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Agence de santé publique du Canada

La prise en charge de l'hépatite virale

Association Canadienne pour l'étude du foie

CASL - ACEF

Compte rendu d'une conférence de concertation tenue à
Montréal (Québec) en mars 1999


VIRUS DE L'HÉPATITE C

Le virus de l'hépatite C (VHC) est un virus à ARN positif simple brin hétérogène, apparenté aux Flavirus. Comme bien d'autres virus à ARN, le VHC présente un taux de mutation élevé, ce qui entraîne une hétérogénéité considérable dans tout le génome. À cause de cette hétérogénéité génétique, le virus de l'hépatite C se divise en 6 grands génotypes, dont la distribution varie selon la région du globe(47). Le génotype 1 semble être le type le plus courant au Canada(46-49). Les quasi-espèces sont des variantes très proches d'un même génotype chez un individu, qui apparaissent à la suite de mutations lors de la réplication virale. Le nombre de quasi-espèces différentes peut augmenter avec le temps et contribuer à la résistance à l'interféron et à la persistance virale.

Les données sur les taux d'apparition de la chronicité après une première infection par le VHC viennent en grande partie d'études sur l'hépatite post-transfusionnelle. Dans ces études, une clairance virale dans le sérum a été observée chez environ 20 à 30 % des patients infectés par le VHC. On ne sait pas si cela est également vrai dans les cas où l'hépatite est contractée par une autre voie. Pour savoir si le virus a été éliminé, on doit avoir recours à des tests par PCR. Un résultat négatif au dosage de l'ARN-VHC par PCR indique que le virus a été éliminé du sérum, mais ne dit rien sur la situation du virus dans le foie ou dans d'autres cibles privilégiées (p. ex. les lymphocytes). Ainsi, dans l'état actuel de nos connaissances, il est impossible de savoir avec certitude si le virus a été complètement éliminé. Par conséquent, les patients qui présentent des anticorps anti-VHC et chez qui les tests par PCR indiquent une élimination spontanée de l'ARN-VHC doivent continuer d'être suivis à intervalles réguliers pour vérifier s'il n'y a pas d'hépatopathie.

L'issue de l'infection chronique par le VHC n'est pas bien connue. Chez un certain pourcentage de patients, une cirrhose et un carcinome hépatocellulaire apparaîtront à un moment donné(50-52). Toutefois, la proportion de patients à risque à cet égard n'a pas été établie de façon précise. Selon différents rapports, le risque de cirrhose, la vie durant, chez les porteurs du VHC se situe entre 20 et 50 %. Bien que l'on ait cerné plusieurs facteurs qui augmentent le risque, p. ex. la consommation d'alcool(50-55), on n'a pas pu établir clairement la mesure dans laquelle le risque augmente. En outre, la vitesse d'évolution de la maladie n'a pas été entièrement déterminée(56-58). D'après certaines études, après 17 ans d'infection, la prévalence de la cirrhose ne dépasse pas les 2 %(60). D'autres études ont révélé que la période moyenne entre l'infection et le premier diagnostic de cirrhose est d'environ 20 ans(50). Les écarts entre ces études sont dus au biais de référence. On note donc un degré considérable d'incertitude quand à la vitesse d'évolution de la maladie.

Les facteurs qui font augmenter le risque d'évolution vers la cirrhose sont notamment le fait d'avoir plus de 40 ans, la consommation d'alcool, même en quantité modérée(53-55), et le fait d'avoir contracté l'infection à un âge plus avancé. On croit également que, chez les patients infectés par une transfusion, la maladie est plus agressive, mais dans cette cohorte le fait d'avoir reçu une transfusion peut être un marqueur indirect d'un âge plus avancé au moment de l'infection, étant donné que la population des transfusés est considérablement plus âgée que la moyenne de la population. Le risque d'évolution vers la cirrhose semble également associé au degré d'inflammation et de fibrose hépatiques, tel qu'observé à la biopsie. L'évolution vers la cirrhose est moins fréquente chez les patients qui ont de façon constante des taux normaux d'ALAT(56,60,61). Il n'y a pas d'association nette entre l'évolution de la maladie et un génotype particulier ou la charge virale. La co-infection avec le VIH est associée à des charges virales plus élevées et à une évolution plus rapide vers la cirrhose (voir plus loin). La co-infection avec l'hépatite B est associée à un risque plus grand de carcinome hépatocellulaire que l'une ou l'autre des deux maladies lorsqu'elles surviennent seules (voir plus loin).

Les prédictions concernant l'évolution de la maladie sont fondées sur l'hypothèse selon laquelle la vitesse d'évolution de la maladie est linéaire et qu'il faut autant de temps pour passer, par exemple, du stade 1 au stade 2 de fibrose et du stade 3 au stade 4 de fibrose. Cette hypothèse pourrait être inexacte.

Une fois la cirrhose installée, la survie à 10 ans est d'environ 80 %. Toutefois, le taux de complications dues à la cirrhose pendant cette même période est d'environ 40 %(62).

On prévoit qu'au cours des 10 à 20 prochaines années, l'hépatite C chronique sera un fardeau important pour le système de soins de santé du Canada, à mesure que les patients qui sont actuellement asymptomatiques et relativement peu atteints par la maladie se rapprocheront de la phase terminale et développeront un carcinome hépatocellulaire. Aux États-Unis, on prévoit une augmentation de 60 % de l'incidence de la cirrhose, une augmentation de 68 % de l'incidence de l'hépatome, une hausse de 279 % de l'incidence de la décompensation hépatique, une hausse de 528 % du besoin de transplantation et, finalement, une augmentation de 223 % du taux de mortalité due à l'hépatopathie. Au Canada, aucune étude comparable n'a été effectuée pour évaluer le futur fardeau de cette maladie mais, étant donné que les caractéristiques démographiques des États-Unis et du Canada sont semblables, nous pouvons nous attendre à des augmentations semblables.

1. DOSAGE DE L'ARN-VHC

Comme dans le cas de l'hépatite B, on constate d'importants écarts d'une méthode à l'autre, et à l'intérieur d'une même méthode, dans les résultats des dosages de l'ARN-VHC. Dans ce cas-ci également, le médecin qui demande le test doit bien connaître les caractéristiques de la méthode utilisée (tableau 5), et chaque méthode particulière doit être appliquée uniformément. Il faut tenir compte de cette variabilité lorsqu'on adapte les résultats figurant dans la littérature à la pratique locale.

Il existe deux types de dosage pour l'ARN du VHC. Les tests qualitatifs donnent un résultat positif ou négatif. Les tests quantitatifs indiquent la concentration ou charge virale. Le seul essai qualitatif actuellement offert est le Roche AMPLICORMC (limite inférieure de sensibilité de 100 copies/mL). Parmi les épreuves quantitatives, on trouve le Chiron bDNA et le Roche MonitorMC, qui mesure la charge à 1 000 particules/mL près. Les plus récentes études sur le traitement par l'interféron et la ribavirine ou le PEG-Interféron se servent de la trousse National Genetics qui, même si elle est offerte sur le marché, exige que l'échantillon soit envoyé au laboratoire du NGI. On constate une différence d'un facteur d'environ 10 entre la trousse Monitor et la trousse du NGI, de sorte qu'un résultat de 2x106 copies/mL avec la trousse du NGI correspond à environ 2x105 copies/mL avec la trousse Monitor. Il est important d'en tenir compte lorsqu'on compare les données sur la charge virale des études publiées et celles qui concernent des patients précis.

2. UTILISATION DU DOSAGE DE L'ARN-VHC

Il n'est pas essentiel de procéder à une épreuve qualitative de l'ARN-VHC pour poser le diagnostic d'hépatite C chez des patients typiques qui présentent des anticorps anti-VHC. Le dosage de l'ARN-VHC est indiqué chez les patients qui ont des anticorps anti-VHC et des taux normaux d'ALAT. L'interprétation des résultats de cette épreuve est donnée au tableau 6. Le dosage de l'ARN-VHC est également parfois nécessaire chez les patients qui sont immunosupprimés et chez qui on observe une hausse inexpliquée des aminotransférases. Il arrive que l'on obtienne chez ces patients un résultat faussement négatif au test de détection des anticorps anti-VHC. Un test qualitatif de détection de l'ARN-VHC peut également servir à déterminer si un bébé né d'une mère infectée est lui-même infecté (voir plus loin) et pour résoudre un test sérologique indéterminé. Un suivi par des tests qualitatifs de l'ARN-VHC sert par ailleurs à évaluer la réponse à un traitement.

On ne doit pas recourir systématiquement à des tests quantitatifs pour l'ARN-VHC chez tous les patients. On n'a pas établi la nécessité de procéder à des tests quantitatifs avant le traitement. La charge virale est un facteur prédictif de réponse au traitement, mais le groupe d'experts était d'avis que la charge virale ne doit pas servir à évaluer la durée du traitement (voir plus loin). Une charge virale élevée ne doit pas être une raison de ne pas entreprendre un traitement.

Tableau 5. Plages dynamiques indiquées par le fabricant pour les dosages de l'ADN-VHC

Méthode Plages
Roche AMPLICORTM HCV MonitorTM (Quantitative) PCR Assay 1-2x103 - 5x107 copies/mL
Roche AMPLICORTM HCV (Qualitative) PCR test 100 copies/mL (limite inférieure de sensibilité)
Chiron QuantiplexTM bDNA HCV RNA Assay version 2 0,2 - 120 mEq/mL (2x105 - 1,2x109 copies/ml)
NGI (National Genetics Institute) HCV SuperQuantTM 100 - 5,0x107 copies/mL

Tableau 6. Interprétation des tests de détection de l'ARN-VHC chez les patieints présentant des anticorps anti-VHC

Taux d'ALAT Résultat - ARN-VHC Interprétation
Normal Positif Patient infecté, mais atteinte hépatique non détectable
Normal Négatif Faux positif pour les anti-VHC

Clairance virale spontanée

Faux négatif pour l'ARN-VHC

Infection inactive, avec atteinte hépatique minime ou inexistante

Élevé Positif Patient infecté, avec hépatopathie active
Élevé Négatif Faux positif

Clairance virale spontanée

Faux négatif pour l'ARN-VHC

Infection par VHC inactive; hépatopathie due à une autre cause

3. TRANSMISSION SEXUELLE DU VIRUS DE L'HÉPATITE C

L'inoculation percutanée directe du VHC représente le mode de transmission le plus efficace, mais la transmission sexuelle, intrafamiliale, professionnelle et verticale sont aussi possibles(63-67). Il semble que la transmission entre conjoints soit rare en l'absence d'un risque parentéral chez le partenaire. Dans des études cas-témoins, les contacts sexuels avec un partenaire séropositif pour le VHC vivant sous le même toit n'ont pas été reconnus comme un facteur de risque d'infection. Aussi, le VHC n'est pas considéré comme une maladie transmissible sexuellement. Il reste que certains facteurs, comme le libertinage, une co-infection par le VIH ou le HSV2, sont associés à la transmission sexuelle de l'hépatite C(66, 67). On ignore si la probabilité de transmission entre partenaires augmente avec la durée du mariage ou l'âge, ou les deux(68, 69). Il ne s'agit pas nécessairement d'une transmission sexuelle.

La personne infectée devrait en informer ses partenaires sexuels. Le partenaire sexuel devrait se voir offrir la possibilité de subir un test. Il faut recommander aux patients d'éviter de partager les articles d'hygiène personnelle. Il est conseillé d'utiliser le condom avec les partenaires sexuels occasionnels et d'éviter d'avoir des relations sexuelles non protégées pendant les menstruations. Il y a lieu d'informer les couples des risques de transmission et des précautions qui pourraient réduire le risque de transmission. Le comité ne recommande ni ne déconseille l'usage du condom dans le cadre de relations monogames stables. C'est au couple qu'il faut laisser le soin de prendre cette décision après lui avoir fourni les meilleures informations disponibles.

4. TRANSMISSION DU VIRUS DE L'HÉPATITE C DE LA MÈRE AU NOURRISSON

Selon différents rapports, le taux de transmission de l'hépatite C de la mère au nouveau-né se chiffrerait à 0 % à 3 %(70-73). Deux facteurs de risque ont été reconnus : la présence d'une infection à VIH chez la mère et une charge virale maternelle élevée(70, 73). L'effet protecteur de la césarienne à cet égard est controversé. Les résultats des tests de détection de l'ARN du VHC dans le lait maternel sont contradictoires. Notons toutefois qu'aucun cas de transmission par le lait maternel n'a été documenté.

L'allaitement maternel est considéré comme sûr et n'est pas contre-indiqué

La recherche des anticorps anti-VHC chez le nourrisson n'est d'aucune utilité en raison de leur transfert passif à travers le placenta. Ils peuvent perdurer pendant 12 à 18 mois. Il faut avoir recours aux épreuves de détection du VHC par PCR pour le diagnostic de l'infection au cours des 18 premiers mois de la vie. On trouve très peu d'information dans la littérature concernant le risque d'évolution vers la chronicité après la transmission néonatale. La clairance virale est peut-être plus fréquente que lorsque l'infection est contractée à l'âge adulte.

5. TRAITEMENT DE L'HÉPATITE C CHRONIQUE

La principale indication du traitement de l'hépatite C chronique est un taux d'ALAT équivalant à au moins 1,5 fois la limite supérieure de la plage des valeurs normales, trois fois consécutives, sur une période de plus de trois mois.

Les patients dont le taux d'ALAT est inférieur à 1,5 fois la limite supérieure ont généralement une forme bénigne de la maladie ainsi qu'un excellent pronostic(60). Le traitement peut ne pas être nécessaire. Dans ce groupe, la monothérapie à l'interféron est le plus souvent inefficace. On ne dispose d'aucune donnée sur le traitement combiné à l'interféron et la ribavirine chez ces patients.

S'il est vrai que le taux d'ALAT est le paramètre qui détermine s'il faut envisager le traitement, d'autres facteurs peuvent aussi influer sur la décision de traiter ou non. On recommande de pratiquer une biopsie du foie pour déterminer le stade et le grade de l'atteinte hépatique. Lorsqu'on traite des patients immunodéprimés, comme des receveurs d'une transplantation rénale ou d'une greffe de moelle osseuse, la biopsie est indispensable pour confirmer le diagnostic. Si elle est normale ou si elle met en évidence une atteinte minime, le traitement pourrait ne pas être indiqué. Pour permettre de réaliser cette évaluation, la biopsie doit consister en au moins trois à cinq espaces portes. Il y a lieu de considérer de nombreux autres facteurs avant de prendre la décision de traiter un patient particulier. Avant tout, il faut tenter de déterminer si le patient risque un jour de développer une cirrhose et une insuffisance hépatique ou, surtout chez les sujets âgés de plus de 50 ans, s'il risque davantage de mourir d'une autre cause.

Il peut aussi être nécessaire de pratiquer une biopsie du foie afin d'évaluer l'ampleur de l'atteinte hépatique chez des patients pour qui aucun traitement n'est envisagé.

Il est recommandé de définir la réponse au traitement en termes virologiques. En effet, l'ALAT n'est plus recommandé à cette fin. L'efficacité du traitement est indiqué par la clairance de l'ARN viral du plasma (au moyen d'épreuves sensibles basées sur la PCR) 6 mois après la fin du traitement. De nouvelles données révèlent que cette réponse est durable en ce sens que le plasma demeure négatif pour l'ARN viral pendant des années(74). Les transaminases redeviennent normales et le risque de complications comme la cirrhose et le carcinome hépatocellulaire est réduit. On note en outre une amélioration de la survie.

Posologie et durée du traitement

Le traitement recommandé pour l'hépatite C chronique est une association d'interféron alpha-2b et de ribavirine. La dose d'interféron est de 3 MU 3 fois/semaine et la dose de ribavirine, de 1 000 mg par jour chez les patients pesant moins de 75 kg et de 1 200 mg par jour pour ceux qui pèsent plus de 75 kg(75-77). L'usage de l'interféron alpha-2a ou d'autres interférons en association avec la ribavirine n'a pas été relevé dans la littérature.

Dans l'ensemble, plus de 40 % des patients recevant ce traitement combiné auront une réponse prolongée. Les patients infectés par les génotypes 2 ou 3 ont généralement un taux de réponse de l'ordre de 65 %(76, 77), alors que le taux n'est que d'environ 30 % chez les porteurs du génotype 1. Les taux de réponse pour les autres génotypes ne sont pas bien définis. En outre, les taux de réponse sont supérieurs lorsque la charge virale est plus faible (<2 x 106 copies/mL par l'épreuve du NGI), chez les patients âgés de moins de 40 ans, s'il y a absence de fibrose et chez les femmes(77).

La durée du traitement combiné à l'interféron et la ribavirine est déterminée par le génotype viral. Les patients qui sont porteurs des génotypes 2 et 3 peuvent être traités pendant 24 semaines alors que les porteurs des autres génotypes doivent être traités pendant 48 semaines(53, 54). La charge virale peut être utilisée pour prédire la réponse au traitement, mais les données en faveur de l'utilisation de ce paramètre comme indicateur de la durée du traitement étaient plus faibles que celles à l'appui du génotype, aussi à ce stade il ne faudrait pas utiliser la charge virale pour déterminer la durée du traitement. Il existe un algorithme qui intègre plusieurs des facteurs de réponse favorable énumérés ci-dessus(77), mais il n'a pas fait l'objet d'une validation prospective et ne devrait donc pas être utilisé pour établir la durée du traitement.

Contrairement à ce qui se produit avec la monothérapie à l'interféron, chez un petit nombre de patients traités à l'interféron et la ribavirine qui auront finalement une réponse à long terme au traitement, on observe déjà une clairance virale après une période de 12 à 24 semaines de traitement. On ne dispose pas encore de suffisamment de données pour recommander que la règle d'arrêt du traitement après 12 semaines décrite pour la monothérapie à l'interféron (voir ci-dessous) soit appliquée également au traitement combiné. Environ 14 % des patients chez qui l'on détecte encore l'ARN du VHC après 12 semaines auront une réponse à long terme au traitement. Il est cependant clair que les patients chez qui l'ARN du VHC est toujours présent après 24 semaines de traitement n'auront pas une réponse prolongée. Aussi, une réponse positive au test de détection de l'ARN du VHC après 24 semaines de traitement est-elle une indication d'arrêt de traitement.

La monothérapie à l'interféron doit maintenant être réservée aux patients qui ne tolèrent pas la ribavirine (p. ex. les sujets anémiques). La durée prévue de la monothérapie à l'interféron est de 48 semaines. La réponse est évaluée après 3 mois au moyen de l'épreuve qualitative d'ARN du VHC. La persistance de l'ARN du VHC après un traitement de 3 mois laisse présager une échec thérapeutique à plus ou moins longue échéance. Aussi, faut-il interrompre le traitement si le test de l'ARN du VHC est positif après 3 mois.

Surveillance pendant le traitement

L'adjonction de la ribavirine au traitement accroît la probabilité d'effets secondaires car, comme on peut s'y attendre, la ribavirine provoque l'hémolyse. Le taux d'hémoglobine chute au cours des 2 à 4 premières semaines pour ensuite se stabiliser chez la majorité des patients. Il est recommandé de réduire la dose de ribavirine si le taux d'hémoglobine baisse en-deçà de 100 g/L. La surveillance systématique des effets secondaires englobe un hémogramme hebdomadaire pendant le premier mois, puis un hémogramme mensuel et un dosage de la TSH tous les 3 mois (on observe une incidence accrue de thyroïdite avec le traitement à l'interféron, particulièrement chez les patients souffrant d'hépatite C chronique). Les symptômes devraient être surveillés chaque mois pendant le traitement.

La réponse au traitement est mesurée au moyen de l'ALAT et de la concentration de l'ARN du VHC. L'ALAT est un marqueur de substitution imparfait de la clairance virale, de sorte que la recherche de l'ARN du VHC est obligatoire aux intervalles déterminés (après 12 ou 24 semaines de traitement et 24 semaines après la fin du traitement). Le test qualitatif de recherche de l'ARN du VHC peut être utilisé pour évaluer la réponse. Il n'est pas nécessaire d'utiliser un test quantitatif à cette fin.

Contre-indications du traitement

Lorsqu'on détermine si un patient est un bon candidat pour le traitement combiné à l'interféron et la ribavirine, il est essentiel de tenir compte des avantages et des risques pour ce patient en particulier. Parmi les facteurs qui peuvent réduire la probabilité de bienfaits à long terme du traitement, on peut mentionner une espérance de vie plus courte, p. ex. un âge plus avancé, l'existence d'une comorbidité, une hépatopathie décompensée et l'alcoolisme actif (au cours des 6 mois précédents). Idéalement, les patients devraient s'abstenir complètement de boire de l'alcool durant le traitement.

Les facteurs qui peuvent entraîner une prédisposition accrue aux effets indésirables englobent un trouble mental majeur; des maladies cardiovasculaires, comme une arythmie importante, une insuffisance cardiaque globale, une hypertension non contrôlée ou une cardiopathie ischémique; des maladies auto-immunes actives; des troubles épileptiques non contrôlés; une rétinopathie diabétique (l'interféron peut exacerber la rétinopathie diabétique) et les maladies de la glande thyroïde (contre-indication relative). L'interféron peut causer une thyroïdite auto-immune. Cependant, les patients qui souffrent d'hypothyroïdie ne risquent pas de voir leur état s'aggraver. D'autres facteurs qui viennent accroître le risque d'effets indésirables incluent la dépression médullaire, comme la thrombopénie et la neutropénie. Le traitement ne devrait pas être mis en route si la numération plaquettaire est inférieure à 80 x 19-9/L ou si le nombre de neutrophiles est en-deçà de 1,0 x 10-9/L. L'insuffisance rénale et l'anémie font augmenter le risque d'effets indésirables de la ribavirine. En outre, le ribavirine a des effets tératogènes, de sorte que les patients qui reçoivent le traitement combiné et leurs partenaires devraient utiliser un moyen de contraception adéquat.

Les patients chez qui l'observance du traitement est improbable ou qui ont un risque important de réinfection, p. ex. les toxicomanes, peuvent ne pas être de bons candidats au traitement.

Les autres contre-indications relatives englobent l'asthme sévère, le psoriasis de même que les antécédents de maladies auto-immunes ou de troubles mentaux.

Les contre-indications absolues du traitement combiné à l'interféron et la ribavirine sont une hépatopathie décompensée active, l'alcoolisme actif, la grossesse ou l'absence de contraception adéquate et la non-observance probable du traitement.

Cas spéciaux

La thalassémie

On peut offrir un traitement aux patients qui souffrent de thalassémie à condition de leur faire comprendre qu'il pourrait y avoir une augmentation de 40 % à 90 % des transfusions requises pendant le traitement. On pourrait envisager de réduire la dose de ribavirine. Les études préconisant une intervention énergique pour abaisser le fer hépatique par un traitement chélateur en vue d'optimiser la réponse au traitement ne font pas l'unanimité. Peut-être serait-il préférable d'attendre l'arrivée sur le marché d'interférons à action prolongée avant de traiter ces patients.

L'hémophilie

On peut offrir un traitement aux patients hémophiles(78, 79). L'évaluation pré-thérapeutique devrait englober une biopsie du foie pratiquée par voie transjugulaire ou par voie percutanée bouchée avec administration de facteur de coagulation.

Traitement d'entretien à la méthadone

Les patients qui suivent un traitement d'entretien à la méthadone ne doivent pas se voir refuser le traitement.

Détenus

La décision de traiter les patients incarcérés doit être fondée sur l'observance prévue du traitement et le risque de réinfection.

Échecs thérapeutiques

Rechute après la monothérapie à l'interféron : - il s'agit de patients chez qui l'ALAT s'était normalisée et chez qui l'on avait observé une clairance virale transitoire pendant la monothérapie à l'interféron, mais qui ont fait une rechute après la fin du traitement. Ces patients devraient se voir offrir un traitement combiné à l'interféron et la ribavirine(80). Le taux de réponse prévu est comparable à celui des patients jamais traités.

Patients qui n'ont pas répondu à la monothérapie à l'interféron : -Il s'agit de patients chez qui l'ALAT ne s'est pas normalisée pendant le traitement ou chez qui l'on n'a pas observé de clairance virale. Il existe plusieurs options thérapeutiques pour ces patients, chacune ayant une taux de réponse variant entre 10 % et 15 %. Elles englobent un nouveau cycle de traitement à l'interféron et la ribavirine, le traitement à l'interféron « consensus » CIFN(81) ou une thérapie inductrice à l'interféron. Les données dont nous disposons ne sont pas suffisantes pour nous permettre de nous prononcer sur l'efficacité de toutes les options thérapeutiques qui s'offrent aux patients pour qui la monothérapie à l'interféron a été un échec.

Échec du traitement combiné : - Chez les patients qui ne répondent pas ou qui font une rechute après la traitement combiné, il y a lieu de consulter un centre d'expertise sur l'hépatite pour orienter la prise en charge. Pour l'instant, il n'y a pas d'option thérapeutique qui ait fait ses preuves chez ces patients, mais ils pourraient être des candidats à des traitements expérimentaux.

Infection par le virus de l'hépatite C chez les enfants

Dans le passé, on observait une forte prévalence d'hépatite C chez les enfants qui avaient reçu de multiples transfusions de produits sanguins avant l'introduction des tests de dépistage. Actuellement, la distribution de l'infection selon l'âge est vraisemblablement le reflet de différents modes d'exposition. La transmission verticale chez les nourrissons et le perçage corporel, le tatouage et l'usage de drogues injectables chez les adolescents sont les modes d'infection les plus courants. On ne sait pas encore quelle proportion des infections initiales chez les nourrissons évoluent vers la chronicité. Il semble que chez jusqu'à 30 % de ces enfants l'infection serait spontanément résolutive.

S'il est vrai que la progression de la maladie semble plus bénigne chez les enfants que chez les adultes, il reste que certains enfants développent une fibrose importante. Des essais non contrôlés laissent entendre que les taux de réponse à l'interféron pourraient atteindre 33 % à 50 %(82-84). La réponse à la thérapie combinée (interféron et ribavirine) est inconnue. Les indications du traitement des enfants atteints d'hépatite C n'ont pas encore été définies convenablement.

Il ne faut pas traiter les enfants atteints d'hépatite C sauf dans le cadre d'essais cas-témoins

Hépatite C aiguë

Depuis 1991, la recherche systématique du VHC dans les dons de sang a fait chuter la prévalence de l'hépatite C aiguë post-transfusionnelle à des taux négligeables. Aussi, aujourd'hui, l'infection aiguë par le VHC est-elle observée surtout chez les sujets qui ont été victimes d'une piqûre d'aiguille accidentelle. Bien que le risque d'infection soit relativement faible (moins de 5 %), la majorité de ces cas sont des travailleurs de la santé, c'est pourquoi il ne faut ménager aucun effort pour diagnostiquer rapidement l'infection et éviter ainsi le risque de transmission nosocomiale. Il n'y a pas de données qui nous indiquent quels algorithmes de dépistage, au moyen d'épreuves sérologiques ou de protocoles de détection virale par PCR, sont les plus rentables. Les tests de détection de l'ARN du VHC peuvent donner un résultat positif deux semaines seulement après l'exposition. Quant à la recherche des anticorps, le délai est habituellement de 10 semaines après l'exposition. Certains auteurs ont laissé entendre qu'un traitement précoce de l'hépatite C aiguë par la monothérapie à l'interféron peut accroître la probabilité d'une réponse par rapport au traitement de l'hépatite C chronique(85-87). On ne sait pas si la même chose s'applique au traitement combiné à l'interféron et la ribavirine. Il importe de mettre en balance la possibilité d'une meilleure réponse au traitement précoce et la probabilité théorique de 20 % d'une résolution spontanée de l'infection. Il est impossible de faire une recommandation concernant le moment propice pour traiter l'hépatite C aiguë. La recommandation suivante est donc fondée sur l'opinion d'experts plutôt que sur des données probantes tirées de la littérature.

Les travailleurs de la santé et les autres personnes qui subissent une piqûre d'aiguille accidentelle ou une autre exposition semblable devraient subir un test de détection des anticorps anti-VHC au moment de la blessure et 12 semaines ou plus après. Il faudrait administrer le traitement combiné standard à l'interféron et la ribavirine pendant la durée normale, malgré l'absence d'études prospectives démontrant l'efficacité de ce protocole. Étant donné l'urgence de recueillir de telles données, nous recommandons fortement que les patients atteints d'hépatite C aiguë soient traités dans le cadre d'un essai clinique ou au moins la tenue d'un registre des traitements.

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Mise à jour : 2000-06-26 haut de la page