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Biographies


Photo de Daphne Odjig

Daphne Odjig

(1919- )
Peintre

Daphne Odjig
Droit d'auteur/Source

Tableau de Daphne Odjig intitulé ROOTS

Roots
Tableau
1979

Roots de Daphne Odjig, 1979
Droit d'auteur/Source

Née et élevée dans le village de Wikwemikong, sur l'île Manitoulin, Daphne Odjig possède de fortes racines traditionnelles dans sa culture autochtone (elle est Potawatomi, Odawa et anglaise) et est fière de la tradition artistique de ses ancêtres. Son grand-père, Jonas Odjig, gravait les pierres tombales pour l'église voisine et, plus tard, a dessiné et peint des vues d'églises. Son père peignait des scènes de guerre et des portraits de soldats de la Grande Guerre et était un musicien talentueux.

Ayant grandi sur une ferme laitière, Daphne était habituée à travailler fort. Néanmoins, elle et ses trois frères et sa sœur ont trouvé le temps d'apprécier la natation dans le trou d'eau voisin, en été, et les contes du pays en hiver. Malheureusement, à 13 ans, un accès de fièvre rhumatismale interrompt sa scolarité -- événement qui la frustre parce qu'elle avait projeté de devenir institutrice. Plus tard, Daphne a apprécié sa convalescence à la maison, parce qu'elle lui a donné l'occasion de devenir très proche de sa mère et de son grand-père.

Il se trouve que ces deux personnes importantes dans sa vie sont décédées quand elle avait 18 ans. Peu après, Daphne quitte la réserve « Wiki » pour la petite ville ontarienne de Parry Sound, où elle subit de la discrimination raciale pour la première fois. C'est alors qu'elle, ses frères et sa sœur prennent le nom de « Fisher », traduction anglaise de « Odjig », en réaction à ce préjudice.

Au cours des premières années de la Seconde Guerre mondiale, Daphne déménage à Toronto pour y trouver de l'emploi. C'est là qu'elle rencontre son premier mari, Paul Somerville, dont l'affectation militaire les mène sur la côte ouest. Ce n'est qu'après l'entrée à l'école de leurs deux fils que Daphne commence à prendre la peinture au sérieux.

Daphne dit qu'elle « est née avec un pinceau à la main » et que, enfant, elle vivait pour la classe d'art du vendredi à l'école. Les dessins et les peintures qu'elle réalisait au début étaient d'un style réaliste, la plupart du temps parce que ses professeurs l'incitaient à faire des peintures « réalistes ». Cependant, Daphne trouvait ces instructions rigides et souhaitait plutôt peindre ce qu'elle « ressentait ».

Adulte, Daphne a d'abord peint dans un style réaliste, mais elle a bientôt expérimenté aussi d'autres styles. Artiste autodidacte, elle visite souvent les galeries d'art et emprunte des livres d'art dans les bibliothèques, étudiant divers artistes et leur œuvre. Vanderburgh et Southcott récapitulent l'exploration des styles artistiques de Daphne comme suit : « Daphne had taught herself to paint realism; next she explored cubism and then abstract expressionism. She moved through impressionism and cloissonnism. She was influenced by the Northwest Coast art and the developing Anishnabe style » [traduction libre : Daphne avait appris elle-même à peindre dans le style réaliste; elle a ensuite exploré le cubisme et puis l'expressionnisme abstrait. Elle a évolué à travers l'impressionnisme et le cloisonnisme. Elle a été influencée par l'art de la côte nord-ouest et le style Anishnabe en pleine ascension] (A Paintbrush in My Hands, p. 88).

Le travail de Daphne est souvent associé à l'école de New Woodland. Ce style a été à l'origine attribué à Norval Morrisseau, le premier à défier les restrictions culturelles en prenant la pictographie sacrée des communautés Ojibwa -- système de croyance Midewewin hors des communautés autochtones. On décrit le style comme ayant plusieurs caractéristiques : une forme prédominante faite d'une ligne noire, un fond noir indifférencié, des couleurs pures non mélangées, un système de vues au rayon X et un système de lignes interconnectées de pictogrammes sacrés connus en tant que « déterminants linéaires » (Odjig: the Art of Daphne Odjig, 1960-2000, p. 16).

Bob Boyer fait remarquer que Daphne proclame souvent qu'elle ne fait pas partie de l'école New Woodland en ce sens qu'elle intègre dans ses œuvres l'importance de la féminité et le sens de la famille, tandis que d'autres dans le groupe New Woodland s'intéressent à une recherche spirituelle (Odjig: the Art of Daphne Odjig, 1960-2000, p. 12). Son œuvre diffère également du fait que la peintre a été influencée par le cubisme de Picasso, mais dans un contexte autochtone. Le style cubiste l'a attirée en raison de son « disregard for perspectival space, its skewing of the elements and relationships of reality, and its central compositional structure » [traduction libre : abstraction qu'il fait de la perspective, de l'asymétrie des éléments et des rapports avec la réalité ainsi que de sa structure de composition centrale] (Odjig: the Art of Daphne Odjig, 1960-2000, p. 17).

Au début des années 1960, les communautés autochtones à travers le Canada entreprennent une renaissance culturelle. À peu près à cette époque, Daphne est encouragée par sa belle-sœur à peindre des scènes de la mythologie de Manitoulin. Elle écrit et illustre également une série de livres pour enfants sur les légendes de Nanabush, personnage de filou dans la culture Ojibwa. Ce travail donne un thème à Daphne et, plus tard, la confiance de peindre pour un public. Cependant, un drame survient : en 1960, son mari, Paul Somerville, se tue dans un accident de voiture. Daphne fait le deuil de cette perte en se consacrant à la fraiseraie qu'elle avait mise sur pied avec son mari et en peignant pendant les soirées.

En 1962, Daphne se remarie. Son deuxième mari s'appelle Chester Beavon. Le travail de développement communautaire de Beavon mène le couple dans le nord du Manitoba, au milieu des années 1960. Au Manitoba, Daphne apprend les souffrances qu'endurent les Cris d'Easterville déplacés et dont les terres ont été inondées à la suite de la construction de barrages. « She felt the need to respond to a community searching for its roots and contemporary relevance » [traduction libre : Elle a ressenti la nécessité de répondre à une communauté qui cherchait ses racines et la pertinence de son existence contemporaine] (Odjig: the Art of Daphne Odjig, 1960-2000, p. 15). Cette réponse a été traitée dans une série de dessins à l'encre sur la vie dans la réserve, avec des images sur les activités de subsistance.

En 1972, l'art d'Odjig l'amène à Winnipeg et à une exposition pivot intitulée « Treaty Numbers 23, 287 et 1171 » à la Winnipeg Art Gallery. Son œuvre y est exposée à côté de celle de Jackson Beardy et d'Alex Janvier. C'est la première fois que des artistes autochtones exposent leurs œuvres dans une galerie d'art publique canadienne, plutôt que dans un musée. À propos de la signification de l'exposition, Carol Podedworny note que « That the contemporary productions of living Canadian Native artists would remain relegated to museums of anthropology and ethnography well into the 1980s confirms the colonialist mentality that has surrounded the exhibition and interpretation of Native art in Canada for nearly sixty years » [traduction libre : le fait que les œuvres contemporaines d'artistes canadiens autochtones vivants restent reléguées dans les musées d'anthropologie et d'ethnographie jusque dans les années 1980 confirme la mentalité colonialiste qui a entouré l'exposition et l'interprétation de l'art autochtone au Canada pendant presque soixante ans] (Odjig: the Art of Daphne Odjig, 1960-2000, p. 14). Cette déclaration donne une idée de la lutte que les artistes autochtones ont dû mener pour être reconnus dans le monde traditionnel de l'art. En outre, Daphne était la seule femme artiste autochtone faisant face à cette lutte dans les premières années, situation rendue d'autant plus difficile qu'elle était une artiste autodidacte et, en conséquence, pas respectée à cette époque.

Winnipeg a néanmoins été comme un tournant pour Daphne. C'est là, en 1973, que voit le jour la Professional Native Indian Artist Association (familièrement appelée « le Groupe indien des sept ») et dont elle est l'une des cofondatrices. Ce groupe est formé par Daphne, Jackson Beardy, Carl Ray, Joseph Sanchez, Eddy Cobiness, Norval Morrisseau et Alex Janvier. Il est évident que Daphne est la première et la seule femme à faire partie de ce groupe. Plus tard, en 1974, Daphne et Chester ouvrent The Warehouse Gallery à Winnipeg, une énorme entreprise qui appuyait les nouveaux artistes autochtones.

En 1976, les Beavon déménagent dans leur maison actuelle d'Anglemont, en Colombie-Britannique, un endroit paisible près du lac Shuswap. C'est là que sont nées les idées pour créer l'immense œuvre murale que le Musée de l'homme à Ottawa (maintenant le Musée canadien des civilisations à Gatineau) leur avait commandée. Tandis que ces idées prenaient forme, « Daphne realized she was going to portray history from the Native point of view. She would bring into this history her own reactions as a Native person -- her emotions of horror, pain, anger and hope » [traduction libre : Daphné se rendait compte qu'elle allait peindre l'histoire d'un point de vue autochtone. Elle introduirait dans cette histoire ses propres réactions d'Autochtone -- ses émotions d'horreur, de douleur, de colère et d'espoir] (A Paintbrush in My Hand, p. 85). La peinture murale à quatre parties, intitulée The Indian in Transition (1978), mesurait 2,6 m x 8,8 m environ [8 pi x 27 pi] et, comme l'écrit Podedworny, elle a fourni à Daphne « … [the] opportunity to be bolder, to express emotions with no inhibition […] Daphne considered this piece] a personal achievement related to her admiration of Picasso's freedom in expressing human truths. She thinks that her public had not been ready, to this point, for her to depict human agony on canvas » [traduction libre : [...] l'occasion d'être plus audacieuse pour exprimer ses émotions sans inhibition. [Daphné a considéré cette œuvre] comme un accomplissement personnel relié à son admiration pour la liberté de Picasso dans son expression des vérités humaines. Elle pense que son public n'était pas prêt, à ce stade, pour qu'elle dépeigne l'agonie humaine sur la toile] (Odjig: the Art of Daphne Odjig, 1960-2000, p. 20).

Depuis son travail sur cette murale, Daphne a continué à peindre sans inhibition. Podedworny décrit l'œuvre d'Odjig pendant les années 1970 comme étant politique et emploie la métaphore des hymnes culturels pour décrire son œuvre entre les années 1980 et 1990 (Odjig: the Art of Daphne Odjig, 1960-2000, p. 14). Podedworny fait valoir que l'œuvre d'Odjig a pris des accents plus lyriques et « the paintings seem to reflect a peace and tranquility not evident in Daphne's political oeuvre » [traduction libre : les peintures semblent refléter une paix et une tranquillité qui ne sont pas évidentes dans l'œuvre politique de Daphné] (Odjig: the Art of Daphne Odjig, 1960-2000, p. 24).

En parallèle, une autre murale, intitulée Roots, récapitule de façon intéressante le voyage d'Odjig vers la découverte d'elle-même :

Roots, a visual biography, consists of three panels, each five by four feet . . . The panel on the left depicts the harmonious life that she [Odjig] knew on the reserve. The middle one shows a female form turning her back to the viewer and heading for the distant city; the centre foreground contains tree roots wrenched from the earth and a headless body with two free-floating faces (one red, one blue), representing her identity crisis. The third panel represents a whole person, with her uncertainties resolved: 'You find out who you are and are proud … only when you discover yourself can you be secure.'


[Traduction libre : Roots, une biographie visuelle, se compose de trois panneaux, de cinq pieds par quatre chacun. Le panneau de gauche dépeint la vie harmonieuse qu'elle [Odjig] a connue dans la réserve. Celui du centre montre une forme de femme tournant le dos au spectateur et se dirigeant vers la ville lointaine; le premier plan au centre contient des racines d'arbre sortant de terre et un corps sans tête avec deux visages flottant librement (un rouge, un bleu), représentant sa crise d'identité. Le troisième panneau représente une personne entière, ayant résolu ses incertitudes : « Vous découvrez qui vous êtes et vous en vous êtes fier. Ce n'est qu'une fois que vous vous découvrez vous-même que vous pouvez être rassuré.]

(A Paintbrush in My Hand, p. 90)

Odjig a à son actif un grand nombre de réalisations. En voici quelques-unes :

  • Elle a reçu des commandes de l'Expo 70 qui s'est tenue à Osaka, au Japon, du Manitoba Museum of Man and Nature et de la compagnie aérienne israélienne El Al.
  • Elle a reçu une bourse de six mois de la Brucebo Foundation de Suède en 1973.
  • Elle a reçu un doctorat honorifique ès lettres de l'Université Laurentienne en 1982, un doctorat honorifique en droit de l'University of Toronto en 1985 et un doctorat honorifique en éducation de la Nipissing University en 1997.
  • Elle a agi comme conseillère à la Society of Canadian Artists of Native Ancestry (SCANA) en 1985; en 1993, cette organisation l'a honorée comme une ancienne et l'a décorée d'une plume d'aigle sacré.
  • En 1986, elle était l'une des quatre artistes dans le monde qu'a choisis le conservateur du musée Picasso d'Antibes, en France, pour peindre un monument commémoratif à Picasso.
  • Elle a été décorée de l'Ordre du Canada, en 1986, pour son militantisme artistique et social.
  • Elle a été élue à l'Académie royale (des arts) du Canada, en 1989.
  • Elle a reçu le National Aboriginal Achievement Award for Arts and Culture en 1998.

Carol Podedworny clôture son hommage à Daphne comme suit : « Odjig has played an important part in recording developments that have been traumatic, passionate and critical to the rewriting of Canadian art history  » [traduction libre : Odjig a joué un rôle important dans l'enregistrement de développements qui ont été traumatiques, passionnés et critiques pour la réécriture de l'histoire de l'art canadien] (Odjig: the Art of Daphne Odjig, 1960-2000, p. 26).

Cependant, il convient d'honorer l'artiste en lui laissant le dernier mot :

If my work as an artist has somehow helped to open doors between our people and the non-Native community, then I am glad. I am even more deeply pleased if it has helped to encourage the young people that have followed our generation to express their pride in our heritage more openly more joyfully than I would have ever dared to think possible. ,


[Traduction libre : Si mon œuvre d'artiste a aidé d'une façon ou d'une autre à ouvrir les portes entre notre peuple et la communauté non autochtone, alors je suis contente. Je suis encore plus profondément heureuse si elle a aidé à encourager les jeunes gens de la génération suivant la nôtre à exprimer leur fierté de notre héritage plus ouvertement, plus joyeusement que je n'aurais jamais osé le croire possible.]

(Odjig : the Art of Daphne Odjig, p. 78)

Lectures suggérées

« Brush in hand : Daphne Odjig is the grand lady of Native art ». -- Calgary herald. -- (Feb. 21, 1993). -- P. C1, C3

« Daphne Odjig : arts and culture ». -- National Aboriginal Achievement Award's 1998 recipients [en ligne]. -- National Aboriginal Achievement Foundation. [Réf. du 31 mai 2002]. -- Accès : www.naaf.ca/rec98.html

Edinborough, A. -- « Painter's lifework a profound synthesis ». -- The financial post. -- (Saturday April 27, 1985). -- P. 26

Garneau, D. -- « [Exposed : aesthetics of Aboriginal erotic art. Mackenzie Art Gallery. Regina] ». -- Border crossings. -- Vol. 18, no. 4 (November 1999). -- P. 78-80

Knapp, M. -- « Nature's resident artist ». -- Aboriginal voices. -- Vol. 5, no. 5, (October 1998). -- P. 26-29

Lusty, T. -- « Daphne Odjig's hand an extension of the soul (A paintbrush in my hand ». -- Windspeaker. -- Vol. 13, no. 1 (1995). -- P. 8

Odjig, Daphne. -- A paintbrush in my hand. -- Through R.M. Vanderburgh and M.E. Southcott. -- Toronto : Natural Heritage/Natural History, c1992. -- 174 p.

____. -- Odjig : the art of Daphne Odjig, 1960-2000. -- Essays by Bob Boyer and Carol Podedworny ; foreword by Phillip Gevik. -- Toronto : Key Porter Books, 2001. -- 126 p.

« Spirit's journey : the life and art of Daphne Odjig ». -- Equinox. -- Vol. 5, no. 4 (1986). -- P. 50-59

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