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Comité consultatif canadien de la biotechnologie
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Les biobanques au Canada : Questions éthiques, juridiques et sociales

Auteur : Lorraine Sheremeta

Table des matières

  1. Contexte
    1. Définition de « biobanque »

  2. Aperçu des rapports commandes antérieurement
    1. Approches nationales en matière de création de banques de données génétiques sur la population, par Mylène Deschênes et Geneviève Cardinal
    2. Vers un régime intégré de protection des données personnelles servant à la recherche et stockées dans les biobanques, par Michael Yeo
    3. À qui sont ces gènes? Sont-ils protégés? Bien protégés? L'opinion du public et de spécialistes concernant les biobanques, par Edna F. Einsiedel

  3. Progrès récents
    1. Rapport du Comité des sciences et de la technologie de la Chambre des communes du Royaume-Uni
    2. Vente de Gene Trust à la Genaissance Pharmaceuticals par la société DNA Sciences Inc.
    3. Sondage d'opinion publique sur les questions de biotechnologie — Huitième vague
    4. Sondages sur les questions de protection des renseignements génétiques

  4. Analyse des grands enjeux à prendre en compte par le canada au moment de formuler une politique relative aux biobanques
    1. Consultation, information et rôle des médias
      Résumé du thème Consultation, information et rôle des médias
    2. Recrutement
      Résumé du thème Recrutement
    3. Vie privée et confidentialité
      Protection de la vie privée
      Confidentialité
      Exceptions au devoir de confidentialité du médecin
      Législation relative à la protection de la vie privée au Canada
      Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques du gouvernement fédéral
      Législation provinciale de protection des renseignements personnels dans le secteur privé
      Lois provinciales sur la protection de la vie privée qui visent les renseignements sur la santé
      Résumé du thème Vie privée et confidentialité
    4. Consentement éclairé et communication des résultats de la recherche
      Consentement individuel dans le cadre de la recherche
      Recherche rétrospective sur des données et prélèvements déjà stockés
      Recherche prospective
      Recherche sur des sujets enfants
      Consentement de la population
      Données d'opinion publique
      Résumé du thème Consentement éclairé et communication des résultats de la recherche
    5. Commercialisation
      Résumé du thème Commercialisation
    6. Régie
    7. Résumé des grands enjeux
      Information et consultation du public
      Vie privée et de la confidentialité
      Consentement éclairé
      Commercialisation
      Régie
      Stratégies de recrutement
  1. Aperçu des grandes initiatives de recherche en génétique démographique

  2. Extraits de la reaction du gouvernement de Londres, par le biais de la commission d'enquête scientifique et technologique de la Chambre des communes, au rapport du Medical Research Council

  3. Sommaire de la législation canadienne relative à la protection de la vie privée

  4. Consentement éclaire : renseignements pertinents pour les participants à des recherches en génétique démographique
    Article 2.4
    Article 10.2

  5. Déclarations internationales au sujet de la protection de la vie privée et des renseignements génétiques



  1. Contexte

    En 2002, le Comité consultatif canadien de la biotechnologie (CCCB) a commandé la préparation d'une série de rapports sur les questions propres aux biobanques de données génétiques démographiques. Il en est ressorti notamment les trois documents suivants :

    • Approches nationales en matière de création de banques de données génétiques sur la population, par Mylène Deschênes et Geneviève Cardinal

    • Vers un régime intégré de protection des données personnelles destinées à la recherche et stockées dans les biobanques, par Michael Yeo

    • À qui sont ces gènes? Sont-ils protégés? Bien protégés? L'opinion du public et de spécialistes concernant les biobanques, par Edna F. Einseidel

    Ces rapports, ainsi qu'un exposé intitulé « Biobanques, recherche et protection de la vie privée : Aperçu de la législation canadienne » et présenté par Patricia Kosseim lors du Symposium d'hiver GELS de Génome Canada, tenu à Montréal (Québec) en février 2003, forment la base du présent document de synthèse, lequel a pour but de résumer les enjeux éthiques, juridiques et sociaux les plus marquants liés aux biobanques au Canada. J'ai étayé ces textes de base, au besoin, par d'autres articles et ouvrages afin d'élargir le propos et de faire valoir certains arguments.

    En plus des trois rapports susmentionnés, au moins quatre autres textes ou événements récents méritent commentaire et sont inclus aux présentes :

    • Le Comité des sciences et de la technologie de la Chambre des communes du Royaume-Uni a émis un rapport sur les travaux du Medical Research Council1 (MRC), dans lequel il adresse des critiques virulentes à l'endroit de UK Biobank. En juin 2003, le gouvernement du Royaume-Uni diffusait publiquement sa réaction au rapport du Comité. L'annexe B résume les recommandations du comité au sujet de UK Biobank ainsi que de la réponse2 du gouvernement à chacune de ces recommandations.

    • En mai 2003, se trouvant au bord de la faillite, la société DNA Sciences Inc. a vendu presque tous ses actifs, y compris la biobanque Gene Trust, à la société Genaissance Pharmaceuticals3. Cette opération a soulevé des problèmes importants mettant en évidence le besoin que les entreprises usent de stratégies légales défensives pour empêcher que des biobanques ne soient vendues à titre d'actifs à cause de difficultés financières ou lors d'une faillite. Le cas de la biobanque Gene Trust crée une inquiétude générale quant à la vente ou à toute autre forme d'aliénation d'une biobanque et des données qui s'y trouvent.

    • En mars 2003, le Secrétariat canadien de la biotechnologie a lancé une nouvelle « vague » de sondages sur les questions de biotechnologie4. Une part des questions portait directement sur la cartographie et le brevetage de l'ADN, et les données qui en sont ressorties sont mentionnées dans les sections pertinentes du présent rapport.

    • En août 2003, le Secrétariat canadien de la biotechnologie a fait paraître un rapport intitulé « Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection5 ». Cette étude est importante parce qu'elle porte sur la confidentialité des données génétiques stockées dans les biobanques et qu'elle met en contexte et réaffirme la teneur des conclusions de la professeure Einseidel au sujet des opinions de la population et des professionnels concernent les biobanques.

    Depuis quelques années, le stockage et l'utilisation éventuelle de matières vivantes humaines sont un enjeu de bio-éthique qui fait l'objet d'un débat houleux. Maintes organisations professionnelles ont émis des déclarations touchant directement ou indirectement la question6. Au moins trois réalisations importantes ayant trait à l'utilisation de tissus humains à des fins de diagnostic et de recherche clinique ont attiré l'attention sur ces enjeux. D'abord, on a cerné de tout nouveaux modes d'utilisation des échantillons de tissus prélevés et stockés, et les chercheurs sont de plus en plus en mesure de tirer des renseignements génétiques précieux des prélèvements biologiques. En deuxième lieu, le paradigme de la recherche en génétique s'est déplacé, passant de l'analyse de liaison de nombres relativement petits de prélèvements génétiques à d'immenses projets de génétique démographique qui, souvent, font intervenir la collecte, le stockage et l'analyse de centaines de milliers d'échantillons. Troisièmement, l'avènement de techniques nouvelles, à grande capacité, de séquençage de l'ADN est source de craintes grandissantes que les données génétiques et autres renseignements médicaux tirés de ces matières puissent être mis à des utilisations qui enfreignent les droits de quiconque à la vie privée et entraînent ainsi une discrimination inique à l'endroit de certaines personnes et de certains groupes.

    L'optimisme est assez général quant aux énormes bienfaits que la société trouvera aux innovations découlant du projet du génome humain. Tous espèrent que l'analyse des données d'études de génétique démographique de grande envergure permettront aux chercheurs de mieux comprendre les interactions gènes-milieu qui entrent en jeu dans des maladies complexes comme la cardiopathie, le diabète, la maladie d'Alzheimer, la sclérose en plaques et d'autres troubles qui affligent trop communément l'être humain. Un grand nombre d'études génétiques démographiques à grande échelle sont entamées et de nombreuses autres en sont à divers stades de la planification (voir le tableau 1).

    Comme tous les autres progrès technologiques, ceux de la génétique démographique s'accompagnent à la fois de risques et de bienfaits. Malgré l'optimisme voulant que la recherche en génétique démographique mène en fin de compte à l'amélioration de la santé et du bien-être des humains, il n'en reste pas moins que ces activités donnent lieu à une foule de préoccupations de nature éthique, juridique et sociale en ce qui concerne, par exemple, le consentement individuel et collectif7, la propriété des matières vivantes humaines8, la vie privée et la confidentialité9, la discrimination et la stigmatisation sociale10 et l'eugénisme11, qui reviennent sans cesse sur le tapis. Les chercheurs universitaires qui se penchent assidûment sur les dimensions déontologiques, juridiques et sociales du projet du génome humain poursuivent un immense débat sur ces questions.


    Tableau 1 –
    Exemples actuels et proposés de biobanques et de bases de données génétiques démographiques


    Propositions de bases de données génétiques démographiques
    Projet Entreprise Nombre d'échantillons d'ADN Budget (en dollars) État et déroulement du projet
    Base de données sur le secteur de la santé, Islande deCODE Genetics 280 000 212 millions Base de données établie en 2003; génotypage de 80 000 prélèvements
    Projet du génome, Estonie EGeen International 1 million 150 millions Projet pilote de 3 ans et 2,5 millions de dollars (10 000 donneurs) lancé à l'automne 2002
    UK Biobank Inconnue 500 000 66 millions Recrutement complet en 2004
    Marshfield – Médecine personnalisée   40 000 3.8 millions Recrutement à l'automne 2003
    Étude nationale sur les enfants, États-Unis   100 000 inconnu Début de l'étude complète en 2004
    Base de données sur le génome, Lettonie Inconnue 60 000 1.7 millions Loi édictée en juin; en quête de fonds
    CARTaGÈNE, Québec Inconnue 50 000+ 19 millions En quête de fonds
    Biobanques et archives médicales existantes
    Västerbotten, Suède UmanGenomics 80 000   Utilisation des données en vertu d'un accord conclu en 2002
    Clinique Mayo, Etats- Unis Inconnue 100 000   Prototype de base de données sur la santé achevé en juillet
    Étude européenne prospective du cancer et de la nutrition (EPIC), Europe   350 000   Regroupement des données tirées des études sur le cancer, par l'entremise d'un consortium
    Étude sur la santé des infirmières et des infirmiers, États-Unis   63 000    
    Étude sur la prévention du cancer, American Cancer Society (CPSII), Etats-Unis   110 000    
    Étude nationale sur la santé et la nutrition, Centers for Disease Control (NHANES III), Etats-Unis   7 300   Demande de propositions d'utilisation des données personnelles, automne 2002

    Source : Jocelyn Kaiser, « Population Databases Boom, from Iceland to the U.S », Science, no 298, 2002, p. 1158-1161 (1159)..


    Présentement, le Canada envisage de lancer sa propre recherche de grande envergure en génétique démographique12. L'Initiative sur la santé des Canadiens à tous les stades de la vie en est encore à l'étape de la planification, bien qu'elle doive commencer dès 2005. Elle consisterait à suivre la santé de 30 000 bébés de partout au Canada pendant une période déterminée ou pendant toute la vie du sujet. Les intéressés sont fort conscients du fait que le Canada, à l'instar du Royaume-Uni, de l'Estonie et de l'Islande, est un lieu idéal pour ce genre de recherches en raison de son système national de soins de santé. L'étude proposée comporte l'administration précoce de tests psychométriques visant à évaluer le développement intellectuel, affectif et social ainsi que le recours à des mesures détaillées du milieu. Elle est d'une envergure beaucoup moindre que plusieurs autres initiatives du genre, par exemple, celle de la UK Biobank, qui prévoit rassembler des données sur 500 000 personnes, et le projet du génome en Estonie, dont les exécutants espèrent rassembler des données sur environ un million de personnes, soit les trois quarts des 1,4 million d'habitants du pays.

    Les planificateurs de l'Initiative sur la santé des Canadiens à tous les stades de la vie se heurtent à de nombreuses difficultés juridiques et déontologiques à cause de la nature de la cohorte à étudier. Le fait que les sujets de la recherche soient mineurs et, par conséquent, incapables de donner leur consentement avant plusieurs années, fait problème et il faudra prendre des précautions supplémentaires pour leur assurer une protection rigoureuse. Les planificateurs conviennent généralement de la nécessité de consulter sérieusement les populations canadiennes au sujet de l'Initiative et d'être réceptifs aux inquiétudes exprimées lors de ces consultations ou autrement. Il reste à déterminer la forme que devraient prendre ces consultations, mais la première question qu'il faudra y aborder est celle de savoir s'il est justifié que Canadiens favorisent la recherche génétique démographique en général et, en particulier, cette grande initiative sur la santé. Les planificateurs estiment que le projet mérite d'être réalisé, mais cela ne signifie pas nécessairement que toute la population sera du même avis.

    Sans l'application rigoureuse des normes scientifiques, juridiques et éthiques les plus élevées, l'Initiative canadienne et tous les autres programmes semblables mèneront inévitablement à la dégradation de la confiance du public à l'endroit des progrès scientifiques et des produits de la recherche en génétique13. Il est essentiel qu'une intégrité absolue préside à l'élaboration du projet et au déroulement même de la recherche. Voici ce que dit pertinemment Wolfgang Edelstein au sujet des erreurs auxquelles a donné lieu la mise sur pied de la base de données sur le secteur de la santé en Islande :

    La précipitation procédurière; le refus d'inviter les opinions d'experts de l'étranger (qui ont beaucoup plus l'expérience des conflits entre l'industrie, la science et l'éthique); le rejet des critiques intérieures; la politicaillerie et la partisanerie qui entachent tous les débats sur des cas particuliers; les simplifications grossières qui rabaissent la discussion; les controverses au sujet des voies biologiques de base par lesquels se transmettent les maladies héréditaires; la puissance des intérêts privés; les modes pseudodémocratiques de légitimation dans les cas sujets à des controverses éthiques, sociales et scientifiques le moindrement subtiles, voilà autant de facteurs propres à faire naître une foule de doutes, c'est le moins que l'on puisse dire, et qui sont de mauvais augure pour la recherche de solutions consensuelles à des conflits d'éthique qui adviennent dans des domaines sociaux fragiles14 (traduction).

    Ces problèmes s'appliquent aussi à d'autres projets bien établis. Au Royaume-Uni, par exemple, le Comité des sciences et de la technologie de la Chambre des communes a récemment blâmé le MRC du Royaume-Uni pour avoir affecté prématurément des fonds à la UK Biobank avant que n'aient été réglées les questions soulevées quant à la valeur et à la méthode du projet15. En outre, le Comité affirme que les justifications scientifiques de la UK Biobank ont été fabriquées de toutes pièces par ses bailleurs de fonds pour soutenir un projet à motivation purement politique16. Le véritable débat sur cette biobanque semble tout juste commencer au Royaume-Uni.

    Le Canada, s'il veut se lancer à son tour dans de grands projets de recherche en génétique démographique, doit tenir compte de ces mises en garde.

    Définition de « biobanque »

    Dans les travaux commandés auparavant et dans le présent rapport, une biobanque se définit comme une collection regroupant à la fois des échantillons physiques dont il est possible de tirer de l'ADN et des données tirées des prélèvements d'ADN.

    Les biobanques de données génétiques démographiques peuvent être catégorisées selon :

    • les fins auxquelles elles sont destinées, c'est-à-dire, la recherche scientifique traductionnelle et fondamentale, la recherche clinique ou la médecine clinique;

    • le fait qu'elles soient en fonctionnement ou au stade de la planification;

    • le fait que leur collection soit temporaire ou permanente.

    En général, la recherche en génétique démographique doit se baser sur un prélèvement biologique, souvent un échantillon de sang ou un frottis buccal, dont le chercheur tire des données sur le génotype du sujet. Une fois obtenues, les données sont stockées dans une base de données à titre de « données de séquence » et il arrive aussi qu'elles soient reliées à des renseignements connexes sur la santé. Au Canada, comme au Royaume-Uni, en Islande et en Estonie, la liaison des données génétiques aux renseignements sur la santé s'établit nécessairement grâce au concours et à l'aide financière du système national de soins de santé à financement public.

    Les questions d'éthique entourant la collecte et le stockage de données et de tissus dans des « biobanques » font souvent l'objet de discussions dans le contexte de la recherche en génétique démographique. Il faut reconnaître, cependant, que la pratique clinique de routine fait souvent appel à la création et à la tenue de collections permanentes ou temporaires de tissus humains. À titre d'exemple, des matières vivantes humaines, tissus ou autres, sont souvent prélevées à l'occasion d'interventions diagnostiques ou chirurgicales afin de permettre de déterminer la nature et l'étendue de la maladie. Lorsque des tissus malades sont prélevés après l'achèvement du diagnostic ou du traitement, il n'est pas rare qu'une partie du spécimen soit conservée pour servir à des fins de nature clinique, expérimentale ou juridique17. En outre, il arrive que des gens donnent volontairement leur corps, leurs organes, leur sang ou d'autres matières vivantes afin qu'ils servent à l'enseignement, à des greffes ou à la recherche.

    Les prélèvements, les cultures cellulaires et l'ADN obtenus peuvent être conservés de diverses manières et sur des supports divers, par exemple, sur des microplaquettes ou des blocs de paraffine ou dans de la formaline. Ils sont stockés dans des laboratoires cliniques ou de recherche ou encore dans des banques spéciales de tissus ou d'ADN, lesquelles ont pour fonction de fournir des échantillons aux laboratoires publics et privés qui s'en serviront à des fins cliniques ou de recherche. Il est important, pour les besoins des soins cliniques de routine, que les médecins aient accès à ces prélèvements stockés, mais lorsqu'il est question de recherche, bien des gens se demandent s'il est justifié, et dans quels cas, de recourir à ces prélèvements. Cette préoccupation découle de la possibilité que le consentement obtenu au moment du prélèvement initial ne mentionne pas spécifiquement des recherches futures. Les enjeux propres à la collecte, au stockage et à l'exploitation des matières vivantes humaines prélevées par les chercheurs et les cliniciens sont souvent traités comme des entités discrètes et séparées malgré les chevauchements inévitables entre les utilisations réservées à la pratique clinique et celles destinées à la recherche.

    Il est important de faire remarquer que les biobanques encore au stade de la planification, comme celle envisagée présentement par le Canada, créeront moins de problèmes que celles déjà en exploitation parce que les participants peuvent être convenablement informés des utilisations possibles de leurs prélèvements biologiques et accepter ou refuser telle ou telle utilisation. Cela dit, il n'en demeure pas moins une incertitude appréciable quant à savoir si, et jusqu'à quel point, la loi et l'éthique peuvent habiliter des patients à consentir à des utilisations futures, aujourd'hui inconnues, de leurs matières vivantes et des données connexes18. L'incertitude règne aussi quant à la légalité du consentement parental dans le domaine de la recherche. Le présent rapport porte avant tout sur les questions relatives aux biobanques envisagées de collections permanentes, du moins on le suppose, de données génétiques démographiques qui seront éventuellement recueillies et serviront à la recherche scientifique traductionnelle et fondamentale ainsi qu'à la recherche clinique.




  2. Aperçu des rapports commandes antérieurement

    1. Approches nationales en matière de création de banques de données génétiques sur la population, par Mylène Deschênes et Geneviève Cardinal

      La recherche de Mylène Deschênes et Geneviève Cardinal porte sur diverses biobanques de données génétiques démographiques établies dans le monde, dont CARTaGÈNE, au Québec, la banque génétique d'Estonie, la base de données sur le secteur de la santé en Islande (société deCode Genetics), la biobanque de Tonga (société Autogen Ltd.), la UK Biobank et le projet HapMap de cartographie des variations génétiques réalisé par un consortium international19. Ces projets incarnent une gamme de modèles que le Canada peut envisager pour ses recherches en génétique démographique. Le présent rapport se concentre sur un sous-groupe de trois initiatives de génétique démographique comprises dans celles décrites par Mylène Deschênes et Geneviève Cardinal : la base de données sur le secteur de la santé en Islande, le projet du génome en Estonie et la UK Biobank.

      Ces trois initiatives sont importantes en raison de la nature des études effectuées; des grandes quantités de renseignements qui existent à leur sujet; et de ce qu'elles révèlent sur les enjeux précis à traiter par les décisionnaires canadiens. Dans leur analyse, Mylène Deschênes et Geneviève Cardinal cernent neuf grands thèmes reliés aux biobanques. Les conclusions principales relatives à chacun de ces thèmes sont résumées dans le tableau 2 ci-dessous :


      Tableau 2 –
      Neuf grands thèmes à prendre en compte par le Canada au moment d'élaborer une politique en matière de biobanques


      Thème  Points clés
      Consultation
      (p. 8–10)
      • Des consultations publiques équitables et effectives doivent se tenir avant l'amorce de toute recherche en génétique démographique.
      Recrutement
      (p. 10–12)
      • Les stratégies de recrutement sont importantes et doivent tenir compte de l'obligation de :
        • Préserver l'autonomie personnelle et la vie privée des sujets ainsi que la confidentialité du processus de recrutement
        • Veiller à une juste répartition des risques et des avantages parmi les membres de la population visée
        • Voir à ce que les sujets recrutés soient représentatifs de l'ensemble de la population.
      • Les stratégies de recrutement doivent être adaptées aux variantes culturelles et les renseignements remis aux candidats doivent être faciles à comprendre. Il faudra donc prévoir de nombreuses traductions, le cas échéant.
      • Au Canada, l'accès légitime à l'information détenue par un organisme privé ou public peut s'obtenir au moyen de mécanismes prévus dans la législation relative à la protection de la vie privée; il faudra examiner minutieusement les exigences juridictionnelles à cause des variations présentes dans les lois provinciales.
      Consentement
      (p. 12–17)
      • Il faut absolument obtenir de chacun des sujets un consentement personnel éclairé à la collecte, au stockage et à l'exploitation des échantillons d'ADN et des données personnelles destinées à une biobanque démographique.
      • Les formules de consentement doivent être rédigées de manière à expliquer les avantages et les risques pour la population entière et pour le sujet en particulier et elles devraient aborder la question de la répartition des avantages.
      • Le « consentement collectif » n'est ni pratique ni souhaitable dans le contexte de la recherche en génétique démographique.
      • Si le Canada a l'intention de se lancer dans un grand projet de génétique démographique, il lui faut d'abord tenir des consultations publiques et ensuite tenir compte de l'opinion des citoyens.
      Régie
      (p. 17–22)
      • Pour l'heure, il n'existe aucun cadre juridique et déontologique cohérent qui répond aux besoins des biobanques.
      • Les biobanques, bien que traditionnellement destinées purement à la recherche et donc comme relevant du secteur public, se lient de plus en plus avec le secteur privé.
      • La dimension commerciale des biobanques doit faire l'objet d'une gestion soigneuse afin d'éviter que ne se dégrade la confiance du public à leur égard.
      • Tout plan de régie doit être transparent, comporter une obligation de rendre compte et inspirer la confiance de tous les intéressés.
      • Il faut créer une entité indépendante qui serait chargée de superviser le projet dans son ensemble et d'en surveiller les activités. La surveillance devra s'appliquer à la fois à la gestion et à l'exploitation du projet et de la biobanque.
      • Il faut exiger une approbation et une surveillance fondées sur l'éthique pour tout ce qui a trait à la recherche en génétique démographique, peu importe qui effectue la recherche et où elle est exécutée.
      • Les principes contenus dans l'Énoncé de politique des trois conseils20 doivent s'appliquer aux organismes publics et aux organismes privés.
      • Cet énoncé donne lieu toutefois aux préoccupations suivantes :
        • il ne s'applique pas aux recherches à financement privé;
        • il n'indique pas clairement le moment où un comité d'éthique de la recherche serait consulté, ni la composition convenable de ce comité;
        • en raison de leur nature longitudinale, les projets de recherche en génétique démographique exigent la création et la mise en œuvre de mécanismes de surveillance et de supervision de longue durée, et l'Énoncé ne se prononce pas clairement à ce sujet;
        • il faudra aussi tenir compte des difficultés qui s'ajoutent en matière d'approbation et de supervision déontologiques, à cause de la multiplicité des centres d'essais.
      Commercialisation
      (p. 23–26)
      • Application commerciale éventuelle : les populations et les individus sujets de la recherche doivent être informés, au moment du consentement éclairé, que les travaux en question peuvent mener à la fabrication de produits commerciaux, à des demandes de brevet et à la production de revenus.
      • Partage des bienfaits : Ce concept découle de la notion voulant que le génome humain soit d'un intérêt collectif et vital pour l'humanité tout entière et que les avantages et les charges liés à l'exploitation et au soutien de cette ressource doivent être répartis universellement. Le comité d'éthique du projet HUGO, dans sa déclaration sur le partage des avantages, dit que la conduite à tenir peut inclure des accords à passer avec des personnes, familles, groupes, collectivités ou populations, dans lesquels seront prévus les transferts de technologie, les programmes locaux de formation, des coentreprises, la mise en place d'infrastructures de soins et d'information en matière de santé, le remboursement des coûts et l'affectation d'une part des dividendes à des objectifs humanitaires21.
      • Liberté d'accès : L'accès généreux, quoique strictement contrôlé, des chercheurs aux données génétiques démographiques est dans le meilleur intérêt des populations visées et conforme aux normes traditionnelles de la science. L'octroi de licences exclusives d'utilisation des biobanques à une ou des entités commerciales fait problème sur les plans de l'éthique et du droit.
      • Conflit d'intérêts : Les intérêts des populations en cause doivent être convenablement représentés lors de toute opération commerciale découlant des données tirées de la recherche en génétique démographique.
      Vie privée
      (p. 27–30)
      • Vu la nature très personnelle et délicate des données stockées dans les biobanques et les bases de données connexes, et les quantités énormes de données qui seront accumulées, il faut prévoir des sauvegardes matérielles, procédurales et électroniques rigoureuses pour protéger les renseignements que les sujets confient aux chercheurs.
        • Les biobanques doivent jouir d'une protection matérielle; le protocole de recherche doit décrire exactement les conditions de stockage, y compris les mesures de sécurité et les règles d'accès.
        • L'accès aux biobanques à des fins autres que la recherche médicale, par exemple, par les autorités de police, devrait être interdit et, s'il faut le permettre, les participants devront être informés de ces cas ainsi que des données qui pourront être divulguées à des tiers.
        • L'accès aux données des biobanques à des fins de recherche doit être contrôlé par un gardien ou conservateur, une personne qui ne fait pas elle-même de la recherche et qui veillera à ce que toute divulgation de données se décide et s'effectue dans le respect des règles de confidentialité qui conviennent.
        • Il faut élaborer des mesures de précaution régissant le traitement des données et la liaison entre les bases de données.
        • Le personnel des biobanques doit comprendre et assumer son devoir de protéger le caractère personnel et confidentiel des données dont il a la garde et savoir que tout manquement sera sanctionné par des mesures disciplinaires.
      • Une autorité indépendante, par exemple, le Commissaire à la protection de la vie privée ou toute autre autorité mandatée à cette fin, doit prendre part à la supervision de la protection des données et à la mise en application de la conformité aux lois et règles sur la protection des renseignements personnels.
      • Il faut peut-être instaurer des sanctions pénales ou autres pour les cas de divulgation illicite ou préjudiciable de données confidentielles. L'Estonie et l'Islande prévoient de dures sanctions sous forme d'amendes et-ou de peines d'emprisonnement dans de tels cas. En Estonie, les sujets dont les données ont été divulguées illégalement ont le droit d'exiger la destruction complète de leurs prélèvements biologiques et des renseignements connexes.
      Divulgation des résultats de la recherche
      (p. 31–34)
      • Les populations qui participent à un grand projet de recherche en génétique doivent être informées périodiquement des résultats des travaux. En restant en contact fréquent avec les sujets de l'étude, les chercheurs leur manifestent un respect et une appréciation bien mérités, et un tel comportement favorise la confiance mutuelle entre les artisans de la recherche et les participants.
      • Les résultats de toute recherche en génétique démographique doivent être communiqués d'une manière qui en facilite la compréhension; les chercheurs doivent éviter les effets négatifs d'une annonce publique des résultats qui ne serait pas accompagnée d'explications complètes.
      • Le milieu scientifique est tenu de prendre part à un dialogue sur les résultats de la recherche, afin de voir à ce que les faits rapportés soient scientifiquement exacts et bien compris par les populations, les familles et les individus qui ont participé aux travaux et en subissent les effets.
      Mieux-être de la population
      (p. 34–37)
      • Tout projet doit être précédé d'une réflexion globale et profonde sur les risques et les avantages relatifs de la recherche en génétique démographique.
      • Puisque la recherche en génétique démographique comporte des risques pour la population entière, il faut que les avantages dépassent les risques pour la société dans son ensemble :
        • Parmi les avantages éventuels, on retrouve des bienfaits pour la santé, l'amélioration des stratégies de soins de santé de la population, la création d'un dépôt de données et de prélèvements biologiques qui pourront être utiles à la recherche future, à l'économie et à des études en collaboration.
        • Les risques éventuels comprennent des effets économiques, la discrimination par les employeurs et les assureurs, la divulgation ou l'utilisation fautive de données personnelles délicates et la possibilité que des matières vivantes humaines servent au clonage de reproduction ou au bioterrorisme.
      Mieux-être de l'humanité
      (p. 37–38)
      • Le caractère universel du génome humain et les principes bioéthiques de bienfaisance et de justice exigent obligatoirement la mise en commun des connaissances au sujet du génome.
      • Les découvertes scientifiques qui sont basées sur le génome humain doivent être destinées à améliorer la santé des populations du monde entier, et non pas rester l'apanage des pays industrialisés, au détriment des pays en développement.
      • Des mécanismes de partage des bienfaits, la concession aux chercheurs d'un accès sans restriction aux données sur la séquence génétique, et des mesures propres à limiter les effets négatifs des conflits d'intérêt aideront à faire en sorte que les avantages découlant de la recherche en génétique démographique aillent équitablement aux populations participantes et à la collectivité mondiale.


    2. Vers un régime intégré de protection des données personnelles servant à la recherche et stockées dans les biobanques, par Michael Yeo

      Le professeur Michael Yeo compose l'image d'une société, dans laquelle la vie privée subit de plus en plus les assauts d'intérêts divers, nobles et bénins ou non à un degré plus ou moins faible ou plus ou moins élevé (p. 5). La constitution et l'exploitation d'une biobanque ne sont que l'une des façons dont les renseignements personnels sont recueillis, stockés et utilisés, convenablement ou non.

      Le fait que des données génétiques démographiques puissent être tout bonnement stockées dans des archives permanentes consultables signale la présence d'un risque plus ou moins grave que les renseignements contenus dans les biobanques soient utilisés à des fins contraires aux intérêts des personnes dont proviennent ces renseignements ou des groupes auxquels elles appartiennent.

      Étant donné que les questions liées à la recherche en génétique démographique et aux biobanques sont de nature sociétale, elles nécessitent un débat vaste faisant intervenir la collectivité entière afin que les intéressés puissent s'assurer que les avantages promis à la société dépassent en force les risques appréhendés. Ce débat doit avoir lieu et se conclure avant le démarrage de tout projet de biobanque de données démographiques et il doit servir à garantir un équilibre mesurable et porteur de transparence et d'imputabilité (p. 3). Bien qu'un bon nombre des risques appréhendés à propos des biobanques soient indirects et hypothétiques, ils n'en sont pas moins probablement réels et à prendre au sérieux. Il faut que soient prises en compte les craintes les plus répandues dans la population en cause. Cela dit, le corpus toujours croissant de mesures législatives provinciales de protection de la vie privée qui visent tout spécialement les renseignements sur la santé témoigne de l'importance de ces enjeux pour la société canadienne. Le système doit aussi composer avec les effets de la réduction du financement des soins de santé par l'État et avec une demande grandissante d'accès aux données. Rien de tout cela ne doit mener à une sous-estimation de la nécessité de liens très perfectionnés et ultraprotégés entre les biobanques et les renseignements médicaux provenant de collectes publiques.

      Le professeur Yeo inscrit les professionnels de la santé et les chercheurs médicaux dans la catégorie générale des nombreuses personnes demandant accès à ces renseignements. Il fait remarquer que ces intervenants, tout en valorisant la protection de la confidentialité des données personnelles sur la santé, prétendent que l'exploitation particulière qu'eux-mêmes se proposent de faire de ces données protégées mérite un traitement d'exception à la règle générale. Ces intervenants reconnaissent le caractère précieux de la vie privée, mais justifient les utilisations qu'ils proposent en les qualifiant de « très importantes » et clairement « dans l'intérêt supérieur de la collectivité » (p. 5, citation de Freeman et Robbins). Certains d'entre eux s'attendent à ce que leurs utilisations des données confidentielles soient exemptées du consentement obligatoire, et la plupart croient que toute exigence qui leur serait imposée, quelle qu'elle soit, ne devrait pas leur fermer indûment l'accès aux renseignements dont ils ont besoin. Il y a peu de chances que les chercheurs médicaux acceptent de se percevoir euxmêmes comme faisant partie de l'immense groupe des autres personnes faisant valoir des arguments concurrents (et pratiquement identiques) pour obtenir l'accès aux données.

      En ce qui a trait aux diverses interprétations de ce qu'est la vie privé, le professeur Yeo fait remarquer qu'aucune définition n'arrive à elle seule à saisir dans sa totalité le concept de vie privée et ce qu'il englobe. Lui-même décrit la vie privée comme « un concept essentiellement contesté » et donne un certain nombre d'exemples à l'appui (p. 21). Voici certains de ces exemples de définition de la vie privée (tous les exemples sont traduits de l'anglais) :

      • « Le droit d'agir à sa guise. » (Warren et Brandeis, 1890)

      • « Le droit revendiqué d'individus, de groupes ou d'organismes à décider d'eux-mêmes quand, comment et jusqu'à quel point des renseignements les concernant pourront être communiqués à d'autres. » (Alan Westin, 1984)

      • « La mesure dans laquelle nous sommes connus des autres, la mesure dans laquelle les autres ont accès physiquement à nous et la mesure dans laquelle nous sommes l'objet de l'attention des autres. » (Gavison, 1984)

      • « Le contrôle que nous détenons sur l'information nous concernant. » (Fried, 1984).

      Le professeur Yeo rappelle l'existence de nombreux concepts qui sont associés à celui de vie privée et même qui la recouvrent, notamment ceux de propriété, d'autonomie, de dignité, de violation, d'intrusion, d'intimité, d'anonymat, de confidentialité, de sécurité, de solitude et de personnalité intangible (p. 21). Il serait permis d'avancer que les renseignements génétiques incarnent plusieurs de ces concepts et aussi que, par contre, les données génétiques transcendent ces mêmes concepts parce qu'elles se rapportent non seulement à l'individu dont elles proviennent mais aussi à sa famille et à sa collectivité unique ou plurielle d'appartenance. Le professeur Yeo souligne pertinemment que :

      Le concept de vie privée, du fait qu'il est si riche, évocateur et amorphe, agit comme une sorte d'aimant et attire toutes les angoisses et les craintes qui découlent de changements sociaux et technologiques rapides et qui sont confuses et difficiles à exprimer. Ce caractère évocateur et amorphe, sans doute un désavantage à certains égards, peut aussi être perçu comme une qualité positive dans la mesure où il permet d'extérioriser des préoccupations qui resteraient peut-être autrement sans nom et sans voix. (p. 23, traduction)

      Étant donné que le sens de soi varie considérablement d'une culture à une autre, il faut aussi tenir compte des différences entre groupes en étudiant les incidences de la recherche en génétique démographique. Le Dr Frank Dukepoo, un généticien autochtone, déclare, par exemple :

      Pour nous, toute les parties de l'individu sont sacrées. Les scientifiques disent « c'est seulement de l'ADN ». Pour un Amérindien, ce n'est pas seulement de l'ADN, c'est une partie d'une personne, c'est sacré et empreint d'une signification religieuse profonde. C'est une part de l'essence d'une personne. (Yeo, p. 10, traduction)

      Reconnaissant la tension fondamentale qui existe entre la vie privée et la recherche, le professeur Yeo aborde certaines réalisations nouvelles en recherche et dans le domaine des biobanques, mais il le fait dans l'optique de la protection de la vie privée. Il essaie d'édifier un cadre au sein duquel il soit possible « de cerner, d'analyser et de débattre les questions et les préoccupations relatives à la vie privée ». Ce qui ressort de ce travail, c'est l'admission du fait que la notion de vie privée a plusieurs sens différents et englobe différents ensembles de valeurs. Pour cette raison, les gens ont des visions diverses de ce que serait un équilibre convenable entre le respect rigoureux et total de la vie privée et le libre partage des données génétiques et des renseignements médicaux pour faciliter la recherche médicale. Le professeur Yeo élabore à partir de deux grandes façons de voir la vie privée, à savoir l'autodétermination et une intendance bénigne, et laisse entendre qu'il faut tenir compte des deux au moment de mettre sur pied un cadre de réglementation responsable qui puisse protéger la vie privée. Le tableau 3 résume ces deux points de vue.


      Tableau 3 –
      Sommaire des principes et des idées à prendre en compte par le Canada en édifiant un cadre de réglementation intégrée des biobanques


      Principes équitables en matière d'information
      Imputabilité
      Définition claire des objectifs
      Consentement
      Collecte restreinte
      Utilisation, divulgation et rétention limitées
      Exactitude
      Sauvegarde
      Ouverture
      Accès individuel
      Défi à la conformité
      Auto-détermination

      Liberalisme
      Déontologie
      Autonomie
      Droits
      Consentement essentiel
      Obligation de rendre compte
      Intendance bénigne

      Communautarisme
      Utilitarisme
      Bienfaisance
      Non-malfaisance
      Utilité
      Sauvegardes
      Cadre d'autodétermination
      • L'individu a le droit de contrôler la collecte, l'utilisation et l'accès des renseignements personnels le concernant.
      • L'individu a aussi le droit de savoir :
        • qui d'autre pourra accéder à ces données
        • les cas dans lesquels la collecte, l'utilisation, l'accès et la divulgation des données pourront advenir sans son autorisation personnelle
        • les dommages qu'il pourra subir si les données sont divulguées
        • les pratiques et politiques d'intendance des données
        • les sauvegardes en place pour parer aux risques
      • L'individu a le droit de participer à la recherche à titre de citoyen d'une société libre et démocratique et non pas simplement à titre de « sujet de données ».
      • Obligation de rendre compte
      Cadre de sauvegarde
      • Protocoles en vigueur pour autoriser l'utilisation des données et mécanismes veillant à la circulation de l'information dans les limites autorisées
      • Accords, serments et promesses de confidentialité obtenus de quiconque a accès aux données; sanctions à l'encontre de quiconque s'en arroge l'accès ou l'utilisation sans autorisation
      • Formation des utilisateurs des données, et des autres personnes participant au régime, en ce qui a trait aux protocoles, attributions et responsabilités
      • Mesures de sécurité, y compris verrous, mots de passe, codage et coupe-feu, pour bloquer l'accès des données à quiconque n'y est pas autorisé
      • Intégration de technologies renforçant la sécurité, par exemple, les pistes de vérification
      • Procédures en place pour rendre les données anonymes, les coder ou leur enlever toute identité
      • Normes de politique internes annoncées et expliquées convenablement
      • Normes de réglementation externes (droit, politique, codes de déontologie) que le responsable de l'intendance est tenu de respecter
      • Agents ou comités institutionnels à la protection de la vie privée, qui surveillent la conformité à la politique de l'organisme et aux normes de réglementation externes
      • Entités de supervision autonomes et de l'extérieur, p. ex. commissaire à la protection de la vie privée
      • Entités mandataires, p. ex., comités d'éthique ou conseils communautaires pour représenter l'individu ou la collectivité dont les renseignements sont détenus en fiducie
      • Études des incidences sur la vie privée, pour cartographier le flux des données et évaluer les sauvegardes et les politiques afin que l'intendance puisse perfectionner le régime d'information et renforcer la transparence
      • Obligation de rendre compte
      Cadre intégré de réglementation

      Un cadre intégré de réglementation de la protection de le vie privée devra obligatoirement comporter des dispositions visant deux grands types d'enjeux. À titre d'exemple, si un participant volontaire à une biobanque a le droit de se retirer du projet et de demander que ses prélèvements biologiques et ses données soient détruits, il faudra que le cadre de réglementation contiennent les dispositions pour le permettre. Le professeur Yeo avance un argument probant selon lequel tout régime de protection de la vie privée qui s'essaie à définir les droits et responsabilités liés aux renseignements génétiques et aux biobanques doit intégrer les principes propres aux droits aussi bien que ceux propres aux responsabilités.

      Les risques liés à la recherche en génétique et aux biobanques et les responsabilités des chercheurs sont définis dans le rapport du professeur Yeo et résumés dans le tableau ci-dessous.


      Tableau 4 –
      Risques et responsabilités propres à la recherche en génétique démographique


      Risques Responsabilités
      • Effets néfastes sur la société en général
      • Perte de la vie privée
      • Portée éventuelle des questions des chercheurs
      • Envergure du projet
      • Consultations publiques
      • Transparence, imputabilité et réévaluation du cadre de régie actuel
      • Prise en compte des incidences sur les normes de consentement éclairé
      • Étude et élaboration de stratégies de financement public et d'innovation

      Voici, en bref, les conclusions auxquelles en vient le professeur Yeo :

      • Les biobanques de grande envergure se rapprochent plus de la grande entreprise que de l'organisme de recherche tel qu'on le conçoit traditionnellement, et les cadres juridique et déontologique qui régissent actuellement la recherche ne leur conviennent pas.

      • Les biobanques et la recherche en génétique appliquée sont très différentes des autres initiatives de recherche faisant intervenir des sujets humains et, de ce fait, nécessitent, soit l'apport de modifications aux régimes juridique et déontologique actuels, soit l'élaboration d'un régime de réglementation nouveau et distinct. Au Canada en particulier, pour donner un exemple, le présent cadre de réglementation ne traite pas convenablement les questions de consentement.

      • L'exploitation des biobanques exige la mise sur pied d'un cadre de réglementation imputable qui intègre aussi bien les normes de droit et d'éthique régissant la recherche sur des sujets humains que les normes déontologiques de la régie des entreprises.


    3. À qui sont ces gènes? Sont-ils protégés? Bien protégés? L'opinion du public et de spécialistes concernant les biobanques, par Edna F. Einseidel

      Dans son rapport, la professeure Edna Einseidel cherche à cerner les opinions des citoyens et des professionnels concernant les technologies génétiques en particulier et les biobanques en général. Les données qu'elle présente sont tirées en très grande partie d'articles approuvés par des pairs et parus dans des périodiques spécialisés, surtout Science et Nature, ou de rapports publiés dans la foulée de l'établissement de la base de données sur le secteur de la santé en Islande et de la UK Biobank. Le document de la professeure Einseidel se compose de deux sections distinctes. La première porte sur les opinions de gens ordinaires et d'organismes de défense des droits du public, deux groupes qui forment ce que celle-ci appelle le « public non organisé ». La deuxième partie porte sur les points de vue de professionnels, c'est-à-dire, des généticiens, des chercheurs en génétique, des conseillers en génétique, des coordonnateurs de recherche, des membres de comités d'éthique de la recherche ou de comités d'examen d'établissements de recherche, des médecins, des éthiciens, des juristes et des épidémiologistes. Le tableau 5 énumère les éléments abordés par la professeure Einseidel en rapport avec les opinions du public et des professionnels.


      Tableau 5 –
      Points de vue des citoyens et des professionnels relativement aux biobanques : Sommaire des questions abordées


      Points de vue des citoyens Points de vue des professionnels
      • Connaissance et compréhension des enjeux
      • Besoin de renseignements plus complets
      • Rôle des médias
      • Recrutement et participation
      • Consentement éclairé
      • Retours d'information
      • Confidentialité
      • Propriété et contrôle des bases de données
      • Commercialisation des données génétiques
      • Droits de la personne
      • Consentement éclairé
      • Consentement à des utilisations futures
      • Confidentialité et protection de la vie privée
      • Retour d'information
      • Droits de la personne
      • Droits individuels et droits collectifs
      • Réification du corps humain
      • Identité personnelle
      • Réductionnisme
      • Préoccupations des professionnels :
        • Commercialisation
        • Utilisation des bases de données à des fins autres que la recherche
        • Régie

      Certaines données ont été tirées de l'article de la professeure Einseidel et intégrées à des tableaux sommaires thématiques figurant à des endroits pertinents de la section 4 du présent rapport.

      La professeure Einseidel présente, dans un contexte international, une série exhaustive d'aperçus des opinions de citoyens et de professionnels sur des questions précises, lesquels sont fort utiles à examiner. Par ailleurs, selon elle, il est essentiel que le Canada s'efforce de comprendre toutes ces questions d'un point de vue canadien. Le Canada est un pays immense et d'une diversité géographique et démographique remarquable, mais cette grande collectivité hétérogène se compose de sous-groupes de population relativement petits, par exemple, les Canadiens français, les Terre-Neuviens et chacune des collectivités autochtones. Il faudra comprendre à fond les différences de besoins et d'intérêts locaux avant que le Canada ne puisse se lancer avec succès dans de vastes initiatives de recherche en génétique démographique. En résumé, la professeure Einseidel en arrive aux conclusions suivantes :

      • S'il s'agit de faire participer les citoyens ordinaires à des débats sérieux sur les technologies génétiques, il faut d'abord veiller à ce que ceux-ci soient aptes à :

        • évaluer rationnellement les avantages et les risques liés à ces technologies,

        • comprendre les limites de la science,

        • saisir les dimensions éthiques, juridiques et sociales de toutes ces questions.

      • Il faut mettre sur pied des programmes d'information publique qui offrent des occasions concrètes de participation et de discussion et permettent aux citoyens d'en arriver à une opinion éclairée sur les enjeux.

      • Il faut favoriser la tenue d'un « dialogue constructif » entre les scientifiques, les autres intervenants et la population et ce dialogue « doit être réciproquement informateur, réfléchi, honnête et porteur d'une possibilité de transformation pour tous » (p. 41, citation de McLean, 2001).

      • Le Canada pourrait envisager l'élaboration d'un plan de communication semblable à celui recommandé par les Centers for Disease Control, aux États-Unis, pour évaluer les besoins d'information des divers publics, formuler des messages et choisir les médias qui conviennent à la diffusion de renseignements au sujet de la génétique et de la santé publique. Il pourrait recourir à Internet comme un des mécanismes de diffusion. Ces moyens permettront d'assurer des communications coordonnées, exactes et opportunes (p. 40).

      • La participation du public est une exigence capitale à remplir avant que le Canada ne se lance dans une vaste initiative de recherche en génétique démographique. En effet, si un pays envisage la création d'une biobanque nationale, une participation significative des citoyens aux décisions exige qu'il se pose des questions quant au bien-fondé d'une telle orientation de la recherche et d'un tel usage des fonds publics (p. 42).

      • Les citoyens, pour être en mesure de prendre une décision éclairée quant à leur participation éventuelle à une initiative de génétique démographique de grande envergure, doivent recevoir des autorités toute l'information voulue concernant le ou les objectifs de la recherche, les conditions en place pour protéger la vie privée et les renseignements personnels, la façon dont sera traitée la question du consentement à l'accès et aux utilisations secondaires des données, les conditions de stockage et de tenue des données et prélèvements, les mécanismes de surveillance et les possibilités de commercialisation (p. 42).

      • En raison de l'immense portée des incidences de la recherche en génétique démographique, si le Canada décide d'entreprendre un ou plusieurs grands projets dans ce domaine, il lui faudra absolument mettre en place un cadre de régie faisant intervenir un comité de supervision indépendant où le public est représenté (p. 42).

      • Un comité d'éthique de la recherche pourrait se charger d'examiner et de surveiller la recherche dans les biobanques, assurer le suivi de l'évolution du projet, produire des rapports périodiques, servir de ressource d'orientation au sujet des questions éthiques, juridiques et sociales et se faire le lieu d'un débat national permanent (p. 44, dans une citation de Martin, 2001).




  3. Progrès récents

    1. Rapport du Comité des sciences et de la technologie de la Chambre des communes du Royaume-Uni

      Le 25 mars 2003, le Comité des sciences et de la technologie de la Chambre des communes du Royaume-Uni rendait public son rapport sur le travail du MRC intitulé The Work of The Medical Research Council22. Bien que basé sur une évaluation de l'ensemble du travail de cet organisme, le rapport se concentre surtout sur le projet de UK Biobank et affirme que l'on constate, au sein même du MRC, des preuves générales de mauvaise gestion financière, de mauvaise planification et d'une surabondance de fonds engagés pendant des périodes trop longues, ce qui mène au refus de subventions à un grand nombre de propositions de haute qualité. Le Comité accuse également le MRC de mettre en œuvre des stratégies irréfléchies à l'appui de la recherche, lesquelles entraînent en bout de ligne une discrimination à l'encontre des jeunes chercheurs et de certaines disciplines.

      Le Comité accuse directement le projet UK Biobank d'être « une initiative purement politique23 » lancée sans la pleine confiance du milieu de la recherche ni celle du public. De fait, le Comité prétend que les fonds affectés au projet, y compris une subvention de 45 millions de livres provenant du MRC, ont été accordés avant l'achèvement d'une étude approfondie qui aurait permis de répondre aux questions scientifiques concernant la valeur et la méthode du projet24 et que les consultations tenues au sujet de la biobanque se sont limitées à « une activité réglée d'avance afin d'obtenir un appui généralisé et n'ont pas été une véritable quête de consensus sur les fins et les moyens du projet25 ». Le rapport décrit UK Biobank comme une initiative à gestion descendante dont les mérites n'ont jamais été proprement comparés à ceux d'autres projets dignes de financement.

      Le gouvernement du Royaume-Uni a réagi aux critiques du Comité en juin 200326. Dans l'essentiel, tout en reconnaissant les difficultés rencontrées par le MRC et le besoin général d'améliorations dans les domaines de la gestion financière, de la planification à long terme, de l'évaluation et de la communication, le gouvernement défendait les stratégies de recherche du MRC parce qu'elles avaient été élaborées par le MRC lui-même en consultation avec une vaste gamme d'organisations.

      Les critiques directes du Comité à l'endroit de UK Biobank et les réactions du gouvernement à ces critiques figurent à l'annexe B du présent rapport, et certains points particuliers sont mis en évidence dans les paragraphes pertinents de la section 4 ci-après.


    2. Vente de Gene Trust à la Genaissance Pharmaceuticals par la société DNA Sciences Inc.

      Depuis quelques années, on assiste aux États-Unis à des poussées remarquables dans la mise sur pied de biobanques commerciales dont les opérations visent à répondre à la demande croissante de tissus humains, d'ADN et de données connexes, de la part des secteurs public et privé27. Les détracteurs de cette activité mercantile se demandent s'il n'est pas contraire à l'éthique d'adopter une approche de libre-échange dans ce domaine28. Ils s'inquiètent de l'absence, aux États-Unis, de toute protection pour les participants à des recherches sur des sujets humains29. À cause des lacunes du système de réglementation fédéral, les directives fédérales visant la recherche sont effectivement inapplicables aux projets de recherche à financement privé et aux initiatives commerciales30.

      Que des biobanques commerciales soient le fait du secteur privé ou du secteur public, leur simple existence ouvre la porte à des modes d'action qui sont l'antithèse même des normes déontologiques modernes. Un article de journal explique, par exemple, que le gouvernement de l'État de la Caroline du Nord a vendu des échantillons sanguins de bébés à une entreprise privée qui s'en sert comme élément de nécessaires de tests génétiques, et à la police en vue d'études de référence sur les marqueurs de l'ADN31.

      Sans mesures précises de sauvegarde juridique, les biobanques commerciales pourraient fort bien être incapables de protéger comme il se doit les intérêts de leurs participants. La vente de la société DNA Sciences Inc. montre que ce danger peut être particulièrement grand dans les périodes de difficultés financières ou une fois qu'est amorcée une procédure de faillite.

      DNA Sciences, Inc.32, aujourd'hui disparue, était une entreprise de génétique appliquée dont le siège social se trouvait en Californie et qui basait son expansion sur la découverte et la commercialisation de tests de diagnostic d'après l'ADN. En créant la biobanque Gene Trust33. DNA Sciences visait à mettre sur pied une base de données personnelles incluant les caractéristiques physiques de chaque individu fiché ainsi que ses antécédents médicaux et des renseignements sans cesse mis à jour sur les traitements médicaux reçus et leur efficacité. L'entreprise, pour se faciliter la tâche, passait par Internet pour attirer au Gene Trust des volontaires auxquels on demandait au départ leurs coordonnées de base et leurs antécédents familiaux en matière de santé. Lorsqu'un sujet convenait aux besoins de la biobanque, l'entreprise obtenait son consentement éclairé ainsi qu'un échantillon de sang qui était ensuite analysé34. Le site Web de DNA Sciences montrait que plus de 10 000 participants, de tous les États de l'union, étaient inscrits au Gene Trust35.

      La stratégie de recrutement comportait une déclaration des droits des participants au Gene Trust (Gene Trust Bill of Rights)36, laquelle garantissait aux participants que les renseignements génétiques les identifiant personnellement ne seraient jamais vendus ni divulgués à quiconque autre que le Gene Trust. Après la collecte, les données devaient être rendues anonymes et les chercheurs de la biobanque devaient n'utiliser que des données non identifiables. Jamais les renseignements génétiques ne devaient être transmis à des employeurs ou des assureurs et jamais ils ne devaient servir à des tentatives de clonage humain, parce que la société DNA Sciences s'opposait à toutes les pratiques de ce genre. Les participants avaient le droit de se retirer en tout temps, pour quelque raison que ce soit et sans pénalisation37.

      La société DNA Sciences assurait aux participants qu'aucune donnée permettant de les identifier ne serait jamais mise à la disposition de quiconque, personne ou entité, de l'extérieur de DNA Sciences sans leur consentement explicite, à moins que la loi ne l'exige38. Cette déclaration de protection de la vie privée est digne de louanges, mais sans aucune signification puisque la formule de consentement signée par les participants contenait une disposition autorisant DNA Sciences à transférer à des tiers des prélèvements et des données médicales rendues anonymes39. Le 15 mai 2003, la Genaissance Pharmaceuticals déclarait avoir conclu un accord en vue d'acquérir à peu près tous les actifs de DNA Sciences40, dont les prélèvements d'ADN stockés au Gene Trust, les prélèvements d'ADN, les données anonymes d'antécédents médicaux et les dossiers informatiques contenant les données d'identification personnelle des participants au Gene Trust41. Pour l'heure, la société Genaissance Pharmaceuticals n'a pas l'intention de poursuivre les activités du Gene Trust, mais la situation n'en soulève pas moins des questions de droit et d'éthique auxquelles doivent réfléchir les responsables de l'élaboration des politiques au Canada.

      Au Canada, des personnes juridiques pourraient agir comme « propriétaires » de biobanques publiques. Il faut tenir compte dès le départ de la possibilité que de telles sociétés constituées fassent faillite ou soient liquidées, et prendre les mesures voulues pour que les prélèvements biologiques humains, les données de séquence d'ADN, les renseignements sur les antécédents médicaux et toute autre information personnelle ne soient pas bradées à des tiers. Ce cadre de fonctionnement devrait prévoir la constitution d'une fiducie légale destinée à protéger la biobanque et empêcher qu'elle ne se retrouve intégrée à l'actif général d'une société et liquidée. La biobanque pourrait simplement être détenue en fiducie par la société au nom et au bénéfice des participants dont elle contient les données. Les décisionnaires canadiens doivent étudier plus à fond les questions de régie d'entreprise en rapport avec les biobanques.


    3. Sondage d'opinion publique sur les questions de biotechnologie — Huitième vague

      Depuis 1999, le Secrétariat canadien de la biotechnologie, un organe du gouvernement du Canada, met en œuvre avec des partenaires un vaste programme de recherche sur l'opinion publique comprenant 10 sondages et plus de 75 groupes de réflexion. Ces travaux composent la plus importante et la plus exhaustive de toutes les recherches menées en Amérique du Nord sur les attitudes de la population face à la biotechnologie et à la politique gouvernementale en cette matière. Le programme est conçu de manière à produire chaque année deux vagues de recherche à forte composante de suivi ainsi que des études intensives au sujet de questions précises telles que celle de « la protection des renseignements génétiques ». Ces enquêtes ont donné des résultats d'une cohérence remarquable depuis le lancement du programme.

      La huitième vague de recherche, achevée en mars 2003, consiste en une étude transnationale des attitudes à l'égard de la biotechnologie au Canada et aux Etats-Unis. Le sondage, dont les résultats ont paru en août 2003, se base sur des entretiens téléphoniques, à l'aide d'un même questionnaire, avec 1 000 Américains et 600 Canadiens et vise deux objectifs principaux :

      • effectuer un suivi des sentiments de la population au sujet d'un éventail de questions de biotechnologie au Canada, à partir de données de référence rassemblées lors des vagues précédentes de recherche;

      • comparer les attitudes des Américains et des Canadiens.

      Cette enquête est d'un intérêt particulier parce qu'elle pose plusieurs questions concernant expressément la cartographie de l'ADN et le brevetage des gènes. Les constatations tirées du sondage ont mené à décrire les Canadiens comme manifestant « un appui circonspect au progrès et à la science ». Parmi les Canadiens interrogés, 78 p. 100 voient plus d'avantages que d'inconvénients à la cartographie de l'ADN et environ la moitié d'entre eux se sentent mal à l'aise à l'idée que des brevets puissent être octroyés dans le domaine de la biotechnologie. Les résultats du sondage sont intégrés aux paragraphes pertinents de la section 4 ci-après.


    4. Sondages sur les questions de protection des renseignements génétiques

      Les sociétés Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications ont réalisé des sondages et tenu deux groupes de réflexion, en février et mars 2003, afin de prendre le pouls de l'opinion publique au sujet des questions de vie privée liées aux renseignements génétiques personnels. Ces enquêtes, dont les résultats ont paru en août 2003, ont une grande importance parce qu'elles aident à mettre en contexte les constatations présentées par la professeure Edna Einseidel et qu'elles portent directement sur les enjeux propres aux biobanques.

      La recherche révèle, et nul ne s'en étonnera, que « le concept de biobanque n'est pas encore très clair dans l'esprit des gens » (p. 11). Voici un sommaire des conclusions tirées de ces travaux. On constate que la population :

      • ne comprend pas les processus de la recherche sur la santé de la population ou de la recherche en génétique;

      • est de plus en plus au courant des stratégies de recherche permettant de retracer les antécédents génétiques des familles et de recueillir des données auprès de personnes apparentées;

      • voit les biobanques comme des dépôts de données et non pas d'échantillons de matière;

      • a de la difficulté à concevoir la collecte et le stockage de grandes quantités de renseignements génétiques;

      • ne sait pas du tout si les biobanques sont un phénomène répandu ni qui se charge de les administrer;

      • suppose que les règlements régissant les biobanques sont probablement assez souples, surtout parce qu'il s'agit d'un phénomène nouveau (p. 11-12).

      Les résultats de ces recherches sont intégrés aux paragraphes pertinents de la section 4 du présent rapport.




  4. Analyse des grands enjeux à prendre en compte par le canada au moment de formuler une politique relative aux biobanques

    L'analyse qui suit a pour but de regrouper les grands concepts tirés des travaux commandés et réalisés jusqu'ici. Les sous-sections sur la vie privée et la confidentialité puisent abondamment à plusieurs sources extérieures.

    Voici les questions qui seront abordées :

    • la consultation, l'information et le rôle des médias
    • le recrutement
    • la protection de la vie privée et la confidentialité
    • le consentement éclairé et la communication des résultats des recherches
    • la commercialisation
    • la régie.


    1. Consultation, information et rôle des médias

      Les auteurs des rapports commandés précédemment concluent à l'unanimité que le Canada devra absolument tenir des consultations publiques avant de s'engager à lancer un grand projet de biobanque nationale (Deschênes et Cardinal, p. 10; Einseidel, p. 44-45; Yeo, p. 58). Le succès de la recherche en génétique démographique repose directement sur la bonne volonté et la confiance du public. Les processus de mise en œuvre doivent donc être empreints de transparence et fondés sur un débat public véritable (Deschênes et Cardinal, p. 8). La consultation est importante pour plusieurs raisons dont la moindre n'est pas qu'elle peut aider à déceler des points faibles qui sont inhérents à la conception même du projet proposé, surtout d'éléments qui, laissés sans correction, risquent d'empêcher toute communication efficace entre les chercheurs, le groupe démographique sujet de la recherche et la population en général. En outre, bien qu'elle ne s'inscrive pas dans le processus de consentement éclairé, la consultation suscite chez les participants éventuels à la recherche et dans toute la collectivité une réflexion approfondie sur les enjeux pertinents et elle contribue ainsi à l'obtention d'un consentement plus solidement étayé. La consultation ouvre la possibilité d'un dialogue sérieux entre les participants et les chercheurs et d'un engagement réel et démocratique de la part des citoyens.

      La professeure Einseidel rappelle que la mise sur pied de la base de données sur le secteur de la santé en Islande a déclenché un débat international sur les questions relatives aux renseignements génétiques et aux biobanques (Einseidel, p. 7) et que cette controverse a largement contribué au fait que le projet UK Biobank ait été conçu par le MRC et le Wellcome Trust dans le but précis de comprendre les préoccupations des intéressés et d'y répondre de manière proactive. Voilà pourquoi le MRC et le Wellcome Trust ont tenu un certain nombre de consultations et en ont publié les rapports42.

      Malgré ces consultations publiques, un rapport récent du Comité des sciences et de la technologie de la Chambre des communes du Royaume-Uni43 critique durement la méthode de consultation utilisée par le MRC (voir aussi Yeo, p. 57-58). Au vu de ces critiques, il y a lieu de mettre une grande application à l'élaboration de stratégies de consultation qui susciteront la production de renseignements propres à influer sur la planification du projet et à favoriser un rapport de collaboration entre les chercheurs et la population, et grâce auxquelles la consultation ne sera pas perçue simplement comme un moyen de faire avancer un programme purement politique (Deschênes et Cardinal, p. 10). Si elles sont exécutées de mauvaise foi ou mal organisées, les consultations détruiront inévitablement la confiance qui doit pourtant régner entre les différents groupes démographiques, le milieu scientifique et les responsables de l'élaboration des politiques.

      La consultation, pour être efficace, doit porter généralement sur les préoccupations des intéressés. En ce qui concerne les biobanques, ces intéressés pourront comprendre notamment les participants (ainsi que leurs familles ou les membres de leur groupe d'appartenance socio-démographique); les chercheurs et le milieu de la recherche; les prestateurs de soins de santé; les organismes de financement de la recherche; les organes de réglementation; les autres utilisateurs des données; les groupes d'intérêt spécial; et les médias44. Le professeur Yeo est d'accord avec la recommandation de la Commission de l'éthique de la science et de la technologie, au Québec, selon laquelle « tout projet de création d'une banque d'information génétique dite "populationnelle", ayant pour objectif la cartographie génétique de la population de son territoire ou la réalisation de recherches sur la génétique des populations, soit soumis à la population – préalablement informée des tenants et aboutissants du projet – afin que celle-ci soit activement engagée dans le processus de décision » (Yeo, p. 56). Le tableau 6 résume les diverses stratégies de consultation publique que le Canada pourrait envisager.


      Tableau 6 –
      Mécanismes de consultation publique


      Méthode Points forts Points faibles
      Sondage d'opinion publique
      • Représentativité
      • Traitement superficiel des enjeux
      Groupes de réflexion
      • Exploration en profondeur des raisons et fondements des préférences
      • Méthode impossible à généraliser
      Consultation de nature délibérative
      • Occasions d'apprentissage pour les spécialistes et les non-spécialistes
      • Interaction avec des experts, débat prolongé
      • Méthode exigeante en temps et en ressources
      • Méthode permettant la participation d'un petit nombre de gens seulement
      Consultation des intéressés
      • Le fait que les intéressés connaissent bien les enjeux
      • Participation des entités touchées directement par les avantages et les risques
      • Exclusion du grand public
      Consultation communautaire
      • Vitale là où la collectivité est très valorisée
      • Problèmes au moment de déterminer qui doit représenter la collectivité
      Consultation sur le Web
      • Participation du plus grand nombre
      • Rapidité et continuité des échanges d'information
      • Participants choisis en fonction de leurs compétences technologiques, accessibilité, possibilité de préjudice
      • Possibilité que les données ne soient pas généralisables
      Représentation de non- spécialistes dans les comités d'experts
      • Élargissement de la base de consultation pour étudier les enjeux dépassant la simple technique
      • Risque de marginalisation des opinions des non-spécialistes par les experts

      Source : (Einseidel, p. 43)


      Les différents publics (et les autres intéressés), pour être en mesure de participer fructueusement à la prise de décisions qui les concernent, doivent avoir accès aux renseignements sur lesquels pourront se baser les délibérations et le processus décisionnel. Le niveau des connaissances du public sur certaines questions est variable et dépend de facteurs nombreux (Einseidel, p. 10). Les gens peuvent être ou ne pas être bien informés au sujet d'une question donnée, et ce pour plusieurs raisons : ils s'en désintéressent peut-être, de façon passive ou active ou il se peut qu'ils soient trop occupés, ne soient pas intéressés ou aient décidé de ne rien apprendre à ce sujet. Ce qu'il faut se rappeler, cependant, c'est qu'un manque d'intérêt ne découle pas nécessairement d'un sentiment négatif.

      Il est possible que la mésinformation de certains au sujet d'une question soit attribuable à la réception de renseignements erronés ou exagérés par le biais des médias de masse. Même si le milieu scientifique n'a aucun contrôle sur la façon dont les médias de masse rendent compte des progrès de la science, il peut certainement garder conscience de l'importance de ces médias comme véhicule d'information dans la population. Les scientifiques doivent se faire une obligation d'expliquer exactement aux médias les réalisations de la science et éviter tout sensationnalisme dans la description de leurs travaux. Les médias, pour leur part, devraient collaborer de près avec le milieu scientifique afin d'assurer l'exactitude et l'objectivité de leurs reportages.

      Compte tenu de la probabilité que les citoyens soient actuellement non ou mal informés au sujet des technologies génétiques, toute consultation sérieuse doit reposer sur la participation mobilisatrice et valorisante d'un nombre suffisamment grand de personnes qui se pencheront sur des questions pertinentes après en avoir acquis une connaissance assez solide.

      Les organismes de financement canadiens et-ou les partenaires du secteur privé doivent accepter le fait que les consultations publiques sont un élément essentiel de tout projet de biobanque. Les fonds nécessaires à la tenue des consultations doivent être prévus au budget en quantités suffisantes et considérés comme faisant partie de la stratégie globale du projet (Deschênes et Cardinal, p. 10).


      Résumé du thème Consultation, information et rôle des médias

      • L'information et la consultation du public sont des étapes obligées pour le Canada s'il veut lancer une initiative de grande envergure en recherche génétique démographique.

      • Le processus de consultation doit s'amorcer le plus tôt possible dans l'élaboration d'une initiative de ce genre et se poursuivre tout au long de l'exécution du projet.

      • Le processus de consultation doit être transparent.

      • Les résultats négatifs d'une activité de consultation doivent être pris en compte et faire l'objet d'un examen ouvert et honnête au fur et à mesure qu'ils sont repérés.

      • La valeur des consultations publiques est renforcée par le recours à des mécanismes variés. La combinaison de méthodes critiques, qualitatives et quantitatives permettra d'en arriver à une compréhension exhaustive des sentiments et opinions de la population (et des autres intéressés).

      • Les stratégies de consultation doivent comporter un élément instructif par lequel les participants acquerront une connaissance assez détaillée des enjeux pour être en mesure de prendre des décisions éclairées.

      • La consultation peut aider à déterminer les meilleures manières de transmettre à divers publics les concepts de risque et d'incertitude.

      • Il faut élaborer des stratégies de consultation visant à jauger l'influence à long terme des médias de masse et de leur façon de présenter les technologies génétiques dans le contexte des biobanques, et visant aussi à examiner les outils nouveaux utilisés pour tenir des consultations auprès de la collectivité entière au sujet des questions soulevées dans les médias de masse.


    2. Recrutement

      L'éthique exige que tout projet de recherche en génétique démographique, pour en assurer la validité scientifique et conceptuelle, repose sur des bases solides45. Les participants à la recherche doivent donc être sélectionnés à l'aide de méthodes toujours fondées sur des principes scientifiques, juridiques et éthiques (Deschênes et Cardinal, p. 10). À titre d'exemple, le recrutement de sujets pour l'exécution des protocoles de recherche doit s'effectuer selon des procédés qui respectent la vie privée et la confidentialité des personnes (ainsi que des membres de leurs familles) composant la cohorte potentielle, et qui sont conformes à la législation relative à la protection de la vie privée dans le territoire de compétence en cause. De plus, les chercheurs doivent s'assurer qu'aucun segment de la population visée ne retirera injustement d'avantages supplémentaires ni ne se verra imposer un fardeau trop lourd à cause de sa participation.

      L'utilisation des coordonnées personnelles pour recruter des participants à la recherche relève de la législation relative à la protection de la vie privée (Deschênes et Cardinal, p. 12). Les lois canadiennes dans ce domaine, tant fédérales que provinciales ou territoriales, prévoient généralement des mécanismes en vertu desquels il est permis d'accéder à des données nominatives, sans consentement préalable des personnes visées, s'il s'agit de recherche et si certaines conditions sont remplies (la sous-section 4.4 donne plus de détails à ce sujet). Dans l'intérêt de la protection de la vie privée, les mécanismes de recrutement pourraient être conçus de telle sorte que les participants soient prévenus de la recherche par des ministères provinciaux de la santé ou par des entités nationales chargées de veiller sur les données personnelles, par exemple, le protecteur du citoyen ou le Commissaire à la protection de la vie privée, ou encore par un organisme compétent tel que les Instituts de recherche en santé du Canada. Les participants pourraient ensuite être recrutés par le biais de leurs médecins de famille ou médecins spécialistes ou par d'autres prestateurs de soins de santé. Quoi qu'il en soit, le Canada doit se doter de méthodes de recrutement qui conviennent exactement à son système de soins de santé et se pencher sur le comportement des patients dans ce système.

      Il faut aussi s'assurer que la recherche en génétique démographique soit représentative de la population dans son ensemble et, pour ce faire, diverses stratégies sont à recommander. L'une d'entre elles consisterait à lancer une campagne nationale d'information afin de faire connaître le projet de recherche en génétique démographique, y compris les objectifs du projet, ses risques et avantages pour les individus et la société ainsi que les mesures de sauvegarde proposées concernant la sécurité des données. La campagne nationale pourrait se dérouler en parallèle avec l'élaboration de stratégies de recrutement locales, ce qui permettrait aux personnes admissibles de savoir qu'elles peuvent participer et d'apprendre où trouver des renseignements plus détaillés sur le projet. Ces stratégies locales devraient inclure des personnes de groupes défavorisés — p. ex., à faible revenu —, et de régions rurales. La communication est primordiale et les messages doivent être rédigés et transmis de façon à toucher les personnes dont la langue maternelle n'est ni le français ni l'anglais.

      Selon la professeure Einseidel, la disposition à participer à des recherches semble proportionnelle à la nature et à la qualité de l'information reçue par les participants éventuels et à leur niveau de confiance envers les médecins et les institutions de l'État ainsi qu'envers les lois en vigueur qui protègent les citoyens (Einseidel, p. 20, dans une citation de Cragg, Ross et Davis, 2000). La participation est peu probable si les gens craignent que des données les concernant ne puissent être consultées par les employeurs, les assureurs ou la police. Les citoyens sont portés à prendre part à des recherches cliniques s'ils croient que leur apport aidera les autres et si la participation n'est pas trop astreignante (Einseidel, p. 21).


      Résumé du thème Recrutement

      • La validité scientifique et conceptuelle du projet de recherche en génétique démographique doit être solidement fondée avant de commencer le recrutement.

      • Les méthodes de recrutement doivent s'appuyer sur des bases scientifiques, juridiques et éthiques.

      • Le Canada doit se doter de méthodes de recrutement qui conviennent exactement à son système de soins de santé et se pencher sur le comportement des patients dans le système.

      • Les stratégies de recrutement doivent tenir compte de l'obligation de répartir équitablement, dans toute la population, les avantages et les fardeaux liés à la recherche en génétique démographique.

      • Il est probable que des consultations publiques sérieuses, un débat véritable et des stratégies d'information élèveront au maximum la disposition des gens à participer à des recherches en génétique démographique.

      • La mise sur pied d'une campagne nationale non coercitive de communication et d'information aidera à faire en sorte que la recherche en génétique démographique soit représentative de toute la population et s'applique à toute la population.

      • Il convient d'élaborer des stratégies locales de communication et de recrutement afin de prendre en compte les différences régionales et de faire appel à des participants de tous les milieux, y compris ceux souvent laissés de côté dans de tels cas, par exemple, les personnes à faible revenu et les Autochtones.

      • La participation aux recherches pourra être maximisée si les sujets sont assurés d'être prévenus de toute découverte de faits nouveaux au sujet de leur état de santé. Cependant, avant de rehausser la participation par une promesse de reprise de contact, il faudra calculer ce qu'une telle pratique pourrait coûter de plus en fonds, en responsabilité, etc.

      • Pour maximiser la participation à des recherches en génétique démographique, il faut garantir aux gens que les données recueillies seront mises à la disposition des chercheurs uniquement à des fins médicales précises, c'est-à-dire que les données contenues dans une biobanque ne seront jamais divulguées à des tiers pour des raisons non médicales, par exemple, pour aider au travail de la police.


    3. Vie privée et confidentialité

      Protection de la vie privée

      Il arrive souvent que le concept de vie privée et celui de confidentialité soient confondus et fassent l'objet de descriptions interchangeables, mais les deux concepts, bien qu'étroitement liés, n'en sont pas moins distincts. Le droit d'une personne à la vie privée lui confère le contrôle de l'accès à ses renseignements personnels. Quiconque a le droit, par exemple, de décider de participer ou non à des recherches en génétique démographique et de donner ou non aux chercheurs l'accès à ses prélèvements biologiques et aux données connexes de séquence génétique, à ses renseignements démographiques personnels, à ses dossiers médicaux et à ses données généalogiques. Une fois qu'une personne a accepté de participer à la recherche et qu'elle a donné à un chercheur l'accès à ses renseignements personnels, le chercheur en question est tenu, par la loi et par l'éthique, de ne pas divulguer ces renseignements à autrui sans l'autorisation du participant. La nature même de l'ADN en fait une source d'information extrêmement délicate (Deschênes et Cardinal, p. 27). Bien des gens craignent, par exemple, que les employeurs, les assureurs et les forces de police n'obtiennent des renseignements génétiques personnels et en fassent un mauvais usage (Einseidel, p. 13, dans une citation de l'Association médicale canadienne). Fait intéressant, la plupart (plus de 90 p. 100) des Canadiens voient les renseignements génétiques différemment des autres genres de données personnelles et veulent les voir protégés par des lois plus rigoureuses (Einseidel, p. 13, dans une citation de Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications). En particulier, 70 p. 100 des Canadiens sont d'avis que les lois protégeant les renseignements personnels sur la santé devraient s'appliquer à la fois au secteur privé et au secteur public (Einseidel, p. 16, dans une citation de l'Association médicale canadienne).

      La vie privée, qui a déjà été décrite comme « le droit d'agir à sa guise46 », est un concept qui, avec le temps, est de plus en plus axé sur la dignité et l'autonomie de l'individu47 et perçu comme une valeur humaine fondamentale (Yeo, p. 21-23, s'étend plus longuement sur les définitions). La notion de vie privée englobe le droit d'une personne à contrôler la divulgation, la diffusion et l'exploitation des renseignements personnels la concernant. En ce qui touche les renseignements personnels sur la santé, ils sont protégés par les règles de l'éthique professionnelle, la common law, la Charte canadienne des droits et libertés48, de nombreuses lois fédérales et provinciales ou territoriales et, à l'échelle internationale, par divers traités, conventions, énoncés déclaratoires et codes d'éthique49.

      Les tribunaux canadiens reconnaissent que le droit de chacun « à la sécurité de sa personne », au sens de l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, englobe à la fois l'intégrité physique et l'intégrité psychologique de l'individu50. Il s'ensuit que l'article 7 comprend aussi le droit d'être libre de tout stress psychologique pouvant résulter de la divulgation non autorisée de renseignements médicaux personnels51. En outre, l'article 8 de la Charte, selon lequel « Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives », a été interprété comme étendant cette protection au droit de chacun à la confidentialité de ses renseignements personnels, ce qui, dans le présent contexte, englobe l'ADN ainsi que les données médicales et démographiques. Ce droit particulier est fondé sur l'intégrité de la personne et non pas simplement sur le droit de propriété52.

      Confidentialité

      Les patients et leurs familles sont en droit de s'attendre légitimement à ce que les renseignements médicaux confidentiels les concernant, y compris les données génétiques, ne soient divulgués à personne sans autorisation. C'est l'un des principes fondamentaux de la relation de confiance qui règne entre le médecin et ses patients53. Cette attente se manifeste dans l'obligation faite aux professionnels de la santé de respecter la confidentialité de tous les renseignements qu'ils acquièrent au sujet de leurs patients. L'obligation déontologique sousjacente à l'obligation juridique est évidente dans le serment d'Hippocrate et dans ses formulations modernes, y compris le Code de déontologie de l'Association médicale canadienne54. De plus, des exigences de confidentialité sont maintenant intégrées aux lois régissant les établissements de soins de santé, les secteurs des soins de santé et les professionnels de la santé. Chaque province s'est dotée de lois imposant aux prestateurs de soins de santé une obligation de respecter le caractère confidentiel des renseignements concernant les patients.

      L'obligation du maintien de la confidentialité des renseignements relatifs à la santé est aussi une obligation clairement imposée par la common law55. La jurisprudence à cet égard est peu abondante, mais de nombreuses déclarations judiciaires confirment l'existence d'une cause équitable de poursuite pour « abus de confiance ». Il semble donc ne faire pratiquement aucun doute que les personnes en possession de renseignements sur la santé d'autrui peuvent être tenues responsables si des renseignements confidentiels sont utilisés à mauvais escient ou divulgués. En 1990, par exemple, un jugement de la Cour du Banc de la reine de l'Alberta, dans la Hay c. University of Alberta Hospital, décrit comme suit l'obligation de confidence :

      La relation médecin-patient est empreinte de confidentialité, un droit auquel le patient peut renoncer. La confidentialité est un attribut important de la relation médecin-patient, elle est essentielle à la tenue de communications ouvertes entre le médecin et le patient. Le patient est habilité à renoncer expressément à ce droit ou encore, il peut être amené par ses propres actions à être considéré comme y ayant renoncé. Par ailleurs, un intérêt public prédominant ou une directive statutaire pourra justifier qu'un médecin divulgue des renseignements au sujet d'un patient. Hors de telles circonstances, le droit demeure et un médecin qui divulgue des renseignements confidentiels pourrait être poursuivi en justice pour abus de confiance, une possibilité qui, évidemment, inquiète quelque peu les médecins56. (traduction)

      La Cour suprême du Canada, dans son arrêt relatif à la cause McInerney c. MacDonald, juge que certaines obligations découlent de la nature spéciale de la relation de confiance qui existe entre le médecin et le patient. Les médecins doivent agir avec « la bonne foi la plus entière et avec loyauté57 » dans leurs rapports avec les patients58. En étendant la portée de ces principes, il est permis de penser que les tribunaux canadiens jugeraient la relation chercheur-participant59 comme un rapport de confiance.

      Exceptions au devoir de confidentialité du médecin

      Les médecins et autres professionnels de la santé ont l'obligation de garder secret ce qui a trait à leurs patients, mais il y a des exceptions tant en vertu de la common law qu'aux termes des lois. De nombreuses exceptions législatives autorisent l'utilisation de renseignements confidentiels sans le consentement du patient60. La plus controversée de ces exceptions est celle du « devoir de mise en garde », prévue par la common law61 et selon laquelle, dans certaines circonstances, un médecin a l'obligation légale et déontologique de lever le sceau de la confidentialité afin de protéger la santé ou la sécurité d'autrui. La cause la plus souvent citée à ce sujet est celle de Tarasoff c. Regents of the University of California62. Un petit nombre seulement d'arrêts canadiens invoquent explicitement le cas Tarasoff63, mais un ensemble juridique grandissant semble appuyer la notion selon laquelle les médecins, dans certaines circonstances, ont une obligation envers une personne qui n'est pas leur patient64. En outre, certains précédents font supposer une exception à l'obligation de confidentialité en vertu du devoir de mise en garde65, mais avant tout, un bon nombre des nouvelles lois provinciales sur les renseignements médicaux codifient une exception basée sur le devoir de mise en garde66. L'Association médicale canadienne a récemment modifié son code de déontologie afin d'y signifier que le principe de confidentialité n'est pas absolu67.

      Le devoir de mise en garde entre en jeu dans le contexte de la collecte et de l'utilisation de prélèvements biologiques humains. Certains laissent entendre qu'il peut se présenter des circonstances dans lesquelles un médecin est légalement tenu de prévenir la famille d'un patient d'un risque sanitaire potentiel révélé par des tests génétiques. Les renseignements génétiques propres à un patient peuvent avoir des incidences sur un membre de sa famille, par exemple, au moment de la décision de procréer ou non, ou de choisir un traitement. Pour cette raison, certains avancent qu'il pourrait y avoir un « devoir de mettre en garde » un membre de la famille au sujet d'un risque ou état pathologique génétique qui s'est révélé68. La communication de renseignements aux membres de la famille qui courent un risque élevé de maladie grave, sans le consentement du participant à la recherche, devrait être envisagée seulement lorsque tout a été fait, en vain, pour convaincre le participant de coopérer et de transmettre lui-même les renseignements aux membres de sa famille69. Malgré la tendance à la reconnaissance du devoir de mise en garde, on ne sait pas encore clairement quand cette obligation devrait s'appliquer. Il n'y a pas consensus, par exemple, quant au degré de gravité que doit atteindre le risque pour autrui avant que n'entre en jeu le devoir de mise en garde.

      Législation relative à la protection de la vie privée au Canada

      Au Canada, de nombreuses lois tant fédérales que provinciales s'appliquent aux renseignements relatifs à la santé. Le tableau 7 ci-après présente, par exemple, diverses lois clés de l'Alberta qui régissent la protection de la vie privée et la confidentialité des données sur la santé. La complexité du cadre législatif devient encore plus évidente lorsque l'on sait que la situation est semblable dans la plupart des provinces et territoires.


      Tableau 7 –
      Exemples de lois de l'Alberta ayant des incidences sur la protection de la vie privée et la confidentialité des renseignements sur la santé


      Renseignements sur la santé
      • Health Information Act, projet de loi 40, 2e session de la 24e législature de l'Alberta, 1999.
      Accès à l'information et protection de la vie privée et des renseignements personnels
      • Freedom of Information and Protection of Privacy Act, S.A. 1994, ch. F-18.5, art. 22.03.
      Santé publique
      • Public Health Act, S.A. 1984, ch. P-27.1.
      Administration de la santé
      • Alberta Health Care Insurance Act, R.S.A. 1980, ch.A-24, art. 13.
      • Alberta Health Care Insurance Regulation, AR 216/81, art. 23.
      • Hospitals Act, R.S.A. 1980, ch. H-11, art. 40.
      Cancer
      • Cancer Programs Act, R.S.A. 1980, ch. C-1, partie 1.1.
      • Cancer Programs Regulation, AR 242/98

      Les lois sur l'accès à l'information s'appliquent aux renseignements personnels dans le secteur public et elles existent maintenant à l'échelon fédéral et à celui des provinces et des territoires. De nouvelles lois fédérales visent la collecte, l'utilisation et la divulgation de renseignements personnels dans le secteur privé. Plusieurs provinces sont en voie de se doter de mesures législatives semblables sur la protection de la vie privée, et si ces lois sont jugées « similaires dans l'ensemble », la législation provinciale prendra la priorité sur la loi fédérale dans la province en cause. Bien des provinces ont déjà des lois précises régissant la confidentialité des renseignements personnels sur la santé.


      Tableau 8 –
      Protection relative accordée par les lois (ou projets de loi) fédérales et provinciales sur la vie privée au Canada


      Compétence Droit à la vie privée Droit criminel Resp. civile Dossiers cliniques Statistiques des registres Accès à l'information, secteur public Protection des données personnelles sur la santé Protection des données personnelles, secteur privé
      Canada 4 4     4 4   4
      Colombie-Britannique     4 4 4 4   (4)
      Alberta       4 4 4 4 (4)
      Saskatchewan     4 4 4 4 (4)  
      Manitoba     4 4 4 4 4 (4)
      Ontario       4 4 4 (4) (4)
      Québec 4     4 4 4   4
      Nouvelle-Écosse       4 4 4    
      Nouveau-Brunswick       4 4 4    
      Île-du-Prince-Édouard       4 4 4    
      Terre-Neuve-et-Labrador     4   4 4    
      Yukon         4 4    
      Territoires du Nord-Ouest         4 4    
      Nunavut         4 4    

      4   = loi en vigueur
      (4)   = projet de loi à l'étude

      Source : Kosseim, diapo 9.


      L'annexe C présente la liste des lois et projets de loi de chaque province et territoire.

      Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques du gouvernement fédéral

      La Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, à l'échelon fédéral70, impose des normes obligatoires régissant la collecte, l'utilisation et la divulgation des renseignements personnels, y compris ceux sur la santé, dans le secteur privé. Cette loi a pour fin convenue :

      de fixer, dans une ère où la technologie facilite de plus en plus la circulation et l'échange de renseignements, des règles régissant la collecte, l'utilisation et la communication de renseignements personnels d'une manière qui tient compte du droit des individus à la vie privée à l'égard des renseignements personnels qui les concernent et du besoin des organisations de recueillir, d'utiliser ou de communiquer des renseignements personnels à des fins qu'une personne raisonnable estimerait acceptables dans les circonstances71.

      L'annexe 1 de cette loi incorpore spécifiquement les principes énoncés dans le Code type sur la protection des renseignements personnels de CSA International. Ces principes sont résumés au tableau 9 ci-après.


      Tableau 9 –
      Principes équitables de traitement de l'information énoncés dans la Norme nationale du Canada intitulée Code type sur la protection des renseignements personnels, CAN/CSA-Q830-96


      Principe Description
      Responsabilité Un organisme est responsable des renseignements personnels dont il a la gestion et doit désigner une ou des personnes qui devront s'assurer du respect des principes énoncés cidessous.
      Détermination des fins Les fins auxquelles des renseignements personnels sont recueillis doivent être déterminées par l'organisme avant la collecte ou au moment de celle-ci.
      Consentement Toute personne doit être informée de toute collecte, utilisation ou communication de renseignements personnels qui la concernent et y consentir, à moins qu'il ne soit pas approprié de le faire.
      Limitation de la collecte L'organisme ne peut recueillir que les renseignements personnels nécessaires aux fins déterminées et doit procéder de façon honnête et licite.
      Limitation de l'utilisation, de la communication et de la conservation Les renseignements personnels ne doivent pas être utilisés ou communiqués à des fins autres que celles auxquelles ils ont été recueillis à moins que la personne concernée n'y consente ou que la loi ne l'exige. On ne doit conserver les renseignements personnels qu'aussi longtemps que nécessaire pour la réalisation des fins déterminées.
      Exactitude Les renseignements personnels doivent être aussi exacts, complets et à jour que l'exigent les fins auxquelles ils sont destinés.
      Mesures de sécurité Les renseignements personnels doivent être protégés au moyen de mesures de sécurité correspondant à leur degré de sensibilité.
      Transparence Un organisme doit faire en sorte que des renseignements précis sur ses politiques et ses pratiques concernant la gestion des renseignements personnels soient facilement accessibles à toute personne.
      Accès aux renseignements personnels Un organisme doit informer toute personne qui en fait la demande de l'existence de renseignements personnels qui la concernent, de l'usage qui en est fait et du fait qu'ils ont été communiqués à des tiers, et lui permettre de les consulter. Il sera aussi possible de contester l'exactitude et l'intégralité des renseignements et d'y faire apporter les corrections appropriées.
      Plaintes pour non-respect des principes Toute personne doit être en mesure de se plaindre du non-respect des principes énoncés ci-dessus en communiquant avec le ou les personnes responsables de les faire respecter au sein de l'organisation concernée.

      Depuis le 1er janvier 2002, la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques s'applique aux renseignements personnels sur la santé, mais jusqu'au 1er janvier 2004, l'application se limite aux renseignements personnels sur la santé dans le secteur privé réglementé par le gouvernement fédéral et à la divulgation transfrontières de ces renseignements. À partir du 1er janvier 2004, la Loi s'applique aux renseignements personnels sur la santé dans le secteur privé. Lorsqu'une province édicte sa propre loi relativement au secteur privé et que la loi provinciale est similaire dans l'ensemble à la loi fédérale, c'est la loi provinciale qui s'applique.

      En termes précis, la Loi contient des dispositions relatives à l'utilisation et à la divulgation de renseignements personnels à des fins de recherche72. Dans le contexte de la recherche, des renseignements personnels peuvent être utilisés ou divulgués sans que le sujet le sache ou y ait consenti, mais seulement si le chercheur ne peut pas atteindre son but autrement, qu'il est pratiquement impossible d'obtenir le consentement du sujet et que l'organisme de recherche en informe au préalable le Commissaire à la protection de la vie privée. Enfin, dans tous les cas, les renseignements doivent être utilisés d'une manière qui permet d'en garantir la confidentialité.

      La Loi fait l'objet de critiques parce qu'elle ne reconnaît pas la nature exceptionnelle des renseignements sur la santé et des objectifs de la prestation des soins de santé. Elle ne reconnaît pas non plus les obligations légales et éthiques préexistantes des médecins et des chercheurs à l'endroit des patients et des sujets de recherche. Qui plus est, certains font remarquer que les principes d'équité dans le traitement de l'information, qui sous-tendent la Loi, ne concordent pas nécessairement avec les normes qui régissent la prestation des soins de santé.

      Législation provinciale de protection des renseignements personnels dans le secteur privé

      Comme on l'a vu plus haut, la loi fédérale s'applique à toutes les données sur la santé qui sont recueillies, utilisées ou divulguées dans le cadre d'une activité commerciale depuis le 1er janvier 2004. Si une province adopte ses propres mesures législatives et qu'elles sont « dans l'ensemble similaires » à la loi fédérale, la législation provinciale prévaut dans la province. Le Québec a sa propre législation en la matière depuis 199373. L'Alberta (projet de loi 4474) et la Colombie-Britannique (projet de loi 3875) se préparent à faire voter des lois qui, si elles sont adoptées, s'appliqueront aux opérations du secteur privé.

      Il reste bien des questions à régler quant à l'interaction des lois fédérales et provinciales au sujet des biobanques. Lesquelles seront-elles proprement applicables? Les lois provinciales seront-elles jugées « dans l'ensemble similaires » aux lois fédérales? Les nombreuses lois existantes sur la protection de la vie privée, bien que semblables sur le plan des concepts, ne sont pas identiques. Et nul ne sait jusqu'à quel point elles pourront être harmonisées. Pour l'heure, la navigation s'annonce houleuse et ardue entre les mesures législatives existantes et celles qui formeront éventuellement le cadre législatif des biobanques. La difficulté sera d'autant plus grande que les biobanques se fondent sur l'exploitation de ressources génétiques démographiques, une activité qui n'est ni purement publique ni purement privée et ne représente certainement pas une opération commerciale typique.

      Lois provinciales sur la protection de la vie privée qui visent les renseignements sur la santé

      Un certain nombre de provinces canadiennes, dont l'Alberta, le Manitoba et la Saskatchewan, se sont déjà dotées de lois régissant directement la confidentialité des renseignements sur la santé. Ces lois visent les objectifs suivants :

      • mettre en place des mécanismes qui permettent de protéger la vie privée des citoyens en ce qui concerne les renseignements sur leur santé et de protéger la confidentialité de ces renseignements

      • rendre possible le partage et l'accès de ces renseignements

      • faciliter la prestation des services de santé et la gestion du système de soins de santé

      • prescrire des règles pour la collecte, l'utilisation et la divulgation des renseignements sur la santé

      • assurer à chacun le droit d'accès aux renseignements sur sa propre santé

      • assurer à chacun le droit de demander que des corrections ou des modifications soient apportées aux renseignements sur sa propre santé

      • établir des recours solides et efficaces dans les cas d'infraction aux lois

      • prévoir l'examen indépendant des décisions prises par des tuteurs, gardiens ou fiduciaires en vertu des lois, et l'examen indépendant du règlement des conflits.

      En général, les lois régissant les renseignements sur la santé réalisent les objectifs visés par les moyens suivants :

      • en imposant des obligations claires aux « gardiens » des renseignements sur la santé en ce qui a trait à « l'identification personnelle » de ces renseignements

      • en établissant des règles strictes pour la collecte, l'utilisation, le stockage, la divulgation, la conservation, la mise au rebut et la destruction des renseignements personnels sur la santé, y compris les prélèvements biologiques (voir par exemple l'Alberta Health Information Act, sous-alinéa 1(1)(i)(iii))

      • en exigeant que les renseignements sur la santé puissent être utilisés et-ou divulgués uniquement aux fins pour lesquelles ils ont été recueillis ou à des fins connexes légitimes

      • en permettant que les renseignements personnels sur la santé soient utilisés et-ou divulgués à des fins de recherche, avec ou sans le consentement de la personne à laquelle ils s'appliquent, si certains critères sont respectés (voir par exemple l'Alberta Health Information Act, art. 48-56).

      Il faut absolument que soit effectuée une analyse minutieuse des lois fédérales et provinciales de protection de la vie privée dans le contexte des biobanques. La mise sur pied et l'exploitation des biobanques forment une question complexe qui n'est pas de nature purement ni strictement publique ou privée, et elle se complique encore plus à cause de la répartition des pouvoirs qui attribue au gouvernement fédéral la compétence en matière de commerce, et aux gouvernements provinciaux celle en matière de santé. L'enchevêtrement du réseau législatif pourrait pousser à rechercher une législation qui vise spécialement les biobanques et qui soit apte à régir de façon plus directe et plus cohérente les enjeux complexes de la protection de la vie privée.

      Le tableau 10 résume les données des sondages d'opinion publique au sujet des questions de protection de la vie privée.


      Tableau 10 –
      Résumé des données des sondages sur la protection de la vie privée


      Préoccupations du public
      Canada
      • Près de 90 p. 100 des Canadiens voient les renseignements génétiques comme étant différents des autres renseignements personnels et ils veulent voir leur accès régi par une réglementation plus stricte (Einseidel, p. 13, citant Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, 2001).
      • Les deux tiers des Canadiens sont d'avis que les données génétiques sont « les plus privées et les plus confidentielles qui soient » et ils refusent que quiconque y ait accès sans leur consentement (Einseidel, p. 13, citant l'Association médicale canadienne, 2000).
      • De nombreuses personnes sont préoccupées par la question de l'anonymat des donneurs de prélèvements, les dossiers utilisés à des fins de recherche et la possibilité que les employeurs et les assureurs obtiennent les renseignements et les utilisent à mauvais escient (Einseidel, p. 13, citant l'Association médicale canadienne, 2000).
      • Environ 78 p. 100 des Canadiens sondés croient que les médecins devraient avoir accès aux renseignements génétiques pour les besoins du diagnostic et de la thérapie; 60 p. 100 pensent que les ministères provinciaux de la santé ne devraient pas avoir accès aux renseignements génétiques; 87 p. 100 sont d'avis que les sociétés d'assurance privées ne devraient pas avoir accès aux renseignements génétiques; et 63 p. 100 pensent que la police devrait y avoir accès lorsqu'elle en a besoin pour trouver les coupables de crimes (Einseidel, p. 14, citant Einseidel, à paraître).
      • Environ 70 p. 100 des Canadiens pensent que les lois de protection des renseignements personnels sur la santé devraient s'appliquer aussi bien au secteur privé qu'au secteur public (Einseidel, p. 16, citant l'Association médicale canadienne, 2000).
      • La plupart des personnes interrogées (76 p. 100) présument que tous les renseignements génétiques tirés d'un test sont conservés, mais elles sont enclines à voir cette conservation dans les locaux des laboratoires et non pas dans une banque de données. Près de 60 p. 100 pensent ainsi même lorsqu'il s'agit d'échantillons de sang ou de salive. (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 12).
      • En l'absence d'arguments expliquant les avantages éventuels à tirer de l'exploitation des renseignements génétiques personnels, la plupart des Canadiens favorisent implicitement la stricte protection des tels renseignements. (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, 2003, p. 15).
      • La protection de la vie privée n'est pas la seule valeur prioritaire des Canadiens. Ces derniers valorisent aussi beaucoup l'utilisation des renseignements génétiques en médecine et en santé, et pardessus tout s'il s'agit de trouver des moyens de guérir des maladies d'origine génétique. Ils sont généralement très ouverts aux utilisations des renseignements génétiques en recherche (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, 2003, p. 15).
      • Les Canadiens sont divisés quant à savoir si les renseignements génétiques sont fondamentalement différents des renseignements sur la santé, mais ils s'attendent à ce que l'accès aux renseignements génétiques soit plus rigoureusement réglementé que celui des autres renseignements médicaux (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, 2003, p. 10).
      • Les Canadiens expriment des opinions très différenciées en ce qui a trait à leur niveau d'aise ou de malaise relativement à la question de savoir quels groupes et quels individus devraient avoir accès aux renseignements génétiques d'autrui. Ils se sentent très à l'aise à l'idée que ces données soient accessibles aux médecins et aux chercheurs, et beaucoup moins à l'aise s'il s'agit des assureurs, des employeurs et des fonctionnaires, y compris ceux des ministères provinciaux de la santé (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, 2003, p. 10).
      Royaume-Uni
      • Les préoccupations au sujet du mauvais usage des renseignements génétiques par les employeurs et les assureurs sont proprement traitées si les autorités sont informées des raisons de l'utilité des renseignements ainsi que des mesures prises pour les protéger contre un accès non autorisé (Einseidel, p. 13, citant la Human Genetics Commission, 2002).
      États-Unis
      • En raison des inquiétudes grandissantes au sein des groupes qu'il représente, le Congrès des États- Unis a proposé un règlement exigeant que les chercheurs utilisant les banques de prélèvements de tissus soient tenus d'obtenir le consentement de chaque patient avant de se servir de renseignements génétiques portant l'identité du donneur (Einseidel, p. 12, citant Uraneck, 2001).
      • Environ 85 p. 100 des Américains sondés en 1995 se disaient « très préoccupés » ou « assez préoccupés » par la possibilité que les assureurs et les employeurs aient accès aux renseignements génétiques et en fassent un mauvais usage (Einseidel, p. 15, citant Uraneck, 2001).
      • Lors du même sondage, moins d'un Américain sur cinq estimait très acceptable l'utilisation, sans permission, des dossiers médicaux pour la recherche médicale; moins d'un sur trois l'estimait non acceptable (Einseidel, p. 15, citant Uraneck, 2001).
      Préoccupations des professionnels
       
      • Les professionnels ne s'entendent pas sur la question des conditions de confidentialité ni sur la viabilité de solutions techniques aux problèmes dans ce domaine (Einseidel, p. 30).

      Résumé du thème Vie privée et confidentialité

      • Les questions de protection de la vie privée et de la confidentialité sont rendues particulièrement difficiles par la conjugaison de nombreux facteurs dont les progrès rapides en technologie de l'information et en génétique et par le conflit persistant entre, d'une part, le désir de réaliser des recherches bénéfiques dans le domaine de la santé et, d'autre part, la nécessité de protéger les données personnelles sur la santé.

      Vie privée

      • Pour l'heure, il semble n'exister aucun cadre légal cohérent au sein duquel aborder proprement les questions de vie privée du domaine de la santé qui sont liées à l'exploitation des biobanques.

      • Il est essentiel d'arriver à bien comprendre l'interaction entre les lois fédérales et provinciales de protection de la vie privée en rapport avec l'exploitation des biobanques. Ce qu'il faut d'abord, c'est trouver réponse à la question de la séparation des compétences entre l'autorité fédérale en matière de commerce et l'autorité provinciale en matière de santé.

      • Le cadre légal actuel est complexe et il pourrait forcer éventuellement les autorités à envisager la promulgation d'une loi régissant spécialement les biobanques et permettant de traiter ces questions complexes de protection de la vie privée.

      • Un besoin est évident, celui d'élaborer et d'instaurer des méthodes pour coder les données, les rendre anonymes et les partager, le tout d'une manière qui garantisse leur sécurité en fonction des besoins qui ont été déterminés76.

      Confidentialité

      • Les médecins ont une obligation claire en common law ainsi qu'un devoir fiduciaire de maintenir la confidentialité des renseignements concernant leurs patients (devoir qui a été modifié par les lois sur la protection des renseignements personnels).

      • Il y a un certain nombre d'exceptions au devoir de confidentialité, et elles sont prévues dans les lois régissant les renseignements sur la santé. La plus controversée reste cependant celle du « devoir de mise en garde » à l'endroit de tiers. Ce devoir reçoit l'appui de la jurisprudence et de la législation récentes, mais sa portée demeure incertaine.


    4. Consentement éclairé et communication des résultats de la recherche

      Consentement individuel dans le cadre de la recherche

      Au Canada, pour être valide, le consentement à un traitement médical doit s'appliquer spécifiquement au traitement proposé et il doit être donné volontairement par un patient qui en a la capacité légale et est « éclairé », c'est-à-dire, bien informé. Si l'une de ces exigences n'est pas remplie, le consentement est nul. Dans le contexte de la recherche clinique, les exigences relatives au consentement sont plus rigoureuses que pour un traitement médical. Le Code de Nuremberg, la Déclaration d'Helsinki et l'Énoncé de politique des trois conseils : éthique de la recherche avec des êtres humains exigent que les participants à une recherche médicale donnent préalablement leur consentement volontaire et éclairé. Qui plus est, le consentement éclairé doit être vu non pas comme un acte ponctuel, mais comme un processus qui se poursuit pendant toute la durée de la recherche, et les participants doivent disposer d'occasions et de réfléchir à la question de savoir s'ils veulent, ou non, continuer de participer.

      Les tribunaux canadiens ont déterminé que les êtres humains sujets d'une recherche ont droit « à une divulgation entière et franche de tous les faits, probabilités et opinions auxquels on peut s'attendre qu'une personne raisonnable veuille réfléchir avant de donner son consentement77 ». En vertu de cette obligation, les chercheurs sont tenus de donner aux sujets potentiels des renseignements sur tous les risques possibles, même les plus minimes, ainsi que toute l'information significative concernant le protocole de recherche. Dans le cas d'une recherche en génétique clinique, les sujets doivent être informés de la possibilité d'une commercialisation des résultats; des mécanismes mis en œuvre pour protéger la confidentialité des données de nature délicate; des incidences possibles de la participation sur leur assurabilité personnelle; de leur droit à se retirer de la recherche à quelque moment que ce soit; et, le cas échéant, de la façon dont les résultats de la recherche seront mis à leur disposition ou à celle de leur médecin. L'annexe D du présent rapport contient une liste, tirée de l'Énoncé de politique des trois conseils, énumérant tous les renseignements qui doivent être transmis à quiconque est sujet potentiel d'une recherche.

      Recherche rétrospective sur des données et prélèvements déjà stockés

      Lorsqu'il s'agit de recherches rétrospectives sur des tissus humains et des données connexes déjà recueillis et stockés, la législation relative aux renseignements sur la santé et les autres lois de protection de la vie privée prévoient habituellement une exception à la règle générale en prescrivant que le consentement informé est obligatoire pour toute recherche utilisant des données sur la santé ou des tissus identifiables à des personnes. La Health Information Act de l'Alberta, par exemple, permet aux chercheurs l'accès à des données identifiables sur la santé d'une personne, y compris à des prélèvements de tissus, sans le consentement du sujet, mais dans des circonstances bien précises et après avoir reçu l'approbation d'un comité d'éthique de la recherche78. En examinant la proposition de recherche, ce comité doit se demander, entre autres choses, si la recherche proposée est d'une importance suffisante pour prévaloir sur l'intérêt public à protéger la vie privée, et si l'obtention d'un consentement est déraisonnable, irréalisable ou infaisable.

      Malgré cet affaiblissement législatif de l'exigence de consentement éclairé dans le cas de recherches rétrospectives, le droit canadien et les normes internationales en voie d'élaboration soutiennent fermement la nécessité du consentement de toute personne à la collecte d'échantillons d'ADN et de renseignements personnels la concernant et à leur stockage futur dans une biobanque de données génétiques démographiques.

      Recherche prospective

      Au Canada, l'application rigoureuse des lois et politiques existantes relativement aux biobanques exigerait que le consentement soit obtenu au moment du prélèvement d'un échantillon et ensuite à chaque nouvelle utilisation d'un échantillon d'ADN identifiable ou de données connexes contenus dans une biobanque (Deschênes et Cardinal, p. 35, citant Caulfield et Outerbridge). Cette obligation est difficile à respecter dans le conteste de la recherche liée aux biobanques, où les utilisations futures possibles sont inconnues. Le degré exact de détail des conditions à respecter pour satisfaire à l'exigence de consentement éclairé dans le contexte de la recherche en génétique démographique demeure hypothétique. Selon une déclaration de la Human Genetics Commission du Royaume-Uni :

      La difficulté de retracer les sujets et d'obtenir d'eux un nouveau consentement à différentes formes de recherche médicale pourrait bien rendre irréalisable l'obtention de ce re-consentement et limiterait sérieusement l'utilité de vastes bases de données sur la population79. (traduction)

      Par ailleurs, si les chercheurs utilisaient seulement des prélèvements anonymes ou s'ils recouraient à un processus permettant d'anonymiser irréversiblement les prélèvements et les données, l'utilité des prélèvements et des données deviendrait limitée. La valeur des biobanques pour la recherche future serait grandement enrichie par des mécanismes qui permettent à la fois de protéger l'identité des participants et de conserver des liens entre cette identité et les renseignements sur la santé et les autres données stockées, qui pourraient être mis à jour de temps à autre (Deschênes et Cardinal, p. 28).

      Des observateurs mettent en doute la qualité et la pertinence des normes juridiques régissant le consentement dans un tel contexte. Caulfield et al. offrent des raisons convaincantes à l'appui de la possibilité que les normes traditionnelles puissent être justement estimées trop exigeantes dans le cas des biobanques et de la recherche en génétique démographique80. Ces raisons peuvent se résumer comme suit :

      • L'évolution d'un projet recherche en biotechnologie, dans tous ses aspects, est difficile sinon impossible à prévoir au moment de l'obtention d'un consentement en rapport avec une collecte de prélèvements.

      • La collecte de prélèvements d'ADN, qui se fait habituellement par veinopuncture ou au moyen d'un écouvillon, représente peu de risque pour le participant.

      • Il est peu probable que la recherche liée aux biobanques aboutisse à des renseignements d'une utilité clinique directe pour tel ou tel participant.

      • La valeur de chacun des prélèvements stockés dans une biobanque est marginale; ce qui est riche en valeur, c'est la collection tout entière et la possibilité offerte de procéder à d'innombrables types d'analyse.

      • Les demandes répétées de consentement individuel auprès des sujets d'une biobanque imposent un fardeau aux chercheurs et aux sujets et peuvent devenir un motif de dissuasion de participer.

      Diverses options stratégiques ont été proposées en vue de modifier de façon plus ou moins importante l'obligation de consentement. Le tableau 11 présente une comparaison entre les modèles de consentement, y compris le consentement en toute connaissance de cause, le « modèle d'autorisation », le consentement inconditionnel et la levée de l'obligation de consentement.


      Tableau 11 –
      Comparaison entre les modèles actuels de consentement


      Modèle de consentement Caractéristiques
      Consentement éclairé
      • Le consentement éclairé est obligatoire avant le premier prélèvement biologique et ensuite à chaque utilisation nouvelle du prélèvement dans un protocole de recherche.
      • Il peut être exagérément restrictif en ce qui a trait à la recherche future.
      • La reprise de contact avec le participant est difficile et elle peut n'être pas souhaitable dans certains cas, par exemple, lorsque la personne en question est décédée.
      Modèle d'autorisation
      (Deschênes et Cardinal, p. 16-17; Yeo, p. 49)
      • Le consentement éclairé est obligatoire avant le premier prélèvement biologique.
      • La recherche ultérieure est autorisée, ou non, par le sujet lors du premier prélèvement.
      • Les participants peuvent préciser qu'ils autorisent certaines utilisations et refusent certaines autres utilisations des prélèvements de leur matière vivante et des données connexes, et préciser aussi le degré de pouvoir de décision qu'ils veulent conserver par la suite.
      • Il est toujours possible qu'un participant opte pour un « consentement inconditionnel », mais les chercheurs ne tiennent jamais cette possibilité pour acquise.
      • Ce modèle établit un équilibre raisonnable qui respecte l'autonomie individuelle et soutient la recherche en génétique, et elle est favorisée dans l'Énoncé de politique des trois conseils (article 8.6).
      • Ce modèle concorde avec l'opinion publique.
      Consentement inconditionnel
      (Deschênes et Cardinal, p. 14)
      • Il s'agit d'un consentement ponctuel par lequel un participant consent à l'utilisation de ses prélèvements et données pour « la recherche en général ».
      • Il est de nature trop générale pour avoir un poids légal de quelque importance, puisque nul ne peut être jugé avoir consenti à des choses auxquelles il n'a même pas pensé.
      • Ce modèle va à l'encontre de l'opinion publique, car les gens s'attendent à ce que les règles régissant l'accès aux renseignements génétiques soient renforcées.
      • Certains affirment que le principe d'autonomie appuie le droit des participants à la recherche de donner leur consentement inconditionnel; d'autres prétendent que le consentement inconditionnel est nul parce que consentir à tout, c'est ne consentir à rien.
      Consentement présumé
      • Parce qu'un patient ou un participant à la recherche a donné un prélèvement biologique pour la recherche et parce que seul un nombre relativement petit de sujets seraient disposés à renouveler leur consentement, les chercheurs présument avoir le consentement de tous à des utilisations futures de leurs prélèvements pour la recherche.
      • Le consentement présumé fait problème à cause du grave manque de respect qu'il manifeste à l'égard des participants pris individuellement et de leur droit personnel de prendre des décisions éclairées concernant leur propre personne et leur propre vie.
      • Ce modèle va à l'encontre de l'opinion publique
      • Il peut constituer une présomption valable permettant l'accès et l'utilisation de collectes existantes de matières vivantes humaines qui, autrement, seraient presque sans valeur.
      Levée de l'obligation de consentement
      • L'obligation d'obtenir le consentement éclairé des personnes auxquelles se rapportent des données ou des prélèvements peut être levée par un comité d'éthique de la recherche si, entre autres raisons, la recherche ne fait courir que des risques minimes aux sujets (Énoncé de politique des trois conseils, article 2.1 c); et Alberta Health Information Act, art. 48-55).
      • Ce modèle va à l'encontre de l'opinion publique.
      • Certains sont d'avis que la levée de l'obligation de consentement est justifiable pour permettre l'accès et l'utilisation de collections de matières vivantes humaines qui, autrement, seraient sans grande valeur.

      Parmi les options du tableau 11, le modèle d'autorisation paraît le meilleur pour les vastes projets de recherche en génétique démographique mais, pour l'adopter, il faudrait apporter des modifications aux cadres actuels de réglementation et de législation canadiens.

      Recherche sur des sujets enfants

      L'étude proposée d'une cohorte de naissance canadienne implique le recrutement de bébés en vue d'une recherche longitudinale en génétique démographique. Au Québec, selon le Code civil81, une personne mineure incapable a le droit de participer à une recherche avec le consentement parental à condition que le mineur en question accepte et que la recherche ne présente pas de risque grave. Dans cette province, tout projet de recherche en génétique démographique faisant intervenir des enfants devrait d'abord être approuvé par un comité d'éthique de la recherche constitué ou nommé par le ministre de la Santé et des Services sociaux. Un enfant ne peut, en outre, être soumis à une expérimentation qu'à la condition que celle-ci laisse « espérer, si elle ne vise que lui, un bienfait pour sa santé ou, si elle vise un groupe, des résultats qui seraient bénéfiques aux personnes possédant les mêmes caractéristiques d'âge, de maladie ou de handicap que les membres du groupe ». Dans les autres provinces, la légalité de la recherche sur des sujets enfants n'est pas clairement définie82 et il faudra donc étudier la question plus à fond.

      L'Énoncé de politique des trois conseils prévoit que les parents, à titre de représentants autorisés des enfants, peuvent consentir à la recherche au nom du mineur si la recherche ne l'expose pas à des risques autres que minimes sans qu'il puisse en tirer des avantages directs83. Les bébés et les enfants peuvent participer à une recherche lorsque l'objet de la recherche en question ne peut être étudié qu'à l'aide d'individus appartenant au(x) groupe(s) désigné(s). Dans le cas de la recherche en génétique démographique sur des sujets enfants, certains affirment qu'il faut absolument se baser sur une cohorte de naissance et la suivre toute la vie pour pouvoir étudier l'interaction entre les gènes humains et les facteurs du milieu. Si le débat entre universitaires aboutit à la confirmation du mérite scientifique de cette approche et si la loi permet la recherche sur des sujets enfants dans ce contexte, l'éthique exigerait le consentement du ou des parents ou tuteurs à titre de « représentants autorisés » du sujet mineur.

      Consentement de la population

      Bien que la notion de consentement de la population soit contestée et difficile, pour ne pas dire impossible, à mettre en application, il n'en est pas moins important d'informer et de consulter la population et de tenir compte de l'opinion publique (Deschênes et Cardinal, p. 8). Les Canadiens doivent être consultés sur la question de savoir si et dans quelles circonstances ils envisageraient de participer à un projet de biobanque nationale. Des forums de discussion convenables doivent donc être mis sur pied et soutenus par les planificateurs et les organes de financement de toute initiative importante de recherche en génétique démographique (voir plus haut à la sous-section 4.1).

      Données d'opinion publique

      C'est au Royaume-Uni que se sont réalisées les recherches les plus exhaustives sur le consentement. Les lois régissant le consentement au Canada sont plus exigeantes que celles du Royaume-Uni et la jurisprudence canadienne en matière de santé accorde plus d'importance au principe d'autonomie84. Les données des sondages effectués là-bas offrent un bon point de départ, mais il faudra procéder à des études semblables ici (Einseidel, p. 44).

      Au vu des données d'opinion publique présentées par la professeure Einseidel, il est clair que la population a à cœur le principe et la valeur du consentement éclairé avant la participation à des recherches en génétique démographique. À l'unanimité, tous les groupes étudiés (grand public, groupes de patients, chefs religieux, groupes d'intérêts spéciaux et professionnels) qualifient le consentement éclairé de crucial (Einseidel, p. 11 et 27). Ils craignent en particulier que des tiers, dont les employeurs, les assureurs et les organismes d'application de la loi, n'obtiennent l'accès aux prélèvements biologiques et-ou aux données connexes.

      Certains ont proposé des stratégies pour traiter du consentement éclairé dans le contexte de la recherche en génétique démographique, notamment la levée de l'obligation d'obtenir le consentement, ou encore, le consentement inconditionnel, qui semblent aller à l'encontre de l'opinion publique. Compte tenu de la nécessité de favoriser et de poursuivre l'étude des sentiments de la population au sujet de la recherche en génétique, et les inquiétudes croissantes concernant la protection de la vie privée et de la confidentialité, il est essentiel de sonder les Canadiens afin de savoir ce qu'ils pensent vraiment des biobanques.


      Tableau 12 –
      Résumé des données des sondages sur le consentement


      Préoccupations du public
      Canada
      • Moins de 50 p. 100 des Canadiens sont d'avis que les renseignements personnels sur la santé pourraient être remis aux gouvernements et aux chercheurs sans le consentement des sujets, à condition que toute donnée identificatrice en ait été supprimée (Einseidel, p. 12, citant l'Association médicale canadienne, 2000).
      • Dans les groupes de réflexion, une fois la discussion achevée, la plupart des participants se sentent à l'aise à l'idée que les chercheurs aient accès au contenu des biobanques aux fins d'études en tous genres, y compris d'études qui n'étaient pas envisagées au moment de la consultation (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, 2003).
      • Les réserves qui reviennent sans cesse tiennent à ce que les gens donnent leur consentement éclairé (seulement au départ et non pas à chaque utilisation différente pour la recherche) et que leur identité soit ensuite maquillée ou supprimée dans les données de la biobanque, quoique de nombreuses personnes accepteraient que les chercheurs puissent connaître leur identité si cette divulgation servait la cause de la recherche médicale et si l'information n'était pas utilisée à mauvais escient (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, 2003).
      Royaume-Uni
      • Environ 90 p. 100 des personnes interrogées pensent que l'obtention du consentement devrait être obligatoire avant l'utilisation de prélèvements de sang ou de tissu dans des tests génétiques (Einseidel, p. 12, citant la Human Genetics Commission, 2001).
      • Près de 90 p. 100 croient que les chercheurs devraient obtenir un nouveau consentement avant de pouvoir utiliser les prélèvements stockés (Einseidel, p. 12, citant la Human Genetics Commission, 2001).
      • Certains voient des problèmes à ce qu'aucun retour d'information ne soit donné aux sujets de la recherche et croient qu'il pourrait y avoir là un obstacle éventuel à la participation (Einseidel, p. 13, citant People, Science and Policy, 2002).
      • Les donneurs de prélèvements devraient avoir le droit d'être mis au courant de tout fait ressortant de l'étude de leurs propres prélèvements (Einseidel, p. 13, citant Porter, 2000).
      • Certains comprennent et acceptent que les sujets ne soient pas informés individuellement. D'autres voient là une source de problèmes et un obstacle possible à la participation (Einseidel, p. 13, citant People, Science and Policy, 2002).
      • Les gens sont intéressés à recevoir des renseignements de nature générale sur les découvertes et les progrès réalisés par la recherche (Einseidel, p. 13, citant Porter, 2000).
      États-Unis
      • Aux États-Unis, plus de 80 p. 100 des personnes sondées jugent inacceptable l'utilisation des dossiers de patients en recherche médicale sans la permission préalable de ces patients (Einseidel, p. 11, citant l'Institute for Health Care Research and Policy, 1999).
      • Bien que les personnes interrogées se sentent relativement plus à l'aise si l'information n'est pas liée à un patient en particulier, une sur trois estime que l'utilisation de ces renseignements sans le consentement des patients est « complètement inacceptable » (Einseidel, p. 11, citant l'Institute for Health Care Research and Policy, 1999).
      • La plupart des personnes sondées ne s'opposeraient pas à ce que des recherches soient réalisées sur des prélèvements auxquels sont reliées des données démographiques ou d'antécédents médicaux (Einseidel, p. 13, citant le NBAC, 2000).
      • Les personnes qui doivent être prévenues au cas où des renseignements médicalement utiles seraient découverts à leur sujet sont enclines à ne pas s'objecter à l'idée de recherches dans lesquelles les données démographiques sont reliées à des prélèvements de tissus stockés; elles sont seulement un peu plus préoccupées au sujet des liens avec leurs antécédents médicaux (Einseidel, p. 13, citant le NBAC, 2000).
      Préoccupations des professionnels
      Royaume-Uni
      • Les professionnels de la santé sont généralement inflexibles quant à l'obtention du consentement avant le prélèvement et avant toute utilisation ultérieure (Einseidel, p. 27, citant Hapgood, 2001).
      Canada
      • Les chercheurs admettent que, souvent, les donneurs de tissus ne sont pas mis au courant des renseignements concernant l'appartenance, le contrôle, les conditions de stockage et le partage des prélèvements entre chercheurs (56 p. 100 des sondés ne précisent pas « renseignements concernant l'appartenance »; seulement 15 p. 100 précisent « renseignements concernant la durée de stockage »; environ 60 p. 100 admettent partager des prélèvements avec d'autres chercheurs) (Einseidel, p. 27, citant Verhoef et al., 1995).
      États-Unis
      • Les deux tiers des membres des professions paramédicales sondés aux États-Unis appuient l'autonomie dans les cas où des sujets choisissent de ne pas être informés des résultats de tests génétiques, mais 29 p. 100 mettraient des limites à l'autonomie dans les cas où les personnes ayant subi des tests refusent d'informer de ces résultats tous les membres de leur famille qui sont à risque (Lapham et al., 1997).
      • Environ 95 p. 100 des sondés sont d'avis qu'il faudrait obtenir la permission des sujets avant de stocker leurs dossiers médicaux dans une base de données nationales, et 93 p. 100 croient que les chercheurs devraient obtenir la permission d'une personne avant d'étudier des renseignements génétiques la concernant (Gallup, 2000).
      Islande
      • L'Association médicale islandaise a prévenu le gouvernement du pays que les intérêts des patients étaient menacés par les dispositions inacceptables qu'il a prises en matière de consentement éclairé (Einseidel, p. 34, citant l'Association médicale islandaise, 2000).
      Royaume-Uni
      • Les professionnels de la santé estiment que la notion de risque et celle de bénéfice commercial sont mal expliquées sur les feuillets d'information remis aux patients et que le prélèvement d'ADN dans le sang ou les tissus est souvent traité comme simplement accessoire à la recherche (Einseidel, p. 27, citant Rigby, 2001).

      Résumé du thème Consentement éclairé et communication des résultats de la recherche

      • Il semble que l'obtention du consentement éclairé de chaque sujet soit devenue la norme de facto dans le domaine de la recherche prospective en génétique démographique.

      • L'obtention du consentement éclairé fait problème dans le contexte des grands projets de biobanque de données génétiques démographiques, dans la mesure où les utilisations futures des prélèvements et-ou des données qui en découlent sont inconnues.

      • Le consentement éclairé ne doit pas être vu comme un acte ponctuel mais comme un processus et il doit être renouvelé si des modifications importantes sont apportées au protocole de recherche ou au fonctionnement de la biobanque.

      • La mise à exécution de vastes projets de recherche en génétique démographique nécessite au préalable une réévaluation du cadre normatif actuel régissant le consentement éclairé.

      • En matière de consentement éclairé, il vaudrait la peine d'envisager une législation instaurant le « modèle d'autorisation » dans le contexte bien précis de la recherche prospective en génétique démographique.

      • Les participants à des travaux de recherche en génétique démographique doivent avoir le droit de retirer leur consentement. Il faut prévoir une procédure qui facilite le retrait de toutes les données permettant d'identifier un participant ou pouvant elles-mêmes être identifiées comme se rapportant à un participant.

      • Si le Canada veut se lancer dans un grand projet de banque de données génétiques démographiques faisant intervenir des sujets mineurs, il lui faudra établir au préalable la légalité, dans ce contexte, d'un consentement donné non pas par le mineur mais par ses représentants autorisés.

      • Les éléments des retours d'information doivent être arrêtés au tout début de la recherche en génétique démographique et communiqués aux participants.

      • Par respect pour la population sujet de la recherche, les résultats des travaux doivent être mis à la disposition de tous, en temps opportun et avec diligence.

      • L'utilisation de collections existantes de matières vivantes humaines pour la recherche en génétique, sans le consentement personnel des participants à ces collections, est possible dans des cas restreints.

      • Avant de donner son consentement et avant le prélèvement, chaque participant doit être mis au courant, s'il y a lieu, du risque que la police ou d'autres tiers puissent obtenir l'accès à ses données et prélèvements.


    5. Commercialisation

      Malgré les demandes de consultations et de délibérations publiques avant de décider si le Canada devrait, ou non, se lancer dans une vaste initiative de biobanque de données génétiques sur sa population, tout permet de supposer que la proposition actuelle des Instituts de recherche en santé du Canada ou une autre du même genre sera inévitablement mise en œuvre. Devant une telle réalité, nous sommes bien obligés de chercher la meilleure façon de gérer les conflits d'intérêt réels ou perçus et les effets de la commercialisation et de faciliter la diffusion rapide des innovations génétiques d'utilité clinique de la manière qui concorde le mieux avec le bien public et produise les plus grands avantages possibles pour la société.

      Dans le domaine de la recherche biomédicale, la distinction entre les secteurs privé et public se fait de plus en plus floue. Tous les auteurs des rapports commandés jusqu'ici soulignent que la commercialisation est un problème en devenir dans le contexte de la recherche en génétique démographique. Les craintes se précisent et peuvent s'exprimer comme suit :

      • la réification éventuelle du corps humain

      • la possession par autrui de matières vivantes humaines et des données connexes

      • la politique du secret adoptée par le monde universitaire

      • la déformation des programmes de recherche pour les faire passer de la recherche fondamentale à la mise au point de produits finals commercialisables

      • la mise en application et la commercialisation prématurées de technologies nouvelles, c'est-à-dire, avant qu'aient été proprement pris en compte les enjeux cliniques, éthiques, juridiques et sociaux

      • les effets éventuellement nuisibles des brevets, et d'autres formes de propriété intellectuelle, sur l'accès des patients aux technologies nouvelles.

      L'industrie privée jouera un rôle crucial pour ce qui est de traduire l'information tirée du Projet du génome humain en produits et en méthodes bénéfiques pour les citoyens et la société. Le secteur privé finance une énorme quantité de recherche et dispense ainsi les chercheurs universitaires de travaux banals et répétitifs. Le privé se charge notamment des études indépendantes étroitement contrôlées qui sont exigées par l'État avant l'approbation des médicaments et des matériels médicaux. Même si l'entreprise privée apporte à la recherche en génétique une contribution financière supérieure à celle des gouvernements, tout le monde reconnaît que la recherche parrainée par l'État sert souvent de tremplin à l'industrie sur le chemin de la commercialisation. Il ne faut pas marginaliser le rôle du secteur public dans les rouages du commerce.

      La dépendance de plus en plus lourde du secteur public à l'endroit de l'entreprise privée, quant au financement de projets de recherche fondamentale, clinique et translationnelle et à sa participation, crée encore plus de risques de conflit d'intérêt (Deschênes et Cardinal, p. 26; Yeo, p. 18; Einseidel, p. 17). De nombreuses personnes craignent, par exemple, que l'industrie privée n'impose des limites indues à la liberté universitaire de chercheurs cliniques financés par l'État, que les chercheurs n'en viennent à fuir la collaboration et le partage des données avec leurs collègues et le milieu général de la recherche, que le point de convergence de la recherche biomédicale ne passe de la recherche fondamentale à des objectifs qui devront probablement être commercialisables, et que la dépendance grandissante des universités à l'endroit de leurs partenaires commerciaux ne détruise la confiance du public à l'égard de ses institutions. Le débat connexe et persistant au sujet de la nature éthique du brevetage des gènes et des cellules souches continue de faire rage. Il y a véritablement danger que l'importance exagérée accordée au commerce ne dévalue à tout jamais la science, les scientifiques, les fruits de la recherche et la profession médicale.

      Les résultats des sondages laissent à penser que le public, bien que généralement favorable à la biotechnologie et au développement de ce secteur, n'en a pas moins des réserves sérieuses quant à certains aspects de la commercialisation et de la possession du matériel génétique humain (Einseidel, p. 17). Ainsi, les Canadiens sont extrêmement réticents à l'idée que les biobanques puissent vendre des données génétiques à d'autres chercheurs, même avec le consentement des personnes que ces données concernent (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, 2003). Selon les observateurs, il y aurait là plus une désapprobation générale du fait d'associer le profit et les soins de santé qu'une décision réfléchie au sujet de circonstances particulières. Les données des études de l'opinion publique au Canada et à l'étranger montrent que, dans l'ensemble, les gens ne se fient pas à la responsabilité de l'entreprise privée dans le domaine de la biotechnologie et que leur confiance envers les chercheurs diminue lorsque ceux-ci collaborent avec l'industrie. La question de la confiance ou de la perte de confiance est celle qui ressort le plus et il faudra l'aborder et la régler avant d'entamer toute grande initiative de recherche en génétique démographique en ce pays.


      Tableau 13 –
      Enjeux clés de la participation commerciale à des projets de biobanque


      Islande De graves inquiétudes ont été soulevées par l'octroi d'une licence exclusive à la société deCODE Genetics pour l'exploitation lucrative de la base de données nationale du secteur de la santé. La situation islandaise met en évidence la nécessité de préciser dès le départ les fins et les principes fondamentaux de toute grande initiative de génétique démographique. Il est essentiel de consulter la population au moment de définir ces fins et ces principes, sinon le projet ne pourra pas s'attirer la confiance du public.
      UK Biobank Les consultations tenues au Royaume-Uni ont révélé que le public craignait toute participation commerciale que ce soit au projet national de biobanque. De façon générale, les gens sont d'avis que les bases de données d'une biobanque ne doivent pas appartenir à des intérêts commerciaux et que les produits créés dans le cadre du projet national devraient rester de propriété publique (Einseidel, p. 15-16). Cet état de choses souligne la nécessité de prévoir des mécanismes garantissant un accès facile des données aux chercheurs, un partage des résultats et des mécanismes transparents de partage des avantages, afin que les effets bénéfiques du projet pour le public soient directs et évidents.
      DNA Sciences Inc. La biobanque génétique Gene Trust a été mise sur pied par la société DNA Sciences qui a recruté des volontaires par le biais d'Internet. Elle contient plus de 10 000 échantillons ainsi que toutes les données d'accompagnement. La banque a récemment été vendue à la société Genaissance Pharmaceuticals dans le cadre d'un marché où la DNA Sciences s'est départie de presque tous ses actifs au profit de la Genaissance afin d'éviter la faillite. Ce cas montre à quel point il est essentiel d'étudier attentivement le droit des sociétés pour y trouver des mécanismes (peut-être une fiducie légale) pouvant servir à protéger les sujets participants.
      Tonga Les Tongans se sont effectivement opposés à la création d'une biobanque et au brevetage de leurs ressources génétiques par la société Autogen parce qu'ils estimaient les avantages promis (y compris des médicaments gratuits et des redevances) beaucoup trop minces en comparaison des profits que la société allait encaisser (Deschênes et Cardinal, p. 24). La situation souligne la nécessité d'une participation de la population aux négociations concernant le partage des avantages afin que les citoyens puissent s'assurer que le marché conclu est vraiment équitable. Le cas de Tonga met aussi en évidence le besoin de relier le montant des redevances aux profits commerciaux futurs de manière à ce que la population puisse tirer des bénéfices équitables et proportionnels si la société exploitante de la biobanque crée et vend un produit à grand succès qui lui rapporte des profits énormes.

      Mylène Deschênes et Geneviève Cardinal (p. 26-27) font remarquer pertinemment qu'avant d'envisager la mise sur pied et l'exploitation de biobanques de données génétiques démographiques au Canada, il faut réfléchir soigneusement aux questions suivantes :

      • Peut-on encourager la commercialisation des produits et des services issus de la recherche génétique démographique de même que l'harmoniser avec les plus grands bienfaits qu'en tirera la société canadienne?

      • Qui peut ou devrait posséder ou contrôler une biobanque de données génétiques démographiques?

      • Comment les intérêts de la population canadienne devraient-ils être représentés lors de la négociation d'accords commerciaux découlant de la biobanque?

      • Y a-t-il quelque obligation juridique nouvelle par laquelle le Canada serait tenu d'intégrer le partage des avantages aux projets de génétique démographique?

      • Comment des dispositions de partage des avantages pourraient-elles être mises à exécution dans le contexte canadien?

      Lorsque des populations ou des collectivités contribuent à des projets de recherche et que ces projets aboutissent éventuellement à des profits pour une ou plusieurs entités commerciales, il est juste de se demander si et de quelle manière les profits et les autres avantages devraient être partagés avec les participants. Les dispositions de partage des bénéfices, si elles sont expliquées avec soin, offrent un mécanisme fort utile pour établir et conserver la confiance du public à l'égard des initiatives de génétique démographique. Le partage des bienfaits répond clairement aux critères de l'éthique et tout indique que le droit international pourrait bientôt en faire une prescription juridique85. Le comité d'éthique du projet HUGO (Human Genome Organization), dans sa déclaration sur le partage des avantages, décrit certains mécanismes qui pourraient servir à réaliser ce partage entre les entreprises commanditaires et les collectivités qui apportent une contribution à la recherche en génétique démographique.

      Le partage des avantages ne devrait être considéré comme contraire au régime actuel de propriété intellectuelle ni comme un moyen de freiner l'intervention du commerce dans les programmes de recherche génétique. Il faut le voir plutôt comme un mécanisme ou mieux, un ensemble de mécanismes, permettant de maintenir un équilibre entre les intérêts commerciaux et ceux des participants à la recherche, d'une manière qui respecte et reflète la contribution relative de ces deux parties.

      Le tableau 14 donne un aperçu des avantages monétaires et autres pouvant être inclus dans les accords de partage.


      Tableau 14 –
      Avantages monétaires et autres pouvant être intégrés aux accords de partage des avantages


      Avantages monétaires Avantages non monétaires
      • Droits d'accès
      • Redevances
      • Frais de licence
      • Possession conjointe des droits de propriété intellectuelle
      • Partage de l'information
      • Collaboration à la recherche, coentreprises
      • Accords de transfert de technologie
      • Perfectionnement des ressources humaines
      • Prestation de soins de santé
      • Expansion des infrastructures de l'information
      • Reconnaissance sociale

      La qualité des dispositions de partage dépend avant tout des parties en cause et des particularités sociales, culturelles et politiques de la situation. Ces dispositions peuvent faire intervenir les institutions gouvernementales, non gouvernementales ou universitaires et les collectivités indigènes ou locales. La situation qui prévaut en Islande et à Tonga montre à quel point il est important que les dispositions de partage soient élaborées avec le plus grand soin afin de traiter et de faire disparaître convenablement les inquiétudes de la population sujet de la recherche, sinon le projet peut être voué à un échec total. Les mécanismes d'examen des modalités contractuelles, y inclus les rétributions monétaires, peuvent être établis dès le départ et il faudrait prévoir des mécanismes appropriés de règlement des conflits.


      Tableau 15 –
      Résumé des données des sondages sur la commercialisation


      Préoccupations du public
      Royaume-Uni
      • Les personnes interrogées sont généralement d'avis que les banques de données médicales ne devraient pas appartenir à des intérêts commerciaux (Einseidel, p. 15, citant la Human Genetics Commission, 2000).
      • Environ les trois quarts des sondés pensent que les nouveaux produits créés à partir des renseignements génétiques devraient être de propriété publique (Einseidel, p. 16, citant la Human Genetics Commission, 2000).
      Canada
      • Environ 70 p. 100 des Canadiens interrogés sont d'avis que les lois conçues dans le but de protéger la confidentialité des renseignements sur la santé devraient s'appliquer aussi bien au secteur privé qu'au secteur public (Einseidel, p. 16, citant l'Association médicale canadienne, 2000).
      • Les Canadiens se montrent très en faveur de la cartographie du génome humain et ils appuient de plus en plus l'idée du brevetage dans ce domaine (Einseidel, p. 17, citant Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, 1999).
      • La moitié des sondés ne sont pas à l'aise à l'idée du brevetage des formes de vie supérieures (Einseidel, p. 18, citant Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, 1999).
      • Le processus de commercialisation devrait être guidé par les principes de l'égalité et de l'accès aux nouveaux produits (Einseidel, p. 18, citant Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, 1999).
      • La moitié des Canadiens sondés croient posséder conjointement leurs renseignements génétiques avec l'organisation qui leur a fait subir le test (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection).
      • Quelque 43 p. 100 des sondés pensent que leurs prélèvements biologiques leur appartiennent (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection).
      • Les personnes interrogées manifestent une résistance farouche à l'idée que les biobanques « vendent » des données génétiques à d'autres chercheurs, même avec le consentement du participant. Il semble y avoir là plus une désapprobation générale rôle du profit en association avec les soins de santé qu'une décision réfléchie au sujet de circonstances particulières. La preuve en est que peu de gens tiennent compte du coût de la collecte et du stockage des données lorsqu'ils pensent à la commercialisation (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection).
      Japon
      • L'appui au brevetage diminue lorsque l'on passe de brevets sur de nouvelles variétés végétales et animales au brevetage de gènes de végétaux, d'animaux et d'êtres humains existants (Einseidel, p. 17, citant Macer, 1992).
      Suède
      • Les Suédois interrogés expriment des craintes d'ordre éthique quant à la commercialisation des renseignements génétiques (Einseidel, p. 18, citant Hoyer, 2002).
      • Les personnes se disent à l'aise à l'idée de la commercialisation de la « technologie de l'information », mais moins à l'aise à celle de la commercialisation de la « technologie des gènes » (Einseidel, p. 18, citant Hoyer, 2002).
      Tonga
      • La proposition de la société Autogen visant la mise sur pied d'une banque de renseignements sur la santé à partir du patrimoine génétique de la population de Tonga a déclenché la colère et l'indignation parmi les groupes de défense des droits de la personne et les organismes confessionnels (Einseidel, p. 32, citant Burton, 2002).
      Préoccupations des professionnels
      Royaume-Uni
      • Les professionnels interrogés signalent les problèmes créés par les liens de plus en plus nombreux qui s'établissent entre les secteurs public et privé dans le domaine des bases de données génétiques (Einseidel, p. 36, citant la Human Genetics Commission, 2000).
      • Les personnes interrogées croient qu'il est déjà en train de se créer un marché commercial de l'ADN humain et des données génétiques (Einseidel, p. 36, citant Martin, 2000).

      Résumé du thème Commercialisation

      Commercialisation en général

      • La recherche en génétique démographique a pour objectif de trouver des médicaments et des traitements nouveaux contre les maladies des humains. Il est inévitable que le secteur privé intervienne dans le processus et, par conséquent, il est aussi inévitable que des entreprises se ménagent et accumulent des droits de propriété intellectuelle.

      • Dans le cadre du processus d'obtention du consentement éclairé, les participants à la recherche doivent être informés de la possibilité d'une commercialisation future de leurs prélèvements biologiques et des résultats de la recherche.

      • Il faut absolument que la recherche en génétique démographique et le processus de commercialisation qui la suit se déroulent d'une manière qui prenne en compte et protège les rapports médecin-patient et chercheur-participant.

      • Il est possible que des sociétés à but lucratif et sans but lucratif qui ne relèvent pas d'établissements connexes de recherche à financement public, détiennent en commun des prélèvements biologiques et des données afférentes. Il est important, par conséquent, que ces entités établissent des formalités, en cas de faillite ou de liquidation volontaire, pour garantir que les prélèvements et les données de nature délicate concernant les antécédents médicaux ne deviennent pas des « actifs » pouvant éventuellement être répartis parmi les créanciers et les actionnaires.

      Accès aux ressources des biobanques

      • L'accès aux ressources des biobanques par les chercheurs du secteur public comme du secteur privé doit être basé sur un examen scientifique et éthique minutieux de la recherche proposée.

      • Les chercheurs canadiens et étrangers devraient avoir un accès facile aux données de biobanque qui se sont accumulées grâce à des initiatives de recherche à financement public.

      • Les biobanques de données génétiques démographiques financées par l'État devraient être autorisées à permettre le plus de recherche possible, y compris au sujet de maladies, qu'elles soient courantes ou rares.

      • Les biobanques de données génétiques démographiques devraient faciliter les recherches qui promettent des avantages à la fois à la population sujet et à la collectivité mondiale.

      Partage des avantages

      • Les intérêts de la population participante et de la population en général doivent être considérés à part et séparément des intérêts commerciaux. À cette fin, les intérêts de la population devraient être représentés dans les accords commerciaux.

      • Les dispositions de partage des avantages doivent être intégrés dès le départ dans les plans généraux des projets de biobanque et la population devrait être consultée au sujet de ce partage.

      • Le partage des avantages doit être considéré comme un mécanisme ou mieux, comme un ensemble de mécanismes, permettant d'établir et de garder un juste équilibre entre les intérêts commerciaux et ceux des participants à la recherche, d'une manière qui respecte et reflète à la fois la contribution relative de chacune des deux parties.


    6. Régie

      La régie a trait aux processus par lesquels les organisations humaines, qu'elles soient privées, publiques ou civiles, conduisent leurs propres affaires86. Les questions de régie qui entrent en jeu dans le contexte des biobanques sont complexes et plus larges que celles inhérentes à la simple « recherche sur des sujets humains ». S'il en est ainsi, c'est parce que les biobanques font intervenir l'interaction d'entités privées dans un domaine qui est traditionnellement considéré « public ». Les questions de régie d'entreprise et d'éthique des affaires sont donc d'une grande pertinence. Dans le contexte des biobanques, les questions de régie surviennent au sein et entre des organisations parmi lesquelles des institutions publiques et privées, des entreprises commanditaires, des organes de réglementation, des comités d'éthique de la recherche, des chercheurs, des participants à la recherche et la population en général. La régie des biobanques est importante pour de nombreuses raisons dont la moindre n'est pas que cette régie remplit une fonction essentielle pour veiller à l'obligation de rendre compte et à l'établissement et au maintien de la confiance du public.

      Michael Yeo fait valoir de façon convaincante que les grandes biobanques s'apparentent plus à des entreprises qu'à des organismes de recherche de conception traditionnelle et que les cadres juridiques et éthiques actuels régissant la recherche ne suffisent plus. Les normes de la recherche et de son éthique propre se sont développées dans un milieu étroit et n'englobent pas convenablement les questions de protection de la vie privée et de consentement auxquelles donnent lieu les biobanques. De nombreux observateurs réclament une protection renforcée de la vie privée et la modification des exigences relatives au consentement éclairé pour ce qui est des recherches à venir sur les prélèvements et les données connexes contenus dans les biobanques (Yeo, p. 16). Qui plus est, les biobanques, même envisagées strictement comme des outils de recherche, diffèrent considérablement des autres types de recherche sur des sujets humains. Il faudra inévitablement apporter des modifications aux régimes juridique et éthique actuels ou mettre sur pied un système de réglementation à part. Cet argument est d'autant plus fort lorsque entre en jeu l'exploitation commerciale des biobanques. La question à laquelle il est urgent de répondre est celle de savoir si les instruments actuels de régie, c'est-à-dire, le droit, les politiques et les normes de l'éthique, sont aptes à répondre aux préoccupations et aux problèmes créés par les biobanques : ces outils peuvent-ils vraiment être adaptés au contexte des biobanques ou faut-il édifier d'autres instruments, que ce soit sous la forme de mesures législatives, de règlements ou d'énoncés de principe, tout spécialement pour les biobanques?

      Les résultats des sondages d'opinion publique permettent de croire que la population comprend l'importance de systèmes de régie fondés sur l'éthique pour la recherche en génétique, un domaine qui est considéré comme se situant au cœur même de la recherche médicale future. Cette importance se vérifie dans le fait que les personnes interrogées voient comme essentiel que l'État et le milieu scientifique collaborent de près à l'élaboration du système de régie qui convient aux biobanques (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, 2003, p. 14). De façon générale, les gens ne veulent pas avoir à choisir entre la recherche en génétique et la protection de leur vie privée, mais il est plutôt étonnant de constater que, forcés de choisir, ils seraient légèrement plus nombreux à opter pour la recherche plutôt que pour la protection de la vie privée (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, 2003, p. 14). Selon toutes les apparences, plus les gens sont informés au sujet de la recherche en génétique et des biobanques et plus il devient probable qu'ils concluent que les bienfaits de la recherche pèsent plus lourd dans la balance que les risques afférents. Il ne faut pas voir là une acceptation inconditionnelle de l'utilisation incontrôlée des renseignements génétiques, mais plutôt un désir de voir un lien concret entre la substance des projets de biobanque et les avantages à en tirer. Sans ce lien, la population en revient implicitement à exiger une protection rigoureuse de la vie privée. Par contre, si on démontre aux gens l'existence, chez les autorités, d'un véritable désir d'améliorer la régie et de répondre aux inquiétudes soulevées par le risque d'utilisations abusives ou malhonnêtes des renseignements génétiques, on voit s'élever leur niveau de confiance. Ces données soulignent l'importance de consulter et d'informer le public au sujet des enjeux liés aux grandes initiatives de recherche en génétique démographique.

      Les planificateurs canadiens de projets de biobanque peuvent apprendre de l'expérience d'autres artisans de vastes initiatives de ce genre. Les difficultés rencontrées par le MRC du Royaume-Uni sont tout spécialement riches en enseignements et les planificateurs canadiens devraient les étudier avec soin afin d'éviter d'attirer les mêmes critiques. Si le Canada se lance effectivement dans la mise sur pied d'une immense base de données génétiques démographiques faisant appel à la participation de sujets enfants, les planificateurs devront, de leur côté, se lancer dans un processus englobant et continu faisant intervenir les scientifiques et les autres intéressés. Tout d'abord, il faut absolument se pencher sur les défis qui seront adressés à la méthode scientifique et comprendre à l'avance que des critiques s'attaqueront à la nature même du processus de mise sur pied de la biobanque. Il serait sage de se demander si l'instauration d'une évaluation officielle par des pairs ne pourrait pas servir efficacement à garantir l'objectivité et l'indépendance qui s'imposent pour l'élaboration du projet.

      Peu importe le degré de réforme qui sera jugé nécessaire, il est clair que les biobanques de grande envergure exigent l'instauration d'un cadre de réglementation et d'obligation de rendre compte qui intègre les normes légales et éthiques régissant la recherche sur des sujets humains et les normes éthiques en devenir de la régie des entreprises.

      Le tableau 16 présente un aperçu schématique du cadre complexe de régie dans lequel opèrent les biobanques au Canada.


      Tableau 16 –
      Aperçu du cadre de régie au sein duquel évoluent les biobanques au Canada


      Responsabilité professionnelles
      Normes professionnelles et scientifiques

      Déclaration universelle des droits de l'homme (Organisation des Nations Unies)
      Déclaration d'Helsinki (Association médicale mondiale)
      Science Médecine
      Divers codes de déontologie soutenant l'honnêteté, l'intégrité, la protection du bien public, la liberté universitaires, le partage des données, l'examen par les pairs, etc.
      (Association canadienne de l'informatique)
      (Conseil canadien des ingénieurs professionnels)
      (Institut de chimie du Canada)
      Serment d'Hippocrate
      (Collèges provinciaux des médecins et chirurgiens)
      (Association médicale canadienne)
      (Sociétés nationales de spécialistes)
      Droit Politique Éthique
      Charte canadienne des droits et libertés

      Lois fédérales :
      • Lois sur la protection de la vie privée et des renseignements personnels (secteurs public et privé)
      • Déclaration des droits garantis par la Loi canadienne sur les droits de la personne

      Common law :
      • vie privée
      • confidentialité
      • consentement
      • droit fiduciaire
      Lois provinciales et territoriales :
      • vie privée et renseignements personnels (secteurs public et privé, santé)
      • hôpitaux
      • tissus humains
      • registres des cancers
      • santé publique
      • statistiques
      • chartes et lois provinciales sur les droits de la personne
      Politique fédérale :
      • Énoncé de politique des trois conseils
      • Stratégies de financement
      • (directives des Instituts de recherche en santé du Canada*)

      Politique provinciale et territoriale :
      • énoncés de politiques des provinces
      • énoncés de politique des universités et des hôpitaux
      Canada:
      • Énoncé de politique des trois conseils
      • Déclaration de principes sur la conduite éthique de la recherche en génétique humaine sur des populations humaines
      Droit international :
      • Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine
      • Convention sur la biodiversité (par analogie)
        International :
      • Directives internationales d'éthique pour la recherche biomédicale impliquant des sujets humains (CIOMS)
      • Déclaration universelle sur le génome humain (UNESCO)
      • HUGO Statement on the Ethical Conduct of Genetic Research
      • HUGO Statement on Benefit-sharing
      • Déclaration concernant les bases de données (Association médicale mondiale)
      • (Normes nouvelles d'éthique des entreprises)
      Politiques et méthodes propres aux biobanques
      (Directives propres aux biobanques pour les comités d'éthique de la recherche*)


      Tableau 17 –
      Résumé des données des sondages sur les questions de régie


      Préoccupations du public
      Royaume-Uni
      • Les participants insistent sur l'importance de règlements régissant la collecte, le stockage, l'utilisation et la destruction des prélèvements et préféreraient que la supervision de ces processus soit confiée à une entité indépendante (Einseidel, p. 8, citant Porter et al, 2000).
      Canada
      • Les Canadiens demandent implicitement la protection rigoureuse de leurs renseignements génétiques personnels, mais ils accordent une haute valeur positive à l'utilisation de ces renseignements pour la santé et la médecine (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 15).
      • Les Canadiens sont plutôt ouverts à l'utilisation de leurs renseignements génétiques personnels pour la recherche (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 15).
      • En ce qui concerne les systèmes de réglementation et de régie, les Canadiens sont plus nombreux (56 p. 100) à croire que le milieu de la médecine et celui de la recherche devraient jouer le rôle principal pour déterminer les priorités et méthodes pertinentes qu'à croire (41 p. 100) que cette fonction devrait relever de l'État (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 15).
      • Les Canadiens sont d'avis que l'État doit instaurer les lois qui s'imposent, mais que les milieux de la recherche et de la médecine sont plus compétents et plus près de la situation sur le terrain. Ils veulent voir une collaboration étroite entre l'État, les chercheurs et les médecins (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 15).
      • Les Canadiens sont en faveur d'un régime qui maintienne un juste équilibre entre la protection rigoureuse des renseignements génétiques personnels et un accès ouvert à ces renseignements en vue d'avantages importants qui pourraient en découler (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 15).
      • Un système de régie, pour se mériter l'appui du public, doit sans cesse montrer les liens qui existent entre la substance des initiatives et les avantages à en tirer. Autrement, la position implicite, c'est-à-dire, la rigoureuse protection des renseignements personnels, reprend le dessus (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 15).
      • Les connaissances et les débats au sujet de la recherche en génétique et de la protection des renseignements génétiques accroissent la conviction que les bienfaits à tirer d'un accès facile aux renseignements génétiques dépassent les inconvénients qui pourraient en découler (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 15).
      • Mieux les gens sont informés au sujet de la recherche en génétique et des biobanques et plus ils sont enclins à penser que les avantages l'emportent sur les risques; les personnes bien placées pour être informées et discuter tôt de ces questions sont plus enthousiastes quant aux promesses de la recherche en génétique (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 14).
      • D'après les résultats des groupes de réflexion, il semble que les gens, une fois qu'ils ont compris que les responsables de la régie de ces enjeux sont soucieux du bien de la population et travaillent à l'amélioration du système de régie, deviennent moins inquiets du danger d'utilisations abusives ou mauvaises et plus intéressés par les avantages à escompter (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 14).
      • L'immense majorité des Canadiens (96 p. 100) voit la recherche en génétique comme extrêmement importante (67 p. 100) ou assez importante (29 p. 100) pour l'avenir de la recherche médicale (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 93).
      • La plupart des Canadiens (73 p. 100) se montrent disposés à permettre que les renseignements génétiques soient utilisés en recherche médicale, et ce pourcentage monte avec l'assurance que les données seront anonymisées (Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications, Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection, p. 95).
      • Des craintes persistent quant au respect de l'anonymat des donneurs de prélèvements, aux dossiers utilisés pour la recherche et à la possibilité que les employeurs et les assureurs aient accès à ces renseignements et en usent à mauvais escient (Einseidel, p. 13, citant l'Association médicale canadienne, 2000).

      Résumé du thème Régie

      • La « biobanque » est une réalité vague ayant des liens d'appartenance avec de nombreuses disciplines scientifiques et médicales. De ce fait, elle exige l'élaboration de stratégies originales et l'apport de précisions et d'améliorations au cadre de régie.

      • Il faut cerner et corriger les conflits et les incohérences qui existent au sein du cadre de régie.

      • La structure de gestion des biobanques doit obéir à l'obligation de rendre compte et les fonctions commerciales des biobanques doivent être transparentes, sinon le public retirera son appui à de telles initiatives.

      • La responsabilité professionnelle se manifeste dans les normes d'éthique et de déontologie propres aux disciplines scientifiques et les normes de l'exercice de la médecine. Les biobanques demandent la définition d'une conception multidisciplinaire originale de la responsabilité professionnelle.

      • L'élaboration des politiques et méthodes propres aux biobanques doit se fonder sur une étude minutieuse du droit (provincial, national et international), des déclarations de principes (fédérales, provinciales, territoriales et institutionnelles) et des nombreux codes d'éthique pertinents.

      • Les politiques et méthodes propres aux biobanques doivent définir clairement de nombreux points, notamment (Yeo, p. 19-20) :

        • le contenu précis et détaillé de la biobanque, dont les prélèvements (tissus, sang, cellules ou ADN qui en est tiré), les données de séquences d'ADN, les données démographiques, les renseignements sur la santé et toute autre information connexe

        • les protocoles de collecte de prélèvements et de données, y compris les modalités du consentement accordé par les participants

        • la mesure dans laquelle il est possible de relier les données de la biobanque à l'identité des participants

        • les règles et formalités régissant l'accès des chercheurs au contenu des biobanques

        • les mesures de sauvegarde mises en place pour protéger les intérêts des personnes dont les renseignements personnels et génétique sont détenus par la biobanque (sécurité, supervision, obligation de rendre compte, etc.)

        • la structure organisationnelle et les dispositions essentielles de régie de la biobanque.

      • Les comités d'éthique de la recherche ont besoin de toute urgence de conseils et d'orientation concernant les questions de droit et d'éthique liées aux biobanques.

      • Tous les protocoles de recherche proposés doivent absolument être approuvés par un comité d'éthique de la recherche, avant toute activité de recrutement de participants à une initiative de recherche en génétique démographique. Ces comités d'éthique de la recherche doivent :

        • être indépendants et multidisciplinaires et comprendre des membres venus de la population participante

        • évaluer et contrôler la constitution de la biobanque et examiner tous les projets de recherche proposés et toutes les demandes d'accès

        • remplir leurs fonctions après avoir acquis une connaissance détaillée de toutes les dispositions contractuelles convenues entre les chercheurs et la biobanque.

      • Les capacités, les compétences et l'indépendance des comités d'éthique de la recherche sont à vérifier et contrôler.

      • Il faudra créer un organisme autonome qui sera chargé de superviser et surveiller les projets.

      • Les biobanques doivent faire l'objet d'une surveillance à long terme et de vérifications périodiques.


    7. Résumé des grands enjeux

      La recherche en génétique a vécu un glissement de paradigme qui l'a vue passer de l'analyse de liaison à de vastes recherches en génétique démographique. Cette mutation accroît l'importance sociétale de veiller à ce que les enjeux éthiques, juridiques et sociaux soient abordés et réglés au fur et à mesure du déroulement de la recherche. Bien des facteurs poussent à l'optimisme et permettent d'espérer que la société trouvera d'immenses bienfaits dans les innovations découlant de cette deuxième étape du Projet du génome humain. La recherche en génétique démographique devrait permettre aux chercheurs de mieux comprendre les interactions gène-milieu présentes dans certaines maladies humaines complexes et, par là, de trouver des stratégies originales de mise au point de médicaments et de tests diagnostics et prédictifs nouveaux. Toutes les dimensions éthiques, juridiques et sociales du domaine devront faire l'objet d'un examen scientifique rigoureux. La présente sous-section passe en revue les principaux enjeux dégagés au long du présent rapport de synthèse et, dans la mesure du possible, tente de les mettre en ordre de priorité.

      En unissant leurs efforts pour élaborer la stratégie qui réponde le mieux aux besoins de la population du Canada, les intervenants du monde de la recherche, l'industrie privée et les artisans de la politique officielle peuvent puiser à même l'expérience accumulée par les autres pays; ils doivent aussi procéder avec toute la précaution voulue et garder à l'esprit les particularités de la société canadienne et le régime de réglementation dans lequel les biobanques canadiennes prendront naissance et évolueront.

      À chaque étape de ce processus, les décideurs doivent reconnaître pleinement que la recherche en génétique démographique n'est rendue possible que grâce à la collaboration de participants volontaires qui composent, collectivement, une « population ». La contribution de cette population à la recherche est essentielle et on pourrait aller jusqu'à dire que la population a le droit de compter parmi les partenaires de l'initiative de recherche. C'est de cette hypothèse de départ que découlent les conclusions ci-après.

      Information et consultation du public

      Ce qu'il faut tout d'abord, c'est élaborer une stratégie transparente d'information et de consultation du public afin de déterminer si le Canada devrait promouvoir, à titre d'objectif de société, la mise à exécution de projets de biobanque de grande envergure. Les responsables de la politique officielle ne doivent pas exclure la possibilité que le Canada ne devrait pas se lancer dans d'immenses projets de recherche en génétique démographique. Par ailleurs, si le Canada décide de le faire après en avoir étudié à fond tous les aspects, il faudra édifier des stratégies de consultation permanente pour assurer la pérennité de la pertinence et de l'acceptation de ces initiatives. Les stratégies de consultation devront obligatoirement être transparentes et les résultats obtenus devront être intégrés aux projets dans tous les cas où la chose est raisonnablement possible. À cet égard, les critiques adressées au projet UK Biobank sont porteuses d'enseignements, à savoir que la consultation ne doit pas être vue comme « un boulonnage accessoire pour trouver de l'appui à une initiative purement politique87 ».

      La mise sur pied d'une stratégie efficace d'information et de consultation sera tout un défi à relever. Il faut une réflexion approfondie afin de déterminer chacun des éléments de l'ensemble de tactiques composant la stratégie qui permettra le mieux de comprendre les sentiments du public et des intéressés dans le contexte canadien. Des fonds suffisants doivent donc être affectés à un processus soutenu d'information et de consultation.

      Vie privée et de la confidentialité

      Les questions de protection de la vie privée et de confidentialité sont rendues particulièrement difficiles par la conjugaison de nombreux facteurs dont les progrès rapides de la technologie de l'information, de la recherche en génétique et de la bio-informatique et le conflit persistant entre, d'une part, le désir de réaliser des recherches bénéfiques dans le domaine de la santé et, d'autre part, la nécessité de protéger les renseignements personnels sur la santé. La question de la sauvegarde de la vie privée est tout spécialement complexe. D'abord, il n'existe aucun cadre légal cohérent au sein duquel aborder proprement les questions de vie privée du domaine de la santé qui sont liées à l'exploitation des biobanques. Il faut donner un très haut degré de priorité à l'étude et au règlement de ces problèmes et à l'acquisition d'une connaissance pratique des interactions entre les lois fédérales et provinciales actuelles ou proposées (et toutes les autres mesures législatives potentiellement pertinentes) ayant trait aux biobanques. Il pourrait arriver que l'analyse minutieuse du cadre légal révèle la nécessité d'envisager une loi qui serait formulée spécialement pour les biobanques et dont on pourrait plus raisonnablement s'attendre qu'elle permette de régler des problèmes précis relatifs à la protection de la vie privée.

      En ce qui a trait à la protection du contenu de la biobanque, il faut voir s'il existe actuellement des mécanisme sûrs pour l'encodage, l'anomymisation et le partage des données. Il serait utile aussi, dès les tout premiers stades de la planification du projet, de se mettre en quête des stratégies les meilleures de collecte et de stockage afin que les opérations de la biobanque canadienne respectent les normes internationales en train de se définir dans ce domaine.

      Consentement éclairé

      Au Canada, il semble que l'obtention du consentement éclairé de chaque sujet soit devenue la norme de facto dans le domaine de la recherche prospective en génétique démographique. Il est évident et admis que le processus de consentement éclairé est rendu très difficile par l'incapacité des chercheurs et des planificateurs de biobanque à prévoir toutes les utilisations futures possibles des matières biologiques humaines et des données connexes. L'exécution de grands projets de recherche en génétique démographique demande une réévaluation complète du cadre normatif en vigueur régissant le consentement éclairé.

      Il convient de souligner aussi que la recherche en génétique démographique sur des sujets mineurs est semée d'embûches en matière d'éthique et de droit. Le Canada doit se pencher sur cette question s'il a l'intention de mettre en œuvre la proposition d'Initiative sur la santé des Canadiens à tous les stades de la vie ou tout autre projet de ce genre.

      Commercialisation

      L'un des objectifs premiers de la recherche en génétique démographique est de trouver des médicaments et des traitements nouveaux contre les maladies des humains. Il est inévitable que le secteur privé intervienne dans le processus et, par conséquent, il est aussi inévitable que des entreprises se ménagent et accumulent des droits de propriété intellectuelle. Le défi consiste à faire concorder le mieux possibles les besoins de l'industrie avec ceux du monde plus vaste de la recherche et ceux des populations sans lesquelles de telles recherches seraient impossibles. La commercialisation de la recherche en génétique soulève de nombreuses inquiétudes, dont la moindre n'est pas qu'elle risque de détruire la confiance du public. Les gens appuient généralement la recherche en génétique, mais il existe un risque véritable qu'en mettant exagérément l'accent sur le commerce, on déclenche dans la population un contrecoup négatif qui lui fera rejeter en bloc la recherche en génétique et les produits commerciaux qui en sont issus.

      En élaborant sa stratégie de consultation, le Canada fera bien de songer à établir des collaborations originales entre les secteurs public et privé qui seront accompagnées d'un « partenariat » avec les populations de sujets de la recherche en génétique.

      Le partage des avantages issus de la recherche est un mécanisme de ce genre. Il ne faut pas y voir une infraction au régime actuel de propriété intellectuelle ni un moyen de freiner la participation de l'entreprise privée à la recherche, mais plutôt un mécanisme ou mieux, un ensemble de mécanismes, permettant de trouver et de maintenir un équilibre entre les intérêts commerciaux et ceux des participants à la recherche, d'une manière qui respecte et reflète la contribution relative de ces deux parties.

      Régie

      Dans le contexte des biobanques, les questions de régie surviennent au sein et entre des organisations parmi lesquelles des institutions publiques et privées, des entreprises commanditaires, des organes de réglementation, des comités d'éthique de la recherche, des chercheurs, des participants à la recherche et la population en général. La régie des biobanques et de leur exploitation est d'une importance cruciale parce qu'elle remplit une fonction essentielle, soit de veiller à l'obligation de rendre compte et à l'établissement et au maintien de la confiance du public. La question qu'il est urgent de se poser est celle de savoir si les instruments actuels de régie, c'est-à-dire, le droit, les politiques et les normes de l'éthique, sont aptes à répondre aux préoccupations et aux problèmes créés par les biobanques : ces outils peuvent-ils vraiment être adaptés aux biobanques ou faut-il édifier d'autres instruments, que ce soit sous la forme de mesures législatives, de règlements ou d'énoncés de principe, tout spécialement pour les biobanques?

      En répondant à la question sur le caractère adéquat ou non du cadre actuel de régie, il faut faire attention de ne jamais sous-estimer les craintes du public quant à la participation de l'entreprise privée et à la possibilité d'un usage abusif des renseignements génétiques. Plus s'accentuera la tendance présente à la collecte et à l'exploitation des renseignements génétiques, et plus s'alourdira la probabilité de tels abus. Il faut donc, afin de garantir l'intégrité de la recherche en génétique démographique, prendre dès maintenant des mesures raisonnables pour comprendre le cadre actuel de régie et trouver des moyens de renforcer les sauvegardes offertes aux participants à la recherche ainsi qu'aux membres de leurs familles.

      Même s'il reste du temps pour la planification d'immenses initiatives de recherche en génétique démographique, il n'en reste pas moins que les comités d'éthique de la recherche ont besoin de toute urgence de conseils et d'orientation sur les questions de droit et d'éthique liées aux initiatives de biobanque de petite envergure. Des biobanques institutionnelles et régionales sont en voie de se créer, à un rythme de plus en plus rapide, maintenant que les intéressés se rendent compte de la valeur possible des renseignements génétiques. L'orientation donnée dans l'Énoncé de politique des trois conseils ne suffit pas aux comités d'éthique de la recherche auxquels on demande d'examiner des projets de biobanque.

      Stratégies de recrutement

      Les méthodes de recrutement de participants à des projets de recherche en génétique démographique doivent être fondées sur des bases scientifiques, juridiques et éthiques et, de plus, il faut élaborer des mécanismes de recrutement qui conviennent exactement au système canadien de soins de santé et au comportement attendu des patients dans ce système. Les stratégies doivent donc être axées sur la répartition équitable des avantages et des fardeaux de la recherche parmi la population dans son entier. Voilà une tâche ardue, vu l'immensité géographique du pays et la diversité et la taille relativement petite de sa population.


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  1. Aperçu des grandes initiatives de recherche en génétique démographique

    Caractéristique Base de données sur le Secteur de la santé, Islande UK Biobank, Royaume-Uni Banque génétique, Estonie
    Données
    • données personnelles sur la santé et le génotype
    • données généalogiques
    • données personnelles sur la santé
    • données sur le génotype
    • examen physique
    • données personnelles sur la santé et le génotype
    • données généalogiques
    Suivi  
    • période initiale de suivi de 10 ans
     
    Taille de l'étude
    • 270 000 personnes, y inclus enfants et défunts
    • 500 000 adultes de 45 à 60 ans
    • 1 million de personnes
    Parties intéressées
    • le gouvernement de l'Islande et la société deCODE Genetics
    • la société Wellcome Trust et le MRC
    • les sociétés Eesti Geenivaramu et eGeen Inc.
    Consultation
    • vaste débat après le fait (local et international)
    • consultations en cours, mais limitées jusqu'ici
    • consultations exhaustives dès le départ
    Appui de la population
    • population favorable au départ, puis confiance érodée par les pressions conjuguées des scientifiques et des médecins islandais
    • projet modifié d'après les recommandations des citoyens et des professionnels de la santé
    • organe de surveillance créé dans la foulée des consultations
    • population très informée et très favorable au projet
    • en août 2002, 76 p. 100 des Estoniens étaient au courant du projet et 2 p. 100 seulement étaient contre
    Lois habilitantes
    • loi sur la base de données du secteur de la santé
    • loi sur les biobanques
    • aucune
    • loi sur la recherche en génétique
    • loi sur la protection des données personnelles
    • loi sur les bases de données
    Stratégie d'octroi de licence
    • licence exclusive accordée à la société deCODE Genetics
    • propriété publique, des licences non exclusives seront octroyées aux chercheurs (des secteurs public et privé)
    • la société eGeen détient la licence exclusive et financera le projet au bénéfice des deux parties
    Recrutement
    • les médecins remettent à la société deCODE Genetics des données chiffrées sur les participants possibles; il y a ensuite une analyse préliminaire de la généalogie;
    • les données sont déchiffrées et retournées aux médecins, qui entrent en rapport avec les patients choisis, leur expliquent la recherche et obtiennent leur consentement par écrit
    • les médecins des centres médicaux participants entrent en rapport avec leurs patients, leur expliquent la recherche et obtiennent le consentement écrit des personnes désireuses de participer
    • les médecins entrent en rapport avec leurs patients, leur expliquent la recherche et obtiennent le consentement écrit des personnes désireuses de participer
    Accès
    • ministère de la Santé
    • abonnement commercial
    • accès spécial pour les chercheurs islandais?
    • la loi donne aux sujets le droit d'accès à leurs données personnelles
    • tout accès par une entité commerciale doit d'abord être approuvé par le comité de gestion scientifique et par l'organe de surveillance, conformément aux exigences éthiques et légales prescrites
    • seul le donneur de gènes et son médecin ont accès aux données génétiques personnalisées
    • les organismes d'État
    Consentement
    • il faut obtenir le consentement éclairé des sujets avant d'accéder à leurs dossiers médicaux et à leurs prélèvements d'ADN
    • aux termes de la loi sur les biobanques, les prélèvements biologiques doivent être obtenus à des fins clairement définies, mais le conseil de la biobanque a le droit d'autoriser des usages autres que ceux auxquels les sujets ont consenti
    • la biobanque doit obtenir le consentement écrit du participant avant d'accéder au registre du service national de santé (NHS), à leur dossiers médicaux courants et à d'autres dossiers médicaux, d'utiliser les données et prélèvements pour diverses analyses et tests biochimiques et génétiques précisés ou non au départ et de faire appel de nouveau au participant en question
    • il faut obtenir par écrit le consentement éclairé des participants avant de stocker dans la banque les prélèvements et les données de santé et de généalogie qui auront d'abord été chiffrées
    • les utilisations précisées au départ sont la recherche en génétique, la recherche sur la santé publique et les études statistiques, le tout en conformité avec la loi
    • une personne mineure peut donner de ses gènes à la banque si son tuteur en est informé
    • le consentement peut être retiré en tout temps jusqu'au chiffrement de l'échantillon
    Droit de retrait
    • les donneurs peuvent demander, en tout temps, la destruction de leurs prélèvements biologiques
    • les données obtenues et incluses à l'analyse avant la destruction d'un prélèvement ne seront pas détruites
    • il n'est pas question d'un droit de retrait dans le protocole provisoire du 14 février 2002
    • les participants peuvent exiger la destruction de toutes les données pouvant être déchiffrées
    Retours d'information sur les résultats
    • les résultats de la recherche sont affichés au site Web de la société deCODE Genetics
    • les participants sont informés des mesures prises pendant l'examen physique
    • des renseignements sur les progrès de la recherche seront mis à la disposition de tous les participants par des bulletins d'information, des affichages sur le Web et des publications approuvées par des pairs
     
    Supervision et surveillance
    • Commission de protection des données, comité national de bio-éthique
    • Organismes affectés en propre : comité de surveillance et comité interdisciplinaire d'éthique
    • le comité de surveillance est chargé par la loi de s'assurer que la base de données est exploitée conformément à la loi
    • un organisme de surveillance indépendant, comprenant des membres venus du grand public, doit superviser le fonctionnement et les activités de la biobanque et effectuer des vérifications afin de veiller à ce que les données stockées soient utilisées judicieusement et en conformité avec la teneur du consentement obtenu des participants
    • le traitement des données est dirigé par la fondation du projet estonien du génome
    • la fondation est tenue de passer des contrats avec l'entreprise de traitement autorisée (eGeen) ou avec des chercheurs; ces contrats fixent les conditions de stockage, les mesures de sécurité et la procédure de copie, de distribution ou de destruction des prélèvements
    • il y a aussi un conseil de supervision et un conseil consultatif scientifique
    Approbation du point de vue de l'éthique
    • tous les protocoles de recherche doivent être soumis au comité national de bio-éthique, qui doit surveiller les progrès de la recherche et peut mettre fin aux travaux s'ils outrepassent les limites du protocole ou contreviennent en toute autre façon à l'éthique
    • le comité interdisciplinaire d'éthique a le pouvoir de surveiller la recherche en cours et d'y mettre fin si elle ne se fait pas de manière conforme à l'éthique
    • il n'est pas question d'un droit de retrait dans le protocole provisoire du 14 février 2002
    • un comité scientifique donne son avis sur les questions concernant la validité scientifique des recherches exécutées à l'aide de la banque de gènes
    • un comité consultatif d'éthique surveille les méthodes de traitement en usage à la banque de gènes
    Partage des avantages
    • la société deCODE Genetics doit remettre à l'Islande une part des profits annuels tirés de l'exploitation de la base de données; les profits doivent servir à améliorer les services de santé et à financer la R-D
    • les dossiers médicaux des Islandais seront informatisés aux frais de la société deCODE Genetics
    • le gouvernement de l'Islande a plein accès à la base de données sur le secteur de la santé
    • en vertu d'un accord de sous-licence conclu avec la société Hoffman-LaRoche, les Islandais auront accès gratuitement aux médicaments issus des recherches exécutées à même la base de données, pendant la durée du brevet
    • les résultats des recherches seront retournés à la biobanque en échange de l'utilisation des prélèvements
    • la fondation a des intérêts dans la société eGeen Inc.
    État actuel du projet
    • en cours d'exécution
    • formation d'un groupe consultatif provisoire qui se réunit périodiquement et donne des avis au MRC sur la conduite du projet
    • des études pilotes seront réalisées avant le lancement de l'étude principale
    • étude pilote achevée en octobre 2002
    • projet principal entamé au printemps 2003
    Adresse URL www.decodegenetics.com www.ukbiobank.ac.uk www.geenivaramu.ee


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  1. Extraits de la réaction du gouvernement de Londres, par le biais de la commission d'enquête scientifique et technologique de la Chambre des communes, au rapport du Medical Research Council

    Recommandation 30 : Nous apprécions qu'il est difficile d'établir dès maintenant des prévisions à long terme des coûts de fonctionnement de la biobanque, mais nous sommes rassurés par le fait que ce travail est déjà activement envisagé (para. 54).

    et

    Recommandation 31 : La biobanque est un projet passionnant et nous louons les efforts consentis par le MRC pour voir à ce que le Royaume-Uni prenne la tête du mouvement pour tirer parti des fruits de la recherche sur le génome humain. Ce qui nous préoccupe, cependant, c'est que des fonds aient été affectés au projet avant l'achèvement d'un examen complet des questions scientifiques relatives à la valeur du projet et aux méthodes proposées (para. 57). [Régie]

    • Réponse du gouvernement : Le gouvernement appuie la mention louangeuse que le Comité adresse aux efforts du MRC pour voir à ce que le Royaume-Uni reste un chef de file dans l'exploitation des fruits de la recherche sur le génome humain. Il est rare qu'un grand projet soit accueilli favorablement à l'unanimité par le milieu scientifique. L'une des raisons pour lesquelles le projet a mis si longtemps à passer à la réalisation (la première réunion conjointe du MRC du Wellcome Trust avec les scientifiques désireux d'aider au développement du concept remonte à 1998) tient au fait que les bailleurs de fonds ont fait appel à la participation pleine et entière de scientifiques et d'autres intéressés à chacune des étapes de l'entreprise. Maintenant que sont choisis le « moyeu » et les « rayons » chargés de la collecte et de l'analyse des prélèvements et des données, les travaux se poursuivront jusqu'à la mise au point finale d'un plan d'activités et de protocoles et les résultats de ces travaux recevront une large diffusion.

    Recommandation 32 : Il nous est difficile de vérifier avec certitude si la biobanque a fait l'objet d'un examen par des pairs et a été financée au même titre que tout autre projet proposé pour une subvention. Nous avons l'impression que les bailleurs de fonds de la biobanque ont monté une proposition scientifique dans le but de trouver de l'appui à une initiative purement politique (para. 58). [Régie]

    et

    Recommandation 33 : Nous recommandons que le MRC rende publics, sans les attribuer à leurs auteurs particuliers, les commentaires des pairs examinateurs, afin de montrer avec assurance que le projet est pleinement justifié et qu'il est soutenu par le milieu scientifique (para. 59). [Régie]

    • Réponse du gouvernement : L'idée de la biobanque est venue au départ de scientifiques, et le projet a effectivement fait l'objet d'un examen par des pairs, mais il n'aurait pas été juste de l'examiner « au même titre que tout autre projet proposé pour une subvention ». En effet, la biobanque a pour but de servir de ressource nationale pour des projets recherche à venir qui ne peuvent pas être encore précisés en détail (et chacun de ces projets sera évidemment soumis à un examen par des pairs). Le processus d'examen conjoint par des pairs utilisé par les bailleurs de fonds (ministère de la Santé, Wellcome Trust, MRC) a fait appel avant tout à des experts venus du monde entier parce que les intéressés avaient convenu que c'était là le meilleur garant d'objectivité, d'indépendance, et d'absence de tout conflit d'intérêts.

      Le gouvernement croit en l'intégrité de l'examen par les pairs tel que commandé par les bailleurs de fonds au sujet du projet UK Biobank. Les commentaires des examinateurs ne peuvent pas être publiés puisqu'ils ont été sollicités en toute confidence par les bailleurs de fonds, selon la coutume. Les commentaires de pairs examinateurs sont actuellement exemptés des exigences de divulgation prescrites par la Freedom of Information Act qui entrera en vigueur en 2005. Tout écart à la pratique courante en matière d'examen par des pairs devrait d'abord être débattu, convenu et ensuite mis en œuvre uniformément par tous les conseils de recherche et les autres organismes intéressés.

    Recommandation 34 : Nous croyons que l'obtention d'un consentement pleinement éclairé doit être une condition préalable obligée à toute participation à la biobanque. Le MRC a peutêtre de bonnes raisons de ne pas adopter, pour la biobanque, les lignes directrices de la Human Genetics Commission, mais il devrait déclarer clairement sa position et, s'il est en désaccord avec les lignes directrices, il devrait expliquer pourquoi (para. 60). [Consentement éclairé]

    • Réponse du gouvernement : Le gouvernement convient qu'un consentement pleinement éclairé est indispensable. La planification de la biobanque s'est toujours fondée sur la nécessité absolue d'un consentement pleinement éclairé. Les propos sur le consentement contenus dans le rapport de la Human Genetics Commission (intitulé Inside Information) ne sont pas des lignes directrices mais plutôt des points de considération générale. Ces points concordent avec les principes de consentement que les bailleurs de fonds sont en train d'élaborer pour la biobanque, et avec les directives formulées par un groupe de travail d'experts du MRC sur les collections d'ADN, lesquelles ont été publiées en 2000 après de vastes consultations. En pratique, par conséquent, les points définis par la Human Genetics Commission seront dûment suivis.

    Recommandation 35 : Nous craignons que la viabilité à long terme du projet ne soit menacée à moins que les bailleurs de fonds de la biobanque n'adoptent une approche plus ouverte à la participation non seulement des exécutants et intervenants du projet mais aussi à la participation du grand public (para. 63). [Consultation]

    et

    Recommandation 36 : Nous avons l'impression que les consultations tenues par le MRC au sujet de la biobanque étaient plutôt une manœuvre accessoire, pour gagner des appuis plus généralisés, qu'un véritable effort pour créer un consensus relativement aux objectifs et aux méthodes du projet. Dans une entreprise de nature aussi délicate et d'une si grande envergure, la consultation doit prendre place au cœur même du processus et non pas à la périphérie (para. 65). [Consultation]

    • Réponse du gouvernement : gouvernement convient que la consultation est un élément vital de l'élaboration d'un projet d'une telle nature et de cette envergure. Le MRC et les autres bailleurs de fonds sont fermement déterminés à poursuivre de vastes consultations au fur et à mesure que le projet avance. La UK BioBank est basée sur la disposition des volontaires à participer et, en conséquence, sa réalisation dépend essentiellement d'une acceptation publique générale des objectifs du projet.

      La consultation d'un large éventail d'intéressés, y compris la population, a toujours été partie intégrante de la planification du projet, ces trois dernières années, et c'est là l'une des raisons pour lesquelles le projet a mis si longtemps à passer à exécution. Voici certaines des initiatives mises en œuvre :

      • une série d'ateliers de consultation informelle avec des professionnels de la santé (médecins généralistes, infirmières, etc.) partout au pays en 2001 et en 2003

      • des études qualitatives et quantitatives effectuées par deux différents cabinets d'expertsconseils en 2000 et en 2002, et dont les rapports ont été rendus publics; l'étude de 2002 a été suivie, au début de 2003, en partie à la suggestion de certains des participants à un groupe de réflexion, de consultations complémentaires auprès de groupes sociaux jusquelà sous-représentés dans les études

      • un atelier de consultation sur le thème de l'éthique, en 2002, auquel ont participé des éthiciens et des représentants de groupes d'intérêts spéciaux; le rapport, aujourd'hui publié, a inspiré l'élaboration de la version provisoire du cadre actuel d'éthique et de régie, lequel fera l'objet d'autres consultations en 2003

      • des ateliers ouverts aux intervenants du milieu de la recherche en général qui souhaitaient contribuer à l'élaboration du projet de biobanque (en 2001 et en 2002)

      • une présence lors de festivals de science, par exemple, BA, Cheltenham

      • des rencontres tenues avec la Human Genetics Commission, dont un forum public en 2002

      • une séance d'information présentée aux parlementaires en 2003.

      La plupart de ces consultations nous ont permis de constater un appui généralisé de la population au concept de la biobanque. Les commentaires exprimés au sujet de la structure d'éthique et de régie et du protocole scientifique sont pris en compte dans la poursuite de l'élaboration du projet.

      Au cours des prochains mois, la stratégie de communication et de consultation de la biobanque sera axée sur un certain nombre de domaines différents. Les bailleurs de fonds ont retenu les services d'experts-conseils de l'extérieur qui se chargeront de sonder les attitudes des gens au sujet du cadre proposé d'éthique et de régie du projet. Parallèlement, les bailleurs de fonds entameront, de concert avec le tout récemment nommé p.-d.-g. de UK Biobank, la mise sur pied d'une stratégie à plus long terme de communication et de consultation pour le projet. Cette stratégie comprendra notamment des activités de communication et de consultation par les « rayons » du réseau auprès des volontaires éventuels et des professionnels de la santé au niveau local, afin de poser les bases de l'étape finale de développement et d'essai pilote du protocole de recherche (un exemplaire de l'ébauche courante du protocole est affiché au site Web de la biobanque depuis l'été 2002). Le nouveau p.-d.-g. a l'intention de nommer un directeur des communications du projet plus tard cette année. En outre, les bailleurs de fonds sont en train de former une commission publique, un groupe d'une cinquantaine de personnes qui ont participé aux consultations antérieures et qui ont manifesté de l'intérêt à participer de façon plus permanente.

    Recommandation 37 : Le MRC semble adopter une attitude sage relativement à la participation de l'industrie à la biobanque. Il faut qu'il soit absolument clair que tous les résultats des recherches appartiendront au domaine public mais, et nous le reconnaissons, si nous voulons que la biobanque donne naissance à des thérapies nouvelles, la participation de l'industrie est inévitable et (para. 66). [Commercialisation]

    • Réponse du gouvernement : Le gouvernement accueille favorablement cette recommandation.

    Recommandation 38 : Nous convenons, avec la Human Genetics Commission, que les participants à la biobanque devraient être représentés au sein de l'organe de surveillance indépendant ou des conseils de participants à chacun des centres régionaux. Il est essentiel que les participants jouent un rôle actif dans la gestion du projet (para. 69). [Régie]

    • Réponse du gouvernement : Le gouvernement et le MRC conviennent qu'une participation des volontaires à la surveillance du projet serait utile à l'échelle nationale et-ou locale.

      La composition de l'organe de surveillance sera rendue publique. Ainsi, bien que l'identité des volontaires et la totalité de leurs données et prélèvements doivent demeurer confidentielles, l'identité des volontaires membres de l'organe de surveillance sera connue de tous. Cette participation à la surveillance devra être expliquée en détail et il faudra obtenir le consentement des personnes en cause.

    Recommandation 39 : La Human Genetics Commission a recommandé que le gouvernement finance une étude des techniques de chiffrement afin de pouvoir garantir la sécurité des données. Nous appuyons cette recommandation (para. 71). [Protection de la vie privée et régie]

    • Réponse du gouvernement : Des travaux sont déjà entamés au sein du programme national de technologie de l'information du NHS en vue de déterminer et d'instaurer des normes sûres et rigoureuses permettant de garantir la confidentialité et la sécurité des données des patients inscrits au NHS. Ces nouvelles dispositions comprendront des moyens de rendre anonymes ou pseudo anonymes et de chiffrer les données des patients en fonction des besoins déterminés et convenus, et ces moyens pourront s'appliquer aussi aux données stockées dans des bases de données ou transmises par voie électronique entre partenaires au sein du réseau d'information du NHS. Les normes de sécurité et de confidentialité seront mises à l'essai et validées dans le cadre de fonctionnement du programme national de technologie de l'information du NHS et elles seront présentées au MRC qui les mettra en oeuvre, le cas échéant.

      Le ministère de la Santé collabore de près avec les autorités gouvernementales en matière de sécurité, dont le Central Sponsor for Information Assurance (l'organisme central d'assurance de l'information) afin de veiller à ce que le NHS ait recours à des méthodes convenables et se conforme aux avis du gouvernement, le cas échéant.

    Recommandation 40 : Il est important que les participants à la biobanque, avant de donner leur consentement et avant tout prélèvement, soient conscients du risque que la police obtienne l'accès à leurs données et prélèvements. Les bailleurs de fonds devraient faire preuve de diligence et vérifier jusqu'à quel point ce risque peut dissuader les gens de participer (para. 72). [Protection de la vie privée, consentement et recrutement]

    • Réponse du gouvernement : Le gouvernement convient que les participants doivent être informés de ce risque. Les bailleurs de fonds pensaient que la police ne pourrait pas accéder aux données mais que cet accès ne pourrait pas lui être refusé dans des cas rares et improbables faisant l'objet d'une ordonnance d'un tribunal. Cette façon de voir a semblé être acceptée du public lors des consultations.

    Recommandation 41 : Le MRC peut s'enorgueillir d'antécédents et d'un rôle de premier plan dans ce qui fait la réputation supérieure de la recherche biomédicale au Royaume-Uni. Nous ne pouvons que louer ses efforts remarquables pour conserver cette réputation. Néanmoins, les chercheurs et leurs organisations sont très préoccupés par les politiques et les gestes du MRC. Il était peu probable, et nous le savions, que nous recevions des mémoires et commentaires de la part de personnes sans grief à exposer, mais nous avons conclu aussi que les personnes qui se sont effectivement exprimées nourrissaient des craintes légitimes. Nous avons pu constater des cas de mauvaise gestion financière et de mauvaise planification dans lesquels des quantités exagérées de fonds étaient affectées pour de longues périodes, forçant ainsi le MRC a refuser en grand nombre des propositions de subvention de la plus haute qualité. Le MRC a usé de stratégies erronées dans son soutien à la recherche et en est venu ainsi à faire preuve de discrimination à l'encontre des jeunes chercheurs et de certaines disciplines. Il s'est rendu coupable de communications sans cohérence et mal gérées qui ont entravé notre capacité d'évaluer son rendement et qui ont induit en erreur le milieu de la recherche qu'il est censé représenter. Ces fautes conjuguées ont terni la réputation de l'organisme et causé un profond ressentiment et de graves inconvénients parmi les chercheurs que le MRC a mission de soutenir (para. 74).

    • Réponse du gouvernement : Le gouvernement accueille favorablement la tentative du Comité pour peser et comparer, dans cette recommandation, les antécédents remarquables du MRC et les plaintes que le Comité a reçues à son endroit.

      Le MRC a un excellent dossier de rendement et ses rapports annuels montrent qu'il remplit la mission qui lui est confiée aux termes de sa charte royale.

      Tout en convenant que certains éléments de gestion financière et de planification ont besoin d'être améliorés, nous croyons que le MRC, dans l'ensemble, est capable de planifier et de contrôler ses dépenses. Ses comptes vérifiés ont reçu l'approbation du bureau administratif national.

      Le gouvernement ne pense pas que les stratégies de recherche du MRC soient erronées. Les stratégies à long terme du MRC sont élaborées par le conseil de l'organisme, où siègent des membres appartenant au monde scientifique et à celui de la médecine, et en consultation avec tout un éventail d'organisations dont les conseils de recherche du MRC et des ministères gouvernementaux.

      Le gouvernement, dans la présente réponse, reconnaît la nécessité de prêter une attention plus étroite à la communication avec le milieu de la recherche et à l'évaluation des politiques et stratégies de recherche.

    Source : Royaume-Uni. Ministère du Commerce et de l'Industrie. Government Response to ‘The Work of the Medical Research Council' Report by the House of Commons Science and Technology Select Committee (HC 132) », Cm 5834, juin 2003, p. 15-19.


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  1. Sommaire de la législation canadienne relative à la protection de la vie privée

    Ressort Champ Titre et état du projet de loi au 31 juillet 2003
    Fédéral secteur public Loi sur la protection des renseignements personnels, S.R.C. 1985, c. P-21.
      secteur privé Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, S.C. 2000, c.5. S'applique aux fonds de données du secteur privé et aux renseignements sur la santé à partir de janvier 2004 seulement
    Colombie-Britannique public Freedom of Information and Protection of Privacy Act, R.S.B.C. 1996, c. 165
      privé (projet de loi) Personal Information Protection Act – Projet de loi 38
    • présentation à l'assemblée législative le 30 avril 2003
    • deuxième lecture le 1er mai 2003
    • si le projet est adopté, la loi entrera en vigueur le 1er janvier 2004
      tissus Human Tissue Gift Act, R.S.B.C. 1996, c. 211
    Alberta public Freedom of Information and Protection of Privacy Act, R.S.A. 2000, c. F-25
      privé (projet de loi) Personal Information Protection Act – Projet de loi 44
    • présentation à l'assemblée législative le 14 mai 2003
    • si le projet est adopté, la loi entrera en vigueur le 1er janvier 2004
      santé Health Information Act, R.S.A. 2000, c. H-5
      tissus Human Tissue Gift Act, R.S.A. 2000, c. H-15
    Saskatchewan public The Freedom of Information and Protection of Privacy Act, S.S. 1990-91, c. F-22.01
      santé The Health Information Protection Act, S.S. 1999, c. H-0.021 (projet de loi 29)
    • a reçu la sanction royale le 6 mai 1999
    • n'est pas encore entrée en vigueur
      tissus The Human Tissue Gift Act, R.S.A. 1978, c. H-15
    Manitoba public Loi sur l'accès à l'information et la protection de la vie privée, C.C.S.M., c. F175
      santé Loi sur les renseignements médicaux personnels, C.C.S.M., c. P33.5
      tissus Loi sur les tissus humains, C.C.S.M. c. H180
    Ontario public Loi sur l'accès à l'information et la protection de la vie privée, L.R.O. 1990, c. F.31
      tissus Loi sur le Réseau Trillium pour le don de vie, L.R.O. 1990, c. H.20
    Québec public Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, S.R.Q., c. A-2.1
      privé Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, S.R.Q., c. P-39.1
      tissus Loi sur les laboratoires médicaux, la conservation des organes, des tissus, des gamètes et des embryons, les services d'ambulance et la disposition des cadavres, S.R.Q. L- 0.2
      délit civil Code civil du Québec, S.Q. 1991, c. 64
    Nouvelle-Écosse public Freedom of Information and Protection of Privacy Act, S.N.S. 1993, c. 5
      tissus Human Tissue Gift Act, R.S.N.S. 1989, c. 215.
    Nouveau-Brunswick public Loi sur la protection des renseignements personnels, S.N.B. 1998, c. P-19.1
      tissus Loi sur les tissus humains, S.R.N.B. 1973, c. H-12
    Île-du-Prince-Édouard public Freedom of Information and Protection of Privacy Act, S.P.E.I. 2002, c. F-15.01
      tissus Human Tissue Donation Act, S.P.E.I. c. H-12.1
    Terre-Neuve-et-Labrador public Access to Information and Protection of Privacy Act, S.N.L. 2002, c. A-1.1
    • a reçu la sanction royale le 14 mars 2002
    • n'est pas encore entrée en vigueur
      tissus Human Tissue Act, R.S.N.L. 1999, c. H-15
    Yukon public Loi sur l'accès à l'information et la protection des renseignements personnels, L.R.Y. 2002, c. 1 (ce site permet la recherche sur les lois du Territoire du Yukon)
      tissus Loi sur les dons de tissus humains, L.R.Y. 2002, c. 117 (ce site permet la recherche sur les lois du Territoire du Yukon)
    Territoires du Nord-Ouest public Loi sur l'accès à l'information et la protection de la vie privée, L.R.T.N.-O. 1994, c. 20 (ce site permet la recherche sur les lois des Territoires du Nord-Ouest)
      tissus Loi sur les tissus humains, L.R.T.N.-O. 1988, c. H-6, accessible en ligne à l'Institut canadien d'information juridique. (ce site permet la recherche sur les lois des Territoires du Nord-Ouest)
    Nunavut public Loi sur l'accès à l'information et la protection de la vie privée (Nunavut), L.R.T.N.-O. 1994, c. 20 adoptée par le Nunavut à l'art. 29 de la Loi sur le Nunavut (ce site permet la recherche sur les lois du Nunavut)
      tissus Loi sur les tissus humains, L.R.T.N.-O. 1988, c. H-6, adoptée par le Nunavut à l'art. 29 de la Loi sur le Nunavut (ce site permet la recherche sur les lois du Nunavut)

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  1. Consentement éclairé : renseignements pertinents pour les participants à des recherches en génétique démographique

    Selon les articles 2.4 et 10.2 de l'Énoncé de politique des trois conseils, les participants à un projet de recherche devraient recevoir les renseignements suivants au sujet du ou des protocoles de la recherche à laquelle ils sont invités à participer :


    Article 24:

    • l'information selon laquelle la personne est invitée à prendre part à un projet de recherche,

    • une déclaration intelligible précisant le but de la recherche, l'identité du chercheur, la nature et la durée prévues de leur participation ainsi qu'une description des méthodes de recherche,

    • un exposé compréhensible des avantages et des inconvénients raisonnablement prévisibles associés à la recherche, ainsi qu'une description des conséquences prévisibles en cas de non-intervention — notamment dans le cas de projets liés à des traitements, entraînant des méthodologies invasives, ou lorsque les sujets risquent d'être exposés à des inconvénients physiques ou psychologiques,

    • la garantie que les sujets pressentis sont libres de ne pas participer au projet, de s'en retirer en tout temps sans perdre de droits acquis et d'avoir en tout temps de véritables occasions de revenir ou non sur leur décision,

    • la possibilité de commercialisation des résultats de la recherche et l'existence de tout conflit d'intérêts, réel, éventuel ou apparent, impliquant aussi bien les chercheurs que les établissements ou les commanditaires de recherche.

    Commentaire

    Le commentaire de l'Énoncé de politique des trois conseils au sujet de l'article 2.4 contient un tableau énumérant des « Informations supplémentaires pouvant être exigées pour certains projets ». Voici celles qui s'appliquent directement à la recherche reliée aux biobanques :

    • l'assurance de fournir aux sujets en temps opportun tous les nouveaux renseignements susceptibles de remettre en cause leur décision de continuer, ou non, à prendre part à la recherche;

    • des renseignements sur les ressources appropriées, extérieures à l'équipe de recherche, avec qui prendre contact en cas de question d'ordre éthique;

    • la liste des personnes qui auront accès aux données recueillies sur l'identité des sujets, la description des mesures prises pour protéger la confidentialité des données ainsi que leur utilisation envisagée;

    • les moyens de diffusion des résultats de la recherche et la façon dont les sujets seront informés de ses conclusions.


    Article 10.2:

    • le genre et la quantité de tissus à prélever ainsi que l'endroit où se fera le prélèvement,

    • la technique, les dangers et le caractère invasif du prélèvement, ainsi que la durée et les conditions de conservation des tissus,

    • les éventuelles utilisations des tissus, y compris les utilisations commerciales,

    • les balises visant à protéger la vie privée et les renseignements personnels des donneurs,

    • les possibilités d'identifier et de retracer les donneurs de tissus précis,

    • la façon dont l'utilisation des tissus pourrait nuire à la vie privée des donneurs.


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  1. Déclarations internationales au sujet de la protection de la vie privée et des renseignements génétiques

    Nations Unies, Déclaration universelle des droits de l'homme, 1948
    Art. 12 Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes.
    Association médicale mondiale, Déclaration d'Helsinki, 1964
    Art. 2 La mission du médecin en recherche médicale de protéger la vie, la santé, la vie privée et la dignité des êtres humains. [traduction]
    Art. 21 Le droit du sujet [de recherche] à la protection de son intégrité doit toujours être respecté. Toutes précautions doivent être prises pour respecter la vie privée du sujet, la confidentialité des données le concernant et limiter les répercussions de l'étude sur son équilibre physique et psychologique.
    Human Genome Organization, Statement on the Principled Conduct of Genetic Research, 1996
      Le comité de la Human Genome Organization qui est chargé des questions éthiques, juridiques et sociales recommande « que le respect et la protection de la vie privée contre tout accès non autorisé soient garantis par la confidentialité des renseignements génétiques. Il faut que soient formulées et instaurées, avant tout prélèvement, des règles de chiffrement des données, des formalités de contrôle de l'accès et des politiques régissant le transfert et la conservation des prélèvements et de l'information. Une attention toute spéciale devrait être accordée aux intérêts réels ou éventuels des membres de la famille ». [traduction]
    Conseil de l'Europe, Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine, 1997
    Art. 10(1) Toute personne a droit au respect de sa vie privée s'agissant des informations relatives à sa santé.
    Art. 10(2) Toute personne a le droit de connaître toute information recueillie sur sa santé. Cependant, la volonté d'une personne de ne pas être informée doit être respectée.
    UNESCO, Déclaration universelle sur le génome humain, 1997
    Art. 5(c) Le droit de chacun de décider d'être informé ou non des résultats d'un examen génétique et de ses conséquences devrait être respecté.
    Art. 7 La confidentialité des données génétiques associées à une personne identifiable, conservées ou traitées à des fins de recherche ou dans tout autre but, doit être protégée dans les conditions prévues par la loi.
    CIOMS, Lignes directrices internationales d'éthique pour la recherche biomédicale impliquant des sujets humains, 2002
    Ligne directrice 18 Les investigateurs doivent établir un système sécurisé de protection de la confidentialité des données relatives aux sujets de recherche. Les sujets doivent être avisés des limites, juridiques ou autres, de la capacité de l'investigateur à préserver cette confidentialité et des éventuelles conséquences d'une violation de cette confidentialité.
    Association médicale mondiale, Déclaration sur les considérations éthiques concernant les bases de données de santé, 2002
    s. 1 Le droit au respect de la vie privée permet au patient de maîtriser la communication et l'utilisation des informations le concernant. L'obligation de secret professionnel du médecin assure la protection des données personnelles de santé du patient.
    Réseau de médecine génétique appliquée, Énoncé de principes sur la conduite éthique de la recherche en génétique humaine concernant des populations (Version 2003)
    Art. 4 La confiance mutuelle entre le chercheur et la population est essentielle à la notion de réciprocité. Par respect pour ce lien de confiance, le chercheur doit s'assurer de la sécurité et de la confidentialité des données concernant la population.

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1 Royaume-Uni. Comité des sciences et de la technologie de la Chambre des Communes. The Work of the Medical Research Council: Third Report of Session 2002-2003 (Rapport du comité).
2 Royaume-Uni. Ministère du Commerce et de l'Industrie. Government Response to « The Work of the Medical Research Council » Report by the House of Commons Science and Technology Select Committee (HC 132) (Réponse du gouvernement), Cm 5834, juin 2003.
3 Voir DNA Sciences Inc. Genaissance Pharmaceuticals Enters into Agreement to Acquire Assets of DNA Sciences, communiqué du 1er avril 2003; DNA Sciences Inc. Genaissance Pharmaceuticals' Acquisition of Substantially All of the Assets of DNA Sciences is Approved, 12 mai 2003.
4 Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications. Recherche sur l'opinion publique concernant la biotechnologie aux états-unis et au Canada, 8e vague de sondages, Comité des sous-ministres adjoints chargé de la coordination de la biotechnologie, Ottawa, mars 2003.
5 Pollara Research et Earnscliffe Research and Communications. Recherche sur l'opinion publique concernant les renseignements génétiques et leur protection. Comité des sous-ministres adjoints chargé de la coordination de la biotechnologie, Ottawa, mars 2003.
6 Voir par exemple : Association of American Medical Colleges, « Policy Statement on Health Data Security, Patient Privacy, and the Use of Archival Patient Materials in Research », 1999; W. Grizzle et al., « Recommended Policies for Uses of Human Tissue in Research, Education and Quality Control », Arch. Path. Lab. Med., vol. 123, 1999, p. 296; Medical Research Council, Tissus humains et prélèvements biologiques à l'usage de la recherche, Medical Research Council, Londres, 1999; Working Party of the Royal College of Pathologists and the Institute of Biomedical Science, The Retention and Stockage of Pathological Records and Archives, 2e éd., RCPATH, Londres, 1999; Working Party of the Royal College of Pathologists and the Institute of Biomedical Science, Consensus Statement of Recommended Policies for Uses of Human Tissue in Research, Education and Quality Control, RCPATH, Londres, 1999; Organisation mondiale de la santé, Proposed International Guidelines on Ethical Issues in Medical Genetics and Genetic Services, WHO/HGN/GL/ETH/98.1, 1999; Human Genome Organization, Statement on ADN Sampling: Control and Access, 1998; Association canadienne des pathologistes, « Policy Statement and Guidelines for the Ethical Use of Human Tissue in Research », Bulletin de l'ACP X, 1998; American Society of Human Genetics, « Statement on Informed Consent for Genetic Research », Am. J. Hum. Genet., vol. 59, 1996, p. 471; Clayton et al., « Informed Consent for Genetic Research on Stored Tissue Samples », JAMA, vol. 274, 1995, p. 1786; American College of Medical Geneticists, « Statement on Stockage and use of Genetic Materials », Am. J. Hum. Genet., vol. 57, 1995, p. 1499; American Society of Human Genetics, Ad Hoc Committee on DNA Technology, « DNA Banking and DNA Analysis: Points to Consider », Am. J. Hum. Genet., vol. 42, 1988, p. 781.
7 Laura M. Beskow et al. « Informed Consent for Population-Based Research Involving Genetics », JAMA, vol. 286, 2001, p. 2315; Weijer C. « Benefit Sharing and Other Protections for Communities in Genetic Research », Clin. Genet., vol. 58, 2000, p. 367; C. Weijer, G. Goldsand et E.J. Emanuel. « Protecting Communities in Research: Current Guidelines and Limits of Extrapolation », Nat Genet, no 23, 1999, p. 275; M. Deschênes, G. Cardinal, B.M. Knoppers et al. « Human Genetics Research DNA Banking and Consent: A Question of “Form”? », Clin. Genet., no 59, 2001, p. 221.
8 Charlotte H. Harrison, « Neither Moore nor the Market: Alternative Models for Compensating Contributors of Human Tissue », Am. J. L. and Med., vol. 28, 2002, p. 77; E. Richard Gold, Body Parts : Property Rights and the Ownership of Human Biological Materials, Georgetown University Press, Washington, 1996; Moe Litman et Gerald Robertson, « The Common Law Status of Genetic Material », dans Bartha Maria Knoppers (réd.), Legal Rights and Human Genetic Materia, Emond Montgomery Publications Ltd., Toronto, 1996.
9 Voir Human Genetics Commission, Inside Information: Balancing Interests in the Use of Personal Genetic Data, Human Genetics Commission, Londres, mai 2002; John A. Robertson, « Privacy Issues in Second Stage Genomics », Jurimetrics, vol. 40, 1999, p. 59; Lawrence O. Gostin et James G. Hodge, « Genetic Privacy and the Law: An End to Genetic Exceptionalism », Jurimetrics, vol. 40, 1999, p. 21; George J. Annas, « Privacy Rules for DNA Databanks: Protecting Coded “Future Diaries” », JAMA, vol. 270, 1993, p. 2346.
10 Henry T. Greely, « The Control of Genetic Research: Involving the “Groups Between” » , Hous. L. Rev., vol. 33, 1997, p. 1397; Eric T. Juengst, « Group Identity and Human Diversity: Keeping Biology Straight from Culture », Am. J. Hum. Genet., vol. 63, 1998, p. 673; H. Markel, « The Stigma of Disease: Implications of Genetic Screening », Am. J. Med., vol. 93, 1992, p. 209.
11 D. C. Wertz et J. C. Fletcher, « Ethical and Social Issues in Prenatal Sex Selection: A Survey of Geneticists in 37 Nations », Soc. Sci. Med., vol. 46, 1998, p. 255; « Western Eyes on China's Eugenics Law », Lancet, vol. 346, 1995, p. 131; D. C. Wertz, « Did Eugenics Ever Die? », Nat. Rev. Genet., vol. 3, 2002, p. 408.
12 Tom Spears, « Gene Study to Follow 30,000 Babies for Years », The Ottawa Citizen, 7 février 2003.
13 William W. Lowrance, « The Promise of Human Genetic Databases: High Ethical as well as Scientific Standards are Needed », BMJ, vol. 322, 2001, p. 1009; D. Blumenthal, « Ethics Issues in Academic–Industry Relationships », Acad. Med., vol. 71, 1996, p. 1291.
14 Wolfgang Edelstein, « The Responsible Practice of Science: Remarks About the Cross Pressures of Scientific Progress and the Ethics of Research », décembre 1998.
15 Supra, note 1 (Rapport du comité, recommandation 31).
16 Ibid.
17 17 Les échantillons biologiques humains entreposés peuvent servir, entre autres, à des utilisations cliniques, à l'élaboration d'outils de recherche (p. ex., les lignées cellulaires, les gènes clonés, les marqueurs de gènes, les protéines purifiées ou l'ADN isolé), au développement de produits commercialisables servant au diagnostic ou à la thérapie, au contrôle de la qualité des soins de santé et à l'indentification médico-légale.
18 Timothy Caulfield, Ross E. G. Upshur et Abdallah Daar, « DNA Databanks and Consent: A Suggested Policy Option Involving an Authorization Model », BMC Medical Ethics, vol. 4, 2003, p.1; voir aussi Henry T. Greely, « Breaking the Stalemate: A Prospective Regulatory Framework for Unforeseen Research Uses of Human Tissue Samples and Health Information », Wake Forest L. Rev., vol. 34, 1999, p. 737.
19 Pour obtenir une comparaison récente de plusieurs biobanques, voir Melissa A. Austin, Sarah Harding et Courtney McElroy, « Genebanks: A Comparison of Eight Proposed International Genetic Databases », Community Genetics, vol. 6, 2003, p. 37.
20 Conseil de recherches médicales du Canada, Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada et Conseil de recherches en sciences humaines du Canada, Énoncé de politique des trois conseils : éthique de la recherche avec des êtres humains, Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, Ottawa, 1998.
21 Comité d'éthique du projet HUGO, « HUGO Statement on Benefit-Sharing », Genome Digest, vol. 6, 2000, p. 7-9.
22 Supra, note 1 (Rapport du comité).
23 Ibid. para. 58.
24 Ibid. para. 57.
25 Ibid. para. 65.
26 Supra, note 2 (Réponse du gouvernement).
27 Eliot Marshall, « Company Plans to Bank Human ADN Profiles », Science, vol. 291, 2001, p. 575. Cet article porte sur la stratégie commerciale de la First Genetic Trust Inc., qui se voit elle-même comme « un intermédiaire entre les patients et les chercheurs ». Des particuliers permettent à la société de stocker leurs renseignements génétiques dans une base de données confidentielles et de les faire servir à la recherche clinique. Les intéressés peuvent consulter le site Web de la First Genetic. Une autre entreprise, Ardais Inc., use d'une stratégie commerciale semblable.
28 Mary R. Anderlik, « Commercial Biobanks and Genetic Research: Banking Without Checks? », exposé présenté lors de la 3e Conférence internationale sur le prélèvement d'ADN, tenue à Montréal (Québec) du 5 au 8 septembre 2002.
29 Eric M. Meslin, « Raising the Bar in Research Ethics: Traditional Obligations are Not Enough », Postgraduate Medicine, vol. 112, 2002, p. 5. 30 Ibid. Voir aussi « Balancing Privacy and Biotechnology », éditorial de Business Week, 15 avril 2002.
31 Dana Hawkins, « Keeping Secrets », U.S. News and World Report, 12 février 2002; voir aussi Michael J. Trebilcock et Edward M. Iacobucci, « Privatization and Accountability », Harvard L. Rev., vol. 116, 2003, p. 1422. Les auteurs font remarquer que, trop souvent, les gens en viennent à la conclusion erronée que les défauts du secteur privé justifient le besoin d'interventions de la part du secteur public. Selon eux, l'analyse des mérites de l'action de l'un ou l'autre secteur doit rester relative, et ils laissent entendre que les insuffisances du secteur privé ne sont rien en comparaison des défauts du secteur public comme prestateur de services ou superviseur d'intervenants du secteur privé.
32 Supra, note 3 (DNA Sciences Inc.) accessible en ligne. La société DNA Sciences Inc., constituée en 1998, avait son siège social à Fremont, en Californie.
33 Ibid., accessible en ligne.
34 Ibid., accessible en ligne.
35 Ibid., accessible en ligne.
36 Ibid., « The Gene Trust Bill of Rights », accessible en ligne à DNA Sciences.
37 Ibid.
38 Ibid., «  DNA Sciences Privacy Policy », version 4, mise à jour le 11-5-02.
39 Communication personnelle de Melodie Henderson, vice-présidente, Intellectual Capital and Licensing, Genaissance Pharmaceuticals, Inc.
40 Supra, note 3. Voir DNA Sciences, « Genaissance Pharmaceuticals Enters into Agreement to Acquire Assets of DNA Sciences », communiqué de presse du 1er avril 2003; DNA Sciences, « Genaissance Pharmaceuticals' Acquisition of Substantially All of the Assets of ADN Sciences is Approved », 12 mai 2003.
41 Supra, note 39, communication personnelle de Melodie Henderson.
42 Supra, note 9, « Inside information », mai 2002. Aussi Human Genetics Commission, Public attitudes to human genetic information, People's Panel Quantitative Study, 2001, et Report to the Human Genetics Commission on Public Attitudes to the Uses of Human Genetic Information, People Science and Policy Ltd., 2000, et UK Biobank : A question of trust, A consultation exploring and addressing questions of public trust, 2002.
43 Supra, note 1, Rapport du comité.
44 Québec. Commission de l'éthique de la science et de la technologie, Les enjeux éthiques des banques d'information génétique : pour un encadrement démocratique et responsable, 2003.
45 Supra, note 20, article 1.5.
46 S.D. Warren et L.D. Brandeis, « The Right to Privacy », Harv. L. Rev., vol. 4, 1890, p. 193.
47 D. Feldman, Civil Liberties and Human Rights in England and Wales, Clarendon, Oxford, 1993, p. 399 : « [privacy] … is autonomy itself, the freedom to pursue one's own objectives and life-style and to enjoy personal space, which is the fundamental justification for privacy rights ».
48 Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, ou annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c. 11.
49 Ibid. Voir aussi la Déclaration universelle des droits de l'homme, résolution 217 de l'A.G., document A/810 de l'ONU, 1948, article 12 : « Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes ». Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques contient une disposition semblable et il est exécutoire par les parties signataires, dont le Canada; selon l'article 17 du Pacte : « Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes illégales à son honneur et à sa réputation ». Parmi les autres instruments internationaux faisant état du droit à la vie privée, il faut mentionner la Convention relative aux droits de l'enfant, rés. de l'A.G. de l'ONU 44/25, 1989, art. 16., et la Convention européenne des droits de l'homme, 213 RTNU 221, art. 8, 1955.
50 R c. Morgentaler, [1988] 1 R.C.S. 30.
51 Ontario AIDS Society c. Ontario (1995), 25 O.R. (3d) 388, appel rejeté (1996), 31 O.R. (3d) 798, refus de l'autorisation d'en appeler à la Cour suprême du Canada, [1997] S.C.C.A. No. 33.
52 R. c. Dyment, [1988] 2 R.C.S. 417.
53 Voir : Re Inquiry into Confidentiality of Health Records in Ontario (1979), 98 D.L.R. (3d) 704 (Ont. C.A.), (1981), 38 N.R. 588 (C.S.C.); Canadian AIDS Society c. Ontario (1995), 25 O.R. (3d) 388 (Gen. Div.); R. c. Osolin (1993), 109 D.L.R. (4e) 478 (C.S.C.); R c. O'Connor (1995), 130 D.L.R. (4e) 235 (C.S.C.), et A. (L.L.) c. B.(A.) (1995), 130 D.L.R. (4e) 422 (C.S.C.). Relativement à la nature fiduciaire de la relation médecin-patient, voir McInerney c. MacDonald (1992), 93 D.L.R. (4e) 415 (C.S.C.).
54 Association médicale canadienne, Code de déontologie, Journal de l'Association médicale canadienne, vol. 155, no 8, 1996, p. 1176A. Le médecin est tenu de « (traduction) respecter le droit du patient à la confidentialité sauf dans les cas où ce droit entraînerait un risque important de dommages substantiels à autrui ou au patient lui-même si celui-ci est incapable; dans de tels cas, le médecin est tenu de prendre toutes les mesures raisonnables pour informer le patient du fait que la confidentialité sera violée ».
55 Peters-Brown c. Regina District Health Board, [1995] S.J. No. 60 (Cour du Banc de la Reine de la Saskatchewan).
56 (1990), 69 D.L.R. (4th) 755, p. 757-8.
57 Supra, note 53 McInerney.
58 Voir aussi Norberg c. Wynrib, (1992) 92 D.L.R. (4e) 449 (C. S.C.); Henderson c. Johnston (1956), 5 D.L.R. (2d) 524 (Haute Cour de justice de l'Ontario); et Cox c. Ordre des optométristes de l’Ontario (1988), 65 O.R. 461 (Haute Cour de justice de l'Ontario).
59 Moe Litman et Lorraine Sheremeta, « The Report of the Committee of Inquiry on the Case Involving Dr. Nancy Olivieri : A Fiduciary Law Perspective », Health L. Rev., vol. 10, no 3, 2002.
60 Health Information Act, Revised Statutes of Alberta 2000, c. H-5, art. 27.
61 Ibid., alinéa 35(1)m).
62 Tarasoff c. Regents of the University of California, 551 p. 2d 334 (Cal. 1976).
63 Voir aussi, toutefois, Wenden c. Trikha (1993), 14 C.C.L.T. (2d) 225 (Alta. C.A.).
64 Voir, par exemple, Pittman Estate c. Bain (1994), 112 D.L.R. (4th) 257 (Ont. Gen. Div). Dans cette affaire, l'épouse d'un patient ayant contracté le VIH à l'occasion d'une transfusion sanguine a recouvré des dommages-intérêts auprès de la Société canadienne de la Croix-Rouge, de l'hôpital et de son médecin de famille, parce que son mari n'avait pas été informé du fait qu'on lui avait transfusé du sang contaminé. Cette cause appuie indirectement le principe selon lequel, dans des circonstances exceptionnelles, le médecin est tenu de prévenir la ou le partenaire de son patient du risque d'une infection par le VIH, même si cette obligation implique la divulgation de renseignements confidentiels sans le consentement du patient, et un manquement à ce devoir pourra rendre le médecin passible de dommages. Voir aussi MacPhail c. Desrosiers, [1998] N.S.J. No. 353 (QL) (C.A.), cause dans laquelle l'accusé, un médecin exerçant dans une clinique d'interruption de grossesse, a été tenu responsable d'un accident d'automobile causé par une femme qui venait de sortir de la clinique après avoir subi un avortement.
65 Supra, note 53, McInerney, p. 154 : (traduction) Le droit [à la confidentialité] est absolu à moins que des raisons d'une importance primordiale n'autorisent une dérogation. Il peut y avoir des cas, par exemple, où des raisons liées à la sécurité d'individus ou du public, personnes physiques ou morales, seraient suffisamment impérieuses pour annuler ou restreindre l'obligation prima facie imposée par la relation de confidentialité.
66 Supra, note 60. L'alinéa 35(1)m) permet la divulgation de renseignements médicaux confidentiels « à quiconque si le détenteur des renseignements croit, pour des motifs raisonnables, que la divulgation empêchera ou atténuera au minimum un danger imminent pour la vie ou la santé d'une autre personne, quelle qu'elle soit ». (traduction)
67 Association médicale canadienne, Code de déontologie, Ottawa, 1996. Le Code permet de divulguer des renseignements confidentiels s'il y a un risque important pour autrui.
68 Jurisprudence pertinente : Tarasoff c. Regents of University of California, 551 p. 2d 334 (Cal., 1976) et W. c. Egdell, [1990] 2 W.L.R. 471 (C.A.)
69 B. Knoppers et R. Chadwick, « The Human Genome Project : Under an International Ethical Microscope », Science, vol. 265, 1995, p. 2033.
70 Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques, S.R.C. 2000, ch. 5.
71 Ibid., art. 3.
72 Supra, note 70, alinéas 7(2)c) et 7(3)f).
73 Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, S.R.Q., ch. P-39.1.
74 Projet de loi 44, Personal Information Protection Act, 3e Session du 25e Parlement de l'Alberta, 2003 (première lecture le 14 mai 2003).
75 Projet de loi 38, Personal Information Protection Act, 4e Session du 37e Parlement de la Colombie-Britannique, 2003 (première lecture le 30 avril 2003).
76 Supra, note 1 (Rapport du comité, recommandation 39). Voir l'annexe B des présentes.
77 Halushka c. University of Saskatchewan (1965), 53 D.L.R. (2d) 436, p. 443-44.
78 Supra, note 60, art. 48-55.
79 Supra, note 9 (Information privilégiée).
80 Supra, note 18 (Caulfield, Upshur et Daar).
81 Code civil du Québec, S.Q., 1991, ch. 64, art. 21.
82 Ellen I. Picard et Gerald B. Robertson, Legal Liability of Doctors and Hospitals in Canada, Carswell, Scarborough, 1996, p. 90-92; Kathleen Cranley Glass et Trudo Lemmens, « Research Involving Humans », dans Jocelyn Downie, Timothy Caulfield et Colleen Flood (réd.), Canadian Health Law and Policy, 2e éd., Butterworths, Markham, 2002, p. 458.
83 Supra, note 20, article 2.6.
84 Timothy Caufield et Tim Outerbridge, « DNA Databanks, Public Opinion and the Law », Clin. Invest. Med., vol. 25, 2002, p. 252.
85 Lorraine Sheremeta et Bartha Maria Knoppers, Beyond the Rhetoric : Population Genetics and Benefit-Sharing, à paraître.
86 The Governance of Health Research Involving Human Subjects. Résumé.
87 Supra, note 1.

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    Création: 2006-07-07
Révision: 2006-08-02
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