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ÉTUDE PORTANT SUR LES SERVICES JURIDIQUES DISPENSÉS AUX DÉTENUS DES PÉNITENCIERS PAR LES RÉGIMES ET LES CLINIQUES D'AIDE JURIDIQUE AU CANADA

Le 4 octobre 2002

Préparé pour
le ministère de la Justice du Canada

  1. 2.0 Constatations ( suite )
    1. 2.3 Exigences législatives en matière de prestation de services d'aide juridique
    2. 2.4 Politiques et approches en matière d'aide juridique

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2.3 Exigences législatives en matière de prestation de services d'aide juridique

Au Canada, le droit à être représenté par un avocat est inscrit dans la loi. La loi ne précise cependant pas dans quelle mesure l'État doit assurer, à ses propres frais, la défense d'un accusé. Toutes les provinces ont des régimes d'aide juridique qui, pour la plupart, ont été créés par voie législative [21]. Les règles relatives à la nature et à la portée des services juridiques couverts varient d'un régime à l'autre. La LSCMLC stipule que, durant son incarcération, le délinquant continue à jouir des droits et privilèges reconnus à tout citoyen, " sauf de ceux dont la suppression ou restriction est une conséquence nécessaire de la peine qui lui est infligée " [22]. Par conséquent, les prisonniers sont admissibles aux mêmes services d'aide juridique que les autres membres de la société, quelle que soit la province ou le territoire visé. Il s'ensuit que les prisonniers financièrement admissibles ont le droit de recevoir les mêmes services juridiques en matière de droit criminel et de droit de la famille que ceux qui sont accessibles à l'ensemble du public. Or, peu de dispositions législatives traitent de la prestation aux détenus de services juridiques relevant du domaine du droit pénitentiaire. La plupart des provinces et territoires n'offrent donc pas de façon courante des services aux détenus pour ce qui est des questions juridiques découlant de leur incarcération.

Comme l'illustre l'annexe C, les services de l'Aide juridique qui sont offerts aux détenus sont limités dans la plupart des provinces. À l'heure actuelle, les régimes d'aide juridique en place au Canada n'exigent pas la prestation de services aux détenus, quoique ces services soient couramment offerts par certaines provinces, comme nous l'avons déjà souligné. Bien que les prisonniers répondant aux critères financiers établis aient accès aux services juridiques qui, dans le domaine du droit criminel et du droit de la famille, sont accessibles à l'ensemble de la population, la plupart des provinces ne leur offrent pas des services qui sont directement liés aux questions juridiques découlant de leur incarcération. Certaines provinces, comme la Nouvelle-Écosse, offrent des services de façon ponctuelle dans une région donnée. L'Ontario, l'Alberta et la Colombie-Britannique offrent ce genre de services dans l'ensemble de la province d'une façon plus institutionnalisée dans le cadre de leurs programmes d'aide juridique. Il existe certaines exceptions notables à l'absence généralisée de dispositions législatives prévoyant la prestation de services d'aide juridique aux prisonniers. Nous traitons plus à fond de ces dispositions ci-dessous.

2.3.1 L'arrêt Howard

L'arrêt Howard [23] datant de 1984 reconnaît le droit d'un prisonnier à être représenté lors d'une audience disciplinaire lorsque celle-ci risque d'avoir d'importantes conséquences pour sa liberté (p. ex., le prisonnier serait placé en isolement). L'arrêt ne traite cependant pas de la question du paiement des frais juridiques par un régime d'aide juridique. Par conséquent, un prisonnier voulant être représenté par un avocat lors d'une audience disciplinaire jouit de ce droit, sans toutefois pouvoir exiger que les frais de l'avocat soient payés par un régime d'aide juridique.

2.3.2 L'arrêt Winters

L'arrêt Winters porte sur une affaire mettant en cause un détenu de la Colombie-Britannique ayant été accusé d'avoir agressé un autre détenu pendant qu'il purgeait une peine d'emprisonnement à perpétuité. Après avoir passé 38 jours en isolement cellulaire, le détenu tenta d'obtenir qu'un avocat de la Legal Services Society de la Colombie-Britannique le représente à son audience disciplinaire. On lui dit qu'il n'avait pas le droit à des services d'aide juridique pour une audience disciplinaire. Il décida alors de soumettre sa demande à la Cour suprême de la Colombie-Britannique, qui la rejeta de nouveau. Cette affaire finit par être portée devant la Cour suprême du Canada, qui statua que les prisonniers des établissements fédéraux avaient le droit d'obtenir des services d'aide juridique lors d'une comparution devant le tribunal disciplinaire lorsqu'ils étaient exposés à la possibilité d'être placés en isolement cellulaire ou à d'autres conséquences graves [24]. Cet arrêt énonçait cependant qu'il appartenait à la Legal Services Society d'établir le type de service devant être offert (p. ex., avocat, avocat de service ou agent parajuridique).

L'arrêt Winters traitait cependant des lois de la Colombie-Britannique relatives aux services d'aide juridique et non des droits prévus dans la Charte. Si la Charte avait été invoquée, toutes les provinces et tous les territoires auraient été tenus d'appliquer l'arrêt, ce qui porte certains à croire qu'une contestation en vertu de la Charte n'est qu'une question de temps.

Malgré le fait que l'arrêt Winters ne s'applique pas à l'extérieur de la Colombie-Britannique, il pourrait être vu comme un avertissement par les autres provinces. Legal Aid Alberta, par exemple, acceptera les demandes relatives aux audiences disciplinaires et obtiendra, dans de nombreux cas, un avis juridique afin de déterminer si les services seront offerts. Bon nombre de petites provinces n'ont cependant pas encore commencé à assurer des services d'aide juridique dans le cas des audiences disciplinaires ou de questions plus vastes se rapportant au droit pénitentiaire.

2.4 Politiques et approches en matière d'aide juridique

Comme nous l'avons fait remarquer plus tôt, les politiques et les approches en matière d'aide juridique varient beaucoup d'un endroit à l'autre au pays, en particulier en ce qui touche les services dispensés aux détenus. L'annexe C comporte une description complète des diverses approches mises en œuvre dans le domaine de l'aide juridique au Canada. Voici un bref résumé des approches et des politiques adoptées à cet égard dans les provinces visées par la présente étude :

Colombie-Britannique. Cette province a adopté un modèle mixte de prestation de services par des avocats internes et par des mandats d'aide juridique. Les prisonniers peuvent présenter une demande de services juridiques aux Prisoners' Legal Services en composant un numéro sans frais [25].

Alberta. Les personnes-ressources que nous avons consultées ont indiqué que le modèle en usage dans la province est surtout celui de la prestation de services par mandats d'aide juridique, mais qu'il existe, dans les établissements fédéraux, un modèle mixte fondé sur la prestation de services par des avocats et des cliniques juridiques dans certains domaines. Dans les établissements qui reçoivent la visite du personnel de l'Aide juridique, les détenus peuvent prendre rendez-vous avec lui pour présenter leurs demandes de services. Il semble que l'établissement d'Edmonton fasse exception à la règle et que les demandes formulées par ses détenus sont recueillies par téléphone.

Saskatchewan. Dans cette province, les services juridiques sont dispensés par des avocats internes. On peut obtenir les services d'avocats internes dans les bureaux locaux et des services Brydges en passant un contrat avec un avocat de pratique privée. Les avocats du bureau de Prince Albert assistent aux audiences de la Cour provinciale qui se tiennent mensuellement au pénitencier de Prince Albert, afin de s'occuper des accusations criminelles qui proviennent de l'établissement et d'autres accusations que les détenus veulent régler avant le prononcé de leur sentence. Les demandes de services d'aide juridique qui comptent parmi ceux qui sont offerts en Saskatchewan sont remplies au téléphone ou en personnel par le personne de l'Aide juridique. Aucun service spécialisé en droit pénitentiaire n'est offert aux détenus des établissements fédéraux.

Manitoba. Dans cette province, la prestation de services se fait par des avocats internes, des avocats de service, des avocats des cliniques sans rendez-vous et par des mandats d'aide juridique. Les prisonniers doivent présenter une demande de services à un avocat de pratique privée qui doit se rendre à l'établissement pour remplir la demande ou ils peuvent présenter cette demande à un avocat dans une clinique (dans les établissements où de telles cliniques existent).

Ontario. Le modèle de prestation de services est surtout celui de la prestation par mandats d'aide juridique, mais Aide juridique Ontario envoie aussi des avocats de service dans les établissements pour recueillir les demandes, donner des conseils juridiques et représenter les détenus. Les avocats et les étudiants du Projet de droit correctionnel de Kingston offrent aussi des conseils et une représentation juridiques Des mandats d'une durée de deux heures sont accordés d'une façon discrétionnaire pour les consultations initiales. Les avocats indiquent à Aide juridique Ontario si, à leur avis, la cause est admissible à l'aide juridique.

Québec. L'approche de cette province est mixte et prévoit le recours aux mandats et aux avocats de l'aide juridique. Les détenus peuvent présenter une demande de services d'aide juridique par téléphone et un représentant de l'Aide juridique visite l'établissement pour évaluer leur cas et déterminer si la délivrance d'un mandat d'aide juridique se justifie.

Nouveau-Brunswick. La prestation de services se fonde sur le modèle de la prestation par mandats d'aide juridique. Les personnes-ressources que nous avons interrogées ont indiqué que les prisonniers peuvent obtenir des formulaires de demande de mandat auprès du personnel correctionnel et que ces formulaires peuvent être envoyés par télécopieur de la prison au bureau d'aide juridique. Ce sont des considérations de sécurité qui déterminent si le détenu peut envoyer lui-même la demande par télécopieur ou s'il doit prier un membre du personnel correctionnel de le faire pour lui.

Nouvelle-Écosse. La plupart des services dans cette province sont dispensés par des avocats internes. Des mandats d'aide juridique peuvent cependant être accordés en cas de conflit d'intérêts. Les prisonniers peuvent téléphoner au bureau d'aide juridique pour obtenir un formulaire de demande. Après avoir rempli le formulaire, le prisonnier le renvoie au bureau d'aide juridique. Une personne-ressource a aussi indiqué qu'à l'établissement de Springhill, un avocat interne fait la collecte des formulaires de demande chaque semaine.


[21] À l'exception de l'Alberta, dont le régime d'aide juridique n'a pas été créé par voie législative, ce qui place cette province dans une situation particulière en ce qui touche l'octroi discrétionnaire des services d'aide juridique. La section 2.5.2 traite de façon plus complète de l'octroi discrétionnaire.

[22] Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20, alinéa 4e).

[23] Voir Howard c. Établissement Stony Mountain, [1984] 2 C.F. 642.

[24] http://www.johnconroy.com/winters.html; http://www.brownandevans.com/comment_05.html

[25] Dans la foulée de la restructuration des services d'aide juridique qui a eu lieu en Colombie-Britannique, les Prisoners' Legal Services cesseront leurs activités le 30 août 2002. Lorsque nous menions notre étude, la Province avait lancé un appel d'offres pour la prestation de services juridiques aux prisonniers.

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