Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie
Canada
English
Contactez-nous
Aide
Recherche
Site du Canada
À notre sujet
Salle des médias
Bibliothèque
Carte du site
Accueil
Atteindre un équilibre
" " Énergie et de
changement climatique
" " Marchés financiers
À propos de ce projet
Documents
Comité
Renseignements
   
" " Écologisation de la fiscalité et énergie
Subscribe to NRTEE e-briefs
Print this Envoyez cette page

© 2006

_
""
" "

Marchés financiers et la durabilité

Examen sommaire du secteur de l'investissement communautaire au Canada

Coro Strandberg
Strandberg Consulting

Brenda Plant
Brenda Plant Consulting

Septembre 2004

Annexe A – Analyse documentaire

Suit un bref synopsis des écrits sur l’investissement communautaire, l’investissement économiquement ciblé et l’investissement dans le capital de risque durable au Canada et aux États-Unis. Il faut souligner que, comme il s’agit d’un créneau d’investissement en émergence dans les deux pays, les documents exhaustifs, analytiques et objectifs sont plutôt rares. Au Canada surtout, les études sur les enjeux associés au secteur de l’investissement communautaire sont peu nombreuses. La plupart des écrits canadiens sur l’IC sont des rapports sur les tendances commandés par des associations ou des analyses des enjeux financiers du développement économique des collectivités (DÉC) A1.

i) L’investissement communautaire

Bien qu’on lui attribue une proportion relativement faible de l’actif, l’IC est un secteur d’investissement en croissance. Les États-Unis possèdent le plus vaste marché d’investissement communautaire au monde, cette classe d’actif comptant pour environ 14 G$US, selon les chiffres publiés en 2003 par le Social Investment Forum (SIF), ce qui correspond à une progression de 84 % depuis 2001 (7,6 G$US). Bien que les écarts de définition limitent les possibilités de comparaisons fermes, au Canada, la Social Investment Organization (SIO) estimait à environ 69 M$ la valeur de cette classe d’actif pour 2002, en baisse comparativement aux 85 M$ qu’elle valait en 2000 (on attribue 15 M$ de cette baisse à la fermeture d’un seul fournisseur d’investissements communautaires).

L’éventail de véhicules et de méthodes d’investissement communautaire s’élargit. Là encore, les États-Unis mènent le bal avec la plus vaste gamme de véhicules d’investissement, les institutions financières de développement communautaire (IFDC) A2. Selon les estimations, le nombre d’IFDC oscille entre 800 et 1 000 aux États Unis, comparativement à une cinquantaine de fonds d’investissement communautaire recensés au Canada à ce jour. Le risque d’investissement dépend du produit; certains produits, mais pas tous, bénéficient d’une garantie complète. Le risque est géré par une combinaison adéquate de capital de risque et de réserves pour pertes sur prêts, par une surveillance systématique des portefeuilles et, au besoin, par la prestation d’une assistance technique. Les taux varient eux aussi : certains produits d’IC offrent un rendement comparable à celui du marché, mais la plupart offrent aux investisseurs un rendement s’approchant de celui du marché ou inférieur à celui-ci. L’accès au capital à un taux inférieur à celui du marché et à des subventions d’exploitation de la part de pouvoirs publics et de donateurs privés est un élément essentiel de l’IC, tant au Canada qu’aux États-Unis (SIF, 2003; Mendell et al., 2000b; SIO et Riverdale, 2003).

D’après notre analyse documentaire, les trois piliers du soutien essentiel à la croissance du DÉC au Canada sont : 1) le financement organisationnel; 2) le développement du capital humain; 3) l’accès au capital financier A3. On mentionne le manque de compétences et les problèmes de capacité parmi les limitations secondaires à la croissance du DÉC au Canada, mais la principale limitation est l’inconstance et l’insuffisance du soutien des banques, et plus particulièrement du capital patient et de l’appui du gouvernement (RCDÉC, 2002, p. 12).

Les véhicules d’investissement communautaire sont répartis entre deux structures traditionnelles, la philanthropie et le capital de risque des marchés financiers, ainsi qu’entre les secteurs traditionnels (privé, sans but lucratif, public) (Davis, 2003, p. 13; Social Capital Partners, 2002; Emerson, 2000). Le financement traditionnel repose uniquement sur le rendement financier et le financement philanthropique est basé sur un rendement social, ce qui laisse un vide dans le financement communautaire, comme l’illustre la figure ci dessous :

L'écart financier : le marché du capital social
Source : Social Capital Partners, 2003.

Cette position sur les marchés financiers – créneau de l’investissement communautaire et social qui génère à la fois un rendement financier et un rendement social – est dit « marché du capital social ». L’écart reflète le manque de financement, traditionnel ou non, offert en soutien à la croissance des entreprises sociales et environnementales. Aux États-Unis, où le marché du capital social est plus développé, les prêts à double rendement représentent 97 % des activités financières des IFDC, malgré la croissance des segments des nouveaux droits sur l’actif, des quasi-droits sur l’actif A4et des garanties au sein de l’industrie, 94 % de tous les investissements en actions étant réalisés avec des fonds de capital de risque (IFDC, 2003, p. 4 et 19). Actuellement, les structures et institutions juridiques et normatives qui concernent les marchés financiers inhibent la croissance de l’IC (Mendell et al., 2000b).

Aux États-Unis, les lois et les programmes du gouvernement sont des moteurs essentiels du secteur de l’investissement communautaire. La Community Reinvestment Act (CRA)A5 et la Community Development Banking and Financial Institutions Act A6ont facilité la création d’un marché du capital social plus soutenu par des mesures fiscales ciblées et des investissements obligatoires dans le secteur bancaire des États-Unis. Au nombre des programmes complémentaires, le crédit d’impôt aux logements pour locataires à faible revenu (CILLFR) A7; le crédit d’impôt pour nouveaux marchés (CINM) A8; le programme Bank Enterprise Award (BEA) A9; les obligations municipales de développement communautaire (OMDC) A10; les investissements en équivalent d’equity (EQ2) A11; les sociétés de développement communautaire (SDC); les groupes d’investisseurs communautaires A12; les associations professionnelles (IFDC, 2002; SIF, 2003; SIO et Riverdale, 2003; Davis, 2003, p. 14). De plus en 2000, le SIF a lancé sa campagne « 1 % dans la collectivité » visant à accroître la part d’actif consacrée à l’IC en encourageant tous les investisseurs sociaux – y compris les investisseurs sociaux institutionnels – à consacrer un pour cent de leurs placements à l’IC. Une bonne part du succès de cette campagne – qui a contribué à accroître de 159 % A13le secteur de l’IC depuis son lancement – a été attribuée au fait que l’impact négatif global sur le rendement obtenu par l’investisseur est minime, sinon nul, alors que le rendement social est réputé important (on trouvera plus loin dans la présente annexe un exemple de l’impact sur le rendement des fonds) (SIF, 2003, p. 26).

Au Canada, aucun cadre national de législation et de programmes gouvernementaux n’encourage les activités d’investissement communautaire, bien qu’il existe un certain nombre de programmes provinciaux qui visent à rassembler du capital-actions au profit de certains secteurs commerciaux, des régions défavorisées et des petites entreprises (Davis, 2003). On pense notamment à la réserve fixe pour pertes sur prêts soutenue par l’organisme de développement régional Diversification économique de l’Ouest Canada; le crédit d’impôt sur le capital-actions et les fonds d’investissement pour le développement économique des collectivités en Nouvelle-Écosse A14 ; les obligations de développement rural du Manitoba A15et le Crédit d’impôt pour le développement de l’entreprise communautaire du Manitoba A16(Davis, 2003). Signalons entre autres initiatives complémentaires : un réseau officiel de crédit communautaire au Québec; des réseaux informels de microcrédit dans les provinces de l’Atlantique; une association officielle d’institutions financières autochtones et en Colombie-Britannique; les associations de développement des collectivités A17et les Sociétés de développement des entreprises de la collectivité; un forum national des bailleurs de fonds et organismes de financement coopératifs; un forum national du DÉC pour les coopératives de crédit (SIO et Riverdale, 2003, p. 7-8); enfin, la création toute récente (juin 2004) d’un réseau canadien de l’IC.

Les documents recensés confirment l’existence de divers instruments d’IC pour les marchés à créneaux qui ne sont pas servis adéquatement par les institutions financières traditionnelles; ils confirment également que les IC financent des transactions à haut niveau de risque apparent avec prudence et efficacité et qu’ils ont des répercussions variées sur les collectivités dont ils s’occupent. Ces répercussions vont cependant bien au-delà de la création de nouveaux emplois et de nouveaux logements abordables, mais la mesure des autres impacts demeure plutôt aléatoire.

ii) L’investissement dans le capital de risque durable

Le capital de risque durable (CRD) est souvent considéré comme un sous-ensemble de l’IC, bien que certains y voient plutôt un élément des portefeuilles filtrés en fonction de l’IR. En général, les initiatives de CRD localisées relèvent de l’IC et les investissements de CRD à l’échelle nationale ou internationale relèvent du filtrage de l’IR. Quoi qu’il en soit, les écrits sur la question ne voient pas le CRD de cette façon; la plupart traitent soit des aspects relatifs à l’environnement ou aux technologies propres, soit de l’angle du développement communautaire. De fait, certains chercheurs (O’Rourke et Randjelovic, 2003; Dick, 2004) ont constaté un vide sur le plan de la recherche fondamentale et n’ont trouvé pratiquement aucun renseignement de base à savoir qui fait quoi dans le domaine du capital de risque durable.

Pour ce qui est de l’ensemble du secteur du CRD, on peut dire que le marché du CRD est encore en voie de maturation; la taille des fonds et des transactions est encore assez modeste, la plupart des fonds ne sont pas aussi actifs au stade de l’investissement de démarrage qu’au stade de l’expansion, et il n’y a pas de cas évident de réussite financière dans ce domaine (Clark et Gaillard, 2003, p. 10). Seulement la moitié des fonds de CRD évaluent l’impact social ou environnemental A18de leurs investissements et l’on tend à avoir davantage confiance en leur engagement à réaliser un impact qu’en l’impact lui-même (Clark et Gaillard, 2003, p. 9).

Quelques conditions sont réputées essentielles à la croissance du CRD : 1) la possibilité de se retirer de certaines transactions, et l’existence de données plus cohérentes et plus fiables sur le rendement financier (Cleantech, 2003; Clark et Gaillard, 2003; Wustenhagen et Teppo, 2004); 2) la sensibilisation, l’éducation et la formation des investisseurs en CR et des promoteurs de projets durables à la recherche de financement sous forme de CR (Randjelovic et al., 2002); 3) des co investisseurs ou la participation de grands investisseurs institutionnels en complément aux investisseurs stratégiques qui assurent le financement de départ sous forme de CRD jusqu’ici (Cleantech, 2003; Clark et Gaillard, 2003). Sur ce dernier point, Technologies du développement durable Canada (TDDC), fondation sans but lucratif mise sur pied par le gouvernement du Canada en 2001, a été créée afin d’abaisser le niveau de risque des technologies propres et de contribuer à les rendre plus attrayantes pour les investisseurs. En outre, la réglementation sur l’atténuation des effets environnementaux, qui impose l’internalisation des sources externes de pollution, pourrait elle aussi faciliter l’investissement dans ce secteur. Traditionnellement, le prix des « externalités » environnementales n’est pas évalué adéquatement sur le marché, et ces imperfections du marché peuvent nuire aux éco-innovations. Selon Remmings (2000, p. 326), tant que les marchés ne puniront pas les effets nocifs sur l’environnement, la concurrence entre l’innovation environnementale et l’innovation non environnementale subira des distorsions. Les directives de réglementation, notamment la Directive PRIP A19de l’Union européenne (UE), constituent une façon de remédier à ce genre d’imperfections (Randjelovic et al., 2002, p. 14).

Bien qu’unis par la volonté d’obtenir des effets sociaux et environnementaux par l’investissement privé sous forme d’actions, quatre « types » de fonds de développement communautaire ont émergé aux États-Unis : le CR conscientisé A20, qui représente environ 22 % de tous les fonds de développement communautaire en CRD; le fonds de CR axé sur l’évolution de l’industrie A21, qui représente environ 29 % de tous les fonds de développement A22communautaire en CRD; le fonds de CR axé sur le leadership ou le développement , qui en représente environ 32 %; et le fonds d’investissement social sans but lucratif A23, qui en représente environ 17 % (Clark et Gaillard, 2003, p. 6-7).

iii) L’investissement ciblé économiquement

On appelle « investissements ciblés économiquement » les investissements en CRD et les investissements communautaires réalisés par les régimes de retraite et les autres investisseurs institutionnels. Par définition, les ICE ne forment pas une classe d’actif en soi. Il s’agit plutôt d’un mode d’investissement qui, toutes choses étant égales par ailleurs, reconnaît les avantages connexes qu’il apporte (Hebb, 2001, p. 10). De fait, en reconnaissant que les marchés financiers ne sont pas neutres à l’égard des enjeux du développement local, des emplois et d’autres biens sociaux, les investisseurs institutionnels à long terme peuvent décider d’agir de façon plus stratégique sur l’obtention d’avantages connexes tout en considérant le bénéfice comme la priorité absolue (Falconer, 1999, p. 5).

Par rapport à leurs équivalents étasuniens, les régimes de retraite et autres investisseurs institutionnels du Canada n’ont qu’une exposition très limitée aux marchés financiers privés. D’ailleurs, au Canada, aucun cadre législatif général ne précise la notion d’investissement ciblé ni ne prescrit de paramètres à cet égard (Canadian Labour and Business Centre, 2001; Yaron et Kodar, 2003). Aux États-Unis, le modèle des ICE a bénéficié d’un coup de pouce décisif vers 1995, lorsque les autorités chargées de la réglementation d’application de l’ERISA ont produit une série de déclarations officielles confirmant leur admissibilité fiduciaire s’ils assuraient un rendement adéquat compte tenu du risque A24(Falconer, 1999, p. 80).

Malgré l’absence de législation habilitante au Canada qui préciserait le caractère légal des ICE, il existe plusieurs modèles importants au Canada, surtout au Québec et en Colombie-Britannique.

Les auteurs des écrits sur l’ICE cherchent généralement à favoriser la sensibilisation et la connaissance à l’égard des effets profonds qu’ont maintenant les régimes de retraite, en soulignant à la fois les risques (Baker et Fung, 2001) et les débouchés (Calabrese, 2001; Hebb, 2001) que la croissance de ces énormes fonds de capital représente pour la population active; ils visent à examiner les obstacles auxquels les ICE sont confrontés (Zanglein, 2001; Falconer, 1999; Canadian Labour and Business Centre, 2001; Quarter et Carmichael, 2003) et à suggérer aux fiduciaires de régimes de retraite et aux gestionnaires de fonds de tenir compte des conséquences macroéconomiques de leurs investissements sur le rendement à long terme du portefeuille.

Toutes les politiques et méthodes de placement de l’actif des régimes de retraite ont pour origine la promesse d’un revenu de retraite aux participants, et les stratégies choisies pour respecter cette promesse de façon fiable (Falconer, 1999, p. 17). Les promoteurs de l’ICE soulignent les inefficacités et les lacunes du continuum financier des économies nationales qui découlent en partie d’une information coûteuse et asymétrique, et la possibilité de combiner un rendement au taux du marché et des avantages connexes (Calabrese, 2001; Hebb, 2001). Comme le disent les défenseurs de l’ICE, la marée montante soulève tous les navires. Pour le California Public Employees’ Retirement System (CalPERS), par exemple, « il est évident […] que la santé financière actuelle et future de ses fonds en fiducie est inextricablement liée à la santé économique de la Californie » (Harrigan, 2003, p. 241).

Bien qu’il n’existe aucune évaluation financière systématique des divers programmes d’ICE, le General Accounting Office (GAO) des États-Unis a sondé en 1995 les responsables de la majorité des régimes de retraite publics aux États-Unis et constaté que la plupart des programmes ICE avaient un rendement supérieur aux points de repère A25(GAO, 1995, p. 7).

Quoique l’évaluation et la documentation exhaustives des impacts des ICE soient rares, il existe tout de même diverses statistiques liées à la création d’emplois. Aux États-Unis, on attribue au personnel bien payé des firmes de technologie soutenues par le capital de risque la création de quatre fois plus de travailleurs du savoir par rapport à un effectif d’emplois comparables créés par les 500 principales sociétés cotées en bourse du pays (Falconer, 1999, p. 27). Au Canada, de 1991 à 1996, près de 17 000 emplois ont été créés par 420 entreprises soutenues par le capital de risque, à un taux de croissance exponentiel de 26 % par an (Falconer, 1999, p. 27). Les auteurs des écrits sur l’ICE expriment généralement l’avis que les fiduciaires des régimes de retraite et autres investisseurs institutionnels seraient en mesure de reproduire ce taux de croissance de la main-d’œuvre s’ils plaçaient davantage d’avoirs dans l’entreprise privée.

Si, aux États-Unis, les régimes de retraite des secteurs public et privé ont été généralement à l’origine de la moitié du nouveau capital de risque sur une base annuelle au cours des années 1990, seule une poignée de très gros régimes de retraite du secteur public canadien investissent dans l’entreprise privée. La capacité qu’ont la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDP), le Régime de retraite des employés municipaux de l’Ontario (OMERS), la British Columbia Investment Management Corporation (BCIMC) et le Hospitals of Ontario Pension Plan (HOOPP) de pénétrer ces marchés est attribuée à leur taille (Falconer, 2001).

Les fonds d’investissement de travailleurs (FIT) –approche très canadienne en matière d’investissement ciblé économiquement – contrôlent plus de 50 % du marché du capital de risque disponible (Quarter et Carmichael, 2003, p. 18). Les FIT représentent du capital visant à combler les lacunes du marché pour les petites et moyennes entreprises (PME) de certaines provinces, tel que défini par chaque fonds et, éventuellement, dans certains secteurs particuliers du marché, s’il s’agit d’un fonds spécialisé. La loi les oblige à diversifier leurs investissements et à réduire leurs risques au minimum. Pour encourager la participation aux fonds d’investissement des travailleurs, les gouvernements fédéral et provinciaux accordent aux participants un crédit d’impôt équivalent à 30 % de leur investissement (Quarter et Carmichael, 2003, p. 16-17).

Il devient évident qu’aux États-Unis comme au Canada (avec les FIT), là où existent une structure juridique et un appui du gouvernement, les ICE représentent une stratégie efficace de création d’emplois et de richesse.

iv) Les mesures de l’impact social

De nombreux observateurs sont d’avis qu’un des principaux moteurs de la croissance future de l’IC, y compris le CRD et l’ICE, est l’aptitude à quantifier son impact social et environnemental. En affaires, il existe des principes comptables généralement reconnus et une infrastructure juridique internationale qui aide à gérer la déclaration des rendements financiers. Il n’existe pas encore de norme comparable pour la comptabilisation des effets sociaux. Les responsables du Double Bottom Line Project (2004) ont publié un catalogue des méthodes utilisables par les entreprises sociales avec ou sans but lucratif pour évaluer l’impact social de leurs activités. Ce catalogue analyse la faisabilité et la crédibilité de neuf méthodes et présente des exemples de leur utilisation.

On soulève souvent la question de l’attribution, soit la mesure dans laquelle le résultat d’une activité se serait quand même produit et le pourcentage qu’on peut en attribuer à l’activité en question. Résultat pratique, les mesures utilisées actuellement tendent à porter davantage sur les extrants que sur les effets réels (Clark et al., 2004).

Le rendement social sur le capital investi (RSCI) est une méthode d’évaluation de la valeur sociale. Au sens le plus général, le RSCI vise à quantifier la valeur sociale générée par une organisation à la suite d’un investissement qui y serait fait. On propose le RSCI comme stratégie d’évaluation afin de déterminer quels organismes et programmes produisent le « meilleur » rendement social. On parle de « rendement » parce qu’il résulte des ressources (financières et humaines) investies. La caractéristique qui distingue le plus le RSCI du traditionnel « rendement sur le capital investi » (RCI) tient au fait que les unités de mesure définissent l’impact social ou environnemental, ou les deux. Le RSCI mesure aussi la création d’une valeur sociale sur le plan des résultats dans son effet d’entraînement plus général, notamment par le biais d’indicateurs indirects (REDF, 2004). Certains s’en servent pour déterminer la valeur financière des avantages et des coûts sociaux relatifs au coût financier des activités d’une entreprise. Dans cette interprétation, le RSCI est fondé sur la valeur actuelle nette en dollars de ces résultats extérieurs au marché. La méthodologie du RSCI est jugée plus crédible que la plupart des autres approches utilisées actuellement pour mesurer les impacts dans le domaine de l’entreprise sociale; elle repose en effet sur les donnés réelles des extrants et des résultats d’une entreprise, ainsi que sur la recherche d’indicateurs indirects (Clark et al., 2004).

Généralement, une analyse simple considère les coûts et avantages comme des échanges, ce qui ne facilite pas la planification ou la fixation de priorités dans l’optique d’une optimisation de la création de valeurs à la fois financières et sociales. Emerson (2003) soutient que les valeurs financières et sociales sont considérées à tort comme deux aspects distincts de l’investissement; il propose l’idée d’un « rendement pondéré sur le capital investi » (RPCI), mesure optimale qui intègre à la fois le rendement social et le rendement financier.

La méthodologie des effets sociaux, tout comme le secteur de l’IC, est en plein devenir, mais on peut s’attendre à ce que les tentatives de quantifier davantage le domaine de l’entreprise sociale et environnementale contribuent pour beaucoup à combler le manque d’information sur le marché du capital social.

Conclusions

1. Aux États-Unis, les lois et programmes du gouvernement sont les moteurs essentiels du secteur de l’investissement communautaire. Il manque au Canada un cadre comparable qui favoriserait l’IC; on croit que cela expliquerait en grande partie le retard relatif du Canada par rapport aux États-Unis dans le domaine de l’investissement communautaire.

2. Le marché du capital de risque durable (CRD) n’a pas encore atteint sa maturité; il se consacre surtout au financement du stade de l’expansion, car le financement du stade du démarrage est encore plus risqué. On estime que certaines conditions sont essentielles à la croissance du CRD :

  • la possibilité de se retirer de certaines transactions et l’existence de données plus cohérentes et plus fiables sur le rendement;
  • la sensibilisation et l’information concernant les avantages et les risques de l’investissement dans le CRD;
  • la présence de co-investisseurs (la venue de Technologies du développement durable Canada représente un premier pas dans cette direction);
  • une réglementation relative à l’atténuation des effets sur l’environnement imposant l’internalisation des effets externes des sources de pollution.

3. Il paraît évident qu’aux États-Unis comme au Canada, là où existe une structure juridique et un appui du gouvernement, les ICE représentent une stratégie efficace de création d’emplois et de prospérité.