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Viabilité écologique urbaineDocuments
La qualité de l'environnement dans les villes canadiennes : le rôle du governement fédéral   [version Adobe PDF - 3.2 MB]

Chapitre 4 - La politique budgétaire actuelle et la qualité de l’environnement urbain

Quelles sont les politiques budgétaires du gouvernement fédéral qui ont un impact sur la qualité de l’environnement urbain? L’influence est-elle délibérée ou involontaire? Les divers programmes budgétaires des trois ordres de gouvernement fonctionnent-ils de manière concertée (ou non) pour améliorer la qualité de l’environnement dans les centres urbains du Canada ?

Le gouvernement fédéral

Dans le cadre de ses travaux de recherche sur la viabilité écologique urbaine, la TRNEE a commandé une étude des différents programmes et politiques budgétaires fédéraux touchant la qualité de l’environnement urbain.21 Cette étude a confirmé quelques un des résultats du Rapport Sgro selon lesquels les politiques, les programmes de dépenses et les activités du gouvernement fédéral exercent une influence importante sur la qualité de l’environnement urbain. Toutefois, dans certains cas, cette influence est davantage involontaire que délibérée. Le gouvernement fédéral ne dispose d’aucun mécanisme qui lui permette d’évaluer l’impact sur la qualité de l’environnement urbain, et encore moins la viabilité écologique urbaine dans son ensemble. Par conséquent, l’approche du gouvernement fédéral en matière de qualité de l’environnement urbain n’est pas uniforme. Ainsi :

  • Quelques initiatives fédérales concernent « L’écologisation du gouvernement » (comme l’initiative fédérale Prêcher par l’exemple qui exige de certains ministères de produire des plans individuels de viabilité écologique); toutefois, la plupart de ces initiatives ne tiennent pas compte des effets des installations et des activités fédérales sur la qualité de l’environnement urbain.
  • Une partie seulement du programme Infrastructures Canada de 2,05 milliards de dollars vise les projets d’infrastructures vertes (cette partie varie d’une province à l’autre), et les critères servant à déterminer ce qui doit être considéré comme « vert » ne sont pas bien établis. En outre, le Fonds canadien sur l’infrastructure stratégique, dont la création a été annoncée récemment, ne possède pas de volet vert explicite.
  • Même si les municipalités peuvent réclamer un remboursement de 57,14 % de la taxe sur les produits et services (TPS) qu’elles paient, le taux réel de 3 % de TPS applicable représente quand même des sommes d’argent importantes par rapport aux achats souvent à grande échelle qu’elles doivent réaliser (p. ex., la Ville de Toronto estime dépenser entre 15 et 40 millions de dollars par an pour ses seuls véhicules de transports en commun).
  • Certains programmes fédéraux encouragent la réurbanisation, comme les subventions uniques qui sont accordées pour la revitalisation de secteurs riverains et les initiatives visant le réaménagement de sites urbains contaminés.
  • Certes, des remboursements de TPS sont accordés pour les constructions neuves afin d’encourager l’achat de maison d’habitation (valeur approximative de 520 millions de dollars en 2000), mais les rénovations visant à rendre les maisons plus efficaces sur le plan énergétique ne donnent normalement pas lieu à un remboursement de TPS.
  • Certains programmes d’encouragement visent à améliorer l’efficacité énergétique des bâtiments commerciaux et industriels (p. ex., le Programme d’encouragement pour les bâtiments commerciaux et le Programme d’encouragement pour les bâtiments industriels). Toutefois, aucun stimulant direct n’est offert aux consommateurs afin de les inciter à acquérir des maisons R-2000 (qui consomment 30 % moins d’énergie que les maisons d’habitation neuves ordinaires).
  • Le gouvernement fédéral réglemente les émissions provenant des véhicules, mais il s’est laissé dépassé par le succès des VUS et des camionnettes, dont la consommation en carburant s’est accrue de 85 % au cours de la dernière décennie; la taxe sur le carburant de 10 cents le litre, ainsi que la taxe sur les véhicules lourds (qui maintenant couvre les VUS, mais demeure invisible au consommateur), n’ont jusqu’à présent pas réussi à faire fléchir la demande pour ces véhicules à forts taux d’émissions.

L’étude de cas sur la région du Grand Toronto

La TRNEE a aussi commandé une étude de cas22—la première de sa catégorie—qui a confirmé l’existence d’une vaste série de politiques budgétaires au sein des gouvernements provincaux ou municipaux, touchant la qualité de l’environnement urbain. Combinée à l’examen de la politique budgétaire fédérale, cette tranche verticale des politiques et des programmes fédéraux, provinciaux et municipaux a pu renseigner sur leur degré de complémentarité ou de contradiction entre les trois ordres de gouvernement.

L’étude de cas a examiné trois municipalités situées dans la région du Grand Toronto (RGT)—la Ville de Toronto (une ville déjà bien développée), la Ville de Mississauga (une ville en expansion) et la Ville de Markham (une ville nouvellement urbanisée). Elles possèdent des formes urbaines différentes ainsi que des systèmes de transport distincts, mais interdépendants. En sélectionnant un éventail de différentes catégories de villes, on a pu se faire une idée de la manière dont les politiques budgétaires fonctionnaient selon les contextes urbains. Afin de tenir compte de la structure de la gestion des affaires publiques au sein de la RGT, des politiques pertinentes au niveau régional ont aussi été identifiées (les politiques de la région de Peel, pour la Ville de Mississauga et de la région de York en ce qui concerne Markham).

Au niveau provincial, le régime fiscal foncier de l’Ontario exerce une grande influence sur les modèles de croissance et d’aménagement dans les villes. Le système ontarien de « l’évaluation à la valeur actuelle du bien » ne favorise pas des modèles d’aménagement urbain qui sont écologiquement viables; il reflète la valeur au marché des propriétés plutôt que le niveau de leur contribution au coût municipal.

Ce régime fiscal foncier a longtemps été peu favorable aux immeubles à logements multiples, en leur appliquant un taux plus élevé d’imposition qu’aux maisons individuelles unifamiliales. L’Ontario est en train de corriger cette situation en créant une nouvelle classe d’immeubles à logements multiples pour une période de 35 ans, qui permettra aux municipalités d’imposer ces immeubles au même taux que les autres ensembles résidentiels.

Le gouvernement de l’Ontario possède plusieurs programmes prévoyant une exemption de l’impôt foncier ordinaire, notamment :

  • La réduction d’impôt à l’égard des biens patrimoniaux, qui vise à favoriser la préservation des biens patrimoniaux en offrant une réduction d’impôt qui se situe entre 10 et 40 % des impôts prélevés sur le bien aux fins municipales.
  • La politique d’imposition foncière des propriétés agricoles, qui vise à préserver certains types de terres de l’aménagement et prévoit le classement de l’exploitation agricole au sein de la catégorie des terres agricoles afin qu’elle soit imposée à 25 % du taux municipal d’imposition résidentielle.

Cependant, ces réductions d’impôts sont souvent assumées par les municipalités. En outre, certaines réductions d’impôt sont en réalité susceptibles d’avoir des retombées négatives sur la viabilité écologique urbaine pendant longtemps. Par exemple, la réduction d’impôt foncier à l’égard des bâtiments commerciaux et industriels vacants de l’Ontario, permet aux municipalités d’octroyer des réductions d’impôt foncier si les bâtiments demeurent vacants.

Les municipalités ontariennes disposent aussi de redevances d’aménagement, grâce auxquelles elles perçoivent des taxes sur les nouveaux lotissements. Elles sont ainsi en mesure de recouvrer les dépenses en immobilisations des investissements qu’elles ont dû réaliser dans les infrastructures (p. ex., routes, transports en commun, écoles, égouts). En principe, les redevances d’aménagement permettent de faire en sorte que « la croissance paie pour la croissance ». Cependant, étant donnée leur structure en Ontario— selon le coût moyen par unité d’habitation pour toute la ville (p. ex., une maison individuelle unifamiliale construite sur un lot de 70 pieds donne lieu à la même redevance que la même maison sur un lot de 30 pieds)—celles-ci créent une série d’aides d’interfinancement qui vont à l’encontre des modèles d’aménagement abordables et viables sur le plan écologique. Ces retombées négatives sont reflétées dans le prix des maisons ou des loyers de bureaux et peuvent se révéler assez importantes en banlieue.

Parmi les autres politiques et programmes provinciaux qui ont un impact sur la qualité de l’environnement urbain, on peut citer :

  • Le Plan d’investissement dans les transports en commun de la province, de 3 milliards de dollars, dans le cadre du programme SuperCroissance (qui comprend un financement équivalent auquel se sont engagés provisoirement le gouvernement fédéral et les administrations municipales), vise à lier les investissements à un plan de gestion de la croissance (comme la Stratégie de croissance intelligente actuelle de la province) et inclut le Programme ontarien de renouvellement des véhicules de transports en commun de 100 millions de dollars (pour assurer le remplacement des véhicules de transport en commun vieillissants).
  • Une partie importante du financement du programme SuperCroissance—soit environ 1 milliard de dollars par an dont le résultat est de 7 milliards de dollars approximativement (entre 1995 et 2002)—, a été consacrée aux autoroutes et à l’agrandissement des routes, alors que seulement 3,2 milliards de dollars ont été dépensés dans les transports en commun (dont une part importante est allée au métro Sheppard de Toronto).
  • Le Programme d’infrastructures Canada–Ontario (en vertu duquel le gouvernement fédéral s’est engagé à verser 680 millions de dollars pour arriver au niveau du financement provincial de SuperCroissance et des administrations municipales), vise une cible de 40 % en investissements verts, mais ne prévoit aucun critère de viabilité pour le choix des projets à financer.
  • Le remboursement des droits de cession immobilière de l’Ontario, qui lui encourage l’accession à la propriété de maisons, prévoit une réduction des droits de cession de terrains prélevés par la province au premier propriétaire de maison, mais exclut la revente des maisons.
  • L’Ontario prélève une taxe sur l’essence (de 14,7 cents le litre), mais pas sur d’autres carburants moins nocifs pour l’environnement, et possède quelques programmes qui visent à encourager l’utilisation de véhicules plus écoénergétiques (p. ex., le Programme d’encouragement aux véhicules à carburant de remplacement, la taxe aux fins de conservation de carburant et le crédit de taxe aux fins de conservation de carburant).

En dépit de leur capacité limitée à générer des recettes, les municipalités ont adopté des mesures encourageantes :

  • Le York Region Transportation Master Plan récemment adopté, met surtout l’accent sur les transports en commun, et on estime qu’il coûtera entre 5,6 et 7,3 milliards de dollars en dépenses d’équipement sur une période de 30 ans.
  • La Ville de Markham a structuré ses redevances d’aménagement de manière à ce qu’elles varient d’une zone à l’autre, en fonction des différences de coûts réelles. Toutefois, ces redevances dépendent encore du coût moyen par unité d’habitation à l’intérieur de chaque zone, ce qui ne favorise pas une utilisation du sol plus dense et plus efficace.
  • La Ville de Markham a aussi établi un système énergétique collectif pour favoriser un aménagement plus dense et attirer les entreprises vers son nouveau Centre Markham.
  • De même, la Ville de Toronto a récemment privatisé l’ancienne Toronto District Heating Corporation. La nouvelle entité—Enwave District Energy Limited23—est actuellement engagée dans un projet qui vise à utiliser les eaux profondes du lac Ontario afin de climatiser les immeubles du centre-ville.

Au niveau fédéral, il est clair qu’il existe des incohérences entre les politiques et programmes provinciaux et municipaux, du moins pour ceux qui sont applicables à la RGT.

Un manque de synergie

Les exemples tirés de l’examen des politiques et programmes fiscaux fédéraux et l’étude de cas sur la RGT ont mis en évidence une absence marquée de synergie—et dans certains cas, un conflit évident—entre les politiques budgétaires et autres, qui visent à améliorer la qualité de l’environnement urbain, tant à l’intérieur de chaque gouvernement qu’entre les ordres de gouvernement.

Il n’est pas logique que le gouvernement fédéral touche de l’argent de l’assiette de l’impôt foncier municipal, sous forme de TPS payée sur les dépenses d’infrastructures, pour le reverser aux municipalités par le biais de subventions aux infrastructures. Alors que tant de politiques budgétaires favorisent de manière involontaire l’aménagement des terrains vierges à faible densité (p. ex., le remboursement de la TPS fédérale pour habitations neuves, le remboursement des droits de session de l’Ontario, ainsi que les redevances d’aménagement municipales), les gouvernements dépensent les deniers publics afin d’atténuer leurs effets délétères dans des zones déjà urbanisées (p. ex., les subventions uniques fédérales et provinciales octroyées pour la revitalisation du secteur riverain de Toronto).

L’approche suivie pour le financement des transports semble aussi être incohérente. Comme l’indique le cas du plan SuperCroissance de l’Ontario, les investissements réalisés dans les transports en commun peuvent certainement être sapés par des investissements concurrents dans l’infrastructure routière. Tout comme les investissements fédéraux dans les transports en commun peuvent être minés par une utilisation du sol inadéquate et par des modèles d’aménagement urbain qui ne sont dictés principalement que par des impératifs à l’échelle locale.

Les travaux de recherche effectués par la Table ronde confirment que pour être efficace et être en mesure d’atteindre ses objectifs, un programme de dépenses publiques nécessite une meilleure coordination horizontale et un meilleur alignement vertical des politiques budgétaires et des programmes. Il démontre aussi que la politique budgétaire doit être soigneusement conçue si elle veut servir à améliorer la qualité de l’environnement urbain.


Notes

21 Metropole Consultants en collaboration avec Lisa Salsberg, Ecological Fiscal Reform and Urban Sustainability: An Analysis of Federal Policie, rapport préparé pour la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie, août 2002. Ce rapport peut être obtenu sur le site internet : www.nrtee-trnee.ca

22 David Amborski et Steven M. Webber, Ecological Fiscal Reform and Urban Sustainability: Case Study of the Ontario Provincial Government and Greater Toronto Area Municipalities, rapport préparé pour la Table ronde nationale sur l’environnement et l’économie, août 2002. Ce rapport peut être obtenu sur le site internet : www.nrtee-trnee.ca

23 www.enwave.com


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