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Traitement par la justice pénale des homicides commis par un partenaire intime par opposition aux autres types d’homicides

  1. 5.0 Discussion et conclusion
    1. 5.3 Est-il possible d’établir un lien entre les lois, les politiques et les pratiques judiciaires?

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5.3 Est-il possible d’établir un lien entre les lois, les politiques et les pratiques judiciaires?

La dernière question à se poser (et peut-être la plus importante) est celle de savoir ce qui peut expliquer les constatations documentées dans notre étude. L’un des avantages des analyses statistiques fondées sur de vastes ensembles de données est qu’elles permettent aux chercheurs de dégager les tendances et de déterminer les relations qui existent entre un certain nombre de variables. Cependant, l’une des limites méthodologiques de ce genre d’analyse réside dans le fait que, souvent, on ne dispose pas des détails suffisants pour comprendre la raison de ces tendances. Par exemple, comme nous l’avons déjà précisé, bien que notre étude montre que les négociations de plaidoyer sont plus courantes dans les affaires d’homicides commis par un partenaire intime, nous n’avions pas assez d’information pour déterminer pourquoi. De la même façon, il n’y avait pas de renseignements sur le raisonnement qui sous-tendent les décisions relatives aux peines imposées, car les dossiers des procureurs de la Couronne ne comprennent pas les motifs du jugement. Par ailleurs, même si nous avions fait appel à d’autres sources d’information, le prononcé de la sentence n’aurait peut-être pas toujours été fourni. Il faut donc reconnaître que le manque d’information relative aux raisons sur lesquelles se fondent les décisions prises par la justice pénale est la cause des principales lacunes des études qui portent sur les résultats du processus pénal en général (Daly, 1994; Steffensmeier et coll., 1993).

Toutefois, l’attitude des tribunaux face à la relation intime a changé, et cette évolution semble s’être, jusqu’à un certain point, produite parallèlement à une sensibilisation à l’égard de la violence entre partenaires intimes en tant que problème social grave et à une accentuation des préoccupations à ce sujet. Peut-on alors conclure que les changements apportés aux lois et aux politiques au cours des trois dernières décennies en réponse aux inquiétudes croissantes ont contribué à modifier le traitement réservé à la violence entre partenaires intimes au sein du système de justice pénale? Les féministes ont-elles réussi, en remettant constamment en question les stéréotypes liés à la relation intime et à la violence interpersonnelle, à changer la perception qu’ont les intervenants du système de justice pénale et le grand public des crimes de violence qui mettent en cause des partenaires intimes? Généralement (et cela est logique), les changements apportés aux lois en matière pénale, ainsi qu’aux lois en général, reçoivent un appui politique généralisé, ce qui est aussi vrai dans le cas des changements survenus dans les lois et les politiques relatives à la violence entre partenaires intimes. Cependant, dans bien des cas, seules quelques études examinent l’efficacité de ces changements par rapport au problème ou à la question qu’ils visent (Dugan, 2003). En outre, les politiques en matière de justice pénale ont, du moins en ce qui concerne la détermination de la peine, évolué dans une large mesure sans qu’il n’y ait d’études destinées à analyser les changements survenus, ni au Canada ni ailleurs (Roberts, 1999). Par ailleurs, si le « décalage » entre les recherches et les politiques s’est quelque peu atténué au cours des dernières décennies, il reste beaucoup à faire pour évaluer les répercussions des réformes qui ont modifié les lois et les politiques (ainsi que des autres initiatives) pour ce qui est de changer les attitudes vis-à-vis de la violence entre partenaires intimes ainsi que de réduire et de prévenir la violence en général.

À première vue, les résultats que nous présentons portent à croire que ceux qui mettaient en doute l’incidence des changements législatifs et politiques sur le traitement réservé aux crimes de violence par la justice pénale se sont peut-être montrés trop pessimistes. Toutefois, l’objet de notre étude n’était pas de démontrer (et nos résultats ne permettent d’ailleurs pas une telle démonstration) qu’il existe un lien direct entre la mise en œuvre de nouvelles lois ou politiques visant à modifier le traitement de la violence entre partenaires intimes au sein du système de justice pénale et les tendances que nous avons observées. Ce que notre étude indique, cependant, c’est que l’existence d’un tel lien est probable et que d’autres recherches sur la question doivent être menées. Pour ce faire, il faudra toutefois disposer d’information sur la justice pénale qui soit de meilleure qualité que celle qui est disponible à l’heure actuelle. De plus, on doit élaborer des indicateurs à l’aide desquels on pourra déterminer si les résultats visés par les programmes et les initiatives ont été atteints. Jusqu’à présent, les limites des données relatives aux crimes, surtout celles qui concernent les tribunaux, ont empêché une analyse systématique des tendances en matière pénale. En fait, il n’existe aucune source de données nationales permettant de faire le lien entre l’information relative à la victime, à l’accusé et aux caractéristiques de l’infraction, d’une part, et, d’autre part, les résultats auxquels en arrive la justice pénale dans les affaires criminelles. Une grande partie des connaissances au sujet des facteurs qui influent sur les décisions issues du processus pénal se fondent donc sur des études portant sur une seule région et visant une période restreinte.

Bien que notre étude porte, elle aussi, sur une seule région, elle présente toutefois trois avantages. Premièrement, les données utilisées fournissent des renseignements inédits sur le processus pénal qui ne sont pas facilement accessibles au Canada. Par exemple, nous avons examiné plusieurs étapes du processus décisionnel en matière de justice pénale, à partir de l’étape initiale de la mise en accusation jusqu’à celle de la détermination de la peine – cette dernière ayant été le sujet central de la majorité des études réalisées dans le domaine pénal au Canada. Deuxièmement, parce que nous disposions, pour chaque affaire d’homicide, d’information détaillée sur l’accusé, la victime et l’infraction, nous avons pu établir un lien entre d’importantes variables judiciaires et non judiciaires, et les résultats du processus pénal. Troisièmement, nous avons examiné les tendances se dégageant de ces résultats pendant près de trois décennies, ce qui nous a permis de comparer des décisions s’inscrivant dans divers contextes sociaux et juridiques. Étant donné que des changements semblables à ceux que nous avons mentionnés sont survenus dans tout le Canada et dans d’autres pays développés en ce qui concerne la réaction à la violence entre partenaires intimes, il se peut que des tendances similaires soient observées dans d’autres régions d’ici ou d’ailleurs. Toutefois, des recherches plus approfondies doivent être menées avant que des conclusions puissent être tirées à ce sujet.

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