Ruptures en blocs.

Le littoral de la mer de Beaufort au Canada se compose de sédiments non consolidés cimentés avec de la glace. Ces sédiments incluent la boue, le sable, le gravier et le diamicton glaciaire. Parmi les formes de relief littorales figurent des talus de toundra peu inclinés progressivement envahis par la mer, des deltas, des estrans, des marais supratidaux, des plages et des barrières, des lagunes et des baies complexes formées par la rupture de lacs thermokarstiques. Le littoral est surtout composé (52%) de falaises dont l'érosion est causée par le ravinage, le creusage de niches par les vagues, le déclenchement de coulées peu profondes, de ruptures de blocs et de glissements régressifs dus au dégel.

L'érosion de la toundra et dégradation des lacs thermokarstiques forment des promontoires lesquelles alimentent flèches près de Tuktoyaktuk. Les collines coniques sont des pingos érodés.

Les formes littorales sont surtout des formes dues à l'érosion (63%) et même là où l'on trouve des formes dues à l'accrétion, le littoral recule. La vitesse de recul des littoraux varie de moins de 1 m à 20 m par année. Au cours d'une seule tempête, une falaise peut reculer de plus de 10 m. Les vitesses les plus rapides sont enregistrées le long du littoral de faible hauteur du delta du Mackenzie et dans les falaises riches en glace.

Le village de Tuktoyaktuk

Le village de Tuktoyaktuk a été fondé en 1934 par la Compagnie de la baie d'Hudson pour le transbordement des marchandises transportées par des barges provenant du fleuve Mackenzie. Le port, d'une profondeur de 20 à 30 m par endroits, est le mieux protégé entre l'île Herschel, à l'ouest, et le cap Bathurst, à l'est. En 1994, sa population était de 1000 habitants et il s'agissait de la seule agglomération permanente sur la mer de Beaufort. Il est situé sur une petite péninsule longeant la péninsule Tuktoyaktuk sur la rive est de la baie Kugmallit. Les sédiments superficiels y sont composés de sable et de gravier fluvioglaciaires, surmontés d'une mince couche de diamicton. Le pergélisol y est continu et on trouve de la glace massive sous forme de filons-couches, de coins et de pingos au sein des sédiments. Comme le niveau de la mer monte à une vitesse d'environ 2,5 mm/a, une grande partie de la côte est érodée. Le recul à long terme typique (plusieurs décennies) des falaises littorales non lithifiées est de l'ordre de 1 à 2 m/a. Ici et là, des formes d'accumulation (flèches et barres) sont créées par le transport de sable et de gravier érodé. Des flèches se sont formées des deux côtés de la péninsule sur laquelle est établi le village.

Des études récentes ont permis d'établir l'importance des tempêtes d'automne, de la position de la bordure des glaces et des ondes de tempête dans le recul rapide des côtes pergélisolées non lithifiées. Les nombreuses tempêtes et la glace de mer peu abondantes en 1944, 1970 et 1993 se sont traduites par d'importants épisodes d'érosion. Le terrain de curling a été sous-cavé et complètement érodé dans les années 1980 et l'école a été fermée et démolie dans les années 1990. Le changement climatique pourrait augmenter la fréquence des tempêtes étant donné que la quantité de glace de mer diminue au cours de l'été et pourrait produire des changements dans l'intensité ou la fréquence des tempêtes. La montée du niveau de la mer aura également des répercussions à long terme.

Auteur: S. Solomon
Commission géologique du Canada