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Profil instantané d'une journée des jeunes Autochtones sous garde au Canada : Phase II

février 2004

  1. 5.0 DISCUSSION
    1. 5.1 Données tirées du profil instantané
    2. 5.2 Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes
    3. 5.3 Étude de contrôle relative à la LSJPA  : phase de référence
    4. 5.4 Données tirées des cercles de partage

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5.0 DISCUSSION

Les résultats du profil instantané confirment que le taux d'incarcération chez les adolescents autochtones est beaucoup plus élevé que celui que l'on trouve chez les jeunes non-Autochtones au Canada. Il reste à savoir pourquoi il en est ainsi. On peut consulter plusieurs sources de données en vue de répondre à cette question.

5.1 Données tirées du profil instantané

Les données tirées du profil instantané indiquent que, en général, les adolescents autochtones sont condamnés à un jeune âge au titre de leur première infraction (soit entre 12 et 14 ans). Il se peut qu'un contact avec le système de justice pénale à un jeune âge explique en partie le taux d'incarcération élevé que l'on trouve chez les adolescents autochtones. Plus ce contact se fait à un jeune âge, plus il est probable qu'on ait un casier judiciaire, ce qui peut entraîner l'imposition de peines plus sévères.

Les données tirées du profil instantané indiquent également que 47 % des jeunes Autochtones sous garde vivaient dans une famille qui recevait de l'aide sociale. La Prairie (1992, 2002) a soutenu que le facteur central lié au taux d'incarcération supérieur que l'on trouve chez les Autochtones est la pauvreté. Ces données viennent appuyer l'affirmation de La Prairie.

Selon les données tirées du profil instantané, il y a un nombre considérable de jeunes Autochtones sous garde aux prises avec un problème d'alcoolisme ou de toxicomanie. On a confirmé qu'environ 57 % des adolescents autochtones font face à un problème de cette nature tandis qu'on soupçonnait que 24 % des jeunes Autochtones consommaient de façon excessive de l'alcool ou de drogues. On a bien documenté le fait que l'abus de l'alcool ou de drogues est un corrélat du comportement criminel chez les jeunes ( Dawkins, 1997; Huizinga et Jakob-Chien, 1998; Latimer, Kleinknecht, Hung et Gabor, 2003 ). La recherche menée antérieurement a également démontré qu'il existe clairement un lien entre la consommation abusive d'alcool ou de stupéfiants et les crimes violents (Fergusson, Lynskey et Horwood, 1996; Watts et Wright, 1990), lesquels sont associés à des peines plus lourdes.

Les données tirées du profil instantané ont indiqué qu'un fort pourcentage (39 %) d'adolescents autochtones avaient obtenu des services auprès des organismes de protection de l'enfance. Selon les résultats de la recherche menée récemment sur les corrélats de la délinquance, de mauvais rapports parents-enfants (à savoir, des rapports inconsistants, peu de supervision, une discipline sévère) sont liés de très près à un comportement criminel chez les jeunes (Latimer, Kleinknecht, Hung et Gabor, 2003). Si un adolescent a obtenu les services d'un organisme de protection de l'enfance, on peut conclure que ses parents s'acquittaient mal de leur rôle.

On a également démontré qu'un mauvais rapport avec l'école (pour ce qui est du rendement scolaire, de l'assiduité et du comportement) est un corrélat important de la délinquance chez les jeunes (Latimer, Kleinknecht, Hung et Gabor, 2003). D'après les données qui ont été communiquées, un fort pourcentage de jeunes Autochtones sous garde étaient peu instruits, ce qui indique que leur rapport avec le milieu scolaire était pauvre.

Malheureusement, on n'a recueilli aucune de ces variables (âge lors de la première condamnation, aide sociale, abus d'alcool ou de drogues, recours aux services d'un organisme de protection de l'enfance, dernière année d'étude complétée) dans le cas des jeunes non-Autochtones, ce qui limite les conclusions que l'on peut tirer.

Les données tirées du profil instantané indiquent bel et bien que, en moyenne, les adolescents autochtones se voient imposer des peines de détention plus longues par rapport aux jeunes non-Autochtones et ce, pour de nombreux groupes d'infraction. Il faut toutefois faire preuve de circonspection lorsqu'on interprète cette conclusion parce que les antécédents criminels de l'adolescent et la gravité de l'infraction au sein du regroupement d'infractions n'étaient pas contrôlés dans le cadre de l'analyse. Ces facteurs sont importants pour ce qui est du processus d'imposition de la peine et il se peut qu'ils expliquent en grande partie les écarts que l'on remarque dans la durée de la sentence imposée aux jeunes Autochtones et aux jeunes non-Autochtones sous garde. Il reste que cela peut expliquer partiellement pourquoi on trouve chez les jeunes Autochtones un taux d'incarcération plus élevé, étant donné qu'on a démontré antérieurement que l'imposition de peines plus longues contribue de façon déterminante à l'existence de taux d'incarcération plus élevés (Young et Brown, 1993).

5.2 Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes

Les données autodéclarées tirées de l'Enquête longitudinale nationale sur les enfants et les jeunes ont indiqué que la même proportion d'adolescents autochtones et de jeunes non-Autochtones ont un comportement criminel. Toujours selon ces données, toutefois, les adolescents autochtones commettraient des infractions plus graves par rapport aux jeunes non-Autochtones (Latimer, Kleinknecht, Hung et Gabor, 2003). Cet état de choses pourrait en partie expliquer pourquoi le taux d'incarcération est plus élevé chez les adolescents autochtones par rapport aux jeunes non-Autochtones. En effet, le jeune qui commet une infraction grave risque davantage de se voir imposer une peine de garde par rapport à l'adolescent qui est reconnu coupable d'une infraction moins grave. Qui plus est, étant donné que ces données sont autodéclarées, on n'a pas affaire aux mêmes préjugés qui pourraient se trouver dans les sources de données officielles.

5.3 Étude de contrôle relative à la LSJPA : Phase de référence

Les données recueillies par le ministère de la Justice du Canada auprès des tribunaux de la jeunesse en 1999-2000 indiquent qu'il est plus probable que les adolescents autochtones se voient imposer une peine de garde comme sentence la plus grave, et ce, pour presque toutes les catégories d'infractions, par rapport aux jeunes non-Autochtones; cela comprend notamment la possession de stupéfiants, le trafic de stupéfiants, les voies de fait graves, les voies de fait simples, l'introduction par effraction, le vol de plus de 5 000 $ et le méfait (Latimer et Verbrugge, à paraître). Ces données indiquent également que la durée médiane de la peine imposée aux adolescents autochtones (soit 90 jours) est trois fois plus élevée que celle de la sentence prononcée contre les jeunes non-Autochtones (soit 30 jours). Encore une fois, cependant, les chercheurs qui ont procédé à ces analyses n'ont contrôlé ni les antécédents criminels de l'adolescent ni la gravité de l'infraction.

5.4 Données tirées des cercles de partage

Les données tirées des cercles de partage fournissent des raisons additionnelles qui pourraient expliquer en partie l'écart que l'on remarque entre le taux d'incarcération des jeunes Autochtones et celui des jeunes non-Autochtones. Les Autochtones qui ont pris part aux cercles de partage ont en effet signalé que le taux de victimisation dans leur famille est élevé, qu'il y a abus d'alcool ou de drogues et qu'ils prennent part aux activités de bandes organisées. Ces facteurs sont largement reconnus comme étant des corrélats importants de la délinquance (Latimer, Kleinknecht, Hung et Gabor, 2003; Andrews et Bonta, 1998). En d'autres termes, le jeune qui a subi de mauvais traitements étant enfant, qui est aux prises avec une consommation excessive d'alcool et de drogues et qui a des liens avec des pairs aux tendances antisociales risque fortement d'adopter un comportement criminel. Toutefois, les données tirées des cercles de partage ne permettent pas de conclure que les jeunes non-Autochtones sous garde connaissent des taux de victimisation inférieurs, qu'ils sont moins aux prises avec des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie ou qu'ils prennent moins part aux activités de bandes organisées.

Outre ces facteurs, les personnes qui ont pris part aux cercles de partage ont fait mention de plusieurs incidents graves au cours desquels des particuliers ont fait montre de racisme. Les agents de police et les agents de probation jouissent d'un pouvoir discrétionnaire lorsqu'il s'agit d'accuser formellement un jeune ou de lui imposer une mesure dénuée de caractère officiel. De même, les juges sont habilités à ordonner ou non des peines de garde conformément aux restrictions prévues à la Loi sur le système de justice pénale pour adolescents . Il se peut que les jeunes Autochtones se voient imposer davantage de peines officielles et il est aussi peut-être plus probable qu'ils sont condamnés à la détention même lorsqu'on tient compte des antécédents criminels des intéressés et de la gravité de l'infraction. Les données tirées du profil instantané ainsi que celles qui proviennent de l'étude de contrôle relative à la LSJPA (phase de référence) soutiennent cette hypothèse à première vue. On est en train d'élaborer une analyse plus détaillée des données provenant de l'étude de contrôle de la LSJPA , dans le cadre de laquelle on contrôlera les antécédents criminels du délinquant et la gravité de l'infraction commise. On s'attend à ce que cette analyse fournisse une preuve plus étoffée pour ce qui est de répondre à la question suivante : existe-t-il un préjugé systémique envers les adolescents autochtones au sein du système de justice pénale pour les jeunes ?

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