Principes en matière de justice réparatrice

Les lignes qui suivent sont tirées de l’article de Howard Zehr et Henry Mika intitulé « Fundamental Concepts in Restorative Justice », Contemporary Justice Review, vol. 1, 1998.

I. L’acte criminel est essentiellement une violation des rapports humains et interpersonnels.

Un tort a été causé aux victimes et à la collectivité, et doit être réparé.

  • Les principales victimes sont celles qui sont touchées le plus directement par le crime, mais d’autres, comme les membres de leur famille et les auteurs du crime, les témoins et les membres de la collectivité sont aussi des victimes.
  • Il faut restaurer les rapports humains mis à mal par le crime.
  • La réparation s’effectue par la prise de mesures pour répondre à l’éventail de besoins et de torts subis par les victimes, les délinquants et la société.

Les victimes, les délinquants et la collectivité dans son ensemble sont les principales parties intéressées dans le système de justice.

  • La justice réparatrice met l’accent sur la participation de ces parties, notamment les victimes et les délinquants, et recherche la réparation, de guérison, la responsabilisation et la prévention.
  • Les rôles des différentes parties varient selon la nature du délit , en fonction des capacités et des préférences de chacune.
  • L’État a défini certaines tâches, comme la recherche des faits, les méthodes de facilitation et les mesures de sécurité, mais il n’est pas la victime principale.

II. Les violations créent des obligations et des responsabilités.

L’obligation du délinquant est de réparer les torts autant que possible.

  • Comme la première obligation est envers la victime, la justice réparatrice donne à celle-ci le pouvoir de participer réellement à la définition de ces obligations.
  • Les délinquants ont l’occasion et la possibilité de comprendre le tort qu’ils ont causé aux victimes et à la société, et d’en assumer la responsabilité.
  • La participation volontaire des délinquants est maximisée; la contrainte et l’exclusion sont minimisées. Cependant, les délinquants peuvent être tenus à leurs obligations s’ils ne les respectent pas volontairement.
  • Les obligations découlant du tort causé par le délit doivent se rapporter à la réparation qu’il y a lieu d’offrir.
  • Les obligations peuvent paraître difficiles, même douloureuses, mais ne visent pas à causer de la douleur ou à obtenir vengeance.
  • Les obligations envers les victimes, comme le dédommagement, ont préséance sur les autres sanctions ou obligations imposées par l’État, comme les amendes.
  • Les délinquants ont l’obligation de participer activement à la définition de leurs propres besoins.

La collectivité a des obligations envers les victimes et les délinquants, et doit viser le bien-être général de ses membres.

  • La collectivité a la responsabilité de soutenir et d’aider les victimes à répondre à leurs besoins.
  • La collectivité est responsable du bien-être de ses membres et des conditions et rapports sociaux qui encouragent la criminalité ou qui favorisent la paix sociale.
  • La collectivité a la responsabilité d’appuyer les efforts visant la réintégration des délinquants dans la collectivité, de participer activement à la définition de leurs obligations et de leur donner l’occasion de se racheter.

III. La justice réparatrice vise à guérir les victimes et à redresser les torts.

La justice réparatrice a pour point de départ les besoins des victimes aux plans de l’information, de la reconnaissance du tort qu’elles ont subi, de la défense, du dédommagement, du témoignage, de la sécurité et du soutien.

  • La sécurité des victimes est une priorité immédiate.
  • Le processus de justice fournit un cadre favorisant la guérison qui, en définitive, est un travail que doit accomplir la victime elle-même.
  • Les victimes influencent le processus pénal en participant activement à la définition des besoins et des résultats.
  • Les délinquants participent le plus possible à la réparation du tort causé.

La justice réparatrice multiplie les occasions entre la victime et le délinquant d’échanger de l’information, de participer, de dialoguer et de parvenir à un consentement mutuel.

  • Les rencontres face à face sont indiquées dans certaines circonstances, alors que d’autres formes de rencontres sont plus appropriées dans d’autres cas.
  • Les victimes ont le principal rôle à jouer dans la définition des conditions et des orientations de l’échange.
  • L’accord mutuel a préséance sur les résultats imposés.
  • Des occasions sont fournies pour exprimer remords, pardon et réconciliation.

Les besoins et les capacités du délinquant sont pris en compte.

  • Compte tenu du fait que les délinquants eux-mêmes ont souvent subi des torts, la guérison et la réintégration reçoivent une attention particulière.
  • Les délinquants sont soutenus et traités avec respect dans le processus.
  • On limite au minimum nécessaire la mise au banc du délinquant et l’imposition de restrictions sévères.
  • La justice apprécie plus le changement personnel que le comportement docile.

Le processus de justice réparatrice appartient à la collectivité.

  • Les membres de la collectivité participent activement à rendre la justice.
  • Le processus tire parti des ressources de la collectivité, et contribue en retour à la consolider.
  • Le processus tente d’encourager les changements au sein de la collectivité afin d’empêcher que des torts semblables soient causés à d’autres, de favoriser les interventions rapides destinées à répondre aux besoins des victimes et de responsabiliser les délinquants.

Une attention est portée aux résultats, voulus ou accidentels, découlant des mesures prises pour contrer la criminalité et la victimisation.

  • Le suivi est important, car la guérison, la responsabilisation et le changement surviennent lorsque les engagements pris sont respectés.
  • Il y a équité non pas en raison de l’uniformité des résultats, mais parce qu’on a procuré l’aide nécessaire à toutes les parties et qu’on a évité la discrimination fondée sur l’origine ethnique, la condition sociale ou le sexe.
  • Les résultats principalement axés sur la dissuasion ou la neutralisation doivent constituer un dernier recours, et procéder de l’intervention la moins restrictive tout en cherchant à obtenir réparation pour toutes les parties touchées.
  • Des mesures sont prises pour éviter les conséquences non voulues telles le choix du processus de justice réparatrice à des fins coercitives ou punitives, une influence indue ur l’orientation du délinquant ou l’accroissement du contrôle social.

En outre, Zehr et Mika (1998) relèvent un certain nombre de signes indiquant que les pratiques de justice réparatrice deviennent de plus en plus courantes :

  • On met l’accent sur les torts causés par le méfait plutôt que sur les règles qui ont été enfreintes.
  • On se préoccupe autant de la victime que du délinquant, en les faisant participer tous les deux au processus de justice.
  • On cherche à obtenir réparation pour les victimes, à les habiliter et à répondre à leurs besoins tels qu’elles les perçoivent.
  • On vient en aide aux délinquants en les encourageant à comprendre, à accepter et à assumer leurs obligations.
  • On reconnaît que si les obligations imposées aux délinquants peuvent être lourdes, elles ne doivent pas viser à leur faire tort et elles doivent être réalisables.
  • On fournit les occasions appropriées permettant le dialogue, direct ou indirect, entre les victimes et les délinquants.
  • On invite la collectivité à s’intéresser au processus de justice réparatrice, et on lui donne les moyens de reconnaître les causes de la criminalité et de les corriger.
  • On encourage la collaboration et la réinsertion plutôt que la coercition et l’isolement.
  • On porte attention aux conséquences non voulues des actions et des programmes.
  • On fait preuve de respect envers toutes les parties, y compris les victimes, les délinquants et les collègues du système de justice.
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