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Comité consultatif canadien de la biotechnologie
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Améliorer la réglementation des aliments génétiquement modifiés et des autres aliments nouveaux au Canada - Rapport provisoire

Table des matières

Résumé

Introduction

Organisation et processus de consultation

Aliments GM, autres aliments nouveaux et système de réglementation canadien
Avantages et préoccupations
Évaluation de la salubrité des aliments
Système de réglementation canadien
Incidences des aliments futurs sur le système de réglementation

Contexte éthique

Enjeux clés de la réglementation des aliments GM

Thème 1 : Régie judicieuse
Enjeu 1 – Transparence
Enjeu 2 – Séparation et indépendance des fonctions de réglementation
Enjeu 3 – Mesures de sécurité durant les activités de recherche-développement
Enjeu 4 – Possibilités de participation du public
Enjeu 5 – Surveillance des risques et des avantages après la mise en marché
Enjeu 6 – Capacités et ressources du système de réglementation
Recommandations provisoires concernant la régie judicieuse
Thème 2 : Information et choix
Enjeu 7 – Prestation de l’information nécessaire à des choix éclairés
Enjeu 8 – Étiquetage
Recommandations provisoires concernant l’information et le choix
Thème 3 : Considérations sociales et éthiques
Enjeu 9 – Bonne intendance de l’environnement
Enjeu 10 – Considérations générales d’ordre social et éthique
Recommandations provisoires concernant les considérations sociales et éthiques
Voies proposées pour aller de l’avant
Améliorer le système fédéral de réglementation des aliments
Instaurer une politique alimentaire nationale
Prochaines étapes
Annexes
A – Membres du Comité consultatif canadien de la biotechnologie
B – Publications du CCCB, rapports commandés et documents connexes
C – Retours d’information au sujet du contexte éthique qui convient
D – Recommandations du groupe d’experts de la Société royale du Canada
E – L’avenir de la biotechnologie alimentaire

Résumé

Préambule

Le système actuel de réglementation des aliments au Canada atteint son but premier, celui de garantir la salubrité des approvisionnements en vivres au pays. Compte tenu du rythme rapide de la création de produits alimentaires nouveaux issus de la modification génétique des végétaux et des animaux, les consommateurs se préoccupent de plus en plus de la capacité du système de réglementation à ne pas se laisser dépasser par les découvertes dans ce domaine.

Le présent document est un rapport provisoire sur la réglementation des aliments génétiquement modifiés (GM) adressé au gouvernement du Canada par le Comité consultatif canadien de la biotechnologie (CCCB). Le rapport porte sur les deux premières parties d’un projet en trois étapes que le CCCB a entrepris sur ce sujet de grande importance. Le projet en question a pour objectif principal de déterminer les améliorations à apporter à la structure et à la fonction du système de réglementation afin de le rendre apte à relever les défis actuels et futurs.

La partie I du projet, entamée pendant l’été 2000, consistait à recueillir et à analyser les données existantes sur les dimensions réglementaires, sociales, économiques, éthiques, juridiques et environnementales des aliments GM. Le CCCB a confié à des organismes de l’extérieur la tâche d’élaborer un certain nombre de documents de base et il a également étudié les rapports d’autres groupes d’experts, dont celui Group d’Experts de la Société royale du Canada sur l’avenir de la biotechnologie alimentaire.

La partie II comportait trois activités principales conçues dans le but de rassembler et d’analyser les opinions des Canadiennes et des Canadiens au sujet de la réglementation des aliments GM. La première de ces activités a eu lieu en mars 2001, lorsque le CCCB a diffusé un document de consultation et invité les Canadiens à faire part de leurs commentaires et observations. Dans le cadre de la deuxième activité principale, en avril 2001, le CCCB a tenu une série d’ateliers à intervenants multiples dans cinq villes canadiennes. Les représentants de certains organismes non gouvernementaux principalement voués à la protection de l’environnement ont refusé de participer aux ateliers, ce qui a amoindri d’autant la contribution de ce segment du public au débat. La troisième activité, en mai 2001, a consisté à examiner des rapports de sondages d’opinion publique sur les aliments GM. Des comptes rendus de toutes ces activités sont affichés au site Web du CCCB.

La partie III du projet sur les aliments GM commence avec la diffusion du présent rapport provisoire. Le CCCB voudrait obtenir des réactions sur ce rapport et acceptera des commentaires jusqu’au 31 janvier 2002. Lorsque la partie III se terminera, après la période de réception des commentaires, le CCCB présentera son rapport final au gouvernement du Canada.

Pour obtenir des renseignements ou documents supplémentaires sur les activités du CCCB, prière de passer par le site Web du Comité, à www.cbac-cccb.ca, ou par sa ligne téléphonique sans frais au 1 866 748-2222, ou au 1 866 835-5380 pour le service TTY-ATS.

Observations, constatations et recommandations provisoires

Le présent rapport provisoire commence par la description du contexte dans lequel s’inscrit le projet du CCCB sur les aliments GM et de son déroulement. Viennent ensuite un aperçu du système canadien de réglementation des aliments GM et un coup d’oeil sur le cadre éthique au sein duquel le CCCB a abordé les grands enjeux pertinents et importants pour la société canadienne d’aujourd’hui.

L’appellation « aliments GM » désigne généralement les aliments produits à partir de végétaux et d’animaux modifiés génétiquement à l’aide de la technologie de l’ADN recombinant. Comme nos délibérations l’ont vite révélé, même si certains aspects de la réglementation des aliments concernent spécifiquement les aliments GM (par exemple, certains éléments de l’évaluation des risques), un bon nombre des questions en cause et plusieurs de nos observations et de nos recommandations s’appliquent à toutes les cultures vivrières et à tous les végétaux et animaux dotés de caractères nouveaux. De fait, le système de réglementation canadien inscrit les aliments GM dans une vaste catégorie englobant tous les aliments nouveaux. Nous adhérons à cette démarche globale, et c’est pourquoi plusieurs de nos recommandations provisoires sont formulées dans le contexte général des aliments nouveaux. En outre, dans certains cas, notre analyse et nos recommandations sont susceptibles d’incidences sur certains attributs généraux du système de réglementation des aliments, de la politique alimentaire et des règlements environnementaux. Nos recommandations s’efforcent aussi de prévoir les situations susceptibles de justifier une application de portée plus vaste.

Les analyses, les consultations et les recommandations provisoires du CCCB s’articulent autour des 10 enjeux suivants :

  • la transparence;
  • la séparation et l’indépendance des fonctions de réglementation;
  • les mesures de sécurité durant les activités de recherche-développement;
  • les possibilités de participation du public;
  • la surveillance des risques et des avantages après la mise en marché;
  • les capacités et les ressources du système de réglementation;
  • la prestation de l’information;
  • l’étiquetage;
  • la bonne intendance de l’environnement;
  • les considérations générales d’ordre social et éthique.

Ces enjeux sont abordés en fonction de trois thèmes dominants, c’est-à-dire :

  • une régie judicieuse;
  • l’information et le choix;
  • les considérations sociales et éthiques.

Les idées actuelles du CCCB au sujet des aliments GM se retrouvent dans les recommandations provisoires, dont 5 sont de nature générale et 24 concernent des points particuliers. Les recommandations visent un certain nombre d’attributs de la structure et du fonctionnement du système de réglementation ainsi que quelques défis clés ayant trait à l’information du public, au choix éclairé et à la bonne intendance de l’environnement. Le présent rapport définit également un sixième centre d’intérêt dans le cadre duquel le CCCB se propose, à la partie III du projet, d’amasser des connaissances et d’élaborer des recommandations touchant les questions sociales et éthiques liées à la réglementation des aliments GM.

Les recommandations provisoires présentées ci-après correspondent aux valeurs et principes élémentaires propres à la protection de la santé et de l’environnement; à l’autonomie personnelle; à la transparence; à l’intégrité et à la reddition de comptes du système de réglementation; et à la pérennité de la production vivrière. Nous sommes convaincus que la compréhension des 10 enjeux principaux et la mise en oeuvre effective des recommandations connexes, une fois terminées, permettront d’en arriver à un système de réglementation des aliments qui sera mieux axé sur l’obligation de rendre compte, la connaissance et la prudence.

Régie judicieuse


1. Structure, organisation et fonctionnement du système fédéral de réglementation des aliments

Observations: Le système fédéral de réglementation des aliments s’appuie sur un certain nombre d’organes de réglementation dont quelques-uns ont un rôle plus actif en regard des enjeux relatif aux aliments GM et aux autres aliments nouveaux. Tous ces organes opèrent en interaction mutuelle, mais sans véritable intégration. Au sein de sa propre sphère d’activité spécialisée, chacun d’entre eux s’occupe d’enjeux et de préoccupations similaires, mais, en général, l’action n’est pas concertée et n’a pas toute la transparence voulue. Santé Canada et l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) fonctionnent en collaboration plus étroite que les autres éléments du système, mais sans coordination efficace apparente avec les autres éléments. Aucun dirigeant ni porteparole n’est affecté exclusivement aux questions de salubrité alimentaire au niveau fédéral, que ce soit pour les aliments GM, les autres aliments nouveaux ou les produits alimentaires en général. Les aliments GM et autres aliments nouveaux ne sont actuellement qu’une petite composante de l’ensemble des systèmes d’assurance de la salubrité des aliments, mais la situation pourrait changer sous peu. La mesure dans laquelle la fonction de réglementation garde son indépendance par rapport aux activités gouvernementales de promotion de ces aliments reste mal définie.

Recommandation provisoire 1: Le CCCB recommande au gouvernement d’améliorer la structure, l’organisation et le fonctionnement du système fédéral de réglementation des aliments GM et des autres aliments nouveaux; d’instaurer une série de mesures visant à systématiser et à intégrer plus étroitement les divers organes fédéraux de réglementation; et d’éclaircir la question de l’indépendance de la fonction de réglementation par rapport aux activités gouvernementales de promotion. Il recommande aussi d’effectuer une évaluation des avantages à élargir la portée de ces recommandations pour englober le système fédéral de réglementation des aliments.


Nous recommandons expressément les mesures suivantes :

1.1 Nommer un responsable principal en matière de salubrité des aliments GM et des autres aliments nouveaux. Celui-ci sera la référence unique et le porte-parole du gouvernement fédéral en ce qui a trait à toutes les questions relatives aux aliments GM et autres aliments nouveaux, pour ce qui est de protéger la santé humaine et l’environnement, et il coordonnera les activités des différents organes de réglementation. Ce fonctionnaire présidera un nouveau comité des sous-ministres adjoints (SMA) sur la réglementation de la salubrité des aliments GM et autres aliments nouveaux (voir l’article 1.2 ci-dessous) et il sera désigné membre d’office de tous les comités décisionnels des organes de réglementation qui composent le système fédéral de réglementation des aliments.

1.2 Créer un comité de niveau SMA et le charger de surveiller la réglementation de la salubrité des aliments GM et autres aliments nouveaux au Canada. Le comité sera composé de fonctionnaires attachés aux organes fédéraux de réglementation responsable de l’évaluation, de l’approbation et de l’homologation des produits de la biotechnologie et des activités d’inspection et d’application des règlements (il devrait donc compter au moins des représentants de Santé Canada, de l’ACIA, d’Environnement Canada et de Pêches et Océans Canada). Il assurerait l’efficacité de la coordination et des communications entre les ministères et les organismes, ainsi que les activités de planification et d’analyse. Voici quelles seraient les fonctions précises de ce comité :

  • Coordonner l’évaluation des produits et communiquer les résultats des évaluations ainsi que les décisions proposées et prises en matière de réglementation.
  • Coordonner les activités et les instruments propres aux communications axées sur des auditoires externes.
  • Combler les lacunes et éliminer les chevauchements inefficaces dans le système de réglementation.
  • Évaluer la pertinence des lignes directrices qui régissent actuellement les travaux de nature expérimentale faisant appel à l’ADN recombinant et aux autres formes de modification génétique. Cette fonction viserait à déterminer la capacité des lignes directrices actuelles à garantir la sécurité pendant les activités de recherchedéveloppement; la mesure dans laquelle celles-ci sont mises en oeuvre par les chercheurs des secteurs public et privé; et le besoin éventuel de mesures supplémentaires de protection de la santé et de l’environnement, notamment par un examen plus minutieux grâce au système réglementaire ou à l’établissement d’une norme nationale unique pour la recherchedéveloppement.
  • Gérer les compétences scientifiques et techniques au sein de l’administration fédérale afin de veiller à leur maintien et à leur renforcement, selon les besoins, et à leur adaptation aux besoins futurs de réglementation, en examinant périodiquement les résultats des recherches et les tendances du marché.
  • Élaborer et publier des modes opératoires normalisés qui expliquent clairement la délégation des pouvoirs décisionnels; les stratégies en place pour mettre les fonctionnaires à l’abri de toute influence déplacée; les procédures et la justification relatives à l’embauche de spécialistes et de comités d’experts non gouvernementaux dans le cadre de l’exécution du processus de réglementation; les politiques concernant l’élaboration des décisions provisoires et leur soumission à un examen par le public avant la prise de décision finale; et les modalités de fonctionnement des comités décisionnels et des autres éléments du processus d’examen interne.
  • Étudier les possibilités d’améliorer sans cesse les activités d’évaluation et de gestion des risques et de rehausser les capacités d’inspection et de mise à exécution des règlements au regard de produits relativement plus complexes de nouvelle génération. Cette fonction devrait s’exercer dans le but d’assurer la surveillance régulière de la conformité aux conditions d’approbation touchant la production de végétaux GM et d’aliments nouveaux.

1.3 Garantir l’indépendance, dans l’administration fédérale, des fonctions de réglementation par rapport aux fonctions de promotion de l’industrie et du commerce. Le CCCB recommande au gouvernement d’examiner soigneusement ses rouages internes et les rapports qu’il entretient avec les industriels et les commerçants, et de les modifier au besoin. Il s’agirait d’évaluer tous les messages et les documents de communication en portant une attention particulière à la participation des personnes chargées de la réglementation lors de la négociation des politiques et des règles commerciales internationales. Ces mesures devraient être prises dans le but de veiller à ce que les fonctions de réglementation s’exercent avec le plus haut degré possible d’intégrité et d’autonomie; d’éviter d’aggraver la perception d’un conflit de mandat; et de faire en sorte que les fonctionnaires s’occupant de réglementation assument la fonction qui leur revient dans les activités internationales. Quant aux organes de réglementation qui n’ont pas encore de comité permanent chargé d’examiner en détail toutes les décisions proposées relativement aux aliments GM et autres aliments nouveaux, le CCCB juge essentiel qu’ils se dotent d’un tel comité.

1.4 Demander au vérificateur général de voir à la surveillance et de faire un rapport public sur les activités des organes de réglementation participant aux évaluations et aux décisions relatives aux produits alimentaires vendus au Canada, et de contrôler tout spécialement l’indépendance des fonctions de réglementation et l’efficacité des modes opératoires normalisés.


2. Évaluation des effets à long terme sur la santé et l’environnement

Observations: Le gouvernement fédéral effectue des recherches sur les aliments GM, tout comme le font de nombreux pays étrangers, mais il manque un certain nombre d’outils et de programmes pour évaluer et prévoir efficacement les effets à long terme des aliments GM et autres aliments nouveaux sur la santé et l’environnement.

Recommandation provisoire 2 : Le CCCB recommande au gouvernement fédéral de lancer un programme important de surveillance des effets à long terme des aliments GM et autres aliments nouveaux sur la santé et l’environnement.


La mise en oeuvre de cette recommandation fait appel aux mesures suivantes :

2.1 Exiger que le processus d’approbation des produits nouveaux comprenne des méthodes efficaces de détection des produits transgéniques.

2.2 Rassembler des données sur la consommation alimentaire afin d’améliorer le processus d’évaluation des risques. Une meilleure compréhension des possibilités d’exposition à certains aliments aiderait à cerner les populations qui courent peut-être des risques supérieurs à la normale et à surveiller les effets à long terme de certaines habitudes de consommation alimentaire.

2.3 Veiller à ce que les nouveaux renseignements scientifiques ou techniques soient pris en compte dans des délais raisonnables. Pour atteindre cet objectif, le gouvernement pourrait intégrer au processus d’approbation des produits une échéance prédéterminée à laquelle il faudrait procéder à une réévaluation de toutes les données nouvelles concernant le produit ou l’estimation des risques relatifs au produit.

2.4 Lancer un programme exhaustif et à long terme de recherche sur les organismes GM faisant déjà partie de la chaîne alimentaire humaine. L’exécution de cette tâche permettrait d’enrichir les connaissances scientifiques au sujet des dangers et des avantages que ces organismes représentent pour la santé et l’environnement. Dans ce domaine, le Canada devrait remplir son rôle de chef de file mondial en étudiant les cultures dont il est un des principaux producteurs, par exemple le colza canola, le soja d’identité préservée, le blé dur, le lin et l’orge brassicole. Il faudrait aussi collaborer avec les autres pays et les tenir informés, et mettre sur pied des programmes visant la collecte et la diffusion de renseignements semblables sur les autres aliments nouveaux.


3. Transparence

Observations: L’administration fédérale veut donner plus de transparence à ses fonctions de réglementation, mais elle se heurte à des contraintes et peut-être aussi à des entraves d’ordre juridique. Le gouvernement ne met pas suffisamment l’accent sur la transparence. La communication des renseignements sur la réglementation des aliments GM et autres aliments nouveaux n’est pas encore très efficace.

Recommandation provisoire 3: Le CCCB recommande au gouvernement fédéral de rehausser son efficacité et sa transparence en faisant connaître au public tous les attributs du système de réglementation des aliments GM et autres aliments nouveaux, y compris les fondements scientifiques des décisions réglementaires reliées à la santé et à la sécurité de l’être humain et de l’environnement.


Nous recommandons les mesures suivantes :

Continuer de faire participer la population canadienne à l’élaboration des lois, des règlements, des politiques et des programmes relatifs au système fédéral de réglementation des aliments.

3.2 Améliorer l’information et les communications au sujet du système fédéral de réglementation des aliments. Pour ce faire, il faudrait diffuser des arbres de décision qui décrivent clairement les autorités réglementaires, les centres de responsabilité, les lois et activités pertinentes, les étapes de l’évaluation des risques et du processus décisionnel, la progression au sein du système de réglementation, les schémas chronologiques, les mécanismes de règlement des conflits d’opinion et les possibilités de participation du public à diverses étapes.

3.3 Tenir un registre public et facilement accessible de tous les produits alimentaires GM et autres aliments nouveaux qui sont en cours d’examen, ainsi que de leur stade d’évaluation.

3.4 Diffuser systématiquement, au moyen de documents publiés, les résultats des évaluations des aliments GM et autres aliments nouveaux ainsi que les décisions réglementaires proposées. La diffusion serait suivie d’une période de 45 jours pendant laquelle le public pourrait faire part de ses commentaires sur les propositions, après quoi viendrait la publication d’une décision finale, modifiée au besoin en fonction des commentaires reçus. (Les sujets essentiels à traiter dans ces documents sont énumérés plus loin dans le présent rapport.)

3.5 Mettre à la disposition du public les données scientifiques et techniques détaillées examinées par le gouvernement au moment d’évaluer les aliments GM et autres aliments nouveaux afin de déterminer la salubrité et l’innocuité de ces produits pour la santé humaine et l’environnement. À cette fin, il faudrait procéder à un examen en vue d’assurer l’interprétation exacte des dispositions actuelles de la Loi sur l’accès à l’information. Il faudrait aussi étudier la possibilité d’apporter les modifications voulues aux lois et règlements en vigueur. Par ailleurs, l’obligation d’informer ne devrait pas s’appliquer à des renseignements tels que le mode d’élaboration et de fabrication du produit, car cela compromettrait gravement la compétitivité de l’entreprise en cause. De plus :

  • Il faudrait donner accès à des renseignements sur les produits vendus au Canada et sur ceux dont la vente fait l’objet d’une demande d’approbation.
  • Les dispositions actuelles de la Loi sur l’accès à l’information ne devraient pas être interprétées comme exigeant que le gouvernement garde confidentielles les données techniques ou scientifiques que leur propriétaire n’a pas marquées d’une stricte confidentialité, par exemple si les données sont déjà publiées ou mises à la disposition du public dans un pays où le produit a déjà été approuvé.
  • Il faudrait envisager d’apporter aux lois et règlements pertinents les modifications nécessaires à la diffusion des données.

3.6 Réexaminer la dérive des pollens ainsi que les zones tampons créées actuellement dans le cadre des essais au champ de culture de végétaux GM et d’autres plantes à caractères nouveaux. Toutes les demandes d’approbation concernant des végétaux à caractères nouveaux devraient obligatoirement contenir des renseignements sur la dérive des pollens. Les cultivateurs dont les champs sont situés dans un rayon de cinq kilomètres du lieu d’essais au champ de cultures GM devraient avoir accès, sur demande, à des renseignements détaillés afin de pouvoir protéger leurs propres cultures. Mis à part ces cultivateurs, il ne faudrait pas divulguer l’endroit exact de ces études sur le terrain, en raison du risque de vandalisme. Il faudra mener d’autres études pour arriver à mieux comprendre les caractéristiques et les risques éventuels des produits GM.

3.7 Publier chaque année des renseignements concernant les programmes d’inspection gouvernementaux, la conformité aux mesures touchant les produits GM, la fréquence des cas de non-conformité et les mesures mises en oeuvre pour corriger la non-conformité.

3.8 Publier chaque année des renseignements concernant les programmes de recherche gouvernementaux et les résultats des recherches sur les dimensions sanitaires et environnementales des produits GM, qu’il s’agisse d’aliments pour les humains ou les animaux, de végétaux ou d’autres produits nouveaux.

Information et choix


4. Information et choix éclairé

Observations: Les Canadiens veulent avoir facilement accès à des renseignements fiables et complets au sujet des produits alimentaires, y compris les aliments GM et autres aliments nouveaux. Les sources actuelles d’information font l’objet de critiques parce que les gens estiment que les données mises à leur disposition sont douteuses, incomplètes, trop techniques et généralement peu adaptées au grand public. Les Canadiens veulent aussi pouvoir choisir eux-mêmes d’acheter ou non des aliments GM. Les décisions des consommateurs peuvent être influencées par des préoccupations en matière de santé et d’environnement ainsi que par des principes, des convictions et des valeurs. À l’heure actuelle, l’étiquetage explicite est exigé pour des motifs de santé tels que la présence d’allergènes ou une modification importante de la teneur nutritive d’un aliment. Les lois en vigueur permettent l’étiquetage volontaire à condition que le contenu de l’étiquette ne soit pas trompeur. Toutefois, en l’absence d’une norme systématique et fiable d’étiquetage pour indiquer si un aliment est issu ou non de la modification génétique, il est impossible de vérifier l’exactitude d’allégations du genre « Aliment sans élément GM ». D’autres pays sont en voie d’adopter diverses politiques d’étiquetage obligatoire ou volontaire.

Recommandation provisoire 4: Le CCCB recommande au gouvernement fédéral d’instaurer des mécanismes qui permettront aux Canadiens de faire des choix éclairés relativement aux aliments qu’ils consomment. Le gouvernement devrait accroître les ressources existantes en vue d’offrir aux Canadiens un service centralisé d’information exacte et complète sur les aliments GM et autres aliments nouveaux ainsi que sur le système de réglementation des aliments et les normes et règlements régissant les produits alimentaires. Le gouvernement devrait également voir à ce que soit élaborée une ligne de conduite concernant l’étiquetage des aliments comme étant génétiquement modifiés ou non, et s’assurer que cette démarche, conjuguée au service centralisé d’information, aidera effectivement et efficacement les Canadiens à prendre des décisions éclairées en matière d’alimentation.


Nous recommandons les mesures suivantes :

4.1 Mettre sur pied un service centralisé d’information qui constituera la voie principale utilisée par l’État pour donner aux Canadiens des renseignements sur les produits alimentaires en général et sur les aliments GM et autres aliments nouveaux. Ce service devrait être le fruit d’une collaboration étroite entre tous les ministères et organismes gouvernementaux s’occupant de réglementation des aliments, de recherche sur les aliments, de politique alimentaire et de protection des consommateurs. Les renseignements diffusés devraient, pour la plupart, provenir de l’administration fédérale et toujours être impartiaux. Il faudrait fonder l’organisation et le fonctionnement du service sur une stratégie globale, et les fonds consacrés aux activités gouvernementales de communication et d’information devraient appuyer cette stratégie.

4.2 Dans le cadre de la stratégie en question, élaborer des renseignements fiables qui seront utilisés par les professionnels de la santé et les autres intermédiaires de ce domaine, par exemple les médecins, le personnel infirmier, les nutritionnistes, les diététistes, les enseignants, les travailleurs communautaires, les associations de consommateurs, des groupes de la société civile et les médias.

4.3 Concevoir et instaurer un système d’étiquetage des aliments contenant des éléments GM et poursuivre les travaux visant l’adoption d’un régime international d’étiquetage.

  • Produire un ensemble de critères précis concernant l’étiquetage explicite des aliments contenant des éléments GM. Dans ce but, il convient notamment de continuer à appuyer les travaux en cours de l’Office des normes générales du Canada et du Conseil canadien de la distribution alimentaire.
  • Veiller à ce que toutes les allégations indiquées sur les étiquettes au sujet de la modification génétique soient vérifiables et s’assurer que les programmes et les techniques nécessaires soient en place pour en garantir la validité.
  • Appliquer la norme d’étiquetage de façon volontaire, du moins au départ, afin d’en vérifier la pertinence et l’efficacité, et en faire la promotion dans tout le pays de sorte que les consommateurs puissent vraiment faire des choix éclairés.
  • Continuer de collaborer avec les autres pays dans les instances internationales en vue d’élaborer une démarche mondiale commune concernant l’étiquetage explicite des aliments GM.
  • En fonction de la réussite relative de cette stratégie, et surtout si elle ne parvient pas à offrir aux Canadiens une latitude suffisante pour choisir les aliments qu’ils consomment, il faudra considérer de nouveau l’imposition d’un régime obligatoire d’étiquetage.

Considérations sociales et éthiques


5. Bonne intendance de l’environnement

Observations: Il n’existe actuellement aucune norme internationale exécutoire concernant l’évaluation environnementale des aliments GM ou autres aliments nouveaux. Des travaux sont en cours et il se fait des progrès quant à la définition de « pratiques exemplaires » dans ce domaine. Néanmoins, le CCCB est d’avis qu’il y a matière à améliorer les méthodes actuelles d’évaluation environnementale en ce qui a trait à l’étude des effets à long terme et à la mesure dans laquelle les répercussions sur les écosystèmes sont prises en compte.

Recommandation provisoire 5: Le CCCB recommande au gouvernement fédéral d’intensifier sa bonne intendance de l’environnement en ce qui touche les aliments GM, les autres aliments nouveaux et les organismes dont sont issus ces produits. Il faut lancer un programme de recherches national et exhaustif sur les effets à long terme, améliorer les évaluations environnementales et fonder l’approbation des produits sur des normes prudentes en matière de salubrité.


Nous recommandons les mesures suivantes :

5.1 Lancer un programme de recherches national, concerté et généreusement financé en vue d’enrichir les connaissances relatives aux effets à long terme sur les écosystèmes naturels, agricoles et autres, des organismes GM qui sont contenus dans les produits alimentaires nouveaux ou utilisés en production vivrière.

5.2 À courte échéance, étudier et adopter des mesures en vue d’intégrer une perspective écosystémique renforcée à l’évaluation environnementale des aliments GM et autres aliments nouveaux. Il faudrait, d’ici un an, rédiger et diffuser un rapport sur les options possibles en mettant l’accent sur la collaboration nationale et internationale en matière de recherche et sur une meilleure utilisation des compétences spécialisées en écologie.

5.3 À moyen terme, renforcer l’évaluation environnementale des aliments nouveaux et des procédés de modification génétique utilisés en production vivrière grâce à une orientation plus marquée sur l’écosystème et à un examen par les pairs des données et des schémas expérimentaux. On devrait se servir de comités indépendants pour recommander des protocoles d’essai efficaces pour chaque catégorie nouvelle d’utilisation d’organismes GM. Une telle mesure nécessitera au préalable l’élaboration d’une base solide de compétences aptes à couvrir les grandes préoccupations écologiques et environnementales telles que la persistance des organismes GM dans l’environnement; les effets des organismes GM sur les cycles biogéochimiques; les conséquences sur la biologie reproductive, par exemple la propagation des pollens, les effets nuisibles du transfert horizontal de gènes, l’amoindrissement de la biodiversité, la résistance éventuelle des ravageurs aux produits insecticides GM et les effets cumulatifs sur l’environnement.

5.4 Adopter une démarche avisée afin de garantir le respect d’une norme prudente de sécurité en ce qui touche les préoccupations écologiques et sanitaires suscitées par les aliments GM et autres aliments nouveaux. Cela ne veut pas dire qu’il faut emprunter une démarche cherchant à éliminer tous les risques. Il faudrait porter une attention toute spéciale aux risques de nature éventuellement catastrophique. Dans les cas où il convient de recourir à l’équivalence substantielle comme cadre structurant de l’évaluation des aliments nouveaux, il est nécessaire de vérifier si la composition du végétal a subi quelque modification. Parmi les possibilités dont il faudra se préoccuper, mentionnons l’introduction de dangers nouveaux dans les aliments; un accroissement des concentrations de composants intrinsèquement toxiques; la diminution de la teneur nutritive escomptée; ou l’ajout de caractères non désirés, tels que des propriétés antibiotiques, dans les écosystèmes naturels.

5.5 Évaluer les incidences et la pertinence des recommandations 5.1 à 5.4 ci-dessus en vue de leur application à l’ensemble du système de réglementation de l’environnement.


6. Autres considérations d’ordre social et éthique relatives aux aliments GM

Observations: Le débat entourant les aliments GM est polarisé sur deux fronts, celui des partisans de l’application de la biotechnologie (par exemple, la technologie de l’ADN recombinant) à la production alimentaire, et celui des opposants à cette application. La recherche d’un terrain d’entente entre les deux camps se heurte au manque d’outils convenables pour aborder et évaluer de façon systématique et continue les facteurs sociaux et éthiques qui influent sur l’acceptation d’un produit alimentaire précis par le public.

Le CCCB continuera de tenir compte des préoccupations relatives aux dangers possibles pour la santé et l’environnement, des facteurs éthiques, sociaux et économiques et des grands facteurs sociétaux qui influent sur l’acceptation des différents genres d’aliments GM. Le Comité s’attachera particulièrement à l’élaboration de méthodes permettant de tenir un dialogue valable sur ces questions et de cerner les critères et les valeurs qui entrent en ligne de compte lorsque les gens évaluent un produit alimentaire particulier.

Le CCCB est en train de concevoir, en vue de son rapport final, des principes directeurs concernant cet aspect du débat sur les aliments GM et, en particulier, un mécanisme qui servira à traiter les facteurs d’ordre social et éthique qui influent sur l’acceptation de produits alimentaires précis par le public.


Haut de la page


Introduction

Le présent document est le premier rapport que le Comité consultatif canadien de la biotechnologie (CCCB) adresse au gouvernement du Canada au sujet de la réglementation des aliments GM. Ce rapport provisoire vise un objectif à deux volets, c’est-à-dire :

  • présenter aux ministres et aux organes gouvernementaux de réglementation les recommandations provisoires du CCCB concernant la réglementation des produits alimentaires GM, ainsi que 10 grands enjeux sur ce sujet;
  • inviter les Canadiens à faire connaître leurs opinions et points de vue sur les enjeux exposés et les recommandations provisoires.

Le CCCB est un organe consultatif composé d’experts indépendants et créé par le gouvernement du Canada afin d’aider l’administration fédérale à formuler la politique officielle relative à toute une série de sujets concernant la biotechnologie1. Le CCCB prodigue ses conseils au Comité de coordination ministérielle de la biotechnologie (CCMB), lequel est composé des ministres de l’Industrie, de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, de la Santé, de l’Environnement, des Pêches et des Océans, des Ressources naturelles et du Commerce international. Le Plan de programme 2000 du CCCB décrit en détail l’organisation de ce comité ainsi que son mode de fonctionnement et son programme d’activités2. Le premier rapport annuel du CCCB présente des données plus complètes sur l’origine et les activités de ce comité, ses fonctions permanentes de surveillance et de conseil, les avis qu’il a déjà offerts au gouvernement et certaines idées d’ensemble au sujet des découvertes en biotechnologie. On peut consulter ces documents ou se les procurer en passant par le site Web du CCCB (www.cbac-cccb.ca) ou par sa ligne téléphonique sans frais au 1 866 748-2222, ou au 1 866 835-5380 pour le service TTY-ATS.

En 2000, le CCCB a mis en oeuvre un programme de recherches et de consultations au sujet de la réglementation des aliments GM au Canada. Dans le cadre de ce programme, il a produit un document de consultation décrivant les 10 enjeux sur lesquels ce dernier allait se concentrer au départ ainsi que diverses possibilités d’action pour aborder ces questions ou y trouver réponse. Le présent rapport contient les recommandations provisoires du CCCB et ajoute un élément nouveau destiné à favoriser la tenue d’un dialogue plus fructueux au sujet du caractère acceptable ou non acceptable de certains aliments GM. Le CCCB invite tous les Canadiens à lui faire part de leurs commentaires et observations sur tous les points soulevés dans le présent document.

En plus des recommandations provisoires du CCCB, ce rapport présente également :

  • une introduction au système canadien de réglementation des aliments et un aperçu de ce que recouvre l’appellation « aliments GM »;
  • le contexte éthique au sein duquel il convient d’envisager les aliments GM;
  • des précisions sur les enjeux clés que le CCCB a cernés et qui ont alimenté le débat pendant les consultations auprès des Canadiens;
  • d’autres textes d’appoint que le lecteur intéressé pourra consulter, par exemple des études de recherche et des rapports techniques pertinents commandés par le CCCB, des comptes rendus des commentaires recueillis au cours des consultations sur les aliments GM et d’autres documents complémentaires pertinents, dont le CCCB s’est servi et continue de se servir pendant ses délibérations;
  • les démarches adoptées par d’autres pays pour réglementer les aliments GM;
  • un tableau des recommandations du groupe d’experts de la Société royale du Canada sur l’avenir de la biotechnologie alimentaire;
  • une initiation à de possibles aliments GM de deuxième et de troisième générations et aux questions qu’ils font naître.

C’est tout à fait intentionnellement que le CCCB a choisi, comme objet premier de ce rapport provisoire, le système canadien de réglementation des aliments et la façon dont il traite les aliments GM. Le Comité n’en reconnaît pas moins, cependant, qu’un bon nombre des questions abordées ne se rapportent pas exclusivement aux aliments GM et peuvent s’appliquer à d’autres domaines de la politique gouvernementale. Dans la mesure où il cherche à orienter et à influencer le programme d’élaboration des politiques relatives aux aliments GM, le présent rapport agit en toute conscience du fait que le plan d’action de l’État en cette matière doit concorder avec les mesures gouvernementales touchant les autres aliments et qu’il est souhaitable que le Canada se dote d’une stratégie globale visant à assurer la salubrité et la sûreté de tous les aliments.

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Organisation et processus de consultation

La production et la commercialisation de cultures et d’aliments GM vont grandissant au Canada et partout dans le monde. Il pourrait apparaître bientôt des produits nouveaux possédant des caractères fonctionnels, nutraceutiques ou pharmaceutiques nouveaux, par exemple des vaccins comestibles et des substances biopharmaceutiques produites dans des végétaux ou des animaux. Les incidences de ces réalisations sur l’être humain, les animaux et l’environnement font l’objet d’un débat important au Canada et ailleurs dans le monde.

Le débat en question se concentre principalement sur la salubrité des aliments GM et leurs effets possibles sur l’environnement, leurs incidences d’ordre éthique, leurs conséquences pour les pays industrialisés et ceux en développement et leurs répercussions sur les relations commerciales entre pays. Il s’agit d’un débat hautement polarisé. D’un côté, il y a les gens qui nourrissent des inquiétudes quant aux aliments GM et aux autres organismes GM et qui conseillent d’approfondir les recherches et d’imposer des contrôles rigoureux avant d’approuver tout produit GM. De l’autre, on retrouve les gens convaincus que les aliments GM offrent des possibilités et des avantages immenses aux Canadiens et à tous les habitants de la planète et que les risques associés aux aliments GM ne sont ni plus ni moins graves que ceux rattachés aux aliments produits au moyen des méthodes traditionnelles. La controverse a amené un bon nombre de gouvernements, de spécialistes et d’organismes internationaux à se lancer dans des analyses de politique, des études scientifiques et des consultations publiques au sujet des dangers, des avantages, des incidences sociales et éthiques et de la réglementation des aliments GM.

Lors de sa première réunion, tenue en octobre 1999, le CCCB a désigné la réglementation des aliments GM comme une de ses priorités et cerné trois champs d’étude principaux : les fondements scientifiques des processus de réglementation; l’organisation et la régie des systèmes de réglementation; et les dimensions sociales, éthiques et juridiques des aliments GM. Il a ensuite décidé de centrer son action sur les deuxième et troisième champs d’étude lorsque, en décembre 1999, la Société royale du Canada a créé un groupe d’experts sur l’avenir de la biotechnologie alimentaire chargé de conseiller le gouvernement au sujet des capacités et ressources scientifiques du système canadien de réglementation des aliments GM. Plutôt que de reprendre le travail des experts de la Société royale, le CCCB a étudié et pris en compte leurs recommandations. L’annexe D au présent rapport contient un tableau montrant les points d’intersection entre ces recommandations et les grandes questions sur lesquelles le CCCB concentre son action.

Pendant l’été et l’automne 2000, le CCCB a entamé la partie I de son projet, en l’occurrence la collecte et l’analyse des renseignements existants sur les aspects réglementaires, sociaux, économiques, éthiques, juridiques et environnementaux des aliments GM. La tâche a comporté l’élaboration d’un certain nombre de rapports de recherche et de rapports techniques par des spécialistes de ces divers domaines, l’examen des principales études et des principaux documents parus sur ces questions et la tenue d’entretiens avec des spécialistes en réglementation et d’autres experts afin d’amasser le plus possible de connaissances au sujet de la réglementation des aliments GM au Canada. Se basant sur les résultats de ce travail, le CCCB a dégagé les 10 enjeux clés sur lesquels il allait d’abord se concentrer. L’annexe B au présent rapport contient la bibliographie des rapports commandés et les textes complémentaires consultés par le CCCB.

La partie II du projet du CCCB sur la réglementation des aliments GM, qui a commencé en mars 2001, se composait de trois volets conçus dans le but d’obtenir les commentaires et observations des Canadiens à ce sujet. Le premier volet a consisté à diffuser un document de consultation portant sur les 10 enjeux clés cernés par le CCCB et à inviter les Canadiens à faire connaître leurs points de vue sur ces questions. Le Comité a affiché le document de consultation sur son site Web. Plusieurs groupes, dont des producteurs, des associations environnementales, des associations de citoyens et de consommateurs, des professionnels de la santé et des industriels, ont aidé à diffuser le document. Le public était invité à transmettre ses commentaires par l’entremise du site Web ou de la ligne téléphonique sans frais du CCCB, ou encore par télécopieur ou par la poste.

Le second volet de la partie II a consisté à tenir une série d’ateliers à intervenants multiples dans cinq villes du pays en avril 2001. Il s’agissait d’amorcer un dialogue et de recueillir d’autres observations et opinions sur les enjeux à l’étude, de dégager les points forts et les points faibles des diverses options pour régler ces enjeux et de jauger les principes et les valeurs qui y sont liés. Les séances de consultation étaient conçues de façon à obtenir une représentation équilibrée des participants venus du grand public, de la société canadienne en général, de l’industrie, du monde de la recherche et des universités. Certains invités, surtout des membres d’organismes non gouvernementaux voués à l’environnement, ont refusé de participer, ce qui a amoindri d’autant la représentation provenant de ce secteur. La pétition présentée par ces personnes, et la réponse du CCCB, sont affichées au site Web du Comité.

En recueillant les commentaires de tous ces intervenants, le CCCB cherchait aussi à mieux comprendre les préoccupations et les préférences de la population canadienne; il a donc procédé à l’examen des résultats des sondages d’opinion réalisés au sujet des aliments GM.

Les données amassées à partir de ces trois sources d’information, c’est-à-dire le document de consultation, les ateliers à intervenants multiples et les sondages d’opinion publique, sont résumées dans des rapports qui sont énumérés à l’annexe B du présent rapport et affichés au site Web du CCCB.

Le présent rapport intérimaire marque le début de la partie III du projet du CCCB sur les aliments GM. Il fait la synthèse des résultats des délibérations du CCCB concernant les apports reçus pendant les parties I et II du projet et offre des recommandations provisoires visant à régler les problèmes cernés. Le CCCB met le rapport à la disposition du public et invite les Canadiens à lui faire part de leurs commentaires jusqu’à la fin de janvier 2002. Le Comité espère que ce délai donnera à tous les intéressés le temps et le loisir nécessaires pour lire le rapport de même que pour préparer et soumettre leurs observations et suggestions.

Le CCCB tiendra compte des commentaires reçus durant la partie III du projet au moment de produire son rapport final sur la réglementation des aliments GM, lequel sera remis au gouvernement au début de 2002.


Afin d’appuyer ses activités entourant la réglementation des aliments GM, le CCCB a mis sur pied un groupe de référence, composé de personnes liées à divers groupes d’intervenants, et l’a chargé d’offrir des commentaires sur les rapports de recherche, les grands enjeux, la méthode de consultation, le document de consultation, les retours d’information et le matériel de communication. Le groupe de référence s’est réuni trois fois entre décembre 2000 et mai 2001. Pendant toute la réalisation du projet, le CCCB a également fait appel à de nombreux chercheurs universitaires et autres spécialistes qui l’ont conseillé aux divers stades du travail. Ni les membres du groupe de référence ni les autres experts retenus par le CCCB n’avaient pour mission d’en arriver à des décisions consensuelles. Ces personnes n’appuient pas nécessairement les travaux du CCCB, les rapports et analyses, le contenu du document de consultation ou le présent rapport provisoire destiné au gouvernement. Le CCCB tient à remercier tous les membres du groupe de référence et tous les autres universitaires et spécialistes d’avoir bien voulu lui apporter une contribution précieuse sous forme d’analyses, de réflexions, d’observations et de suggestions judicieuses.


Tous les commentaires au sujet du présent rapport doivent parvenir au CCCB d’ici le 31 janvier 2002 et peuvent être acheminés par le site Web du CCCB à www.cbac-cccb.ca, par télécopieur au (613) 946-2847 ou par la poste à l’adresse suivante : CCCB, 240, rue Sparks, bureau 570E, Ottawa (Ontario) K1A 0H5.

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Aliments GM, autres aliments nouveaux et système de réglementation canadien

Dans son acception courante, l’appellation « aliment génétiquement modifié » ou « aliment GM » se rapporte aux produits alimentaires issus des toutes nouvelles techniques de la génétique, par exemple le clonage de gènes, l’épissage de gènes et l’insertion d’un gène dans un végétal (ou un animal) selon une méthode appelée transformation génétique. Ces techniques, et les autres du même genre, sont souvent regroupées sous l’appellation collective de « technologie de l’ADN recombinant » ou de « biotechnologie moderne » et elles englobent l’ensemble des outils du génie génétique qui servent à modifier la constitution génétique d’organismes (végétaux, animaux et bactéries) afin de leur conférer des caractères prévisibles et bien définis. C’est pourquoi les aliments GM sont aussi désignés par l’expression « aliments issus du génie génétique ».

Comme nous le verrons plus loin, le système canadien de réglementation n’était pas conçu pour régir exclusivement les aliments ou les cultures GM. Les autorités réglementaires se sont servi des mesures législatives en vigueur et ont inscrit respectivement les aliments et les cultures GM au sein des grandes catégories d’aliments nouveaux et de végétaux à caractères nouveaux. Bien que le présent rapport provisoire utilise l’expression « aliments GM », il convient de rappeler que, dans le contexte réglementaire canadien, tous les aliments GM sont des aliments nouveaux mais que les aliments nouveaux peuvent comprendre aussi des aliments produits par des moyens autres que le génie génétique tel que défini au paragraphe précédent.

Les technologies de modification génétique des végétaux ont vu leur première application pratique au début des années 1980 sous la forme de systèmes modèles pour le tabac. Grâce à des perfectionnements continus, ces technologies permettent maintenant d’apporter des modifications génétiques particulières à toutes les grandes cultures vivrières. Depuis leur apparition sur le marché, les aliments GM font l’objet de contrôles scientifiques et réglementaires rigoureux afin de veiller à ce qu’ils ne fassent courir aucun danger à la population. Au Canada, il se vend des aliments GM depuis 1995 et le marché offre aujourd’hui toute une gamme de produits fabriqués à partir du maïs, du soja, du colza canola et du coton GM. Un certain nombre d’autres cultures GM, notamment des variétés de lin, de pomme de terre, de tomate, de courge et de betterave à sucre sont approuvées en vue de leur utilisation dans la production alimentaire au Canada, mais elles ne tiennent encore qu’une toute petite place dans le régime alimentaire canadien. Parmi les modifications génétiques apportées à ces cultures, mentionnons la tolérance aux herbicides, la résistance aux insectes ravageurs et aux maladies virales, la prolongation de la durée de conservation (dans le cas des tomates) et la modification des composants des huiles.

D’après les activités de recherche-développement en cours dans ce domaine, l’avenir pourrait nous apporter des cultures qui tolèrent mieux la salinité et la sécheresse, résistent mieux aux maladies et aux ravageurs, offrent un rendement supérieur et une meilleure valeur nutritive, et peuvent servir de véhicule à des vaccins et à des protéines thérapeutiques. Ces aliments dotés de nouveaux attributs fonctionnels, nutraceutiques ou pharmaceutiques afficheront fort probablement des caractères relativement plus complexes qui, dans bien des cas, estomperont la ligne de démarcation entre produit alimentaire et produit thérapeutique. À titre d’exemple, mentionnons une pomme de terre qui exprime un vaccin contre le virus de Norwalk, lequel cause la gastro-entérite virale à la source de 25 p. 100 de tous les cas de « diarrhée du voyageur »; une tomate à niveau élevé de lycopène, un pigment dont l’ingestion est liée à une réduction du risque de cancer; et le fameux « riz doré » à teneur accrue en bêta-carotène, un précurseur de la vitamine A. Des cultures non vivrières telles que le tabac sont également soumises à des modifications génétiques en vue d’agir comme des « usines à végétaux » pour la production d’agents thérapeutiques aptes à servir au traitement du virus herpétique ou de polymères biodégradables qui pourront remplacer les plastiques. Ces produits sont décrits plus en détail à l’annexe E du présent rapport.

La première phase d’une révolution agricole mondiale est déjà bien entamée. En 2000, les cultures GM recouvraient déjà 44,2 millions d’hectares (109,2 millions d’acres) de la planète, soit près de deux fois la superficie du Royaume-Uni3. Il s’agit là d’une augmentation de 11 p. 100 par rapport à 1999 et du quadruple de la surface cultivée en 1997. Ces cultures GM se retrouvent à 99 p. 100 dans 4 pays, soit les États-Unis (68 p. 100), l’Argentine (23 p. 100), le Canada (7 p. 100) et la Chine (1 p. 100), et elles se composent presque exclusivement de 4 plantes cultivées dont le soja (58 p. 100), le maïs (23 p. 100), le coton (12 p. 100) et le colza canola (7 p. 100).

Pour certaines raisons dont quelques-unes sont exposées ci-après, les aliments GM sont devenus l’objet d’une controverse importante dans plusieurs pays et le thème de nombreux débats dans les instances internationales. En conséquence, un bon nombre de pays et d’organisations mondiales effectuent des recherches scientifiques et cherchent à obtenir les points de vue et opinions du grand public au sujet de la réglementation sûre et adéquate des aliments GM.

Avantages et préoccupations

À l’instar des autres nouvelles technologies habilitantes, l’espoir d’avantages éventuels à tirer de l’application de la biotechnologie à la production alimentaire est contrebalancé par la crainte d’effets négatifs possibles. Les gens sont d’opinions très variées quant aux incidences que les réalisations de la biotechnologie pourraient avoir sur les êtres humains, les animaux et l’environnement.

De nombreux scientifiques croient que le recours à la biotechnologie pour produire des aliments nouveaux ne présente pas plus de dangers que les autres moyens de production. Selon eux, même si la science est rarement apte à donner des garanties, le système d’évaluation des risques et de surveillance réglementaire est capable de protéger efficacement la santé et la sécurité de l’être humain et de l’environnement. D’autres intervenants, par contre, craignent que le système de réglementation ne puisse pas protéger la santé humaine et l’environnement contre les risques des aliments GM, surtout à long terme ou si l’on considère les produits GM de deuxième génération qui apparaîtront peut-être bientôt.

Les avis diffèrent quant aux avantages et aux risques environnementaux propres au cultures GM. Les partisans de la biotechnologie affirment que la modification génétique des cultures afin de les rendre plus résistantes aux parasites et aux maladies permettra éventuellement de réduire l’utilisation des pesticides et des herbicides, de rehausser la viabilité de l’environnement et de diminuer la contamination des eaux souterraines et le nombre de cas de maladies ou de lésions causées aux travailleurs et travailleuses agricoles par les pesticides. Certains pensent que l’adoption de ces nouvelles variétés de cultures aidera tant les agriculteurs des pays industrialisés que ceux des pays en développement. D’autres sont également convaincus que les cultures GM contribueront effectivement à régler des problèmes sociaux et éthiques, notamment en renforçant la sécurité des disponibilités alimentaires dans les pays en développement.

Par ailleurs, il persiste des inquiétudes au sujet des incidences à long terme des cultures GM. Certains craignent, par exemple, que les végétaux qui produisent leurs propres pesticides pour lutter contre les insectes n’accélèrent le développement de populations d’insectes résistants et n’affaiblissent ainsi l’efficacité des pesticides en question dans d’autres applications agricoles, ou que les croisements extérieurs (c’est-à-dire les transferts de caractères génétiques) entre des cultures tolérant les herbicides et des plantes nuisibles étroitement apparentées n’amènent la création de « superplantes nuisibles ». Nombreux sont ceux qui s’inquiètent des effets négatifs sur les animaux et les insectes consommant des végétaux GM et du risque de voir diminuer la biodiversité.

D’autres personnes et organismes se préoccupent des questions sociales et éthiques de grande portée soulevées par la production et la consommation de cultures et d’aliments GM. Ils apportent entre autres une opposition fondamentale à la manipulation artificielle des végétaux et des animaux (en agissant ainsi envers la nature, l’être humain se substituerait à Dieu); la conviction selon laquelle la modification génétique des végétaux est préjudiciable à la justice planétaire et à la bienfaisance (c’est-à-dire, au bien); la peur que les citoyens ne puissent pas prendre de décisions éclairées aux sujet des aliments qu’ils consomment si les produits GM ne sont pas étiquetés d’une façon qui en indique clairement la provenance; et les conséquences économiques d’une mondialisation accrue et de la concentration croissante des pouvoirs entre les mains de quelques multinationales. Parmi les autres objets de préoccupation exprimés, il faut mentionner le double rôle d’un gouvernement canadien qui s’occupe à la fois de réglementer les aliments GM et d’en faire la promotion; le conflit entre le secret commercial et le droit du public à être informé; et le fait que le système fédéral de réglementation des aliments est basé sur la science et n’a pas le mandat de traiter les enjeux sociaux, éthiques ou économiques dans le cadre de ses fonctions d’évaluation des risques et de prise de décisions.

Évaluation de la salubrité des aliments4

Pendant 10 000 ans, l’agriculture s’est basée sur la sélection amélioratrice des végétaux et des animaux pour rehausser la quantité et la qualité des produits cultivés et des aliments consommés. Jusqu’à il y a une centaine d’années, cette sélection s’opérait en très grande partie selon une méthode d’essais et d’erreurs. Dans le cas des végétaux, par exemple, la sélection se fondait sur une apparence extérieure robuste, une croissance vigoureuse, un aspect attrayant, des rendements élevés, ainsi que l’aspect, le goût et l’odeur des éléments comestibles. Vers la fin du XIXe siècle et au début du XXe, la sélection des végétaux, jusque-là un art qualitatif, devient une science quantitative. Les sélectionneurs font appel à des techniques nouvelles pour accroître la variabilité génétique des végétaux et des animaux. Les années 1930 voient apparaître la mutagenèse accélérée, qui permet de modifier délibérément l’ADN d’une plante. Les graines de semence sont soumises à des traitements chimiques ou à des rayonnements en vue d’apporter des changements aléatoires à la structure génétique du végétal et de lui conférer des caractères désirables choisis par les sélectionneurs. Les végétaux créés au moyen de la mutagenèse accélérée sont commercialisés depuis les années 1950. En 2000, selon les estimations de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), il existait déjà plus de 2 200 cultivars créés directement ou indirectement à l’aide de cette technique5.

Au cours des 20 dernières années, la technologie de l’ADN recombinant a permis de mettre au point des végétaux et des animaux possédant des caractères qu’il aurait été impossible de leur conférer au moyen des techniques traditionnelles de sélection. Les gènes de ces caractères désirables peuvent être isolés et clonés à partir de plantes, de micro-organismes ou d’animaux, et ensuite intégrés au génome d’un végétal.

Les produits de la sélection traditionnelle n’ont jamais fait l’objet d’un contrôle réglementaire très étroit. La mise en marché des variétés nouvelles de végétaux et des produits alimentaires qui en sont issus se faisait habituellement sans évaluation officielle préalable de l’innocuité, et ce, en très grande partie à cause des longs antécédents de sécurité des méthodes de production utilisées. L’avènement des cultures et des aliments issus de la biotechnologie moderne a bouleversé cette convention. Le recours à la technologie de l’ADN recombinant pour produire des végétaux GM a mené les gouvernements et les institutions du monde entier à instaurer des règlements visant expressément l’innocuité de ces plantes et de ces aliments.

En 1993, le gouvernement du Canada annonce la mise en place d’un cadre de réglementation de la biotechnologie, élaboré en vertu d’un accord entre les organes fédéraux de réglementation. La nécessité d’investir dans cette stratégie de réglementation, en vue de relever les défis nouveaux, est reconnue lors du renouvellement de la Stratégie canadienne en matière de biotechnologie, en 1998. Les principes découlant de la stratégie sont toujours en vigueur et comprennent la manifestation des valeurs canadiennes; la participation du public à un dialogue ouvert, permanent et transparent; la promotion du développement durable, de la compétitivité, de la santé publique, de l’excellence scientifique et d’une économie innovatrice; et le devoir d’une action et d’une coopération judicieuses à l’échelle nationale et mondiale. Ces principes affirment que la recherche des avantages pratiques des produits et des procédés de la biotechnologie doit toujours être tempérée par le besoin de protéger la santé, la sécurité et l’environnement.

Système de réglementation canadien

Un des éléments clés du système canadien de réglementation des aliments est le principe selon lequel le genre et l’importance des risques sont déterminés par la nature de l’aliment et non pas par la nouveauté des applications scientifiques ayant servi à le produire. Des consultations nombreuses auprès de spécialistes ont permis de déterminer sans conteste qu’il faut évaluer l’innocuité du produit final sans tenir compte de la méthode utilisée pour provoquer la modification génétique6, qu’il s’agisse des techniques de l’ADN recombinant, de la mutagenèse artificielle (par exemple, des changements génétiques aléatoires causés par des agents chimiques) ou même de vastes croisements artificiels entre des espèces créées à l’aide de méthodes de laboratoire perfectionnées. Partant de ce principe, toutes les denrées et tous les produits alimentaires agricoles, qu’ils soient issus de techniques traditionnelles ou de la biotechnologie, sont régis par les mêmes lois. En pratique, cela veut dire que tous les végétaux ou aliments à caractéristiques nouvelles qui sont proposés à la mise en marché, peu importe la technique qui en a permis la création, sont assujettis à la réglementation et à l’évaluation obligatoire de l’innocuité en vertu des lois du Canada. Les cultures génétiquement modifiées en vue d’exprimer des caractères nouveaux doivent être évaluées à fond, afin d’en garantir l’innocuité pour les humains, les animaux et l’environnement, avant de pouvoir être cultivées au Canada ou utilisées dans des aliments commercialisés au Canada. Ce règlement est plus exhaustif que ceux des autres pays où le contrôle réglementaire est déclenché par le fait qu’un procédé du génie génétique a servi à la fabrication du produit.

Le fait que la portée du régime canadien de réglementation dépasse les seuls aliments GM a mené les autorités réglementaires du pays à adopter une terminologie et des définitions singulières. Plutôt que de parler de végétaux GM ou d’aliments GM, les directives et les règlements font état de végétaux à caractères nouveaux et d’aliments nouveaux. La réglementation définit les aliments nouveaux comme des produits qui n’ont jamais servi comme aliments ou qui sont fabriqués ou emballés selon un procédé qui n’a jamais été utilisé pour les aliments et qui change appréciablement les propriétés du produit. Les aliments nouveaux comprennent tous les aliments GM, mais ils peuvent aussi englober d’autres produits, par exemple des fibres alimentaires de source nouvelle. De même, l’appellation de végétal à caractères nouveaux s’applique à toute plante dont les caractéristiques sont inconnues ou ne peuvent pas se comparer à des caractères semblables présents dans d’autres espèces végétales. La définition peut donc englober les végétaux produits par technique génétique ainsi que ceux issus de la mutagenèse accélérée, de la fusion cellulaire ou même des pratiques traditionnelles de croisement.

Au Canada, la réglementation des végétaux et aliments GM relève de l’action coordonnée de Santé Canada, de l’ACIA et d’Environnement Canada7. Santé Canada et l’ACIA se partagent la responsabilité des politiques du Canada en matière d’étiquetage des aliments. Santé Canada s’occupe des questions d’étiquetage liées à la santé et à l’innocuité, comme les aliments qui pourraient contenir des substances allergènes; l’ACIA se charge des politiques et règles générales d’étiquetage autres que celles liées à la santé et à l’innocuité, par exemple la prévention des allégations trompeuses et de la fraude et la prescription des exigences de base en matière d’étiquetage et de publicité des produits alimentaires. Environnement Canada, pour sa part, assume la responsabilité d’évaluer les risques environnementaux pouvant être causés par des substances telles que les organismes et micro-organismes issus de la biotechnologie. Le ministère des Pêches et des Océans élabore présentement un projet de réglementation sur les organismes aquatiques transgéniques. Jusqu’à ce que les nouveaux règlements entrent en vigueur, toute demande d’approbation de la mise en marché de poissons transgéniques doit faire l’objet d’une évaluation environnementale effectuée par Environnement Canada.

Les scientifiques qui conçoivent les produits de la biotechnologie travaillent dans des laboratoires, des chambres de croissance et des serres où les produits sont confinés et à l’abri de tout contact avec l’environnement naturel. Pour le moment, ces activités ne sont pas réglementées par le système fédéral. Les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) ont émis des directives concernant l’utilisation des organismes GM. La plupart des établissements de recherche, qu’ils soient du secteur public ou privé, disposent aussi de leurs propres codes de conduite et de comités de surveillance de la recherche en biotechnologie.

Agence canadienne d’inspection des aliments

Les végétaux issus de la biotechnologie sont examinés dans des installations d’utilisation confinée. Ceux qui paraissent prometteurs sont ensuite évalués lors d’essais au champ dans des conditions d’isolement reproductif. Ces conditions d’isolement sont prescrites par l’ACIA et conçues dans le but de restreindre rigoureusement les interactions entre le végétal GM et l’environnement naturel. C’est ainsi que les végétaux issus de la biotechnologie sont cultivés dans un milieu qui empêche tout transfert de leur pollen à d’autres plantes. En outre, ces végétaux sont contrôlés par l’expérimentateur et par le personnel d’inspection sur place de l’ACIA, et le lieu des essais est lui-même l’objet de surveillance et aussi de restrictions de l’utilisation du sol après la récolte. Les renseignements exigés dans toute demande de réalisation d’essais en milieu confiné, ainsi que les restrictions imposées à ce genre d’essais, figurent dans la directive de réglementation 2000-7, Lignes directrices sur la dissémination dans l’environnement de végétaux à caractères nouveaux dans le cadre d’essais au champ en conditions confinées au Canada. Les végétaux à caractères nouveaux sont habituellement évalués pendant plusieurs années dans le cadre d’essais au champ en conditions confinées. Ceux qui semblent prometteurs sur le plan commercial sont ensuite soumis à des évaluations environnementales et à des vérifications de l’innocuité pour l’environnement, les animaux d’élevage et les êtres humains avant d’être approuvés en vue de la mise en marché.

Aucun végétal issu de la biotechnologie ne peut être cultivé ailleurs que dans des essais au champ en milieu confiné sans avoir d’abord été évalué par l’ACIA. Lorsqu’une demande d’approbation est présentée par un producteur, les scientifiques de l’ACIA affectés à l’évaluation procèdent à l’examen critique du dossier d’information technique accompagnant la demande. Chaque demande est évaluée séparément selon un processus incluant un examen des dimensions biologiques du nouveau végétal ainsi qu’une estimation de ses effets environnementaux. Les végétaux issus de la biotechnologie sont comparés à des produits traditionnels correspondants afin de voir si le ou les caractères nouveaux des premiers modifient l’influence de la plante sur l’environnement. Parmi les critères environnementaux évalués en vertu de la directive de réglementation 94-08, Critères d’évaluation du risque environnemental associé aux végétaux à caractères nouveaux, mentionnons les conséquences de transferts génétiques du végétal nouveau à d’autres espèces et les effets de tels transferts sur des organismes non cibles et sur la biodiversité. La mise en circulation sans contrôle est autorisée seulement lorsque l’ACIA a déterminé que les risques environnementaux liés à la dissémination d’un végétal à caractères nouveaux sont acceptables et/ou maîtrisables.

L’ACIA réglemente également les végétaux créés au moyen de la biotechnologie, ainsi que leurs sousproduits, qui servent aux essais d’alimentation du bétail et dans la composition des aliments industriels destinés au bétail, que ces produits soient fabriqués au Canada ou importés. Tout comme dans le cas de l’évaluation des risques pour l’environnement, les scientifiques de l’ACIA effectuent l’évaluation de l’innocuité des aliments pour animaux et chacun des produits est évalué séparément. Les caractères de l’aliment nouveau sont comparés à ceux de produits traditionnels correspondants au moyen de l’analyse moléculaire, compositionnelle, toxicologique et nutritionnelle. Les demandes d’approbation doivent obligatoirement s’accompagner d’un dossier de données sur la stabilité de l’aliment nouveau, l’évolution de cet aliment dans l’environnement et l’éventualité que les produits et sous-produits génétiques de l’aliment en question puissent se propager dans la chaîne alimentaire humaine. Les aliments nouveaux destinés aux animaux sont interdits d’utilisation à moins d’avoir d’abord été dûment évalués et approuvés par l’ACIA.

Le Canada s’est doté d’un système d’enregistrement des variétés de culture nouvellement élaborées, qui lui permet de veiller à ce que seules soient mises en vente les variétés aux mérites éprouvés. Toutes les variétés nouvelles sont évaluées lors d’essais régionaux au champ et seules celles qui sont choisies et appuyées par les comités nationaux de recommandation sont ensuite enregistrées. En plus de devoir répondre aux normes nationales d’enregistrement, les variétés végétales issues de la biotechnologie ne peuvent être enregistrées ni vendues au Canada sans avoir obtenu au préalable les autorisations propres à la protection de l’environnement, aux aliments du bétail et à l’innocuité.

Santé Canada

Santé Canada détient la responsabilité exclusive d’évaluer la salubrité des aliments destinés à la consommation humaine, y compris les aliments GM et autres aliments nouveaux, et de permettre la vente de ces aliments au Canada. Ce ministère est chargé d’exécuter les dispositions de la Loi sur les aliments et drogues en ce qu’elles s’appliquent à la santé publique, à l’innocuité des produits et à la nutrition; d’instaurer les lignes de conduite et les normes relatives à la salubrité et à la valeur nutritive des aliments vendus au Canada; et d’évaluer l’efficacité des activités de l’ACIA dans le domaine de l’innocuité des aliments, par exemple le prélèvement d’échantillons et l’inspection en vue de vérifier que les aliments sont libres de tout contaminant. Le processus adopté par Santé Canada pour l’évaluation de l’innocuité des aliments se fonde sur le principe selon lequel les aliments nouveaux peuvent être comparés à des aliments traditionnels aux antécédents d’innocuité vérifiables et que la comparaison peut se baser sur un examen, dans l’aliment nouveau, des mêmes facteurs de risque que ceux qui sont inhérents à l’aliment traditionnel. Cette méthode, qui concorde avec le concept internationalement appliqué de l’équivalence en substances, vise à démontrer l’innocuité relative de tout aliment nouveau afin de pouvoir assurer avec une certitude raisonnable qu’aucun effet préjudiciable ne découlera des utilisations prévues de cet aliment dans les conditions prévues de traitement et de consommation. Dans le cadre de cette démarche, l’évaluation de l’innocuité porte avant tout sur les différences définies comme inhérentes à l’aliment nouveau. Elle nécessite une évaluation critique des données moléculaires, compositionnelles, toxicologiques et nutritionnelles concernant l’aliment à l’étude et elle se penche également sur les possibles attributs allergènes du produit ainsi que sur les effets de l’exposition de consommateurs moyens et de sous-groupes de population au produit dans leur régime alimentaire. Les renseignements qui doivent accompagner les demandes d’approbation sont indiquées dans les Lignes directrices relatives à l’évaluation de l’innocuité des aliments nouveaux. Les évaluations effectuées par Santé Canada sont résumées dans un rapport-synthèse dont le contenu est vérifié par un comité de surveillance.

Les occurrences d’approbation de cultures ou d’aliments GM font éventuellement l’objet d’un rapport sommaire publié par l’ACIA et Santé Canada et affiché sur le site Web de l’Agence et du Ministère. En outre, tous les végétaux nouveaux et les aliments de consommation humaine et animale nouveaux demeurent assujettis au régime canadien de réglementation de base des végétaux et aliments conventionnels.

Environnement Canada

Aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (LCPE), Environnement Canada met en application le Règlement sur les renseignements concernant les substances nouvelles et effectue l’évaluation des risques liés à l’environnement afin de déterminer si les substances en question sont toxiques selon la définition de la LCPE. Cette réglementation englobe les organismes et les microorganismes pouvant être issus de la biotechnologie. Le Règlement exige que toutes les substances « nouvelles », y compris les produits de la biotechnologie, soient déclarées et évaluées en vue d’y vérifier la présence d’attributs susceptibles de nuire à la santé humaine et à l’environnement, avant de pouvoir être importées ou fabriquées au Canada. Le programme de réglementation est administré conjointement par Environnement Canada et Santé Canada. L’évaluation tient compte de toutes les étapes du cycle de vie de la substance nouvelle, depuis sa fabrication initiale pour la recherchedéveloppement jusqu’à son exploitation commerciale et à son élimination.

Le Règlement préside à la surveillance réglementaire des substances nouvelles soumises à des utilisations qui ne sont pas réglementées par d’autres lois ou règlements fédéraux. Il prévoit la déclaration et l’évaluation des effets nuisibles possibles d’une substance sur l’environnement et sur la santé humaine avant que cette substance ne soit approuvée en vue de la fabrication, de l’importation ou de la vente au Canada.

Le ministère des Pêches et des Océans est en voie d’élaborer un projet de réglementation des organismes aquatiques transgéniques. D’ici à ce que les nouveaux règlements entrent en vigueur, les demandes de dissémination de poissons transgéniques dans l’environnement doivent être évaluées en fonction de la LCPE, mais aucune demande à cet effet n’a encore été présentée.

Dimensions internationales de la réglementation

À l’heure actuelle, neuf organes internationaux contribuent à la coordination et à la réglementation des produits de la biotechnologie. Dans un sens conceptuel, ils vont d’entités fondamentalement basées sur la science (la Convention internationale pour la protection des végétaux, l’Office international des épizooties, le Codex Alimentarius et l’Organisation mondiale de la santé) à des organismes aux objectifs plus vastes comme la sécurité alimentaire, la facilitation du commerce, la protection de l’environnement et certains buts politiques (la FAO, l’OCDE, diverses initiatives bilatérales et régionales, l’Organisation mondiale du commerce et le tout nouveau Protocole de Carthagène sur la biosécurité). Les organismes axés sur la science cherchent avant tout à contribuer à l’élaboration de normes et de méthodes pour la détection et l’évaluation des risques propres aux aliments GM, tandis que les autres, à assises plus larges, s’attachent à ériger un consensus international au sujet des procédures à mettre en oeuvre pour la coordination des évaluations, le règlement des conflits et la création de mécanismes de répartition des avantages découlant des produits nouveaux. Le Canada, un intervenant de poids dans toutes ces entités, prend parfois la tête du mouvement en vue d’en arriver à un consensus international et apporte une contribution très positive à l’élaboration des bases scientifiques, des modes de régie et des lignes de conduite.


Depuis la première autorisation accordée relativement à un aliment nouveau, en 1994, le Canada a approuvé la commercialisation de 50 de ces aliments et la dissémination dans l’environnement naturel de 43 végétaux à caractères nouveaux. La totalité des aliments GM approuvés au Canada jusqu’à maintenant sont issus de l’intégration ou de la sélection d’un ou deux caractères génétiques dans un végétal. La plupart de ces caractères font intervenir la résistance aux insectes et/ou aux virus ou la tolérance à une gamme d’herbicides; les aliments ainsi produits sont conçus en vue de pouvoir se comparer, sur le plan de la composition et de la valeur nutritive, à des aliments traditionnels correspondants.

Incidences des aliments futurs sur le système de réglementation

Tout indique que les prochaines années amèneront une « deuxième génération » d’aliments GM pour lesquels les producteurs demanderont l’autorisation de mise en marché. Ces aliments sont décrits en détail à l’annexe E du présent rapport et les paragraphes qui suivent en expliquent certaines incidences.

Les produits de la biotechnologie végétale qui sont en cours d’élaboration offriront un éventail plus vaste de caractères nouveaux et de degrés de complexité comparativement aux produits GM commercialisés jusqu’à maintenant, dont la création fait appel principalement à l’insertion d’un seul gène. L’introduction de caractères multigéniques qui créent des voies métaboliques entièrement nouvelles ou modifient sensiblement les voies existantes rendra plus difficile la prévision et l’évaluation des effets secondaires.

Lors de l’évaluation des conséquences involontaires possibles des modifications génétiques, les protocoles actuels d’évaluation de l’innocuité font appel à une méthode à cible définie pour déterminer les différences entre les niveaux de divers éléments nutritifs, toxiques et antinutritionnels particuliers. À titre d’exemple, en évaluant les effets secondaires possibles de la modification génétique des pommes de terre, il est pratique courante de mesurer les niveaux de toxines glyco-alcaloïdes d’origine naturelle présentes dans la pomme de terre modifiée. Toutes les pommes de terre produisent normalement deux glyco-alcaloïdes, la solanine et la chaconine, qui peuvent déclencher des effets toxiques après consommation en quantités suffisantes8. Que la nouvelle variété soit issue du génie génétique ou de la sélection traditionnelle, il faut toujours s’assurer que la production de ces composés n’a pas été sensiblement changée sous l’effet de la modification génétique.

Pour ce qui est d’évaluer des conséquences vraiment imprévues, la méthode à cible définie comporte une limitation importante, à savoir le fait que cette méthode s’appuie sur la connaissance antérieure de ce qu’il faut mesurer et qu’elle ne peut révéler que des effets attendus ou qui arrivent par hasard. Des méthodes de rechange en cours d’élaboration devraient permettre une évaluation plus générale et non ciblée des changements qui adviennent en physiologie des végétaux. Les chercheurs espèrent que ces techniques, parmi lesquelles certaines méthodes de détection des changements dans les concentrations de protéines, les métabolites secondaires et l’activité des gènes modifiés, permettront de tracer un profil métabolique du végétal modifié et de le comparer à un profil semblable d’un végétal traditionnel correspondant9. Bien que ces nouvelles méthodes d’établissement de profils soient prometteuses, aucune d’entre elles n’est encore suffisamment perfectionnée et validée pour servir à l’évaluation de l’innocuité des aliments.

En juillet 2001, 50 aliments nouveaux étaient déjà approuvés en vue d’être utilisés au Canada, mais ce nombre représente seulement une mince gamme de traits distinctifs caractérisés par l’expression d’un petit nombre de protéines nouvelles ou modifiées. Pour la plupart, ces protéines non conventionnelles sont soit l’un des quelques enzymes bactériens qui tolèrent ou facilitent la décomposition des herbicides, soit des protéines herbicides de Bacillus thuringiensis ou des protéines de phytovirus. Toutes ces protéines proviennent de bactéries ou de phytovirus ordinaires ou d’autres végétaux. Il est permis de penser que tous les êtres humains y ont déjà été exposés; dans le cas des protéines de phytovirus, cette exposition serait considérable puisque toutes les grandes cultures vivrières sont communément infectées par ces agents.

Le risque éventuel d’introduire involontairement dans un végétal une source de réaction allergique est un facteur critique dont il faut tenir compte pendant l’élaboration et l’évaluation des aliments GM. Les produits en vente actuellement ont été évalués pour y déterminer la présence possible d’attributs allergisants en observant la décomposition des protéines nouvelles dans les conditions physiologiques de l’estomac et du tractus intestinal et en recherchant des similitudes avec des protéines allergisantes connues. Cette façon de procéder est limitée par le fait qu’il devient difficile de prévoir la puissance allergisante des protéines qui possèdent à la fois certaines propriétés non allergènes (par exemple, s’il s’agit de protéines qui n’ont aucune ressemblance séquentielle avec des allergènes connus) et des propriétés allergènes (par exemple, s’il s’agit de protéines qui restent stables pendant la digestion). Pour pouvoir évaluer proprement les produits alimentaires futurs susceptibles d’exprimer une gamme beaucoup plus vaste de protéines nouvelles, il faudra mettre au point de meilleurs outils de prévision, peut-être même des modèles animaux.

Le recours à des cultures vivrières comme « usines à végétaux » pour fabriquer des composés industriels ou pharmaceutiques est une autre possibilité qui soulève des questions concernant la capacité d’assurer un cloisonnement suffisant tout au long du processus de production afin de veiller à ce que les végétaux ainsi fabriqués ne s’infiltrent pas dans la chaîne alimentaire des humains ou du bétail. Devant un tel risque, il est permis de se demander si des végétaux de ce genre devraient jamais être cultivés hors d’installations confinées ou si les systèmes de cloisonnement peuvent être totalement sûrs et efficaces.


Même si le système canadien de réglementation des aliments possède un certain nombre de points forts, bien des intervenants, dont le CCCB, sont d’avis qu’il a besoin d’amélioration. L’évolution du système devrait manifester les tendances actuelles à l’information et à la participation du public, des caractéristiques souhaitées par un grand nombre de gens en ce qui concerne les aliments en cours d’examen préalable à l’approbation. Il est encore plus important, toutefois, que de telles améliorations soient apportées au système avant que celui-ci ne serve à évaluer et à juger l’acceptabilité des produits alimentaires GM très complexes de deuxième génération.


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Contexte éthique

Le CCCB voit dans la primauté du bien public le critère absolu de l’élaboration de politiques et de programmes gouvernementaux solides. Cette notion de bien public recouvre des éléments tels que la santé et la qualité de vie des Canadiens, la salubrité de l’environnement, la prospérité de l’économie du pays et une communauté mondiale durable et pacifique. La primauté du bien public doit se fonder sur une régie judicieuse, laquelle ne peut exister sans l’intégrité et la transparence des opérations, l’indépendance à l’endroit de toute influence indue, la réceptivité aux opinions et aux préoccupations des citoyens et une intégration réelle des divers intérêts et priorités de toute la population du Canada.

Le CCCB croit que les recommandations touchant la politique officielle doivent être formulées au sein de ce contexte éthique. Comme le fait remarquer Thomas Hurka, les jugements éthiques ne sont pas des jugements isolés mais plutôt des jugements globaux, « toute réflexion faite », qui tiennent compte de facteurs économiques, politiques, juridiques, scientifiques et autres10. La tâche du CCCB, en élaborant des recommandations sur la biotechnologie, consiste à intégrer ces divers facteurs et à formuler un ensemble de conseils qui favorisent au plus haut point le bien de tous les Canadiens et l’intérêt public dans son sens le plus large.

Dans le but de manifester son engagement à servir le bien public et à promouvoir une régie judicieuse, le CCCB a identifié et en a dégagé les principes et les valeurs d’éthique énoncés dans l’encadré ci-dessous pour ses premières consultations et discussions avec les Canadiens, pendant l’hiver 2001. Ces principes et valeurs sont décrits dans le document de consultation produit par le CCCB et mis à la disposition des participants aux ateliers à intervenants multiples sur les aliments GM lors de la partie II du projet sur la réglementation de ces aliments. Ils ont aussi servi à lancer le débat au sujet du genre de paramètres qui devraient orienter les systèmes de réglementation et les décisions stratégiques concernant les aliments GM.

Les commentaires reçus jusqu’à maintiennent par le CCCB sont résumés à l’annexe C. L’idée de fixer des paramètres servant à orienter les systèmes de réglementation et les décisions stratégiques touchant les aliments GM, que ces paramètres soient des valeurs, des principes ou d’autres expressions de ce qui compte le plus pour les Canadiens en ce qui a trait à la façon dont le gouvernement traite les aliments GM, est une des bases essentielles des travaux du CCCB. Ce dernier est convaincu que les recommandations qu’il formule à l’intention du gouvernement doivent être profondément enracinées dans les principes que les Canadiens valorisent le plus. En poursuivant la réalisation de la partie III de son projet sur la réglementation des aliments GM, le CCCB mettra tous ses efforts à atteindre cet objectif.


Justice
L’engagement à veiller à la répartition équitable des avantages et des fardeaux et à faire en sorte que les politiques ne contribuent pas à l’oppression des groupes vulnérables.

Responsabilité
L’engagement à faire preuve de transparence et à être responsable.

Autonomie
L’engagement à promouvoir le choix éclairé et à mettre en place les conditions nécessaire pour permettre aux Canadiens rester fidèles à leurs valeurs et leurs choix fondamentaux.

Bienfaisance
L’engagement à rechercher le bien des Canadiens et des citoyens du monde entier.

Respect de la diversité
L’engagement à garantir le respect des divers modes et formes de vie.

Connaissance
L’engagement à valoriser à la fois les connaissances scientifiques et les connaissances traditionnelles.

Prudence
L’engagement à faire preuve de prudence lorsque les connaissances sont encore incomplètes.


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Enjeux clés de la réglementation des aliments GM

En analysant les enjeux liés à la réglementation des aliments GM, le CCCB a cerné 10 enjeux principaux qui se regroupent sous trois grands thèmes, tel qu’indiqué dans l’encadré ci-dessous. Ces enjeux forment la base du document de consultation et, regroupés selon des thèmes légèrement différents, ils constituent le centre d’intérêt des discussions tenues lors des séances de consultation à intervenants multiples organisées par le CCCB.

Ces 10 enjeux sont repris dans le présent rapport provisoire. Les pages qui suivent décrivent les principaux défis cernés relativement à chacun des 10 enjeux et les possibilités d’action mises de l’avant par le CCCB au départ, dans le document de consultation, ainsi que les démarches adoptées par les autres pays pour aborder ces enjeux. Après une analyse de chaque enjeu dans le thème qui lui est propre, le présent rapport offre les recommandations provisoires du CCCB en fonction de ce thème. Le CCCB est d’avis que ces recommandations, prises globalement, permettront d’en arriver à un système de réglementation des aliments qui sera fondé plus solidement sur l’obligation de rendre compte, les connaissances scientifiques et la prudence.

C’est très consciemment que le CCCB a axé le présent rapport provisoire sur le système canadien de réglementation des aliments, dans l’optique des aliments GM. Le Comité reconnaît cependant que plusieurs des préoccupations soulevées dans le cadre du débat actuel sur les aliments GM ne sont pas exclusives à ces aliments et concernent tout aussi bien d’autres aliments nouveaux et même d’autres éléments du système de réglementation des aliments et d’autres domaines de la politique gouvernementale.


Dans le cours de ses recherches sur ces questions, le CCCB a commandé un certain nombre de rapports que les intéressés pourront consulter pour y trouver des renseignements et des points de vue complémentaires. La liste de ces rapports ainsi que des publications du CCCB sur les aliments et d’autres documents utilisés par le CCCB figurent à l’annexe B. Cette liste comprend des rapportssynthèses sur les commentaires et les opinions populaires dont il a tenu compte en élaborant les recommandations provisoires présentées ici, notamment:

  • Rapport sommaire des consultations — Ateliers sur les aliments génétiquement modifiés;
  • Rapport sommaire des consultations — Exposés écrits sur les aliments génétiquement modifiés;
  • Analyse secondaire des sondages d’opinion publique sur les aliments génétiquement modifiés.

On peut se procurer des exemplaires de ces rapports et publications en passant par le site Web du CCCB, à www.cbac-cccb.ca, ou par sa ligne téléphonique sans frais au 1 866 748-2222 ou au 1 866 835-5380 pour le service TTY-ATS.


Thèmes Enjeux
Régie judicieuse Transparence
Séparation et indépendance des fonctions de réglementation
Mesures de sécurité durant les activités de recherche-développement
Possibilités de participation du public
Surveillance des risques et des avantages après la mise en marché
Capacités et ressources du système de réglementation
Information et choix Prestation de l’information nécessaire à des choix éclairés
Étiquetage
Considérations sociales et éthiques Bonne intendance de l’environnement
Considérations générales d’ordre social et éthique

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Thème 1 : Régie judicieuse

Comme on l’a vu précédemment, le CCCB voit dans la primauté du bien public le critère absolu de l’élaboration de politiques et de programmes gouvernementaux solides. La primauté du bien public doit se fonder sur une régie judicieuse, laquelle ne peut exister sans l’intégrité et la transparence des opérations, l’indépendance à l’endroit de toute influence indue, la réceptivité aux opinions et aux préoccupations des citoyens et une intégration réelle des divers intérêts et priorités de toute la population du Canada. Dans ce contexte de régie judicieuse, le CCCB a cerné et analysé six enjeux particuliers et élaboré trois grandes recommandations visant le maintien des points forts de l’actuel système de réglementation canadien et l’amélioration d’un certain nombre des caractéristiques qui définissent la façon dont le système agit au service des Canadiens.

Enjeu 1 – Transparence

Objet de l’enjeu

La transparence a trait à la limpidité et à l’ouverture avec lesquelles le gouvernement exerce ses activités. Elle a trait aussi à l’obligation du gouvernement de rendre compte aux Canadiens dans l’exercice de ses activités. La transparence est essentielle au maintien et au renforcement de la confiance du public à l’égard de ses institutions publiques et, à ce titre, elle est un élément essentiel de la régie judicieuse.

La transparence empreinte d’un sens des responsabilités pourra nécessiter aussi le maintien d’un équilibre entre l’ouverture, le respect du caractère confidentiel de certains renseignements, et l’excès d’information.

Dans le contexte des aliments GM, le débat sur la transparence porte principalement sur l’ouverture et l’imputabilité de l’administration fédérale pour ce qui est des jugements posés et du partage de l’information concernant l’évaluation des risques et les processus décisionnels, y compris les données scientifiques sur lesquelles ces activités se fondent, de même que les conclusions et les décisions qui en découlent.

Santé Canada et l’ACIA diffusent des renseignements sur divers aspects du système de réglementation, y compris le traitement des aliments GM, dans Internet, des publications et des exposés présentés au public. Environnement Canada et Industrie Canada sont également sources d’information sur la biotechnologie; un tout nouveau site Web BRAVO offre des renseignements sur toutes les exigences réglementaires imposées aux produits de la biotechnologie11.

Le débat entourant la transparence de l’administration fédérale soulève aussi la question du secret commercial. La volonté des entreprises de garder confidentielles les données et l’information qu’elles estiment « commercialement sensibles » influe jusqu’à un certain point sur la quantité et la nature des renseignements que l’autorité réglementaire peut divulguer publiquement. Elle donne également lieu à la question de savoir qui devrait avoir le droit de déterminer ce qui constitue une information commercialement sensible12.

Problèmes cernés

Il y a insuffisance de renseignements clairs et faciles d’accès pour informer les Canadiens au sujet des éléments essentiels du système de réglementation des aliments en ce qu’il s’applique aux aliments GM et autres aliments nouveaux. Il manque notamment de l’information concernant : les activités des divers organes gouvernementaux s’occupant de réglementer les aliments; la façon dont se prend la décision d’autoriser l’entrée d’un aliment nouveau sur le marché canadien; et les données sur lesquelles l’État s’appuie pour accorder ou refuser une telle autorisation. L’ACIA et Santé Canada font l’objet de critiques pour leur manque d’efficacité à faire comprendre leurs rôles en matière de réglementation des aliments GM. De fait, le CCCB s’est trouvé dans l’impossibilité de trouver une description vraiment claire et précise des étapes à franchir par les aliments GM et autres aliments nouveaux au sein du système de réglementation.

Voici, concernant les aliments GM et autres aliments nouveaux, des exemples d’information que les Canadiens se disent intéressés à recevoir mais qui n’est pas entièrement mise à leur disposition pour le moment :

  • Des renseignements détaillés, et surtout des données techniques de santé et d’innocuité, sur les évaluations effectuées par les organes gouvernementaux.
  • Les données évaluées par les fonctionnaires chargés de l’évaluation des risques. Ces données sont généralement considérées comme des renseignements commerciaux à caractère confidentiel, c’est-à-dire comme appartenant exclusivement à l’entreprise qui les soumet.
  • La liste des produits en cours d’examen.
  • Des renseignements complets au sujet des essais au champ de cultures GM et d’autres cultures nouvelles avant l’approbation du produit. Il est impossible d’avoir accès aux données complètes sur le produit mis à l’essai ou l’emplacement des essais.
  • Les résumés des décisions relatives à l’approbation d’un produit. Il s’agit de documents qui décrivent brièvement les caractéristiques du produit, les facteurs d’innocuité pris en compte par le promoteur et la justification de la décision réglementaire. Ces résumés sont publiés, mais il faut souvent attendre un an ou plus, un délai qui ne s’explique par aucune raison précise.

En ce qui concerne la question de savoir si les données techniques que possède une entreprise peuvent et devraient demeurer confidentielles, les fonctionnaires affectés à la réglementation justifient souvent leur refus de transmettre les données d’essai d’un produit en invoquant les restrictions légales imposées à la divulgation de renseignements relatifs à un tiers, par exemple, celles prévues dans la Loi sur l’accès à l’information.

Une autre difficulté a trait à l’absence apparente de procédures normalisées pour aborder certaines situations, par exemple pour régler les conflits d’opinion susceptibles de s’élever à l’interne entre les fonctionnaires affectés à la réglementation ou entre ces fonctionnaires et les entreprises qui demandent l’approbation d’un produit GM ou d’un autre produit nouveau. Ce problème crée des doutes quant à l’équité du système, c’est-à-dire des processus décisionnels véritables, et risque éventuellement de miner la confiance du public à l’égard des organes gouvernementaux de réglementation.

Mesures envisagées

Voici certaines des premières idées mises de l’avant par le CCCB comme solutions possibles à cet enjeu :

Améliorer les communications au sujet du système de réglementation – Le gouvernement pourrait élaborer et mettre à la disposition du public des documents d’information faciles à comprendre, illustrés de diagrammes ou d’arbres de décision, au sujet des organes de réglementation, des mesures législatives connexes et des étapes et critères applicables aux produits GM et autres produits nouveaux dans le cours du processus de réglementation.

Élaborer et instaurer des processus officiels – Les organes de réglementation pourraient se doter de processus officiels pour les aspects de leurs opérations touchant les aliments GM et autres aliments nouveaux, par exemple une procédure de règlement des conflits d’opinion qui adviennent à l’interne entre les fonctionnaires affectés à la réglementation ou entre ces fonctionnaires et le promoteur d’un produit. Un tel mode de fonctionnement donnerait plus de transparence aux opérations du système.

Communiquer les décisions relatives aux produits et les données à l’appui de ces décisions – L’ACIA et Santé Canada pourraient publier le résumé d’une décision dès l’approbation du produit ou même avant, sous forme provisoire (voir plus bas, l’Enjeu 4 – Participation du public). L’Agence et le Ministère pourraient aussi faire paraître des préavis contenant la liste des produits GM et autres produits nouveaux qui sont en cours d’examen.

Plusieurs mesures sont possibles en ce qui concerne la divulgation générale des renseignements touchant les examens d’innocuité des produits alimentaires GM et autres aliments nouveaux et celle des données justifiant le document de décision. Le gouvernement pourrait diffuser ces renseignements tout simplement parce qu’il les estime essentiels au bien public; il pourrait tenter d’en arriver à une entente avec le promoteur en vue de diffuser des données partielles ou résumées; ou il pourrait procéder à ses propres essais relativement à la protection de l’environnement et de la santé humaine et à l’innocuité du produit, et en diffuser les résultats. Il serait possible d’élaborer des critères en vertu desquels des entreprises pourraient demander d’être exemptées de diffuser certains renseignements si elles croient qu’une telle divulgation nuirait considérablement à leur compétitivité sur le marché.

Annoncer publiquement les lieux des essais au champ pour les besoins de la réglementation – L’information sur les lieux des essais au champ de cultures GM et d’autres cultures à caractères nouveaux s’ouvre à deux possibilités de base, soit la divulgation, qui est compatible avec la transparence, et la non-divulgation, une option plus respectueuse du promoteur qui risque, si l’endroit est connu, du vandalisme même si les essais sont approuvés par l’État et conformes aux lois. Il y a une troisième possibilité, celle de conserver la situation actuelle selon laquelle les organes de réglementation donnent, sur demande, des renseignements généraux au sujet des essais, par exemple, le nombre d’essais et la région, mais sans indiquer l’endroit précis où ils auront lieu. L’administration fédérale pourrait aussi envisager d’élaborer des critères régissant la demande et l’autorisation d’une divulgation complète ou d’une nondivulgation, selon le cas. Une telle mesure permettrait d’accepter ou de refuser les demandes sans avoir à recourir automatiquement à la ligne de conduite implicite. Les critères aideraient à étudier les demandes de façon minutieuse, uniforme et transparente.

Démarches adoptées par les autres pays

Dans les autres pays, les systèmes de réglementation de la biotechnologie s’orientent vers une transparence accrue accompagnée souvent d’une augmentation des possibilités de participation du public. Certains pays, dont les États-Unis et l’Australie, se sont dotés de systèmes qui rendent obligatoires l’annonce publique des activités et l’apport de commentaires de la population avant toute décision réglementaire finale au sujet d’un aliment GM. En Australie, l’exigence de notification préalable s’applique aux essais au champ en milieu confiné, par exemple les essais de recherche sur le terrain; aux demandes de dissémination globale dans l’environnement, ce qui correspond au Canada aux demandes de dissémination non confinée; et aux demandes d’approbation de la sécurité d’un aliment. Dans le cas des essais en milieu confiné, l’Australie exige que l’annonce publique préalable décrive brièvement l’organisme mis à l’essai, la nature et l’effet de la modification génétique en cause, le but des essais et l’emplacement général de l’endroit où ils s’effectueront. Avant d’approuver la consommation alimentaire d’un produit nouveau, l’autorité en matière de réglementation des aliments, l’Australia New Zealand Food Authority, publie les résultats provisoires de l’évaluation des risques en indiquant le caractère moléculaire de l’organisme nouveau, les propriétés des nouvelles protéines exprimées, la teneur nutritive de l’aliment et les dangers possibles d’effets toxiques ou allergisants découlant des aliments GM.

Aux États-Unis, par contre, la notification publique préalable n’est pas une obligation dans le cas des essais au champ en milieu confiné et elle ne constitue pas non plus un des éléments du processus volontaire de consultation auprès de l’industrie établi par la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis. Ce processus volontaire de consultation sera touché par une règle récemment proposée par la FDA13 et exigeant que les promoteurs présentent une évaluation scientifique et réglementaire de tout aliment GM 120 jours avant la mise en marché. Dans le texte du règlement proposé, la FDA annonce son intention d’accroître la transparence de son processus d’évaluation des aliments issus de la biotechnologie. À titre d’exemple, aux termes du nouveau règlement, la FDA publierait au début du processus d’évaluation, et non plus à la fin, une notification préalable à la mise en marché, rédigée par le promoteur. Jusqu’à maintenant, la FDA a tenu 45 séances de consultation à participation volontaire avec des industriels au sujet des aliments GM, et elle vient aussi de publier des renseignements sur les aspects pertinents d’innocuité et de valeur nutritive relatifs à chacun des produits sur lesquels ont porté ces consultations14.

En février 2001, le Parlement européen a adopté une nouvelle directive concernant la dissémination délibérée d’organismes génétiquement modifiés (OGM) dans l’environnement. Il s’agit de la directive 2001/18/CE, qui abroge l’ancienne directive 90/220/CEE et institue, entre autres, de nouvelles dispositions visant une plus grande transparence. Ces changements établissent l’exigence obligatoire d’une notification publique, y compris la diffusion des rapports d’évaluation, ainsi qu’une période réservée aux commentaires de la population avant la tenue d’essais au champ et la délivrance d’une approbation de mise en marché d’un OGM. Tout en respectant le principe de la confidentialité des renseignements commerciaux, la nouvelle directive en exclut expressément les données suivantes : la description de l’OGM, le nom et l’adresse de l’auteur de la notification, l’objectif de la dissémination, le lieu de la dissémination, les méthodes et plans de surveillance de l’OGM et l’évaluation des risques liés à l’environnement.

Enjeu 2 – Séparation et indépendance des fonctions de réglementation

Objet de l’enjeu

Le gouvernement fédéral assume plusieurs responsabilités en matière de biotechnologie et de produits alimentaires, notamment : la réglementation; la recherche scientifique à l’appui de l’enrichissement des connaissances scientifiques, des règlements et de l’analyse des risques; l’élaboration de politiques et de règlements (à l’échelle nationale et internationale); l’exploitation judicieuse de la biotechnologie; la promotion de l’industrie et du commerce; l’élaboration de nouvelles cultures et pratiques agricoles à l’appui de la production alimentaire au pays; et la sensibilisation du public aux rôles de l’État, aux décisions stratégiques et aux risques. Une des grandes questions est celle de savoir si le gouvernement canadien est capable de remplir toutes ces obligations en s’assurant que ses fonctions de réglementation ne sont pas indûment influencées par les pressions de l’économie et de l’expansion du marché.

Problèmes cernés

Bien que Santé Canada, Environnement Canada, l’ACIA et Pêches et Océans Canada (qui prépare de nouveaux règlements sur les organismes aquatiques transgéniques) participent tous à la mise en oeuvre du régime de réglementation, le débat sur la séparation et l’indépendance des fonctions de réglementation vise avant tout l’ACIA.

L’ACIA est chargée de réglementer l’application des modifications génétiques aux cultures, aux végétaux, aux animaux, aux aliments du bétail, aux engrais et à la biologie vétérinaire. Agriculture et Agroalimentaire Canada s’occupe de la promotion des technologies agricoles propres à améliorer la compétitivité du Canada et le commerce international des produits agricoles canadiens, dont les aliments GM. L’Agence et le Ministère rendent tous deux compte au ministre de l’Agriculture. Ainsi, bien que les deux organes soient séparés, ils sont comptables au Parlement par l’entremise du même ministre. Certains sont d’avis qu’une telle situation est susceptible de créer un conflit d’intérêts, réel ou perçu, et que le gouvernement devrait séparer complètement ses fonctions de réglementation de ses activités de promotion et du processus politique. D’autres intervenants voient l’ACIA et Agriculture et Agroalimentaire Canada comme deux entités distinctes et sont convaincus que le Ministère n’a aucun pouvoir ni aucune influence sur les décisions de l’Agence en matière de réglementation.

Il y a également ici un problème de communication en ce que le gouvernement n’explique peut-être pas toujours clairement aux Canadiens la séparation et l’indépendance de ses activités de réglementation par rapport à ses activités de promotion, ni la façon dont se règlent les conflits possibles entre les deux mandats. Qui plus est, du moins aux yeux de certains observateurs, les responsables de la réglementation semblent promouvoir les aliments GM au lieu de fournir des renseignements impartiaux à la population. Les documents d’information émanant du gouvernement ont probablement été rédigés dans un esprit d’objectivité, mais il est possible qu’ils aient pour effet d’affaiblir la crédibilité de l’État comme autorité neutre en matière d’évaluation et de réglementation des aliments GM et des autres produits issus de la biotechnologie.

Mesures envisagées

Voici les mesures que le CCCB a d’abord envisagées relativement à cet enjeu :

Modifier les rapports hiérarchiques: Certains proposent de modifier les rapports hiérarchiques entre l’Agence et le Ministère de façon à ce que l’ACIA rende compte au ministre de la Santé, à un autre ministre ou au Parlement directement.

Normaliser les procédures – Tel que mentionné à l’Enjeu 1 – Transparence, les organes gouvernementaux de réglementation pourraient normaliser plus à fond leurs procédures internes et contribuer ainsi à alléger les problèmes liés au fonctionnement de l’administration fédérale.

Mieux renseigner le public – Les organes gouvernementaux de réglementation pourraient prendre les moyens nécessaires pour mieux informer la population au sujet du système de réglementation en général et de ses attributs particuliers, par exemple la distinction entre les fonctions des organes de réglementation et les autres activités de l’État ainsi que les mesures prises par ces organes pour assurer l’intégrité de leurs évaluations et de leurs décisions.

Lancer un programme d’information et de sensibilisation – Reconnaissant le besoin gouvernemental de diffuser publiquement des documents à caractère informatif et éducatif concernant les aliments mis en vente au Canada, des intervenants croient essentiel qu’une initiative de cette nature s’inscrive dans un programme d’information général et systématique qui renseigne les Canadiens sur les aliments, y compris la technologie entourant les aliments GM et autres aliments nouveaux. Il est peut-être permis de se demander si cette tâche devrait incomber aux organes gouvernementaux de réglementation ou à d’autres entités gouvernementales ne s’occupant pas de réglementation.

Démarches adoptées par les autres pays

La réglementation des aliments GM au sein des ministères et des organismes gouvernementaux chargés de responsabilités à la fois de promotion et de réglementation n’est pas un phénomène inusité. Aux États-Unis, par exemple, le service d’inspection de la santé des animaux et des végétaux, l’Animal and Plant Health Inspection Service (APHIS), au ministère de l’Agriculture (USDA), est chargé de réglementer la mise en circulation de cultures GM dans l’environnement naturel alors que le service de recherches en agriculture, l’Agricultural Research Service (ARS), également à l’USDA, fait la promotion de la technologie. L’ARS, comme la Direction générale de la recherche à Agriculture et Agroalimentaire Canada, a le mandat d’effectuer des recherches de base en agriculture, ce qui comprend l’élaboration de nouvelles applications de la biotechnologie, et de faciliter le transfert de cette technologie au secteur privé. La séparation des fonctions de l’APHIS de celles de l’ARS est assurée aux moyen de codes de conduite institutionnels et, de façon encore plus importante, par la transparence du processus d’examen et d’évaluation des produits.

Le Royaume-Uni a choisi une autre démarche en créant un comité scientifique indépendant qui se charge d’examiner toutes les demandes de dissémination d’organisme GM (OGM) dans l’environnement naturel. Il s’agit d’un organe consultatif, l’Advisory Committee on Releases to the Environment, qui évalue les incidences possibles des produits GM proposés, y compris les risques d’effets allergisants et toxiques et les répercussions éventuelles sur l’environnement. Après l’évaluation, le comité conseille au ministre de l’Environnement d’approuver ou de rejeter la demande. En raison de son indépendance à l’égard du gouvernement, le comité est intrinsèquement séparé de toutes les activités de promotion de la biotechnologie mises en oeuvre par l’État.

Enjeu 3 – Mesures de sécurité durant les activités de recherche-développement

Objet de l’enjeu

Cet enjeu a trait au besoin éventuel d’établir des normes et/ou des règlements afin de garantir que tous les programmes de recherche, dès leurs premiers stades, sont exécutés de façon à en réduire au minimum les effets nuisibles sur la santé et l’environnement. Dans les laboratoires de recherche, les toutes premières étapes de la recherchedéveloppement menant à la production d’aliments GM ne relèvent pas du mandat de réglementation conféré à Santé Canada ou à l’ACIA. En outre, les directives et normes en vigueur n’ont généralement pas force obligatoire et il est possible qu’elles ne couvrent pas tous les programmes de recherche.

Parmi les directives actuelles visant à garantir la santé et la sécurité, il faut mentionner les Lignes directrices en matière de biosécurité en laboratoire et les Directives concernant la manipulation de molécules d’ADN produites par recombinaison et de cellules et virus animaux. D’abord fixées par le Conseil de recherches médicales et adoptées ensuite par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), ces lignes de conduite s’appliquent aux travaux faisant intervenir des OGM. Les chercheurs appliquent aussi, de façon générale, les normes internationalement acceptées contenues dans les Règlements sur les bonnes pratiques de laboratoire ainsi que les codes de pratique institués par les établissements de recherche. Les organes fédéraux de financement tels que les IRSC, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie et le Conseil national de recherches du Canada doivent respecter ces lignes directrices, et des comités de biosécurité universitaires ou institutionnels surveillent la conformité des laboratoires aux directives en question.

Problèmes cernés

Certains intervenants craignent que les premiers stades de la recherche-développement ne se déroulent pas toujours dans le respect de mesures propres à réduire au minimum les répercussions possibles sur la santé et l’environnement. Selon d’autres observateurs, lorsque de telles mesures sont mises en oeuvre, nul ne sait exactement à quelles méthodes et mesures de sauvegarde les chercheurs ont recours. Enfin, d’autres encore sont préoccupés par le fait que, souvent, nul ne sait jusqu’à quel point les chercheurs se conforment aux directives, et par la possibilité que l’imposition de la conformité ne suffise pas si les directives ne sont pas inscrites dans la loi.

Des intervenants croient aussi qu’un renforcement de la réglementation de cette technologie ne fera que rendre plus difficile aux petites entreprises et aux chercheurs universitaires la découverte et la mise au point de produits. Certains soulignent le manque de preuves qui indiqueraient que les activités actuelles de recherche-développement auraient nui à la santé humaine ou à l’environnement, et suggèrent que ce secteur n’a besoin d’aucune autre exigence réglementaire.

Mesures envisagées

Voici les mesures que le CCCB a d’abord envisagées relativement à cet enjeu :

Élaborer une norme et la mettre en application – Une des options à envisager consisterait à élaborer, pour les travaux basés sur la recombinaison de l’ADN, une norme unique axée sur le rendement et permettant de réduire au minimum les inquiétudes relatives à la santé et à l’environnement. La norme pourrait demeurer d’application volontaire ou s’accompagner de mesures législatives et de règlements, lesquels pourraient être absolus ou permettre des exemptions ponctuelles dans le cas de certains établissements, de certaines activités à risque peu élevé ou de certaines démarches respectueuses de la norme.

Démarches adoptées par les autres pays

Aux États-Unis, les National Institutes of Health (NIH), du ministère de la Santé et des Services à la personne, jouent un rôle analogue à celui des IRSC ici. Les NIH ont publié des directives en matière de biosécurité qui sont en vigueur depuis 1976. Tant par leurs objectifs que par leur mise en application, ces directives sont semblables à celles énoncées au Canada par les IRSC et elles décrivent les protocoles de sécurité à respecter par les chercheurs gouvernementaux et universitaires. Les États-Unis étudient également les problèmes que pourrait éventuellement créer le flux des déchets sortant des laboratoires. Certains pays, par exemple l’Argentine, l’Australie et le Royaume-Uni, traitent les questions de biosécurité au moyen de règlements et se sont dotés d’un mécanisme permettant d’assurer un degré de contrôle de toutes les expériences de recherche faisant intervenir la manipulation génétique et les OGM. Même dans ces pays, toutefois, la recherche touchant la modification génétique de formes végétales élevées est considérée à risque faible et la réglementation prévoit des exemptions ou des exigences minimales pour de nombreux genres d’expériences.

Au Canada, pour le moment, ni le système de réglementation ni les directives volontaires des IRSC ne contiennent de normes visant particulièrement la propagation des cultures GM en serre. Le premier point de contact avec le système de réglementation survient au moment de la demande d’essais de cultures GM au champ en milieu confiné (par exemple, des essais de recherche en terrain circonscrit).

Enjeu 4 – Possibilités de participation du public

Objet de l’enjeu

Des occasions sont offertes aux Canadiens d’exprimer leurs points de vue et opinions sur certains aspects du système de réglementation, notamment lorsque des règlements sont en cours d’élaboration ou de modification ou que le gouvernement sollicite des commentaires sur les questions stratégiques propres au système. De telles possibilités ne se présentent pas, cependant, dans le contexte de l’approbation d’aliments nouveaux ou de végétaux à caractères nouveaux. Le régime de réglementation en place au Canada ne prévoit pas de moment où les simples citoyens seraient invités à s’exprimer au sujet de l’évaluation des risques liés à un aliment GM particulier. En cette matière, les discussions ont généralement lieu entre les fonctionnaires chargés de l’évaluation des risques et l’entreprise ou la personne demandant l’approbation, sans intervention aucune de l’extérieur, que ce soit de la part d’organismes scientifiques, de spécialistes, du grand public, etc.

Problèmes cernés

Certains voient comme un point faible du système le fait que celui-ci n’offre pas au public l’occasion de participer aux décisions de réglementation concernant chaque aliment GM ou autre aliment nouveau. Cette réserve exclut, jusqu’à un certain point, la prise en compte intégrale des connaissances et des opinions pertinentes et elle nuit ainsi à la transparence du système. D’autres sont d’avis que les décisions réglementaires prises méritent la confiance du public, sans autre apport de l’extérieur, puisque tous les examens sont effectués et toutes les décisions sont prises par des fonctionnaires indépendants chargés de la réglementation, à l’aide de méthodes d’évaluation élaborées avec la participation du public et incorporant des principes acceptés à travers le monde.

Mesures envisagées

Voici les mesures que le CCCB a d’abord envisagées relativement à cet enjeu :

Diffuser les documents avant la décision finale – Comme on l’a vu plus haut dans la section sur la transparence, Santé Canada et l’ACIA publient tous les deux des résumés dans lesquels sont expliquées les décisions arrêtées relativement aux aliments GM et autres aliments nouveaux ainsi que les justifications scientifiques de ces décisions, mais ces documents sont diffusés trop tard pour permettre au public de donner son avis. Pour remédier à ce problème, il faudrait produire et diffuser des documents préliminaires pertinents avant que la décision finale ne soit prise, et ces documents serviraient de base à l’expression de commentaires par le public pendant une période prédéterminée de 30 ou 60 jours, par exemple. Les autorités réglementantes tiendraient compte des commentaires reçus au moment de prendre leur décision finale.

Cette façon de procéder est déjà celle en usage lors de l’enregistrement des nouveaux ingrédients actifs des pesticides, en vertu de la Loi sur les produits antiparasitaires, et pour les demandes d’approbation d’utilisations nouvelles importantes d’une matière active déjà approuvée. L’Agence de réglementation de la lutte antiparasitaire publie des Projets de décision réglementaire qui contiennent le résumé des données sur l’innocuité du produit, ce résumé étant approuvé au préalable par le promoteur. Le public a 45 jours pour faire part de ses commentaires, après quoi l’Agence publie sa décision finale, laquelle tient compte des observations reçues.

Conserver le statu quo – Il serait possible également de ne rien changer à la situation actuelle, qui prévoit l’apport du public à l’élaboration des politiques et des prescriptions juridiques, mais non pas aux décisions.

Démarches adoptées par les autres pays

Dans le processus décisionnel en matière de réglementation, la question de la participation du public va de pair avec celle de la transparence (voir l’enjeu 1). En général, un système de réglementation caractérisé par une grande ouverture et une information largement distribuée compte parmi ses qualités premières l’existence d’un mécanisme servant à inviter et à prendre en compte les points de vue des citoyens ordinaires. Aux États-Unis et en Australie, par exemple, la législation prescrit que tout examen des effets environnementaux des cultures GM doit comporter une période réservée aux commentaires du public. L’Australie impose aussi un examen de la salubrité des aliments. Au-delà de l’obligation de respecter une exigence juridique, nombreux sont ceux affirmant que la contribution du public offre une perspective nouvelle à partir de laquelle considérer d’autres sources de renseignements relatifs à la sécurité, par exemple les particuliers, les sociétés scientifiques et d’autres groupes d’intervenants, et renforce la confiance de la population à l’endroit du processus d’évaluation des risques.

Tel que déjà mentionné, les changements proposés par la FDA aux États-Unis et les dispositions de la récente directive 2001/18/CE du Parlement européen, au sujet de la réglementation de la diffusion d’OGM dans l’environnement, offrent de nouvelles voies à la participation du public à ces instances.

Enjeu 5 – Surveillance des risques et des avantages après la mise en marché

Objet de l’enjeu

Le suivi des aliments GM après leur mise en marché, afin de détecter tout effet nuisible à long terme sur la santé humaine ou l’environnement, est simple affaire de prudence. Le besoin de conditions et d’activités de surveillance après la mise en marché est envisagé pendant les évaluations d’innocuité préalables à la mise en marché, mais il ne s’applique actuellement qu’aux cultures Bt15. Au Canada, comme dans la plupart des pays, la responsabilité de la surveillance ultérieure à la mise en marché incombe au promoteur, qui devrait effectuer des contrôles pour détecter les risques existants et les risques nouveaux et prévenir les autorités réglementantes dès qu’il a des renseignements nouveaux sur les cultures GM mises en vente.

En vertu du système actuel, les aliments GM et autres aliments nouveaux qui ont subi l’évaluation d’innocuité préalable à la mise en marché et reçu l’approbation réglementaire ne sont pas soumis par la suite à une surveillance de routine visant à contrôler leurs effets à long terme sur la santé et l’environnement. Cette absence de suivi semble se justifier en partie par le fait que l’évaluation préalable à la mise en marché devrait démontrer que les aliments GM sont aussi sûrs que leurs produits traditionnels correspondants, et par le fait que les connaissances restent limitées quant aux effets à long terme des aliments conventionnels, et à plus forte raison quant à ceux des aliments GM.

Certains aliments nouveaux à venir, GM ou autres, qui comportent des changements importants sur le plan de la valeur nutritive, pourraient nécessiter un suivi après la mise en marché afin de confirmer quelquesunes des hypothèses formulées au moment de l’évaluation d’innocuité (par exemple, pour veiller à ce que personne n’excède la limite quantitative de sûreté de l’ingestion des nutriments nouveaux). Compte tenu de la complexité grandissante prévue des végétaux et aliments GM, de nombreux intervenants sont d’avis qu’il faudra mettre en oeuvre des mesures et des programmes de suivi et d’examen après la mise en marché très élaborés et d’application

Problèmes cernés

L’ACIA a lancé un programme qui rend obligatoire la bonne intendance dans le cas des variétés de maïs GM résistantes à la pyrale, lesquelles sont déjà commercialisées et cultivées à grande échelle. Partant d’une évaluation qui en a été faite, l’Agence a mis sur pied un Programme de gestion de la résistance (PGR) conçu dans le but de retarder l’apparition d’insectes résistants au Bt. L’autorisation de cultiver du maïs Bt est accordée seulement à la condition que les exploitants agricoles mettent en place ce PGR. Il incombe aux promoteurs du maïs Bt de s’assurer que les maïsiculteurs prennent les mesures voulues. Par ailleurs, on ne sait pas très bien s’il se fait suffisamment de vérification ou de contrôle pour évaluer la conformité au PGR ou l’efficacité des conditions spéciales imposées.

Les cultures GM qui tolèrent les herbicides au glyphosate et au glufosinate-ammonium sont les cultures GM les plus populaires au Canada. L’ACIA recommande que le personnel des services de vulgarisation agricole, du secteur privé comme du secteur public, fasse la promotion de pratiques de gestion prudente auprès des exploitants qui recourent à ces cultures tolérantes aux herbicides, afin de veiller à réduire au minimum l’apparition de résistances multiples. Il n’en reste pas moins que l’on a découvert des plantes de colza canola GM devenues résistantes à deux ou trois herbicides différents. Ces plantes peuvent se contrôler efficacement et à bon marché au moyen des techniques existantes, mais il est possible que les pratiques qui conviennent ne soient pas mises en application. C’est une question qui ne fait l’objet d’aucun suivi officiel après la mise en marché et la responsabilité des promoteurs de cette technologie vis-à-vis les programmes de bonne intendance n’est pas claire.

Certains intervenants s’inquiètent de la possibilité que le gouvernement ne dispose pas des moyens voulus pour détecter ou retracer facilement les aliments GM vendus sur le marché ou pour mesurer les habitudes de consommation alimentaire. En raison de la grande variabilité génétique présente dans les populations humaines, de l’évolution des habitudes alimentaires au fil du temps et de la difficulté de reconnaître les aliments GM consommés, les auteurs d’études épidémiologiques ont du mal à déterminer précisément les effets nuisibles réels reliés à la consommation des aliments GM ou d’autres aliments. Qui plus est, le Canada n’a pas de programmes de surveillance de la consommation alimentaire ni de programmes de surveillance médicale axés sur la population et concernant les effets à long terme des aliments.

Le Canada ne possède pas de données d’aprèscommercialisation sur des éléments tels que la vente, l’utilisation et l’exportation d’aliments, de cultures ou de graines de semence particuliers, GM ou autres. Cette lacune rend difficile l’estimation de l’importance des aliments GM dans le régime alimentaire ou l’économie du pays. Certains croient qu’il s’agit là de renseignements précieux, alors que d’autres ne les considèrent pas nécessaires, du moins si les produits GM sont jugés comparables aux produits alimentaires conventionnels.

Le système de réglementation prévoit la tenue d’examens ad hoc au sujet des données nouvelles concernant les produits déjà homologués et aussi la réévaluation des décisions réglementaires antérieures. À cette fin, des renseignements nouveaux peuvent être présentés à l’ACIA ou à Santé Canada en tout temps par le promoteur ou par d’autres parties. Dans certains cas, la présentation de ces renseignements est imposée par la loi. L’examen des données nouvelles a lieu généralement lorsque des renseignements importants et inédits sont portés à l’attention des autorités réglementaires. Le système n’exige pas de suivi systématique de toutes les approbations, ni ne prévoit d’occasions officielles où les autorités réglementaires devraient trouver, extraire et étudier des données nouvelles concernant un produit déjà approuvé. Le système n’invite pas non plus les instituts de recherche ou les établissements universitaires à présenter des renseignements complémentaires susceptibles de se rapporter à l’innocuité d’un aliment ou d’une culture déjà soumis à l’examen. Certaines personnes croient que ces éléments d’un programme de réglementation pourraient se révéler utiles pour veiller à ce que les autorités réglementaires étudient attentivement les nouveaux rapports de recherche scientifique car on pourrait ainsi faire en sorte que les produits en vente sur le marché continuent de concorder avec les normes les plus récentes, même s’il s’agit de produits approuvés il y a plusieurs années.

Mesures envisagées

Voici les mesures que le CCCB a d’abord envisagées relativement à cet enjeu :

Élaborer et mettre en oeuvre des méthodes de détection – Pour faire approuver de nouveaux aliments et cultures GM et d’autres végétaux à caractères nouveaux, le promoteur serait tenu de fournir des méthodes acceptables de détection des caractères ou du matériel génétiques nouveaux. Une telle mesure faciliterait les tâches de détection, de surveillance et de compte rendu après la mise en marché.

Vérifier les conditions appliquées afin de garantir l’innocuité pour l’environnement – Dans le cas des aliments et des produits réglementés par l’État et approuvés en vue d’être vendus au Canada selon des conditions imposées en rapport avec la sûreté de leurs procédés de production (par exemple, les zones-tampons autour des champs de culture de maïs Bt), on pourrait envisager le recours à la vérification de conformité et à la publication des résultats des vérifications.

Surveiller les effets sur l’environnement et la santé – Il y aurait peut-être lieu d’envisager la conception, le financement et l’exécution de projets supplémentaires visant l’étude détaillée et à long terme des incidences environnementales des aliments et des cultures GM. Ces projets pourraient chercher à accroître les preuves d’avantages réels tels que la réduction de l’utilisation de pesticides et des niveaux de certains produits chimiques dans les eaux souterraines, ainsi que les preuves d’effets nuisibles tels que le transfert de gènes et les répercussions sur des populations non-cibles, et à déterminer les conditions ou circonstances permettant d’augmenter les avantages et de réduire le plus possible les risques. Parallèlement, étant donné que les organes de réglementation connaissent l’emplacement exact de nombreux essais au champ de cultures GM, on pourrait élaborer un programme de surveillance et de suivi à long terme des lieux d’essais afin d’y détecter les signes possibles d’incidences, d’avantages ou de conséquences nuisibles des cultures GM.

Produire des données sur la consommation alimentaire – Il faudrait songer à lancer un programme de suivi de la consommation d’aliments GM, afin de recueillir des renseignements sur les niveaux d’ingestion de ces produits par divers groupes de population. Dans la mesure du possible, ce programme pourrait se fonder sur les initiatives déjà entamées en vue d’une collecte plus vaste de données sur la consommation alimentaire. Il faudrait probablement rassembler des données détaillées sur la production d’aliments GM et autres et sur les produits alimentaires importés, et produire un modèle d’intégration mathématique pour l’analyse de ces données.

Présenter des rapports après la mise en marché – On pourrait demander aux promoteurs du secteur privé de présenter chaque année un ou plusieurs rapports sur les données relatives à l’utilisation, à la vente, aux exportations et/ou aux importations de produits alimentaires GM et autres. Parallèlement à ces rapports et à l’aide des renseignements qu’ils contiennent, les autorités réglementaires canadiennes pourraient publier des comptes rendus annuels de situation au sujet des aliments GM et non GM.

Réévaluer les approbations antérieures – Le gouvernement pourrait officialiser un processus de réévaluation périodique de l’innocuité des aliments GM et des autres aliments et cultures nouveaux dont la vente est déjà approuvée au Canada. Ce processus aurait pour but d’assurer la prise en compte systématique de tous les renseignements nouveaux et pertinents qui font surface après l’approbation d’un produit. Ce plan pourrait être lancé en commençant par les approbations à durée limitée et renouvelées seulement à la suite de la réévaluation du produit, à partir de données provenant de sources diverses et de la confirmation que le produit en question répond toujours aux normes et aux critères d’innocuité pour la santé humaine et l’environnement.

Démarches adoptées par les autres pays

Bien que certains pays se soient donné des systèmes de surveillance de la consommation alimentaire, aucun n’a encore instauré de programme de contrôle systématique des effets à long terme des aliments GM sur la santé humaine. Le système de réglementation de pays tels l’Australie, le Japon et les États-Unis se fonde sur l’hypothèse selon laquelle l’évaluation préalable à la mise en marché permet de s’assurer que les aliments GM sont aussi sûrs que les produits traditionnels correspondants et qu’il n’est donc pas nécessaire de poursuivre la surveillance après l’approbation. De façon générale, la responsabilité du contrôle après la mise en marché s’inscrit dans les devoirs de diligence du promoteur. Cette obligation est énoncée dans les règlements canadiens sous une clause intitulée « renseignements nouveaux » et elle est semblable dans ses fins aux dispositions de la directive récemment approuvée de l’Union européenne concernant la dissémination d’OGM dans l’environnement naturel. Cette directive impose aux promoteurs ou à quiconque de prévenir l’organe de réglementation s’ils prennent connaissance de toute information nouvelle au sujet des effets d’un aliment sur la santé ou l’environnement.

L’Union européenne, dans sa directive révisée sur la dissémination d’OGM dans l’environnement, exige maintenant que les promoteurs élaborent et mettent en oeuvre un plan de contrôle des occurrences et des incidences d’effets nuisibles des OGM sur l’environnement. La période de surveillance après la mise en marché est fixée au moment de la délivrance de l’approbation commerciale, et les renouvellements ultérieurs de cette approbation peuvent être conditionnels à la présentation de données de surveillance par le promoteur.

Enjeu 6 – Capacités et ressources du système de réglementation

Objet de l’enjeu

Cette question a trait à la mesure dans laquelle le système de réglementation canadien est convenablement outillé pour relever les défis actuels et futurs, surtout en ce qui concerne ses ressources humaines formées dans les domaines de la réglementation et des sciences. La science modifie rapidement la nature des aliments nouveaux, et ces changements donnent lieu à de nouveaux défis scientifiques pour le système de réglementation. Les experts gouvernementaux en matière réglementaire et scientifique doivent posséder l’étendue et le degré de compétences voulues pour aborder et relever ces défis.

Problèmes cernés

Au fur et à mesure que progressent les connaissances scientifiques nécessaires à la production de cultures et d’aliments GM et que les produits eux-mêmes deviennent de plus en plus complexes, il faut absolument que progressent aussi les compétences scientifiques à la disposition du système de réglementation. Les experts gouvernementaux doivent posséder le même niveau de compétences que leurs homologues de l’entreprise privée et des universités. L’État doit pouvoir compter sur une masse critique d’évaluateurs qualifiés s’il veut que son système de réglementation demeure crédible, efficace et efficient. Il doit aussi être en mesure de faire appel au besoin à des ressources de l’extérieur, par exemple lorsqu’il n’a pas le personnel aux compétences voulues, qu’un produit est d’un intérêt de premier ordre pour le bien public ou que le fardeau de travail est trop lourd. Le niveau actuel de ressources du système de réglementation canadien n’est peut-être pas suffisant pour répondre aux besoins croissants, et il se peut que son mode opératoire interne ne lui permette pas de recourir systématiquement à des compétences externes là et quand il le faut.

Pour attirer et conserver des employés hautement qualifiés en matière réglementaire et scientifique, les organes gouvernementaux doivent pouvoir offrir à ces gens des possibilités de continuer sans cesse à perfectionner leurs connaissances et leurs compétences. La concurrence qui règne autour de compétences aussi élevées est tout particulièrement féroce dans les disciplines où le personnel est insuffisant. De telles pénuries de ressources humaines sont attribuables en partie au manque d’investissement dans la formation d’étudiants aux études supérieures; en effet, ces experts en cours de formation sont essentiels pour répondre aux besoins futurs des organes de réglementation.

Mesures envisagées

Voici les mesures que le CCCB a d’abord envisagées relativement à cet enjeu :

Recourir à des compétences spécialisées de l’extérieur – L’ACIA et Santé Canada pourraient recourir plus largement à des consultations auprès de commissions spéciales d’experts, peut-être en instaurant des procédures et des mécanismes propres à faciliter l’exploitation officielle, normale et transparente de telles entités. Les procédures pourraient décrire, par exemple, les moments et les circonstances justifiant le recours à des spécialistes de l’extérieur, la gamme convenable des rôles et des degrés d’accès à l’information accordés à ces spécialistes, la façon dont ces personnes seraient choisies et les aspects pratiques de leur embauche. La formation sur place et le recours à des spécialistes de l’extérieur nécessiteront l’affectation de fonds supplémentaires. Le système de réglementation pourrait aussi rechercher des apports externes en participant à des initiatives communes avec des pays étrangers, par exemple dans le cadre d’activités de partage des données et d’examens conjoints, et en harmonisant plus étroitement les méthodes d’évaluation à l’échelle internationale.

Planifier à long terme – Le travail des organes de réglementation pourrait se concentrer plus fortement sur l’acquisition d’une meilleure compréhension des genres d’aliments GM susceptibles d’être intégrés au système au cours des prochaines années. Des études prévisionnelles permettraient de mieux voir venir les besoins futurs en matière de réglementation et de prendre les moyens nécessaires pour évoluer et s’y préparer. En outre, les organes de réglementation pourraient examiner périodiquement leurs méthodes, leurs ressources et leurs compétences relativement à ce qu’ils connaissent déjà au sujet de la prochaine génération de produits GM.

Accroître la recherche et le transfert de connaissances – Le gouvernement du Canada pourrait augmenter ses investissements dans des recherches appuyant l’évaluation réglementaire des risques et le processus décisionnel. Un tel apport de fonds permettrait d’enrichir la base des connaissances accessibles à nos chercheurs scientifiques dans les disciplines essentielles à l’évaluation de l’innocuité des cultures et des aliments GM pour la santé et l’environnement. Parallèlement, il faudrait mettre en place des mécanismes transparents visant le transfert de connaissances nouvelles entre la collectivité scientifique et les chercheurs affectés à la réglementation.

Démarches adoptées par les autres pays

Au Canada, au Japon et aux États-Unis, les scientifiques et les spécialistes gouvernementaux travaillant auprès des diverses autorités réglementaires sont chargés d’effectuer l’évaluation des risques liés à la culture de produits alimentaires GM destinés au bétail et d’évaluer aussi ces produits sur le plan de l’innocuité et de leur dissémination dans l’environnement. Il en est ainsi également des évaluations d’innocuité des aliments GM exécutées par l’Australia New Zealand Food Authority. En revanche, l’Argentine, le Royaume-Uni et l’Australie (dans le cas des évaluations environnementales) font appel, exclusivement ou en partie, à un système d’examen dans lequel ce sont des comités consultatifs scientifiques qui détiennent la responsabilité d’évaluer les applications de la modification génétique et de conseiller les ministres.

Recommandations provisoires concernant la régie judicieuse

1. Structure, organisation et fonctionnement du système fédéral de réglementation des aliments

Observations: Le système fédéral de réglementation des aliments s’appuie sur un certain nombre d’organes de réglementation dont quelques-uns ont un rôle plus actif en regard des enjeux relatif aux aliments GM et aux autres aliments nouveaux. Tous ces organes opèrent en interaction mutuelle, mais sans véritable intégration. Au sein de sa propre sphère d’activité spécialisée, chacun d’entre eux s’occupe de d’enjeux et de préoccupations similaires, mais, en général, l’action n’est pas concertée et n’a pas toute la transparence voulue. Santé Canada et l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) fonctionnent en collaboration plus étroite que les autres éléments du système, mais sans coordination efficace apparente avec les autres éléments. Aucun dirigeant ni porte-parole n’est affecté exclusivement aux questions de salubrité alimentaire au niveau fédéral, que ce soit pour les aliments GM, les autres aliments nouveaux ou les produits alimentaires en général. Les aliments GM et autres aliments nouveaux ne sont actuellement qu’une petite composante de l’ensemble des systèmes d’assurance de la salubrité des aliments, mais la situation pourrait changer sous peu. La mesure dans laquelle la fonction de réglementation garde son indépendance par rapport aux activités gouvernementales de promotion de ces aliments reste mal définie.

Recommandation provisoire 1: Le CCCB recommande au gouvernement d’améliorer la structure, l’organisation et le fonctionnement du système fédéral de réglementation des aliments GM et des autres aliments nouveaux; d’instaurer une série de mesures visant à systématiser et à intégrer plus étroitement les divers organes fédéraux de réglementation; et d’éclaircir la question de l’indépendance de la fonction de réglementation par rapport aux activités gouvernementales de promotion. Il recommande aussi d’effectuer une évaluation des avantages à élargir la portée de ces recommandations pour englober tous le système fédéral de réglementation des aliments.

Nous recommandons expressément les mesures suivantes :

1.1 Nommer un responsable principal en matière de salubrité des aliments GM et des autres aliments nouveaux. Celui-ci sera la référence unique et le porte-parole du gouvernement fédéral en ce qui a trait à toutes les questions relatives aux aliments GM et autres aliments nouveaux, pour ce qui est de protéger la santé humaine et l’environnement, et il coordonnera les activités des différents organes de réglementation. Ce fonctionnaire présidera un nouveau comité des sous-ministres adjoints (SMA) sur la salubrité des aliments GM et autres aliments nouveaux (voir l’article 1.2 ci-dessous) et il sera désigné membre d’office de tous les comités décisionnels des organes de réglementation qui composent le système fédéral de réglementation des aliments.

1.2 Créer un comité de niveau SMA et le charger de surveiller la réglementation de la salubrité des aliments GM et autres aliments nouveaux au Canada. Le comité sera composé de fonctionnaires attachés aux organes fédéraux de réglementation responsable de l’évaluation, de l’approbation et de l’homologation des produits de la biotechnologie et des activités d’inspection et d’application des règlements (il devrait donc compter au moins des représentants de Santé Canada, de l’ACIA, d’Environnement Canada et de Pêches et Océans Canada). Il assurerait l’efficacité de la coordination et des communications entre les ministères et les organismes, ainsi que les activités de planification et d’analyse. Voici quelles seraient les fonctions précises de ce comité :

  • Coordonner l’évaluation des produits et communiquer les résultats des évaluations ainsi que les décisions proposées et prises en matière de réglementation.
  • Coordonner les activités et les instruments propres aux communications axées sur des auditoires externes.
  • Combler les lacunes et éliminer les chevauchements inefficaces dans le système de réglementation.
  • Évaluer la pertinence des lignes directrices qui régissent actuellement les travaux de nature expérimentale faisant appel à l’ADN recombinant et aux autres formes de modification génétique. Cette fonction viserait à déterminer la capacité des lignes directrices actuelles à garantir la sécurité pendant les activités de recherchedéveloppement; la mesure dans laquelle celles-ci sont mises en oeuvre par les chercheurs des secteurs public et privé; et le besoin éventuel de mesures supplémentaires de protection de la santé et de l’environnement, notamment par un examen plus minutieux grâce au système réglementaire ou à l’établissement d’une norme nationale unique pour la recherchedéveloppement.
  • Gérer les compétences scientifiques et techniques au sein de l’administration fédérale afin de veiller à leur maintien et à leur renforcement, selon les besoins, et à leur adaptation aux besoins futurs de réglementation, en examinant périodiquement les résultats des recherches et les tendances du marché.
  • Élaborer et publier des modes opératoires normalisés qui expliquent clairement la délégation des pouvoirs décisionnels; les stratégies en place pour mettre les fonctionnaires à l’abri de toute influence déplacée; les procédures et la justification relatives à l’embauche de spécialistes et de comités d’experts non gouvernementaux dans le cadre de l’exécution du processus de réglementation; les politiques concernant l’élaboration des décisions provisoires et leur soumission à un examen par le public avant la prise de décision finale; et les modalités de fonctionnement des comités décisionnels et des autres éléments du processus d’examen interne.
  • Étudier les possibilités d’améliorer sans cesse les activités d’évaluation et de gestion des risques et de rehausser les capacités d’inspection et de mise à exécution des règlements au regard de produits relativement plus complexes de nouvelle génération. Cette fonction devrait s’exercer dans le but d’assurer la surveillance régulière de la conformité aux conditions d’approbation touchant la production de végétaux GM et d’aliments nouveaux.

1.3 Garantir l’indépendance, dans l’administration fédérale, des fonctions de réglementation par rapport aux fonctions de promotion de l’industrie et du commerce. Le CCCB recommande au gouvernement d’examiner soigneusement ses rouages internes et les rapports qu’il entretient avec les industriels et les commerçants, et de les modifier au besoin. Il s’agirait d’évaluer tous les messages et les documents de communication en portant une attention particulière à la participation des personnes chargées de la réglementation lors de la négociation des politiques et des règles commerciales internationales. Ces mesures devraient être prises dans le but de veiller à ce que les fonctions de réglementation s’exercent avec le plus haut degré possible d’intégrité et d’autonomie; d’éviter d’aggraver la perception d’un conflit de mandat; et de faire en sorte que les fonctionnaires s’occupant de réglementation assument la fonction qui leur revient dans les activités internationales. Quant aux organes de réglementation qui n’ont pas encore de comité permanent chargé d’examiner en détail toutes les décisions proposées relativement aux aliments GM et autres aliments nouveaux, le CCCB juge essentiel qu’ils se dotent d’un tel comité.

1.4 Demander au vérificateur général de voir à la surveillance et de faire un rapport public sur les activités des organes de réglementation participant aux évaluations et aux décisions relatives aux produits alimentaires vendus au Canada, et de contrôler tout spécialement l’indépendance des fonctions de réglementation et l’efficacité des modes opératoires normalisés.

2. Évaluation des effets à long terme sur la santé et l’environnement

Observations: Le gouvernement fédéral effectue des recherches sur les aliments GM, tout comme le font de nombreux pays étrangers, mais il manque un certain nombre d’outils et de programmes pour évaluer et prévoir efficacement les effets à long terme des aliments GM et autres aliments nouveaux sur la santé et l’environnement.

Recommandation provisoire 2: Le CCCB recommande au gouvernement fédéral de lancer un programme important de surveillance des effets à long terme des aliments GM et autres aliments nouveaux sur la santé et l’environnement.

La mise en oeuvre de cette recommandation fait appel aux mesures suivantes :

2.1 Exiger que le processus d’approbation des produits nouveaux comprenne des méthodes efficaces de détection des produits transgéniques.

2.2 Rassembler des données sur la consommation alimentaire afin d’améliorer le processus d’évaluation des risques. Une meilleure compréhension des possibilités d’exposition à certains aliments aiderait à cerner les populations qui courent peut-être des risques supérieurs à la normale et à surveiller les effets à long terme de certaines habitudes de consommation alimentaire.

2.3 Veiller à ce que les nouveaux renseignements scientifiques ou techniques soient pris en compte dans des délais raisonnables. Pour atteindre cet objectif, le gouvernement pourrait intégrer au processus d’approbation des produits une échéance prédéterminée à laquelle il faudrait procéder à une réévaluation de toutes les données nouvelles concernant le produit ou l’estimation des risques relatifs au produit.

2.4 Lancer un programme exhaustif et à long terme de recherche sur les organismes GM faisant déjà partie de la chaîne alimentaire humaine. L’exécution de cette tâche permettrait d’enrichir les connaissances scientifiques au sujet des dangers et des avantages que ces organismes représentent pour la santé et l’environnement. Dans ce domaine, le Canada devrait remplir son rôle de chef de file mondial en étudiant les cultures dont il est un des principaux producteurs, par exemple le colza canola, le soja d’identité préservée, le blé dur, le lin et l’orge brassicole. Il faudrait aussi collaborer avec les autres pays et les tenir informés, et mettre sur pied des programmes visant la collecte et la diffusion de renseignements semblables sur les autres aliments nouveaux.

3. Transparence

Observations: L’administration fédérale veut donner plus de transparence à ses fonctions de réglementation, mais elle se heurte à des contraintes et peut-être aussi à des entraves d’ordre juridique. Le gouvernement ne met pas suffisamment l’accent sur la transparence. La communication des renseignements sur la réglementation des aliments GM et autres aliments nouveaux n’est pas encore très efficace.

Recommandation provisoire 3: Le CCCB recommande au gouvernement fédéral de rehausser son efficacité et sa transparence en faisant connaître au public tous les attributs du système de réglementation des aliments GM et autres aliments nouveaux, y compris les fondements scientifiques des décisions réglementaires reliées à la santé et à la sécurité de l’être humain et de l’environnement.

Nous recommandons les mesures suivantes :

3.1 Continuer de faire participer la population canadienne à l’élaboration des lois, des règlements, des politiques et des programmes relatifs au système fédéral de réglementation des aliments.

3.2 Améliorer l’information et les communications au sujet du système fédéral de réglementation des aliments. Pour ce faire, il faudrait diffuser des arbres de décision qui décrivent clairement les autorités réglementaires, les centres de responsabilité, les lois et activités pertinentes, les étapes de l’évaluation des risques et du processus décisionnel, la progression au sein du système de réglementation, les schémas chronologiques, les mécanismes de règlement des conflits d’opinion et les possibilités de participation du public à diverses étapes.

3.3 Tenir un registre public et facilement accessible de tous les produits alimentaires GM et autres aliments nouveaux qui sont en cours d’examen, ainsi que de leur stade d’évaluation.

3.4 Diffuser systématiquement, au moyen de documents publiés, les résultats des évaluations des aliments GM et autres aliments nouveaux ainsi que les décisions réglementaires proposées. La diffusion serait suivie d’une période de 45 jours pendant laquelle le public pourrait faire part de ses commentaires sur les propositions, après quoi viendrait la publication d’une décision finale, modifiée au besoin en fonction des commentaires reçus.

Ces documents devraient couvrir, au minimum, les sujets suivants :

  • la détermination des produits;
  • la description de la conception et de la production des aliments, des végétaux et des ingrédients GM;
  • les méthodes d’analyse et de détection;
  • les données sur la valeur nutritive;
  • une description des renseignements concernant les risques pour la santé – les points terminaux vérifiés, un résumé des données et des résultats des essais, les conclusions principales au sujet de l’ensemble de données;
  • l’exposition dans le régime alimentaire – expliquer la méthode utilisée pour évaluer le risque potentiel d’exposition;
  • les conclusions tirées quant aux incidences sur la santé humaine;
  • une description des renseignements concernant les caractères environnementaux et les risques possibles pour l’environnement – les points terminaux vérifiés, un résumé des données et des résultats des essais, les conclusions principales au sujet de l’ensemble de données;
  • l’évolution et le comportement des OGM dans l’environnement – expliquer la méthode utilisée pour évaluer leur évolution et leur comportement possibles dans l’environnement, par exemple la persistance, la répartition, le flux génétique;
  • les conclusions tirées quant aux incidences sur l’environnement;
  • les incidences sur la pérennité de l’environnement.

3.5 Mettre à la disposition du public les données scientifiques et techniques détaillées examinées par le gouvernement au moment d’évaluer les aliments GM et autres aliments nouveaux afin de déterminer la salubrité et l’innocuité de ces produits pour la santé humaine et l’environnement. À cette fin, il faudrait procéder à un examen en vue d’assurer l’interprétation exacte des dispositions actuelles de la Loi sur l’accès à l’information. Il faudrait aussi étudier la possibilité d’apporter les modifications voulues aux lois et règlements en vigueur. Par ailleurs, l’obligation d’informer ne devrait pas s’appliquer à des renseignements tels que le mode d’élaboration et de fabrication du produit, car cela compromettrait gravement la compétitivité de l’entreprise en cause. De plus :

  • Il faudrait donner accès à des renseignements sur les produits vendus au Canada et sur ceux dont la vente fait l’objet d’une demande d’approbation.
  • Les dispositions actuelles de la Loi sur l’accès à l’information ne devraient pas être interprétées comme exigeant que le gouvernement garde confidentielles les données techniques ou scientifiques que leur propriétaire n’a pas marquées d’une stricte confidentialité, par exemple si les données sont déjà publiées ou mises à la disposition du public dans un pays où le produit a déjà été approuvé.
  • Il faudrait envisager d’apporter aux lois et règlements pertinents les modifications nécessaires à la diffusion des données.

3.6 Réexaminer la dérive des pollens ainsi que les zones tampons créées actuellement dans le cadre des essais au champ de culture de végétaux GM et d’autres plantes à caractères nouveaux. Toutes les demandes d’approbation concernant des végétaux à caractères nouveaux devraient obligatoirement contenir des renseignements sur la dérive des pollens. Les cultivateurs dont les champs sont situés dans un rayon de cinq kilomètres du lieu d’essais au champ de cultures GM devraient avoir accès, sur demande, à des renseignements détaillés afin de pouvoir protéger leurs propres cultures. Mis à part ces cultivateurs, il ne faudrait pas divulguer l’endroit exact de ces études sur le terrain, en raison du risque de vandalisme. Il faudra mener d’autres études pour arriver à mieux comprendre les caractéristiques et les risques éventuels des produits GM.

3.7 Publier chaque année des renseignements concernant les programmes d’inspection gouvernementaux, la conformité aux mesures touchant les produits GM, la fréquence des cas de non-conformité et les mesures mises en oeuvre pour corriger la non-conformité.

3.8 Publier chaque année des renseignements concernant les programmes de recherche gouvernementaux et les résultats des recherches sur les dimensions sanitaires et environnementales des produits GM, qu’il s’agisse d’aliments pour les humains ou les animaux, de végétaux ou d’autres produits nouveaux.

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Thème 2 – Information et choix

Le respect de la diversité et de l’autonomie va de pair avec celui des habitudes de vie et des fondements culturels d’autres peuples, ainsi que de leur droit de faire des choix éclairés conformément à leurs valeurs et intérêts personnels. Dans le contexte des aliments GM, cela implique de mettre à la disposition du citoyen des renseignements complets et en langage clair, le tout accompagné d’outils permettant d’asseoir ces choix. Les enjeux et les recommandations dont ce thème fait l’objet visent à étoffer la qualité de l’information présentée et à permettre de faire des choix éclairés.

Enjeu 7 – Prestation de l’information nécessaire à des choix éclairés

Objet de l’enjeu

Afin de faire des choix éclairés sur leur alimentation, les Canadiens ont besoin d’information précise, équilibrée et facile à consulter au sujet de la production, de la réglementation, de la valeur nutritive, des risques et avantages, et d’autres caractéristiques des aliments qu’offre le marché. Le coeur de la question est de décider de la meilleure façon de fournir l’information et des ressources les mieux appropriées à cette fin.

Problèmes cernés

Malgré diverses tentatives pour présenter des renseignements de façon limpide (par exemple, sur des sites Web du gouvernement), la documentation offerte aux Canadiens sur la biotechnologie, les aliments GM et le système de réglementation reste difficile à trouver et à comprendre.

Le problème tient en partie à la complexité de cette information. Le défi consiste donc en sa présentation sous format convivial adapté à divers publics et de façon à la fois précise et facile à comprendre. Il s’agit aussi de la présenter sans distorsion, de sorte qu’elle épaule vraiment le choix éclairé et inspire confiance. Présentement, l’information disponible semble souvent chercher à persuader le lecteur d’être pour ou contre la technologie et/ou les produits, ainsi qu’à promouvoir des points de vue ou des comportements spécifiques.

Mesures envisagées

Voici les mesures que le CCCB a d’abord envisagées relativement à cet enjeu :

Fournir une meilleure information sur le système de réglementation – La première étape pourrait consister en l’amélioration de la description et de la diffusion de l’information portant sur le système canadien de réglementation des aliments GM et autres aliments nouveaux et des mesures visant à s’assurer que l’information présentée est complète, abordable et facile à consulter. Plusieurs outils (par exemple, Internet, des livrets et des articles) pourraient faciliter une dissémination plus généralisée, et le matériel devrait être rédigé selon divers niveaux de complexité en fonction de diverses catégories de lecteurs.

Mettre sur pied un service centralisé d’information – Il pourrait également être utile au consommateur d’avoir accès à un service centralisé d’information sur la biotechnologie des aliments. Ce service pourrait offrir de l’information sur la production des aliments, la biotechnologie des aliments GM et autres aliments nouveaux, les lois et règlements pertinents, les connaissances scientifiques, les perspectives sur des enjeux éthiques et sociaux, les recherches et activités en cours, et la façon de contribuer aux activités reliées au gouvernement. Afin de présenter une information équilibrée, il pourrait être utile de discuter des aliments traditionnels et des pratiques de reproduction des plantes, et de fournir une description utile des avantages, des risques et des incertitudes ayant trait aux divers types d’aliments.

Accroître la sensibilisation et la participation – En sus des options décrites ci-dessus, il pourrait être utile de mettre sur pied un programme de communications proactif pour sensibiliser davantage le public et donner aux Canadiens l’occasion de commenter divers aspects des aliments GM grâce à un dialogue public.

Enjeu 8 – Étiquetage

Objet de l’enjeu

La question sous-tendant l’étiquetage des aliments GM porte sur le fait que le système canadien actuel est ou n’est pas adéquat, sur le besoin ou non de l’épauler par une norme volontaire et sérieuse d’étiquetage, ou sur le besoin d’imposer un processus systématique mais obligatoire.

Le système de réglementation canadien actuel exige l’étiquetage de tous les aliments, y compris les produits GM, pour des raisons de salubrité et de sécurité. Par exemple, tout changement significatif de valeur nutritive ou de composition ou toute présence d’allergènes doit figurer sur l’étiquette. Il faut que l’information inscrite puisse être vérifiée. Toutes les informations sur les étiquettes doivent être exactes et en langage clair; elles ne doivent être trompeuses. Présentement, il n’y a aucune obligation d’étiqueter un aliment comme étant un produit de la biotechnologie.

Afin de veiller à ce que l’étiquetage informe et n’induise pas en erreur, le Conseil canadien de la distribution alimentaire (CCDA) et l’Office des normes générales du Canada (ONGC) s’affairent présentement à élaborer une norme d’étiquetage volontaire des aliments GM. Le CCDA est un organisme regroupant près de 80 p. 100 des grands détaillants canadiens du secteur de l’alimentation, et il participe à des programmes de sensibilisation et d’éducation du public au sujet de la biotechnologie. L’ONGC est un organisme relevant de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada. Ces entités travaillent à l’élaboration d’une norme d’étiquetage, de concert avec des associations de consommateurs, des entreprises alimentaires, des producteurs, des groupes d’intérêts et des gouvernements.

Certains Canadiens préféreraient que l’étiquetage des aliments GM fasse l’objet d’un processus systématique obligatoire. Cette préférence se fonde sur un éventail de raisons, dont des préoccupations touchant la santé et l’environnement, le manque d’information sur les mesures gouvernementales répondant aux soucis quant à la salubrité, et les enjeux sociaux ou éthiques. D’aucuns voient dans l’étiquetage obligatoire le seul outil permettant à ceux qui ne veulent pas consommer d’aliments GM d’identifier et de choisir des produits en fonction de leur contenu GM (Nota : le projet de loi C-287 a été inscrit au feuilleton de la Chambre des communes du Canada comme un projet de loi d’initiative parlementaire le 26 avril 2001. Ce projet propose un système obligatoire d’étiquetage des aliments GM par l’entremise d’amendements à la Loi sur les aliments et drogues du Canada).

De nombreux pays, dont le Canada, travaillent ensemble à l’élaboration d’une démarche internationale. Par exemple, le Canada participe de plain-pied au Comité du Codex sur l’étiquetage des denrées alimentaires préemballées, un comité international composé de représentants de gouvernements de plusieurs pays, pour convenir d’une position internationale commune sur l’étiquetage. Une fois fixées, les normes seront volontaires, comme le sont toutes les normes Codex, lesquelles acquièrent de plus en plus de poids en commerce international.

Il semble que l’enjeu principal de l’étiquetage ait trait aux valeurs et aux choix. Les grandes questions sont de savoir si ces éléments sont des motifs suffisants pour faire entrer l’étiquetage en jeu afin de pouvoir identifier les produits issus ou non de techniques impliquant des modifications génétiques. Un tel étiquetage devrait-il être obligatoire? Ou encore l’étiquetage volontaire, comme dans le cas des produits biologiques, offre-t-il un choix raisonnable et suffisant?

Problèmes cernés

Quoiqu’il existe certaines exigences quant à l’étiquetage de tous les aliments, y compris les aliments GM, certains soulèvent le fait que l’étiquetage ne tient pas compte des préoccupations sociales et éthiques ou des méthodes de production. Ce sont là des facteurs qui peuvent influer sur les choix que fait le consommateur. En vertu du système actuel, on peut difficilement choisir de consommer ou non des aliments GM car il n’y a pas de norme d’étiquetage des produits GM. On peut y voir une restriction à l’autonomie individuelle. On a également suggéré que les produits biologiques, que l’on dit libres d’aliments GM, pourraient être une solution pour ceux qui préfèrent ne pas consommer d’aliments GM. Cependant, le manque de méthodes de détection efficace applicables aux aliments ou ingrédients GM ne permet pas de vérifier ces affirmations. De plus, il n’y a guère d’aliments préparés qui soient constitués essentiellement de produits biologiques.

Si les produits GM étaient systématiquement étiquetés, le consommateur aurait le choix de se procurer ou non des aliments GM, peu importe que le choix se fonde sur des considérations de santé ou de salubrité, de convictions ou de préférences personnelles. Certains soutiennent qu’un système formel d’étiquetage pourrait réduire l’ampleur des différences entre diverses pratiques d’étiquetage, ce qui rendrait les étiquettes plus claires, significatives et précises.

L’étiquetage exigerait un système de ségrégation des récoltes GM et conventionnelles au niveau des grossistes et un système de vérification des affirmations, possiblement à l’échelle internationale. Certains hésitent à mettre au point un système de ségrégation des récoltes à l’origine parce qu’ils craignent attirer l’attention sur le fait que leur production est en bonne partie génétiquement modifiée, ce qui ferait du tort à leurs marchés. De plus, il est possible que ces exigences augmentent le coût des aliments, gênent des travaux utiles de recherche-développement, et diminuent la possibilité d’exportation de produits issus de pays en développement. Par contre, certains estiment que ces exigences s’imposeront, qu’il y ait ou non étiquetage, à cause de pressions par des partenaires commerciaux. L’une des préférences notées est de consacrer davantage de ressources aux essais et à l’évaluation des aliments plutôt qu’à des projets d’étiquetage.

L’étiquetage serait chose complexe. Les producteurs et l’industrie de l’alimentation estiment que près de 75 p. 100 de tous les aliments préparés comprennent des ingrédients à base de maïs, soya ou colza canola. Comme les grossistes canadiens ne font généralement pas de distinction entre les récoltes conventionnelles et les récoltes GM, les produits en sont un mélange. Les producteurs d’aliments préparés n’ont aucun moyen de connaître la quantité de produits GM dont ils se servent. Bien qu’il existe des tests pour identifier certaines cultures et certains ingrédients GM, ils sont d’une utilité restreinte quant à ce qu’ils vérifient, à leur disponibilité commerciale et à l’efficacité coût-rendement.

L’application effective d’exigences en matière d’étiquetage, qu’il soit volontaire ou obligatoire, serait fortement gênée par le manque de normes objectives et internationalement reconnues de vérification de la présence ou absence d’un aliment GM dans un produit. Cette difficulté se complique du fait que certains systèmes volontaires proposent l’étiquetage de produits alimentaires fortement traités ne comprenant pas d’ADN ou de protéines, par exemple de l’huile de colza canola, maïs ou soya, ou de sucre provenant de betterave à sucre, lorsqu’ils sont obtenus à partir de cultures GM. En l’absence de moyens adéquats de vérification, les exigences imposées par tout protocole d’étiquetage ne peuvent facilement être imposées. Le manque de méthodes de normalisation et de vérification est l’une des grandes critiques émise à l’endroit de l’étiquetage obligatoire d’aliments GM, que d’aucuns perçoivent comme arbitraire et protectionniste.

En ce qui a trait à l’étiquetage volontaire, certaines entreprises pourraient ne pas étiqueter leurs aliments GM si elles ne sont pas tenues de le faire. Si l’industrie ne l’adopte pas, la norme d’étiquetage volontaire serait virtuellement inutile.

Certains estiment que seul un système obligatoire permettrait de s’assurer que le consommateur puisse faire des choix éclairés et disposer de la liberté de choix. Cependant, d’autres pensent qu’un système obligatoire préviendrait la mise en marché de certains aliments par crainte d’un rejet par le consommateur ou de la faiblesse des ventes, ce qui empêcherait le public d’avoir accès à des produits pouvant lui offrir des avantages au chapitre de la consommation, de l’environnement et de l’économie. Un système obligatoire d’étiquetage pourrait également être perçu comme contrevenant aux obligations commerciales internationales. Pourraient s’ensuivre des représailles de la part de partenaires commerciaux et des obstacles à la compétitivité internationale des produits alimentaires GM canadiens.

Mesures envisagées

Voici les mesures nationales que le CCCB a envisagées en matière d’étiquetage :

  • Appuyer l’élaboration d’une norme utile et volontaire d’étiquetage des aliments (par exemple, le projet actuel ONGC/CCDA).
  • Élaborer un système obligatoire d’étiquetage.
  • Disposer d’un système fiable de vérification (par exemple, des méthodes de détection et un programme de contrôle) à l’appui de l’étiquetage, que celui-ce soit volontaire ou obligatoire.
  • Inscrire sur l’étiquette une source d’information permettant aux Canadiens d’obtenir davantage de données sur les aliments GM, et faire la promotion de l’utilisation et de la compréhension du système d’étiquetage.

En ce qui a trait aux volets internationaux de l’étiquetage des aliments, le CCCB a examiné tout particulièrement le rôle du Canada en matière de promotion et de contribution au développement d’un système international harmonisé d’étiquetage des aliments GM.

Le CCCB s’est vite rendu compte que si l’étiquette était une bonne façon de présenter aux Canadiens de l’information sur leurs aliments, elle n’offrait pas toute l’information nécessaire pour faire un choix éclairé. Tout système d’étiquetage ne fonctionnerait vraiment bien qu’en tandem avec d’autres véhicules d’information pertinente.

Démarches adoptées par les autres pays

La mise sur pied d’un étiquetage volontaire ou obligatoire des aliments GM est considérée comme le principal moyen d’information dont le consommateur a besoin pour faire des choix à l’achat. Certains pays, dont ceux de l’Union européenne, le Japon, l’Australie et la Nouvelle-Zélande ont annoncé des exigences d’étiquetage obligatoire des aliments GM contenant des quantités détectables d’ADN ou de protéines nouvelles. Si ces systèmes se ressemblent quant aux objectifs, ils présentent des différences marquées quant aux aliments qui doivent être étiquetés (soit aliments comme tels plutôt qu’aliments traités ou plats en restaurant). Il y a également les différences de seuil applicables aux additifs alimentaires qui pourraient provenir d’aliments GM, ainsi que des seuils indiquant la présence non prévue d’aliments GM dans de la nourriture traitée.

En janvier 2001, aux États-Unis, la FDA a publié son projet de lignes directrices à l’intention de l’industrie, le Voluntary Labelling Indicating Whether Foods Have or Have Not Been Developed Using Bioengineering. Ce document vise à informer les producteurs d’aliments quant à l’acceptabilité de divers types d’information sur l’étiquette et à renforcer le fait que l’étiquetage doit être exact et ne pas induire en erreur. Tout particulièrement, la FDA a réitéré l’exigence que les fabricants doivent prouver les renseignements indiqués sur leurs étiquettes et que le fait d’inscrire qu’un aliment « n’est pas issu du génie biologique » ne dénote pas une supériorité quelconque.

Recommandations provisoires concernant l’information et le choix

4. Information et choix éclairé

Observations : Les Canadiens veulent avoir facilement accès à des renseignements fiables et complets au sujet des produits alimentaires, y compris les aliments GM et autres aliments nouveaux. Les sources actuelles d’information font l’objet de critiques parce que les gens estiment que les données mises à leur disposition sont douteuses, incomplètes, trop techniques et généralement peu adaptées au grand public. Les Canadiens veulent aussi pouvoir choisir eux-mêmes d’acheter ou non des aliments GM. Les décisions des consommateurs peuvent être influencées par des préoccupations en matière de santé et d’environnement ainsi que par des principes, des convictions et des valeurs. À l’heure actuelle, l’étiquetage explicite est exigé pour des motifs de santé tels que la présence d’allergènes ou une modification importante de la teneur nutritive d’un aliment. Les lois en vigueur permettent l’étiquetage volontaire à condition que le contenu de l’étiquette ne soit pas trompeur. Toutefois, en l’absence d’une norme systématique et fiable d’étiquetage pour indiquer si un aliment est issu ou non de la modification génétique, il est impossible de vérifier l’exactitude d’allégations du genre « Aliment sans élément GM ». D’autres pays sont en voie d’adopter diverses politiques d’étiquetage obligatoire ou volontaire.

Recommandation provisoire 4 : Le CCCB recommande au gouvernement fédéral d’instaurer des mécanismes qui permettront aux Canadiens de faire des choix éclairés relativement aux aliments qu’ils consomment. Le gouvernement devrait accroître les ressources existantes en vue d’offrir aux Canadiens un service centralisé d’information exacte et complète sur les aliments GM et autres aliments nouveaux ainsi que sur le système de réglementation des aliments et les normes et règlements régissant les produits alimentaires. Le gouvernement devrait également voir à ce que soit élaborée une ligne de conduite concernant l’étiquetage des aliments comme étant génétiquement modifiés ou non, et s’assurer que cette démarche, conjuguée au service centralisé d’information, aidera effectivement et efficacement les Canadiens à prendre des décisions éclairées en matière d’alimentation.

Nous recommandons les mesures suivantes :

4.1 Mettre sur pied un service centralisé d’information qui constituera la voie principale utilisée par l’État pour donner aux Canadiens des renseignements sur les produits alimentaires en général et sur les aliments GM et autres aliments nouveaux. Ce service devrait être le fruit d’une collaboration étroite entre tous les ministères et organismes gouvernementaux s’occupant de réglementation des aliments, de recherche sur les aliments, de politique alimentaire et de protection des consommateurs. Les renseignements diffusés devraient, pour la plupart, provenir de l’administration fédérale et toujours être impartiaux. Il faudrait fonder l’organisation et le fonctionnement du service sur une stratégie globale, et les fonds consacrés aux activités gouvernementales de communication et d’information devraient appuyer cette stratégie.

4.2 Dans le cadre de la stratégie en question, élaborer des renseignements fiables qui seront utilisés par les professionnels de la santé et les autres intermédiaires de ce domaine, par exemple les médecins, le personnel infirmier, les nutritionnistes, les diététistes, les enseignants, les travailleurs communautaires, les associations de consommateurs, le grand public et les médias.

4.3 Concevoir et instaurer un système d’étiquetage des aliments contenant des éléments GM et poursuivre les travaux visant l’adoption d’un régime international d’étiquetage.

  • Produire un ensemble de critères précis concernant l’étiquetage explicite des aliments contenant des éléments GM. Dans ce but, il convient notamment de continuer à appuyer les travaux en cours de l’Office des normes générales du Canada et du Conseil canadien de la distribution alimentaire.
  • Veiller à ce que toutes les allégations indiquées sur les étiquettes au sujet de la modification génétique soient vérifiables et s’assurer que les programmes et les techniques nécessaires soient en place pour en garantir la validité.
  • Appliquer la norme d’étiquetage de façon volontaire, du moins au départ, afin d’en vérifier la pertinence et l’efficacité, et en faire la promotion dans tout le pays de sorte que les consommateurs puissent vraiment faire des choix éclairés.
  • Continuer de collaborer avec les autres pays dans les instances internationales en vue d’élaborer une démarche mondiale commune concernant l’étiquetage explicite des aliments GM.
  • En fonction de la réussite relative de cette stratégie, et surtout si elle ne parvient pas à offrir aux Canadiens une latitude suffisante pour choisir les aliments qu’ils consomment, il faudra considérer de nouveau l’imposition d’un régime obligatoire d’étiquetage.

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Thème 3 – Considérations sociales et éthiques

Du point de vue du CCCB, l’intérêt public constitue la pierre angulaire de l’élaboration de politiques et programmes gouvernementaux valables. Comme il en était fait mention précédemment, l’intérêt public comprend la santé des citoyens canadiens, leur qualité de vie, l’environnement, la prospérité de l’économie canadienne, ainsi qu’une communauté mondiale durable et pacifique. Les enjeux sociaux et éthiques portant sur l’intérêt public font corps avec certains aspects de la réglementation des aliments GM et autres aliments nouveaux, ainsi que de nombreuses questions et recommandations dont le présent rapport fait état. De par leur nature même, les politiques sous-tendant et protégeant la santé des êtres humains et l’environnement sont le reflet d’une certaine prise de position éthique et de valeurs sociales. Ce thème cherche à aller plus loin et à traiter de certaines des grandes dimensions sociales et éthiques de la biotechnologie de l’alimentation.

Enjeu 9 – Bonne intendance de l’environnement

Objet de l’enjeu

La bonne intendance de l’environnement est un élément fondamental de l’analyse des responsabilités sociales et éthiques. Il ne s’agit pas seulement de la protection traditionnelle de l’environnement, mais également de la question plus générale de la durabilité et de l’intégration d’objectifs sociétaux importants, dont la santé de la population, le bienêtre social, la conservation de l’environnement et la prospérité économique. Elle implique un leadership en matière de produits et de technologies, et exige l’examen des répercussions cumulatives possibles à long terme et de tous genres sur la santé, l’environnement et l’économie. Le savoir qu’offre une discipline telle que la science des écosystèmes est essentiel, comme le sont la coopération internationale sur les questions environnementales mondiales et les liens étroits entre les milieux scientifiques et ceux de la réglementation. La bonne intendance de l’environnement peut s’appliquer à pratiquement tout type d’activité ou produit, y compris la biotechnologie.

Dans le cadre de l’évaluation des produits, procédés, technologies et services, l’une des grandes caractéristiques de la bonne intendance de l’environnement touche à une démarche basée sur le cycle de vie. Cette dernière reconnaît que toutes les étapes de l’existence d’un produit (par exemple, la fabrication, le transport, la distribution, l’utilisation et la réutilisation, et la gestion des déchets) ont des répercussions dans plusieurs domaines – dont la qualité de vie, l’environnement, l’économie et autres – dont il importe de tenir compte dans l’évaluation des risques et avantages que les produits présentent. Cette démarche suppose également l’évaluation du besoin d’un produit, de sa valeur ajoutée, des solutions de rechange et des questions plus générales de durabilité.

Tel que décrit au début du présent rapport dans la section Aliments GM, autres aliments nouveaux et système de réglementation canadien, le système de réglementation canadien examine les récoltes GM au moins en ce qui a trait à certaines répercussions environnementales. Cependant, il n’existe aucun système qui traite de l’aspect général de l’intendance.

Problèmes cernés

Les connaissances – Les connaissances sous-tendant la bonne intendance de l’environnement sont essentiellement issues de la science des écosystèmes. Elles reposent sur une excellente compréhension de la structure et de la dynamique des écosystèmes, et des répercussions que les phénomènes naturels et les activités humaines leur imposent. On se préoccupe du fait que la capacité canadienne en sciences des écosystèmes est en perte de vitesse depuis une décennie, principalement à cause de coupures budgétaires en recherche et en formation ayant trait aux disciplines de l’écologie. D’aucuns pensent que cela peut avoir gêné la création de liens entre des spécialistes en réglementation et en sciences dans ce domaine, et diminué la qualité du savoir-faire requis pour réaliser des évaluations sophistiquées des cultures GM. D’autres estiment qu’il faudra, avec l’arrivée prochaine de récoltes et d’aliments GM plus complexes de deuxième génération, faire davantage de recherches en sciences des écosystèmes.

Évaluation des produits – En ce qui a trait aux évaluations gouvernementales de cultures GM et d’autres cultures non conventionnelles, certains observateurs croient que l’application de principes internationalement reconnus et la collaboration avec des homologues étrangers pourront amener davantage de pays à convenir d’une norme d’évaluation. À mesure que d’autres pays se doteront de savoir à ces titres, ils seront plus à même de tenir compte, et ce de façon constante, des besoins qu’il faudra mieux cerner et améliorer. Dans le cadre actuel de l’approbation au Canada et ailleurs des aliments GM et autres aliments nouveaux, d’aucuns estiment que des démarches et des principes communs ne suffiront pas à la tâche et ils préconisent une démarche plus musclée. Ils suggèrent également que des assises plus scientifiques permettront d’effectuer des évaluations qui tiendront mieux compte des répercussions écologiques des produits qu’on se propose de lancer.

Mesures envisagées

Voici les mesures que le CCCB a d’abord envisagées relativement à cet enjeu :

Renforcer les connaissances de base – La bonne intendance de l’environnement repose sur un investissement de taille en recherche et sur une base améliorée des connaissances fondamentales touchant à la dynamique des écosystèmes et aux mécanismes par lesquels la technologie affecte les écosystèmes. Étant donné l’importance des exportations et du rôle international du Canada dans des domaines tels que l’agriculture, la foresterie et l’aquaculture, ces disciplines en particulier pourraient devenir le point de mire de projets de recherche en écologie. Il faudrait songer sérieusement à y inclure des projets multipartites internationaux et le partage des nouvelles connaissances.

Devenir un chef de file grâce à une démarche centrée sur le cycle de vie – Certains pensent qu’il serait souhaitable de déterminer comment la démarche basée sur le cycle de vie pourrait s’appliquer aux produits GM et autres produits nouveaux. D’autres estiment que cela n’est pas nécessaire pour arriver à une évaluation réglementaire et à la gestion efficaces des cultures et aliments GM et des autres cultures et aliments nouveaux, et que la bonne intendance de l’environnement en agriculture devrait être étudiée dans le contexte plus général de la culture de la terre plutôt que de la simple question des cultures GM.

Évaluation des produits – La science de l’évaluation des répercussions environnementales dépend de l’accès sans restriction à l’information et d’un examen rigoureux. L’évaluation environnementale des cultures GM pose un défi car il est possible que les répercussions dépassent largement le cadre du moment et de l’endroit de leur introduction. Tant les systèmes naturels qu’agricoles suscitent des préoccupations. Certains estiment que les systèmes actuels d’évaluation des OGM, fondés sur des principes internationalement reconnus, sont complets et efficaces. D’autres croient que les procédures actuelles ont besoin d’être renforcées pour pouvoir examiner plus attentivement le transfert horizontal de gènes, les effets sur les cycles biogéochimiques impliquant des micro-organismes du sol, la persistance des OGM, la résistance aux ravageurs et la modification des écosystèmes naturels. De plus, on trouve qu’il faut davantage insister sur des études scientifiques multidisciplinaires de haut niveau et à long terme portant sur les répercussions environnementales possibles des OGM et que, lorsque leur introduction s’étend à une région dans son ensemble, les répercussions sur le paysage soient analysées.

Enjeu 10 – Considérations générales d’ordre social et éthique

Objet de l’enjeu

Lors de discussions internationales sur les aliments GM, plusieurs grandes questions sociales et éthiques ont été soulevées. Elles sont directement ou indirectement reliées à l’origine et à la production d’aliments GM et à leur introduction dans diverses sociétés. Touchant principalement à la justice, à la bienfaisance (soit faire ou produire quelque chose de bien) et au respect des diversités culturelles et des connaissances traditionnelles, ces questions font l’objet de grands débats internationaux et, dans certains cas, peuvent jouer sur l’attitude des gens vis-à-vis des aliments GM.

Il importe de noter que ces grandes questions sociales et éthiques ne se limitent généralement pas aux aliments GM et que, dès lors, leur analyse et gestion seraient mieux assises dans un contexte dépassant le cadre des aliments GM ou même celui de la biotechnologie. Les mécanismes ou les organes de réglementation actuels peuvent suffire à traiter certaines questions. D’autres cependant pourraient exiger des structures et démarches différentes au titre des dialogues nationaux et internationaux, des négociations et des gestes à poser.

Sujets préoccupants

Acceptabilité éthique – La biotechnologie permet aux scientifiques de produire des organismes affichant diverses combinaisons de matériel génétique – provenant d’espèces apparentées ou distantes, voire même d’espèces qui ne sont pas reliées. Certains croient que de telles modifications génétiques sont fondamentalement mauvaises. Pour d’autres, il n’y a problème que lorsque les combinaisons impliquent des espèces génétiquement éloignées. D’autres encore se demandent si de telles gestes sont nécessaires. Néanmoins, certaines personnes estiment que la technologie peut générer des avantages considérables, lesquels justifient son développement. Comme ces opinions sont fort divergentes et vu l’existence de diverses positions éthiques, on a recommandé que certains procédés ou applications de la technologie des aliments GM ne soient jamais développés, quelles que soient les circonstances.

Connaissances et ressources traditionnelles – De nombreuses sociétés partout dans le monde sont riches en ressources et connaissances traditionnelles porteuses d’avantages en matière de développement de nouveaux aliments GM. Grâce à ces ressources et connaissances, des entreprises peuvent produire de nouvelles combinaisons génétiques convenant à un objectif ou un environnement particulier. Cependant, lorsque ces entreprises détiennent des brevets sur ces nouveautés, les individus ou sociétés qui y ont contribué peuvent ne pas en dériver de gains financiers. De plus, les entreprises vendent parfois de tels produits – par exemple, des semences et plantes améliorées – aux sociétés et fermiers sources et en tirent des profits substantiels. Si de telles questions préoccupent certaines personnes, elles dérangent moins d’autres individus qui estiment que les cultivateurs et consommateurs de ces sociétés en tirent de grands bienfaits. Les discussions à ce sujet font leur chemin dans les forums internationaux, et les médias font état graduellement du fait que certaines entreprises songent à établir un système de partage.

Déséquilibre des pouvoirs et vulnérabilité – Comme c’est le lot de nombreuses technologies nouvelles, l’arrivée des aliments GM soulève la question d’un déséquilibre possible entre ceux qui en profiteront le plus et ceux qui encourront les risques les plus graves. Présentement, le plus grand avantage est associé à la productivité et aux gains financiers que se partagent un petit nombre de gens (par exemple, les fabricants et les producteurs), tandis que les répercussions imprévues sur la santé et l’environnement affecteront probablement une population plus vaste. Pour fin de correctif, d’aucuns proposent de consentir davantage d’efforts à l’atteinte d’un meilleur équilibre, le tout accompagné de retombées plus grandes pour le consommateur et les sociétés traditionnelles. D’autres trouvent que les retombées sont déjà partagées à plus grande échelle, et que les effets positifs en matière de création d’emplois, d’économie, d’une moindre utilisation de pesticides, etc., ainsi que des retombées imprévues, avantageraient de larges segments de la population.

Présentement, quelques grandes entreprises des sciences de la vie détiennent un part croissante du marché des aliments GM. Cette domination entraîne des craintes chez ceux qui y voient un facteur de diminution de l’autosuffisance alimentaire et une menace à la souveraineté de certaines nations. À cause des délais et des frais menant à l’approbation d’un produit par le système de réglementation, d’autres considèrent cette domination comme nécessaire.

Le lancement de nouvelles technologies et l’injection de capital dans des pays caractérisés par une économie agraire et des systèmes de culture traditionnelle peuvent grandement modifier les pratiques agricoles locales et les sociétés. Dans le contexte des aliments GM, certaines personnes craignent qu’il y ait déstabilisation du mode de vie traditionnelle et vulnérabilité accrue des fermiers pauvres. Nombreux sont ceux qui prétendent que cela ne découle pas seulement de l’arrivée des aliments GM ou même de la biotechnologie, mais de toute technologie de pointe.

La biotechnologie des aliments peut également être perçue comme un élément permettant de soulager le fardeau de la pauvreté et de la faim, et l’une des solutions aux problèmes des sociétés vulnérables. On y voit une façon d’assurer l’alimentation, de nourrir trois autres milliards de gens d’ici 2050 et de régler les problèmes causés par un territoire agricole plus restreint et la carence croissante d’eau, sans pour autant dégrader l’environnement. Certains partisans de la technologie entrevoient le besoin de transférer des connaissances biotechnologiques aux pays en développement et d’amener les fermiers pauvres à adopter des technologies de pointe. Ils appuient une démarche coopérative centrée sur la satisfaction de besoins spécifiques des nations moins développées.

Éthique et économie environnementale – Selon l’éthique environnementale, il est mauvais que des individus, entreprises ou sociétés agissent ou fassent du développement qui mine la santé à long terme de l’environnement et la diversité naturelle florale et faunique. D’aucuns croient que le respect de cette éthique exige un plus grand souci de l’économie environnementale. Cette discipline se décrit généralement comme la gamme de moyens économiques possibles qui contribueraient directement ou indirectement à la conservation de l’environnement. Ces moyens comprennent, entre autres, des incitatifs financiers, dont des subventions ou des mesures dissuasives, par exemple des taxes qui poussent les gens à prendre des décisions environnementalement saines. Dans le contexte des aliments GM et autres aliments nouveaux, certains suggèrent qu’il faudrait peut-être examiner plus avant la signification et l’application de l’économie environnementale.

Mécanismes axés sur des solutions aux questions sociales et éthiques – Comment devrait-on examiner et résoudre les grandes questions sociales et éthiques touchant aux aliments GM? Les systèmes de réglementation nationaux de salubrité des aliments se penchent sur la question des risques possibles en matière de santé et d’environnement, mais se fient essentiellement sur des facteurs et évaluations scientifiques. L’éthique entre en jeu en ce que la salubrité de la santé et de l’environnement sont considérées comme des facteurs prioritaires, et que l’on a adopté des politiques visant la protection des éléments les plus vulnérables de la société, par exemple les enfants et les personnes âgées. Mais les systèmes de réglementation des aliments, tant au Canada qu’à l’étranger, ne tiennent pas compte de ces questions lors de la prise de décisions sur des produits individuels.

Certains estiment qu’il faut accorder beaucoup plus d’attention à ces grandes dimensions sociales et éthiques, et ce, dans le cadre des évaluations produit par produit. D’autres craignent qu’un débat plus ouvert à l’échelle du produit pourrait être une stratégie visant à retarder l’approbation de produits. On craint également que cela ne diminue la prévisibilité du processus de réglementation et des fondements sur lesquels reposent des décisions reliées. D’autres se préoccupent du fait qu’en modifiant la raison d’être des évaluations, en y incluant plus précisément des considérations sociales et éthiques, les politiques d’un pays pourraient contrevenir à ses obligations internationales et aux efforts d’harmonisation internationale en matière d’évaluation de la salubrité des produits et de la prise de décisions. Selon des partisans d’un système de réglementation fondé sur les connaissances scientifiques, la réponse à ces questions relève d’une perspective politique élargie et de paliers supérieurs. Cela pourrait faire entrer le Parlement en jeu ou pourrait impliquer un comité d’experts mandatés pour conseiller le gouvernement sur ces questions et examiner des classes de produits et activités plutôt que des décisions produit par produit.

Mesures envisagées

Voici les mesures que le CCCB a d’abord envisagées relativement à cet enjeu :

Définir un forum pour examiner les grandes dimensions sociales et éthiques des aliments GM – Vu le paradigme actuel des décisions réglementaires fondées sur des évaluations scientifiques et de risque, il faudra probablement consentir davantage d’efforts pour déterminer la meilleure façon de définir les grandes questions sociales et éthiques et d’en tenir compte, ainsi que les compromis entre elles. L’une des grandes questions est de décider si le système de réglementation peut ou devrait être modifié pour intégrer les grandes considérations sociales et éthiques aux décisions cas par cas ou par catégorie de produits. Il faudrait débattre du palier de mise en oeuvre, que ce soit par un autre ordre ou organisme gouvernemental, par le système juridique ou le Parlement, par l’industrie ou par la société au sens large.

Définir plus en profondeur des questions – Il faudrait probablement mettre davantage d’efforts à définir plus précisément les grandes questions sociales et éthiques touchant aux aliments GM. Ce travail pourrait relever conjointement d’experts et d’organismes canadiens et étrangers qui se préoccupent déjà de ces questions, y compris des organisations internationales et des gouvernements étrangers. Une meilleure compréhension des points de vue du grand public pourrait également contribuer à définir ces questions.

Évaluer les questions à la lumière de principes fondamentaux – Une fois les questions mieux circonscrites, chacune d’elles pourrait être évaluée en fonction d’un ensemble global de principes et de valeurs. Dans le cadre des questions déjà présentées dans la section Contexte éthique, cette évaluation pourrait aider à mettre à l’épreuve et à préciser un ensemble de principes essentiels et à élaborer des valeurs devant former les assises de la formulation de politiques officielles. En ce qui a trait à la résolution des questions sociales et éthiques comme telles, l’ensemble que forment les principes et les valeurs pourrait servir de lentille permettant d’analyser plus avant et de mieux comprendre chaque question et de cerner les politiques actuelles qui pourraient être réexaminées.

Trouver des solutions qui reflètent les principes et valeurs de base sous-tendant l’élaboration de politiques officielles – Ces solutions pourraient comprendre :

  • La recherche sur les répercussions écologiques à long terme, y compris une attention particulière aux questions qui importent aux pays en développement et la mise à leur disposition des connaissances et des technologies découlant de ces travaux.
  • L’analyse des politiques et programmes canadiens de développement pour identifier comment ils pourraient contribuer davantage à la salubrité mondiale des aliments; l’emphase sur les activités et les recherches visant à traiter des préoccupations et besoins spécifiques des sociétés vulnérables; et le respect de la diversité des cultures et des méthodes uniques de production d’aliments.
  • Le réexamen des lois nationales et des ententes internationales du point de vue des grandes préoccupations sociales et éthiques; et l’étude des changements qui pourraient permettre de mieux tenir compte des questions sociales et éthiques (par exemple, nature de la propriété et des partenariats, contrôles de la biodiversité et incitatifs pour que les pays les adoptent, moteurs économiques pour épauler l’éthique environnementale, etc.).
  • La mise en oeuvre de ces mesures dans un esprit de collaboration internationale, de sorte que tous les pays aux prises avec ces questions conviennent des moyens de les régler et voient à ce qu’il y ait concordance entre les politiques nationales et internationales.

Une autre option s’est dessinée pendant les consultations et est présentée ci-dessous. Elle a trait aux perspectives sociales et éthiques dans un contexte qui pourrait conduire à un dialogue sur des aliments GM spécifiques, ainsi que sur les valeurs et principes sous-tendant les attitudes du public canadien au sujet de ces aliments.

Élaboration d’un cadre de détermination de l’acceptabilité ou non-acceptabilité des aliments GM

Pendant la partie 1 de ce projet sur les aliments GM et les préparatifs de la partie 2, le CCCB a porté son attention sur les éléments essentiels de la réglementation des aliments GM. Au cours de son examen des facteurs sociaux, éthiques et légaux touchant aux programmes de réglementation, le CCCB a adopté comme point de départ – ce qu’on pourrait qualifier d’hypothèses générales de la plupart des membres – que les aliments GM feront partie de la réalité commune et qu’une discussion sur leur réglementation serait pertinente. Somme toute, le CCCB prend pour acquis que les aliments GM existent bel et bien et sont là pour rester.

Pendant ses consultations, le CCCB a entendu un autre son de cloche. Il s’est fait dire que l’existence même d’aliments GM dans l’avenir méritait discussion, tout comme la question de la ligne à tracer entre les aliments GM que les Canadiens jugent acceptables et ceux qu’ils jugent inappropriés. Le CCCB s’est aussi fait dire que ce concept n’a pas été suffisamment scruté lors de ses délibérations, y compris dans le document de consultation.

C’est pourquoi le CCCB a injecté un nouveau volet de consultation et reçu des commentaires sur un cadre qui pourrait faciliter une discussion sur l’acceptabilité ou la non-acceptabilité des aliments GM. Ce cadre se fonde sur l’hypothèse qu’il pourrait être possible de classer les différentes sortes d’aliments GM comme étant plus ou moins acceptables en fonction d’une échelle basée sur divers critères. L’échelle illustrée cidessous comprend quatre catégories : acceptable, acceptable à certaines conditions, inacceptable présentement faute de données suffisantes ou de respect d’une norme, et inacceptable quelles que soient les circonstances. Les aliments GM catalogués comme étant inacceptables quelles que soient les circonstances pourraient faire l’objet d’une recommandation de prohibition (bannissement). Ceux qui sont inacceptables présentement pourraient être soumis à un moratoire.

Ce cadre pourrait permettre de placer des groupes ou classes d’aliments ou des produits spécifiques dans une catégorie le long de l’échelle. Ils pourraient changer de case à mesure que les connaissances se perfectionnent, que la société change d’opinion ou que certaines normes sont atteintes.

Pendant ces discussions, il est devenu apparent que diverses raisons poussent les gens à classer les aliments selon des catégories. Il s’agit, entre autres, de questions de salubrité en matière de santé ou d’environnement, de facteurs sociaux (dont les répercussions économiques), d’enjeux éthiques (dont le point de vue de certaines personnes voulant que la combinaison d’ADN végétal et animal ne soit pas éthique) et des facteurs sociétaux plus généraux (dont la concentration de pouvoir ou d’autres répercussions mondiales ou internationales qui peuvent découler de l’approbation d’un aliment ou d’une classe d’aliments donnés).

Ces divers facteurs ont mené à l’élaboration du cadre bidimensionnel d’un système d’acceptabilité illustré à la page suivante. Les considérations de salubrité en matière de santé et d’environnement sont séparées des autres facteurs par une ligne épaisse parce qu’il s’agit d’éléments sur lesquels le système actuel de réglementation s’appuie pour prendre ses décisions concernant les aliments GM. Une autre ligne épaisse sépare les considérations sociétales au sens large des facteurs situés à leur gauche, afin de faire ressortir l’importance internationale de nombre des questions sociétales en jeu.

Il est à noter que ce cadre d’acceptabilité comprend des caractéristiques uniques aux discussions d’une politique fédérale sur les aliments. D’abord, il reconnaît que les opinions de certaines personnes sur l’acceptabilité de produits peuvent se fonder sur plus que la salubrité en matière de santé ou d’environnement, et il s’appuie sur l’idée que certains aliments peuvent être jugés inacceptables par le public s’ils s’accompagnent de conséquences sociales ou éthiques – à l’échelle nationale ou internationale – qui effacent les avantages escomptés. Deuxièmement, il laisse entendre que selon les circonstances les gouvernements et/ou l’industrie devraient peut-être songer à reporter ou à empêcher la mise en marché de certains aliments pour des motifs autres que les risques en matière de santé et de sécurité.

Acceptable Acceptable à certaines conditions Inacceptable (en attendant des données suffisantes ou le respect de certaines normes, soit un moratoire) Inacceptable quelles que soient les circonstances (bannissement)

Salubrité - santé et environnement Considérations sociales Considérations éthiques Considérations sociétales au sens large
Acceptable        
Acceptable à certaines conditions        
Inacceptable (en attendant des données suffisantes ou le respect de certaines normes, soit un moratoire)        
Inacceptable quelles que soient les circonstances        

Vu la doctrine actuelle du droit commercial national et international, les conséquences sont importantes. Ces dernières soulèvent la question importante de l’autorité. Comment les décisions qui tiennent compte d’éléments sociaux et éthiques seraient-elles appliquées, vu les lois nationales et internationales actuelles? Comment pourraient-elles être appliquées si elles ne s’appuient pas sur des critères qui répondent aux évaluations et décisions basées sur les sciences et les risques émanant du système de réglementation? Il faudrait étudier des mécanismes possibles de mise en oeuvre de ce cadre, y compris les systèmes volontaires et ceux du fait de l’industrie. Il faudrait examiner de plus près la relation et la complémentarité de cette activité avec le système de réglementation et la structure de l’intendance au sens large.

Il est ressorti des discussions préliminaires que ce cadre pourrait effectivement aider les Canadiens à amorcer un dialogue sur les valeurs et critères soustendant l’acceptabilité des aliments GM par le public.

Recommandations provisoires concernant les considérations sociales et éthiques

5. Bonne intendance de l’environnement

Observations : Il n’existe actuellement aucune norme internationale exécutoire concernant l’évaluation environnementale des aliments GM ou autres aliments nouveaux. Des travaux sont en cours et il se fait des progrès quant à la définition de « pratiques exemplaires » dans ce domaine. Néanmoins, le CCCB est d’avis qu’il y a matière à améliorer les méthodes actuelles d’évaluation environnementale en ce qui a trait à l’étude des effets à long terme et à la mesure dans laquelle les répercussions sur les écosystèmes sont prises en compte.

Recommandation provisoire 5 : Le CCCB recommande au gouvernement fédéral d’intensifier sa bonne intendance de l’environnement en ce qui touche les aliments GM, les autres aliments nouveaux et les organismes dont sont issus ces produits. Il faut lancer un programme de recherches national et exhaustif sur les effets à long terme, améliorer les évaluations environnementales et fonder l’approbation des produits sur des normes prudentes en matière de salubrité.

Nous recommandons les mesures suivantes :

5.1 Lancer un programme de recherches national, concerté et généreusement financé en vue d’enrichir les connaissances relatives aux effets à long terme sur les écosystèmes naturels, agricoles et autres, des organismes GM qui sont contenus dans les produits alimentaires nouveaux ou utilisés en production vivrière.

5.2 À courte échéance, étudier et adopter des mesures en vue d’intégrer une perspective écosystémique renforcée à l’évaluation environnementale des aliments GM et autres aliments nouveaux. Il faudrait, d’ici un an, rédiger et diffuser un rapport sur les options possibles en mettant l’accent sur la collaboration nationale et internationale en matière de recherche et sur une meilleure utilisation des compétences spécialisées en écologie.

5.3 À moyen terme, renforcer l’évaluation environnementale des aliments nouveaux et des procédés de modification génétique utilisés en production vivrière. Il faudrait confier à des commissions d’experts indépendants, à orientation marquée sur l’écosystème, la tâche de superviser l’examen par les pairs des données et des schémas expérimentaux et de recommander des protocoles d’essai efficaces pour chaque catégorie nouvelle d’utilisation des organismes GM en production vivrière. Une telle mesure nécessitera au préalable l’élaboration d’une base solide de compétences aptes à couvrir les grandes préoccupations écologiques et environnementales telles que la persistance des organismes GM dans l’environnement; les effets des organismes GM sur les cycles biogéochimiques; les conséquences sur la biologie reproductive, par exemple la propagation des pollens, les effets nuisibles du transfert horizontal de gènes, l’amoindrissement de la biodiversité, la résistance éventuelle des ravageurs aux produits insecticides GM et les effets cumulatifs sur l’environnement.

5.4 Adopter une démarche avisée afin de garantir le respect d’une norme prudente de sécurité en ce qui touche les préoccupations écologiques et sanitaires suscitées par les aliments GM et autres aliments nouveaux. Cela ne veut pas dire qu’il faut emprunter une démarche cherchant à éliminer tous les risques. Il faudrait porter une attention toute spéciale aux risques de nature éventuellement catastrophique. Dans les cas où il convient de recourir à l’équivalence substantielle comme cadre structurant de l’évaluation des aliments nouveaux, il est nécessaire de vérifier si la composition du végétal a subi quelque modification. Parmi les possibilités dont il faudra se préoccuper, mentionnons l’introduction de dangers nouveaux dans les aliments; un accroissement des concentrations de composants intrinsèquement toxiques; la diminution de la teneur nutritive escomptée; ou l’ajout de caractères non désirés, tels que des propriétés antibiotiques, dans les écosystèmes naturels.

5.5 Évaluer les incidences et la pertinence des recommandations 5.1 à 5.4 ci-dessus en vue de leur application à l’ensemble du système de réglementation de l’environnement.

6. Autres considérations d’ordre social et éthique relatives aux aliments GM

Observations : Le débat entourant les aliments GM est polarisé sur deux fronts, celui des partisans de l’application de la biotechnologie (par exemple, la technologie de l’ADN recombinant) à la production alimentaire, et celui des opposants à cette application. La recherche d’un terrain d’entente entre les deux camps se heurte au manque d’outils convenables pour aborder et évaluer de façon systématique et continue les facteurs sociaux et éthiques qui influent sur l’acceptation d’un produit alimentaire précis par le public.

Le CCCB continuera de tenir compte des préoccupations relatives aux dangers possibles pour la santé et l’environnement, des facteurs éthiques, sociaux et économiques et des grands facteurs sociétaux qui influent sur l’acceptation des différents genres d’aliments GM. Le Comité s’attachera particulièrement à l’élaboration de méthodes permettant de tenir un dialogue valable sur ces questions et de cerner les critères et les valeurs qui entrent en ligne de compte lorsque les gens évaluent un produit alimentaire particulier.

Le CCCB est en train de concevoir, en vue de son rapport final, des principes directeurs concernant cet aspect du débat sur les aliments GM et, en particulier, un mécanisme qui servira à traiter les facteurs d’ordre social et éthique qui influent sur l’acceptation de produits alimentaires précis par le public.

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Voies proposées pour aller de l’avant

Améliorer le système fédéral de réglementation des aliments

Le présent rapport provisoire porte avant tout sur le contexte de réglementation au sein duquel le Canada évalue la salubrité des aliments GM et régit le lancement de ces produits sur le marché. Le rapport aborde notamment les questions suivantes :

  • la transparence, surtout celle du processus décisionnel en matière de réglementation;
  • la participation du public;
  • l’indépendance des organes de réglementation;
  • les compétences scientifiques qui fondent le processus d’évaluation des risques;
  • l’importance d’inscrire les aliments GM dans une vaste perspective sociale et politique.

Le rapport provisoire offre une analyse de ces questions en ce qu’elles concernent les aliments GM et autres aliments nouveaux. Ce sont des questions que le CCCB situe au coeur même de son mandat d’étude et de conseil relativement au système de réglementation des aliments GM. Cependant, ces questions ne s’appliquent pas uniquement aux aliments GM. Elles peuvent également se rapporter à d’autres domaines de politique gouvernementale et tout particulièrement à la réglementation des autres formes de végétaux et d’aliments dotés de caractères nouveaux. Dans la mesure où il cherche à orienter et à influencer le programme d’élaboration des politiques relatives aux aliments GM, le présent rapport agit en toute conscience du fait que le plan d’action de l’État en cette matière doit concorder avec la stratégie gouvernementale globale visant à assurer la salubrité et la sûreté des aliments. En conséquence, le CCCB recommande au gouvernement fédéral d’étudier l’applicabilité de ses recommandations, dans leur formulation finale, non seulement en fonction des aliments GM mais aussi dans le contexte général du système canadien de réglementation des aliments.

Instaurer une politique alimentaire nationale

Certains affirment que le Canada a besoin d’une politique alimentaire nationale pour aborder les questions de santé, de pérennité environnementale et de salubrité des aliments ainsi que les enjeux globaux de la sécurité alimentaire16. Même si la formulation d’une telle politique déborde sans conteste le cadre du présent projet et le mandat du CCCB, il est possible que les ébauches de réponses aux grands défis de la réglementation des aliments GM permettent de dégager les principes directeurs qu’une telle stratégie pourrait concrétiser, c’est-à-dire : une confiancelégitime à l’égard de la salubrité et de la qualité des aliments en vente au Canada; un système de régie caractérisé par un degré élevé de transparence et d’imputabilité; un accès facile à des renseignements simples et exacts sur les produits alimentaires et la nutrition; la liberté personnelle de choisir les aliments qui nous sont acceptables; et la préservation d’un système viable et durable de production vivrière.

Prochaines étapes

Les prochaines étapes à franchir par le CCCB relativement aux aliments GM et au système canadien de réglementation commencent par une période de commentaires du public sur le contenu du présent rapport provisoire (tous les commentaires devront parvenir au CCCB au plus tard le 31 janvier 2002), pendant laquelle le CCCB invite les experts, les groupes d’intéressés et les citoyens ordinaires à lui faire part de leurs opinions. Le CCCB est spécialement à l’affût de commentaires sur les recommandations provisoires formulées dans le présent rapport, incluant des améliorations ou solutions de rechange proposées en regard de ces recommandations. Il espère également recevoir des observations sur l’utilité de l’échelle d’acceptabilité pour faciliter le dialogue au sujet des aliments GM et, en particulier, au sujet des grands enjeux sociétaux et éthiques reliés à la production, au commerce et à la consommation de ces aliments. La partie III du projet se terminera par la préparation et la présentation de recommandations formelles adressées au gouvernement du Canada.

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Annexe A – Membres du Comité consultatif canadien de la biotechnologie

Dr Arnold Naimark
Président, Comité consultatif canadien de la biotechnologie
Directeur, Centre for the Advancement of Medicine,
Université du Manitoba, Winnipeg (Manitoba)

Mary Alton Mackey (Ph.D.)
Présidente, Alton Mackey and Associates,
Portugal Cove (Terre-Neuve)

Lorne Babiuk (Ph.D.)
Directeur, Veterinary Infectious Disease Organization,
Saskatoon (Saskatchewan)

Dr Françoise Baylis (Jusqu’au 30 juin, 2001)
Professeure agrégée de médecine et de philosophie,
département de bioéthique, Université Dalhousie,
Halifax (Nouvelle-Écosse)

Gloria Bishop
Vice-présidente, Affaires publiques et Communications, University Health Network,
Toronto (Ontario)

Timothy Caulfield
Professeur associé et directeur de recherches,
Health Law Institute, Université de l’Alberta,
Edmonton (Alberta)

Robert Church (Ph.D.)
Professeur émérite de biochimie médicale et de biologie moléculaire, Université de Calgary
Propriétaire du ranch Lochend Luing à Airdrie (Alberta)

Pierre Coulombe (Ph.D.)
Président et chef de la direction, Infectio Diagnostic Inc., Sainte-Foy (Québec)

Arthur Hanson (Ph.D.)
Membre émérite et scientifique principal,
Institut international du développement durable,
Winnipeg (Manitoba)

Dr Michael Hayden
Directeur, Centre de médecine moléculaire et thérapeutique, Children’s and Women’s Hospital,
Université de la Colombie-Britannique,
Vancouver (Colombie-Britannique)

Suzanne Hendricks
Nutritionniste, Ottawa (Ontario)

Dr Thomas J. Hudson
Directeur, Centre Génome de Montréal, Université McGill, Institut de recherche de l’Hôpital général de Montréal, Montréal (Québec)

Bartha Maria Knoppers (Ph.D.)
Professeure de droit et chercheuse principale, Centre de recherche en droit public, Université de Montréal,
Montréal (Québec)

Murray McLaughlin (Ph.D.)
Président et chef de la direction, Foragen Technology Ventures Inc., Guelph (Ontario)

Anne Mitchell
Directrice exécutive, Institut canadien du droit et de la politique de l’environnement, Toronto (Ontario)

Peter W. B. Phillips (Ph.D.)
Professeur d’économie agricole, Collège d’agriculture,
Université de la Saskatchewan, Saskatoon (Saskatchewan)

Douglas Powell (Ph.D.)
Professeur adjoint en agriculture végétale,
Université de Guelph, Guelph (Ontario)

René Simard (Ph.D.)
Ancien recteur de l’Université de Montréal,
Montréal (Québec)

Jonathan Bjorn Syms
Étudiant en médecine, Université Queen’s,
Kingston (Ontario)

Denny Warner
Directrice, Chambre de commerce de Vanderhoof,
Vanderhoof (Colombie-Britannique)

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Annexe B – Publications du CCCB, rapports commandés et documents connexes

Rapports commandés par le CCCB ayant trait aux aliments GM

Analysis of Relevant Canadian Legislation, Donald J. MacKenzie, vice-président à la direction, Agriculture and Biotechnology Strategies (AGBIOS) Inc.

La biotechnologie, l’éthique et l’État : Synthèse, Michael McDonald (Ph.D.), directeur, Centre for Applied Ethics, Université de la Colombie-Britannique.

Comparaison internationale des cadres de réglementation des produits alimentaires issus de la biotechnologie, Donald MacKenzie (Ph.D.), viceprésident à la direction, Agriculture and Biotechnology Strategies (AGBIOS) Inc.

Démarches adoptées par certains pays pour aborder les questions non scientifiques liées à la réglementation des produits de la biotechnologie, Ozzie Silverman, associé conseil, Secor Conseil Inc.

Étiquetage des produits génétiquement modifiés : Considérations d’ordre stratégiques liées à la politique commerciale du Canada, Ramesh Chaitoo, analyste principal de la politique commerciale, Centre de droit et de politique commerciale, Université Carleton, et Michael Hart, professeur titulaire de la chaire Simon Reisman de politique commerciale, Norman Paterson School of International Affairs, Université Carleton.

Analyse du système canadien de réglement de biotechnologie – étude exploratoire approfondie, Bruce Doern, School of Public Administration, Université Carleton, et Politics Department, Université d’Exeter.

Intégration des facteurs d’éthique à la biotechnologie alimentaire et agricole, Paul Thompson (Ph.D.), Distinguished Professor of Philosophy, et Joyce et Edward E. Brewer, Chair of Applied Ethics, Université Purdue, West Lafayette (Indiana), États-Unis.

Rapport sur le principe de précaution, Marc Saner (Ph.D.), directeur administratif, Ethics and Policy Issues Centre, Department of Philosophy, Université Carleton.

Réglementation et promotion des aliments GM : Une analyse organisationnelle et décisionnelle de ces deux fontions dan l’administration fédérale canadienne, Michael Prince, Lansdowne Professor of Social Policy et doyen associé, Faculty of Human and Social Development, Université de Victoria.

Répondre aux besoins d’information du public en matière de biotechnologie, Edna F. Einsiedel (Ph.D.), professeure d’études en communications, Faculty of Communication and Culture, Université de Calgary.

Secondary Analysis of Public Opinion Research Regarding Genetically Modified Food and Related Biotechnology Issues, Environics Research Group, juin 2001.

Transformer l’agriculture : avantages et coûts des cultures génétiquement modifiées, Richard Gray et al. Department of Agricultural Economics, Université de la Saskatchewan.

Vers l’établissement d’un cadre éthique adéquat pour l’élaboration de la politique en matière de biotechnologie, Susan Sherwin (Ph.D.), Munro Chair in Philosophy, Department of Philosophy, Université Dalhousie.

Publications du CCCB sur les aliments GM

Rapport sommaire des consultations : ateliers sur les aliments génétiquement modifiés, sessions avec les intervenants, juin 2001.

Réglementation des aliments génétiquement modifiés : Document de consultation 2001, février 2001.

Summary Consultation Report: Written Input on Genetically Modified Food, juin 2001.

Documents connexes

Outre le Rapport du groupe d’experts de la Société royale du Canada sur l’avenir de la biotechnologie alimentaire (voir l’annexe D), les rapports d’experts internationaux suivants sur les sciences pertinentes ont contribué aux décisions du CCCB :

FAO/OMS. 1996. Biotechnology and Food Safety. Report of the Joint FAO/WHO Expert Consultation. (30 septembre au 4 octobre, 1996).

FAO/OMS. 2000. Aspects de la slubrité des aliments génétiquement modifiés d’origine végétale. Rapport d’une consultation conjointe d’experts FAO/OMS sur les aliments produits par la biotechnologie (29 mai – au 2 juin 2000).

FAO/OMS. 2001. Evaluation of Allerginicity of Genetically Modified Foods. Report of the Joint FAO/WHO Expert Consultation on Allergenicity of Foods Derived from Biotechnology (du 22 au 25 janvier 2001).

IFT. 2000a. IFT expert report on biotechnology and foods: Introduction. Food Technology 54: 124–36.

IFT. 2000b. Expert report on biotechnology and foods: Human food safety evaluation of r-DNA biotechnology-derived foods. Food Technology 54 (9): 53–61.

IFT. 2000c. Expert report on biotechnology and foods: Labelling of r-DNA biotechnology-derived foods. Food Technology 54 (9): 62–74.

IFT. 2000d. « Expert Report on biotechnology and foods: Benefits and concerns associated with recombinant DNA biotechnology-derived foods ». Food Technology, vol. 54, no 10, p. 61-80.

États-Unis. 2000. National Research Council. Genetically Modified Pest Protected Plants: Science and Regulation. Washington, DC, National Academy Press.

États-Unis et Union Européene. 2000. U.S.-E.U. Biotechnology Consultative Forum. Final Report. U.S. Department of State

Organisation de coopération et de développement économiques. 2000. La sécurité des aliments génétiquement modifiés : faits, incertitudes et évaluation. Conférence OCDE d’Edimbourg sur les aspects scientifiques et sanitaires des aliments génétiquement modifiés.

Organisation de coopération et de développement économiques. 2000. Report of the Task Force for the Safety of Novel Foods and Feeds, 86/ADDI, Paris, OCDE, le 17 mai 2000.

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Annexe C – Retour d’information au sujet du contexte éthique qui convient

Pendant les consultations à multiples intervenants organisées par le CCCB au cours de l’hiver 2001, les participants se sont penchés sur les sept valeurs présentées dans la section Contexte éthique et dans le document de consultation publié auparavant. Ils ont discuté des valeurs et principes qui devraient guider le gouvernement dans la structuration du système de réglementation et l’élaboration des politiques touchant aux aliments GM. Les valeurs et principes mis de l’avant pendant les ateliers dans les cinq villes sont présentés dans le tableau ci-dessous, en fonction du nombre décroissant de fois qu’ils ont été mis de l’avant. L’explication ou la définition de ces mots, tels qu’émanant des participants, est présentée dans le document Rapport sommaire des consultations : ateliers sur les aliments génétiquement modifiés affiché sur le site Web du CCCB.

Structuration du système de réglementation

Responsabilité/leadership
Fondements scientifiques
Transparence
Éducation/connaissances
Prudence/précaution
Justice
Basé sur le produit
Respect de la diversité
Risques-avantages
Intégrité/honnêteté
Autonomie
Bienfaisance
Durabilité future
Processus empreint de participation
Qualité et authenticité de l’information
Optimisation sociale
Sécuritaire pour la santé
Réalisable
Réglementation équilibrée
Compatibilité internationale
Vérifiable
Éthique
Séparation entre le promoteur et le régulateur

Choix de politiques

Responsabilité/leadership
Choix éclairé/public informé/connaissances
Transparence
Sûreté des aliments
Justice
Intégrité
Précaution
Durabilité
Sûreté de l’environnement alimentaire
Fondements scientifiques
Prudence/précaution
Sûreté à long terme
Équitabilité
Autonomie
Confiance
Retombées sociales positives
Participation
Objectivité
Équité/égalité des chances
Diversité
Choix du consommateur en matière d’alimentation
Bienfaisance
Stabilité/confiance
Démocratie
Réussite commerciale
Crédibilité et responsabilité
Respect de la diversité
Éthique envers la nature
Équilibre

Quelques idées dominantes semblent ressortir des valeurs et principes énumérés ci-dessus. Les grandes lignes suivantes se sont dessinées.

Responsabilité/leadership – Concept voulant que les intervenants soient tenus responsables et aient à répondre de leurs actes, et que les administrations pertinentes veillent à ce que le système de réglementation donne les résultats escomptés.

Transparence – Concept voulant que le processus réglementaire, l’information sous-tendant des décisions et les décisions comme telles soient aussi transparents et accessibles que possible.

Fondements scientifiques [pour le système de réglementation] – Concept voulant que le processus de réglementation soit enraciné dans des principes scientifiques, à la lumière de risques connus, le tout basé sur des méthodes d’évaluation scientifiques reconnues et rigoureuses.

Choix éclairé/public informé/connaissances [pour éclairer les choix de politiques] – Concept voulant que les choix de politiques soient éclairés et fondés sur des faits et des connaissances; de plus, les politiques devraient aider un public informé à faire des choix valides fondés sur de bons renseignements.

Sûreté et précaution – Concept voulant que l’on use de prudence dans l’élaboration de politiques et de règlements portant sur les aliments GM, et que l’on fasse preuve de diligence en matière de sûreté touchant tant la santé humaine que l’environnement. (Dans le cas de cette valeur, plusieurs cotes semblables ont été combinées, y compris la sécurité des aliments, la sûreté à long terme, etc.)

Les liens entre ces concepts indiquent qu’il existe apparemment un désir de voir dans ces valeurs des facteurs constituant des fondements tant de la structuration du système de réglementation que des assises des choix politiques. En poussant l’analyse plus loin, il ressort que les valeurs retenues pour former la base du système de réglementation pourraient être groupées en grappes thématiques tel qu’illustré ci-dessous. De ces grappes émergent un ensemble de grandes qualités régies par les principes qui devraient sous-tendre le système de réglementation.

Un ensemble de qualités fortement régies par des principes portant sur la responsabilité et la transparence :

  • responsabilité/leadership
  • transparence
  • intégrité/honnêteté
  • éthique
  • séparation entre promoteur et régulateur.

Une grappe fondée sur les connaissances qui met l’accent sur les sciences et la qualité de l’information :

  • fondée sur les sciences
  • éducation/connaissances
  • basée sur le produit
  • qualité et authenticité de l’information
  • vérifiable

Un ensemble axé sur le sens de la justice, un juste milieu entre risques et avantages, l’objectif étant de répartir les retombées équitablement :

  • justice
  • risques-avantages
  • bienfaisance
  • optimisation sociale.

Un ensemble centré sur la précaution, avec accent sur la durabilité, la santé et la sûreté :

  • précaution
  • durabilité future
  • santé/sûreté
  • prudence.

Un ensemble qui souligne le besoin de disposer de solutions innovatrices mais pratiques qui sont compatibles à l’échelle internationale :

  • respect de la diversité
  • réalisable
  • réglementation équilibrée
  • compatibilité internationale.

Un ensemble qui souligne la nécessité de la participation du public et de choix éclairés :

  • autonomie
  • processus empreint de participation.

Les valeurs choisies comme guide des choix politiques pourraient également être groupées en grappes tel qu’illustré ci-dessous.

Un ensemble de qualités fortement régies par des principes portant sur la responsabilité et la transparence :

  • responsabilité/leadership
  • transparence
  • intégrité
  • confiance.

Un ensemble fortement apparenté au premier et qui souligne l’importance de la confiance dans un système où la responsabilité prime :

  • stabilité/confiance
  • démocratie
  • crédibilité et responsabilité.

Un ensemble sur les choix éclairés mettant l’accent sur le besoin de bonnes connaissances chez le public, fondées sur les sciences, et qui facilitent les choix faits par le consommateur :

  • choix éclairé/public informé/connaissances
  • fondé sur les sciences
  • autonomie
  • choix du consommateur en matière d’alimentation.

Un ensemble centré sur un sens de la justice, de l’équilibre et de l’objectivité :

  • justice
  • équitabilité
  • objectivité
  • équilibre.

Un ensemble empreint de précaution portant sur la sûreté des aliments et de l’environnement :

  • sécurité des aliments
  • précaution
  • sûreté de l’environnement alimentaire
  • prudence
  • sûreté à long terme.

Un ensemble englobant la durabilité et le respect de la diversité en tandem avec l’objectif de retombées accessibles à tous :

  • durabilité
  • retombées sociales positives
  • bienfaisance
  • respect de la diversité
  • éthique envers la nature.

Un ensemble qui souligne le besoin d’épauler les entreprises dans un contexte d’égalité des chances sur le marché :

  • équité/égalité des chances
  • réussite commerciale.

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Annexe D – Recommandations du groupe d’experts de la Société royale du Canada

Le groupe d’experts de la Société royale du Canada sur l’avenir de la biotechnologie alimentaire17 a publié le 5 février 2001 un rapport intitulé Éléments de précaution : recommandations pour la réglementation de la biotechnologie alimentaire au Canada. Ce document traite des aspects scientifiques de la technologie alimentaire (par exemple, des évaluations réalisées par des organes de réglementation dont le mandat est de veiller à la sûreté de la santé et de l’environnement), ainsi que de certains enjeux examinées par le CCCB en matière d’organisation et de fonctionnement du système de réglementation et des questions sociales, éthiques et juridiques reliées. Ce rapport est une référence fort utile pour obtenir des points de vue supplémentaires et des renseignements de base sur les aliments GM.

Dès le début de son projet sur les aliments GM, le CCCB s’est engagé à tenir compte, pendant l’élaboration de ses conseils destinés au gouvernement, du rapport du groupe d’experts de la Société royale. À cette fin, le CCCB a créé un forum sur son site Web pour permettre à toute personne intéressée à présenter ses commentaires sur le rapport de la Société royale. Il a aussi tenu compte des recommandations du groupe d’experts de la Société royale. Un tableau illustrant les points d’intersection avec les enjeux clés sur lesquels se penche le CCCB est présenté ci-dessous.

La plupart des recommandations du Groupe d’experts de la Société royale du Canada sur l’avenir de la biotechnologie alimentaire répondent aux enjeux clés sur lesquels se pendre le CCCB.

Enjeux du CCCB Recommandations du groupe d'experts de la société royale du Canada sur l'avenir de la biotechnologie alimentaire
Transparence

4.9 Le Comité d’experts recommande, d’une part, que toutes les évaluations d’aliments GM où l’échantillon est comparé à un contrôle approprié devraient satisfaire aux exigences d’une publication dans une revue scientifique avec examen par les pairs et, d’autre part, que toutes les données relatives à l’évaluation soient mise à la disposition du public pour fins d’examen. Ces données incluraient une composition nutritionnelle complète (Santé Canada, 1994), l’analyse de tout composant anti-nutritif et, s’il y a lieu, une évaluation protéique telle qu’approuvée par l’Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation (FAO).

6.1 Le Comité d’experts recommande que toute l’information écologique concernant le sort et les impacts des produits transgéniques sur les écosystèmes exigée en vertu de la réglementation existante soit générée et disponible pour fins d’examen par les pairs.

6.8 Le Comité d’experts recommande que les données découlant d’expériences menées par l’industrie sur les incidences potentielles sur l’environnement des plantes GM utilisées dans les évaluations de l’Agence canadienne d’évaluation environnementale soient mises à la disposition du public.

7.2 Le Comité d’experts recommande que la conception et la mise en oeuvre des tests d’évaluation de risques des nouveaux organismes transgéniques s’effectuent en consultation ouverte avec la communauté d’experts scientifiques.

  9.2 Le Comité d’experts recommande que les organismes de réglementation canadiens identifient des façons d’accroître la transparence des données et des bases scientifiques sur lesquelles les décisions réglementaires sont fondées.
Séparation et indépendance des fonctions de réglementation 9.1 Le Comité d’experts recommande que les organismes de réglementation canadiens fassent preuve de la plus grande diligence dans le maintien d’une position objective et impartiale face au débat sur les risques et les avantages de la biotechnologie et dans leur interprétation du processus réglementaire.
Surveillance des risques et des avantages après la mise en marché

4.6 Le Comité d’experts recommande le développement de mécanismes de surveillance des aliments GM comportant de nouvelles protéines après la distribution de ces aliments sur le marché.

5.3 Le Comité d’experts recommande que le contrôle des animaux transgéniques s’effectue selon un processus similaire à celui qui vise les animaux enregistrés et que l’enregistrement de ces animaux soit obligatoire.

5.7 Le Comité d’experts recommande l’établissement d’un programme national de recherche pour effectuer un suivi sur les effets à long terme des organismes GM sur l’environnement, la santé humaine, la santé animale et le bien-être des humains et des animaux.

5.11. Le Comité d’experts recommande qu’Environnement Canada et l’Agence canadienne d’inspection des aliments établissent un processus d’évaluation et de contrôle afin de régir l’introduction sécuritaire d’organismes GM au Canada au sens de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement.

6.2 Le Comité d’experts recommande que soit institué un régime de tests exhaustifs et à long terme sur les effets écologiques des produits issus de la biotechnologie qui présentent un risque pour l’environnement, notamment en ce qui a trait à la persistance d’un organisme ou d’un produit issu de l’organisme, à ses effets persistants sur les cycles biogéochimiques, ou à ses effets nuisibles découlant du transfert de gènes horizontal et de la sélection génétique.

6.9 Le Comité d’experts recommande que le gouvernement fédéral finance une initiative de recherche multidisciplinaire sur les incidences environnementales des plantes GM. Les fonds devraient être mis à la disposition de scientifiques de tous les secteurs (industrie, gouvernement et universités) dans le cadre d’un programme de subventions assujetties à un examen rigoureux par les pairs.

6.12 Le Comité d’experts recommande l’élaboration de lignes directrices pour l’étude à long terme de l’évolution de la résistance aux insectes lorsque des organismes GM contenant des substances insecticides sont utilisés, particulièrement pour les insectes nuisibles migrant sur de grandes distances.

Capacités et ressources du système de réglementation

5.5 Le Comité d’experts recommande que les gouvernements fédéral et provinciaux consentent des investissements adéquats dans la recherche et l’éducation universitaire en génomique, de manière à doter le Canada de la capacité scientifique pour effectuer des évaluations indépendantes et pour développer des technologies transgéniques.

5.10. Le Comité d’experts recommande que les laboratoires universitaires participent à la validation de l’innocuité et de l’efficacité des plantes et des animaux GM.

6.4 Le Comité d’experts recommande, d’une part, que soit effectuée une analyse détaillée de l’expertise requise pour que le Canada puisse évaluer les incidences environnementales de nouveaux produits issus de la biotechnologie et, d’autre part, que soient engagées les ressources nécessaires pour parer à cette pénurie le cas échéant.

6.11 Le Comité d’experts recommande qu’un comité indépendant procède à l’évaluation des protocoles expérimentaux et des résultats avant l’approbation de nouvelles plantes ayant des caractères nouveaux.

7.3 Le Comité d’experts recommande que l’analyse des résultats de tous les tests effectués sur les nouveaux organismes soit revue par un comité d’experts appropriés et indépendants provenant de toutes les disciplines; ce comité serait tenu de rendre et de justifier ses décisions dans un cadre public.

9.3 Le Comité d’experts recommande que les organismes de réglementation canadiens se soumettent à une évaluation par les pairs régulière des évaluations des risques menant à une approbation de produits transgéniques. Cette évaluation par les pairs devrait être effectuée par un comité d’experts externes (non gouvernementaux) et indépendants. Les données et les bases scientifiques ayant servi à l’évaluation des risques et menant à une approbation réglementaire devraient être rendues publiques.

Prestation de l’information nécessaire à des choix éclairés

4.11 Le Comité d’experts recommande que le Fichier canadien sur les éléments nutritifs soit actualisé de manière à inclure la composition nutritionnelle des aliments GM et que ce fichier soit mis à la disposition du public.

5.9. Le Comité d’experts recommande qu’une banque de données renfermant les profils nutritionnels de toutes les plantes GM susceptibles d’entrer dans l’alimentation des animaux soit établie et actualisée par le gouvernement fédéral.

Bonne intendance de l’environnement

6.7 Le Comité d’experts recommande que les évaluations environnementales des plantes GM ne se limitent pas l’étude de leurs incidences sur seulement les écosystèmes agricoles, mais qu’elles englobent une étude explicite des incidences potentielles de ces plantes sur les écosystèmes naturels et perturbés dans les régions où l’on envisage leur culture.

6.10 Le Comité d’experts recommande que les entreprises et corporations qui demandent la permission de placer un organisme GM dans l’environnement soient tenues de fournir des données expérimentales (obtenues dans le cadre de protocoles expérimentaux appropriés sur le plan écologique) concernant tous les aspects des incidences potentielles de cet organisme sur l’environnement.

6.15 Le Comité d’experts recommande que soient établis des programmes de recherche axés sur l’étude des interactions entre les poissons sauvages et les poissons d’élevage. Une évaluation fiable des risques potentiels pour l’environnement ne peut être obtenue qu’une fois effectuées des recherches poussées dans ce domaine.

7.1 Le Comité d’experts recommande que l’approbation pour la culture de nouveaux organismes transgéniques ou leur utilisation comme aliments ou comme aliments pour animaux soit assujettie à une évaluation scientifique rigoureuse des incidences potentielles de ces organismes sur l’environnement ou la santé humaine. Les tests effectués dans le cadre d’une telle évaluation scientifique devraient remplacer la pratique courante de l’utilisation du concept d’équivalence substantielle comme seuil de décision en matière de réglementation.

7.4. Le Comité d’experts recommande que le Canada établisse et maintienne des banques de données de référence complètes sur la biologie de ses principaux écosystèmes agricoles et des biosystèmes adjacents.

7.5 Le Comité d’experts recommande que le Canada développe des ressources à la fine pointe de la génomique pour chacune de ses principales récoltes, animaux de ferme et espèces de poissons d’élevage, et que ces ressources servent à la mise en oeuvre de méthodes scientifiques efficaces pour appuyer la prise de décisions en matière de réglementation.

8.1 Le Comité d’experts recommande l’application du principe de précaution en matière de réglementation qui propose qu’aucune nouvelle technologie ne doit être présumée sécuritaire en l’absence de fondements scientifiques fiables permettant de conclure à son innocuité. Le Comité d’experts rejette le recours au concept d’équivalence substantielle comme seuil de décision pour exempter les nouveaux produits GM d’évaluations d’innocuité rigoureuses sur la seule base de similarités superficielles; une telle procédure réglementaire ne constitue pas une approche prudente qui requiert l’établissement d’une preuve d’innocuité.

8.5 Le Comité d’experts recommande une approche précautionnaire dans l’utilisation de normes d’innocuité dites « conservatrices » face à certains types de risques (p. ex., qui pourraient entraîner des effets sérieux et irrémédiables). L’invocation du concept d’équivalence substantielle comme standard d’innocuité (et non comme seuil de décision aux fins de l’évaluation du risque) suppose l’existence d’une norme d’innocuité raisonnablement conservatrice correspondant à une approche prudente en matière de réglementation des risques associés aux produits alimentaires GM.

Systèmes d’évaluation des risques18

4.1 Le Comité d’experts recommande que les organismes fédéraux responsables de la réglementation établissent des critères clairs concernant la nécessité et la nature des études toxicologiques qui s’imposent pour établir l’innocuité de nouveaux produits provenant de plantes transgéniques.

4.2 Le Comité d’experts recommande que les organismes de réglementation établissent les fondements scientifiques ouvrant la voie à l’évaluation de l’innocuité des aliments entiers issus de plantes transgéniques. En raison de l’intérêt que suscite cette question sur la scène internationale, le Comité d’experts recommande en outre que les fonctionnaires responsables de la réglementation au Canada collaborent avec leurs collègues à l’échelle internationale en vue de l’établissement de telles méthodes ou pour parrainer la recherche nécessaire à cette fin.

4.3 Le Comité d’experts recommande qu’en raison de la disponibilité d’alternatives aux marqueurs génétiques de résistance aux antibiotiques, que ceux-ci ne soient plus utilisés pour la production de plantes transgéniques destinées à l’alimentation humaine.

4.4 Le Comité d’experts recommande que le gouvernement du Canada appuie, d’une part, des initiatives de recherche pour améliorer la fiabilité, la précision et la sensibilité des méthodes actuelles d’évaluation du potentiel allergène d’une protéine alimentaire et, d’autre part, les efforts de développement de nouvelles technologies susceptibles de faciliter ces évaluations.

4.5 Le Comité d’experts recommande de renforcer les infrastructures existantes et d’en développer de nouvelles pour faciliter l’évaluation du potentiel allergène de protéines GM. Pareille initiative pourrait inclure : la constitution d’une banque centralisée de sérums provenant d’individus choisis pour leur allergie à des protéines et qui pourrait être utilisés pour des modifications génétiques; la constitution d’échantillons d’allergènes alimentaires normalisés et des protéines de nouveaux aliments GM ou des extraits d’aliments GM; l’entretien et la mise à jour de bases de données de séquences d’allergènes, et un registre de bénévoles allergiques à certains aliments.

4.7 Le Comité d’experts recommande que les organismes de réglementation appropriés veillent à la mise en oeuvre d’une approche précise, scientifique et exhaustive pour faire en sorte que soit effectuée l’évaluation adéquate du potentiel allergène des aliments GM.

4.8 Le Comité d’experts recommande de ne pas approuver d’aliments GM destinés à l’alimentation animale si ceux-ci sont assujettis à des restrictions quant à leur utilisation pour fins d’alimentation humaine (p. ex., récoltes destinées à l’alimentation animale, mais non à l’alimentation humaine). En l’absence de moyens fiables pour assurer la ségrégation et le rappel, au besoin, de ces produits, ces produits ne devraient être approuvés que s’ils sont acceptables pour fins d’alimentation humaine.

4.10 Le Comité d’experts recommande que des protocoles soient développés pour effectuer l’analyse de futurs aliments transgéniques dans le cadre de régimes expérimentaux.

5.1 Le Comité d’experts recommande que l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) élabore des lignes directrices détaillées pour décrire le processus d’approbation d’animaux transgéniques destinés a) à la production alimentaire ou b) à des fins non alimentaires, y compris le développement de critères scientifiques appropriés pour évaluer les changements de comportement ou les changements physiologiques chez ces animaux suite à une modification génétique.

5.2 Le Comité d’experts recommande que le processus d’approbation des animaux transgéniques comporte une évaluation rigoureuse des incidences potentielles axées notamment sur :

  • les effets des modifications génétiques sur la santé et le bien-être des animaux;
  • une évaluation environnementale faisant ressortir les impacts sur la diversité et la pérennité des stocks génétiques;
  • les implications pour la santé humaine découlant de la production d’animaux résistants aux maladies ou d’animaux dont le métabolisme a été modifié (p. ex., fonction immunitaire).

5.4 Le Comité d’experts recommande que les animaux transgéniques et les produits issus d’animaux élevés à des fins autres que l’alimentation (p. ex., la fabrication de produits pharmaceutiques) ne soient pas intégrés dans la chaîne alimentaire à moins que leur innocuité n’ait été démontrée scientifiquement.

5.8. Le Comité d’experts recommande que les modifications de la susceptibilité des plantes génétiquement modifiées aux microorganismes produisant une toxine quelconque et le transfert potentiel de ces microorganismes aux animaux et aux aliments soient évalués dans le cadre du processus d’approbation.

6.3 Le Comité d’experts recommande d’accorder une importance accrue, lors de l’évaluation des risques pour l’environnement, aux effets potentiels de la sélection génétique sur un organisme introduit ou sur des gènes issus de l’organisme en question et transférés à des récipiendaires.

6.5 Le Comité d’experts recommande que soit prise en compte l’historique de la domestication des plantes GM, notamment de la durée et de l’intensité de la sélection artificielle, lors de l’évaluation des incidences environnementales potentielles. Les espèces dont la domestication est récente devraient faire l’objet d’un examen particulièrement serré parce qu’elles sont davantage susceptibles de présenter un risque pour l’environnement.

6.6 Le Comité d’experts recommande que les évaluations environnementales des plantes GM et de leurs gènes recombinants spécifiques portent une attention particulière aux aspects de la biologie de la reproduction, notamment aux systèmes de reproduction, à la distance de transport du pollen, à la fécondité, à la dissémination des graines et aux mécanismes de dormance. L’information sur ces caractéristiques du cycle vital devrait découler d’expériences particulières aux cultivars GM faisant l’objet d’une évaluation, et non pas de la seule consultation de la documentation sur l’espèce en général.

6.16 Le Comité d’experts recommande que les risques potentiels pour l’environnement que représentent les poissons transgéniques soient évalués non seulement en fonction de chaque cas, mais aussi en fonction de chaque population.

6.17 Le Comité d’experts recommande d’accorder la priorité à la recherche visant à cerner les effets pléiotropiques, ou secondaires, de l’insertion de gènes recombinants dans les organismes GM.

8.2 le Comité d’experts recommande que la charge de la preuve soit imposée à ceux qui proposent d’offrir des produits alimentaires issus de la biotechnologie, et que ceux-ci soient tenus d’effectuer l’éventait complet des tests nécessaires pour faire la démonstration fiable que ces produits ne présentent pas de risques inacceptables.

8.3 Le Comité d’experts recommande qu’en présence de fondements scientifiques raisonnables, soit théoriques soit empiriques, établissant à première vue la possibilité qu’un produit puisse présenter des effets délétères pour la santé humaine, la santé animale ou l’environnement, le fait que les résultats des tests disponibles ne permettent pas d’identifier, avec un degré de certitude élevé, le risque ou le niveau de risque posé par le produit ne doit pas empêcher l’imposition de contraintes réglementaires.

8.4 Comme mesure de précaution, le Comité d’experts recommande que la possibilité de risques graves pour la santé humaine, tels que les allergènes potentiels des aliments GM, de perturbations importantes et irréversibles des écosystèmes naturels à la suite de l’apparition d’espèces de plantes nuisibles très vigoureuses et très envahissantes ou une importante réduction de la biodiversité, entraîne le recours aux meilleures méthodes scientifiques pour réduire l’incertitude associée à ces risques. L’approbation de produits comportant ces risques potentiels graves doit être retardée jusqu’à ce que le niveau d’incertitude scientifique soit réduit à un niveau acceptable.

Autres enjeux

5.6 Le Comité d’experts recommande que le recours aux méthodes biotechnologiques pour sélectionner des animaux supérieurs soit contrebalancé par des programmes appropriés visant à maintenir la diversité génétique, laquelle pourrait être menacée suite aux pressions exercées par la sélection génétique.

6.13. Le Comité d’experts recommande l’ordonnance d’un moratoire sur l’élevage de poissons GM dans des enclos placés en milieu aquatique.

6.14 Le Comité d’experts recommande de confiner l’élevage commercial de poissons transgéniques à l’exploitation de viviers terrestres.

9.4 Le Comité d’experts recommande que le Comité consultatif canadien de la biotechnologie entreprenne l’examen des problèmes associés à l’influence croissante des intérêts de l’entreprise privée et des intérêts commerciaux sur l’orientation de la recherche dans le domaine public et qu’il formule des recommandations en vue de politiques gouvernementales favorisant la promotion de recherches indépendantes sur les risques de la biotechnologie agricole pour la santé et l’environnement.

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Annexe E – L’avenir de la biotechnologie alimentaire

L’examen de la réglementation des aliments GM ne serait pas complet sans chercher à scruter l’avenir et entrevoir les produits alimentaires qui pourraient naître de la biotechnologie au cours des prochaines années.

Trois vagues ou générations distinctes peuvent résumer l’évolution des aliments GM. La première porte essentiellement sur la modification de cultures pour qu’elles résistent à des virus ou à des insectes, ou encore tolèrent des herbicides. Tel que mentionné plus tôt, cette génération de cultures est déjà bien établie. Sur la planète, la culture de fèves soya tolérant des herbicides, ainsi que celles de maïs, coton et colza canola résistant aux insectes et aux herbicides, couvrent près de 44 millions d’hectares.

Depuis quelques années, les modifications génétiques de nouvelles variétés à l’essai sont plus complexes, impliquant davantage de gènes et une tendance à modifier les fonctions métaboliques (processus chimiques qui gouvernent la physiologie et la croissance des plantes) ou même l’introduction de nouveaux gènes. Ces nouveaux produits formeront la prochaine génération de cultures GM. La deuxième génération comprendra probablement de nouvelles caractéristiques nutritives (par exemple, une teneur accrue en vitamines). La troisième génération verra possiblement la naissance de plantes qui serviront d’usines de fabrication de produits pharmaceutiques ou véhiculeront des vaccins.

Cette annexe examine quelques exemples des répercussions que la biotechnologie pourrait avoir sur la production d’aliments au cours des prochaines années.

Résistance aux ravageurs et aux maladies

Depuis les débuts de l’agriculture, la reproduction et la sélection pour obtenir des cultures offrant davantage de résistance aux ravageurs et aux maladies ont été des objectifs de base. Des gènes identifiés dans des espèces sauvages ou découlant de mutations spontanées ou forcées ont été incorporés dans des variétés de nombreuses grandes espèces cultivées. À ce processus s’ajoute maintenant le génie génétique.

Les premiers cas de résistance manipulée à une maladie visaient à protéger des plantes contre des infections virales. L’incorporation de séquences virales aux génomes de plantes comme technique conférant une résistance aux maladies causées par ces agents est maintenant bien établie, et cette méthode a permis de développer des variétés commerciales de pommes de terre, courges et papaye. Il s’agit d’un procédé qui pourra être exploré davantage pour combattre de grandes maladies des cultures, particulièrement dans les pays en développement. Par exemple, le rendement du manioc, une denrée de base pour plus de 500 millions de gens habitant l’Afrique sub-saharienne, peut chuter de près de 80 p. 100 à cause d’une infection causée par le virus de la mosaïque du manioc africain.

Les plantes peuvent combattre les maladies de diverses façons. Dans certains cas, elles produisent des produits chimiques ou protéines spécifiques. Ces composés protecteurs peuvent viser des pathogènes spécifiques ou être de nature générale, et il arrive souvent que leur production mène à la mort de cellules près du point d’entrée du pathogène, ce qui isole l’agent infectieux et l’empêche de se répandre. À mesure que nous comprenons mieux les mécanismes naturels de défense de ces plantes, il devient possible d’améliorer ces processus ou de transférer une résistance d’une espèce à une autre à l’aide de techniques de manipulation génétique.

Plusieurs façons d’augmenter la résistance de certaines plantes par le transfert ou la modification des capacités de défense des plantes sont illustrés ci-dessous :

  • L’introduction d’une enzyme, la synthase stilbène19, provenant d’une vigne résistante au Phytophthera infestans, agent qui a été la principale cause de la famine de la pomme de terre en Irlande en 1845-1846.
  • L’amélioration de la résistance du concombre à la moisissure (Botrytis cinerea) grâce à un gène de la chitinase du riz20.

D’autres exemples comprennent l’expression de peptides et protéines à propriétés antibactériennes, la résistance à des toxines fongiques introduite dans des céréales, et la protection contre les nématodes du sol qui s’attaquent aux racines des plantes et véhiculent des maladies. Le clonage récent d’un gène interrupteur, qui commande la production de nombreuses protéines de l’Arabidopsis thaliana (une mauvaise herbe répandue de la famille des moutardes) qui combattent des maladies, présente la possibilité, grâce à un seul gène, d’obtenir des plantes dotées d’une résistance durable à spectre large.

Stress environnemental

L’humanité doit réussir à produire de plus en plus de nourriture pour subvenir aux besoins d’une population sans cesse croissante. Cependant, les terres arables propices à l’agriculture se font rares, souvent à cause d’une forte teneur en sel, d’un manque d’eau, du froid ou d’une contamination chimique. On a postulé qu’il serait possible de diminuer cette pression en cultivant des variétés offrant une résistance à ces stress environnementaux.

La salinité élevée affecte quelque 20 p. 100 de l’ensemble des terres agricoles et 40 p. 100 des terres irriguées. La faculté qu’ont certaines plantes de s’adapter à une forte salinité ou à des conditions de sécheresse découle de l’interaction de nombreux gènes. Il est donc difficile d’introduire une tolérance au sel ou à la sécheresse par reproduction traditionnelle ou par la biologie moléculaire d’aujourd’hui. Néanmoins, des progrès ont été réalisés en manipulant des plantes pour qu’elles produisent davantage de certains composés, dont la glycine bétaïne21, qui protège les cellules contre l’action du sel. La tolérance de la tomate au sel a également été augmentée par des techniques qui accroissent l’expulsion des ions de sodium que renferment les cellules des plantes22.

Les sols fortement acides entraînent une libération d’aluminium, élément toxique pour les racines de la plupart des cultures et qui cause des problèmes dans 30 à 40 p. 100 des terres arables du monde, particulièrement sous les tropiques. Par exemple, le rendement du maïs peut chuter de 80 p. 100 lorsqu’il pousse sur des sols acides. Des plantes qui tolèrent naturellement de fortes concentration d’aluminium secrètent de l’acide malique ou citrique, ce qui aide les racines à absorber moins d’aluminium. L’introduction d’un gène bactérien dans la papaye a rendu cette plante plus tolérante à l’aluminium23, mais on n’a pas encore étudié l’effet d’un surplus de production de citrate sur la physiologie de la plante.

Amélioration du rendement

Certaines variétés de récoltes GM disponibles sur le marché, particulièrement celles qui offrent une plus grande résistance aux maladies et aux insectes, ont déjà conduit à de meilleurs rendements, mais n’ont pas comme tel augmenté le potentiel de ces cultures. Plusieurs paramètres, dont l’efficacité de l’utilisation de l’eau, la synthèse des amidons, le poids des semences et le métabolisme de l’azote déterminent le rendement possible d’une plante commerciale. Ce sont des paramètres que l’on peut manipuler par des procédés biotechnologiques.

La manipulation génétique des fonctions métaboliques servant à convertir le sucrose en amidon (soit le contournement des étapes intermédiaires du processus) a permis d’obtenir des pommes de terre ayant une teneur substantiellement plus forte en amidon24. Elles contiennent moins d’eau, offrent un meilleur rendement énergétique par unité de poids, ainsi qu’une meilleure texture et une moindre absorption de gras pendant la friture.

Toutes les plantes ont besoin d’azote organique afin de pousser. Dans le cas des légumineuses, dont le soya, l’alfalfa et les pois, cet apport provient d’une relation de symbiose avec la bactérie Rhizobium qui vit en étroite relation (nodules) avec les racines de la plante. Dans le cas d’autres cultures, l’azote est fourni par des fertilisants. Présentement, on explore deux façons d’augmenter la teneur d’azote dans le sol. Il s’agit de la modification génétique de la bactérie Rhizobium pour l’amener à former davantage de nodules sur les racines25, et de l’introduction dans les plantes de caractéristiques de nitrification de la bactérie. Cette deuxième solution exigerait l’introduction de possiblement 16 gènes et la conservation d’un système de fixation de l’azote dans un milieu libre d’oxygène, un défi qui n’a pas encore été relevé.

Il est possible également que l’apport d’oxygène aux plantes puisse être manipulé d’une façon qui les avantagera. L’introduction d’un gène d’hémoglobine de bactérie dans des plants de tabac leur a permis de germer trois ou quatre jours plus tôt et de se développer plus rapidement, ce qui conduit à un gain de poids humide de 80 à 100 p. 100 en 35 jours26. Cependant, on ne comprend pas comment cela se produit et on ne sait pas encore si ce résultat pourrait être obtenu avec d’autres cultures ou s’il mènera à de meilleurs rendements sur le terrain. Il s’agit d’une caractéristique que l’on incorporera peut-être aux plantes GM d’une prochaine génération.

Nutraceutiques

En plus d’offrir des vitamines et des minéraux, les plantes synthétisent des milliers de métabolites secondaires, dont certains ont un impact sur la santé humaine. Voilà une autre raison voulant qu’une alimentation riche en plantes soit bonne pour la santé.

Les nutraceutiques sont des aliments ou des parties d’aliments qui ont une valeur médicinale. Par exemple, un composé du brocoli27, le sulforaphane, offre une certaine protection contre le cancer du sein chez les souris.

L’amélioration de la valeur nutritive des aliments et des plantes pourrait avoir des retombées significatives en matière de santé. À cette fin, on se penche sur la modification par manipulation génétique de cultures bien ciblées. Le cas le plus médiatisé est celui du riz doré qui a été génétiquement manipulé pour aider à pallier la carence de vitamine A. Denrée de base de près de la moitié de la population mondiale, le riz ne contient pas de bêta-carotène, le précurseur de la vitamine A. Deux gènes provenant l’un de la jonquille l’autre d’une bactérie y ont été introduits pour qu’il produise de la bêta-carotène28. Les retombées possibles sont notamment en Asie du Sud-Est où le riz est une denrée de base. La carence en vitamine A affecte annuellement quelque cinq millions d’enfants. Dans de nombreux cas, la maladie oculaire dont ils souffrent les rend aveugles. L’accès à davantage de vitamine A peut également aider à prévenir la diarrhée et la rougeole, conditions qui tuent jusqu’à deux millions d’enfants par année. Le potentiel qu’a ce riz modifié de soulager la carence en vitamine A n’a pas encore été confirmé et exigera des études supplémentaires.

On a également modifié des tomates pour qu’elles contiennent quatre fois la quantité normale de lycopène, un caroténoïde29 qui agit comme antioxydant puissant et dont l’effet peut diminuer sensiblement le risque de maladies coronariennes et de certains types de cancers.

La vitamine E est le plus important antioxydant soluble dans l’eau que connaisse notre alimentation et est associée à divers bienfaits cardiovasculaires. Les sources naturelles de vitamine E sont les huiles de semences, dont le colza canola et le soya, lesquels contiennent un mélange de plusieurs types de molécules appelées tocophérols. Le tocophérol alpha est le plus bénéfique de ces composés, mais il ne se retrouve qu’en faible quantité dans la plupart des produits. En introduisant un gène dans des semences d’une espèce proche du colza canola, l’Arabidopsis thaliana, cette proportion a été augmentée par un facteur de plus de 95 p. 10030.

La carence en fer est l’une des plus grandes faiblesses des alimentations traditionnelles au monde, et elle affecte entre un et deux milliards de gens. Son symptôme le plus commun s’appelle l’anémie, mais il est également associé à des difficultés d’apprentissage chez les enfants et à une plus grande susceptibilité aux infections. Outre les suppléments alimentaires, on a cherché à augmenté l’absorption de fer de deux façons : en accroissant dans certaines cultures la teneur en protéines renfermant du fer (ferritines) et en réduisant l’impact des composés qui gênent l’absorption de fer. L’incorporation d’une protéine du soya porteuse de fer a conduit à un riz manipulé qui contient trois fois plus de fer que les variétés conventionnelles31. On estime qu’une portion d’un repas de ce riz transgénique fournit entre 30 et 50 p. 100 du besoin quotidien de fer alimentaire d’une personne.

Les semences renferment du phosphore, nécessaire à la germination, sous forme de phyrate, un glucide comprenant six groupes de phosphate. Comme le phyrate se lie fortement au fer, au calcium, au zinc et à d’autres ions métalliques, il joue un rôle antinutritif dans notre alimentation (comme dans celle des animaux de ferme) en empêchant l’absorption de certaines substances. Une méthode employée pour contrer cette propriété antinutritive du phyrate dans le riz consiste en l’introduction d’un gène du champignon Aspergillus niger, qui code une phytase, soit une substance qui dégrade le phyrate32. On ajoute souvent des préparations de phytase à l’alimentation du bétail pour améliorer la disponibilité de phosphate dans son alimentation. Les fèves soya génétiquement modifiées pour exprimer une phytase de champignon peuvent se substituer aux traitements à base de phytase ou à l’ajout de phosphore inorganique à la moulée de la volaille33, ce qui peut mener à une réduction des coûts de production et à une diminution de la pollution au phosphore..

Vaccins oraux

Depuis toujours, les plantes sont de grandes sources de composés médicinaux permettant de traiter des maladies chez les humains. Au cours des dernières années, de nombreuses recherches ont porté sur l’utilisation de techniques de manipulation génétique pour amener des plantes à produire une gamme de composés allant d’antigènes de vaccins à des anticorps monoclonaux et à des produits pharmaceutiques.

L’incorporation d’antigènes (agents qui stimulent une réaction immunitaire protectrice) dans des plantes de consommation permet la production de vaccins oraux. Les avantages possibles de tels vaccins comprennent l’administration sans l’aide de professionnels de la santé, aucune exigence de réfrigération, une rétention prolongée de la protection immunitaire par le biais d’absorption régulière, et l’élimination des risques attenant aux injections par aiguilles hypodermiques, méthode qui contribue fréquemment à la propagation des hépatites B et C.

Il n’existe aucun vaccin efficace contre la diarrhée grave, laquelle entraîne le décès de près de 2,5 millions d’enfants par année. L’ E. coli entérotoxigénique (ETEC) et le Vibrio cholerae (choléra) sont les principales cause de la diarrhée. Quand on a nourri des souris de pommes de terre manipulées pour exprimer une partie de la toxine ETEC, elles ont développé une réaction immunitaire à la protéine du vaccin34. Quoique le processus d’évaluation soit loin d’être complété, les essais initiaux chez des humains à l’aide de ce vaccin comestible sont prometteurs et donnent espoir que cette technologie pourrait aider à résoudre nombre de problèmes associés à l’administration sûre et efficace de vaccins dans les pays en développement35. D’autres exemples comprennent le vaccin comestible contre le virus de l’hépatite B36, le virus Norwalk37 (responsable de la gastroentérite virale qui compte pour le quart des diarrhées des voyageurs) et le virus de la rage38.

L’expression de protéines spécifiques dans des plantes pourrait également aider à prévenir des réactions immunitaires néfastes telles que celles qu’entraînent des maladies auto-immunes, par exemple le diabète traité à l’insuline. Lorsque des souris ont été nourries de pommes de terre manipulées pour exprimer une protéine fusionnée de la toxine du choléra et de la pro-insuline, elles ont acquis des niveaux élevés d’anticorps qui ont réprimé la réaction auto-immune qui aurait normalement détruit les cellules productrices d’insuline du pancréas39.

Les plantes-usines

On manipule de plus en plus des plantes à des fins non alimentaires, c.-à-d. la production de protéines industrielles, de produits pharmaceutiques et d’autres produits. Certains exemples comprennent la production d’une protéine antimicrobiale (lysozyme) par des plants de tabac, l’expression de facteurs de croissance et d’interleukines, l’introduction de protéines spéciales (à forte teneur d’hydroxyproline) de moules dans des plantes pour produire une colle médicale, l’introduction de polymères dégradables comme substituts du plastique, et la production d’huiles modifiées servant dans des processus de fabrication ou pour formuler des enduits et des peintures.

Il est également possible de produire à grande échelle certains anticorps thérapeutiques grâce à la manipulation génétique. Un exemple de ces « planticorps » conçus pour des thérapies humaines vise à combattre la bactérie dentaire Streptococcus mutans, qui contribue à la formation de plaque, donc de caries dentaires40. Il y a aussi l’exemple de l’expression dans la fève soya d’un anticorps complet humanisé contre le virus de l’herpès génital41.

La biotechnologie animale

La manipulation de la physiologie de reproduction des animaux pour contrôler l’élevage remonte à 1891, avec le premier cas de transfert d’embryons dans des lapines. Ce travail constitue la base des techniques modernes d’insémination artificielle qui permettent la propagation de lignées choisies de bétail à partir de banques d’embryons gelés.

Ce sont des expériences pendant les années 1970 sur le développement d’embryons de grenouilles qui ont constitué les fondements du clonage moderne des animaux, technique qui a fait les manchettes lors de l’annonce du clonage de la brebis « Dolly » en 1997. Des techniques de microinjection pour introduire des gènes isolés dans un ovule récemment fertilisé ont conduit à la production d’animaux transgéniques qui expriment des traits nouveaux ou altérés. Ces techniques et d’autres méthodes de génie génétique s’appliquent maintenant à plusieurs types d’animaux d’élevage, y compris des ruminants, des cochons, des moutons et des chèvres, ainsi que des poules et plusieurs espèces de poissons.

Les animaux transgéniques offrent de nombreuses applications en recherche médicale, par exemple en servant de modèles pour étudier les maladies, la croissance, le vieillissement et les fonctions de gènes de l’être humain. La possibilité d’exprimer des protéines pharmaceutiques dans le lait d’animaux transgéniques pourrait permettre la production d’importants composés thérapeutiques qui ne pourraient être isolés en quantité suffisamment grande à partir de sources naturelles, ou produits sous forme active dans d’autres êtres vivants, par exemple des micro-organismes ou des plantes GM.

Quoique de récentes percées en sciences médicales aient permis de transplanter des coeurs, reins et foies de façon routinière, il y a un manque chronique d’organes compatibles, ce qui limite des procédures qui sauvent des vies. Le fait que l’on puisse manipuler génétiquement des organes d’animaux et diminuer le risque de rejet du transplant est présentement considéré comme une solution possible à ce problème. L’utilisation de telles xénotransplantations (transplantations entre espèces) soulève plusieurs préoccupations tant éthiques que scientifiques. Ces dernières comprennent la possibilité de transmettre à des humains des maladies d’animaux.

Le premier aliment GM d’origine animale qui sera peut-être l’objet d’une approbation réglementaire est le saumon de l’Atlantique. Celui-ci a été manipulé génétiquement pour croître plus rapidement. Ce poisson transgénique produit de plus fortes concentrations de l’hormone de croissance, ce qui l’amène à augmenter de taille et de poids à un rythme pouvant atteindre six fois celui d’un saumon conventionnel. La taille finale est équivalente à celle du saumon de l’Atlantique normal, mais le processus de croissance est accéléré.


1 Des renseignements plus détaillés concernant le CCCB et ses activités, les autres thèmes de consultation et la biotechnologie en général sont affichés au site Web du Comité à www.cbac-cccb.ca. L’annexe A au présent rapport contient la liste des membres du CCCB.

2 En plus de ses recommandations adressées au gouvernement sur la réglementation des aliments GM, le CCCB élabore une autre série de recommandations sur la propriété intellectuelle en biotechnologie et le brevetage des formes de vie supérieures.

3 C. James, « Global status of commercialized transgenic crops: 2000 », dans ISAAA Briefs No. 21: Preview, ISAAA, Ithaca, New York, 2000.

4 Pour les besoins du projet du CCCB sur les aliments GM, l’« innocuité des aliments » a trait à la protection de la santé humaine et de l’environnement. Toutefois, dans l’analyse des divers éléments du système de réglementation, l’évaluation de l’innocuité pourra se rapporter aux questions de santé ou à celles d’environnement, ou aux deux, selon le contexte.

5 M. Maluszynski et al., « Officially released mutant varieties – the FAO/IAEA database », dans Mutation Breeding Review No. 12, Division des techniques nucléaires en alimentation et en agriculture (un organe conjoint de la FAO et de l’IAEA) et Laboratoire d’agriculture et de biotechnologie de la FAO et de l’IAEA, 2000.

6 OCDE, 2000 (traduction) : « Il n’y a aucune raison scientifiquement valable de traiter des transferts possibles de gènes entre des organismes GM différemment des transferts qui adviennent entre des organismes naturels [...] Seuls le gène et le caractère qu’il confère, et le fait qu’ils apportent ou non un avantage sur le plan de la reproduction ou de la sélection de l’organisme receveur, ont une importance critique au moment de considérer les effets éventuels d’un transfert génétique possible. »

FAO et Organisation mondiale de la santé, 2000 (traduction) : « L’occurrence possible d’effets involontaires n’est pas exclusive aux techniques de l’ADN recombinant; il s’agit plutôt d’un phénomène répandu dans l’exercice des techniques conventionnelles de sélection. »

U.S. National Research Council, 2000 (traduction) : « Il n’existe aucune distinction stricte entre les risques sanitaires et environnementaux découlant de végétaux modifiés génétiquement au moyen des techniques moléculaires modernes et les risques découlant de végétaux modifiés à l’aide des pratiques conventionnelles de sélection. » (Voir aussi les listes bibliographiques des documents d’accompagnement.)

7 Pour obtenir des renseignements supplémentaires, voir les sites Web suivants : http://www.hc-sc.gc.ca/food-aliment/francais/sujets/aliment_nouveau/aliment_nouveau.html (Santé Canada); http://www.inspection.gc.ca/francais/toc/biotechf.shtml (ACIA) et www.ec.gc.ca (Environnement Canada).

8 La teneur en glyco-alcaloïdes des pommes de terre varie considérablement selon les conditions du milieu de croissance, les lésions d’origine mécanique, la durée d’entreposage et la variété de pomme de terre. La solanine glyco-alcaloïde est présente également dans les pommes, les poivrons, les cerises, les betteraves à sucre et les tomates.

9 H. P. J. M. Noteborn et al., « Chemical fingerprinting for the evaluation of unintended secondary metabolic changes in transgenic food crops », Journal of Biotechnology, no 77, 2000, p. 103-114.

10 M. MacDonald, La biotechnologie, l’éthique et l’État : Synthèse, CCCB.

11 Les intéressés trouveront d’autres renseignements en consultant les sites Web suivants : http://www.hc-sc.gc.ca/food-aliment/francais/sujets/aliment_nouveau/aliment_nouveau.html (Santé Canada); http://www.inspection.gc.ca/francais/toc/biotechf.shtml (ACIA); http://www.ec.gc.ca (Environnement Canada) et http://bravo.ic.gc.ca (Industrie Canada).

12 Ibid.

13 Food and Drug Administration des États-Unis, « Pre-market notice concerning bioengineered foods », U.S. Federal Register, vol. 66, no 12, p. 4706-4738, dossier no 00N-1396, le 18 janvier 2001.

14 Food and Drug Administration des États-Unis, « List of completed consultations on bioengineered foods », http://vm.cfsan.fda.gov/~lrd/biocon.html.

15 Bt est l’abréviation désignant le Bacillus thuringiensis, une bactérie commune des sols qui produit une protéine ayant des effets toxiques sur les larves de certaines espèces d’insectes. Les cultures Bt, par exemple le maïs Bt, ont subi des modifications génétiques afin de les amener à produire cette protéine Bt dans certaines parties du végétal, notamment les feuilles, et à se rendre ainsi résistantes aux dommages que peuvent causer ces insectes.

16 R. MacRae, « L’échec de la politique alimentaire canadienne », dans Armer les villes contre la faim : Systèmes alimentaires urbains durables, sous la direction de M. Koc, R. MacRae, L. J. A. Mougeot et J. Welsh, Service des publications du Centre de recherches pour le développement international, Ottawa, 2000, p. 182-194.

17 Pour de plus amples renseignements, prière de passer par le site Web de la Société royale du Canada (http://www.rsc.ca/foodbiotechnology/indexFR.html).

18 Les systèmes d’évaluation des risques ne sont pas l’un des enjeux sur lequel se penche le CCCB, mais ils sont mentionnés ici pour donner un aperçu complet des recommandations du groupe d’experts de la Société royale.

19J. E. Thomzik et al., « Synthesis of a grapevine phytoalexin in transgenic tomatoes (Lycopersicon esculentum Mill.) conditions resistance against Phytophthera infestans », Physiology and Molecular Plant Pathology, vol. 51, 1997, p. 265-278.

20Y. Tabei et al., « Transgenic cucumber plants harbouring a rice chitinase gene exhibit enhanced resistance to grey mould (Botrytis cinerea) », Plant Cell Reproduction, vol. 17, 1998, p. 159-164.

21H. Hayashi et al., « Transformation of Arabidopsis thaliana with the coda gene for choline oxidase; accumulation of glycinebetaine and enhanced tolerance to salt and cold stress », The Plant Journal, vol. 12, 1997, p. 133-142.

22 I. Arrillaga et al., « Expression of the yeast HAL2 gene in tomato increases the in vitro salt tolerance of transgenic progenies », Plant Science, vol. 136, 1998, p. 219-226.

23 J. M. de la Fuente, V. Ramirez-Rodriguez, J. L. Cabrera-Ponce et L. Herrera-Estrella, « Aluminum tolerance in transgenic plants by alteration of citrate synthesis », Science, no 276, 1997, p. 1566-1568.

24 J. R. Lloyd et al., « The influence of alterations in ADP glucose pyrophosphorylase activities on starch structure and composition in potato tubers », Planta, no 209, 1999, p. 230-238.

25 J. M. Barea et al., « Effect of a genetically modified Rhizobium meliloti inoculant on the development of arbuscular mycorrhizas, root morphology, nutrient uptake and biomass accumulation in Medicago sativa », New Phytologist, no 134, 1996, p. 361-369.

26N. Holmberg et al., « Transgenic tobacco expressing Vitreoscilla hemoglobin exhibits enhanced growth and altered metabolite production », Nature Biotechnology, vol. 15, 1997, p. 244-247.

27 J. W. Fahey et al., « Broccoli sprouts: An exceptionally rich source of inducers of enzymes that protect against chemical carcinogens », Proceedings of the National Academy of Science USA, vol. 94, 1997, p. 10367-10372.

28 X. Ye et al., « Engineering the provitamin A (beta-carotene) biosynthetic pathway into (carotenoid-free) rice endosperm », Science, no 287, 2000, p. 303-305.

29 R. L. Ausich, Commercial opportunities for carotenoid production by biotechnology,” Pure and Applied Chemistry 69 (1997): 2169–73.

30 D. Shintani and D. Della Penna, “Elevating the vitamin E content of plants through metabolic engineering,” Science 282 (1998): 2098–2100.

31 F. Goto, “Iron fortification of rice seed by the soybean ferritin gene,” Nature Biotechnology 17 (1999): 282–86.

32 I. Potrykus et al, “Research abstract: Contributions to food security by genetic engineering with rice,” Rockefeller Foundation (1999): http://www.rockfound.org/rocktext/t_news/t_072699_rice.html

33 D. M. Denbow et al, “Soybeans transformed with a fungal phytase gene improve phosphorus availability for broilers,” Poultry Science 77 (1998): 878–81.

34 H. S. Mason et al, “Edible vaccine protects mice against Escherichia coli heat-labile enterotoxin (LT): Potatoes expressing a synthetic LT-B gene,” Vaccine 16 (1998): 1336–43.

35 T. S. Mor and C. J. Arntzen, “Pharmaceutical foodstuffs: Oral immunization with transgenic plants,” in Plant Biotechnology and in Vitro Biology in the 21st Century, edited by A. Altman, M. Ziv and S. Izhar (Dordrecht, Germany: Kluwer, 1999), pp. 17–20.

36 L. J. Richter et al, “Production of hepatitis B surface antigen in transgenic plants for oral immunization,” Nature Biotechnology 18 (2000): 1167–71.

37 H. S. Mason et al, “Expression of Norwalk virus capsid protein in transgenic tobacco and potato and its oral immunogenicity in mice,” Proceedings of the National Academy of Science USA 93 (1996): 5335–40.

38 A. Modelska et al, “Immunization against rabies with plant-derived antigen,” Proceedings of the National Academy of Science USA 95 (1998): 2481–85.

39 T. Arakawa et al, “A plant-based cholera toxin B subunit-insulin fusion protein protects against the development of autoimmune diabetes,” Nature Biotechnology 16 (1998): 934–38.

40 J. W. Larrick et al, “Production of antibodies in transgenic plants,“ Research in Immunology 149 (1998): 603–08.

41 L. Zeitlin et al, “A humanized monoclonal antibody produced in transgenic plants for immunoprotection of the vagina against genital herpes,” Nature Biotechnology 16 (1998): 1361–64.

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    Création: 2005-07-13
Révision: 2006-06-22
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