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Volume 21, No 4 - 2000

  Agence de santé publique du Canada

Estimation du tabagisme chez les jeunes Canadiens et Canadiennes

William Pickett, Anita Koushik, Taron Faelker et K. Stephen Brown

Volume 21, No 3 - 2000


Résumé

Cette étude avait pour objet d'évaluer l'usage actuel du tabac et l'incidence du tabagisme (nouveaux fumeurs) chez les jeunes Canadiens et Canadiennes. La méthode de régression logistique a permis d'établir un rapport entre les prédicteurs socio-démographiques et les indicateurs du tabagisme chez les jeunes (âgés de 15 à 24 ans) dans l'Enquête nationale sur la santé de la population (ENSP) de 1994-1995. On a alors appliqué les modèles aux données sur les populations provinciales de jeunes provenant de l'ENSP de 1996-1997 et du recensement du Canada de 1996. Les estimations calculées d'après les modèles ont été comparées à celles qui ont été calculées directement d'après les données de l'ENSP. Les modèles ont permis de prédire avec précision les taux provinciaux de tabagisme chez les jeunes pour 1994-1995. Nous avons alors appliqué ces modèles aux données de l'ENSP de 1996-1997 et obtenu des résultats raisonnablement fiables. Par contre, ceux-ci se sont révélés de moins bons prédicteurs lorsque les estimations ont été calculées d'après les données du recensement de 1996. La modélisation de l'incidence du tabagisme chez les jeunes n'a pas donné de résultats probants, ce qui donne à penser que, même s'il est possible de créer des modèles simples d'estimation du tabagisme chez les jeunes, on ne peut s'attendre à ce qu'ils soient efficaces pour toutes les populations ou toutes les époques.

Mots clés : enquêtes sur la santé de la population; estimation pour de petites régions; jeunes; lutte contre le tabagisme; tabagisme



Introduction

Le tabagisme est une importante cause de mortalité et de morbidité qui peut être évitée1,2. Il est à l'origine de la mort de 45 200 Canadiens et Canadiennes chaque année3; c'est aussi une cause importante de maladies respiratoires, de cancer et de maladies de l'appareil circulatoire4S9; il fait en outre peser un lourd fardeau sur la société canadienne aux chapitres de la perte de productivité économique et des dépenses en soins de santé10,11. En dépit des énormes efforts déployés par les services de santé publique pour encourager les gens à cesser de fumer, les taux d'efficacité dans la population en général et chez les jeunes en particulier sont faibles, notamment chez les fumeurs réguliers1. Les nouveaux fumeurs se retrouvent surtout chez les adolescents 1. Le tabagisme chez les jeunes semble en effet être à la hausse depuis quelques années12,13. Les programmes visant à inciter les jeunes à ne pas commencer à fumer revêtent donc une grande importance sur le plan de la santé publique.

Pour concevoir des programmes anti-tabac efficaces, il est nécessaire d'obtenir des données à jour sur l'incidence et la prévalence du tabagisme chez les jeunes. Pour planifier des programmes de santé répondant aux besoins de la population, il faut souvent avoir en main des estimations du tabagisme propres à une région donnée. Les enquêtes de portée générale, telles que l'Enquête nationale sur la santé de la population (ENSP)14 au Canada, sont conçues de façon à fournir des estimations fiables dans une région géographique relativement étendue, comme un pays ou une province. Les efforts de planification en matière de santé visent généralement des régions moins importantes comme les circonscriptions sanitaires ou les services locaux de santé. Il peut être très coûteux de mener des enquêtes sur les populations de ces petites régions et il faut avoir recours à d'autres techniques pour obtenir des estimations sur les indicateurs de santé.

Au nombre des stratégies habituellement utilisées pour obtenir des statistiques sur de petites régions figurent les approches de type synthétique, les analyses de régression multiple et les estimations combinées, méthodes qui servent à évaluer les taux d'incapacité, de mortalité par cause et de chômage dans ces régions15S20. Ces techniques partent du principe qu'il existe des relations étroites et stables entre les variables socio-démographiques et les caractéristiques liées à la santé d'une population16.

Les estimations de type synthétique supposent l'application d'estimations par strate des comportements liés à la santé (p. ex., taux de consommation de tabac) à la population de la petite région définie en fonction de la même strate socio-démographique15,16. Les méthodes de régression multiple permettent de faire des estimations par sous-unité géographique (p. ex., comptés, provinces). Les données extraites des enquêtes sur la population permettent d'élaborer une équation de régression qui associe les caractéristiques régionales à la prévalence de comportements liés à la santé. Les valeurs obtenues pour les petites régions sont alors intégrées à l'équation de régression qui permet de déterminer la prévalence ou l'incidence des comportements liés à la santé19. Lorsqu'on utilise les approches combinées pour calculer les estimations relatives à de petites régions, on a recours à la fois aux méthodes de type synthétique et de régression17. Une version courante de cette méthode comporte la détermination de taux nationaux pour les sous-groupes à l'aide d'analyses de régression, taux qui sont ensuite appliqués à la répartition de la population dans la région en question18.

Les principaux objectifs de la présente étude consistaient à utiliser une méthode de régression et les données des ENSP de 1994-1995 et de 1996-199714,21 et celles du recensement de la population du Canada (recensement)22 afin d'élaborer des modèles mathématiques qui permettraient d'estimer la prévalence de l'usage actuel du tabac et l'incidence (début) de l'usage quotidien du tabac chez différentes populations de jeunes au Canada en 1996. Le pouvoir de prédiction des modèles a été évalué en tenant compte de critères prédéfinis à l'aide d'estimations directes obtenues à partir des données de l'ENSP de 1996-199721. Si cette méthode s'avère fructueuse, elle permettra ultérieurement d'estimer le tabagisme chez les jeunes dans une petite région en se fondant exclusivement sur les données démographiques que l'on trouve couramment dans les recensements de la population. Cette estimation et évaluation ont d'abord été faites au niveau provincial. Si le processus fonctionne bien, nous avons prévu de l'appliquer aux populations de petites régions.


Méthodes


Aperçu

Nous avons utilisé une méthode de régression. La population servant à l'élaboration du modèle était formée des jeunes âgés de 15 à 24 ans qui ont participé à l'ENSP de 1994-1995 (n = 2 597). Nous avons élaboré des équations de régression logistique afin de pouvoir établir un rapport entre les prédicteurs socio-démographiques et la fréquence de certains résultats liés au tabagisme dans la population à l'étude. Les personnes constituaient l'unité d'analyse; des coefficients normalisés de pondération ont été intégrés au processus de modélisation. Huit modèles distincts de régression à plusieurs variables ont été adaptés à chacun des résultats. Chaque logit prévu a été retransformé en probabilités prévues des résultats liés au tabagisme, compte tenu des relations existantes entre les caractéristiques socio-démographiques et le tabagisme indiqué par chaque modèle. Les probabilités individuelles ont alors été appliquées aux chiffres de population des strates définies de façon analogue par les catégories de variables prédictives. Cela a permis de déterminer la prévalence (usage actuel du tabac) et l'incidence (nouveaux fumeurs quotidiens) pour chaque province canadienne en 1996. Nous avons d'abord utilisé les chiffres de population par strate provenant des données de l'ENSP de 1996-1997 (n = 9 601), puis de celles du recensement de 1996. Pour évaluer les modèles, nous avons comparé les estimations calculées d'après ces derniers à celles qui ont été calculées directement à partir des données de l'ENSP de 1996-1997.


Usage actuel du tabac

Le premier indicateur de tabagisme examiné a été la prévalence de l'usage actuel du tabac, à partir de la question SMOK-Q2 (usage actuel du tabac) de l'ENSP de 1994-1995. L'usage actuel du tabac est l'indicateur le plus complet de la prévalence du tabagisme23, car il comprend l'usage quotidien et occasionnel de la cigarette. Ce résultat a été défini comme la proportion de la population âgée de 15 à 24 ans qui fume quotidiennement ou occasionnellement. La variable analogue au niveau de la personne, qui a été utilisée pour les modèles de régression, départageait les «fumeurs actuels» (usage quotidien ou occasionnel) de «ceux qui ne fument pas du tout».


Début de la consommation de tabac

Le second indicateur de l'usage du tabac était l'incidence (ou début) de l'usage quotidien du tabac défini comme étant la proportion de la population qui a commencé à fumer quotidiennement au cours de la dernière année. Cet indicateur est également une variable calculée (questions SMOK-Q2 [usage actuel du tabac] et DVSMKY94 [nombre d'années d'usage du tabac])14. Les jeunes ont été classés comme «fumeurs quotidiens nouveaux» s'ils fumaient quotidiennement depuis une année ou moins.


Prédicteurs du tabagisme chez les jeunes

L'objet de ce projet était de mettre au point des méthodes d'estimation pour de petites régions qui pourraient s'appliquer à toute région du Canada pour laquelle on dispose de données de recensement. Les facteurs socio-démographiques utilisés comme prédicteurs n'ont donc été inclus que s'ils étaient disponibles dans les deux versions de l'ENSP (1994-1995 et 1996-1997) et dans les données croisées du recensement de 1996. Différentes combinaisons des variables prédictives suivantes étaient disponibles : âge, sexe, langue, scolarité et chômage. Chacune des variables prédictives a été dichotomisée afin de simplifier les totalisations croisées. En ce qui concerne les modèles de régression logistique, nous avons inclus la province comme variable indépendante dans le but de tenir compte de tous les effets liés à la province. Lors de la sélection des modèles d'estimation, toutes les combinaisons possibles de variables ont été examinées. Cinq modèles ne tenant compte que des effets majeurs ont été choisis, car ils semblaient prometteurs (modèles 1 à 5, tableau 1). Trois autres modèles (modèles 6 à 8), qui comprenaient des variables d'interaction postulées à priori, ont également été examinés.


TABLEAU 1
Description des variables et des modèles

Variable/modèle Description
Variables dépendantes
 Prévalence de l'usage actuel du tabaca Proportion des fumeurs actuels (usage quotidien ou occasionnel) dans la population
 Incidence de l'usage quotidien du tabacb Proportion des personnes qui ont commencé à fumer quotidiennement au cours de la dernière année
Variables prédictivesc
 Âge Entre 15 et 19 ans et entre 20 et 24 ans
 Sexe Hommes et femmes
 Langue Anglais et/ou français et autre
 Chômage Cherche du travail et toute autre caractéristique liée à la population active

 Scolarité

Ne fréquente pas actuellement l'école et fréquente actuellement l'école

Modèles
 Modèle 1 Âge, sexe, province
 Modèle 2 Sexe, langue, province
 Modèle 3 Âge, sexe, chômage, province
 Modèle 4 Âge, sexe, scolarité, province
 Modèle 5 Âge, sexe, chômage, scolarité, province
 Modèle 6 Âge, sexe, chômage, âge par chômage, province
 Modèle 7 Âge, sexe, scolarité, âge par scolarité, province
 Modèle 8

Âge, sexe, chômage, scolarité, âge par chômage, âge par scolarité, province

a Dans les modèles de régression, les fumeurs actuels étaient comparés aux non-fumeurs.
b Dans les modèles de régression, les nouveaux fumeurs quotidiens étaient comparés à tous les autres répondants.
c Toutes les variables sont dichotomiques.

   

Estimation

Pour chacun de ces huit modèles, la méthode de régression logistique a été utilisée pour modéliser les relations entre les variables prédictives et le résultat étudié et obtenir les estimations de paramètres les plus vraisemblables. En ce qui concerne le premier résultat (usage actuel du tabac), par exemple, le logit de la probabilité qu'une personne fume actuellement, étant donné ses caractéristiques socio-démographiques (p. ex., âge, sexe, province), a été estimé. Les probabilités prévues ont ensuite été calculées au moyen d'une retransformation pour chaque combinaison de caractéristiques socio-démographiques et chaque province. En supposant que toutes les personnes qui présentaient certaines caractéristiques avaient des probabilités égales de fumer, les probabilités ont été appliquées à la structure socio-démographique des populations de jeunes. Les chiffres de population par strate provenaient d'abord de l'ENSP de 1996-1997, puis du recensement de 1996.


Validation du modèle

Les estimations directes des deux résultats de l'étude (avec des intervalles de confiance [IC] à 95 %) ont été calculées pour chaque province à partir de l'ENSP de 1996-1997. Les estimations calculées à l'aide des modèles ont alors été comparées aux estimations directes. On avait établi a priori une hypothèse voulant que les modèles soient raisonnables si les estimations provinciales modélisées étaient approximativement dans le même ordre de grandeur que les estimations provinciales directes et si la moyenne des écarts entre les estimations modélisées et directes était mince (près de zéro) comparativement aux estimations elles-mêmes. Si ces deux critères étaient satisfaits, cela voudrait dire que le processus de modélisation donne des estimations raisonnablement précises. Les coefficients de corrélation des rangs de Spearman24 et les valeurs prédictives bilatérales correspondantes ont aussi été calculés pour quantifier les corrélations entre les classifications provinciales obtenues à partir des estimations modélisées et directes.


Résultats

Types généraux d'association

Les estimations de paramètres obtenues à partir du processus de modélisation par régression logistique ont été déterminées pour les deux résultats de l'étude. Nous avons découvert que le chômage et une faible scolarité étaient de façon constante associés à l'usage actuel du tabac. Pour le début de la consommation du tabac, l'âge était le prédicteur le plus constant. La scolarité et le chômage étaient significativement associés au début de la consommation de tabac seulement dans les modèles qui avaient incorporé les deux prédicteurs en même temps. Ces deux prédicteurs étaient positivement corrélés (scolarité plus élevée, chômage plus élevé) puisque les étudiants à plein temps ont été classés parmi les chômeurs dans ces sources de données. L'étude n'établit aucune association significative entre les termes qui décrivent l'interaction entre l'âge et le chômage/la scolarité et l'un ou l'autre des résultats.


Usage actuel du tabac

Les résultats des estimations provinciales de l'usage actuel du tabac (autant directes que modélisées) sont illustrés au tableau 2. Ces modèles reposent sur les données de répartition de la population par strate selon l'ENSP de 1996-1997. Les estimations directes variaient de 27,9 % en Ontario à 40,1 % au Québec. Lorsque le Québec était exclu, la fourchette des estimations était plutôt étroite (27,9-33,6 %). Les estimations calculées d'après les modèles étaient approximativement du même ordre de grandeur que les estimations directes, à l'exception du Nouveau-Brunswick et de l'Alberta, pour lesquels chacun des huit modèles donnait constamment des résultats différents des estimations directes. Quant au second critère de validation, la moyenne des écarts entre les estimations directes et modélisées était la plus faible pour les modèles 4 et 7. À titre d'illustration et de référence, nous présentons au tableau 3 les coefficients bêta et les IC à 95 % correspondants calculés à l'aide du modèle 4 de régression logistique. Ce modèle a été considéré comme le meilleur des deux parce qu'il était parcimonieux; il démontre que les coefficients de l'âge et du sexe n'étaient pas statistiquement différents de zéro et que le rapport entre la scolarité et l'usage actuel du tabac était minime.


TABLEAU 2
Estimations directes et calculées d'après les modèles de la prévalence de l'usage actuel du tabac chez les jeunes Canadiens âgés entre 15 et 24 ans en 1996
(estimations calculées à partir de la population de chaque strate de l'ENSP de 1996-1997)

Province

Estimations directes et calculées d'après les modèles et classement des provinces

Direct

Modèle 1

Modèle 2

Modèle 3

Modèle 4

%
(IC à 95  %)

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

T.-N.

33,6 (26,1-41,1)

 3

32,3

 5

32,7

 5

22,8

 4

32,2

 5

N.-É.

31,0 (23,4-38,6)

 6

29,7

 7

28,8

 9

21,1

 7

31,0

 7

Î.-P.-É.

33,6 (25,2-42,0)

 2

34,2

 4

35,1

 4

22,2

 5

32,3

 4

N.-B.

30,7 (23,7-37,7)

 7

34,4

 3

35,3

 3

25,5

 3

33,0

 3

Qué.

40,1 (34,9-45,3)

 1

39,6

 1

39,2

 1

30,4

 1

40,3

 1

Ont.

27,9 (26,6-29,2)

10

27,6

10

27,9

10

20,1

10

26,5

10

Man.

31,5 (27,4-35,6)

 5

37,2

 2

37,3

 2

25,6

 2

35,4

 2

Sask.

30,4 (23,0-37,8)

 8

31,2

 6

31,5

 6

21,5

 6

31,6

 6

Alb.

31,9 (25,1-38,7)

 4

29,6

 8

30,1

 7

20,2

 9

30,0

 8

C.-B.

29,2 (23,1-35,3)

 9

29,3

 9

29,2

 8

20,5

 8

29,1

 9

Corrélation des classements associés aux estimations directes (valeur p)

0,67 (0,03)

0,66 (0,04)

0,58 (0,08)

0,67 (0,04)

Moyenne des écarts absolus

1,7

1,9

9,0

1,4

TABLEAU 2 (suite)
Estimations directes et calculées d'après les modèles de la prévalence de l'usage actuel du tabac chez les jeunes Canadiens âgés entre 15 et 24 ans en 1996
(estimations calculées à partir de la population de chaque strate de l'ENSP de 1996-1997)

Province

Estimations directes et calculées d'après les modèles et classement des provinces

Direct

Modèle 5

Modèle 6

Modèle 7

Modèle 8

%
(IC à 95  %)

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

T.-N.

33,6 (26,1-41,1)

 3

24,9

 4

23,0

 4

32,3

 5

25,3

 4

N.-É.

31,0 (23,4-38,6)

 6

23,3

 7

21,4

 7

30,9

 7

24,2

 6

Î.-P.-É.

33,6 (25,2-42,0)

 2

24,4

 5

22,4

 5

32,4

 4

24,8

 5

N.-B.

30,7 (23,7-37,7)

 7

27,1

 3

25,7

 3

33,1

 3

27,6

 3

Qué.

40,1 (34,9-45,3)

 1

32,8

 1

30,7

 1

40,3

 1

33,6

 1

Ont.

27,9 (26,6-29,2)

10

21,4

10

20,4

10

26,5

10

22,0

10

Man.

31,5 (27,4-35,6)

 5

27,7

 2

25,9

 2

35,3

 2

28,3

 2

Sask.

30,4 (23,0-37,8)

 8

23,8

 6

21,7

 6

31,6

 6

24,2

 7

Alb.

31,9 (25,1-38,7)

 4

22,4

 9

20,5

 8

29,9

 8

22,9

 9

C.-B.

29,2 (23,1-35,3)

 9

22,3

 8

20,8

 9

29,1

 9

22,9

 8

Corrélation des classements associés aux estimations directes (valeur p)

0,66 (0,04)

0,60 (0,07)

0,67 (0,03)

0,62 (0,06)

Moyenne des écarts absolus

7,0

8,7

1,4

6,4


TABLEAU 3
Estimations de paramètres
a à partir du modèle de régression logistique utilisé pour estimer la prévalence de l'usage actuel du tabac (modèle 4)

 

Coordonnée à l'origine

Âge

Sexe

Scolarité

Niveau de base

 

Entre 15 et 19

Hommes

Ne fréquente pas l'école

Béta
(IC à 95 %)

-1,384
(-1,666- -1,102)

-0,045
(-0,234-0,144 )

0,148
(-0,021-0,317)

0,926
(0,737-1,116)

a Bien qu'elles aient été prises en compte dans le cadre du modèle, les estimations de paramètres ne sont pas présentées pour chaque province.


   

Le tableau 4 présente les estimations directes et modélisées de l'usage actuel du tabac, mais cette fois-ci en se fondant sur les données de répartition de la population par strate du recensement de 1996. Les estimations calculées d'après les modèles avaient une configuration identique à celles qui ont été calculées directement d'après les données de l'ENSP de 1996-1997, même si la corrélation entre les deux types d'estimation n'était pas aussi étroite.

Début de la consommation de tabac

Les estimations directes et modélisées de l'incidence (ou début) de l'usage quotidien du tabac sont présentées au tableau 5 (selon les données de l'ENSP de 1996-1997) et au tableau 6 (selon le recensement de 1996). Les pourcentages obtenus étaient plutôt faibles, allant de 1,1 % à 4,7 % dans les dix provinces (estimations directes). De façon générale et pour les deux sources de données, la corrélation entre les estimations directes et modélisées était peu étroite et l'écart moyen entre les deux types d'estimation était grand par rapport aux proportions de jeunes qui avaient commencé à fumer.

Considérations d'ordre temporel

Le tableau 7 présente les estimations et les classements établis à partir du modèle considéré comme le meilleur dans le tableau 2 (c.-à-d. le modèle 4) ainsi que les estimations et les classements directs obtenus d'après les données des ENSP de 1994-1995 et de 1996-1997. Dans la plupart des provinces, des différences à tout le moins légères ont été relevées entre les estimations directes de 1994-1995 et celles de 1996-1997 alors qu'au Nouveau-Brunswick et au Manitoba, ces différences étaient assez marquées. De même, les classements provinciaux sont différents selon les deux ENSP : les estimations et les classements de 1996-1997 calculés d'après les modèles sont conformes à ceux qui ont été calculés directement à partir des données de l'ENSP de 1994-1995, mais l'association n'est pas aussi étroite dans le cas des classements directs de 1996-1997.

 


TABLEAU 4
Estimations directes et calculées d'après les modèles de la prévalence de l'usage actuel du tabac chez les jeunes Canadiens âgés entre 15 et 24 ans en 1996
(estimations calculées à partir de la population de chaque strate du recensement canadien de 1996)

Province

Estimations directes et calculées d'après les modèles et classement des provinces

Direct

Modèle 1

Modèle 2

Modèle 3

Modèle 4

%
(IC à 95  %)

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

Rang

T.-N.

33,6 (26,1-41,1)

3

32,9

5

33,3

5

25,2

4

6

N.-É.

31,0 (23,4-38,6)

6

29,3

9

29,5

10

23,7

6

7

Î.-P.-É.

33,6 (25,2-42,0)

2

34,3

4

35,1

4

24,2

5

5

N.-B.

30,7 (23,7-37,7)

7

35,1

3

35,4

3

27,7

2

3

Qué.

40,1 (34,9-45,3)

1

39,7

1

41,6

1

32,2

1

1

Ont.

27,9 (26,6-29,2)

10

27,7

10

31,3

9

21,7

8

10

Man.

31,5 (27,4-35,6)

5

37,3

2

39,9

2

27,4

3

2

Sask.

30,4 (23,0-37,8)

8

31,6

6

32,8

7

23,2

7

4

Alb.

31,9 (25,1-38,7)

4

29,9

7

32,0

8

21,5

10

8

C.-B.

29,2 (23,1-35,3)

9

29,9

8

33,3

6

21,7

9

9

Corrélation des classements associés aux estimations directes (valeur p)

0,57 (0,09)

0,43 (0,21)

0,51 (0,14)

0,49 (0,15)

Moyenne des écarts absolus

1,7

2,8

7,1

2,4

TABLEAU 4 (suite)
Estimations directes et calculées d'après les modèles de la prévalence de l'usage actuel du tabac chez les jeunes Canadiens âgés entre 15 et 24 ans en 1996
(estimations calculées à partir de la population de chaque strate du recensement canadien de 1996)

Province

Estimations directes et calculées d'après les modèles et classement des provinces

Direct

Modèle 4

Modèle 5

Modèle 6

Modèle 7

Modèle 8

%
(IC à 95  %)

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

T.-N.

33,6 (26,1-41,1)

3

30,0

6

25,9

4

25,4

4

30,1

6

26,3

4

N.-É.

31,0 (23,4-38,6)

6

29,1

7

24,7

7

23,9

6

29,0

8

25,2

7

Î.-P.-É.

33,6 (25,2-42,0)

2

30,1

5

24,8

6

24,4

5

31,0

5

25,9

5

N.-B.

30,7 (23,7-37,7)

7

33,7

3

28,9

3

28,1

2

33,8

3

29,5

3

Qué.

40,1 (34,9-45,3)

1

37,9

1

41,6

1

32,5

1

37,9

1

34,0

1

Ont.

27,9 (26,6-29,2)

10

26,4

10

22,6

10

22,0

9

26,5

10

23,1

10

Man.

31,5 (27,4-35,6)

5

35,6

2

29,1

2

27,7

3

35,6

2

30,0

2

Sask.

30,4 (23,0-37,8)

8

31,9

4

25,1

6

23,5

7

31,9

4

25,6

6

Alb.

31,9 (25,1-38,7)

4

29,1

8

23,0

8

21,7

10

29,1

7

23,5

8

C.-B.

29,2 (23,1-35,3)

9

28,6

9

22,9

9

22,0

8

28,3

9

23,5

9

Corrélation des classements associés aux estimations directes (valeur p)

0,49 (0,15)

0,54 (0,11)

0,51 (0,14)

0,49 (0,15)

0,61 (0,06)

Moyenne des écarts absolus

2,4

5,9

6,9

2,4

5,4


TABLEAU 5
Estimations directes et calculées d'après les modèles de l'incidence de l'usage quotidien du tabac chez les jeunes Canadiens âgés entre 15 et 24 ans en 1996
(estimations calculées à partir de la population de chaque strate de l'ENSP de 1996-1997)

Province

Estimations directes et calculées d'après les modèles et classement des provinces

Direct

Modèle 1

Modèle 2

Modèle 3

Modèle 4

%
(IC à 95  %)

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

T.-N.

 2,8
(0,4-5,2)

5

1,9

8

1,9

8

2,0

7

1,9

8

N.-É.

3,6
(0,4-6,8)

4

3,7

3

4,0

2

1,3

10

3,7

3

Î.-P.-É.

1,6
(0,4-2,8)

8

4,0

2

3,8

3

4,1

2

3,9

2

N.-B.

4,7
(1,4-8,0)

1

1,6

9

1,5

9

1,7

8

1,6

9

Qué.

4,3
(1,7-6,9)

2

2,9

4

3,0

4

2,9

3

2,9

4

Ont.

2,1
(1,7-2,5)

7

2,3

7

2,3

6

2,4

6

2,3

7

Man.

1,4
(0,4-2,4)

9

2,5

5

2,5

5

2,6

4

2,4

5

Sask.

3,7
(0,7-6,7)

3

6,3

1

6,3

1

6,5

1

6,4

1

Alb.

2,7
(0,3-5,1)

6

1,5

10

1,5

10

1,5

9

1,5

10

C.-B.

1,1
(0,0-2,6)

10

2,3

6

2,3

7

2,4

5

2,3

6

Corrélation des classements associés aux estimations directes (valeur p)

-0,01 (0,99)

-0,02 (0,96)

-0,15 (0,68)

-0,14 (0,70)

Moyenne des écarts absolus

1,4

1,4

1,7

1,4


TABLEAU 5 (suite)
Estimations directes et calculées d'après les modèles de l'incidence de l'usage quotidien du tabac chez les jeunes Canadiens âgés entre 15 et 24 ans en 1996
(estimations calculées à partir de la population de chaque strate de l'ENSP de 1996-1997)

Province

Estimations directes et calculées d'après les modèles et classement des provinces

Direct

Modèle 5

Modèle 6

Modèle 7

Modèle 8

%
(IC à 95  %)

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

T.-N.

 2,8
(0,4-5,2)

5

3,1

8

2,0

8

2,0

8

2,9

7

N.-É.

3,6
(0,4-6,8)

4

5,7

3

3,9

3

3,6

3

4,7

3

Î.-P.-É.

1,6
(0,4-2,8)

8

6,4

2

4,2

2

4,0

2

6,1

2

N.-B.

4,7
(1,4-8,0)

1

2,3

10

1,7

9

1,6

9

2,1

10

Qué.

4,3
(1,7-6,9)

2

4,3

4

3,0

4

2,9

4

3,9

4

Ont.

2,1
(1,7-2,5)

7

3,1

7

2,4

7

2,3

7

2,8

8

Man.

1,4
(0,4-2,4)

9

3,9

5

2,6

5

2,4

5

3,5

5

Sask.

3,7
(0,7-6,7)

3

10,0

1

6,6

1

6,4

1

9,1

1

Alb.

2,7
(0,3-5,1)

6

2,4

8

1,6

10

1,5

10

2,2

9

C.-B.

1,1
(0,0-2,6)

10

3,6

6

2,4

6

2,3

6

3,3

6

Corrélation des classements associés aux estimations directes (valeur p)

-0,23 (0,52)

-0,01 (0,99)

-0,14 (0,70)

-0,04 (0,91)

Moyenne des écarts absolus

2,2

1,5

1,4

2,0


TABLEAU 6
Estimations directes et calculées d'après les modèles de l'incidence de l'usage quotidien du tabac chez les jeunes Canadiens âgés entre 15 et 24 ans en 1996
(estimations calculées à partir de la population de chaque strate du recensement canadien de 1996)

Province

Estimations directes et calculées d'après les modèles et classement des provinces

Direct

Modèle 1

Modèle 2

Modèle 3

Modèle 4

%
(IC à 95  %)

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

T.-N.

 2,8
(0,4-5,2)

5

1,8

8

1,9

8

1,9

7

1,8

8

N.-É.

3,6
(0,4-6,8)

4

3,8

3

4,0

2

1,3

10

3,8

2

Î.-P.-É.

1,6
(0,4-2,8)

8

3,9

2

3,7

3

4,0

2

3,7

3

N.-B.

4,7
(1,4-8,0)

1

1,5

9

1,5

10

1,5

8

1,5

9

Qué.

4,3
(1,7-6,9)

2

2,8

4

3,2

4

2,9

3

2,8

4

Ont.

2,1
(1,7-2,5)

7

2,3

6

2,5

6

2,3

5

2,2

6

Man.

1,4
(0,4-2,4)

9

2,5

5

2,6

5

2,5

4

2,4

5

Sask.

3,7
(0,7-6,7)

3

6,3

1

6,5

1

6,5

1

6,4

1

Alb.

2,7
(0,3-5,1)

6

1,5

10

1,6

9

1,5

9

1,4

10

C.-B.

1,1
(0,0-2,6)

10

2,2

7

2,5

7

2,3

6

2,2

7

Corrélation des classements associés aux estimations directes (valeur p)

-0,04 (0,91)

0,02 (0,96)

-0,12 (0,75)

0,08 (0,83)

Moyenne des écarts absolus

1,4

1,5

1,7

1,4


TABLEAU 6 (suite)
Estimations directes et calculées d'après les modèles de l'incidence de l'usage quotidien du tabac chez les jeunes Canadiens âgés entre 15 et 24 ans en 1996
(estimations calculées à partir de la population de chaque strate du recensement canadien de 1996)

Province

Estimations directes et calculées d'après les modèles et classement des provinces

Direct

Modèle 5

Modèle 6

Modèle 7

Modèle 8

%
(IC à 95  %)

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

%

Rang

T.-N.

 2,8
(0,4-5,2)

5

2,6

8

1,9

8

1,8

8

2,3

8

N.-É.

3,6
(0,4-6,8)

4

5,2

3

4,0

3

3,8

3

4,6

3

Î.-P.-É.

1,6
(0,4-2,8)

8

5,5

2

4,1

2

3,8

3

5,0

2

N.-B.

4,7
(1,4-8,0)

1

2,1

10

1,6

9

1,5

9

1,9

10

Qué.

4,3
(1,7-6,9)

2

3,7

5

3,0

4

2,8

4

3,4

5

Ont.

2,1
(1,7-2,5)

7

3,0

7

2,4

6

2,3

6

2,7

7

Man.

1,4
(0,4-2,4)

9

3,8

4

2,6

5

2,4

5

3,5

4

Sask.

3,7
(0,7-6,7)

3

9,5

1

6,6

1

6,4

1

8,7

1

Alb.

2,7
(0,3-5,1)

6

2,2

9

1,5

10

1,5

10

2,0

9

C.-B.

1,1
(0,0-2,6)

10

3,2

6

2,3

7

2,2

7

3,0

6

Corrélation des classements associés aux estimations directes (valeur p)

-0,15 (0,68)

0,03 (0,93)

0,08 (0,83)

-0,15 (0,68)

Moyenne des écarts absolus

2,1

1,5

1,4

1,9


TABLEAU 7
Comparaison des estimations/classements produits à partir du modèle 4 et des estimations/classements directs de la prévalence de l'usage actuel du tabac calculés d'après les données des ENSP de 1994-1995 et de 1996-1997

Province

Modèle 4 produit
à partir de l'ENSP de 1996-1997

1994-1995 direct

1996-1997 direct

Estimation (%)

Rang

Estimation (%)

Rang

Estimation (%)

Rang

T.-N.

32,2

 5

32,7

 5

33,6

 3

N.-É.

31,0

 7

29,1

 9

31,0

 6

Î.-P.-É.

32,3

 4

34,7

 4

33,6

 2

N.-B.

33,0

 3

35,0

 3

30,7

 7

Qué.

40,3

 1

39,1

 1

40,1

 1

Ont.

26,5

10

27,6

10

27,9

10

Man.

35,4

 2

37,4

 2

31,5

 5

Sask.

31,6

 6

31,6

 6

30,4

 8

Alb.

30,0

 8

29,7

 7

31,9

 4

C.-B.

29,1

 9

29,5

 8

29,2

 9

Corrélation des classements associés aux estimations directes (valeur p)

0,96 (< 0,0001)

0,67 (0,04)

Moyenne des écarts absolus

0,5

0,2


FIGURE 1
Comparaison des estimations directes et calculées d'après le modèle 4 de la prévalence de l'usage actuel du tabac chez les jeunes Canadiens âgés entre 15 et 24 ans en 1996 (à partir de l'ENSP de 1996-1997)


   

Discussion

Dans cette étude, nous avons tenté d'estimer la prévalence et l'incidence de l'usage du tabac chez les jeunes Canadiens et Canadiennes en utilisant les données de l'ENSP et du recensement du Canada. Pour ce faire, nous avons utilisé une méthode de régression. Les analyses ont porté sur le calcul des estimations du tabagisme chez les jeunes à l'échelle provinciale, qui ont été ensuite comparées aux estimations directes censées être relativement stables et précises.

Avant d'entreprendre l'étude, nous avons établi un certain nombre de critères dans le cadre du processus d'estimation. Nous avons jugé que, pour qu'un modèle soit acceptable, il devait produire des estimations justes. Les techniques utilisées à cette fin devaient en outre être passablement simples, car nous croyions qu'elles seraient utilisées par des personnes n'ayant que des notions fondamentales en statistique et relativement aux tableurs. Les techniques exigent l'utilisation de renseignements socio-démographiques régionaux tirés du recensement, sous forme de données croisées, qui permettent d'estimer le tabagisme chez les jeunes. Il s'ensuit que les prédicteurs inclus dans les modèles se limitaient à ceux que l'on trouve dans le recensement et que tout modèle élaboré devait être théoriquement parcimonieux. Enfin, nous espérions que les modèles définitifs seraient transférables (c.-à-d. qu'ils pourraient s'appliquer à des groupes de jeunes Canadiens et Canadiennes habitant dans différentes régions géographiques et vivant à des époques différentes).

Les estimations des paramètres pour les modèles d'usage actuel du tabac sont issues des données de l'ENSP de 1994-1995. Lorsque nous avons appliqué ces dernières estimations aux sous-groupes aléatoires de données socio-démographiques relatives aux jeunes de cette enquête, les résultats ont été presque parfaits (données non illustrées), comme nous pouvions nous y attendre étant donné que les modèles ont été produits à partir de l'ensemble de données de 1994-1995. Lorsqu'ils ont été appliqués aux données socio-démographiques de l'ENSP de 1996-1997, les modèles ont permis d'obtenir des résultats raisonnablement bons quoique non parfaits. Le rendement s'est encore détérioré lorsque ces mêmes modèles ont été appliqués aux données socio-démographiques du recensement de 1996. Comme le montre le tableau 7, les estimations calculées d'après les modèles en fonction des données de l'ENSP de 1996-1997 ont tendance à correspondre davantage, sur les plans de l'ordre de grandeur et des classements, aux estimations directes calculées d'après les données de 1994-1995 qu'à celles qui ont été calculées selon les données de 1996-1997. Cela nous porte à croire que même le meilleur des modèles prédictifs ne puisse être utilisé pour calculer des estimations portant sur différentes périodes.

Les répartitions de la population en fonction des facteurs socio-démographiques dont tenaient compte les modèles étaient relativement stables et ne pourraient, à elles-seules, justifier les variations temporelles observées à l'égard du tabagisme chez les jeunes. Cela indique que les associations entre les prédicteurs et le tabagisme évoluent dans le temps ou qu'une ou plusieurs variables explicatives dont on n'a pas tenu compte dans les modèles étaient instables. Par conséquent, les variables socio-démographiques disponibles n'étaient généralement pas suffisantes pour permettre de prédire avec précision les habitudes de consommation de tabac des jeunes ainsi que l'évolution de ces habitudes.

En ce qui a trait à l'usage actuel du tabac, même si, d'après les deux critères de validation, les modèles ont permis d'obtenir des résultats raisonnablement bons, le rendement par province était inconstant. Les modèles qui tenaient compte du chômage (modèles 3, 5, 6 et 8) avaient tendance à sous-estimer la prévalence de l'usage actuel du tabac. On s'attendrait à ce que l'emploi des personnes de ce groupe d'âge soit une variable inexacte, d'autant plus que la plupart des jeunes ne sont pas considérés comme faisant partie de la population active traditionnelle. Les modèles qui tenaient compte de la scolarité (mais non du chômage - modèles 4 et 7) ont permis d'obtenir des estimations plus précises que ceux qui prenaient seulement en compte l'âge et le sexe (modèle 1). L'introduction de l'âge en interaction avec la scolarité n'a pas permis d'obtenir de meilleures estimations. (Dans ce cas-ci, la précision et son degré d'amélioration font référence à la mesure dans laquelle les classements et l'ordre de grandeur des estimations directes et calculées d'après les modèles étaient similaires.)

La modélisation du second indicateur du tabagisme chez les jeunes (début de l'usage quotidien de tabac) n'a pas été fructueuse. De façon générale, le coefficient de corrélation entre les estimations provinciales calculées directement et calculées d'après les modèles était faible. De plus, la rareté des résultats explique la grande variabilité des estimations directes, comme en font foi les intervalles de confiance relativement importants.

La taille des échantillons des ENSP (2 597 et 9 601 pour les versions de 1994-1995 et de 1996-1997, respectivement) a limité la portée de l'étude. Les estimations directes du tabagisme et les modèles prédictifs étaient moins stables que prévu dans certaines provinces. Par conséquent, il a été impossible de faire des sous-analyses additionnelles (p. ex., dans différentes strates d'âge/sexe) et la méthode de partage des données permettant d'élaborer les modèles et de les valider n'a pu être utilisée. Au niveau de la population, le manque de variation interprovinciale des deux indicateurs du tabagisme a compliqué le processus d'estimation. De même, dans la plupart des huit modèles que nous avons examinés, les répartitions sous-jacentes des prédicteurs importants variaient peu d'une province à l'autre, ce qui est venu compliquer davantage l'élaboration de modèles stables et prévisibles.

Pour illustrer ces derniers points, on trouvera à la figure 1 une vue sommaire des taux provinciaux de l'usage actuel du tabac obtenus d'abord directement à partir des données de l'ENSP de 1996-1997, puis selon le modèle 4 appliqué à chaque strate de population de cette enquête. Même si les estimations directes et calculées d'après les modèles étaient généralement similaires, cette figure illustre quand même la difficulté inhérente à l'utilisation de données provinciales en vue de produire des estimations pour de petites régions. À l'exception du Québec, on ne note en fait qu'une variation minime de la prévalence de l'usage actuel du tabac d'une province à l'autre. Il est possible, voire probable, que les variations au sein d'une province des taux de tabagisme chez les jeunes dépassent effectivement les variations observées entre provinces. Les processus de modélisation et leurs imputations auraient peut-être pu permettre d'obtenir de meilleurs résultats s'ils avaient été tirés de petites régions et non de provinces.

Les études existantes qui ont eu recours à des approches de type synthétique, à des analyses de régression et à des estimations combinées ont obtenu des succès mitigés, ce qui est corroboré par nos propres résultats. Par exemple, MacKenzie et ses collaborateurs15 ont appliqué les données du National Health Interview Survey des États-Unis à des données locales provenant du recensement américain afin d'estimer une variété d'indicateurs de santé. Les estimations locales ont ensuite été validées en utilisant les résultats d'une enquête téléphonique basée sur une population plus vaste afin d'obtenir des valeurs «étalons». On a constaté que les estimations de type synthétique et de régression correspondaient aux valeurs étalons pour certaines variables liées à la santé, mais non pour d'autres. Il n'y avait aucune constante dans les types de variables qui produisaient des approximations justes et médiocres. Spasoff et son équipe16 ont utilisé des estimations de type synthétique et de régression pour effectuer des calculs similaires à l'aide des données de l'Enquête sur la santé en Ontario de 1990-1991 et du recensement du Canada de 1986. Une fois encore, les estimations relatives à de petites régions n'ont pas permis d'obtenir des valeurs étalons approximatives satisfaisantes.

On a attribué les résultats observés dans ces deux études à des lacunes dans le plan des évaluations. La seconde comportait des choix imparfaits de valeurs étalons et des sources inexactes de données sur lesquelles fonder les modèles d'estimation. Notre expérience nous porte à croire que, par opposition aux résultats de ces études, il est possible de créer des modèles simples d'estimation du tabagisme chez les jeunes. Ces modèles ne peuvent cependant pas s'appliquer à différentes populations et à différentes époques et il est peut-être irréaliste de s'attendre à ce que des comportements complexes, comme le tabagisme chez les jeunes, puissent être prédits en se fondant uniquement sur des facteurs socio-démographiques et des méthodes simples d'estimation. Il peut être nécessaire d'avoir recours à des méthodes d'analyse plus raffinées (telles que les nouvelles méthodes empiriques de Bayes20) ou encore, la conceptualisation des modèles doit comporter l'utilisation de prédicteurs qu'on ne trouve pas couramment dans les données du recensement.


Remerciements

Cette étude a été financée grâce à la subvention 6605-6550-NPHS versée par le Programme national de recherche et de développement en matière de santé, de Santé Canada. Le Dr Pickett est un scientifique de carrière dont les travaux sont financés par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée de l'Ontario.


Références

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2. Stephens M, Siroonian J. L'habitude de fumer et les tentatives pour s'en défaire. Rapports sur la santé 1998;9(4):31-8.

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7. Miller AB. Le meilleur des mondes - la lutte contre le cancer et les promesses du nouveau millénaire [commentaire]. Maladies chroniques au Canada 1999;20(4):154-66.

8. Single E, Rehm J, Robson L, Truong MV. The relative risks and etiologic fractions of different causes of death and disease attributable to alcohol, tobacco and illicit drug use in Canada. Can Med Assoc J 2000;162:1669-75.

9. Single E, Robson L, Rehm J, Xie X. Morbidity and mortality attributable to alcohol, tobacco, and illicit drug use in Canada. Am J Public Health 1999;89:385-90.

10. Kaiserman MJ. Le coût du tabagisme au Canada, 1991. Maladies chroniques au Canada 1997;18(1):15-22.

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Références des auteurs

William Pickett, Departments of Community Health and Epidemiology and of Emergency Medicine, Queen's University, Kingston (Ontario); et Ontario Tobacco Research Unit, Toronto (Ontario)

Anita Koushik, Department of Community Health and Epidemiology, Queen's University, Kingston (Ontario); et Department of Epidemiology and Biostatistics, McGill University, Montréal (Québec)

Taron Faelker, Department of Community Health and Epidemiology, Queen's University, Kingston (Ontario)

K. Stephen Brown, Ontario Tobacco Research Unit, Toronto (Ontario); et Department of Statistics and Actuarial Science, University of Waterloo, Waterloo (Ontario)

Correspondance : Dr William Pickett, Queen's University, c/o Emergency Medicine Research, Angada 3, Kingston General Hospital, 76 Stuart Street, Kingston (Ontario)  K7L 2V7; Téléc. : (613) 548-1381; Courriel : PickettW@post.queensu.ca

 

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Dernière mise à jour : 2002-10-02 début