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Enjeux stratégiques
Enjeux et défis

Énoncé de la politique de défense

La politique de la défense du Canada et sa vision des capacités expéditionnaires

COMMENTAIRE : PUBLICATION DU ROYAL CANADIAN MILITARY INSTITUTE

David McDonough - Mai 2005 

David S. McDonough est agent des communications et des programmes au Royal Canadian Military Institute. Avant d’occuper ce poste, il était agent de recherche à l’Institut canadien des études stratégiques, au Programme de stages du Forum sur la sécurité et la défense du MDN. Il détient un baccalauréat avec mention d’honneur de l’Université Simon Fraser et une maîtrise en sciences politiques de l’Université de la Colombie-Britannique. Ses intérêts de recherche comprennent la stratégie nucléaire américaine, les relations de défense Canada-États-Unis et le régime de non-prolifération. Bon nombre de ses articles ont été publiés dans le CIR Working Paper, le CISS Strategic Datalinks, le International Journal et SITREP.  

 

Le gouvernement du Canada a rendu public dernièrement son Énoncé de la politique de défense (EPD), intitulé Le Cap sur notre politique de défense du XXIe siècle. Cet Énoncé faisait partie de l’Énoncé de politique internationale du gouvernement, qui en plus d’être très complet, est étonnamment et raisonnablement bien intégré.

L’idée maîtresse de l’Énoncé de politique internationale et de son EPD est que le Canada doit se redonner un rôle international. Ceci est peut-être l’aspect le plus important de l’Énoncé – la reconnaissance qu’il faut réinvestir dans la Défense, afin que le pays puisse poursuivre ses engagements en terme de défense, de diplomatie et d’aide internationale. Comme l’a mentionné le premier ministre Paul Martin dans l’Avant-propos de l’Énoncé de politique internationale, l’érosion de ce que nous pourrions appeler nos biens durables a eu des répercussions sur notre présence à l’étranger. 

Dans l’Énoncé, on accorde une importance particulière au besoin de réinvestir dans la capacité militaire expéditionnaire du Canada. L’élément d’avant-garde de cette capacité serait une Force d’opérations spéciales, une formation militaire interarmées apte à mener des opérations tant au pays qu’à l’étranger, et qui comprendrait une Force opérationnelle interarmées 2 (FOI 2) élargie, ainsi que des capacités de soutien en terme notamment de renseignement et de force aérienne, maritime et terrestre.

Une telle force serait idéale pour procéder à des opérations d’évacuation rapides et elle permettrait également aux Forces canadiennes d’avoir une capacité de combat et de renseignement améliorée. D’après les derniers rapports, la FOI 2 sera appuyée par une force légère, bien entraînée et très mobile de rangers. Certains ont fait des comparaisons entre cette force et l’ex-Régiment aéroporté du Canada, quoiqu’il serait peut-être plus juste de la comparer aux US Army Rangers, étant donné le rôle d’appui clé qu’ils jouent auprès des Forces spéciales américaines.  Cette force légère serait utilisée pour sécuriser un secteur et pour permettre à la FOI 2 de prendre part à des missions plus concentrées.

Selon l’EPD, la Force d’opérations spéciales sera appuyée par une Force opérationnelle permanente de contingence, soit une plus grande force à haut niveau de préparation, composée de forces terrestres, aériennes, marines et d’opérations spéciales désignées. Cette force s’appuira sur une capacité de transport maritime stratégique, centrée sur ce que le chef d’État-major de la Défense, le Général Rick Hillier, a nommé le « Big Honking Ship » (BHS) (l’énorme navire). On a donné très peu de détails sur ce navire, quoiqu’il s’agira sûrement d’un navire d’assaut amphibie semblable au ravitailleur héli-plate-forme (LPD) de 25 000 tonnes de la classe San Antonio, utilisé par le Corps des Marines des États-Unis. Un tel navire serait équipé d’un pont d’envol pour hélicoptères, ainsi que d’un puits pour engin de débarquement.

Le BHS serait appuyé par la capacité de transport stratégique des trois navires de soutien interarmées (NSI) prévus, et puisque ces navires seront répartis sur les deux côtes, la Force opérationnelle permanente de contingence aurait la possibilité de se servir de deux d’entre eux. Ces navires pourraient transporter du carburant, des approvisionnements et de l’équipement pour la Force terrestre et la Force opérationnelle navale qui l’accompagne.

Cette capacité de transport maritime stratégique sera complétée par une capacité de transport aérien tactique, qui prendra probablement la forme d’hélicoptères de transport lourds et moyens. Les choix envisageables sont le CH-47 Chinook, l’hélicoptère à toute épreuve de l’Armée américaine depuis sa mise en service dans les années 1960, ou le CH-53 Sea Stallion, qui a l’avantage additionnel d’avoir une plus grande capacité de transport, d’être compatibles avec les systèmes de bord et d’être conçu pour les opérations amphibies. Il faut noter que le CH-53 est actuellement utilisé par les Marines américains. Cette capacité combinée de transport stratégique et tactique devrait donner à la Force opérationnelle permanente de contingence la capacité de projeter une puissance relativement importante pour les Forces canadiennes. 

Ces deux forces opérationnelles ont été conçues dans le but de participer à des missions expéditionnaires interarmées, et sont donc interopérables avec celles de nos alliées; elles ont en outre une capacité d’intervention rapide. Elles sont également très complémentaires : d’un côté, la Force d’opérations spéciales peut fournir des capacités de surveillance secrète et d’autres capacités très demandées pour appuyer la Force opérationnelle permanente de contingence. De l’autre côté, la Force d’opérations spéciales, petite mais robuste, peut se trouver déployée dans un environnement hostile et avoir besoin d’aide, et être alors appuyée par la Force opérationnelle permanente de contingence. Bien sûr, il reste à savoir si on utilisera cette force à cette fin, étant donné la quasi-improbabilité que la Force d’opérations spéciales soit déployée autrement que dans le cadre d’une opération menée par une grande coalition (probablement avec les États-Unis).

La création de ces deux forces opérationnelles laisse sous-entendre que les planificateurs de la défense au Canada reconnaissent qu’en raison de notre situation financière et de notre manque de capitaux, il est maintenant impossible d’établir des Forces canadiennes entièrement polyvalentes et aptes au combat, capables de mener sans difficulté des opérations auprès de nos partenaires (particulièrement les États-Unis) à tous les niveaux de conflit. On peut argumenter (beaucoup l’ont fait) qu’il faudrait investir énormément de fonds pour prévenir ce déclin, mais la possibilité que cela se produise est de plus en plus mince.

L’Énoncé de la politique de défense tend plutôt vers une division du travail dans les Forces canadiennes. D’une part, la Force d’opérations spéciales, en tant que fer de lance, si je puis dire, sera la première à participer à des opérations d’intervention de haute intensité aux côtés de nos alliés américains, particulièrement contre les menaces non classiques et asymétriques comme le terrorisme (quoique son utilité pour lutter contre des menaces classiques ne soit pas à négliger).   La nature des plus spécialisées de la Force d’opérations spéciales – basée principalement sur les missions petites mais précises de la FOI 2 – limite son utilité. Cependant, une force interopérable si précieuse permettrait au moins aux Forces canadiennes de continuer à travailler avec les Américains lors d’opérations d’intervention dangereuses.

D’autre part, la Force opérationnelle permanente de contingence, en plus de fournir un appui plus important lors d’opérations spéciales, est clairement désignée pour écarter les menaces lancées par les États défaillants ou en déroute, qui « font naître des menaces pour la sécurité régionale et mondiale »,  sous la forme de sanctuaires de terroristes ou de mouvements de réfugiés. De telles opérations de stabilisation à faible ou moyenne intensité nécessitent une présence au sol importante et raisonnablement robuste, et ce besoin sera probablement comblé par la Force opérationnelle permanente de coalition expéditionnaire, dont l’effectif sera plus nombreux.

L’importance accordée aux missions de stabilisation a incité certains à déplorer le manque d’attention portée dans l’EPD à l’établissement d’une force apte au combat de haute intensité. Cette critique est hors propos. En effet, les États défaillants ou en déroute sont effectivement l’une des premières préoccupations concernant la sécurité du Canada et les intérêts nationaux, et ils le sont depuis la fin de la Guerre froide. C’est du moins que ce semble indiquer la vaste expérience opérationnelle que nous avons acquise lors de missions de stabilisation et de soutien de la paix robustes et complexes. Il est donc justifié de donner la priorité aux opérations de combat de faible ou de moyenne intensité, plutôt qu’aux opérations de combat classiques de haute intensité. De plus, les ressources étant limitées, cette approche nous permettra d’obtenir les résultats escomptés en fonction de nos ressources disponibles.

De plus, les États défaillants ou en déroute sont, pour la plupart, des pays en voie de développement. Dans de telles circonstances, il ne faudrait pas surestimer la possibilité que le Canada soit appelé à participer à des opérations de combat de haute intensité. Bien sûr, le Canada pourrait être confronté à une menace de haute intensité ou à une menace classique dans un état défaillant. Cependant, les forces conçues pour mener des opérations de stabilisation robustes et faire partie de l’environnement opérationnel dangereux et chaotique d’une guerre à trois volets ne seraient pas sans défense dans ce cas. Ces forces ne seraient pas des forces peu armées comme les troupes de maintien de la paix qui ont, pour la plupart, participé aux opérations de cessez-le-feu durant la Guerre froide : ce n’est pas non plus ce que prévoit l’EPD. 

Il faudrait également préciser qu’il est peu probable que le Canada participe seul à une prochaine mission de stabilisation. Le besoin d’une présence à terre forte, jumelé à la propension de longue date du Canada à prendre part à des opérations de coalition et à s’unir à des forces interopérables éliminent cette possibilité. Il faut donc évaluer le danger auquel ferait face une force « de stabilisation » en tenant compte du fait que la force du Canada participerait à une coalition interarmées. En effet, il serait surprenant qu’un déploiement de la sorte ait lieu sans la présence de forces alliées capables d’intervenir dans divers niveaux de conflit. Il est donc possible de surestimer le danger que représente, pour la sécurité du Canada, l’absence d’une telle capacité de combat par comparaison à l’espoir croissant (et, dirait-on, irréaliste) de maintien de FC complètement prêtes au combat.

Cette division du travail dans les Forces canadiennes ne représente évidemment pas une situation idéale, loin de là. Un tel choix de politique de défense est basé sur nos ressources limitées et notre érosion de capitaux, bien plus que sur une bonne évaluation de la défense. De plus, les capacités envisagées dans l’EPD représentent uniquement de modestes changements aux capacités actuelles du Canada. Par exemple, notre capacité à prendre part à une opération d’intervention classique de haute intensité, comme l’invasion de l’Irak par les États-Unis, se limiterait à un contingent de forces spéciales et de leurs forces de soutien améliorées.

Il ne faut cependant pas dédaigner cette contribution qui, quoique petite, est tout de même très utile, ni exagérer l’importance de déployer un grand contingent de forces totalement aptes au combat (par opposition aux forces de stabilisation). Une telle force de contingence serait utile, ne serait-ce que parce que l’intervention porterait la marque du Canada. En outre, un contingent plus considérable donnerait probablement au Canada plus de capital politique à Washington, mais la différence, au bout du compte, serait peu importante. De plus, toute perte de capital politique pourrait être contrebalancée par le déploiement d’une force de stabilisation opérationnelle permanente de contingence durant la période incontournable de reconstruction d’après-guerre et dans le cadre d’importantes opérations de soutien de la paix. Alors que même le Royaume-Uni s’efforce tant bien que mal de maintenir une force militaire pertinente comparativement aux Forces américaines de plus en plus perfectionnées, nous ne pouvons surestimer l’influence du Canada, même dans la meilleure des situations.

Finalement, la vision expéditionnaire de l’EPD, à défaut de présenter un tout nouveau concept, représente  une mesure provisoire nécessaire. Cette mesure a été élaborée à la suite de l’analyse de notre situation stratégique, afin de prévenir l’érosion continue de notre capacité de participer tant à des opérations d’intervention aux côtés des Forces américaines qu’à des opérations de stabilisation avec les États-Unis et, plus probablement, avec les Forces européennes. Il se peut fort bien que nous ne soyons pas en mesure de prendre part de la même façon aux deux types d’opérations, mais nous maintiendrons cependant une certaine capacité de le faire. À bien des égards, ceci est le reflet du modèle d’opérations que nous avons déployé en Afghanistan, où nous avons été très présents durant les opérations de stabilisation au sein de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS), et beaucoup moins présents durant les opérations d’intervention menées dans le cadre de l’opération Enduring Freedom (OEF).

Cette solution, imparfaite, mais à tout le moins nécessaire,  comporte encore beaucoup d’incertitude. Le transport stratégique est la composante cruciale de toute capacité expéditionnaire, tant pour la Force d’opérations spéciales que pour la Force opérationnelle permanente de contingence. Peu de détails cependant ont été annoncés, à l’exception des vagues commentaires du Général Hillier sur un « Big Honking Ship ». Il est possible que le fait que les plate-formes des FC sont de plus en plus désuètes et qu’il faut beaucoup de temps pour mener à bien un cycle d’approvisionnement pourrait même, à court ou à moyen terme, rendre non pertinente cette politique toute simple. L’utilisation que l’on fera des deux forces opérationnelles en tant que capacité expéditionnaire, et non comme capacité intérieure/continentale (une composante critique de l’EPD), reste à voir. 

Il ne faut surtout pas oublier que cette capacité expéditionnaire limitée dépend fortement des 12 millions de dollars promis dans le budget de 2005, qui devraient être principalement versés en quatre ou cinq ans. Cependant, bien que le gouvernement ait promis cette aide financière, cela ne signifie pas qu’il versera les fonds nécessaires – dans la défense ou ailleurs – pour qu’on élargisse le rôle international du Canada.

Le gouvernement a par contre reconnu et accepté publiquement qu’il y a bel et bien eu une érosion importante des capacités de défense au Canada et conséquemment, de l’influence du pays à l’échelle internationale. Bien qu’il soit possible qu’Ottawa ne verse pas aux FC les ressources promises, il est permis de croire qu’en confirmant qu’un manque était à combler et en promettant un octroi de fonds, le gouvernement s’est engagé auprès du public, ce qui pourrait le « forcer » à remplir son engagement, ou du moins à rehausser la barre pour les politiques futures. Il ne s’agit peut-être pas d’une solution parfaite, mais elle est typiquement canadienne.

Les vues exprimées dans ce document n'engagent que l'auteur et ne traduisent pas nécessairement celles de l’Institut ou de ses membres.

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