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Marchés financiers et la durabilité

Examen sommaire du secteur de l'investissement communautaire au Canada

Coro Strandberg
Strandberg Consulting

Brenda Plant
Brenda Plant Consulting

Septembre 2004

5. L’attribution des investissements

Le succès de la campagne américaine de 1 % qui a incité 54 institutions membres du SIF, dont des gestionnaires d’investissements, des conseillers, des courtiers et des sociétés de fonds communs de placement à investir plus de 1 G$US dans l’IC, avec un investissement moyen de 15,7 M$US (SIF, 2003, p. 29) révèle le rôle important que les gestionnaires de fonds peuvent jouer dans le ciblage du financement de l’IC. Au Canada, il y a peut-être une vingtaine de gestionnaires de fonds qui canalisent le financement de l’IC de cette façon, si l’on inclut le financement de l’ICE et qu’on exclut le secteur du CRD, sur lequel les données canadiennes sont limitées. Nous allons maintenant procéder à l’analyse préliminaire de quelques questions fiduciaires ou relatives à l’imputation sur les fonds propres auxquelles les gestionnaires de fonds sont confrontés quand ils envisagent de placer de l’argent dans l’IC.

5.1 Questions fiduciaires

Comme le souligne Gil Yaron, l’un des principaux spécialistes canadiens de l’interprétation de la réglementation applicable aux régimes de retraite en ce qui concerne l’investissement socialement responsable, la common law impose aux fiduciaires des obligations qui sont codifiées dans une certaine mesure par la législation fédérale et provinciale relative aux régimes de retraite et aux fiducies (Yaron, 2001, p. 4). Les droits et les décisions d’investissement des fiduciaires sont d’abord régis par l’acte de fiducie, qui oblige les fiduciaires à respecter les critères particuliers qu’il énonce à l’égard du placement de l’actif. Par conséquent, « si la fiducie donne l’instruction de prendre en compte des critères non financiers [...], le fiduciaire peut suivre les conditions de la fiducie sans crainte d’en enfreindre les dispositions » (Yaron, 2001, p. 4). Si l’acte de fiducie ne prescrit pas d’orientation quant à la gestion des investissements, on peut se guider sur les principes suivants :

  • le devoir de prudence : agir avec le soin, la compétence et la diligence d’une personne prudente dans l’administration des biens d’autrui;
  • le devoir de loyauté : agir de bonne foi et dans les meilleurs intérêts […] des bénéficiaires, en les traitant tous sur le même pied;
  • le devoir de diversifier le portefeuille;
  • le devoir d’éviter les conflits d’intérêts (Yaron, 2001).

Aux fiduciaires d’un régime de retraite qui décident d’envisager des ICE dans le cadre de la stratégie d’investissement du régime, Yaron et Kodar (2003, p. 93) recommandent notamment d’incorporer à leur politique d’investissement :

  • les types de placement dignes d’intérêt pour les participants au régime;
  • le pourcentage de l’actif à affecter à ces placements et le profil global du risque et du rendement du régime;
  • une disposition qui réitère les obligations des fiduciaires, notamment la nécessité d’éviter tout conflit d’intérêts;
  • l’obligation pour les fiduciaires d’obtenir des conseils juridiques et d’investissement s’ils envisagent des ICE;
  • un mécanisme indépendant d’évaluation de ces investissements;
  • dans la mesure du possible, une évaluation du rendement de ces investissements par rapport à des points de repère du marché.

Le département du Travail des États-Unis (voir la note 24 de l’annexe A) exige que les régimes de retraite qui investissent dans des ICE s’assurent que le rendement attendu correspond à celui d’investissements semblables ayant un profil de risque similaire (Yaron et Kodar, 2003, p. 91). Les normes fiduciaires applicables aux ICE ne diffèrent nullement de celles qui s’appliquent à l’ensemble des investissements du régime (ERISA Interpretive Bulletin, 1974).

Il faut admettre qu’il s’agit là un traitement très superficiel des affaires fiduciaires, mais nous espérons qu’il contribuera à mettre en lumière les responsabilités des fiduciaires et de leurs gestionnaires de fonds dans l’analyse des investissements qui produisent un rendement social outre le rendement financier. En fait, des gestionnaires de fonds qui pratiquent l’IC au Canada et aux États-Unis affirment qu’ils adoptent des lignes directrices très prudentes dans leur choix de placements en IC, comme le révèle notre analyse des questions relatives à l’imputation sur les fonds propres.

5.2 Questions relatives à l’imputation sur les fonds propres

Aux fins de la présente analyse, nous avons interviewé cinq gestionnaires américains et canadiens afin de comprendre les décisions relatives à l’imputation sur les fonds propres qu’ils prennent dans le but d’atteindre leurs objectifs sociaux et de remplir leurs responsabilités fiduciaires 11. Leur expérience, tout comme les recherches que nous avons menées à ce sujet sur Internet et ailleurs, nous amènent aux considérations suivantes concernant l’imputation sur les fonds propres :

1) Les objectifs du fonds : dans tous les cas, les investisseurs institutionnels dévoilent publiquement leur engagement à investir dans l’IC, que le rendement souhaité soit d’ordre social ou environnemental, ou les deux. Ils sont guidés par l’une des deux motivations suivantes : soit procurer du capital à la collectivité et générer un rendement pour le fonds; soit ne pas générer de rendement financier, mais simplement fournir du capital à la collectivité sans perdre le montant en principal.

2) Les lignes directrices en matière de politiques et de clientèle : généralement, ce sont les politiques d’investissement et les lignes directrices relatives à la clientèle qui dictent l’approche du fonds quant aux considérations sociales suivantes :

  • les aspects géographiques, les groupes cibles, les réalisations sociales et l’impact social ou environnemental du fonds; le capital déployé (les fonds recherchent des véhicules d’IC à déploiement de capital important afin de maximiser l’impact social);
  • des cibles d’affectation de l’actif de 1, 2 ou 3 % (à moins d’une instruction du client pouvant aller jusqu’à 100 %), sans recette empirique connue, sauf celle de l’affectation modeste afin de limiter l’impact financier sur l’ensemble du portefeuille;
  • le choix d’un investissement en actions ou en titres de créance, et le type d’institution, selon les dispositions de la politique.

3) Le risque : tous les gestionnaires de fonds affirment appliquer la même norme de soin que pour leurs autres investissements :

  • Examiner les dispositions relatives au partage des risques, les garanties limitées ou principales et les assurances fournies par les administrations publiques ou par d’autres donateurs.
  • Recourir aux services d’un intermédiaire en IC qui sert d’autorité pour la garantie d’émission et fournit des services délégués.
  • Limites d’investissement : l’actif est réparti dans un groupe d’intermédiaires diversifiés où aucun intermédiaire ne gère plus de 20 % (par exemple) de l’actif du programme; aucun IC ne doit compter à lui seul pour plus de 10 % (par exemple) du portefeuille d’IC.
  • La capacité de rembourser : les investisseurs en IC recherchent la qualité de l’investissement – une cote égale ou supérieure à A – ou disposent d’une assurance; ils évaluent le calibre de la direction.
  • Co-investir avec d’autres institutions.
  • Rechercher des points de repère comparables à l’échelle locale (p. ex. le taux accordé par les banques locales sur leurs dépôts à terme) ou confronter les IC à d’autres indices comparables.
  • Aux États-Unis, les fonds communs de placement doivent être évalués quotidiennement; on exige donc la même chose de tous leurs IC.

4) Le rendement : les investisseurs recherchent un taux de rendement raisonnable et non maximal, égal ou comparable à celui du marché, selon les lignes directrices du fonds. Certains recherchent un taux de rendement à l’abri de l’inflation; d’autres parlent de taux de rendement correspondant au risque et de rendement ajusté en fonction du risque. Selon les lignes directrices pour l’investissement, certains fonds administrent leurs placements dans des IC de sorte que le rendement avant les frais sur l’ensemble du fonds s’approche du point de repère fixé pour leur fonds; ainsi, ils se contentent de placements des IC qui sont susceptibles de produire un taux de rendement s’approchant de celui du marché.

Certains fonds, dont le Canadian Acuity Social Values Global Equity Fund, joignent à leur prospectus une perspective très conservatrice sur le rendement de leurs placements en IC et s’attendent à ce que leurs IC produisent un rendement inférieur à celui du marché. Le prospectus d’Acuity définit l’IC comme suit : « Les IC offrent un taux de rendement inférieur au taux en vigueur sur le marché et sont considérés comme non liquides, non cotés et inférieurs aux investissements de bonne qualité. Ils comportent également un risque de défaut ou de baisse de prix plus important que les titres de bonne qualité » (Acuity, 2003, p. 29). Or, ce ne sont pas tous les investisseurs qui définiraient ainsi leurs IC, ce qui illustre la diversité des approches et des attentes à l’égard de l’investissement communautaire de la part des gestionnaires de fonds qui pratiquent l’IC.

Il est également intéressant de constater que certains fonds canadiens ont du mal à trouver des investissements canadiens admissibles qui répondent à leurs critères d’imputation sur les fonds propres; ce facteur peut entraîner le recours des investisseurs canadiens à des intermédiaires en IC étasuniens, et donc des pertes pour le secteur de l’IC au Canada.