La gestion collective de la propriété intellectuelle des organismes de patrimoine culturel Canadiens -
Diverses solutions possibles
12. Conclusion
La gestion collective du droit d'auteur au Canada est un chemin
parsemé d'embûches. Au départ, la gestion
collective cherchait à établir un rapport de force
entre le titulaire d'un droit d'auteur et l'utilisateur d'une
uvre protégée qui permette une négociation
équilibrée entre ceux-ci. La poursuite de ce processus
d'équilibrage a donné lieu à la création
d'un système complexe de gestion collective. Pour régler
la question des possibilités d'atteinte à la concurrence,
l'existence d'un tribunal administratif ayant le pouvoir de superviser
les taux de redevances a été jugée nécessaire.
En dépit de sa complexité, le système a
procuré certains avantages, tant aux utilisateurs des uvres
qu'aux titulaires de leurs droits d'auteur. Ainsi, dans certains
secteurs de la communauté culturelle, un accès à
prix modique à des uvres protégées
a été rendu possible grâce à ce système.
L'exemple des collectifs de reprographie, qui ont permis aux établissement
d'enseignement d'accéder aux uvres moyennant des
droits modiques est, à ce titre, probant. Le système
de la gestion collective a accru la circulation d'information,
ce qui est dans l'intérêt du public.
Les organismes de patrimoine culturel canadiens ont largement
bénéficié de la gestion collective du droit
d'auteur et le système juridique canadien offre des conditions
qui ont une valeur incitative. Bien que certaines exemptions à
la loi canadienne sur le droit d'auteur peuvent avoir pour effet
de réduire la taille du marché éducatif à
portée d'exploitation des organismes culturels, on peut
juger que l'ampleur de cet inconvénient est atténuée
si l'on considère que, grâce à la gestion
collective, les marchés de l'éducation sont maintenant
régulés par la loi sur le droit d'auteur.
Toutefois, la manière canadienne en ce qui concerne la
gestion collective n'est pas sans présenter quelques limitations
intéressantes pour la communauté culturelle. En
effet, contrairement à leurs pendants états-uniens,
les sociétés de gestion collective canadiennes courent
toujours le risque de voir la Commission du droit d'auteur intervenir
pour fixer le niveau des redevances qu'elles perçoivent.
Toutefois, une politique éclairée en matière
d'établissement des taux de redevances peut aider un collectif
à assurer sa crédibilité aux yeux de la Commission
et, ce faisant, à réduire le risque que celle-ci
ne prête une oreille trop attentive aux consommateurs de
propriété intellectuelle d'organismes culturels
qui se posent en détracteurs de ses projets d'imposition
de redevances.
Une autre préoccupation a trait à l'exigence d'exclusivité
imposée par nombre de sociétés de gestion
collective canadiennes. Une telle exigence limite en effet le
contrôle de l'organisme culturel sur sa propre propriété
intellectuelle. Idéalement, les membres devraient accorder
à la société de gestion collective un droit
non exclusif de gérer des droits d'auteur leur appartenant
de manière à pouvoir continuer de contrôler
eux-mêmes leur propre propriété intellectuelle.47
Nombre de collectifs et d'organismes sont déjà
en butte au problème soulevé par l'environnement
numérique, à savoir la possibilité de réaliser
instantanément des reproductions quasi parfaites de leurs
uvres. Le droit canadien se contente pour le moment de «
rattraper » le retard et nombre de problèmes (tels que
les droits d'auteur liés aux bases de données et
les droits de reproduction électronique) demeurent sans
solution. Poursuivant sans fin sa spirale évolutive, la
technologie fournira de nouveaux moyens de protéger et
d'exploiter la propriété intellectuelle. Les organismes
de patrimoine culturel doivent toutefois demeurer à l'affût
des changements technologiques et de l'évolution du droit
de sorte que les collectifs puissent continuer d'agir dans le
meilleur intérêt de leurs membres.