Volume: 24S3 - juillet 1998
Lignes directrices pour la lutte contre la diphtérie
au Canada
ANNEXE B
Protocole pour le diagnostic biologique de C. diphtheriae
Le rôle du laboratoire dans l'établissement du diagnostic de diphtérie
consiste à aider des cliniciens à confirmer leur diagnostic clinique.
Cependant, la diphtérie étant devenue une maladie rare dans les pays industrialisés
depuis l'avènement de la vaccination, les médecins n'ont guère d'expérience
dans le traitement de cette maladie et il est difficile de la reconnaître.
On peut confondre les symptômes de la diphtérie avec ceux de l'amygdalite
streptococcique aiguë, de la mononucléose infectieuse ou de l'angine
de Vincent. Le laboratoire doit donc fournir rapidement des renseignements
exacts pour faciliter la confirmation d'un cas suspect de diphtérie ou
pour permettre d'écarter ce diagnostic. Le personnel de laboratoire ayant
peu d'expérience dans l'identification de C. diphtheriae et la
mise en évidence de sa toxigénicité, on recommande que des laboratoires
précis (qui restent à déterminer) soient désignés comme laboratoires de
référence pour de telles épreuves.
A Prélèvement et transport des échantillons Diphtérie respiratoire
La diphtérie est essentiellement une infection des voies respiratoires
supérieures; les échantillons devant être mis en culture doivent être
prélevés par écouvillonnage dans la gorge, le nez ou le rhinopharynx et
placés dans un milieu de transport Amies. Chez les patients symptomatiques,
les échantillons doivent être prélevés sur les régions enflammées de la
gorge et du rhinopharynx. Si l'on observe la présence d'une pseudomembrane,
il faut également en prélever un échantillon à des fins d'examen. Il est
utile de prélever des échantillons dans la gorge et le rhinopharynx pour
déceler les porteurs asymptomatiques (écouvillonner les fosses amygdaliennes,
la région postérieure du pharynx et la luette). Si on prévoit que le transport
sera retardé, on peut conserver les échantillons soit à la température
ambiante, soit à 4 oC avant de les expédier au laboratoire,
mais il faut les envoyer dès que possible.
Diphtérie cutanée
La diphtérie se présente également souvent sous la forme de diphtérie
cutanée, qu'il peut être impossible de distinguer cliniquement des pyodermites.
Les lésions cutanées s'accompagnent parfois également de fausses membranes.
Il faut prélever un échantillon dans la région lésée, par aspiration ou
par écouvillonnage. Enlever toute croûte et écouvillonner la base de la
(ou des) lésion(s). Dans les cas d'impétigo, il peut y avoir, outre C. diphtheriae,
la présence de Staphylococcus aureus et de S. pyogenes.
À l'aide de l'écouvillon, réaliser un frottis sur des lames stériles
en vue d'une coloration de Gram et d'une coloration de Loeffler au bleu
de méthylène; on joindra les lames aux écouvillons/échantillons destinés
à la mise en culture. Il importe de signaler qu'à lui seul, un frottis
ne peut justifier un diagnostic définitif de C. diphtheriae,
mais qu'on peut recourir à l'examen direct du frottis au microscope pour
étayer les résultats de la culture.
Transport
Les échantillons doivent être expédiés immédiatement au laboratoire.
Le laboratoire doit être prévenu à l'avance que l'on soupçonne un diagnostic
de diphtérie. Si l'échantillon ne peut être expédié immédiatement au laboratoire,
on peut utiliser un milieu de transport comme celui d'Amies. Si on prévoit
que plus de 24 heures s'écouleront avant que le laboratoire ne reçoive
les échantillons, il faut expédier ceux-ci au laboratoire destinataire
par messager, après les avoir emballés à une température de 4 oC.
Si on soupçonne une éclosion de diphtérie, il faut absolument prévenir
à l'avance le laboratoire auquel on expédie les échantillons pour qu'il
se procure la quantité nécessaire de milieux de culture spécialisés.
B Isolement primaire
Remarque : Le diagnostic de diphtérie fondé exclusivement sur
l'examen direct d'un frottis au microscope n'est pas fiable.
Dans un premier temps, les échantillons destinés à la mise en culture
doivent être placés sur une boîte de gélose au sang et un milieu de Hoyle
(gélose au tellurite de potassium) et incubés à 35 oC en atmosphère
aérobie. Les plaques de gélose sont incubées de 18 à 48 heures.
Rechercher les colonies noirâtres caractéristiques en effectuant une
sous-culture de chaque morphotype qu'on aura placé en milieu de Tinsdale
modifié et dans de la gélose au sang. Procéder à une coloration de Gram
pour déterminer la morphologie (bâtonnets Gram positif).
Incuber les plaques mises en sous-culture à 35 oC en aérobie
pour 24 heures. Toutes les colonies qui apparaissent entourées de halos
bruns ou noirs sont positives. Procéder à une coloration de Gram de ces
colonies et mettre en évidence une catalase (réaction devrait être positive)
et noter la morphologie des colonies (y compris l'hémolyse). Si la coloration
de Gram met en évidence des bacilles Gram positif qui présentent la morphologie
typique des colonies, il faut les transmettre à un laboratoire de référence
à des fins d'identification plus précise et de confirmation.
C Mise en évidence de l'activité toxigène
Tous les isolats de C. diphtheriae doivent être expédiés à un
laboratoire de référence pour analyse de leur pouvoir toxigène.
On utilise actuellement la méthode du test d'Elek. Des méthodes moléculaires
visant à déterminer la toxigénicité sont actuellement en voie d'élaboration.
Il existe des amorces pouvant servir à la détection du gène de la toxine
par amplification en chaîne par polymérase (la portion A biologiquement
active de fragment). Cependant, on a trouvé certains isolats qui, tout
en contenant le gène, n'exprimaient pas la protéine biologiquement; par
conséquent, on ne recommande pour l'instant la PCR qu'en tant que complément
au test d'Elek.
D Antibiogramme
Bien que la plupart des isolats soient sensibles à la pénicilline, il
peut être nécessaire d'effectuer un antibiogramme au laboratoire de référence.
Il n'y a pas à l'heure actuelle de normes recommandées pour la réalisation
d'antibiogrammes pour C. diphtheriae, mais les antimicrobiens
suivants peuvent être testés : pénicilline, érythromycine et clindamycine.
E. Autres études
On étudie actuellement d'autres méthodes de typage moléculaire. Le recours
à l'électrophorèse en champs pulsés et au polymorphisme de taille des
fragments de restriction des gènes de l'ARN ribosomique a mis en évidence
la diversité des biotypes et des souches toxigènes et non toxigènes, et
permet une meilleure différenciation que les méthodes conventionnelles.
Le laboratoire de référence pourrait également appliquer ces techniques.
Lectures recommandées
-
Clarridge JE, Spiegel CA. Corynebacterium and
miscellaneous irregular gram-positive rods, Erysipelothrix,
and Gardnerella. Dans : Murray PR, Baron EJ, Pfaller
MA et coll., éds. Manual of Clinical Microbiology, 6e
édition. Washington DC : ASM Press, 1995.
-
Pollock AM. Diphtheria. Dans : Balows A,
Hausler WJ, Ohashi M et coll., éds. Laboratory diagnosis of infectious
diseases: principles and practice, Vol 1. New York : Springer-Verlag,
1988.
-
Efstratiou A, George RC. Microbiology and epidemiology of
diphtheria. Rev Med Microbiol 1996;7:31-42.
-
Efstratiou A, Maple PAC. Manual for the laboratory diagnosis
of diphtheria. Copenhagen: Le Programme élargi de vaccination
in the European Region of WHO, 1994. (ICP/EPI038.)
-
Nakao N, Popovic T. Development of a direct PCR assay for
detection of diphtheria toxin gene. J Clin Micro 1997;35:1651-55.
-
Reinhardt DJ, Lee A, Popovic T. Antitoxin-in-membrane and
antitoxin-in-well assays for detection of toxigenic Corynebacterium
diphtheriae. J Clin Micro 1998;36:207-10.
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