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Marchés financiers et la durabilité

Examen sommaire du secteur de l'investissement communautaire au Canada

Coro Strandberg
Strandberg Consulting

Brenda Plant
Brenda Plant Consulting

Septembre 2004

4. Description et analyse du secteur de l’IC aux
États-Unis

4.1 Le secteur de l’IC aux Etats-Unis

Comme nous l’avons souligné, c’est aux États-Unis qu’on trouve le plus vaste secteur de l’investissement communautaire du monde, d’une valeur de 14 G$US en 2003, avec environ 800 à 1 000 institutions financières de développement communautaire (IFDC) en activité. Les IFDC constituent le secteur de l’IR qui connaît la croissance la plus rapide aux États-Unis : leur actif a presque doublé en deux ans, soit une augmentation de 84 % de 2001 à 2003. Depuis quelques années, on a consacré des efforts considérables au suivi et à la surveillance du secteur de l’investissement communautaire aux États-Unis. La création d’un certain nombre d’organismes professionnels d’investissement communautaire a également contribué à catapulter ce secteur dans des cercles plus traditionnels, grâce à l’accent que ces organismes ont mis sur la documentation et la normalisation du secteur de l’IC.

Ces études récentes nous apprennent que les institutions financières, y compris des investissements institutionnels tels que les régimes de retraite, représentent la principale source de capital d’emprunt, d’actions et de dépôts des IFDC, à 42 %. Cependant, le plus important bailleur de fonds des IFDC depuis 1995 est le département du Trésor des États Unis, qui a accordé 534 M$US au secteur par le biais de trois programmes de financement. Les taux d’intérêt exigés dans ce secteur varieraient de 5,6 % (prêts hypothécaires aux particuliers) à 9,2 % (microentreprises). Le ratio de suffisance du capital pour les IFDC qui dévoilent leurs résultats est de 27 % des capitaux propres, ce qui, si on le combine à des réserves pour pertes sur prêts de 5 % en moyenne, suffit amplement à absorber les pertes du portefeuille et les pertes d’exploitation (IFDC, 2002, p. 3, 5 et 7).

Les effets des IFDC sur l’IC vont bien au-delà des impacts faciles à mesurer; il n’en reste pas moins qu’en 2002, on attribue aux IFDC des États-Unis le fait d’avoir assuré un financement de 2,6 G$US; financé et aidé 7 800 entreprises qui ont créé ou maintenu plus de 34 000 emplois; favorisé la construction ou la rénovation de plus de 34 000 unités de logement à prix abordable; construit ou rénové plus de 500 installations communautaires dans des collectivités économiquement défavorisées; consenti des prêts hypothécaires à 4 100 personnes et – dans plus de 4 800 cas – proposé une solution de rechange au remboursement d’emprunts par prélèvement sur le salaire (IFDC, 2003, p. 4).

Pour ce qui est du rendement, il a été bon dans la plupart des portefeuilles d’IFDC, même pendant la période de ralentissement économique. Dans l’ensemble, le taux de pertes nettes sur prêts des IFDC se chiffre à 0,7 % et varie de 0,2 % pour l’ensemble du secteur des banques de développement communautaire à 0,9 % dans le secteur des coopératives de crédit de développement communautaire; ces taux rivalisent avec le taux de pertes nettes sur prêts des institutions financières conventionnelles, qui était de 0,97 % en 2002 (IFDC, 2003, p. 20).

Vu la multitude d’IFDC aux États-Unis, il est difficile de limiter le champ à quelques portraits d’organismes exemplaires. Ceux que nous avons retenus illustrent quelques approches intéressantes en matière d’investissement communautaire : la création d’entreprises environnementales; un marché financier secondaire pour l’investissement communautaire; un fonds commun de placement à critères de sélection axés sur l’environnement, qui finance la conservation dans le cadre de son portefeuille d’IC.

4.1.1 ShoreBank et ShoreBank Pacific

Établie à Chicago, la ShoreBank est la première et principale société bancaire axée sur le développement communautaire et l’environnement aux États-Unis. Depuis sa fondation en 1973, elle a investi plus de 1,7 G$US dans ses collectivités prioritaires – celles qui sont traditionnellement sous-desservies par les autres banques – et dans des entreprises appartenant à des membres de minorités. Elle a créé, conservé ou placé près de 11 000 emplois et rénové 38 000 unités de logement, tout en investissant, depuis sa création, 305 M$US dans de petites entreprises (chiffres de 2002).

Avec un actif consolidé total de 1,5 G$US en 2003, la ShoreBank exploite aussi une société de développement immobilier, un organisme sans but lucratif dans chacun de ses cinq marchés prioritaires, une firme de consultants et une société de financement secondaire. Toutes ces entreprises soutiennent la mission de la ShoreBank, qui est d’établir des collectivités solides et durables, de protéger et restaurer l’environnement et d’aider ses clients à prospérer. La ShoreBank offre un éventail complet de produits et de services bancaires en plus de ses options d’investissement communautaire.

Plus de 4 000 particuliers, sociétés et organismes sans but lucratif soutiennent le travail de la ShoreBank en déposant de l’argent - 324 M$US au total à la fin de l’exercice 2002 – dans ses succursales bancaires. Ces investissements, baptisés Development DepositsMC [dépôts de développement] et EcoDepositsMC [écodépôts], offrent les mêmes caractéristiques et les mêmes taux du marché que les autres dépôts bancaires et sont garantis par le gouvernement fédéral. La banque convertit ces dépôts bancaires ordinaires en prêts de développement pour appuyer ses objectifs généraux de développement communautaire et durable.

Les dépôts de développement aident à financer l’activité économique dans les collectivités sous-desservies, tandis que les écodépôts donnent aux investisseurs de la collectivité la possibilité de soutenir le travail de la ShoreBank Pacific, établie dans l’État de Washington, qui est la première institution financière réglementée en Amérique du Nord à se consacrer à la revitalisation économique durable. La ShoreBank Pacific s’emploie à remplir sa mission de créer une économie de la conservation dans les forêts pluviales de la région du Nord Ouest du Pacifique en ciblant ses prêts à l’intention d’entreprises locales qui font une bonne utilisation de l’énergie, qui s’efforcent de réduire la production de déchets et la pollution et qui conservent les ressources naturelles. En 2002, les écodépôts avaient attiré 57 M$US, puis 81,4 M$US en juin 2004, ce qui représente 2 073 investisseurs ayant placé en moyenne près de 40 000 $US chacun.

La ShoreBank Pacific a prêté 12 M$US en 2002; pour l’ensemble du groupe, elle a financé au total 56 M$US en prêts accordés pour des centaines de projets de conservation. Les emprunteurs ont consacré le produit de ces prêts à l’économie d’énergie, à la réduction des effets environnementaux négatifs, à la fabrication de produits écologiques et à leur mise en marché à des consommateurs « verts », à une prolongation importante de la durée de vie utile de vieux immeubles et à la restauration d’immeubles abandonnés à des fins productives. Ses entreprises se consacrent à l’agriculture biologique, à la pêche respectueuse de l’environnement, à la production de produits forestiers non ligneux, au réaménagement de sites contaminés et au financement d’édifices écologiques. Depuis un an, son financement a contribué à soutenir 1 378 emplois à plein temps et plus de 2 000 emplois saisonniers. Depuis sa création, la ShoreBank a contribué à la conversion de 216 hectares à l’agriculture biologique.

4.1.2 Le Community Reinvestment Act Qualified Investment Fund (CRAQIF)

Le CRAQIF [Fonds d’investissements admissibles aux termes de la loi sur le réinvestissement dans la collectivité] est un fonds commun de placement voué exclusivement à l’investissement communautaire. En date d’août 2004, 250 investisseurs institutionnels ayant un actif combiné de 1 600 G$US avaient investi dans ce fonds, dont l’actif est actuellement de 475 M$US. Ce fonds est depuis peu accessible aux épargnants par l’entremise de Charles Schwab, qui offre à cette fin un service sans frais d’acquisition ni frais de transaction pour tout placement d’au moins 2 500 $. Depuis sa création il y a cinq ans, le CRAQIF a produit un rendement annuel de 6,27 % (juillet 2004), ce qui le place dans les premiers 20 % des 79 fonds de sa catégorie. Le fonds, qui tire son nom d’une loi fédérale américaine, le Community Reinvestment Act de 1977 8, cherche à assurer un accès égalitaire au crédit et au capital aux familles à revenu faible ou moyen, qui sont généralement sous-desservies par les institutions financières traditionnelles. Depuis cinq ans, le CRAQIF a aiguillé près de 900 M$US vers le développement communautaire et ainsi soutenu la mise en service de 61 515 appartements à prix modique, 2 159 maisons pour familles à revenu faible ou moyen, et 1 285 places à prix abordables dans des établissements de santé. Un exemple récent d’achat d’obligations concerne la Société Saint-Vincent de Paul de Seattle. Cet achat a aidé l’œuvre de bienfaisance à donner de l’expansion à son réseau de six magasins à prix modique et à sa fabrique de matelas qui contribue à créer des emplois pour les résidents à faible revenu.

4.1.3 Portfolio 21

Portfolio 21 est un fonds commun d’actions de croissance mondiale pour les épargnants et les institutions. Doté de 51 M$US, il a pour mandat d’investir dans des entreprises ayant démontré un esprit d’initiative en matière de pratiques commerciales durables. Les entreprises où il investit ont pris l’engagement explicite d’adopter des pratiques commerciales durables et affecté d’importantes ressources à l’atteinte de ces objectifs. L’évaluation des entreprises se fait en fonction de certains critères adaptés au groupe industriel auquel elles appartiennent et en comparaison avec leurs concurrents sur des aspects tels que l’impact de leurs produits et services sur toute leur durée de vie, les relations avec les fournisseurs, les investissements dans des technologies et procédés durables, le leadership, la bonne utilisation des ressources et la gestion environnementale. Les responsables de Portfolio 21 examinent en particulier l’amélioration du bénéfice grâce à des gammes de produits supérieurs sur le plan écologique, l’efficience dans l’utilisation et la réutilisation des ressources, les investissements dans les sources d’énergie renouvelables, les stratégies novatrices en matière de transport et de distribution, et l’usage équitable et efficient des ressources dans la satisfaction des besoins humains. Ils se sont engagés à consacrer au moins 1 % de la valeur du fonds à des investissements communautaires, ce qui représentait près de 500 000 $ à l’été 2004. ShoreBank Pacific est l’un des trois investissements communautaires de Portfolio 21 vu son engagement à l’égard de The Natural Step 9. Le fonds Portfolio 21 affiche actuellement un rendement sur 5 ans de 2,29 % par rapport au point repère du MSCI World Equity Index, qui est de -1,08 %.

4.2 L’investissement ciblé économiquement aux États-Unis

Comme au Canada, il n’existe pas de suivi exhaustif des ICE aux États-Unis, ce qui complique l’évaluation de l’ampleur et de la croissance des activités d’ICE de la part des fiduciaires de régimes de retraite et d’autres investisseurs institutionnels. Dans un rapport publié en 1995, on estimait l’actif combiné des placements de régimes de retraite publics dans les programmes d’ICE à 2,4 % du total, soit environ 55 G$US. À l’époque, au moins 29 États offraient une forme de programme d’ICE aux régimes de retraite publics (GAO, 1995), les domaines les plus communs étant le logement résidentiel (32 %) et le capital de risque (25 %) (Hoffer, 2004b). Selon une autre estimation, 84 % de tous les fonds d’ICE (ces chiffres datent de plus de dix ans) étaient investis dans le logement domiciliaire et d’autres placements immobiliers, 3 % dans le capital de risque et 0,2 % dans les prêts aux petites entreprises (Institute for Fiduciary Education, 1993). Selon le Social Investment Forum, plusieurs régimes de retraite publics sont tenus par leur conseil d’administration ou leurs services fiscaux de s’engager à placer de 5 à 10 % de l’actif dans des ICE (SIF, 2003, p. 27). Ces investissements sont rendus possibles en partie grâce à divers programmes gouvernementaux de gestion du risque et de subvention, ce qui donne aux fiduciaires de ces régimes un rendement au taux du marché.

Vu la rareté des données sur les effets de l’ICE, il faut examiner la feuille de route de programmes d’ICE existants pour mieux comprendre le potentiel qu’a l’ICE de produire des avantages sur le plan de la durabilité. Le California Public Employees’ Retirement System (CalPERS) dispose de l’un des programmes d’ICE les plus imposants et les plus complets des États-Unis.

4.2.1 Le California Public Employees’ Retirement System (CalPERS)

Doté d’un actif de 167 G$US, le CalPERS est le plus grand régime de retraite public aux États-Unis. En 2000, il a lancé l’initiative Double Bottom Line [double rendement] (Office of the Treasurer, 2004a), qui cible des investissements dans les quartiers urbains afin d’assurer au fonds un rendement comparable à celui du marché tout en donnant un coup de pouce au développement économique des collectivités californiennes. Depuis, il a injecté plus de 9 G$US dans ces collectivités, notamment sous forme d’investissements en actions dans des entreprises urbaines et de prêts hypothécaires à des travailleurs californiens vivant en milieu urbain ou rural. Quelque 13 % du Pooled Money Investment Account [Compte d’investissement commun] (PMIA) est aujourd’hui investi dans des placements à « double rendement ». En date de mars 2004, le PMIA avait :

  • investi plus de 1,7 G$US dans des prêts hypothécaires à des particuliers et à des collectivités à revenu faible ou moyen, à un rendement actuel de plus de 5,87 % par an;
  • investi 537 M$US dans des prêts aux petites entreprises, pour un rendement annuel allant de 1,3 % à plus de 7 %;
  • produit un rendement de 1,04 % sur ses placements de 5,8 G$US dans des institutions de prêt aux collectivités et des coopératives de crédit, dont une bonne part dessert des quartiers déshérités des grandes villes ou des régions rurales, ce qui représente une augmentation comparativement à des dépôts de 1,9 G$US en 1999, et un rendement généralement supérieur de 0,03 % à 0,1 % à celui des bons du Trésor comparables où ces dépôts auraient pu être investis autrement;
  • obtenu un rendement annualisé de 10,3 % depuis 1966 avec son California Urban Investment Partnership [partenariat californien pour l’investissement en milieu urbain], dans le cadre de son engagement à favoriser le développement immobilier dans les noyaux centraux des grandes villes. L’investissement initial du CalPERS dans ce programme, qui était de 50 M$US, s’est accru depuis à 290 M$US.

De plus, le CalPERS s’est fixé comme objectif d’investir 2 % de son portefeuille (environ 3,3 G$US) dans des marchés intérieurs en émergence, surtout en Californie. Dans le cadre de la California Initiative, il a investi plus de 1,3 G$US dans des projets de densification immobilière en milieu urbain, dont 150 M$US pour des logements abordables et 475 M$US pour des placements en actions dans des entreprises privées de secteurs sous-desservis. Le CalPERS entend par « marchés sous-desservis » les secteurs urbains ou ruraux ayant un accès restreint à des biens et services de première nécessité. Les marchés sous-desservis offrent aux entreprises des actifs inexploités qui vont des vastes bassins de main-d’œuvre aux immeubles à faible coût et aux infrastructures sous-utilisées (Harrigan, 2003, p. 245). On estime que l’investissement de 20 G$US réalisé par le CalPERS en Californie a créé plus de 54 000 emplois (Harrigan, 2003, p. 251).

Le printemps dernier, le CalPERS a lancé un programme d’investissement dans le secteur des technologies de l’environnement (Office of the Treasurer, 2004b) en s’engageant à investir jusqu’à 200 M$US d’ici cinq ans dans ce secteur en offrant des investissements en actions dans le secteur privé, du capital de risque et du financement de projets. Ce programme cible les investissements dans les solutions technologiques environnementales plus efficientes et moins polluantes que les technologies existantes, comme le recyclage; l’économie des ressources naturelles; la réduction des émissions polluantes, de la production de déchets et de la contamination de l’air, de l’eau et du sol. Ce programme sera géré dans le cadre d’un programme d’investissement de gestion alternative (IGA), dans lequel on a engagé plus de 19 G$US à titre d’investissements en actions dans le secteur privé.

4.2.2 Le United Methodist Church General Board of Pensions and Health Benefits (General Board)

Le General Board, l’un des cent plus importants régimes de retraite des États-Unis, a affecté l’un de ses gestionnaires de placements au logement abordable et au développement communautaire. C’est le plus important investisseur institutionnel dans les secteurs du logement abordable et du développement communautaire, avec des placements totalisant près de 1,6 G$US dans l’IC. Comme tous les placements du General Board, ses IC visent à obtenir un rendement comparable à celui du marché compte tenu du risque assumé par les participants, tout en soutenant les collectivités sous-desservies et l’établissement de logements abordables.

4.3 Le capital de risque durable aux États-Unis

Nous ne disposons pas de données complètes pour le secteur du CRD aux États-Unis, compte tenu surtout de la définition que nous donnons du CRD dans le présent document, définition qui comprend le capital de risque investi afin d’obtenir un rendement social ou environnemental. Toutefois, le rapport sur les tendances de l’IR, publié par le Social Investment Forum de 2003, contient des données sur les fonds d’épargne solidaires, qui se servent des instruments du capital de risque pour créer des emplois, accroître la capacité des entreprises et générer de la prospérité, ce qui améliore les conditions de vie de personnes à faible revenu et l’économie des collectivités défavorisées. « Avec 485 M$US de capital administré [en hausse de 58 % comparativement à 2001], les FES réalisent des investissements en actions ou d’autres placements similaires dans de petites entreprises susceptibles de connaître une croissance rapide. Ces investissements atteignent généralement de 100 000 $ à 1 M$ par entreprise, donc moins que la plupart des investissements traditionnels en capital de risque. Les entreprises où les FES investissent emploient généralement de 10 à 100 personnes » (SIF, 2003). La plupart des FES sont encore trop récents pour qu’on puisse évaluer précisément leur rendement financier, mais les résultats préliminaires de quelques-uns des fonds les plus anciens indiquent un taux de rendement interne brut allant de 8 % à 17 % (IFDC, 2003, p. 38).

Le Cleantech Venture Network fournit des statistiques sur le secteur du capital de risque « environnemental » aux États-Unis. Il révèle que l’activité globale de ce secteur a décliné de 14 % de 2002 à 2003 dans ce pays, tandis que les entreprises de « technologie propre » ont crû de 8 % au cours de la même période, leur valeur passant de 1,1 G$US à 1,2 G$US, avec des investissements dans 179 entreprises de technologie propre au cours de la période, ce qui a fait passer la part relative des technologies propres de 5,1 % des investissements industriels en 2002 à 6,4 % en 2003.

Ces statistiques sur le capital de risque social et environnemental indiquent que le secteur du CRD croît d’année en année, au bénéfice de l’environnement et de la société. Pacific Community Ventures, un FES investi d’une solide mission sociale, nous montre comment les véhicules de CRD pour le développement communautaire sont structurés aux États-Unis.

4.3.1 Pacific Community Ventures

Pacific Community Ventures (PCV) est un organisme sans but lucratif établi en Californie qui gère deux fonds d’investissements en actions dans des entreprises choisies. Ces fonds d’investissement ont pour but d’attirer des investissements institutionnels et de les canaliser dans des entreprises privées qui fournissent de bons emplois qui génèrent des compétences monnayables, des avantages, des véhicules de création de richesse (régimes d’option d’achat d’actions et de partage des bénéfices) ainsi que de la formation professionnelle applicables à des collectivités à faible revenu. Le CalPERS et Citigroup (l’une des plus grandes sociétés de services financiers du monde) sont deux de ces investisseurs institutionnels. Avec un actif actuel de 18,5 M$US, PCV a investi jusqu’ici 8 M$US dans sept entreprises.

En près de quatre ans, les entreprises financées par le portefeuille de PCV ont employé au total 850 personnes issues de collectivités à faible revenu et ont versé un salaire horaire moyen de 11,59 $US, ce qui est nettement supérieur au taux horaire de subsistance, qui s’établit à 10,25 $US en Californie.

4.4 Analyse et conséquences pour le secteur de l’IC au Canada

Même si l’on tient compte de l’écart de population entre les deux pays, le secteur de l’IC au Canada – y compris les domaines de l’ICE et du CRD – accuse beaucoup de retard sur l’expérience étasunienne. Il est évident que plusieurs conditions propres aux États Unis ont contribué à cet écart. La plupart des observateurs attribuent la croissance du secteur de l’IC aux États-Unis à une combinaison des facteurs suivants:

  • Les programmes gouvernementaux : les administrations (fédérale et des États) ont élaboré un éventail complet de programmes gouvernementaux de gestion du risque, de mesures fiscales et d’autres programmes de subvention.
  • La réglementation gouvernementale : les modifications apportées en 1995 à la Community Reinvestment Act (CRA) reconnaissent les investissements des IFDC comme des activités admissibles au sens de la CRA, et la réglementation de l’ERISA adoptée en 1995 autorise les régimes de retraite à se livrer à des activités d’ICE.
  • La feuille de route : les IFDC ont une feuille de route ponctuée de réussites dans l’utilisation efficace et prudente du capital au service des marchés économiquement défavorisés.
  • Les associations professionnelles nationales et leurs intermédiaires : l’émergence récente d’associations professionnelles nationales et de leurs intermédiaires dans l’organisation et le développement de l’industrie a joué un rôle essentiel, surtout dans la normalisation du secteur de l’IC et la création de marchés secondaires.
  • La croissance des IFDC : l’augmentation du nombre d’institutions se traduit par un nombre accru de perspectives d’investissement pour les épargnants et les investisseurs institutionnels.
  • La sensibilisation : la campagne de 1 % du Social Investment Forum a généré plus de 1 G$US en actif consacré à l’IC depuis son lancement en 2001 (SIF, 2003, p. 29). Cette campagne du SIF comprend un site Internet, une série de guides et d’autres initiatives visant à faire la promotion de l’IC auprès des gestionnaires de fonds et à répondre à leurs besoins en IC admissibles.
  • La médiocrité du marché : certains gestionnaires de fonds d’IC avancent que le piètre rendement du marché des actions a incité les investisseurs à délaisser les actions au profit de titres à revenu fixe. Bien souvent, le portefeuille d’IC offre un rendement plus solide que les autres classes d’actif depuis quelques années. De fait, les gestionnaires de fonds constatent que lorsqu’ils n’ont rien de positif à dire à leurs clients quant au rendement sur le capital investi (RCI), ils sont heureux de pouvoir parler de leur RSCI.

Il faudra obtenir davantage de statistiques dans le cas du CRD, ainsi que des statistiques actualisées dans le cas des programmes ICE avant de pouvoir établir une comparaison complète entre les deux pays dans ces domaines. Toutefois, cette brève exploration nous incite à conclure qu’aux États-Unis, le marché de l’IC a fait des gains considérables depuis quelques années et qu’il est en bonne position pour poursuivre sa croissance. Il y a nettement plus de financement disponible aux États-Unis de la part des investisseurs, du secteur bancaire, des administrations publiques et des donateurs pour alimenter cette expansion. De fait, des observateurs de l’industrie (Ellman, 2004) sont d’avis que la croissance du secteur de l’IC aux États-Unis résulte directement de la Community Reinvestment Act, du CRAQIF et du Community Development Financial Institutions Fund financé par le gouvernement fédéral 10. Tous ces programmes prennent racine dans les luttes pour les droits civiques des années 1970 et 1980, au cours desquelles les collectivités locales ont réclamé des mécanismes fédéraux pour rééquilibrer les inégalités économiques locales (en particulier quant à la sélection du crédit par les banques). Ces premières victoires ont mené à la transfusion de capital en provenance du secteur privé (par l’entremise des banques, aux termes de la CRA, et de l’investissement communautaire, dans le cadre du CRAQIF) ainsi que du gouvernement fédéral par le CDFI Fund. En revanche, il manque au Canada une intervention robuste des pouvoirs publics, une présence des banques dans l’IC, la sensibilisation des investisseurs et une solide base de donateurs, ce qui limite sa capacité de capitaliser sur les leçons à tirer du secteur de l’IC aux États-Unis. (Il serait intéressant de spéculer, par exemple, sur le coup de pouce qu’une fraction des 128 M$ versés en dons de charité par les cinq plus grandes banques canadiennes pourrait donner à l’IC au Canada.) Nous reviendrons sur ce sujet dans la section 6.