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MISSION DES PLAINTES DU PUBLIC CONTRE LA GRC  

Loi sur la Gendarmerie royale du Canada

paragraphe 45.46(3)

Rapport final du Président suite à une audience publique

Le 26 février 1993

Plaignante  : Mme Marcella Glambeck

Nos de dossier : 2000-PCC-89212

2000-PCC-89213

TABLE DES MATIÈRES

I. Introduction

II. Rapport intérimaire

III. Avis du Commissaire de la GRC

IV. Conclusions et recommandations finales du Président

  • ANNEXE A Rapport intérimaire de la Commission ayant tenu l'audience publique

  • RAPPORT FINAL DU PRÉSIDENT À LA SUITE D'UNE AUDIENCE PUBLIQUE

    I. INTRODUCTION

    La procédure

    Le paragraphe 45.43(1) de la Loi sur la GRC prévoit que le Président de la Commission peut, s'il estime dans l'intérêt public d'agir de la sorte, convoquer une audience pour enquêter sur une plainte, que la Gendarmerie ait ou non enquêté ou produit un rapport sur la plainte ou pris quelque autre mesure à cet égard. Le Président de la Commission désigne alors les membres de la Commission qui tiendront cette audience et ceux-ci sont réputés être la Commission aux fins de l'audience. L'article 45.45 de la Loi énonce certaines des règles auxquelles sont soumises ces audiences, entre autres, le droit des témoins de se faire représenter par un avocat. À la fin de l'audience, la Commission, c'est-à-dire les membres qui ont mené l'audience, rédigent un rapport intérimaire énonçant leurs conclusions et recommandations et le transmettent au Solliciteur général, au Commissaire de la GRC, aux parties qui ont comparu à l'audience et à leurs avocats.

    Lorsqu'il reçoit le rapport intérimaire, le Commissaire de la GRC doit réviser la plainte à la lumière des conclusions et des recommandations énoncées dans celui-ci. Le Commissaire doit ensuite aviser, par écrit, le Président de la Commission de toute mesure additionnelle prise ou devant l'être quant à la plainte. S'il choisit de s'écarter des conclusions et des recommandations, il doit motiver son choix dans l'avis.

    Après avoir examiné l'avis du Commissaire, le Président de la Commission établit un rapport final énonçant les conclusions et recommandations qu'il estime indiquées et le transmet au plaignant, aux membres visés par la plainte, au Commissaire de la GRC et au Solliciteur général.

    II. RAPPORT INTÉRIMAIRE

    Rapport intérimaire et avis du Commissaire

    Dans le cas présent, le rapport intérimaire en date du 13 novembre 1992 énonçant les conclusions et les recommandations a été envoyé au Solliciteur général et au Commissaire. Ce dernier a avisé le Président des mesures qu'il comptait prendre à l'égard de la plainte dans une lettre en date du 16 décembre 1992.

    Le présent rapport constitue le rapport final du Président à l'égard de la plainte. Il contient des renseignements généraux concernant les conclusions et les recommandations finales, le rapport intérimaire qui donne un résumé de la plainte, les résultats des enquêtes de la GRC sur la plainte, des remarques générales et les conclusions et recommandations intérimaires.

    III. AVIS DU COMMISSAIRE

    Tel que l'exige le paragraphe 45.46(2) de la Loi, le Commissaire a envoyé l'avis suivant au Président de la Commission  :

    J'accuse réception, en date du 13 novembre 1992, du rapport établit par les membres de la Commission à la suite de l'audience publique tenue concernant les plaintes déposées par Mme Marcella Glambeck. Les dossiers correspondant à ces plaintes portent les numéros 2000-PCC-89212/89213 et 89G-1368.

    J'ai étudié les conclusions présentées et je vous transmets l'avis suivant, comme l'exige la Loi sur la GRC.

    Pour ce qui est de la plainte no 1, je suis heureux de constater que les membres de la Commission n'ont découvert aucune preuve susceptible d'étayer l'allégation que les sergents Michael Humphries et Richard Jordan de la GRC n'avaient pas pris tous les moyens pour réinstaller la plaignante et sa famille de façon à assurer leur sécurité.

    En ce qui concerne la plainte no 2, je vois que les membres de la Commission ont considéré comme un fait établi qu'aucun membre de la GRC n'a promis une rétribution monétaire quelconque à la plaignante.

    Dans sa répression antidrogue, la GRC sera de plus en plus appelée à réinstaller et à protéger des témoins, et à ce chapitre, elle devra prendre des mesures à la fois coûteuses et complexes. Je remarque que, pendant l'audience, on a soulevé des sujets auxquels la GRC a déjà accordé une grande réflexion. Il se peut que la GRC ait à apporter des modifications à sa politique relative au programme de protection des témoins, mais en présence de contraintes budgétaires, la mise en ouvre de ces modifications peut ne pas être aussi complète que souhaitée.

    Je compte prendre en délibéré les 21 recommandations portant sur le programme de protection des témoins, car elles ne portent pas directement sur le règlement des plaintes. Je demanderai cependant au directeur de la Police des drogues de les étudier plus avant à des fins internes.

    Je désire remercier la Commission pour ses précieux conseils et j'espère recevoir sous peu le rapport final. [Traduction]

    IV. CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS FINALES DU PRÉSIDENT

    Le comité de trois membres qui a tenu l'audience a remis un rapport intérimaire très étoffé. Ce rapport présente un examen approfondi des preuves produites à l'audience qui ont mené au rejet des plaintes par la Commission. Les membres du comité ont toutefois conclu qu'ils devaient se pencher sur les programmes touchant la réinstallation et la protection des témoins et elle a fait à leur sujet plusieurs recommandations au Ministre et au Commissaire afin qu'ils puissent les examiner et y donner suite.

    À ce chapitre, le Commissaire a indiqué que même si les recommandations ne portent pas directement sur les plaintes, il les prendra en délibéré et demandera au directeur de la Police des drogues d'en faire l'examen.

    À ce moment-ci, je désire citer la judicieuse préface des trois membres de la Commission aux 21 recommandations, préface retrouvée aux pages 100 et 101 du rapport intérimaire.

    Cela ayant été dit, nous désirons faire certaines recommandations. Nous reconnaissons que nous ne sommes pas des experts en la matière, mais nous savons que l'application de la loi, ce qui comprend la protection et la réinstallation des témoins, est une responsabilité publique qu'assume pour nous tous la GRC en sa qualité de principal corps policier à l'échelle nationale. Les avis et les recommandations que nous livrons en tant que citoyens et membres de la Commission des plaintes du public contre la GRC peuvent être d'une certaine utilité, car ils constituent un apport externe et désintéressé à cet important volet du travail policier. [Traduction]

    Même si je me réjouis des intentions du Commissaire de prendre en délibéré ces recommandations et de demander au directeur de la Police des drogues de les examiner plus avant à des fins internes, et même si je n'oublie pas les contraintes financières auxquelles est soumise la GRC, je dois néanmoins enjoindre le Commissaire de les mettre à exécution en temps opportun.

    Conformément aux dispositions du paragraphe 45.46(3) de la Loi sur la GRC, je dépose le rapport final de la Commission relativement aux plaintes de Marcella Glambeck.

    Le 26 février 1993

    Le président,

    Jean-Pierre Beaulne, c.r.

    Président

    Commission des plaintes du public de la GRC

    C.P. 3423, station D

    Ottawa (Ontario)

    K1P 6L4

    ANNEXE A 

    COMMISSION DES PLAINTES DU PUBLIC CONTRE LA

    GENDARMERIE ROYALE DU CANADA  

    Loi sur la gendarmerie royale du Canada

    Partie VII

    Paragraphe 45.45(14)  

    Audience publique

    relative aux plaintes

    de

    Marcella Glambeck  

    RAPPORT DE LA COMMISSION 

    John U. Bayly, c.r.

    Judith MacPherson

    John Wright 

     

    Le 13 novembre 1992

    À L'HONORABLE DOUG LEWIS, C.P., DÉPUTÉ, SOLLICITEUR GÉNÉRAL DU CANADA

    ET AU COMMISSAIRE NORMAN INKSTER, GENDARMERIE ROYALE DU CANADA

     Nous, les soussignés, avons été désignés le 16 juillet 1990 par le président de la Commission des plaintes du public contre la Gendarmerie royale du Canada, M. Richard Gosse, c.r., en vertu des pouvoirs que lui confère la partie VII de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada pour tenir une audience relativement aux plaintes de Marcella Glambeck.

     Nous avons l'honneur de vous présenter notre rapport conformément au paragraphe 45.45(14) de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada.

    Le tout respectueusement soumis.

     

    John U. Bayly, c.r.

    Judith F. MacPherson

    John Wright

    COMPARUTIONS

    E.A. Cronk et A.T. Little

    Fasken Campbell Godfrey

    Toronto Dominion Bank Tower

    C.P. 20

    Toronto Dominion Centre

    Toronto (Ontario) M5K 1N6

    Avocat de la Commission

     

    P. Northcott

    Avocat

    Professional Corporation

    9902 - 111e rue

    Edmonton (Alberta) T5K 1K2

    Avocat de Mme Marcela Glambeck

     

    C. Beckton et S. Frost

    Services juridiques

    Direction générale de la Gendarmerie royale du Canada

    1200, promenade Vanier

    Pièce G-225

    Ottawa (Ontario) K1A 0R2

    Avocat de l'officier compétent de la GRC

    C.D. Evans, c.r.

    Evans, Bascom

    Barristers' Chambers

    Pièce 510, Lougheed Building

    604 - 1ière rue S.O.

    Calgary (Alberta) T2P 1M6

    Avocat des membres en cause

     

    RAPPORT DU PRÉSIDENT

    RÉSUMÉ

    La Commission des plaintes du public contre la GRC a siégé à Edmonton (Alberta) du 7 janvier 1991 au 28 novembre 1992 et elle rend la décision suivante après avoir entendu la preuve relative aux deux plaintes déposées par Mme Marcella Glambeck  :

    1. il n'est pas nécessaire de déterminer si elle a la compétence nécessaire pour rendre une décision concernant la seconde plainte qui suit :

    La plaignante allègue que des membres de la GRC ont violé leur promesse de lui verser 250 000 $. [Traduction]

    La Cour fédérale d'appel a statué que la partie VII de la Loi sur la GRC ne peut s'appliquer rétrospectivement. En raison de cette décision, la Commission a étudié la preuve portant sur la plainte afin de déterminer si elle avait ou non la compétence nécessaire. Après cet examen, la Commission a conclu que les membres en cause ou tout autre membre de la GRC n'avaient jamais promis à Mme Glambeck 250 000 $ ou tout autre montant et qu'en portant ces allégations, la plaignante avait profondément lésé ces personnes.

    Il n'a pu y avoir bris de promesse, car aucune promesse de ce genre n'a été faite par les membres mis en cause ou tout autre membre de la GRC. La Commission n'a donc pas à décider si elle a ou non compétence relativement à la seconde plainte.

    2. La Commission a conclu qu'elle peut se prononcer dans le cas de la première plainte de Mme Glambeck dont voici le libellé.

    . des membres de la GRC se sont comportés d'une façon telle le 12 mai 1989 et dans les jours précédents qu'ils ont violé la promesse de la réinstaller afin de garantir sa sécurité et que ces membres comprennent les caporaux Jordan et Humphries lorsque la lettre mentionnée plus haut lui a été lue. [Traduction]

    Les faits qui motivent la plainte remontent à une date antérieure au 30 septembre 1988, mais ils existent même après cette date. Nous soutenons que cette plainte est de nature continue, et qu'à ce titre, elle n'est pas visée par une décision relative à l'effet rétrospectif.

    3. Nous concluons que la GRC, et plus particulièrement les membres mis en cause, ne se sont pas comportés d'une façon pouvant constituer un bris de promesse de réinstaller Mme Glambeck afin de garantir sa sécurité.

    Nous rejetons la première plainte contre les membres en cause. Cependant, nous avons relevé certains accrocs, et en présence de ceux-ci, il a d'abord été difficile et ensuite impossible d'assurer la protection de Mme Glambeck. La responsabilité à ce chapitre revient autant à Mme Glambeck qu'à la GRC, mais nous ne voulons pas imputer de faute à quiconque.

    La Commission a étudié et avalisé certaines des recommandations que l'avocat de la Commission lui a présentées et elle a également fait ses propres recommandations.

    Les membres de la Commission qui ont entendu la preuve désirent remercier les avocats qui ont comparu devant eux, les parties qui ont assisté à l'audience, les membres supérieurs de la GRC qui ont été présents pendant la quasi-totalité des témoignages et les sténographes judiciaires dont la patience et l'aide ont été inestimables.

    En dernier lieu, nous offrons nos plus sincères condoléances à la famille du sergent Gordon Shaw qui a été emporté par la maladie avant la fin des audiences.

    PLAINTES

    Le 29 mai 1989, Marcela Glambeck communique avec la Commission des plaintes du public contre la GRC et dépose officiellement deux plaintes. Le préposé aux plaintes, Henry Kostuck, consigne les deux plaintes et leur assigne des numéros de dossier distincts. Ces plaintes sont transmises au Commissaire de la GRC, comme l'exige les dispositions du paragraphe 45.35(3) de la Loi sur la GRC.

    La première plainte (2000.PCC.89212) se lit essentiellement comme suit  :

    . des membres de la GRC se sont comportés d'une façon telle le 12 mai 1989 et dans les jours précédents qu'ils ont violé la promesse de la réinstaller afin de garantir sa sécurité et que ces membres comprennent les caporaux Jordan et Humphries lorsque la lettre mentionnée plus haut lui a été lue. [Traduction]

    La seconde plainte (2000.PCC.89213) se lit essentiellement comme suit  :

    ... des membres de la GRC se sont comportés d'une façon telle le 12 mai 1989 et dans les jours précédents qu'ils ont violé la promesse de lui verser une somme de 250 000 $ et ces membres comprennent les caporaux Jordan et Humphries lorsque la lettre mentionnée plus haut lui a été lue. [Traduction]

    Plusieurs mois plus tard, soit le 4 décembre 1989, M. Richard Gosse, président de la Commission des plaintes du public contre la GRC, donne avis qu'une audience aura lieu et il désigne les membres de la Commission qui instruiront les deux plaintes.

    L'avis nomme les trois membres suivants de la GRC  :

    le sgt Rick Jordan

    le sgt Gordon Shaw

    le sgt Michael Humphries

    tous de la Division K à Edmonton (Alberta)

    Au 11 décembre 1989, les plaintes consignées par le préposé aux plaintes, Henry Kostuck, avaient été reformulées dans le libellé suivant retrouvé dans l'avis d'audience  :

    La plaignante allègue que des membres de la GRC ont violé leur promesse de lui verser 250 000 $ et leur promesse de la réinstaller afin de garantir sa sécurité ». [Traduction]

    Le commissaire de la GRC, Norman D. Inkster, et les trois membres nommés ont donné l'avis requis à la plaignante, Mme Marcela Glambeck.

    En juin 1990, M. Gosse donne avis qu'un membre de la Commission sera remplacé. La Commission est maintenant composée des membres suivants :

    le juge Sidney V. Legg

    Mme Rosemary Trehearne

    M. Graham Stewart

    et ceux-ci convoquent une audience pour instruire les plaintes à Edmonton en juin 1990.

    Le jour de l'audience, les membres de la Commission se déclarent inhabiles à instruire les plaintes et se désistent. Le 16 juillet 1990, M. Gosse désigne de nouveaux membres et il donne avis à la plaignante, au Commissaire de la GRC et aux membres en cause que  :

    M. John U. Bayly, c.r.

    Mme Judith MacPherson

    M. R. Barry Learmonth

    constituent maintenant la Commission.

    En raison de circonstances imprévues, M. Barry Learmonth ne peut siéger et il est remplacé par M. John Wright le 26 novembre 1990, un peu moins de 18 mois après le dépôt des plaintes. M. Gosse donne un nouvel avis de sa décision d'instruire les plaintes de Mme Glambeck. Cet avis nomme les sergents Jordan, Shaw et Michael Humphries. L'avis fait séparément renvoi aux deux plaintes et aux deux numéros de dossier, mais il les fond sous le libellé suivant  :

    La plaignante allègue que des membres de la GRC ont violé leur promesse de lui verser 250 000 $ et leur promesse de la réinstaller afin de garantir sa sécurité ». [Traduction]

    Le nouvel avis d'audience contient de nouvelles dispositions touchant l'avis et la portée de l'audience, ainsi que les responsabilités en matière de rapport des membres de la Commission que ne mentionnaient pas les avis antérieurs. Ces dispositions sont les suivantes  :

    Prenez également avis que relativement à ces plaintes, j'estime dans l'intérêt public de convoquer à ce moment-ci une audience qui sera tenue par les trois membres de la Commission nommés ci-dessus. Je confirme donc la convocation d'une telle audience en vertu du paragraphe 45.43(1) de la Loi afin que les membres de la Commission puissent faire enquête sur tous les faits se rapportant à ces plaintes, entendre les témoignages pertinents afin de veiller à une audience pleine et juste de ce dossier et fassent rapport des conclusions et des recommandations qu'ils jugent utiles. [Traduction]

    L'audience devait débuter le 7 janvier 1991 à Edmonton. La plaignante et les membres nommés ont reçu un avis de convocation et ils ont été avisés de leur droit de se faire représenter par un avocat.

    COMPÉTENCE

    Même si l'avocat pour les membres dénommés et l'avocat du membre désigné ont fait part de leurs inquiétudes au sujet du nouveau libellé des plaintes rédigé dans les termes usuels de la Commission, une démarche qui a exigé beaucoup de temps et est sujette à caution, ils n'ont pas contesté la formation de la Commission qui a convoqué l'audience du 7 janvier 1991. Ces avocats ont toutefois contesté la compétence de la Commission d'instruire les plaintes et de faire rapport à leur sujet. Ils ont prétendu d'emblée que les événements donnant lieu aux plaintes sont survenus avant la mise sur pied de la Commission. Ils ont ensuite avancé que si nous souscrivons à leur argument voulant que les événements soient survenus avant le 30 septembre 1988, nous n'avions pas la compétence nécessaire pour établir certains faits et formuler des recommandations relatives aux plaintes.

    Les décisions juridiques sur l'absence de compétence rétrospective de la Commission des plaintes du public contre la GRC sont sans équivoque. La Cour fédérale d'appel a statué récemment que la partie VII de la Loi sur la GRC ne confère aucune compétence rétrospective à la Commission.

    Cependant, l'ambiguïté persistait sur la façon dont la Commission pourrait déterminer si les plaintes étaient visées par la décision de la Cour fédérale d'appel au début de l'audience. L'avocat de la Commission et l'avocat de la plaignante nous ont enjoint d'entendre la preuve et ensuite d'établir les faits nécessaires pour trancher la question de la compétence. Nous avons acquiescé à leur requête et entendu toute la preuve. Nous en avons retiré les faits nécessaires pour déterminer si nous avons ou non la compétence nécessaire.

    LA PREMIÈRE PLAINTE 2000.PCC89212

    Faits correspondant à la compétence de la Commission relativement à la première plainte.

    La preuve déposée par tous les témoins démontre que Marcela Glambeck, son époux et leurs deux jeunes enfants ont été mis sous la protection de la GRC, réinstallés dans un motel à Edmonton et ensuite déménagés à Lethbridge en mai 1986. Lorsque les Glambeck ont quitté leur domicile, le sgt Rick Jordan a avisé Mme Glambeck qu'elle et sa famille étaient maintenant couverts par le programme de protection des témoins de la GRC, qui, à ce moment, était à l'état embryonnaire.

    La famille Glambeck est demeurée à Lethbridge jusqu'à l'été 1987. Elle a été réinstallée dans une ville de la Colombie-Britannique, qui, pour des raisons de sécurité, sera appelée « ville en Colombie-Britannique » pendant l'audience. La famille Glambeck est demeurée à cet endroit et, aux yeux de la GRC, elle a bénéficié du programme de protection des témoins jusqu'au 12 mai 1989.

    Mme Glambeck ne se plaint pas uniquement des réinstallations après que sa vie eut été menacée, mais également de la façon dont la GRC s'est chargée de sa réinstallation et de sa protection. Elle prétend que la GRC n'a pas pu garantir sa sécurité en raison de la façon dont celle-ci s'est chargée de sa réinstallation et de sa protection. Sa plainte est en somme une plainte contre la conduite continue de la police. La conduite dont il est question ici débute avant l'entrée en vigueur de la partie VII de la Loi sur la GRC et prend fin bien après le 30 septembre 1988. Nous concluons avoir compétence dans cette plainte. La conduite faisant l'objet de la plainte est une suite d'événements. La Commission peut et doit examiner du début à la fin une conduite antérieure et postérieure au 30 septembre afin de déterminer si la GRC a violé sa promesse à Mme Glambeck et à sa famille ou si la GRC n'a pas donné suite à une obligation qu'elle avait contractée lorsqu'elle avait pris les décisions menant aux risques auxquels a fait face Mme Glambeck, d'abord en tant qu'informatrice, et ensuite en tant qu'agente de police.

    Afin de pouvoir évaluer correctement et équitablement la plainte de Mme Glambeck touchant sa réinstallation, nous devons examiner la preuve portant sur les événements survenus avant le 30 septembre 1988 et établir certains faits découlant de cet examen. Certaines preuves portent sur l'état et l'évolution du programme de protection des témoins de la GRC, et d'autres, sur la connaissance qu'avait la GRC de la famille Glambeck et de l'évaluation qu'elle avait faite d'elle en vue de sa participation au programme de protection des témoins.

    Étant donné que la plainte de Mme Glambeck porte sur une période chevauchant la date d'entrée en vigueur des dispositions mettant sur pied et habilitant la Commission, nous examinerons intégralement la réinstallation et la protection. Donc, nous ne tiendrons pas uniquement compte des conclusions portant sur la période allant de mai 1986 au 30 septembre 1988 pour évaluer la conduite après le 30 septembre 1988. Nous ne croyons pas que la décision de la Cour fédérale est aussi contraignante.

    Les recommandations que nous fondons sur les conclusions découlant des événements antérieurs au 30 septembre 1988 sont prospectives et nous les voulons utiles et de nature positive.

    LA SECONDE PLAINTE 2000-PCC-89213

    Faits correspondant à la compétence de la Commission relativement à la seconde plainte.

    La Section de la lutte antidrogue de la Division K de la GRC à Edmonton a pris connaissance de l'existence de Marcela Glambeck pour la première fois au printemps ou à l'été 1985. Grâce aux informations obtenues de diverses sources de renseignements, la GRC a recueilli des preuves sur son implication dans le trafic de cocaïne.

    Forte de ces renseignements, la GRC a demandé et obtenu une autorisation d'interception des conversations téléphoniques de Mme Glambeck en vertu de la Loi sur la protection de la vie privée dont les dispositions se trouvent maintenant à l'article 185 du Code criminel. Elle a ainsi appris que Mme Glambeck et son époux étaient tous deux des revendeurs, elle, de cocaïne, et lui, de marihuana. Mme Glambeck ne semblait pas être une trafiquante de grande envergure, mais plutôt une revendeuse assidue de cocaïne. Ses fournisseurs lui cédaient des onces de drogue à crédit. Elle n'était peut-être qu'une trafiquante de la rue, mais elle avait de solides relations avec les gros trafiquants sud-américains.

    Mme Glambeck a communiqué de son propre chef avec la GRC pour lui fournir des renseignements sans même savoir qu'elle était épiée. Un ami et locataire, qui sera désormais appelé l' « héroïnomane », devait de l'argent à des membres d'un club de motards pour des achats de drogue impayés et il avait été menacé par eux.

    Marcela Glambeck a accepté de recueillir des preuves contre les motards pour le compte de la GRC. Elle a accepté, à ses risques, de porter sur elle un micro lors de sa rencontre avec les motards en question. C'est pendant l'enquête que la gendarme Carmen McKnight a appris l'existence de Mme Glambeck.

    La gendarme McKnight a présenté Marcela Glambeck et son époux aux caporaux Jordan et Smith le 30 septembre 1985 au quartier général de la Division K. (Nous utiliserons dans le rapport les grades que les membres en cause avaient au début de leur participation au dossier Glambeck.)

    M. et Mme Glambeck avaient amené leur fille d'un an à la réunion. Au début de cette rencontre, ils n'étaient manifestement pas au courant que leur ligne téléphonique était sur table d'écoute depuis des mois.

    Nous ne savons pas vraiment ce que M. et Mme Glambeck croyaient être le but de la réunion. Cependant, les intentions des caporaux Jordan et Smith étaient sans équivoque. Ils comptaient révéler au couple que la GRC était au courant de leurs activités, que leurs conversations téléphoniques avaient été interceptées en vertu d'une ordonnance d'un tribunal et qu'ils pouvaient être poursuivis, auquel cas, ils seraient probablement reconnus coupables et emprisonnés.

    Les deux policiers espéraient qu'en mettant cartes sur table, ils convaincraient Mme Glambeck de devenir informatrice de la GRC et de leur fournir des renseignements grandement nécessaires dans leur lutte contre des trafiquants de cocaïne sud-américains dans leur territoire.

    Les caporaux Jordan et Smith étaient des enquêteurs antidrogue chevronnés. Ils n'ont pas mâché leurs mots et sont allés droit au but. Ils ont peut-être, et fort probablement, exagéré la valeur de leur dossier. Ils ont laissé à M. et à Mme Glambeck la nette impression qu'ils seraient probablement poursuivis, condamnés et emprisonnés pendant plusieurs années. Les Glambeck ont alors cru qu'on leur enlèverait leurs enfants.

    La tactique a fonctionné. M. Glambeck a ressenti une telle frayeur qu'il a fait une crise d'angoisse et s'est évanoui dans les premiers instants de la réunion. La gendarme McKnight l'a escorté ainsi que sa fille à l'extérieur de la pièce.

    Marcela Glambeck ne se laisse pas impressionner aussi facilement. Élevée dans un pays totalitaire de l'Amérique du Sud, elle a rejoint, jeune, l'opposition politique au régime au pouvoir. Elle a dû trouver refuge en Argentine, où elle est demeurée dans un camp de réfugiés avant d'arriver en Amérique du Nord. Marcela Glambeck est une personne coriace et futée. Aux yeux de la gendarme Gail Secord, qui plus tard s'est donné la peine d'écouter l'histoire de sa vie, Mme Glambeck est une « survivante ».

    Mme Glambeck a rapidement saisi la situation et est allée droit au but. Elle a demandé à brûle pourpoint aux policiers ce qu'ils attendaient d'elle, ce à quoi ils ont répondu qu'elle et son époux pourraient jouir d'impunité pour leurs crimes si elle était disposée à fournir à la GRC des renseignements qui l'aiderait dans ses enquêtes sur le trafic de cocaïne et la répression antidrogue. Elle a acquiescé à leur demande pour éviter les poursuites au criminel.

    Pendant la réunion, les policiers ont indiqué à Mme Glambeck qu'ils ne voulaient pas uniquement les noms de ses contacts et complices, mais également, contre rémunération, tout autre renseignement antidrogue utile. Nous ne pouvons pas dire si des sommes ont ou non été mentionnées, mais nous concluons que ni le caporal Jordan ni le caporal Smith n'ont promis une rémunération quelconque et que des récompenses monétaires ne faisaient pas partie de l'entente entre Mme Glambeck et la GRC.

    Nous avons noté que le caporal Smith a indiqué sur la formule de recrutement qu'il a remplie le 2 octobre 1985 que la collaboration de Mme Glambeck était motivée par l'argent. Nous ne partageons pas cet avis, car le 30 septembre 1985, Mme Glambeck voulait avant tout éviter les poursuites et les sanctions auxquelles l'exposaient ses infractions.

    Les caporaux Jordan et Smith ont donné à Mme Glambeck les numéros de téléphone où les rejoindre, et presque aussitôt, elle a donné à la GRC les coordonnées des trafiquants qu'elle connaissait.

    Dans les jours qui ont suivi, Marcela Glambeck a consulté son avocat, MJohn Bassie, au sujet des preuves d'écoute électronique que prétendaient avoir les policiers. Elle lui a donné les numéros de téléphone de ses deux recruteurs. Me Bassie a confirmé ces faits pendant son témoignage devant la Commission. Une note de sa main prouve que le 2 octobre 1985, il a discuté avec Mme Glambeck de sa réunion de recrutement du 30 septembre. Nous sommes convaincus que Me Bassie a dit à Mme Glambeck au début d'octobre qu'il allait probablement de ses meilleurs intérêts de collaborer avec la GRC et de fournir à celle-ci des renseignements antidrogue.

    À la mi-octobre1985, Marcela Glambeck avait déjà commencé à fournir des renseignements très utiles sur le trafic de la cocaïne dans la région d'Edmonton. Certains de ces renseignements portaient sur une personne ciblée par une vaste opération d'infiltration de la GRC. Le 5 novembre 1985, le caporal Smith demandait 200 $ pour les remettre à Marcela Glambeck pour les informations qu'elle avait fournies.

    L'enquête s'est poursuivie et la participation de Mme Glambeck a pris de l'ampleur. Au début de décembre 1985, elle appelait des trafiquants outre-province dans le cadre d'une opération au moyen de laquelle la GRC espérait arrêter un suspect qui apporterait de la Colombie-Britannique 17 onces de cocaïne à un endroit prédéterminé à la frontière de l'Alberta.

    L'opération a échoué, car le suspect a détecté un membre de l'équipe de surveillance à Vancouver. Malgré tout, les caporaux Smith et Jordan étaient satisfaits du travail de Mme Glambeck et ils ont demandé 375 $ afin de les lui remettre pour les informations qu'elle a fournies et pour ses faux frais pendant l'enquête.

    Après la période des fêtes, les caporaux Jordan et Smith, forts des renseignements communiqués par Mme Glambeck, ont ciblé Suhail Khoury, un coiffeur connu de l'informatrice et Robert Rivas, un trafiquant de cocaïne et un de ses employés.

    Les policiers ont à nouveau demandé à Mme Glambeck de jouer un rôle important dans l'opération. Mme Glambeck a rencontré à plusieurs reprises M. Rivas et ce dernier a fini par se sentir tellement en confiance avec elle qu'il lui a fourni des renseignements utiles qu'elle a communiqués à la GRC. De plus, M. Rivas lui a proposé de la cocaïne à crédit, la pensant encore trafiquante.

    La participation de Mme Glambeck a de nouveau pris de l'ampleur. Elle a accepté de porter sur elle un magnétophone et un micro à un déjeuner avec Rivas au restaurant Sceppas. Le gendarme Dennis Travanut (appelé ci-après le gendarme Travanut) se trouvait, en tenue civile, dans le restaurant pendant la durée de la rencontre afin d'en surveiller le déroulement et de protéger Mme Glambeck . Des policiers additionnels étaient à l'extérieur du restaurant.

    Le 16 février 1986, uniquement grâce aux informations de Mme Glambeck, des policiers antidrogue de la GRC et des policiers municipaux d'Edmonton ont mis sous surveillance l'hôtel Greenbrier et ont pu arrêter trois suspects en possession d'environ 3½ livres de cocaïne.

    Pour récompenser Mme Glambeck, le caporal Jordan a demandé et obtenu l'autorisation de lui remettre un cachet. Il avait demandé 10 000 $, mais en a obtenu 9 200 $, soit 6 500 $ à titre de récompense et le reste à titre de remboursement de la somme personnelle qu'elle avait utilisée à la demande du caporal Jordan pour acheter un échantillon d'une once de cocaïne.

    Mme Glambeck a reçu ce montant à la fin de février 1986. Elle était très heureuse d'avoir été rémunérée et semblait véritablement très étonnée du montant de la récompense.

    Mme Glambeck n'a jamais remis à la GRC la drogue qu'elle avait achetée. La preuve n'indique pas si le caporal Jordan avait donné des instructions la concernant. Mme Glambeck prétend que le caporal lui avait dit de la consommer ou de la vendre, ce que nie le caporal Jordan.

    Étant donné qu'il s'agissait d'un achat contrôlé, la drogue aurait dû être remise à la police. D'après les apparences, ce n'est que quelques mois plus tard que le caporal s'est enquis de la cocaïne. En ne récupérant pas la drogue, il a commis à tout le moins une grave erreur.

    On pourrait échafauder des hypothèses intéressantes sur les instructions qu'aurait données le caporal Jordan à Mme Glambeck et ce que cette dernière a fait avec la cocaïne. Nous ne sommes pas tenus de tirer des conclusions à ce chapitre dans la détermination de notre compétence et nous n'en offrons aucune.

    Pendant tout le mois de mars 1986, Mme Glambeck a collaboré avec la GRC dans l'affaire Khoury. C'est pendant cette période que Mme Glambeck dit avoir rencontré le caporal Jordan et un autre membre de la GRC qu'elle ne peut identifier. Mme Glambeck prétend que le caporal Jordan lui a promis 250 000 $ pour sa collaboration et ses preuves à charge dans une enquête sur les trafiquants visés par l'opération contre Khoury. M. et Mme Glambeck ont témoigné que la rencontre a eu lieu dans le stationnement du centre commercial Capilano à Edmonton. M. Glambeck a dit qu'il se trouvait un peu à l'écart dans une fourgonnette et qu'il n'a pas participé à la conversation. Il a ajouté que son épouse a quitté le véhicule de police après la rencontre pour ensuite lui faire part de la bonne nouvelle.

    Le caporal Jordan ne peut dire à ce moment-ci s'il a déjà rencontré Mme Glambeck dans ce stationnement. Les manipulants de Mme Glambeck rencontraient habituellement cette dernière à bord d'un véhicule dans des stationnements à des endroits et à heures prédéterminés.

    Quoi qu'il en soit, le caporal Jordan nie avec véhémence avoir eu une conversation avec Mme Glambeck au cours de laquelle il lui aurait promis ou indiqué que 250 000 $ ou un montant particulier lui seraient versés en retour de sa collaboration et de son témoignage dans l'affaire Khoury.

    Pour établir si la Commission a ou non compétence dans la plainte relative à la prétendue promesse de rémunération en retour d'une collaboration et de témoignages, nous ne sommes pas tenus de déterminer si une telle promesse avait ou non été faite. Pour trancher, nous pourrions partir du principe que cette promesse a été faite et établir ensuite si cette prétendue promesse a ou non été violée. Si nous concluons à une prétendue violation, nous pouvons déterminer le moment de celle-ci. En présence de preuves nous permettant de conclure que la prétendue promesse avait été violée, nous pourrions établir à quel moment la violation est survenue et ensuite décider si la Commission a ou non la compétence pour instruire cette plainte.

    Nous avons envisagé cette démarche et nous l'avons rejetée. Comme l'a indiqué l'avocat de la Commission, si nous établissons qu'une promesse a été faite à Mme Glambeck, nous sommes tenus d'en faire rapport au Président de la Commission et au Commissaire de la GRC même si nous arrivons à la conclusion que la Commission n'a aucune compétence dans cette affaire.

    D'un autre côté, comme l'a également indiqué l'avocat de la Commission, la GRC, le caporal Jordan et le regretté sergent Shaw seront profondément lésés si nous établissons que le caporal Jordan n'a jamais promis à Mme Glambeck que la GRC lui verserait 250 000 $ en retour de sa collaboration et de son témoignage.

    Nous avons donc pesé les autres preuves portant sur la prétendue promesse et nous tirons les conclusions énoncées ci-après.

    Mme Glambeck a accompagné le caporal Jordan et le gendarme Travanut à Vancouver le 30 mars 1986. Elle participait à d'autres activités d'infiltration portant sur l'enquête dont il a déjà été question. Les trafiquants visés devaient prendre livraison d'une grande quantité de cocaïne dans cette ville. Mme Glambeck s'était posée en passeuse éventuelle pour une certaine quantité du stupéfiant.

    Les trafiquants n'ont pu être rencontrés. Pendant ce voyage, Mme Glambeck et le gendarme Travanut ont parlé de rétribution. Mme Glambeck nie que le gendarme Travanut a mentionné des sommes quelconque, mais elle avoue avoir insisté pour obtenir des renseignements. Nous concluons que Mme Glambeck a pressé le gendarme Travanut de lui révéler la somme qu'elle pourrait toucher. Nous concluons également qu'après autant d'instance, le gendarme Travanut lui a indiqué que les enquêteurs demanderaient entre 40 000 $ et 50 000 $.

    Mme Glambeck a aidé la police jusqu'à la fin d'avril 1986. Sa collaboration et les démarches policières dans l'affaire Khoury ont permis à la GRC d'arrêter sept personnes et de saisir environ 17 livres de cocaïne.

    À la suite des arrestations, les trafiquants de cocaïne à Edmonton ont commencé à se demander si Mme Glambeck n'était pas une informatrice. La GRC a alors commencé à craindre pour la sécurité de M. et Mme Glambeck.

    C'est à ce moment que l'on a compris que Mme Glambeck serait appelée à témoigner à l'enquête préliminaire et aux procès des inculpés. Mme Glambeck et sa famille ont été pris en charge par le programme de protection des témoins. Nous aborderons les circonstances entourant cette démarche dans une autre partie du présent rapport et de notre décision.

    Les Glambeck ont été réinstallés. Ils bénéficiaient du programme de protection des témoins depuis un certain temps, et, tandis qu'ils habitaient à Lethbridge (Alberta), Mme Glambeck a vu à l'émission « W5 » un reportage sur Leonard Mitchell, un informateur et agent de la GRC. M. Mitchell en avait contre la GRC, car celle-ci lui aurait promis une forte somme d'argent en retour de son aide et elle ne lui aurait rien versé. M. Mitchell et l'avocat torontois Robert Reuter ont négocié une entente satisfaisante et lucrative avec la GRC.

    L'émission serait le tournant décisif de la relation entre Mme Glambeck et la GRC. À compter de ce moment, elle a tenté d'obtenir de la GRC des engagements écrits sur différentes questions, entre autres, sa rémunération définitive pour l'aide qu'elle lui a apportée.

    Au printemps et au début de l'été 1987, Mme Glambeck a demandé des conseils à John Bassie, un avocat d'Edmonton, au sujet des ébauches de lettres de reconnaissance que lui avait remises la GRC, et de la rémunération qu'elle désirait obtenir.

    Me Bassie a témoigné devant la Commission et nous avons eu l'occasion de prendre connaissance des documents dans son dossier, dont ses notes manuscrites en date du 14 avril 1987, qui ont été déposés en preuve.

    Selon Me Bassie, Mme Glambeck ne lui a jamais affirmé que le caporal Jordan lui avait promis 250 000 $ ou un montant quelconque lors de la rencontre dans le stationnement du centre commercial Capilano. D'après lui et ses notes, Mme Glambeck voulait entre 160 000 $ et 250 000 $.

    Après s'être entretenu avec Mme Glambeck, Me Bassie a envoyé une lettre à la GRC au sujet de la réinstallation et de la rémunération de celle-ci. Dans cette lettre, il ne fait état d'aucune promesse portant sur un montant précis.

    Dans son témoignage, Mme Glambeck ne précise pas si elle a affirmé à Me Bassie que la GRC lui avait promis 250 000 $. Après avoir entendu tous les témoignages, nous concluons que Mme Glambeck n'a pas dit à Me Bassie que la GRC lui avait promis 250 000 $ ou tout autre somme d'argent.

    En décembre 1987, Mme Glambeck, qui avait été réinstallée en Colombie-Britannique avec sa famille dans le cadre du programme de protection des témoins, a terminé son témoignage au procès de l'un des inculpés. Le 14 décembre 1987, elle a conversé au téléphone avec le sergent Shaw, et peut-être même avec le caporal Jordan, au sujet de sa rétribution finale.

    Le sergent Shaw lui a appris à ce moment que la GRC avait consenti à lui verser 40 000 $. Elle a répondu au sergent Shaw que cela n'était pas suffisant.

    La plupart des entretiens précédents entre Mme Glambeck et le sergent Shaw au sujet d'une récompense auraient eu lieu en avril et mai 1986 lorsque les Glambeck sont entrés dans le programme de protection des témoins. Mme Glambeck prétend que le sergent Shaw lui a dit à plusieurs reprises que sa récompense irait au-delà de ses espérances et qu'elle contiendrait beaucoup de « 0 », et qu'elle et sa famille pourraient désormais se la couler douce. Le sergent Shaw ne nie pas que Mme Glambeck lui a souvent posé des questions au sujet de sa rémunération. Au cours d'un entretien qui a eu lieu en mars 1987 au sujet de sa réinstallation définitive, elle a dit vouloir acheter une maison avec sa récompense. D'après son témoignage, le sergent Shaw lui aurait répondu de ne pas se faire trop d'illusions.

    Nous écartons le témoignage de Mme Glambeck voulant que le sergent Shaw lui aurait dit que le montant de sa récompense aurait plusieurs zéros. Nous rejetons également son témoignage voulant que le sergent Shaw lui aurait dit qu'elle et sa famille pourraient désormais se la couler douce. Et, en dernier lieu, nous écartons également son témoignage selon lequel la somme irait bien au-delà de ses espérances. Nous concluons que Mme Glambeck a posé à plusieurs reprises au sergent Shaw des questions au sujet du montant de sa récompense et que ce dernier a en tout temps fait preuve de prudence et de circonspection et évité de faire des promesses.

    Beaucoup plus tard, Mme Glambeck a étalé au grand jour sa plainte et elle a été interviewée à la télévision en Colombie-Britannique le 5 janvier 1989. Au cours de l'entrevue, elle a dit à son interlocuteur que son avocat lui avait parlé de 250 000 $, une somme équitable à son avis. Mme Glambeck reconnaît avoir tenu ces propos, mais elle avoue avoir erré lorsqu'elle a dit que c'était son avocat qui avait avancé la somme de 250 000 $. Nous ne sommes pas disposés à conclure que Mme Glambeck a erré en ce qui a trait à l'origine de ce montant. Elle et son avocat, Me Bassie, ont parlé de plusieurs montants et ils ont convenu dans ces entretiens qu'une somme entre 160 000 $ et 250 000 $ serait un montant équitable et incompatible avec toute autre explication raisonnable.

    Après avoir étudié la preuve concernant la prétendue promesse, nous concluons que ni le caporal Jordan ni le sergent Shaw n'ont promis à Mme Glambeck 250 000 $ ou tout autre montant fixe en retour de sa collaboration dans l'affaire Khoury et de son témoignage contre les trafiquants. Nous écartons le témoignage de Mme Glambeck et accueillons celui du caporal Jordan et du sergent Shaw.

    Nous concluons que Mme Glambeck a inventé de toute pièce la promesse d'un montant particulier en retour de sa collaboration et de son témoignage. En agissant ainsi, elle a profondément lésé le caporal Jordan et le sergent Shaw.

    Afin d'éviter toute équivoque quant à la démarche que nous prendrions relativement à notre compétence dans cette affaire, nous avons statué au tout début, après les représentations de tous les avocats, que nous ne nous prononcerions pas sur cette question jusqu'à ce que la totalité de la preuve soit entendue. Nous avons donc attendu le dépôt de la preuve portant sur la promesse de versement d'une récompense et de la violation de celle-ci. Nous avons ensuite apprécié cette preuve et sommes arrivés à nos conclusions.

    Nous considérons comme un fait établi qu'aucun membre de la GRC n'a promis à Mme Glambeck 250 000 $ ou toute autre somme. Puisque nous concluons à une absence de promesse, nous ne pouvons établir si elle a ou non été violée.

    Nous concluons donc qu'il est inutile de déterminer si la Commission a compétence dans cette affaire. Les faits qui pourraient sous-tendre une telle décision n'existent pas et la question portant sur notre compétence ne se pose même pas.

    Nous rejetons donc la plainte sans nous prononcer sur notre compétence sur celle-ci.

    LA PREMIÈRE PLAINTE

    LES FAITS

    Comme nous l'avons indiqué plus tôt, la première plainte se lit essentiellement dans les termes suivants  :

    ... des membres de la GRC se sont comportés d'une façon telle le 12 mai 1989 et dans les jours précédents qu'ils ont violé la promesse de lui verser une somme de 250 000 $ et que ces membres comprennent les caporaux Jordan et Humphries lorsque la lettre mentionnée plus haut lui a été lue. [Traduction]

    Au 1er avril 1986, la GRC savait pertinemment que malgré sa grande utilité aux enquêteurs antidrogue de la Division K, il faudrait probablement placer Mme Glambeck et sa famille dans le programme de protection des témoins, et les réinstaller. Jusque là, Mme Glambeck n'avait été qu'une informatrice, même si elle a participé de près à certains volets de l'affaire Khoury. Lorsqu'elle a rencontré M. Roberto Rivas au restaurant Sceppas le 12 février 1986, elle avait sur elle un microphone. Le 14 février 1986, elle a acheté un échantillon d'une once de cocaïne de M. Rivas dans sa fourgonnette. Avant mars 1986, la GRC n'avait pas prévu que l'identité de Mme Glambeck en tant qu'informatrice devrait être divulguée lors des procès des trafiquants arrêtés à l'hôtel Greenbrier. À ce moment, elle n'avait pas toutes les preuves nécessaires pour fondre sur M. Rivas et ses complices.

    L'enquête sur la filière américaine impliquée dans l'affaire Khoury se poursuivait, mais entre-temps, deux éventualités se sont présentées. Premièrement, les trafiquants pourraient soupçonner que Mme Glambeck était une informatrice. Deuxièmement, la GRC aurait probablement à utiliser Mme Glambeck en tant qu'agente afin qu'elle puisse s'impliquer davantage dans l'enquête, et à divulguer son identité en la faisant témoigner contre les trafiquants de cocaïne.

    À la fin de mars 1986, le caporal Jordan, le gendarme Travanut et Mme Glambeck se sont rendus à Vancouver et se sont inscrits dans un hôtel. La GRC espérait pouvoir intercepter une grande quantité de cocaïne à la frontière canado-américaine et arrêter les comploteurs grâce en partie aux informations recueillies par Mme Glambeck.

    Dans la mesure du possible, Mme Glambeck demeurerait surtout en coulisse afin de protéger son identité. Cependant, Mme Glambeck a accepté de jouer un rôle plus important en cas de besoin afin d'assurer le succès de l'enquête. Ce rôle aurait fort probablement mené à la divulgation de son identité.

    Les enquêteurs antidrogue de la Division K ne voulaient évidemment pas que soit connue l'identité de leur informatrice. Dans un télex du 1er avril au sergent Michael Humphries, sous-officier responsable de la Section antidrogue de la GRC à Vancouver, le caporal Smith a dit nourrir les inquiétudes suivantes  :

    « 6. Dès le début de l'enquête, nous avions l'intention d'utiliser ______ d'une façon qui ne compromettrait pas son identité dans toute action en justice. Nous comptions faire appel aux dispositions de la loi sur la vie privée et obtenir de _______les informations données par Calderone et Rivas.

    Nous comptions, tel que nous l'avons indiqué plus tôt, intercepter la cocaïne à son entrée au pays et _______n'aurait pas à être à proximité de la drogue, de sorte que personne ne pourrait penser que notre source est une informatrice.

    9. Si _____ doit jouer un rôle de premier plan dans cette affaire, son identité sera fort probablement révélée. De plus, _____ sera probablement appelée à témoigner dans les procès à venir.

    10. Si l'identité de _____ est divulguée, nous devrons probablement réinstaller

    cette source et sa famille.

    11. La possibilité d'une réinstallation a été abordée à plusieurs reprises avec

    ______ et aucune objection n'a été soulevée. De plus, sa famille ne s'y oppose pas.

    12. ______ est sans emploi. Elle a deux enfants âgés de 5 et de 2 ans et un époux. La famille a des dettes s'élevant à environ 2 000 $. En cas de réinstallation, la famille voudrait probablement aller à Winnipeg, mais ce choix n'a pas encore été confirmé.

    13. Nous tenterons par tous les moyens de ne pas impliquer davantage _____ dans ce dossier, mais s'il le faut, nous ferons appel à _____ pour aider la section à trouver la cocaïne.

    14._______ se trouve actuellement dans un hôtel de Vancouver. Elle attend des instructions des responsables de l'enquête. Fin. [traduction]

    Pièce 1, p. 52-3

    Paragraphes 6, 9, 10 à14

    Aucun des policiers en cause, soit le caporal Smith, l'auteur du télex, le caporal Jordan, le principal manipulant de Mme Glambeck et le sergent Shaw, le responsable du programme de réinstallation des témoins, ne peuvent dire si des entretiens portant sur la réinstallation de la famille Glambeck ont eu lieu avant le 1er avril 1986. Le télex confirme les dires de Mme Glambeck que de telles discussions se sont déroulées avant le voyage à Vancouver avec au moins le caporal Jordan. Mme Glambeck s'est rappelée que le caporal Jordan a dit en rigolant qu'elle serait réinstallée à Winnipeg. Peu importe la portée des entretiens tenus avant avril 1986 sur la réinstallation de la famille, tous les témoins ont déclaré que dans la semaine qui a suivi le voyage à Vancouver, le sergent Shaw, le gendarme Travanut ainsi que M. et Mme Glambeck se sont rencontrés dans un hôtel aux abords d'Edmonton pour discuter de l'entrée possible de la famille Glambeck dans le programme de réinstallation des témoins.

    À ce moment, le sergent Shaw s'est enquis de la situation financière, de la santé et des choix de destination de la famille Glambeck. On a soulevé la possibilité d'une réinstallation à Toronto et on en a peut-être même discuté, car cette ville semblait être la destination de choix de la famille. Le sergent Shaw a indiqué dans son témoignage que les villes de Lethbridge et de Medicine Hat en Alberta ont aussi été mentionnées.

    Le rôle de Mme Glambeck en tant qu'informatrice et agente a pris fin lorsque sept comploteurs ont été arrêtés en possession de 15 à 17 livres de cocaïne le 30 avril 1986. Dans les jours qui ont suivi, le caporal Jordan a appris de sources de renseignements de la GRC que des trafiquants sud-américains étaient à la recherche de Mme Glambeck, car ils la soupçonnaient d'être une informatrice. D'après les renseignements, elle serait abattue si elle était découverte.

    La GRC a vite compris que la réinstallation et la protection de la famille Glambeck devaient être accélérées. Le 7 mai 1986, le caporal Jordan et le sergent Shaw ont rencontré M. et Mme Glambeck au motel Pan Am à Edmonton. Ils ont parlé du programme de réinstallation et de dispositions financières. Selon Mme Glambeck, plusieurs questions sont toutefois demeurées sans réponse.

    Quelques jours plus tard, le caporal Jordan a appelé Mme Glambeck à son domicile à l'extérieur d'Edmonton. Même si elle avait des invités à ce moment-là, il lui a dit de faire ses valises, de quitter la maison et de le rencontrer avec son époux et ses enfants dans un motel de Leduc.

    À leur arrivée au motel, le caporal Jordan les a avisés qu'ils venaient d'entrer dans le programme de réinstallation des témoins. La famille devait demeurer au motel jusqu'à ce que l'aînée finisse ses examens scolaires. Ce délai donnerait à la GRC le temps nécessaire pour organiser la réinstallation. Ce serait exagéré de dire que la GRC avait en tête un plan pour la famille Glambeck lorsque le caporal Jordan a annoncé à cette dernière qu'elle était entrée dans le « programme ». Le programme en était à ses débuts et pour reprendre les termes utilisés par le sergent Shaw dans son témoignage :

    « au tout début, on donnait à la personne un billet d'autobus et une poignée de dollars et on lui faisait nos adieux. » (Transcription, vol. 21, p. 4716). [traduction]

    Selon le sergent Shaw, le programme était en réalité un « quasi-programme » en 1986. On y mettait les dernières touches et le programme de protection des témoins tel que nous le connaissons n'a vu le jour qu'en 1988.

    C'est sous cet éclairage que nous devons lire le plan de réinstallation des Glambeck élaboré en mai 1986 (pièce 1, p. 75 et suivantes).

    Daté du 16 mai, ce plan de 11 pages manuscrites n'a été terminé que le 29 mai 1986. Dans celui-ci, le sergent Shaw a donné des précisions sur la menace pesant sur Mme Glambeck et il a avoué que celle-ci était grave. Il a informé l'inspecteur Barszczewski de la Direction de la police des drogues que les Glambeck avaient été réinstallés dans un motel de Leduc et ensuite, avant la fin de mai 1986, dans un motel de Lethbridge. Il avait pris des arrangements pour louer pour eux une maison à Lethbridge et il a été en mesure de donner à ses supérieurs des précisions sur les frais de subsistance et autres dépenses que devrait probablement engager la GRC.

    Pour le sergent Shaw, Lethbridge n'était qu'une escale sûre qui répondait aux besoins immédiats de la famille Glambeck. Il a indiqué dans son plan que celle-ci préférerait se retrouver à Toronto, mais il a précisé n'avoir pris aucun engagement en ce sens au nom de la GRC.

    Le sergent Shaw a décrit la famille Glambeck à la Direction de la police des drogues qui peu de temps après a examiné en comité le plan initial de réinstallation. Nous aborderons plus loin cet examen et les interventions de la Direction.

    Dans son plan initial, le sergent Shaw a fait le bilan de l'actif et du passif de la famille Glambeck, de leur état de santé et de leur employabilité. Il a mentionné que Bruce Glambeck était en profonde dépression. Il a ajouté que selon lui, la famille ne sera pas obligée de changer d'identité et que M. et Mme Glambeck auront plus de facilité à obtenir un emploi sous leur vraie identité.

    Au moment de terminer sa note de service, le sergent Shaw s'était déjà assuré l'aide du sergent Bruce Welke (appelé ci-après sergent Welke) du détachement de Lethbridge. Le 27 mai 1986, le sergent Welke a loué une maison pour les Glambeck et pris les mesures pour qu'elle y emménage le 2 juin 1986.

    Mme Glambeck et sa famille avaient entièrement remis leur sort entre les mains de la GRC. Ils n'ont posé que quelques questions et ils ont accepté sans mot dire le choix de la GRC. Au tout début, cette docilité nous a paru inusitée si l'on tient compte des relations houleuses qu'ont entretenues Mme Glambeck et la GRC par la suite. Cependant, après un second regard sur les rapports entre Mme Glambeck et ses manipulants du 30 septembre 1985 au 1er mai 1986, cela ne nous étonne aucunement.

    Dans ses six mois de collaboration avec la GRC, Mme Glambeck a appris à faire confiance à ses manipulants et à les apprécier. Elle a dit à la Commission que la GRC lui avait permis de refaire sa vie. Elle a décrit en termes affectueux le caporal Jordan et l'a appelé son « génie de 200 livres ». Elle aimait ce genre de travail qui mettait à l'épreuve ses moyens et son sang-froid. Elle avait l'impression d'être de l'équipe qui vivait une grande épopée.

    Lorsque la GRC n'a pu obtenir à temps l'argent nécessaire pour faire un achat contrôlé de cocaïne, Mme Glambeck a puisé dans ses épargnes pour ne pas perdre cette chance de faire avancer l'enquête. En agissant ainsi, Mme Glambeck a démontré qu'elle savait pertinemment que la GRC allait la rembourser.

    Ses manipulants en sont également venus à apprécier Mme Glambeck. Le caporal Jordan a admis qu'il aimait travailler avec elle. L'absence de suivi à l'achat contrôlé d'une once de cocaïne par Mme Glambeck le 14 avril et le défaut de ne pas saisir la drogue à des fins de preuve témoignent du climat de confiance et de la collégialité qui régnaient entre Mme Glambeck et ses manipulants.

    En mission, Mme Glambeck était protégée par ces mêmes policiers qu'elle connaissait et en qui elle avait confiance. Ils étaient en tenue civile tout près lorsqu'elle a rencontré M. Roberto Rivas au restaurant Sceppas. Ils surveillaient la fourgonnette dans laquelle elle a pesé et acheté l'once de cocaïne à la demande du caporal Jordan. Ils la rencontraient dans des voitures garées dans des stationnements d'hôtels pour n'éveiller aucun soupçon.

    Les sommes versées à Mme Glambeck étaient des récompenses officieuses et elles lui étaient (probablement) remises selon un système établi en vue d'accroître ou de maintenir son désir d'aider ses manipulants et de leur fournir des informations. Elle a été étonnée par le paiement de 9 200 $ pour les informations menant aux arrestations à l'hôtel Greenbrier. Cette somme lui a été remise sans pièce justificative ni ventilation des montants, ni au moment du versement ni plus tard. Nous ne pouvons que spéculer sur l'effet que ce geste a eu sur l'idée qu'avait Mme Glambeck de la valeur des renseignements et de l'aide qu'elle apportait à la GRC. Nous reconnaissons toutefois qu'elle était plus que jamais certaine que la GRC ne la laisserait pas tomber.

    Lorsque la famille Glambeck a dû quitter la ferme de New Serepta qu'elle louait, ce sont le caporal Jordan et le gendarme Travanut qui lui sont venus en aide. Un fait inusité et révélateur est survenu lorsque Mme Glambeck et le gendarme Travanut ont tiré à la cible avec le revolver réglementaire du gendarme. La Commission s'étonne d'un tel geste, mais elle ne veut pas se prononcer sur le caractère convenable de celui-ci. La Commission y voit néanmoins une autre preuve de la relation qui s'est nouée entre Mme Glambeck et ses manipulants.

    Mme Glambeck a appris à apprécier les policiers de la GRC avec lesquels elle collaborait, à compter sur eux et à se fier entièrement à eux. Les manipulants ont pour leur part fait d'elle leur responsabilité personnelle. Ils la traitaient comme une collègue et ils sont même allés outre les conventions manipulant-informateur habituelles lorsque les relations se sont transformées en amitié.

    Nous concluons que les Glambeck se sont réinstallés à Lethbridge en toute confiance s'attendant à ce que la GRC s'occupe d'eux dans le programme de réinstallation des témoins de la même façon qu'elle a vu à leur bien-être au cours des six mois pendant lesquels Mme Glambeck a collaboré avec ses manipulants.

    LETHBRIDGE

    Lorsqu'elle est arrivée à Lethbridge, la famille Glambeck et les intéressés à la Division K savaient que ce séjour serait de courte durée. La famille serait réinstallée définitivement après le témoignage à charge de Mme Glambeck au procès des trafiquants de cocaïne impliqués dans le dossier auquel elle avait collaboré.

    À Lethbridge, le sergent Welke et le sergent Humphries (appelé ci-après sergent Phil Humphries afin d'éviter toute confusion avec son frère, le sergent Michael Humphries qui a participé à la protection de Mme Glambeck en Colombie-Britannique) veillaient sur la famille Glambeck.

    En mai 1986, le sergent Welke était le sous-officier responsable de la SEG de Lethbridge. Le sergent Welke était un policier chevronné, mais il avait peu d'expérience dans le domaine de la répression antidrogue. Il ne s'était jamais occupé d'une source humaine réinstallée devant témoigner à un procès, et n'avait reçu aucune formation à cet effet.

    Le sergent Phil Humphries comptait plusieurs années d'expérience de la lutte antidrogue. Il avait déjà manipulé des informateurs et des agents, mais il n'avait aucune expérience ou formation relative à la manipulation de sources humaines réinstallées devant témoigner à un procès.

    Le sergent Welke avait loué une maison à la demande du sergent Shaw. Il avait à ce moment fait preuve d'initiative et d'empressement et démontré qu'il connaissait bien son milieu.

    À Lethbridge, les Glambeck ont rarement rencontré les policiers antidrogue de la Division K avec qui Mme Glambeck avait collaboré en 1985 et 1986. En juin 1986, les caporaux Jordan et Smith se sont manifestés pour passer en revue la preuve que Mme Glambeck devait déposer à l'enquête préliminaire. Les Glambeck ont rencontré par la suite le caporal Smith qui avait été chargé de la preuve dans le dossier de complot et nommé intermédiaire entre le procureur de la Couronne et les témoins.

    À la demande de Mme Glambeck, le gendarme Travanut a accepté de la rencontrer à la fin décembre 1986. Dans son témoignage, le gendarme Travanut a dit que Mme Glambeck combattait ennui et frustration. Il en a conclu qu'elle se sentait isolée et abandonnée. Il a remarqué qu'elle avait pris de l'embonpoint.

    Pour nous, cette rencontre avec le gendarme Travanut était un appel à l'aide. Que s'était-il passé au cours des six derniers mois pour que cette personne débordant de confiance en elle et pleine de ressources demande sympathie et aide au gendarme Travanut?

    La GRC avait réinstallé les Glambeck temporairement à Lethbridge, car ils n'y connaissaient personne. Les chances qu'on les reconnaisse dans cette ville étaient minces. De plus, la GRC les avait invités à se faire tout petit, ce qu'ils ont fait. Au début, la GRC ne les avait pas encouragés à se chercher un emploi. Lorsque le sergent Shaw leur a suggéré en juillet 1986 d'encourager M. et Mme Glambeck à se trouver un emploi, les sergents Welke et Phil Humphries n'ont pas immédiatement transmis le message aux Glambeck.

    Dans les jours qui ont suivi l'arrivée de la famille Glambeck à Lethbridge, Mme Glambeck a rapporté à ses manipulants dans cette ville que son époux s'était enfui à la suite d'une querelle et qu'elle craignait qu'il attente à sa vie. Plus tard le même jour, elle les a appelés pour leur annoncer son retour. Aucun suivi ne semble avoir été donné à cet incident, même si dans son plan de réinstallation, le sergent Shaw avait noté que M. Glambeck était en proie à une profonde dépression.

    C'est à Lethbridge que Mme Glambeck s'est heurtée pour la première fois à la bureaucratie de la GRC. Elle a constaté que faire réparer un réfrigérateur ou approuver une facture de services médicaux ou dentaires n'était pas une mince affaire, même si les montants étaient peu élevés. Les retards la frustraient et elle s'ennuyait des jours où une personne à la Division K s'occupait de ces menus détails ou lui remettait de l'argent plus officieusement et promptement.

    Nous ne prétendons pas que la GRC évitait de payer régulièrement la famille Glambeck. Les sergents Welke et Humphries lui remettaient régulièrement et ponctuellement en espèces la somme de 350 $ par semaine qui avait été prévue pour sa subsistance.

    Les manipulants ne savaient pas ce que la famille Glambeck faisait avec cet argent. Mme Glambeck a avoué à la Commission qu'elle et son époux donnaient certainement l'impression d'être dépensiers.

    Au tout début, le sergent Shaw ne voyait pas l'utilité de donner aux Glambeck une nouvelle identité.

    L'inspecteur Chester Kary n'était pas du même avis et les Glambeck devaient soit accepter une nouvelle identité ou perdre la protection de la GRC. Les Glambeck ont choisi de nouveaux noms avec l'aide de la GRC.

    Cette démarche était prudente et appropriée, mais non sans problèmes pour les Glambeck et la GRC. Au début, vivre sous un nouveau nom n'est pas chose facile et on s'attendait à ce que l'aînée, qui était alors en troisième année, éprouve des difficultés que les autres ne connaîtraient pas. Pour ces raisons, les Glambeck ne voulaient pas prendre une nouvelle identité avant la fin de l'année scolaire de 1986. Le plus gros hic était que les Glambeck ne possédaient pas les pièces d'identité que la plupart des Canadiens ont habituellement sur eux et montrent sur demande à des étrangers ou aux autorités.

    Ils n'avaient que leurs anciens numéros d'assurance sociale les identifiant comme M. et Mme Glambeck et sans nouveaux NAS, ils ne pouvaient s'inscrire à un centre de main-d'ouvre du Canada ni fournir à un employeur les renseignements dont il a besoin pour retenir à la source les impôts ainsi que les contributions de l'employé à l'assurance-chômage et au régime de pensions du Canada.

    M. et Mme Glambeck avaient encore leurs anciens permis de conduire et ce n'est que le 11 mars 1987 qu'ils en ont reçus de nouveaux du sergent Shaw.

    Même si les Glambeck n'avaient pas encore toutes leurs pièces d'identité, ils ont commencé à utiliser leurs noms d'emprunt et à s'y habituer. Ils avaient chacun leur nouvelle carte d'assurance-maladie et Mme Glambeck a acheté des médicaments sur ordonnance en utilisant son nom d'emprunt.

    Un fâcheux incident est survenu en octobre 1986 lors de l'audience préliminaire d'un des comploteurs. En réponse à une question posée en contre-interrogatoire, Mme Glambeck a sorti de sa bourse une bouteille de comprimés et l'avocat de la défense avait apparemment pu lire son nom d'emprunt. Cet incident a angoissé Mme Glambeck et la GRC, qui pendant un certain temps, ont envisagé donner à la famille une autre identité.

    La GRC savait que M. Glambeck était un camionneur et le sergent Shaw était conscient que c'était là son seul métier. M. Glambeck aurait probablement pu se trouver un emploi temporaire comme camionneur pendant la saison des récoltes, mais nous considérons qu'il n'aurait sans doute jamais pu être camionneur à temps plein sans permis de conduire sous son nom d'emprunt.

    M. et Mme Glambeck étaient furieux et frustrés parce que la GRC n'a pas pu leur fournir au moment opportun les deux documents essentiels à leur nouvelle identité. Nous étions alors en octobre 1986, et à ce moment, même le sergent Welke avait de la difficulté à expliquer le retard. Le sergent Welke a abordé le sujet dans une note de service adressée, en octobre, au sergent McLeod, le supérieur du sergent Shaw. Avant la première moitié de décembre 1986, Mme Glambeck s'était plainte à plusieurs reprises au sergent Shaw que la GRC tardait à leur faire parvenir une carte d'assurance sociale. Le 10 décembre 1986, elle a imputé à ce retard l'impossibilité de se trouver un emploi. Elle s'est également dite inquiète de la tension mentale que six mois d'inactivité exerçaient sur elle et sa famille. Dans une note adressée au sergent Shaw le 9 janvier 1987, le sergent Welke s'est dit convaincu que la GRC avait laissé Mme Glambeck dans une situation délicate en ne lui fournissant pas les pièces d'identité appropriées. La Commission est du même avis.

    Dans sa note, le sergent Welke a mentionné que selon Mme Glambeck, elle et son époux pouvaient difficilement fonctionner sans pièces d'identité. La GRC aurait dû le savoir puisque c'est elle qui a insisté pour que les Glambeck adoptent une nouvelle identité pour des raisons de sécurité.

    Malheureusement, le sergent Shaw s'est senti visé personnellement par les commentaires du sergent Welke. Il était troublé et se demandait si les sergents Shaw et Phil Humphries avait perdu leur objectivité. Pendant un moment, il a envisagé confier les Glambeck à d'autres manipulants.

    Pour ce qui est des pièces d'identité, la responsabilité à ce chapitre a été assumée par la Direction de la police des drogues lorsque le 18 juin 1986, le surintendant principal Stamler a approuvé la recommandation du comité réuni pour étudier le plan de réinstallation initial proposé le 16 mai par le sergent Shaw. Toutefois, pour que ce plan soit mis en branle, les Glambeck devaient accepter une nouvelle identité. La Division K a été chargée d'obtenir les nouvelles pièces. Le plan approuvé pour la première réinstallation contient le paragraphe suivant  :

    La Division K s'est opposée à la réinstallation à Toronto. La ville de Lethbridge est donc leur dernière destination. Ce déménagement suffira si la famille change de nom. Les démarches à cette fin peuvent être faites en toute sécurité par la Division K. [Traduction]

    Recommandations du comité

    2. La famille doit se donner une nouvelle identité ou signer une déclaration indiquant qu'une nouvelle identité n'est pas nécessaire.

    Pièce 1, p. 107 (l'accent est de nous)

    La Division K a échoué dans sa tâche en ne remettant pas à la famille Glambeck leurs nouvelles pièces d'identité au moment opportun. Nous ne jetons le blâme sur aucun des policiers nommés, mais il s'agit d'une faute très grave pour laquelle la Commission n'a reçu aucune explication satisfaisante.

    À la fin de novembre 1986, Mme Glambeck, qui perdait rapidement confiance en la GRC, a vu le reportage à W5 dont il a été question plus tôt.

    M. et Mme Glambeck ont parlé de ce reportage sur Mitchell et ils sont arrivés à la conclusion que leur cas n'était pas étranger au sien. Mme Glambeck a aussitôt appelé un de ses manipulants et elle a insisté pour parler au sergent Shaw. Dans son témoignage, Mme Glambeck a dit à la Commission qu'elle avait appelé Me Reuter qui l'a avisée d'obtenir une promesse ou confirmation écrite de la GRC. Elle a fait part aux sergents Welke et Shaw de ses inquiétudes touchant sa sécurité et les pièces d'identité. Elle a également posé au sergent Shaw des questions au sujet de sa rémunération. Tôt après, elle a demandé et obtenu la rencontre avec le gendarme Travanut dont nous avons parlé plus tôt.

    Mme Glambeck a fait de l'obtention de cette promesse ou confirmation sa résolution du Nouvel an de 1987. En même temps, les Glambeck n'ont pas cessé de presser la GRC pour de nouvelles pièces d'identité. De plus, Mme Glambeck, par l'intermédiaire de son avocat, Me John Bassie, a tenté de savoir quel montant lui verserait la GRC pour son aide. Elle a aussi demandé que la GRC signe une déclaration indiquant les mesures de protection élaborées.

    Dans son témoignage, l'inspecteur Kary a indiqué que les intéressés à la Direction générale de la GRC à Ottawa voulaient également une confirmation écrite des mesures de protection dont faisait l'objet la famille Glambeck.

    Le 25 février 1986, le sergent Shaw a envoyé au sergent Welke et au sergent Phil Humphries une lettre d'entente qui s'inspirait d'une formule normalisée élaborée auparavant par la GRC. Les manipulants des Glambeck leur ont montré la lettre le 26 février. Ni le sergent Shaw ni ses supérieurs n'ont fait part du but de la lettre aux manipulants. MmeGlambeck a indiqué à ces derniers que certaines conditions ne lui plaisaient pas et elle a refusé de signer la lettre.

    Son refus n'a rien de surprenant. Les dispositions de la lettre n'étaient qu'une confirmation des paiements qui avaient été prévus et versés. De plus, la lettre précisait les gestes qui pourraient mener au retrait des mesures de protection. La lettre prévoyait également ce qui suit  :

    (d) la Gendarmerie royale du Canada fera sans délai enquête sur tout acte criminel commis antérieurement ou postérieurement et déposera au besoin des accusations au criminel. (Pièce 1, p. 135) [Traduction]

    La GRC pouvait et devait donc faire enquête sur les délits antérieurs de Mme Glambeck et déposer des accusations. Au cours d'une réunion tenue le 26 février 1987, Mme Glambeck a accusé la GRC de ne pas respecter ses promesses, sans pour autant motiver ses prétentions. Nous concluons que Mme Glambeck parlait de l'engagement pris par le caporal Jordan et le caporal Smith le 30 septembre 1985 prévoyant qu'elle ne serait pas poursuivie pour ses transactions de drogue à l'été 1985 si elle acceptait d'être informatrice pour la GRC. Elle a menacé de ne pas témoigner au procès de l'un des comploteurs. Elle a demandé une confirmation écrite des intentions de la GRC à son égard. Elle a dit à ses manipulants qu'elle s'entretiendrait avec Me Bassie au sujet de la lettre.

    Les notes conservées par les manipulants à Lethbridge indiquent que lorsque le sergent Shaw a appris que Mme Glambeck pourrait refuser de collaborer, il a dit qu'il envisagerait de la retirer du programme. Nous comprenons donc pourquoi Mme Glambeck a demandé des garanties écrites.

    Vers la fin de février 1987, le sergent Shaw savait qu'il était aux prises avec un problème qui s'aggravait. En mars, il a pris des arrangements afin que les Glambeck viennent à Edmonton par avion. Lors de la réunion du 11 mars 1987, le sergent Shaw avait les nouveaux permis de conduire des Glambeck. Il les leur a remis et leur a montré la nouvelle lettre d'entente qui contenait une modification majeure, dont voici le libellé  :

    1(d) ... aucune accusation ne sera déposée contre moi relativement à l'enquête en raison de laquelle j'ai été réinstallée. (Pièce 1, p. 144) [Traduction]

    Nous concluons que la GRC a ajouté cette phrase afin d'empêcher le dépôt d'accusations contre Mme Glambeck pour ses activités antérieures au 30 septembre 1985 et à l'égard desquelles la GRC avait recueilli des preuves d'écoute électronique au printemps et à l'été de la même année.

    Mme Glambeck a avisé le sergent Shaw qu'elle ne signerait pas la lettre avant que son avocat, Me Bassie, n'en prenne connaissance. La réunion terminée, le sergent Shaw était encore convaincu que les Glambeck pourraient plus tard venir hanter la GRC. Pendant la réunion, Mme Glambeck a encore une fois parlé d'argent et elle voulait connaître le montant de sa récompense. Elle a fait part de son désir de s'acheter une maison et c'est à ce moment que le sergent Shaw lui a dit de ne pas se faire trop d'illusions.

    Malgré la discorde qui s'était installée et avait grandi entre eux et la GRC depuis leur entrée dans le programme de réinstallation des témoins, les Glambeck sont retournés à Lethbridge plus optimistes et satisfaits que jamais. La nouvelle lettre d'entente et les permis de conduire les ont convaincus que la GRC s'affairait à terminer les démarches en vue de leur donner une nouvelle identité.

    De son côté, le sergent Shaw était encore perturbé par la réunion du 11 mars 1987. Le 13 mars, il a écrit aux manipulants à Lethbridge les avisant de la détérioration des relations avec Mme Glambeck, et il leur a demandé de prendre des notes sur toute conversation portant sur des sujets épineux.

    Le sergent Shaw a demandé à la Direction générale à Ottawa l'autorisation de verser les paiements de subsistance jusqu'à mai 1987. Même si l'autorisation donnée par le surintendant principal Stamler le 18 juin 1986 avait pris fin le 30 novembre 1986, la GRC avait continué de verser les paiements.

    Le 20 mars 1987, le caporal Jordan a rédigé une proposition de récompense au nom de Mme Glambeck. Il a mentionné à la Commission qu'il avait recommandé une somme de 40 000 $ sans demander conseil à ses collègues. Cependant, le sergent Shaw a révisé la proposition avant qu'elle ne soit acheminée à Ottawa.

    Dans sa proposition, le caporal Jordan a fait des remarques élogieuses au sujet de la collaboration de Mme Glambeck. Il a parlé des risques auxquels elle s'est exposée et des inconvénients que l'enquête a apportés à sa famille. Il a souligné à ses supérieurs que la preuve qu'a déposée Mme Glambeck à l'enquête préliminaire était probante et qu'elle avait permis l'envoi en prison des comploteurs.

    Le caporal Jordan a rédigé et présenté sa proposition en même temps que Mme Glambeck et son avocat s'enquéraient du montant de la récompense. Nous ne voyons aucun lien entre ces deux démarches et nous ne croyons pas que la rédaction et la soumission de la proposition soient reliées de quelque façon aux inquiétudes grandissantes que nourrissait le sergent Shaw relativement aux Glambeck et à leur sécurité.

    De plus, nous sommes convaincus que Mme Glambeck n'a pas laissé son mécontentement envers la GRC relativement à différents sujets influer sur son témoignage ou sur la preuve qu'elle a déposée lors de l'enquête préliminaire.

    PART DE LA DIRECTION DE LA POLICE DES DROGUES

    Pendant qu'ils bénéficiaient du programme de protection des témoins, les Glambeck ne savaient pas que des officiers supérieurs de la Police des drogues étaient au courant du dossier et participaient aux décisions relatives à leur protection et réinstallation. L'inspecteur Chester Kary, l'officier responsable des infiltrations et des sources (groupe qui est devenu plus tard la Section de l'infiltration et des sources) à la Police des drogues a commencé à s'occuper du dossier en mai 1986. Après avoir pris connaissance du plan initial du sergent Shaw, il a demandé à l'inspecteur Richard Barszczewski, l'officier responsable de la protection des sources et des témoins à Ottawa, de l'informer du contenu et des recommandations du plan.

    Le plan n'inspirait pas une entière confiance à l'inspecteur Kary. Il se demandait si on pouvait assurer la sécurité des Glambeck si la famille s'installait en Alberta, ne changeait pas d'identité et si Mme Glambeck devait se trouver un emploi.

    La note d'information qu'avait demandée l'inspecteur Kary avait en fait été rédigée par le caporal S.N. Braun et c'est sur cette dernière que s'est appuyée la recommandation de réinstallation soumise à l'examen d'un comité d'officiers supérieurs à la Direction générale à la demande du surintendant principal Stamler de la Police des drogues.

    Le 18 juin 1986, le comité a étudié le plan de réinstallation recommandé par le caporal S.N. Brown. L'inspecteur Kary a témoigné devant la Commission. Il était le secrétaire du comité. L'inspecteur Barczczewski et le surintendant Pouliot ont également comparu devant la Commission. Ils ne siégeaient pas au comité, mais ils ont tous deux pris connaissance des recommandations tôt après qu'elles eurent été adoptées.

    C'est ce comité qui a approuvé le plan initial de réinstallation du sergent Shaw prévoyant  :

    1. l'accord des Glambeck d'assumer une nouvelle identité ou de remettre à la GRC une renonciation signée s'ils refusaient;

    2. le versement de frais de subsistance et le remboursement de dépenses de réinstallation pendant six mois jusqu'au 30 novembre 1986. [Traduction]

    Il nous semble évident que les officiers supérieurs à la Direction générale de la GRC se fiaient aux renseignements de la Division K dans leur examen du plan initial. En effet, ils ont retenu ce qui suit  :

    1. M. et Mme Glambeck étaient disposés à travailler;

    2. Mme Glambeck s'opposait quelque peu à un changement de nom en raison des problèmes que pourrait éprouver sa fille d'âge scolaire.

    Ce qui est plus difficile à savoir, c'est comment le comité d'examen à la Direction générale en est venu à considérer Lethbridge comme la ville de réinstallation définitive. Dans son témoignage, l'inspecteur Kary nous a appris qu'une seule réinstallation extraterritoriale est préférable pour trois raisons. D'abord, elle coûte moins cher, ensuite, elle perturbe moins la vie du témoin et de sa famille, et enfin elle offre une plus grande sécurité. Nous souscrivons à cette explication.

    Mme Glambeck préférerait cependant Toronto. Le sergent Shaw ne lui a fait aucune promesse en ce sens, mais a mentionné ce désir dans son plan initial de réinstallation.

    Dans sa note d'information du 12 juin au comité, le caporal Brown a recommandé que les Glambeck soient réinstallés définitivement à Lethbridge (pièce 1, p. 103). Le même jour, l'inspecteur Kary aurait appelé le sergent Shaw, le coordonnateur divisionnaire de la réinstallation des témoins. D'après la note de service de l'inspecteur Kary, écrite au bas de la note d'information du caporal Brown, le sergent Shaw a expliqué ce qui suit  :

    Le déménagement à Lethbridge est la seule et unique réinstallation demandée. (pièce 1, p. 103) [Traduction]

    Le procès-verbal de la réunion reflète l'impression de l'inspecteur Kary.

    La Division K s'est opposée a la réinstallation à Toronto. La ville de Lethbridge est donc leur dernière destination. Ce déménagement suffira si la famille change de nom. Les démarches à cette fin peuvent être faites en toute sécurité par la Division K. (Pièce 1, p. 107) [Traduction].

    Dans sa note du 12 juin, l'inspecteur Kary mentionne que le sergent Shaw l'a avisé que les Glambeck avaient décidé de demeurer à Lethbridge. Son témoignage n'est cependant pas aussi catégorique. L'inspecteur Kary a témoigné que le sergent Shaw ne faisait que donner suite aux décisions de la Direction générale concernant la réinstallation, d'abord à Lethbridge, et un an plus tard, en Colombie-Britannique. La preuve ne nous révèle pas qui, en juin 1986, a décidé que les Glambeck étaient à Lethbridge pour y demeurer.

    Cela dit, il est évident que la GRC a pris la décision sans consulter les Glambeck et nous concluons que tel a été le cas. Selon le sergent Shaw, Mme Glambeck a pu croire, malgré les décisions qui avaient déjà été prises même à la fin de l'été 1987, qu'elle et sa famille seraient réinstallées à Toronto. Nous concluons que personne n'a avisé M. Glambeck et Mme Glambeck, ni les manipulants à Lethbridge, le sergent Welke et le sergent Phil Humphries, que Lethbridge était la destination définitive. Nous concluons également que les Glambeck ont continué de croire, comme le leur avait dit la GRC, qu'une destination finale serait choisie et qu'un déménagement définitif serait effectué après l'enquête préliminaire.

    Contrairement aux officiers supérieurs de la GRC, les Glambeck ne pensaient pas que le déménagement à Lethbridge était permanent. De ce malentendu sont nés entre eux une méfiance et une mésentente grandissante, ce qui a compliqué les interventions de la GRC en vue d'assurer la sécurité des Glambeck.

    La GRC aurait dû faire part aux Glambeck de la décision prise le 18 juin quant à leur réinstallation, mais personne ne l'a fait. Nous ne retenons pas l'avis de l'inspecteur Kary que cette démarche appartenait au sergent Shaw en sa qualité de coordonnateur divisionnaire. La Police des drogues à Ottawa devait veiller à ce que le sergent Shaw ou toute autre personne responsable avise les Glambeck. La Police des drogues a pu croire que les Glambeck avaient avalisé le choix, cependant personne à la Direction générale ne s'en est assuré. Ce manquement a mené à l'envenimement des relations entre la GRC et les Glambeck. Même si cette erreur n'a pas miné la sécurité des Glambeck, elle n'a pas facilité la tâche des manipulants. De plus, suite à cette erreur, les Glambeck étaient encore moins disposés à agir d'une façon qui aiderait la GRC à assurer leur sécurité à long terme.

     

    Mme Glambeck a indiqué à la Commission qu'elle n'a pas déposé sa plainte parce que la GRC n'avait pas réinstallé sa famille définitivement à Toronto. Elle nous a dit qu'elle savait au printemps de 1987 que la GRC avait rejeté ce choix. Nous concluons qu'elle a accepté cette décision à contrecour et qu'elle a insisté pour que la GRC réinstalle sa famille ailleurs qu'en Alberta. Nous concluons également que les Glambeck ont proposé une ville de leur choix (la ville en Colombie-Britannique).

    Nous voyons un lien entre le projet de réinstallation en Colombie-Britannique élaboré en mai 1987 et la divulgation accidentelle de la nouvelle identité de Mme Glambeck à l'enquête préliminaire d'octobre 1986, mais nous ne croyons pas que cette divulgation constitue le seul ou principal motif de l'approbation de la réinstallation à l'été 1987.

    D'abord, plus de neuf mois s'étaient écoulés depuis, et ensuite les relations entre Mme Glambeck et la GRC étaient houleuses. Nous sommes portés à penser que la réinstallation en Colombie-Britannique constituait pour tous une possibilité de recommencer à neuf. Nous félicitons la GRC d'avoir saisi cette occasion.

    LA VILLE EN COLOMBIE-BRITANNIQUE

    À la fin de mai 1987, la Division K a envoyé à la Direction générale un plan de réinstallation des Glambeck dans la ville en Colombie-Britannique. Le plan a été approuvé un mois plus tard. Le sergent Michael Humphries, un policier chevronné possédant une expérience de la lutte antidrogue, s'est vu confier la tâche d'aider les Glambeck à se trouver une maison et à s'établir dans cette ville. Le sergent Michael Humphries est plus tard devenu le principal manipulant de Mme Glambeck ainsi que sa personne-ressource en cas d'urgence. Le sergent Michael Humphries est l'un des policiers mis en cause dans cette audience.

    Les deux manipulants à Lethbridge, le sergent Phil Humphries et le sergent Welke ont offert peu de renseignements généraux à leurs collègues. Le sergent Welke a tout au plus dit au sergent Michael Humphries que les Glambeck étaient dépensiers. Il ne semble pas avoir relaté les problèmes et les frustrations éprouvés au cours des dernières années par les Glambeck et leurs manipulants.

    La Commission s'étonne du silence du sergent Shaw et des manipulants à Lethbridge. De plus, elle remarque que les manipulants dans cette ville de la Colombie-Britannique n'ont pas cherché à connaître les motifs de la réinstallation ni à se renseigner sur les personnes dont ils avaient la charge. Cette absence de curiosité est d'autant plus surprenante puisque les sergent Phil et Michael Humphries sont des frères, et qu'avant sa mutation à la ville en Colombie-Britannique, le sergent Michael Humphries était affecté à la Section de la lutte antidrogue de Vancouver, la même section qui avait collaboré à l'enquête dans l'affaire Khoury. Le sergent Michael Humphries était l'un des policiers qui avaient saisi l'envoi de 15 à 17 livres de cocaïne et arrêté Rosa Echeverria, une des trafiquantes contre qui Mme Glambeck témoignait.

    Le sergent Michael Humphries était bien placé pour obtenir des renseignements pertinents. En y regardant de plus près, les manipulants en Colombie-Britannique auraient eu besoin de ces informations pour s'occuper de Mme Glambeck et de sa famille.

    Nous constatons que le sergent Michael Humphries a été dès le départ bienveillant et utile. Avant l'arrivée des Glambeck, il a envoyé à ces derniers un exemplaire du quotidien de l'endroit afin qu'ils puissent consulter les annonces de maison à louer. Il leur a suggéré de se rendre sur place avant leur déménagement afin qu'ils puissent eux-mêmes s'occuper du bail. À leur arrivée, le sergent Michael Humphries leur a remis une carte de la ville.

    Au début, les Glambeck étaient démoralisés, car il n'y avait pas beaucoup de choix pour une famille avec enfants et animaux. Mme Glambeck a toutefois trouvé en moins de 24 heures une maison qui lui convenait. Le bail était de 12 mois et le loyer, 620 $ par mois, soit 20 $ de plus que le montant autorisé par la Direction générale de la GRC. Le sergent Michael Humphries l'a priée d'attendre une journée avant de signer le bail afin de lui donner le temps de faire approuver le loyer. Mme Glambeck n'a pas tenu compte de cette requête, et pour ne pas rater une telle occasion, elle a signé le bail et dit à la GRC qu'elle suppléerait au montant si cela s'avérait nécessaire.

    Pendant les premiers mois, les Glambeck se plaisaient en Colombie-Britannique. Ils semblaient bien s'entendre avec leurs manipulants, le sergent Michael Humphries et le caporal Ken Doll, qui était le « payeur » pour le compte de la GRC. Au tout début, il y a eu des malentendus au sujet des dépenses de réinstallation, mais ceux-ci étant peu importants, ils ont été réglés à la satisfaction de tous.

    À Lethbridge, les manipulants de la GRC réglaient le loyer et les comptes pour les services publics. En Colombie-Britannique, Mme Glambeck se chargeait de cette tâche, ce qui veut dire qu'elle recevait les fonds et payait les dépenses ménagères.

    Le caporal Doll semblait être la personne indiquée pour s'occuper des besoins courants de Mme Glambeck et composer avec ses demandes démesurées de paiement d'autres dépenses. Il était flegmatique et impartial. Ce choix était judicieux et nous en félicitons la GRC et surtout le sergent Michael Humphries.

    Mme Glambeck a parlé de sa rémunération définitive à deux ou trois reprises avec ses manipulants en Colombie-Britannique entre le 1er août 1987, date du déménagement en Colombie-Britannique, et le 4 décembre, date du retour de Mme Glambeck à Edmonton pour témoigner contre les cocomploteurs.

    Le sergent Michael Humphries s'est rappelé une de ces conversations qui a eu lieu le 31 août. Mme Glambeck a, à ce moment, mentionné son avocat et le mutisme de la GRC au sujet de sa rémunération définitive.

    Le caporal Doll a dit à la Commission que Mme Glambeck l'avait appelé deux fois vers la fin de février - une fois pour lui indiquer qu'elle avait entendu dire qu'elle ne recevrait rien et une fois pour lui mentionner qu'elle avait conversé avec le sergent Shaw. Dans son premier appel, Mme Glambeck a dit au caporal Doll qu'elle envisageait étaler au grand public ses revendications et ses griefs contre la GRC.

    Pendant ces conversations, Mme Glambeck n'a jamais dit que la GRC lui avait promis une somme de 250 000 $ ou tout autre montant. Elle a elle-même avoué dans son témoignage en interrogation principale qu'elle avait peut-être abordé le sujet avec ses manipulants en Colombie-Britannique, mais qu'elle n'en avait pas la certitude. Nous concluons, toute preuve entendue, que Mme Glambeck n'a pas parlé de la prétendue promesse à ses manipulants en Colombie-Britannique à ces occasions.

    Pendant l'été et l'automne 1987, Mme Glambeck n'a pas travaillé et n'aurait pas cherché un emploi. Elle aurait travaillé pendant une journée comme cueilleuse saisonnière de fruits, mais rien de plus. Le sergent Shaw ou la Direction générale de la GRC ne semblent pas avoir donné aux manipulants en Colombie-Britannique des directives pour qu'ils enjoignent les Glambeck à se trouver un emploi rémunérateur.

    À une date quelconque en octobre 1987, Mme Glambeck a mentionné à ses manipulants qu'elle pensait ouvrir un atelier d'art ou un comptoir de fournitures artistiques. Dans son rapport de suivi rédigé le 25 et le 26 octobre, le sergent Michael Humphries a noté que Mme Glambeck lui avait dit qu'elle avait consulté un conseiller en activités commerciales et que ce dernier l'avait avisée de faire exécuter une étude de marché à un coût approximatif de 400 $. À cette fin, Mme Glambeck a demandé une avance sur sa récompense définitive par l'intermédiaire du sergent Michael Humphries.

    Le lendemain, le sergent Michael Humphries a appelé le sergent Shaw pour lui faire part de la requête de Mme Glambeck, mais la preuve semble indiquer qu'il aurait invité Mme Glambeck à patienter jusqu'à ce qu'elle ait témoigné au cas où elle ne voudrait plus vivre en permanence en Colombie-Britannique. (Pièce 1, p. 244).

    Le sergent Shaw a fait suivre la requête de Mme Glambeck à la Direction de la police des drogues. Plus tard, la Direction a informé le sergent Shaw que d'après l'avis juridique qu'elle a reçu, l'avance en question conviendrait à la règle établie dans l'affaire Palmer. Cette affaire est la jurisprudence dont s'inspire la règle voulant que la preuve déposée par un témoin qui a reçu ou savait qu'il recevrait une récompense monétaire en retour de son « témoignage » serait viciée, car le juge ou le jury pourrait en tirer des inférences défavorables.

    La règle a depuis été modifiée et cela veut dire que nos remarques sur cette question ne seront pas très utiles. Cependant, certains faits nous laissent un peu songeurs. En effet, la GRC était disposée à imputer au poste budgétaire « Dépenses de réinstallation » une somme maximale de 10 000 $ et à remettre celle-ci à Mme Glambeck afin qu'elle puisse se lancer dans le commerce de la viande. Quelques semaines plus tard, le sergent Shaw avait de son propre chef remis à Mme Glambeck une avance de 200 $ afin qu'elle puisse s'acheter des vêtements convenant à une agente de la GRC à la barre des témoins. Nous concluons donc que la GRC peut, lorsqu'elle le désire, trouver et justifier des façons de remettre de l'argent à des témoins réinstallés.

    En revanche, la GRC ne semble pas avoir beaucoup fait pour encourager ou aider Mme Glambeck à ouvrir son atelier d'art. En bout de ligne, la GRC aurait sans doute pu recouvrer l'avance de 400 $ en puisant dans la récompense définitive ou en ayant recours à tout autre moyen légitime. Mme Glambeck aurait probablement regagné la population active plus rapidement si l'avance lui avait été remise. Au lieu de trouver des moyens de lui fournir aide et encouragement, la GRC, et plus précisément le sergent Shaw et le sergent Michael Humphries, lui auraient conseillé d'attendre jusqu'à ce qu'elle ait témoigné.

    Comme nous l'avons indiqué plus tôt, il est revenu au caporal Doll de faire part à Mme Glambeck que l'avance en vue de mener l'étude de marché lui avait été refusée. C'est pendant cette conversation du 30 octobre 1987 que Mme Glambeck a dit douter qu'elle recevrait une récompense définitive et menacé d'étaler l'affaire au grand jour. (Pièce 1, p. 249).

    Mme Glambeck s'est rendue à Edmonton dans les jours qui ont précédé son témoignage dans le premier procès pour complot et elle y a reçu la protection de la GRC. C'est pour cette occasion que le sergent Shaw lui avait remis 200 $ afin qu'elle puisse s'acheter les vêtements dont elle prétendait avoir besoin pour avoir une tenue convenable au tribunal.

    Mme Glambeck a terminé son témoignage le 14 décembre 1987. Le sergent Shaw l'a appelée en soirée à l'hôtel pour lui dire qu'elle recevrait 40 000 $. Elle a avisé le sergent Shaw qu'elle refusait cette somme. Mme Glambeck a dit à la Commission qu'elle était bouleversée et nous la croyons.

    Dans son témoignage, Mme Glambeck nous a dit que le sergent Shaw l'avait avisée qu'elle serait retirée du programme de protection des témoins si elle refusait la somme. Nous n'avons trouvé aucune autre preuve en ce sens. Peu importe ce qu'a pu dire le sergent Shaw pendant cette conservation téléphonique, nous concluons que la GRC n'avait aucune intention réelle ou prévue de retirer Mme Glambeck du programme de protection des témoins en décembre 1987.

    Avant de quitter la table des témoins, le sergent Shaw a reconnu que les conversations téléphoniques qu'il a eues avec Mme Glambeck le 14 décembre 1987 étaient houleuses. Il lui a dit qu'elle était auparavant une trafiquante de drogue et qu'elle n'avait jamais eu la vie si belle que depuis qu'elle est sous la protection de la GRC. Il a indiqué à la Commission que Mme Glambeck lui a fermé la ligne au nez.

    Après sa conversation téléphonique avec le sergent Shaw, Mme Glambeck a dit à ses gardes du corps qu'elle voulait se rendre au cabinet de son avocat, Me Bassie. Les deux policiers en service l'y ont accompagnée. Me Bassie était absent ce jour-là et elle a rencontré son adjointe, Michelle Reeves. Mme Reeves a rédigé un compte rendu de leur conversation qui a été déposé en preuve. Dans ce compte rendu, elle dit que le sergent Shaw l'a avisée que Mme Glambeck serait encore rémunérée, qu'elle avait reçu les sommes qui lui étaient dues au 18 décembre 1987 et qu'elle pourrait recevoir d'autres paiements à l'avenir.

    Les gardes du corps du quart de jour ont reconduit Mme Glambeck à son hôtel. Ils sont demeurés sur place jusqu'à ce qu'ils soient remplacés à 20 h. Un de ces gardes du quart de jour, la gendarme Gail Secord, avait été affectée à la sécurité de Mme Glambeck pendant le procès. La Commission a constaté que Mme Glambeck s'était confiée à la gendarme, qui a vu chez elle des qualités qu'elle a aimées et admirées. Selon la gendarme Secord, Mme Glambeck est une survivante. Aux yeux de la Commission, la gendarme Secord est, de tous les membres de la GRC, celle qui a été la plus perspicace. Nous avons constaté qu'elle avait un excellent souvenir de cet épisode et dans les moments où son témoignage et celui de Mme Glambeck ont divergé, nous avons accueilli celui de la gendarme, le croyant plus complet et exact.

    Mme Glambeck a dit à la Commission que le caporal Jordan l'avait appelée après son retour à l'hôtel. Cet appel l'avait bouleversée et la conversation n'était pas amicale. Elle a ajouté que les membres de la GRC se trouvant dans sa chambre ont entendu cette conversation. Elle a dit qu'elle savait que la GRC cessait de la protéger et elle a supplié les gardes du corps de ne pas l'abandonner. Elle a terminé en disant qu'un des gardes du corps, le gendarme Les Kjemhus, avait accepté de rester sur place jusqu'à ce que son époux vienne la chercher. M. Glambeck a livré un témoignage identique devant la Commission.

    La gendarme Secord a témoigné au sujet des événements survenus en après-midi et en début de soirée le 14 décembre 1987. Selon elle, Mme Glambeck ne semblait aucunement perturbée après son témoignage et aucun membre ne l'a appelée à l'hôtel après son retour du cabinet de Me Bassie. La gendarme a ajouté qu'elle n'avait aucun motif de croire que Mme Glambeck perdrait ses gardes du corps pendant son séjour à Edmonton et qu'elle et son collègue, le gendarme Rex Brasnett ont terminé leur quart à 20 h et ont été remplacés par le caporal Les Kjehmus.

    Après avoir entendu la preuve de M. et Mme Glambeck et de la gendarme Secord, et après avoir pris connaissance de la preuve écrite des gendarmes Brasnett et Kjehmus qui a été déposée avec le consentement de toutes les parties, nous concluons que la GRC n'a agi d'aucune façon, les 14 et 15 décembre 1987, pouvant laisser croire que la sécurité de Mme Glambeck, de son époux et de sa famille était compromise ou menacée.

    LE TÉMOIGNAGE DU SERGENT SHAW

    Le témoignage du sergent Shaw en réponse aux questions de l'avocat de la Commission a dû être ajourné à ce stade-ci. Nous espérions reprendre et terminer son interrogatoire plus tard, mais sa santé s'est vite détériorée et il est décédé avant que nous n'en ayons eu l'occasion. Nous avons retenu que le sergent Shaw n'a pas été interrogé par son avocat ou contre-interrogé par l'avocat de la plaignante et l'avocat de l'officier désigné. Nous convenons que l'avocat de la Commission lui a posé des questions directes d'une façon qui aurait pu laisser croire à un contre-interrogatoire et que les autres parties n'ont pas eu l'occasion de lui poser des questions sur ce qu'il savait de cette affaire et sur les documents sous sa signature se trouvant dans le dossier.

    Suite à l'examen de la preuve, nous concluons que les témoignages des autres parties et la volumineuse preuve documentaire corroborent en grande partie son témoignage. Dans cet examen, et surtout en ce qui a trait aux événements survenus après le 14 décembre 1987, nous avons pris en compte le fait que le souvenir du sergent Shaw et les documents sous sa signature dans le dossier n'ont jamais été soumis à notre appréciation. Nous nous sommes donc assurés avant tout que les faits découlant de la preuve du sergent Shaw sont corroborés par d'autres preuves crédibles et que son témoignage a fait l'objet d'un contre-interrogatoire satisfaisant par notre avocat lorsque nous avons retenu sa preuve non corroborée au lieu de celle d'autres témoins.

    LA VILLE EN COLOMBIE-BRITANNIQUE - DU 29 DÉCEMBRE 1987 AU 12 MAI 1989

    Les Glambeck seraient retournés en Colombie-Britannique un peu après Noël. Tôt après, Mme Glambeck a relaté à ses manipulants des incidents qui lui auraient fait craindre pour sa sécurité. Tissés dans ces plaintes sont le mécontentement, la rancour et la colère qui étaient encore plus manifestes et qui ont dénaturé la relation entre Mme Glambeck et la GRC. Ses manipulants, le sergent Michael Humphries et le caporal Doll ont essuyé cette rancour et cette colère. Le caporal Doll a été imperturbable et il a encaissé, au nom de la GRC, les invectives de Mme Glambeck. Par contre, le sergent Michael Humphries était plus sensible et il a semblé être blessé par les propos, les accusations et plus particulièrement par la plainte officielle de Mme Glambeck.

    À la fin de décembre, Mme Glambeck a signalé à ses manipulants que son automobile avait pris feu. Elle a ensuite dit au sergent Michael Humphries qu'elle soupçonnait une main criminelle.

    Le sergent Michael Humphries a pris les soupçons de Mme Glambeck très au sérieux. Il a demandé au service des incendies de trouver la cause de l'incident. Une main criminelle n'était pas en jeu. Le sergent Michael Humphries a trouvé un moyen de transport pour les Glambeck et pendant un certain temps ceux-ci ont utilisé un véhicule de remplacement fourni par la GRC. Il croyait que les Glambeck commençaient à abuser de la GRC disant que celle-ci cédait à leurs moindres désirs. Il semblait nourrir à ce moment une opinion peu favorable des Glambeck, mais cela ne l'a pas empêché de veiller à leur sécurité. De plus, il n'a ni consigné ni rapporté que l'attitude et la collaboration des Glambeck semblaient changer. Pour être juste, nous pouvons dire après coup qu'un changement n'était probablement pas perceptible au début de l'année 1988.

    Tandis que le caporal Doll remettait à Mme Glambeck son allocation le 18 janvier 1988, cette dernière lui a indiqué que rien n'allait rondement, qu'elle avait appelé le premier ministre et qu'elle allait étaler son histoire au grand jour. Le caporal Doll avait déjà entendu les doléances de Mme Glambeck et il n'y a pas porté attention.

    À la mi-février 1988, Mme Glambeck a dit avoir reçu un appel de menaces le 13 février. Elle a dit à ses manipulants que son interlocuteur lui avait dit, en anglais :

    « Je connais ton adresse et nous allons te faire un mauvais parti » [Traduction]

    Elle a ajouté que son interlocuteur lui a ensuite dit en espagnol :

    « Tu ne seras jamais en sécurité. Tu ne pourras pas te cacher. » [Traduction]

    Selon Mme Glambeck, une autre personne a ensuite ri et crié au téléphone tandis que d'autres personnes en arrière plan parlaient en espagnol. Mme Glambeck a dit à ses manipulants que son interlocuteur était peut-être Roberto Rivas.

    Les manipulants de Mme Glambeck ont pris cet incident au sérieux. Ils ont fait changer le numéro de téléphone de Mme Glambeck et lui ont dit de ne le donner à personne. Ils ont fait vérifier les registres téléphoniques afin de connaître la provenance de l'appel. Ils ont avisé le sergent Shaw qui a son tour a mis l'inspecteur Kary au courant de l'incident.

    Des policiers de la Division K ont interviewé Roberto Rivas le 24 février 1988. Il a dit ne pas être l'auteur de cet appel. Ils ont pris des mesures afin de faire vérifier sa note de téléphone. Rivas avait été emprisonné, mais le jour de l'appel, il n'était pas au pénitencier.

    Après toutes ces démarches, cet appel demeurait un mystère. Nous avons examiné les faits entourant cet incident et nous sommes d'avis que la GRC a déployé tous les efforts possibles afin de garantir la sécurité de Mme Glambeck et de sa famille.

    L'inspecteur Kary à la Direction de la police des drogues à Ottawa avait des doutes sur cet incident. Il avait récemment indiqué à l'avocat de Mme Glambeck que la GRC s'en tenait à une récompense de 40 000 $ et il croyait que ce prétendu appel n'était qu'une tactique de négociation. Même s'il nourrissait des soupçons, l'inspecteur Kary a demandé par écrit au sergent Shaw quelles mesures avaient été prises pour établir la véracité de la menace et pour s'occuper de la plainte de Mme Glambeck. L'inspecteur Kary a fait état de ses soupçons et demandé ces renseignements dans une note de service adressée le 16 février 1988 au commandant de la Division K, à l'attention du service divisionnaire de la police criminelle.

    Nous ne pouvons affirmer si l'inspecteur Kary a fait part de ses soupçons au sergent Shaw. Quoi qu'il en soit, il a adressé la demande suivante aux manipulants dans un télex envoyé le 16 février 1992.

    « Veuillez faire enquête sur la menace reçue par la plaignante [Mme Glambeck] afin de savoir si l'appel est réel ou fictif. Demandez à la plaignante [Mme Glambeck] de faire une déclaration et tentez d'en établir la véracité ou la fausseté. Si vous concluez que la menace est réelle, des mesures devront être prises. » [Traduction]

    Pièce 2, pages 308 et 305

    L'inspecteur Kary a peut-être semé un doute qui a ensuite gagné les manipulants en Colombie-Britannique. Ces manipulants ont cru, du moins jusqu'au 19 février 1992, à l'authenticité de l'appel.

    Mis à part les soupçons concernant l'authenticité de l'appel, nous n'avons été saisis d'aucune preuve voulant que l'inspecteur Kary ou toute autre personne à la GRC ait pu croire que la plainte (si elle était fallacieuse) était motivée par le mécontentement, la méfiance, l'aversion ou tout autre sentiment qui, s'ils persistaient, pourraient soulever des problèmes pour la GRC et miner sa capacité de protéger adéquatement Mme Glambeck et sa famille. Comme nous l'avons signalé plus tôt, la preuve connue en février 1988 ne semblait pas justifier l'échafaudage de telles hypothèses. À ce moment, les policiers n'auraient pu faire ce nous avons fait rétrospectivement, c'est-à-dire trouver un lien entre la plainte relative à d'incendie criminel du 29 décembre 1987 et l'appel de menaces du 13 février 1988.

    L'avocat de Mme Glambeck, Me Reuter, et la GRC sont arrivés à une entente vers la fin de février 1988. Mme Glambeck pourrait accepter la récompense de 40 000 $ sans porter atteinte à ses droits juridiques. Elle a reçu deux avances de 1 000 $, une à la fin février et l'autre le 4 mars 1988.

    Dans leurs témoignages, le caporal Doll et le sergent Michael Humphries ont dit qu'ils avaient rappelé à Mme Glambeck de ne pas dépenser trop rapidement son argent et de le mettre plutôt en banque afin qu'elle puisse en retirer des intérêts jusqu'à ce qu'elle décide de la meilleure façon d'en disposer. M. et Mme Glambeck nient tous deux avoir reçu un tel conseil. Quoi qu'il en soit, nous pensons que ce prétendu conseil était bien pauvre et nous concluons que la GRC n'a offert à Mme Glambeck aucun conseil éclairé sur la façon d'utiliser judicieusement sa récompense.

    Cela ayant été dit, pourquoi la GRC serait-elle tenue de donner des conseils financiers aux personnes à qui elle verse une récompense? La Commission est d'avis que la GRC n'est aucunement tenue de le faire.

    Nous nous sommes demandé s'il existe une différence dans une situation où :

    a. la personne a été réinstallée dans une autre ville pour sa propre protection;

    b. la personne a démontré qu'elle était dépensière;

    c. la personne avait déjà demandé de l'aide et des conseils en vue d'ouvrir un commerce;

    d. l'usage à bon ou mauvais escient de l'argent peut empêcher la GRC de protéger adéquatement la personne si elle demeure dans le programme de protection des témoins.

    Nous sommes d'avis que la GRC ne devrait pas être tenue d'aider une personne à qui elle a versé une récompense à obtenir des conseils financiers ou commerciaux avisés. Si la personne en fait la demande, la GRC devrait lui offrir de trouver pour elle ces conseillers. La GRC devrait être tenue de faire une telle offre seulement lorsque l'usage à bon ou à mauvais escient peut nuire aux mesures qu'elle a prises pour assurer la sécurité de la personne.

    Mme Glambeck s'est acheté une nouvelle voiture, de l'équipements pour son commerce et elle a fait des améliorations locatives au local qu'elle avait loué. Lorsqu'elle a reçu sa récompense, Mme Glambeck ne semblait pas intéressée à recevoir des conseils financiers de quiconque.

    La Commission a entendu à huis clos des témoignages sur le genre de commerce qu'avait ouvert Mme Glambeck. Nous n'en ferons pas une description dans le présent rapport de peur d'identifier indirectement la ville en Colombie-Britannique et de compromettre la sécurité de Mme Glambeck.

    Mme Glambeck n'a vécu que pour son commerce pendant un certain temps. Elle en a fait la promotion et elle a même été interviewée par un reporter. Le reportage s'est retrouvé dans un quotidien avec une photo de Mme Glambeck. Elle a également accordé une entrevue qui a été diffusée à la radio et où on peut entendre sa voix particulière et son accent espagnol.

    Les manipulants de Mme Glambeck étaient inquiets après ces deux incidents. La ville en Colombie-Britannique n'était pas un endroit isolé et le sergent Michael Humphries nourrissait des inquiétudes légitimes quant à la sécurité de Mme Glambeck, et il lui a conseillé de ne pas se mettre trop en évidence.

    Les craintes sont d'autant plus légitimes lorsqu'on les associe aux menaces que signalait Mme Glambeck à ses manipulants.

    Le 20 juillet 1988, un mois avant son entrevue avec le quotidien, Mme Glambeck a signalé un second appel de menaces à ses manipulants. Elle a dit que son interlocuteur était une femme et que celle-ci l'a rejointe à son commerce. Elle a ajouté que l'appelante avait utilisé son nouveau nom et lui avait dit  :

    «  __________ , nous savons où tu es et on va te tuer. » [Traduction]

    Elle n'a pas reconnu la voix de son interlocutrice.

    Le sergent Michael Humphries a signalé l'incident au coordonnateur des témoins de la Colombie-Britannique et la GRC a relié la ligne téléphonique de Mme Glambeck à un dépisteur capable d'identifier l'origine de tout appel arrivant en Colombie-Britannique.

    Le lendemain, Mme Glambeck s'est ravisée et elle a dit au sergent Michael Humphries que son interlocutrice avait utilisé son ancien nom.

    À ce moment, le sergent Michael Humphries n'a pas porté de jugement à savoir si l'appel était réel ou fictif. Il ne s'est d'ailleurs pas prononcé lorsqu'il a signalé à ses supérieurs que Mme Glambeck s'était ravisée.

    Le rapport sur l'appel de menaces a fait rapidement son chemin. À la fin de la journée du 20 juillet 1988, il était entre les mains du commandant de la Division E. Le lendemain midi, le surintendant Pouliot de la Police des drogues était déjà au courant.

    Même si les échelons supérieurs de la GRC doutaient de l'authenticité de l'appel, comme en fait foi la correspondance déposée en preuve, ils ont ordonné sans délai qu'une enquête soit menée et que des mesures de sécurité soient prises. Rien dans le dossier ne nous indique que la GRC a omis de prendre les mesures qui s'imposaient pour assurer la sécurité de Mme Glambeck et de sa famille.

    Dans son témoignage, Mme Glambeck s'est dite satisfaite des mesures prises par la GRC pour mener l'enquête sur l'incident du 20 juillet 1988. Elle n'a jamais prétendu qu'elle aurait dû être réinstallée afin d'assurer sa sécurité. Nous sommes d'accord avec Mme Glambeck. Nous sommes convaincus que l'appel n'aurait pu motiver une autre réinstallation afin d'assurer sa sécurité et celle de sa famille.

    À la fin du mois de juillet 1988, les officiers supérieurs dans les divisions E et K et à la Direction générale à Ottawa croyaient de plus en plus que les plaintes de Mme Glambeck étaient issues de son mécontentement à l'égard de sa récompense et de son amertume envers la GRC. Le surintendant principal Holmes notait ce qui suit dans son message du 20 juillet à l'officier responsable des ORD de la Division E  :

    « 3. ___________ a donné du fil à retordre à ses manipulants dans le passé et tout indique qu'elle continuera de le faire .

    4. Même après une autre réinstallation, ________ ne mettra pas fin à ses revendications financières et pourra quand même faire l'objet de menaces réelles ou perçues compte tenu de ses antécédents. [Traduction]

    Pièce 2, page 354

    Jusqu'à ce moment-ci, personne n'a cherché à établir si la nature manipulatrice de Mme Glambeck ajoutée à son mécontentement auraient pu entraîner ou accroître les difficultés découlant de sa réinstallation en Colombie-Britannique dans le but de garantir sa sécurité.

    Le surintendant principal Homes prévoyait une période orageuse comme en témoigne le paragraphe 5 de sa note de service.

    « 5. Je suis d'avis que la Gendarmerie devra à un moment donné refuser de fournir toute autre aide. Cette décision peut déplaire aux personnes en cause, mais autant régler le problème immédiatement avant qu'il ne se transforme en confrontation. » [Traduction]

    Pièce 2, page 355

    Le 29 juillet 1988 à 9 h, Mme Glambeck a appelé le bureau sous-divisionnaire de la GRC se trouvant dans la ville en Colombie-Britannique pour lui faire part qu'une personne avait glissé une note de menaces dans la fente à lettres de son commerce.  Le sergent Michael Humphries n'était pas en service à ce moment. Mme Glambeck prétend que le sergent Michael Humphries a mis près de six heures avant de réagir. Nous ne sommes pas d'accord, puisque la preuve du sergent Michael Humphries et les notes qu'il a prises à ce moment prouvent le contraire. Le sergent Michael Humphries a pris connaissance du rapport de Mme Glambeck à 9 h 30 et il y a donné suite dans un délai raisonnable. Dans l'heure qui a suivi, il s'est rendu au bureau sous-divisionnaire pour y cueillir le caporal Fergus Rodine et ils se sont tous deux rendus au commerce de Mme Glambeck. Il a saisi la note à 10 h 30.

    La note était rédigée à l'aide de gros titres de journaux collés sur une feuille de papier blanc. Elle se lisait ainsi  :

    MARCELA YOU WILL DIE SOON (Marcela tu ne vivras pas longtemps) [Traduction]

    Mme Glambeck a dû être traumatisée par cette note à moins que celle-ci ne fut fictive, une hypothèse à laquelle allait souscrire plus tard la GRC. Dans une telle situation éprouvante, nous croyons qu'un délai d'une heure entre la découverte de la menace et l'arrivée de la police peut sembler être une éternité.

    Nous ne pouvons réprimander le sergent Michael Humphries pour avoir mis une heure pour se rendre au commerce de Mme Glambeck. Nous ne sommes pas d'avis que l'enquête qu'il a amorcée et coordonnée était de qualité inférieure. Nous considérons comme un fait établi que le sergent Michael Humphries a fait part à Mme Glambeck de ses doutes concernant l'authenticité de la note.

    Nous sommes d'avis que Mme Glambeck en avait contre le sergent Michael Humphries non pas parce qu'il avait mis une heure pour se rendre à son commerce, mais plutôt parce qu'il lui a avoué ses doutes.

    Le sergent Michael Humphries a demandé aux Glambeck de se soumettre à un examen polygraphique, requête à laquelle ils ont d'abord acquiescé. Ils ont ensuite refusé après avoir parlé à leur avocat en Colombie-Britannique, Me B. Mackinnon. Nous ne tirons aucune conclusion de ce refus. Certains avocats s'opposent à ces tests dans tous les cas pour une foule de raisons. Il n'en demeure pas moins que les Glambeck étaient et sont demeurés des suspects dans cet incident.

    Après s'être occupé de la note de menaces, le sergent Michael Humphries a étudié dans leur ensemble les plaintes des Glambeck. Il doutait de leur authenticité. Étaient-elles fausses? Les Glambeck les fabriquaient-elles de toutes pièces? Il a constaté que le commerce des Glambeck était en difficulté. Il a commencé à croire que les plaintes étaient fausses et que les Glambeck cherchaient à attirer l'attention sur eux. Il croyait que si elles étaient fausses, les plaintes étaient l'assise d'autres revendications. Il ne pensait pas à ce moment que les Glambeck utilisaient ces plaintes pour demander une autre réinstallation.

    La ville en Colombie-Britannique n'a pas comblé toutes les attentes des Glambeck, comme en témoigne des incidents survenus plus tôt. Dans une conversation téléphonique qu'elle a eue avec le caporal Doll avant l'appel de menaces, Mme Glambeck a dit que la ville en Colombie-Britannique était un endroit mort. Le caporal a dit à la Commission dans son témoignage  :

    « ... je crois qu'elle pensait que la ville était trop tranquille, qu'il n'y avait pas assez d'action. » [Traduction]

    Transcription, pages 6605-6.

    Le caporal Doll a également dit à la Commission qu'entre le 9 novembre 1987 et le 19 juillet 1988, il avait refusé à trois ou quatre reprises d'utiliser les renseignements que lui avait fournis Mme Glambeck afin de ne pas mettre en péril sa sécurité. Il a tenté de lui expliquer qu'elle n'était plus tenue de fournir à la GRC le genre de renseignements qu'elle lui confiait auparavant.

    « Je lui ai indiqué que nous n'étions pas intéressés aux renseignements qu'elle nous donnait. Nous voulions garantir sa sécurité dans la ville où nous étions et les renseignements qu'elle avait fournis auraient pu compromettre sa sécurité. Je n'ai pas demandé de tels renseignements et je ne leur ai jamais donné de suivi. » [Traduction]

    Transcription pages 6639-40

    En gros, Mme Glambeck, qui avait commencé une nouvelle vie grâce à ses manipulants de la Division K à Edmonton, s'est fait dire que la GRC n'avait plus besoin d'elle.

    Le caporal Doll est demeuré le confident de Mme Glambeck. C'est à lui qu'elle a avoué les problèmes psychiatriques de son époux. L'épouse du caporal Doll étant une infirmière, il aurait pu faire des recherches discrètes en son nom pour trouver un bon psychiatre (Transcription 6606).

    La Commission déplore que personne n'ait réuni les éléments sur lesquels le sergent Michael Humphries fondait son hypothèse à la fin du mois de juillet et les remarques du caporal afin de les examiner et de les évaluer dans le but d'aider la GRC à prêter aux Glambeck une assistance qui aurait facilité leur acclimatation dans la nouvelle ville en Colombie-Britannique et la prise de mesures en vue de garantir leur sécurité. Nous présumons que les manipulants et le coordonnateur de la protection des témoins n'avaient aucun protocole pour le regroupement et l'examen des remarques sur les témoins réinstallés.

    Le commerce des Glambeck battait encore plus de l'aile à l'automne 1988 et au début de l'hiver 1989, et leur situation financière était très précaire. Les entrevues et les photographies dans les journaux n'étaient que le prélude. En 1988, les entrevues avec la presse n'étaient qu'un moyen d'annoncer son commerce. En janvier 1989, Mme Glambeck a commencé à se servir de la presse pour étaler ses malheurs et le prétendu traitement injuste que sa famille subissait aux mains de la GRC. Ces manouvres ont mis en péril sa sécurité et celle de sa famille. Les risques qu'elle a courus étaient énormes si les menaces qu'elle avait signalées étaient véridiques.

    Le 5 janvier 1989, Mme Glambeck a donné une entrevue au réseau BCTV et elle a fait connaître la nature et les fondements de ses griefs. Son visage et sa voix avaient été déguisés, mais tous les téléspectateurs pouvaient comprendre qu'elle habitait en Colombie-Britannique en raison du caractère régional de l'entrevue.

    À la fin du mois de février 1989, le commerce de Mme Glambeck agonisait. Les agents de recouvrement frappaient à la porte. Elle a dit à ce moment au sergent Michael Humphries qu'elle révélerait au grand public qu'elle était dans le programme de protection des témoins si elle était traînée devant les tribunaux par ses créanciers. Il lui a dit de penser d'abord à sa sécurité et il a avisé ses supérieurs à la Direction générale à Ottawa.

    L'inspecteur Barszczewski a indiqué que Mme Glambeck était insouciante et qu'elle manipulait la GRC. Nous concluons que Mme Glambeck a tenté de manipuler la GRC dans la plupart de ses rapports avec elle. Cela dit, aucune des preuves qui nous ont été soumises nous démontre que la GRC a tenté d'aider les Glambeck dans cette difficile situation (dont ils sont responsables parce qu'ils ne pouvaient gérer leur commerce) et d'éliminer les risques à la sécurité que ce désespoir pourrait aggraver.

    Le 5 mai 1989, la confrontation que le surintendant principal Holmes avait prévue en juillet 1988 est survenue. Mme Glambeck a appelé le sergent Michael Humphries et lui a dit ne pas avoir assez d'argent pour payer l'épicerie et le loyer. Elle a dit que quelqu'un la surveillait et a menacé de se suicider devant le poste de police après avoir fait une déclaration à la presse.

    Le sergent Michael Humphries a communiqué avec ses supérieurs et une rencontre avec Mme Glambeck a été prévue pour le 12 mai 1989 dans un hôtel de la ville en Colombie-Britannique. Y assistaient Mme Glambeck, le caporal Jordan et le caporal Dobrowolski, le coordonnateur du programme de protection des témoins. Avant la réunion, la GRC a élaboré une proposition de règlement officiel et définitif en cinq points à l'intention de Mme Glambeck.

    La rencontre a été enregistrée et nous avons pu en lire la transcription. Certaines portions de la bande étaient inaudibles. Le teneur de cette rencontre nous apprend que la relation entre Mme Glambeck et la GRC s'était détériorée.

    La position que les policiers de la GRC devaient faire connaître à Mme Glambeck le 12 mai 1989 est la suivante  :

    1. ___________ doit savoir sans équivoque que la GRC ne lui remettra plus d'argent pour sa collaboration aux enquêtes à Edmonton.

    2. Sauf en présence de preuves indiquant le contraire, la ville en Colombie-Britannique est sécuritaire et aucune autre réinstallation n'est prévue à ce moment-ci.

    3. ___________ et ses personnes à charge ne recevront aucun autre paiement de subsistance, peu importe leur situation financière.

    4. La GRC est disposée à aider __________ à obtenir tous les services offerts aux Canadiens en général si elle éprouve des difficultés à cet égard en raison de la réinstallation et du changement de nom. Il faudrait inciter _________ à obtenir des services financiers, des services psychologiques, etc. dans les meilleurs délais.

    5. La GRC continuera d'affecter en permanence des personnes-ressources afin d'enquêter sur toute menace et de prendre les mesures nécessaires pour garantir sa sécurité dans la ville où elle est actuellement réinstallée. [Traduction]

    Pièce 2, pages 477-8

    En plus de faire connaître les intentions de la GRC, le caporal Doll a demandé à Mme Glambeck certains renseignements et lui a fait remplir un formulaire afin d'obtenir pour elle des titres de voyage sous son nouveau nom.

    Mme Glambeck était bouleversée durant le rencontre. Elle a encore une fois menacé de révéler son histoire au grand public. Elle a également menacé de se suicider, mais avec moins d'insistance cette fois-ci. Les policiers et surtout le caporal Jordan l'ont enjoint de se remettre au travail.

    Nous concluons que le 12 mai 1989, la GRC, et plus précisément le sergent Michael Humphries, n'ont pas retiré la protection offerte à Mme Glambeck ou compromis sa sécurité. Nous concluons que le refus de la GRC de réinstaller à nouveau Mme Glambeck à cette date ou dans les jours la précédant ne constitue pas une omission pouvant miner sa sécurité.

    Dans les jours et les mois qui ont suivi la rencontre du 12 mai 1989, la GRC a offert à Mme Glambeck une protection dans la mesure où elle l'acceptait et y contribuait de moins en moins.

    Au fil des mois, Mme Glambeck et son époux se faisaient connaître de plus en plus du public. Ils ont donné des entrevues et ils ont amorcé une marche de protestation à travers le pays. Ils ont manifesté devant la Chambre des communes en portant une cagoule faite d'un sac en papier. Ils ont fait part de leurs doléances à des députés. Dans une entrevue, Mme Glambeck a donné le nom de l'un de ses manipulants, en l'occurrence le sergent Michael Humphries.

    Les Glambeck se faisaient de plus en plus connaître et la GRC éprouvait des difficultés grandissantes à assurer leur sécurité. La protection d'une personne exige une collaboration entre elle et l'organisme chargé de la protection, et dans ce cas-ci, Mme Glambeck a cessé graduellement, et plus précisément après le 12 mai 1989, de collaborer.

    Quant à savoir si le sergent Michael Humphries a fait ou omis de faire quoi que ce soit en vue de réinstaller Mme Glambeck dans le but d'assurer sa sécurité, nous sommes convaincus qu'il a fait preuve du comportement et du professionnalisme exemplaires que le public attend de la GRC et qu'il n'a à aucun moment mis en péril la sécurité de Mme Glambeck et de sa famille.

    Le 29 mai 1989, Mme Glambeck a appelé le sergent Michael Humphries sur le chemin du retour d'un voyage qu'elle avait fait à Ottawa. Dans cette conversation, qu'elle a enregistrée, elle lui a affirmé qu'elle ne lui en voulait pas, ce qu'elle a répété pendant son contre-interrogatoire par l'avocat du sergent. Son propre avocat a résumé ses prétentions en des termes qui ont démontré sans l'ombre d'un doute à la Commission que sa position était la même que celle qu'elle avait annoncée le 29 mai 1989.

    En effet, Mme Glambeck ne semble pas avoir mis en cause le sergent Michael Humphries parce qu'il ne se serait pas occupé convenablement d'elle et de sa famille pendant qu'ils étaient couverts par le programme de protection des témoins ou aurait omis de les réinstaller dans le but d'assurer leur sécurité ou se serait comporté, par acte ou omission, d'une façon qui aurait compromis leur sécurité.

    En cours d'audience, l'avocat du sergent Michael Humphries a demandé à la Commission de rejeter la plainte contre son client avant la fin des débats. Nous aurions probablement pu le faire, mais les instructions du président de la Commission nous en ont empêchés.

    Le sergent Michael Humphries a assisté avec stoïcisme à tous les débats. Il désirait que la Commission entende sa preuve voulant qu'il avait traité Mme Glambeck avec professionnalisme et courtoisie. Nous accueillons son témoignage et concluons que son comportement était irréprochable.

    Nous concluons que la plainte contre le sergent Michael Humphries est sans fondement et nous la rejetons sans plus de commentaire.

    Pour ce qui est du caporal Jordan, nous concluons que sa participation à la réinstallation et à la protection de Mme Glambeck était minime et nous n'avons relevé aucune preuve indiquant qu'il avait omis de quelque façon de la réinstaller et d'assurer sa sécurité. Nous rejetons également la plainte déposée contre lui.

    CE QUI A FAIT DÉFAUT

    Si on ne peut adresser aucun reproche aux policiers mis en cause qui ont manipulé Mme Glambeck en tant qu'informatrice, agente et témoin, qu'est-ce qui a fait défaut dans cette affaire? Il faut se rendre à l'évidence que quelque chose a mal tourné. Mme Glambeck doit accepter une partie du blâme, mais certainement pas la totalité.

    Nous avons entendu des policiers chevronnés, entre autres le surintendant Pouliot, l'inspecteur Barczczewski et l'inspecteur Kary. Ils ont de toute évidence accordé beaucoup de réflexion à cette affaire. Ils ont eu l'occasion d'en faire une évaluation dont ils ont tiré les assises de la révision des politiques. Depuis le recrutement de Mme Glambeck et son entrée dans le programme de réinstallation et de protection des témoins, la GRC a amélioré de bien des façons sa politique touchant les récompenses aux témoins sources ainsi que leur protection et réinstallation.

    L'avocat de la Commission nous a fait des recommandations, dont plusieurs ont été avalisées par l'avocat du membre désigné de la GRC. Nous annexons ces recommandations à notre rapport et nous désirons constituer l'intermédiaire qui veillera à ce qu'elles soient communiquées au public, au président de la Commission des plaintes du public contre la GRC et au Commissaire de la GRC. Dans la mesure où l'avocat du membre désigné de la GRC accepte ces recommandations, nous pouvons présumer qu'elles conviennent au Commissaire de la GRC et qu'elles seront mises en application.

    Nous croyons que la Commission peut être utile en offrant ses idées sur ce qui a mal tourné dans cette affaire ainsi que quelques recommandations générales.

    Mme Glambeck était une revendeuse de drogue lorsque la GRC l'a recrutée. Elle et son époux vivaient du commerce illégal de cocaïne. Elle ne semblait avoir aucune autre source de revenu. Les Glambeck vivaient de leur astuce. Ils avaient de bonnes relations dans la filière sud-américaine. Parmi leurs amis, il y avait un héroïnomane qui éprouvait des problèmes avec des motards. Ils consommaient également de la drogue.

    Pour certains policiers chevronnés, Mme Glambeck n'était qu'une revendeuse de drogue. Ils ont commis une erreur en souscrivant à cette opinion, car rien n'était plus faux.

    Mme Glambeck se livrait à des activités criminelles, mais elle avait une grande force de caractère. Elle était pleine de ressources, intelligente et courageuse. Elle était, comme l'a si bien dit la gendarme Secord, une survivante. Elle était sympathique et travaillait bien en équipe. Elle a fait tout ce qu'on lui a demandé de faire.

    Elle a été transformée. La preuve nous a appris que Rick Jordan lui avait permis de refaire sa vie et nous le croyons. Selon le caporal Jordan, Mme Glambeck a été sa meilleure agente.

    En quelques mois d'activités fébriles pour tous, et grisantes pour Mme Glambeck, deux importants réseaux de trafiquants de cocaïne ont été démantelés. Pendant cette période, les policiers sont devenus ses collègues, amis et protecteurs. Lorsqu'elle avait besoin d'argent, ils lui en remettaient. Lorsqu'elle s'était bien comportée, ils la récompensaient. Lorsque la situation est devenue trop dangereuse, ils étaient tout près, en tenue civile, pour assurer sa sécurité et pour écouter ses conversations. Ils s'étaient rendus à la ferme qu'elle louait pour lui donner un coup de main. De toute évidence, Mme Glambeck faisait confiance à la GRC, et lorsque ses manipulants lui ont dit qu'ils la réinstallaient pour assurer sa sécurité, elle est allée à l'endroit qu'ils avaient choisi.

    À Lethbridge, c'était le dépaysement total. Personne ne l'avait préparée pour ce choc. Plus de missions intéressantes et exigeantes. Elle ne faisait plus partie de l'équipe.

    Elle n'avait presque plus de contact avec ses anciens collaborateurs, ces policiers qui avaient transformé sa vie. Ses manipulants à Lethbridge, une ville qu'elle ne connaissait pas, veillaient à sa subsistance, payaient ses factures et assuraient sa sécurité et celle de sa famille. Elle n'avait aucun statut au sein de la GRC et elle n'avait même pas une pièce d'identité. Elle ne pouvait pas se trouver un emploi et ses manipulants l'ont dissuadé de retourner aux études. Le temps et un époux dépressif étaient un lourd fardeau.

    La bureaucratie de la GRC lui a causé plus d'un ennui pour de menus détails. Ses manipulants l'ont réprimandée parce qu'elle avait compromis sa sécurité, mais ils ne l'avaient jamais renseignée sur sa couverture et les façons de se faire discrète. Elle avait pris du poids. Pour elle, une éternité à dû s'écouler avant l'enquête préliminaire et le procès dans la première affaire.

    Ses manipulants la surveillaient continuellement et elle n'aurait pas pu tremper de nouveau dans la revente de la drogue, même si elle l'avait voulu. Lorsqu'elle a été attirée par un commerce de vente de viande par téléphone, les accusations de fraude déposées contre un des propriétaires ont mis fin à cette possibilité.

    Mme Glambeck a commencé à croire que la GRC l'avait trahie parce que cette dernière avait violé sa promesse. Elle a cru se reconnaître lorsqu'elle a entendu parler de l'affaire Mitchell. Après la lecture de la lettre de l'entente qui lui était proposée, elle a cru que la GRC pourrait revenir sur sa promesse de ne pas la poursuivre pour revente de cocaïne en 1985.

    Personne à la GRC n'a tenté d'évaluer les conséquences de ce sentiment d'abandon qu'a ressenti Mme Glambeck, une femme dynamique et pleine de ressources, après avoir collaboré à quelques enquêtes policières. Ses manipulants et le coordonnateur de la protection des sources veillaient uniquement à ses besoins matériels. Ils ont dit à Mme Glambeck que selon eux, elle n'avait jamais eu la vie si belle.

    Ils n'ont pas compris que Mme Glambeck avait pris plaisir à cette grande épopée et que sa vie était maintenant vide. Elle était de plus en plus mécontente; elle avait été abandonnée.

    Il n'y a aucun intérêt à déterminer si les manipulants n'aimaient plus Mme Glambeck ou s'ils l'avaient vraiment appréciée. Nous savons qu'ils avaient besoin de renseignements, mais là n'est également pas la question. Ce qui importe est son mécontentement. Mme Glambeck était devenue un boulet aux pieds de la GRC et celle-ci s'en est rendu compte trop tard.

    Le déménagement en Colombie-Britannique a offert une période d'accalmie et de concorde et a fait entrer en scène de nouveaux manipulants. Cependant, le problème couvait toujours.

    Dans la ville en Colombie-Britannique, Mme Glambeck a tenté à nouveau de devenir informatrice, mais le caporal Doll a refusé sèchement sa proposition.

    Mme Glambeck a tenté d'ouvrir un commerce lorsque son enthousiasme pour sa ville d'adoption était encore présent. La GRC ne pouvait pas ou ne voulait pas trouver des moyens de l'encourager et de l'aider avant que son enthousiasme ne s'efface.

    Mme Glambeck n'était peut-être pas une agente idéale, mais rien à son sujet n'est ordinaire. Elle aime les feux de la rampe et déteste l'anonymat. Même son suicide serait un événement médiatique spectaculaire.

    La preuve n'indique pas si la GRC a tenté d'évaluer les conséquences de la réinstallation, des nouvelles identités, du délai de plusieurs mois, voire, de plusieurs années avant de pouvoir reprendre une vie normale. La preuve n'indique également pas si on a tenté de conseiller les Glambeck relativement aux problèmes qu'ils éprouvaient pendant qu'ils bénéficiaient du programme de protection des témoins.

    La GRC aurait dû prévoir certaines de ces difficultés. À sa réinstallation, Mme Glambeck n'était plus un mystère, et en mai et en juin 1986, la GRC aurait pu évaluer ses besoins en tant que témoin réinstallé. La GRC savait que M. Glambeck était dépressif. Le sergent Shaw l'a d'ailleurs rapporté. Elle n'a pas cherché à savoir s'il fallait accorder une importance quelconque aux préférences des Glambeck au moment de choisir la ville de réinstallation. Elle aurait dû évaluer si la ville de Lethbridge et la ville en Colombie-Britannique pouvaient raisonnablement combler les besoins des Glambeck en matière d'activités sociales, d'emploi et d'affaires. Rien ne prouve que la GRC a effectué une telle évaluation.

    Nous avons appris que la GRC n'avait pas de programme de protection des témoins lorsqu'elle a recruté Mme Glambeck et qu'elle s'affairait à le mettre en ouvre pendant qu'elle en bénéficiait. La GRC se trouvait aux étapes préliminaires de son étude d'un programme bien rodé des US Marshall aux États-Unis.

    La GRC n'a pas perçu des problèmes cruciaux dans le cas des Glambeck. Les policiers chargés de protéger et d'aider les Glambeck auraient dû être formés et conseillés par des policiers rompus à ce genre de travail. La GRC n'a pas évalué correctement et efficacement l'adaptation à laquelle devaient se soumettre les Glambeck dans leur nouvelle ville. À y regarder de près, certains auraient dit que l'essentiel de la vie des Glambeck avait disparu, mais la GRC était d'avis qu'ils n'avaient jamais eu la vie si belle.

    Nous ne formulerions pas de recommandations si nous étions convaincus que le programme de protection des témoins avait réglé tous les problèmes qui se sont présentés dans l'affaire Glambeck. Pour nous, le dossier serait clos si la GRC avait déjà pris les mesures nécessaires pour combler les lacunes dégagées dans le cours de cette audience. Malheureusement, cela n'est pas le cas. Nous avons entendu la preuve pondérée et pénétrante du surintendant Pouliot, de l'inspecteur Kary et de l'inspecteur Barczczewski, tous des policiers et décideurs chevronnés.

    Nous avons cependant appris que la répression antidrogue nécessite régulièrement le recours à des agents civils. Les agents sont utilisés de plus en plus fréquemment parce que la lutte à un trafic croissant de stupéfiants est une des principales priorités de la police. La réinstallation et la protection par la GRC de ses témoins dans le cadre de sa lutte antidrogue ne peuvent que devenir plus coûteuses et complexes.

    Dans ce contexte, nous désirons faire certaines recommandations. Nous concédons que nous ne sommes pas des experts en la matière, mais nous savons que l'application de la loi, ce qui comprend la protection et la réinstallation des témoins, est une responsabilité publique qu'assume pour nous tous la GRC en sa qualité de principal corps policier au pays. Les avis et les recommandations que nous livrons en tant que citoyens et membres de la Commission des plaintes du public contre la GRC peuvent être d'une certaine utilité, car ils constituent un apport externe et désintéressé à cet important volet du travail policier.

    Nous reconnaissons que le programme de protection des témoins était à ses débuts lorsque les Glambeck ont été réinstallés pour la première fois. Nous savons que la GRC l'a depuis amélioré. Nous la félicitons d'avoir fait ces démarches et d'avoir accepté à la fin des audiences, par l'intermédiaire de son avocat, les recommandations de l'avocat de la Commission. Voici maintenant nos humbles recommandations.

    RECOMMANDATIONS

    1. Les policiers de la GRC qui font appel à des informateurs, des agents et des sources témoins devraient être formés et sensibilisés au fait que même si la plupart de ces personnes ont des antécédents criminels, il est improductif de les percevoir uniquement ainsi peu importe leurs antécédents. Ces personnes ont pour la plupart une personnalité complexe et leur recrutement pour l'exécution de missions particulières et ensuite leur réinstallation et leur protection mettront à l'épreuve les policiers les plus chevronnés et innovateurs.

    2. La GRC devrait évaluer les possibilités de réinstallation et de départ à neuf d'un informateur et d'un agent dès qu'elle s'aperçoit que l'identité de celui-ci peut être divulguée et que sa sécurité peut être en danger.

    3. Lorsqu'une réinstallation semble nécessaire, la GRC devrait effectuer une analyse du risque afin d'établir, entre autres, s'il sera possible, coûteux ou difficile de réinstaller et de protéger un témoin source. Dans la mesure du possible, cette évaluation devrait être faite avant de décider de divulguer l'identité de la source.

    4. Lorsque la GRC établit que la réinstallation et la protection seront probablement épineuses, elle doit en informer la source avant d'avoir à révéler son identité. À ce moment, la source et la GRC devraient décider ensemble de l'étape suivante. Entre-temps, il faut cesser toute activité pouvant révéler l'identité de la source. Si la source accepte de mettre en péril son identité même après avoir pris connaissance des résultats de l'analyse de risque, et si la GRC consent à poursuivre l'enquête avec l'appui de celle-ci, les deux parties devraient documenter leur entente voulant qu'elle ne pourra pas profiter du programme de protection des témoins et qu'elle s'en tiendra à la récompense prévue dans la lettre d'entente et à un billet aller simple à un endroit raisonnable de son choix.

    5. Lorsqu'elle doit protéger et réinstaller une source témoin, la GRC devrait reconnaître et s'assurer que la source sait que des obligations incombent aux deux parties. La source et la GRC devraient, dans les plus brefs délais, traiter de ces obligations et les consigner afin de pouvoir les étudier, les préciser, les modifier et les accepter par écrit.

    6. Les préférences de la source devraient être prises en compte dans le choix d'une ville de réinstallation.

    7. Le style de vie, les habitudes, les talents, les problèmes personnels, les besoins familiaux et les connaissances de la source devraient être pris en compte dans le choix d'une ville de réinstallation.

    8. Il faut comprendre que la réinstallation d'une source dans une ville où elle ne pourra manouvrer à son gré et se refaire une vie peut miner la sécurité de cette personne. La ville de destination devrait être évaluée en fonction des critères pertinents afin d'en établir la convenance.

    9. Les témoins devraient recevoir à tout le moins des pièces d'identité provisoires dès qu'ils sont réinstallés sous une nouvelle identité.

    10. Lorsque des protocoles ne sont pas signés avec d'autres gouvernements et agences pour l'obtention discrète de nouvelles pièces d'identité permanentes, il faut élaborer ces conventions dans les plus brefs délais.

    11. Il faudrait inviter et encourager les témoins et leurs familles à se donner des antécédents raisonnables et, s'il y a lieu, leur fournir les dossiers scolaires et d'emploi appropriés dont ils auront besoin pour se refaire une vie dans leur nouvelle ville de résidence. Il faudra parfois faire cette requête périodiquement ou continuellement. Cette démarche peut englober les membres d'une famille étendue lorsque ceux-ci ne se sont pas réinstallés en même temps.

    12. Dans la mesure du possible, il faut présenter à la source sa réinstallation, l'établissement de sa nouvelle identité et son intégration dans sa nouvelle ville de résidence comme un co-projet. Si la source et ses manipulants perçoivent ainsi la situation, les relations qui les unissaient auparavant pendant les enquêtes policières peuvent être mises en valeur. De plus, il sera possible dans certains cas de façonner le savoir-faire que la source avait apporté à l'enquête en partenariat efficace dans le but d'assurer sa sécurité.

    13. Parfois, les témoins peuvent être consignés à leur domicile ou à leur quartier et invités à ne pas chercher un emploi ou se faire des connaissances afin de ne pas miner leur sécurité. Dans ces cas, il faut prévoir des séances de counseling à l'intention de la source et de sa famille afin qu'elles puissent composer avec les répercussions psychologiques et émotionnelles ainsi qu'avec les problèmes que l'on associe habituellement à l'ennui, à la solitude, à la recherche d'une identité, à la crainte et à la dépendance.

    14. La GRC devrait évaluer et réévaluer les conséquences d'une existence vécue continuellement sous son oil attentif et vigilant et comprendre que cette présence de tous les instants peut empêcher la source de réintégrer la société.

    15. Lorsque la source doit reprendre son ancienne identité afin de témoigner dans le cadre de poursuites judiciaires, la GRC devrait lui faire une mise au courant et la fouiller afin qu'elle ne trahisse pas par inadvertance sa nouvelle identité ou sa ville de résidence.

    16. Les besoins et le quotidien des sources changent constamment et seule une partie de ces transformations est prévisible. Les manipulants de la GRC devraient apprendre à reconnaître les signes annonciateurs de ces changements afin qu'elle, ainsi que la source et sa famille, puissent s'adapter à ceux-ci.

    17. Lorsque la sécurité de la source n'est pas minée si celle-ci a un emploi ou ouvre un commerce, la GRC devrait l'encourager en ce sens, et lorsque la situation s'y prête, lui apporter directement ou indirectement l'aide à cette fin.

    18. La GRC devrait reconnaître que certaines sources n'ont pas ou ont peu d'antécédents de travail, ont de la difficulté à conserver un emploi, ont peu de rudiments du métier ou de compétences en affaires et sont peu motivées.

    19. Dans la mesure du possible, la GRC devrait examiner les antécédents de travail des sources et évaluer leur employabilité et leurs compétences en affaires avant de révéler leur identité afin de pouvoir calculer le coût de leur subsistance à long terme ou indéfinie et d'évaluer la rentabilité de leur exploitation actuelle ou continue en tant qu'agent et témoin.

    20. Le témoin réinstallé devrait avoir accès aux services de consultation familiale, de santé mentale et psychologique dont il peut avoir besoin. Ces services devraient être offerts par des spécialistes qui possèdent l'habilitation sécuritaire nécessaire, mais qui ne collaborent pas régulièrement avec la GRC. De cette façon, le secret professionnel sera garanti et le témoin sera plus disposé à faire appel à ces services.

    Étant donné qu'une personne en possession de tous ses moyens est plus en mesure de collaborer à sa propre sécurité, les dépenses engagées pour les consultations devraient être réglées à même les fonds publics par la GRC.

    21. La GRC peut mettre fin aux mesures de protection et se limiter uniquement aux moyens qu'elle prend à l'égard de tout citoyen, après avoir accompli, en vain, tous les efforts raisonnables afin de réinstaller et de protéger un témoin parce que celui-ci refuse ou est dans l'impossibilité d'apporter son aide ou a violé les consignes de sécurité qu'elle lui a données. Dans ces cas, elle doit faire part de ses intentions au témoin et à sa famille. Si la GRC et le témoin peuvent s'entendre sur des conditions pendant la période visée par l'avis, elle peut continuer de protéger le témoin et sa famille pendant une période raisonnable lorsque les circonstances le permettent avant que les mesures de protection ne soient retirées en permanence.

     

    ANNEXE

    RÉSUMÉ DES RECOMMANDATIONS DE L'AVOCAT DE LA COMMISSION

    Dans sa présentation finale, l'avocate de la GRC, Suzanne Frost, a dit ce qui suit à la Commission  :

    « L'officier désigné reconnaît évidemment que certaines des recommandations de l'avocat de la Commission sont raisonnables et j'ai indiqué celles qui sont ainsi perçues. La GRC s'est déjà penchée sur nombre des préoccupations soulevées pendant l'audience et même s'il peut être souhaitable de proposer des modifications au programme, le manque criant de fonds est la principale entrave à la mise en ouvre des changements souhaités au programme de protection des témoins. » (Transcription, p. 8442) [Traduction]

    Après avoir entendu cette remarque et tenu compte des contraintes financières dont elle fait mention, nous croyons utile d'inclure dans notre rapport les recommandations faites par l'avocat de la Commission qui sont appuyées ou avalisées par la GRC ainsi que celles qui ont été rejetées dans les conclusions finales. Les recommandations de la Commission seront suivies des remarques de l'avocat de l'officier désigné. Nous avons décidé de faire nôtres les recommandations qui sont avalisées ou appuyées sous réserve de la disponibilité de fonds. Nos propres recommandations se trouvent ailleurs dans le rapport.

    En conséquence des présentations contenues dans la partie J et compte tenu de la preuve présentée dans cette affaire  :

    1. La Commission devrait recommander que  :

    (a) les coordonnateurs des témoins sources reçoivent des instructions écrites sur ce qu'ils doivent dire aux personnes qui seront réinstallées dès qu'elles entrent dans le programme de protection des témoins et que ces renseignements devraient comprendre à tout le moins les informations indiquées aux paragraphes 5 et 13 de la partie J;

    Paragraphe 5;

    Donc, pendant les années pertinentes, aucune directive n'obligeait les coordonnateurs à renseigner le candidat à la réinstallation dans les domaines suivants  :

    (a) que faire s'il rencontre une vieille connaissance;

    (b) que faire si les médias prennent contact avec lui;

    (c) que faire si quelqu'un prend sa photo;

    (d) comment passer inaperçu et les moyens à prendre pour y arriver;

    (e) comment composer avec le stress psychologique et émotionnel;

    (f) comment ne pas attirer l'attention sur soi;

    (g) comment forger une couverture pour les voisins ou les commerçants dans les rencontres faisant partie du quotidien;

    (h) quelles réponses donner aux questions des voisins et d'autres personnes sur son passé;

    (i) comment se comporter pendant qu'il est en situation de réinstallation.

    (Transcription, Volume 25, pages 5567 à 5569 [Barszczewski]; Volume 33, pages 7530 à 7531 [Kary] et pages 5726 à 5729; pages 5731 à 5732; pages 5881 à 5883 [Barszczewski]) [Traduction]

    Paragraphe 13

    Dans son témoignage, l'inspecteur Kary a confirmé que des exigences ou suggestions écrites à l'intention des manipulants seraient utiles afin qu'ils puissent conseiller la personne réinstallée sur ce qu'elle doit faire dans diverses situations, entre autres : que faire si elle rencontre une vieille connaissance ou si des médias prennent contact avec elle et veulent prendre sa photo; comment passer inaperçue et les mesures à prendre pour y arriver; comment reconnaître les symptômes du stress pesant sur les relations familiales ainsi que sur la santé émotionnelle et psychologique; et comment composer avec ces pressions; les réponses à donner aux questions des voisins et d'autres personnes concernant ses antécédents; comment forger une couverture plausible à servir en réponse à ces questions; et comment se comporter pendant qu'elle est en cours de réinstallation afin de ne pas attirer l'attention sur elle et de collaborer à sa sécurité.

    (Transcription, Volume 33, pages 7544 to 7546 [Kary]) [Traduction]

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Adoptée en partie (Transcription p. 8413)

      1. la Direction générale ébauche à l'heure actuelle le manuel et le programme de formation proposés et ceux-ci comprendront les informations que les manipulants devraient communiquer aux personnes réinstallées dès leur arrivée et pendant leur séjour dans leur nouvelle ville de résidence. Ces informations comprendront, entre autres, les renseignements indiqués aux paragraphes 5 et 13 de la partie J.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Adoptée, mais les renseignements en question devraient être communiqués lors de l'entrevue de triage avant d'utiliser la personne comme informatrice ou agente. S'il est impossible à ce moment d'apaiser les inquiétudes de la personne, la GRC devrait y penser à deux fois avant de l'utiliser dans des opérations. (Transcription, p. 8414) [Traduction]

    (c) les coordonnateurs et les manipulants chargés de la supervision et la subsistance des personnes réinstallées devraient recevoir du groupe de la protection des témoins à Ottawa (ou du groupe le remplaçant) une formation leur permettant de reconnaître les problèmes pouvant surgir pendant une réinstallation ainsi que des conseils et des suggestions écrits sur la façon de régler ces difficultés de même que les informations à offrir aux personnes réinstallées relativement à ces problèmes.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Nous ne nous y opposons pas. Cependant, la recommandation devrait également comprendre l'affectation à la GRC des fonds nécessaires pour assurer cette formation. (Transcription, p. 8414) [Traduction]

    2. La Commission devrait recommander que  :

    (a) la GRC mette sur pied les mécanismes appropriés afin d'obliger les coordonnateurs à consigner par écrit ou à enregistrer les exposés faits aux personnes pouvant être réinstallées dès que celles-ci entrent dans le programme de protection des témoins.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Aucune objection. La GRC est d'avis que « cette démarche serait souhaitable et utile au cas où les lettres d'entente sont contestées plus tard ». (Transcription, p. 8415) [Traduction]

    (b) la GRC exige que ces dossiers soient conservés tant que la personne est dans le programme et pendant une période appropriée par la suite;

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    ... nous croyons que la GRC est plus apte à déterminer la période appropriée de conservation. La Commission devrait tout simplement recommander que les dossiers soient conservés pendant un délai approprié (Transcription, p. 8414-5) [Traduction]

    (c) la GRC mette sur pied des mécanismes obligeant les coordonnateurs de signaler à la Direction générale l'étendue et la portée des exposés faits aux candidats à la réinstallation dès leur entrée dans le programme.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    La recommandation est peut-être inutile. Ces mécanismes de rapport sont déjà en place. La recommandation, si elle est faite, devrait prévoir une obligation de faire rapport seulement au besoin. (Transcription, p. 8415-8516) [Traduction]

    3. La Commission devrait recommander que la GRC révise sa politique et sa formation à l'intention des coordonnateurs et des manipulants dans les buts suivants  :

    (a) offrir des conseils et mettre en place les modalités concernant la façon appropriée de reconnaître les symptômes de stress chez les personnes réinstallées, peu importe leur cause;

    (b) trouver les interventions lorsque ces symptômes se manifestent ou semblent être présents;

    (c) identifier les personnes ressources compétentes au sein de la GRC ou des services sociaux que les coordonnateurs et les manipulants peuvent consulter afin de pouvoir composer avec ces difficultés;

    (d) identifier les personnes ressources et les services que les personnes réinstallées peuvent consulter pour obtenir le counseling nécessaire.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Ne s'inscrit pas dans le mandat de la Commission. Si elle est formulée, la recommandation devrait se lire ainsi « dans la mesure du possible, les manipulants devraient avoir l'oil aux symptômes de stress. » (Transcription, p. 8417- 8418) [Traduction]

    4. La Commission devrait recommander que la politique et les modalités de la GRC portant sur le programme de réinstallation des témoins obligent les manipulants se trouvant dans la ville de réinstallation à donner une initiation aux personnes réinstallées et à leur indiquer les services communautaires qui leur sont offerts, entre autres ceux portant sur l'orientation professionnelle, les programmes d'initiation au travail, les programmes de recyclage professionnel ainsi que les programmes d'initiation aux affaires lorsque ces personnes manifestent le désir d'ouvrir une entreprise.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Ne s'inscrit pas dans le mandat de la Commission. Si la Commission formule cette recommandation, la GRC demande qu'elle précise si elle devra offrir ces services ou simplement indiquer aux personnes réinstallées où les obtenir. Si la Commission croit que la GRC devrait offrir ces services, je lui demande alors d'inclure dans sa recommandation que la GRC reçoive les fonds nécessaires à cette fin. (Transcription, p. 8420-22) [Traduction]

    5. La Commission devrait recommander que la GRC modifie ses modalités afin de faciliter l'élaboration du profil des personnes entrant dans le programme de réinstallation et d'obliger la communication au tout début de ces profils aux manipulants chargés de la supervision et de la subsistance des personnes réinstallées ainsi qu'aux coordonnateurs s'occupant de l'exécution et de la supervision de la réinstallation d'une source.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Nous ne nous y opposons pas. La politique actuelle de la GRC prévoit cette pratique. (Transcription, p. 8422) [Traduction]

    6. La Commission devrait déterminer s'il y a lieu de recommander que la GRC précise sa politique et qu'elle la communique ensuite aux membres afin de leur expliquer la teneur des discussions qui peuvent se dérouler entre eux et les sources relativement à la rémunération dans un contexte autre que celui impliquant la négociation et l'arrêt des conditions touchant les honoraires de l'agent se trouvant dans la lettre d'entente.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    La [GRC] ne s'oppose pas à la recommandation telle qu'elle est formulée. (Transcription, p. 8422-3) [Traduction]

    7. La Commission devrait déterminer s'il y a lieu de recommander que la politique de la GRC fasse la distinction entre les discussions obligatoires et les discussions permises et sujettes à interprétation par les membres.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    La [GRC] ne s'oppose pas à cette recommandation, mais elle désire faire remarquer qu'une politique semblable se trouve déjà dans ses manuels de politiques. (Transcription, p. 8423) [Traduction]

    8. La Commission devrait recommander que  :

    (a) la Direction générale de la GRC remette par écrit aux coordonnateurs des conseils et des suggestions sur la façon d'encourager les personnes réinstallées à se trouver un emploi ainsi que sur les informations à offrir à celles-ci à ce sujet.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Ne s'inscrit pas dans le mandat de la Commission, car la recommandation ne porte sur aucune des allégations avancées contre la GRC. (Transcription, p. 8426) [Traduction]

    (b) les coordonnateurs et les manipulants s'occupant de personnes réinstallées donnent à celles-ci des conseils touchant, entre autres, la recherche d'un emploi, les programmes de perfectionnement des aptitudes, l'obtention de diplômes et la présence de services offrant une orientation professionnelle ou des conseils sur l'ouverture d'un commerce;

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Au moment de formuler une telle recommandation, la Commission devrait faire preuve de prudence, car la sécurité de la personne réinstallée peut être minée si on l'encourage à se trouver un emploi. (Transcription, p. 8426) [Traduction]

    (c) les personnes réinstallées aient accès aux services sociaux afin d'obtenir d'eux des conseils sur la façon de se trouver un emploi dans la nouvelle ville de résidence;

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Cette recommandation est semblable à la recommandation 4 et elle pourra être intégrée aux recommandations générales. (Transcription, p. 8427) [Traduction]

    (d) la Direction générale de la GRC fasse comprendre aux coordonnateurs et aux manipulants qu'il leur incombe, en leur qualité de surveillants des personnes réinstallées, d'encourager les personnes réinstallées dont ils s'occupent à se trouver un emploi, et que cette responsabilité existe jusqu'à ce que les personnes réinstallées se trouvent un emploi stable et permanent.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    En vertu de cette recommandation, la GRC ne serait pas tenue d'offrir les services de consultation, mais plutôt de renseigner la personne réinstallée sur les services offerts par les organismes sociaux et d'agir, s'il y a lieu, en qualité d'intermédiaire. Il faut encore ici user de prudence, car une telle démarche par la GRC soulève des inquiétudes quant à la sécurité de la personne. Si la Commission désire formuler une recommandation en ce sens, elle devrait y inclure l'affectation de fonds à la GRC pour la mettre en ouvre. Le libellé de cette recommandation et celui de la recommandation 8 (e) devraient correspondre dans la mesure du possible. (Transcription, p. 8427) [Traduction]

    (e) la Direction générale de la GRC envisage d'obliger les coordonnateurs et les manipulants à faire rapport à intervalles réguliers des moyens qu'ils ont pris pour encourager les personnes réinstallées à se trouver un emploi;

    (f) les renseignements communiqués aux personnes réinstallées par les coordonnateurs et les manipulants insistent sur la nécessité de se trouver un emploi et indiquent que s'en abstenir pourrait mener à leur expulsion du programme de protection des témoins;

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Nous nous opposons à cette recommandation, car la Commission recommanderait à ce moment à la GRC de se rendre coupable d'extorsion. (Transcription, p. 8429) [Traduction]

    (g) la Direction générale donne des directives nettes aux coordonnateurs et aux manipulants en vue d'amorcer, avec les personnes réinstallées, les discussions sur la formation professionnelle, et lorsque la situation s'y prête, de leur indiquer que la GRC peut régler les frais de cette formation lorsque les procédures judiciaires seront terminées.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Une telle recommandation doit préciser que la GRC ne mentionnera l'appui financier en vue de la formation professionnelle que dans des circonstances appropriées. La GRC ne peut le faire dans tous les cas pour de raisons financières et opérationnelles. La GRC n'a tout simplement pas les moyens. (Transcription, p. 8430) [Traduction]

    9. La Commission devrait recommander que  :

    (a) la Direction générale de la GRC étudie la possibilité de rédiger, à l'intention du personnel chargé d'évaluer les projets de récompense, un guide contenant les principes et les facteurs dont il faut tenir compte dans l'élaboration et l'évaluation de ces projets;

    (b) les critères constituant dans la politique actuelle les facteurs dont il faut tenir compte au moment de rédiger une proposition de rémunération à verser à un agent soient élargis afin d'englober les principes et facteurs généraux que, selon les témoignages, la Direction générale retient au moment d'évaluer ces propositions.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Cela ne porte pas sur les plaintes ou la conduite des membres nommés. Cependant, si la Commission désire formuler une recommandation, la GRC demande que les recommandations 9 (a) et (b) soient fondues en une seule recommandation générale voulant que la politique soit modifiée afin de faire mention de tous les facteurs pertinents à l'évaluation d'une proposition de récompense, c'est-à-dire ceux se trouvant déjà dans la politique et ceux qui ont été soulevés. La recommandation pourrait également englober les motifs qui amènent la source à collaborer avec la GRC ainsi que les circonstances de son recrutement dont il est fait mention au paragraphe 10(a). La Commission ne devrait pas placer ces facteurs dans un ordre quelconque, car les opérations policières ne se ressemblent pas et cela pourrait empêcher la GRC de verser des récompenses appropriées. (Transcription, p.8431) [Traduction]

    10. La Commission devrait recommander que  :

    (a) le personnel de la Direction générale de la GRC évalue et précise par écrit, à l'intention des personnes à la Direction générale chargées de l'évaluation des propositions de récompense et des membres en général, l'importance des motifs qui amènent la source à collaborer avec la police et la pertinence des circonstances du recrutement quant à la détermination et à l'approbation de la récompense;

    REMARQUE DE L'AVOCATE DE LA GRC

    Selon la décision sur la rétrospectivité, les techniques de recrutement ne relèvent pas de la compétence de la Commission. La recommandation 10(a) pourrait être ajoutée à la recommandation au paragraphe 9. (Transcription, p. 8432) [Traduction]

    (b) la Direction générale de la GRC examine les considérations morales et répressives touchant la conduite appropriée des enquêteurs de la GRC au moment de recruter des sources et donne des précisions par écrit aux membres de la GRC en ce qui a trait aux méthodes et techniques de recrutement répréhensibles;

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Nous nous y opposons, car elle est redondante. La GRC est d'avis que la Loi sur la GRC, de même que le Code de déontologie et la common law ont déjà fait des considérations morales une question de droit. (Transcription, p. 8433) [Traduction]

    (c) la GRC étudie la possibilité d'élaborer un code de conduite ou un guide quelconque afin de donner aux membres une idée générale de ce qu'est une conduite acceptable, et plus précisément, au moment de recruter des sources humaines.

    11. La Commission devrait recommander que  :

    (a) la Direction générale de la GRC fasse savoir aux divisions qu'elles peuvent exercer leurs pouvoirs de dépenser le moment venu de régler, dans les cas appropriés, des dépenses imprévues urgentes pour les personnes réinstallées;

    (b) les membres de la GRC affectés à la lutte antidrogue et les coordonnateurs de la protection des témoins soient avisés que les projets de réinstallation qu'ils soumettront désormais à la Direction générale doivent contenir des dispositions en vue du règlement de dépenses urgentes ou imprévues engagées pour la source.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    [La GRC] ne s'oppose pas à la recommandation dans son libellé actuel. Cependant, elle croit que la somme prévue dans le projet doit être petite afin d'assurer le contrôle et la responsabilité des fonds publics. (Transcription, p. 8440) [Traduction]

    12. La Commission devrait déterminer l'à-propos de recommander à la GRC de préciser ou de confirmer les politiques et les modalités touchant la rédaction des formules d'immatriculation des sources et des documents portant sur la participation des sources dans les opérations d'infiltration afin de faire en sorte que les membres soient au courant de l'importance et de la foi que la haute direction accorde à ceux-ci au moment de prendre des décisions et comprennent la nécessité d'y consigner des renseignements factuels.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Nous nous y opposons, car elle est redondante. Le paragraphe 45 du Règlement de la GRC pris en vertu de la Loi sur la GRC explique aux membres opérationnels l'importance de communiquer aux échelons supérieurs des renseignements précis. Donc, une recommandation additionnelle touchant l'orientation de la politique ou une modification au Règlement ne serait pas nécessaire. (Transcription, p. 8440-1) [Traduction]

    13. La Commission devrait  :

    (a) étudier la possibilité de reconnaître que les politiques et les modalités révisées de la GRC en vertu desquelles des lettres d'entente portant sur les récompenses aux agents doivent être signées avant la collaboration de l'agent dans une opération d'infiltration constituent une nette amélioration des pratiques et modalités en vigueur au moment où Mme Glambeck est devenue une agente de la GRC;

    (b) en ce qui a trait à l'expérience des lettres d'entente et des personnes réinstallées que possèdent les membres de la GRC qui présentent les lettres d'entente, recommander respectueusement à la GRC de veiller à ce que des personnes possédant une expérience du contenu et de l'à-propos des lettres d'entente présentent et expliquent en détail ces ententes à ces agents éventuels;

    (c) recommander que dès qu'elle présente une lettre d'entente à un agent éventuel, la GRC devrait aviser celui-ci d'obtenir des conseils juridiques relativement au contenu de la lettre d'entente dans la mesure où, pour des motifs de sécurité, l'avocat ne conserve pas une copie de la lettre;

    (d) recommander que la GRC évalue le bien-fondé de demander à l'agent éventuel qui a consulté un avocat relativement à la lettre d'entente de lui remettre, pour ses dossiers, un certificat de conseils désintéressés d'un avocat dans la forme qu'elle prescrit;

    (e) recommander que les lettres d'entente présentées aux agents éventuels précisent, à l'intention de la source, la responsabilité impartie à la GRC d'offrir les mesures de protection, et les situations pouvant mener à l'abandon de celles-ci, entre autres, le défaut manifeste de sa part de se chercher un emploi ou les entorses à sa sécurité qui vont à l'encontre des conseils et des efforts de la GRC.

    REMARQUES DE L'AVOCATE DE LA GRC :

    Nous nous y opposons. Les lettres d'entente ne font pas partie des plaintes et ne sont pas visées par le mandat de la Commission. De plus, la Commission n'a pas suffisamment de preuves pour formuler des conclusions ou des recommandations utiles et il serait dangereux de sa part de formuler des conclusions et des recommandations sans connaître les conséquences de celles-ci sur une foule de dossiers. (Transcription, p. 8441-2) [Traduction]

     

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    Date de création : 2003-08-11
    Date de modification : 2003-08-13 

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