Information sur les marchés
Asie du Sud-Est

Analyse du marché des fruits à tartiner ⁽¹⁾

Ana Cecilia S. Palma
Recherchiste
Centre pour le négoce agroalimentaire - 
Université de l'Asie-Pacifique

Quand un changement se produit dans un pays, ses ondes peuvent être ressenties pendant des générations. Étude de l'industrie des fruits traités, qui a été, pendant de nombreuses années, l'un des premiers exportateurs.

Cette image a considérablement changé avec la crise financière asiatique, en 1997. L'industrie a été fortement touchée par la dépréciation du peso et par les autres facteurs économiques et politiques. Cependant, elle est encore parmi les principales exportations du pays, et constitue une bonne source de dollars si nécessaires.

Les Philippines, pays tropical, regorgent de fruits qui abondent pendant les mois de grande demande. Cette situation les prédispose au traitement et à la conserve de fruits en raison des faibles prix. Une fois traités, les fruits sont rendus disponibles, même hors saison, notamment dans les régions où l'approvisionnement peut être limité ou dans celles où il n'y a pas de fruits du tout.

L'industrie des fruits traités peut se diviser en trois catégories : les fruits en conserve ou préparés, les jus, les purées et les concentrés de fruits, et les fruits secs ou déshydratés. Les fruits en conserve ou préparés sont utilisés dans des salades ou servis comme desserts, ou encore servent à fourrer du pain ou sont présentés sous forme de ce que l'on appelle populairement des fruits à tartiner. Les jus, les purées et les concentrés de fruits sont des boissons fruitées et sont parfois classés dans l'industrie des boissons non alcoolisées. Par ailleurs, les fruits secs ou déshydratés servent d'ingrédients dans le müesli, les céréales pour petit déjeuner et les mélanges de fruits pour collations.

Cependant, ce document sera surtout axé sur les fruits à tartiner.

Les fruits à tartiner

Les fruits à tartiner servent à fourrer le pain et sont à base de fruits. Ils incluent les confitures, les marmelades et les gelées. On s'en sert couramment avec le pain salé ou le pain en tranches. Les fruits à tartiner sont aussi parfois utilisés pour la cuisine, pour rehausser les saveurs, ou peuvent simplement servir de dessert.

D'après une étude de l'Université de l'État de l'Ohio, « les fruits à tartiner sont tous des produits à base de fruits gélifiés ou épaissis ». Les confitures, les marmelades et les gelées sont toutes cuites et conservées avec du sucre. Les caractéristiques distinctes de chaque produit dépendent de la sorte de fruit utilisée, de sa proportion dans le mélange et du mode de préparation.

SOURCE : http://ohioline.osu.edu

Production

La quantité limitée des données disponibles fait qu'il est difficile d'établir avec certitude la production totale de fruits à tartiner. Cependant, un fabricant de fruits à tartiner a indiqué que la capacité moyenne de production pour les marmelades est d'environ 60 000 caisses par mois, avec une capacité d'utilisation d'approximativement 70 %. Normalement, l'usine fonctionne six jours par semaine, mais elle peut facilement ajuster les programmes de production en cas de forte demande, notamment pendant la saison des fêtes.

Bien que les fruits soient produits dans les régions rurales, la plupart des usines de traitement sont concentrées dans la zone métropolitaine de Manille.

Commerce

Le pays importe et exporte des confitures, des marmelades et des gelées.

Exportations. En 2000, les exportations totales de fruits à tartiner s'élevaient à 0,9 million (M) $, ce qui représente une baisse de 26 % par rapport au 1,2 M$ de 1999. Cette chute a été attribuée au ramollissement du marché japonais.

Le plus gros des exportations de fruits à tartiner était composé de confitures et de marmelades, qui comptaient pour 97 % de la valeur des exportations en 2000.

Volume en kilogrammes; Valeur en $ FAB.
À compter du mois d'octobre 2001 seulement.
SOURCE : Bureau national des statistiques - Statistiques sur le commerce extérieur (NSO-FTS).

Confitures et marmelades. En 2000, les exportations ont atteint 0,85 M$, par rapport aux 2,9 M$ de 1996. Elles marquaient une croissance négative de 24 % par an au cours de cette période. La chute des exportations était due, en grande partie, aux achats erratiques du Japon au cours des cinq dernières années.

En 1996, plus de 60 % des exportations de confitures et de marmelades du pays partaient à destination du Japon. En 1998, cependant, le marché japonais a commencé à ramollir -- n'achetant que 20 % (0,25 M$) du total des exportations philippines. Puis, en 1999, le Japon ne comptait que pour 1 % (15 000 $) du total des exportations. En 2000, les exportations ont recommencé à monter.

Les plus importants marchés, en 2000, ont été les États-Unis (42 % de la valeur totale des exportations), le Japon (17 %), Hong Kong (10 %), le Canada (10 %), et l'Arabie saoudite (4 %).

Gelées. Le pays fait le commerce de deux sortes de gelées : a) les gelées d'agrumes, cuits avec ou sans addition de sucre ou d'édulcorant; et b) les gelées, autres que d'agrumes, qui sont des préparations cuites, avec ou sans addition de sucre.

En 2000, le total des exportations s'élevait à 30 000 $, approvisionnant les marchés japonais, américain et taïwanais.

Importations. Le pays a importé une moyenne de 600 000 $ de fruits à tartiner au cours des cinq dernières années, bien qu'il y ait eu une augmentation sensible en 1999. Les importations de gelées autres que d'agrumes ont augmenté, passant de 0,3 M$ en 1998 à 1,2 M$ en 1999, tandis que les importations de gelées d'agrumes ont bondi de 1 050 $ en 1998 à 23 000 $ en 1999. En 2000, les importations ont baissé.

De 1996 à 2000, la valeur totale des importations marquait une croissance moyenne de 29 %.

Volumes en kilogrammes; valeurs en $ CAF.
À compter du mois d'octobre 2001 seulement.
SOURCE : Office national des statistiques - Statistiques sur le commerce extérieur (NSO-FTS).

Confitures et marmelades. Les importations ont fluctué au cours des cinq dernières années. La croissance moyenne annuelle, en termes de valeur, a été négative de 3,3 %. Les importations ont atteint 0,5 M$ en 1997, mais ont accusé une série de baisses consécutives en 2000, pour atteindre seulement 0,1 M$, ce qui représente une baisse de 61 % par rapport à l'année antérieure.

Le marché américain a fourni 27 % de la valeur totale des importations en 2000, ce qui contraste considérablement avec les 70 % de 1999. Au nombre des autres principaux fournisseurs comptent Taïwan (22 %), l'Espagne (17 %), Singapour (17 %) et le Royaume Uni (5 %).

Gelées. Les importations ont enregistré une croissance positive au cours des cinq dernières années. Il y a eu une hausse sensible en 1999, quand les valeurs des importations ont fait un bond de plus de 2 000 % pour les gelées d'agrumes et de 100 % pour les gelées d'autres fruits que d'agrumes. L'augmentation subite des importation a été attribuée à l'expansion du marché institutionnel en 1999.

La Chine, Taïwan, Hong Kong et les États-Unis ont été les principales sources de gelées. Ces quatre pays ont fourni 96 % de la valeur totale des importations en 2000.

Principaux acteurs

Selon le sondage de 1994 sur les établissements (Bureau national des statistiques), approximativement 150 sociétés se sont lancées dans la fabrication et l'exportation de fruits traités. Les principales entreprises travaillant dans la production et la distribution de fruits à tartiner incluent California Manufacturing Co. Inc. (CMC) et Sysu International.

California Manufacturing Corp. La CMC est une filiale de Bestfoods Asia Ltd.

(Hong Kong), qu'a récemment achetée Unilever dans le monde entier. La CMC s'est établie aux Philippines en 1955, comme coentreprise à 50-50 % entre CPC International et Ajinomoto Japon. Elles fabriquent une grande variété de produits -- allant des assaisonnements au sirop pour les crêpes. Les marques les plus populaires sont Knorr, Bestfoods, Lady's Choice, Royal Pasta, Alsa et Karo syrup.

SOURCE : Banque de donnée de la FCA

La société a trois usines de traitement à Luçon. Les marinades et l'assaisonnement liquide de marque Knorr sont fabriqués dans la ville de Parañaque; les pâtes, nouilles, soupes, conserves, huile de maïs et sirops sont fabriqués à Las Piñas; et les préparations à salades et les assaisonnements, dans la ville de Cavite.

Dans la catégorie des produits servant à fourrer le pain, notamment le beurre d'arachides, les produits Lady's Choice de la CMC sont considérés comme les premiers sur le marché. Leur production de beurre d'arachides compte pour environ 60 % de la production de produits à fourrer le pain de la société, alors que les 40 % restants sont composés de confitures, de gelées et de marmelades.

Sysu International. La principale activité de la société est la distribution de produits importés. Ses principaux produits sont les chocolats de Hershey, la sauce de soja Kikkoman, les pâtes San Remo, les assaisonnements Lee Kum Kee et les confitures, les gelées et les marmelades Clara Ole.

La société fabrique des confitures dans son usine de Novaliches. La production de Clara Ole, toutefois, a été arrêtée pendant deux ans, au début des années 1980, parce qu'il n'y avait pas de gestionnaire de marque pour la gérer. Cependant, la société l'a rétablie, car elle pouvait encore produire des revenus sur le marché existant. Ils ont toujours des clients institutionnels et, au lieu de les abandonner, Sysu a décidé de recommencer à servir les clients existants plutôt que de laisser les concurrents le faire. Clara Ole est donc revenue sur le marché à la fin des années 1980 et est actuellement le principal concurrent de Lady's Choice dans la catégorie des fruits à tartiner. Clara Ole est, cependant, considérée comme une petite marque en raison du marché très limité.

Politiques gouvernementales

Les manufacturiers de produits alimentaires sont tenus de se conformer aux règlements établis par Bureau de l'alimentation et des drogues du département de la Santé (DOH-BFAD). Tous les produits alimentaires importés non enregistrés vendus ou offerts à la vente peuvent être confisqués par le Bureau de l'alimentation et des drogues (BFAD). L'enregistrement d'un produit vise à empêcher les faux étiquetages et les falsifications. Les produits importés peuvent également être étiquetés avec le nom et l'adresse de l'importateur ou peuvent être confisqués. Les autocollants sont autorisés. Chaque importateur philippin d'un produit doit solliciter un enregistrement directement auprès du Bureau de l'alimentation et des drogues (BFAD). Les enregistrements peuvent être renouvelés pour un coût minimal pour une durée de un ou cinq ans.

Les marchandises traitées pour l'exportation doivent également adhérer aux normes internationales spécifiées par la Codex Alimentarius Commission de l'Organisation de l'alimentation et de l'agriculture.

Les droits de douane en vigueur pour les confitures, les marmelades et les gelées varient de 3 à 15 % en 2001.

PRINCIPALES PRÉOCCUPATIONS

L'une des principales préoccupations de l'industrie des fruits à tartiner est l'approvisionnement irrégulier en matières premières. Le caractère saisonnier de la production des fruits empêche l'industrie d'accroître sa capacité, car le calendrier de production est souvent dicté par les fruits en saison. Le mauvais état des routes et les frais de transport élevés entravent aussi l'acheminement des matières premières de leur source aux usines de traitement. Au nombre des autres contraintes figurent les prix élevés des principales matières premières comme le sucre, l'emballage et les conservateurs.

Par ailleurs, les fruits à tartiner ne sont pas très populaires auprès des enfants, car d'autres produits servant à fourrer le pain sont disponibles sur le marché. Plutôt que d'acheter des fruits à tartiner, les mères achètent du pain fourré ou du pain avec du beurre d'arachides ou du pâté de foie, qui sont beaucoup moins chers que les fruits à tartiner.

À part la concurrence au sein de la même catégorie, les fruits à tartiner sont aussi surpassés par d'autres produits de substitution comme, notamment, les biscuits, les galettes, les nouilles instantanées, le gruau au riz. Les produits de substitution sont plus populaires, beaucoup moins chers, et peuvent être aussi nutritifs que les fruits à tartiner. Dans les supermarchés, les fruits à tartiner occupent seulement une portion mineure des étagères à cause de leur faible mouvement.

Les changements constants dans les règlements et les conditions du marché dans d'autres pays mettent l'industrie dans une situation désavantageuse et constituent un autre obstacle. Les conditions changeantes sur le marché international peuvent provoquer des fluctuations dans le commerce.

PERSPECTIVES

Selon des acteurs de l'industrie, l'industrie des fruits à tartiner a enregistré une croissance soutenue au cours des dernières années. Malheureusement, il est fort probable que le marché fléchisse. Récemment, les ventes n'ont pas été très bonnes. Dans les supermarchés, les fruits à tartiner ne sont pas placés en bonne position, en raison de leur faible mouvement.

Compte tenu aussi du fait que peu de personnes prennent leur petit déjeuner à la maison à cause des exigences changeantes de leur milieu de travail, l'ensemble de la catégorie des produits servant à fourrer le pain n'a pas de nouveaux marchés. L'industrie essaie simplement de maintenir le marché existant.

Par ailleurs, il est plus onéreux de manger du pain au petit déjeuner que des nouilles instantanées et du gruau. C'est la raison pour laquelle les produits de substitution comme les biscuits, les nouilles instantanées et le gruau instantané gagnent rapidement une part plus importante du marché du petit déjeuner. À part l'avantage du prix, ces produits de substitution sont aussi plus pratiques, car ils sont prêts à consommer.

Cependant, le marché institutionnel est un domaine que les fabricants peuvent explorer davantage. En 1999, il y a eu une expansion dans le secteur des gelées importées, attribuée à la demande accrue du marché institutionnel. Il est également nécessaire d'élaborer et de promouvoir quelques produits pour augmenter la demande et accroître la sensibilisation du consommateur aux fruits à tartiner.

Somme toute, le marché est à la baisse, mais les fabricants ont bon espoir pour l'industrie. Les fruits à tartiner deviennent moins populaires à mesure qu'ils sont remplacés par des produits plus pratiques et plus abordables. Toutefois, il existe encore quelques marchés non exploités, à mesure que la logistique s'améliore. Il y a toujours de l'espace aussi pour de nouveaux produits sur des marchés totalement nouveaux, avec le soutien du gouvernement et d'une technologie appropriée.

Heureusement, grâce aux efforts conjugués du secteur privé et du gouvernement, le marché des fruits à tartiner prendra de l'expansion dans le pays et deviendra plus populaire. Quel dommage ce serait que de gaspiller de si bonnes choses!

Références :

Ampo Jr., Sofronio. « The Processed Fruits Industry: in Bloom » Documents du négoce agroalimentaire N^o 4, 1994. Centre pour le négoce agroalimentaire - Université de l'Asie-Pacifique. 
A Profile of the Processed Fruits Industry. 1999. Département du Commerce et de l'Industrie - Cébu.
Francisco, Carol Grace. An Analysis of the Peanut Butter, Jams, Jellies and Marmalades Industry. 2001. Document de recherche présenté au Centre pour le négoce agroalimentaire - Université de l'Asie-Pacifique.
Bureau national des statistiques - Statistiques sur le commerce extérieur.
Bureau national des statistiques - Sondage sur les établissements. 1994.
Services de diffusion de l'Université du Minnesota.
http://www.fda.gov/opacom/morechoices/smallbusiness/blubook/jams
http://www.uaex.edu
http://mofpi.nic.in/annual report
http://ohioline.osu.edu
http://www.msue.edu/imp

1.^* Ce document d'information de l'industrie a été publié par le Centre pour le négoce agroalimentaire de l'Université de l'Asie-Pacifique, dont le siège se trouve à Manille, dans l'édition du Food & Agribusiness Monitor de janvier 2002, principalement à l'intention d'un public philippin. Il est mis à la disposition des gens d'affaires canadiens, afin de leur fournir des informations de base sur le marché, au cas où ils s'intéresseraient à l'exportation dans ce secteur.