Demandez à cette personne
de vous aider à obtenir des soins médicaux ou prenez-vous même
les dispositions nécessaires, ou appelez la police ou un organisme
de soutien aux victimes de viol dès que possible afin de signaler ce
qui s'est passé. On vous informera des mesures que vous pouvez prendre
par la suite.
- Si vous êtes en mesure de le faire, apportez un échantillon
de la boisson ou des aliments consommés à la clinique aux fins
d'analyse. Vous pourrez demander un test de dépistage de drogues et
un examen permettant de déceler tout signe d'agression sexuelle. Si
vous croyez avoir été agressé ou drogué, il est
recommandé de ne rien prendre sans ordonnance, et de ne pas vous doucher
ni prendre de bain, car cela pourrait éliminer ou altérer les
signes d'agression sexuelle, le cas échéant.
Souvent, les victimes d'agression ont honte, sont bouleversées, et se
sentent impuissantes et confuses. Elles se blâment souvent à tort.
L'expérience peut les paralyser et les amener à ne pas parler
de ce qui s'est passé. Il est important de partager votre expérience
avec une personne sensible qualifiée qui peut vous aider et de signaler
le crime à la police. Vous n'êtes peut-être pas la seule
victime de l'agresseur, et votre déclaration pourrait aider à
empêcher d'autres agressions futures.
Que puis-je faire pour prévenir l'agression sexuelle?
Bien des viols ou des agressions sexuelles sont planifiés; certains
sont spontanés. Pour empêcher une agression de se produire ou de
s'aggraver :
- Suivez votre intuition. Si vous sentez qu'une situation ou une personne
est dangereuse, évitez cette personne ou sortez de cette situation
dès que possible. Les enjeux sont trop élevés pour que
vous vous préoccupiez de la justesse de vos impressions - la sécurité
est ce qu'il y a de plus important.
- Assurez-vous que quelqu'un sache où vous vous trouvez en tout temps.
Ne partez pas seul, surtout avec des gens que vous venez de rencontrer ou
des étrangers.
- Ne laissez jamais votre verre sans surveillance, et n'acceptez jamais de
boissons ou de drogues d'un étranger. Ne laissez aucune substance affaiblir
votre jugement ou votre capacité d'agir au mieux de vos intérêts.
Ne buvez pas la boisson d'un bol à punch ni dans le verre d'un autre.
- Connaissez vos limites et énoncez-les dès le départ.
Communiquez clairement votre refus à participer à un acte quelconque
dès que possible. Sachez que vous êtes tout à fait en
droit de mettre fin à une activité sexuelle en tout temps -
si vous ne vous sentez pas bien, si vous êtes mal à l'aise, effrayé
ou incertain. Il arrive qu'on donne son consentement sur le coup, et que la
situation change et qu'on n'ait plus envie.
- Ne vous sentez pas forcé d'avoir des rapports sexuels en échange
d'affection, de cadeaux, de repas au resto, de fleurs, etc. La culpabilité
n'est pas une raison pour avoir des rapports sexuels, pas plus que le désir
d'être vu comme une « bonne fille » ou un « bon gars » . À vrai dire, si vous n'êtes pas assez sûr de vous
pour dire non à des rapports sexuels, vous n'êtes probablement
pas prêt à dire oui à une relation sexuelle avec qui que
ce soit pour le moment.
- Affirmez-vous. Suivez des cours d'autodéfense et d'affirmation de
soi. Apprenez à projeter une attitude physique et mentale de confiance.
Rappelez-vous que vous êtes le seul maître de votre corps.
- Assurez-vous que les personnes particulièrement vulnérables
soient bien protégées (personnes âgées, personnes
atteintes d'une déficience intellectuelle ou physique, enfants et personnes
atteintes d'une maladie mentale). Les membres de ces groupes courent habituellement
un risque accru d'abus et d'agression sexuels au cours de leur vie. Soyez-en
conscient et prenez des mesures supplémentaires pour assurer leur sécurité.
Où puis-je obtenir de l'aide ou des renseignements?
Pour connaître les services offerts près de chez vous, consultez
l'annuaire téléphonique de votre quartier. Normalement, les numéros
d'urgence figurent aux premières pages. Certains de ces numéros
peuvent renvoyer aux services ci-dessous. Sinon, vous pouvez consulter les pages
jaunes aux rubriques suivantes :
- centres de soutien aux victimes d'agression sexuelle ou de viol
- centres pour femmes et pour hommes
- lignes d'écoute téléphonique ou d'aide
- organismes au service des victimes - souvent joints par l'intermédiaire
de la police ou du bureau provincial du procureur général
- centres de consultation sur la violence sexuelle
- organismes de soutien des gais / lesbiennes / transgenres
- médecins, services de santé ou hôpitaux
- travailleurs en santé mentale, par exemple conseillers, psychologues,
infirmiers psychiatriques
Sur Internet…
Références
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Écoutez-moi! Sondage auprès des adolescentes du Canada, Ottawa,
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rape drugs: What you need to know about them.
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Code. Scarborough, ON : Carswell Thomson Professional Publishing.
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