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Créer un cadre de sagesse communautaire : examen des services aux victimes dans les territoires du Nunavut, du Nord-Ouest et du Yukon

  1. Résumé
    1. Nunavut
    2. Territoires du Nord-Ouest
    3. Yukon
    4. Recommandations générales

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RÉSUMÉ

Entre janvier 2001 et août 2002, une consultation étendue a été menée auprès des fournisseurs de services aux victimes, des fournisseurs de services communautaires et des représentants du gouvernement dans les trois territoires du Nord. Le projet comportait plusieurs tâches et objectifs inter-reliés. Outre l'inventaire complet des services actuellement offerts aux victimes de crimes au Nunavut, au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, le projet a permis le recensement des pratiques exemplaires, des défis et des lacunes dans la prestation de services aux victimes dans les territoires.

Le présent rapport résume les résultats de cette consultation et renferme des recommandations sur la façon d'aborder les questions soulevées. Les recommandations tiennent compte du contexte propre à chacun des territoires.

Nunavut : constats

Un inventaire des services officiels offerts au Nunavut a été effectué afin d'examiner la nature et l'étendue des services sociaux formellement structurés offerts aux Nunavois victimes de violence. Il a été décidé de communiquer avec les organisations, organismes, bureaux et certains ministères offrant des services aux victimes, y compris certaines organisations comme les églises et les écoles, dont le mandat n'est pas précisément d'offrir des services aux victimes.  Au total, 148 services communautaires et sept fournisseurs territoriaux ont été recensés aux fins de l'étude dans 26 collectivités des trois territoires. De ce nombre, 91 ont participé au sondage.

Bien qu'il semble y avoir des services sociaux dans chacune des collectivités, il serait erroné de supposer que les victimes bénéficient de services adéquats, ou même que des services leur soient offerts. Il existe peu d'organismes offrant des services d'aide aux victimes dans les collectivités, en particulier hors de la capitale Iqaluit. La plupart des organismes communautaires sont dirigés par des bénévoles ou par des employés mal payés, mal formés et surchargés de travail. Les obstacles écrasants auxquels font face ces fournisseurs de services communautaires, plus particulièrement à la lumière du degré élevé de victimisation au Nunavut, sont présentés dans le corps de ce rapport. En règle générale toutefois, les problèmes dans la prestation de services aux victimes sont dus à l'absence d'éléments clés qui permettraient d'appuyer le travail de ces fournisseurs de services aux victimes, comme le soutien et la compréhension des victimes de la part des leaders politiques, les infrastructures et l'information, qui s'ajoutent à la difficulté générale que présente le travail auprès des personnes victimes de violence.

Les approches traditionnelles inuites à l'égard de la victimisation et les services officieux en place au Nunavut ont été examinés au moyen d'un processus de consultation étendue, dans le cadre d'une autre étape du processus de recherche. Les répondants ont décrit un éventail d'approches traditionnelles à l'égard des personnes victimes de violence. Par exemple, on s'attend à ce que les femmes et les jeunes filles, dont les mariages sont normalement arrangés, gardent le silence sur les abus dont elles sont victimes et s'efforcent d'en faire davantage pour plaire et obéir à leurs maris, ou tenter d'éviter la confrontation ouverte avec les personnes violentes afin de les garder calmes et maintenir une atmosphère de respect au sein du groupe, les victimes peuvent se rendre dans un autre campement afin d'y chercher la sécurité, et les anciens conseillent subtilement ou directement la personne coupable, tout en évitant de l'offenser et de l'embarrasser. Les approches traditionnelles du Nunavut comprennent également l'exercice de représailles, parfois des années plus tard, de la part de la famille de la victime, et des rumeurs sur les victimes et sur les auteurs des actes de violence dans le but de tenter de contrôler la violence dans le groupe et de soulager la tension soulevée par un comportement perturbateur.

Dans le cadre des consultations, les répondants ont également recensé des approches officieuses plus contemporaines à l'égard de la victimisation. Parmi les approches les moins constructives on compte le refus de reconnaître qu'il existe un problème de violence interpersonnelle, le fait de garder le secret sur les expériences personnelles de victimisation, le désir de préserver à tout prix la cellule familiale, le fait de croire que les victimes ont mérité leur sort en raison de lacunes personnelles, le recours à des produits chimiques ou dépendances comportementales (comme le jeu compulsif), les comportements violents, l'activité criminelle et le suicide pour faire face aux sentiments de peur, de rage et de honte et le développement d'une gamme de symptômes de stress post-traumatique.

Les approches les plus positives comprennent le fait de passer le plus de temps possible avec son peuple, de participer aux activités traditionnelles et contemporaines et aux activités d'expression culturelle comme la danse du tambour, d'ouvrir sa demeure aux victimes, d'accueillir des parents durant les épisodes de violence familiale, de participer aux activités sportives communautaires et d'adopter une approche religieuse ou spirituelle à l'égard de la vie.

On a consulté les programmes de services aux victimes dans les autres régions isolées du Sud et du Nord autres que le Nunavut et dans d'autres régions circumpolaires afin de mieux connaître les modes de prestation de services et les « pratiques exemplaires » qui pourraient être utiles au Nunavut. Au total, 43 personnes travaillant au sein d'un éventail de programmes de services aux victimes ont été consultées par téléphone, en personne, par courriel et par télécopieur. Les méthodes efficaces et les « pratiques exemplaires » comprennent entre autres :

  • l'établissement d'une approche communautaire à l'égard de la prestation de services qui met l'accent sur la participation de la collectivité et l'inclusion, le développement des relations, la propriété collective, la coopération entre les organismes, la prise de décision consensuelle et une sensibilisation universelle aux problèmes sociaux de la collectivité;
  • la combinaison de différents services, comme les refuges d'urgence, le counseling et la préparation en vue du procès;
  • la prestation, par l'entremise des gendarmes auxiliaires de la GRC, d'une assistance immédiate aux victimes;
  • la prestation de services pratiques à plusieurs volets accessibles aux femmes victimes de violence;
  • l'élaboration de programmes de rétablissement à court et à long terme pour les victimes;
  • le recours au personnel para-professionnel présent dans la collectivité pour la prestation des services aux victimes;
  • l'élaboration  de programmes destinés à appuyer les victimes qui participent aux processus de justice réparatrice; 
  • l'élaboration de lois progressistes qui protègent les victimes et augmentent les choix à leur disposition. 

À la suite de ces recherches consultatives et d'un examen de la documentation et des études dans le domaine de la victimisation en régions isolées, nous avons formulé une série de recommandations concernant la formation, le soutien et le rétablissement à l'intention des fournisseurs de services en place, des recommandations concernant la formation, le soutien et le rétablissement à l'intention des collectivités, des dirigeants, des systèmes législatif, juridique et correctionnel, et des programmes de services aux victimes.

Territoires du Nord-Ouest : constats

Un inventaire des services officiels offerts dans les Territoires du Nord-Ouest a été effectué afin d'examiner la nature et l'étendue des services sociaux formellement structurés offerts aux victimes dans ce territoire. L'inventaire couvre tous les services, y compris ceux offerts par certaines organisations dont le mandat n'est pas expressément d'offrir des services aux victimes. Au total, 141 fournisseurs ont été recensés dans l'ensemble des 30 collectivités des T.N-.O. De ce nombre, 111 ont répondu au sondage.

Les approches traditionnelles à l'égard de la victimisation et les services officieux actuellement offerts aux victimes dans les T.N.-O. Ont été examinés au moyen d'un processus de consultation étendue, dans le cadre d'une autre étape du processus de recherche. À cet égard, les réponses laissent penser qu'il existe une variété d'opinions quant à la mesure dans laquelle les victimes ont été traditionnellement appuyées et aidées. Il existe également des opinions variées sur les raisons qui justifiaient ce soutien et les formes qu'il prenait.

Les approches non officielles actuelles comprennent à la fois des aspects constructifs et moins constructifs. Les approches moins constructives reflètent un manque généralisé de soutien communautaire aux victimes, qui sont isolées, blâmées et honnies. De plus, certains répondants ont indiqué que le soutien et l'aide accordés aux victimes variaient selon leur position sociale dans la collectivité. Par exemple, les victimes appartenant aux familles les moins puissantes étaient plus susceptibles d'être isolées et blâmées que celles appartenant aux familles plus puissantes. En outre, les répondants ont indiqué que les refuges et les autres programmes axés sur les victimes étaient souvent jugés responsables de « ruptures familiales » et les tentatives d'établissements de nouveaux refuges se heurtent souvent à l'opposition des membres influents de la collectivité. Certains répondants soulignent également que les victimes, lorsqu'elles parviennent à accéder aux services, peuvent parfois être renvoyées.

Les répondants ont également mentionné certaines approches contemporaines positives. Dans les plus petites collectivités, où les victimes font parfois l'objet de pressions pour qu'elles retirent les accusations ou même de menaces, les services d'aide aux victimes les aident à s'établir définitivement dans une collectivité plus importante de la région, les protégeant ainsi du harcèlement par le milieu et la famille de l'auteur des actes de violence. Cela permet également aux victimes d'accéder plus facilement à des services de counseling, de logement, d'emploi et d'éducation.

Les répondants signalent également un changement d'attitude dans les centres plus importants (Yellowknife, Hay River, Inuvik, Fort Smith et Fort Simpson), en faveur du soutien offert aux victimes. Les refuges pour femmes battues et les autres fournisseurs de services aux victimes se sont regroupés pour sensibiliser la population de l'endroit et ont entrepris de mettre sur pied des groupes communautaires de soutien aux femmes agressées. Dans certaines villes, les gens se portent volontaires pour collaborer aux programmes qui viennent en aide aux victimes dans la collectivité. Il y a davantage de conférences et d'ateliers sur les questions touchant la victimisation, et le gouvernement du territoire a récemment organisé une importante conférence sur les conditions sociales dans les T.N.-O. (Social Agenda Conference, tenue à Hay River en juin 2001. )

À la suite de ces recherches consultatives et d'un examen de la documentation et des études dans le domaine de la victimisation en régions isolées, nous avons élaboré une série de recommandations concernant les programmes d'aide aux victimes, l'éducation du public et le développement de la conscience communautaire, les programmes communautaires, le soutien judiciaire et le leadership.

Territoire du Yukon : constats

La population du Yukon est fortement centralisée, 74 % de celle-ci habitant la capitale, Whitehorse, et ses environs. Au total, il existe 17 collectivités dotées de services et toutes, sauf une, sont situées sur le réseau routier. Un inventaire des services officiels en place dans les 17 collectivités a été établi afin d'évaluer la nature et l'étendue des services sociaux formellement structurés offerts aux victimes de crimes au Yukon. Pour les besoins de la présente étude, des entrevues ont été réalisées auprès de 42 personnes provenant de 24 services accessibles à l'ensemble de la population (basés à Whitehorse) et de 12 organismes de services communautaires aux victimes (dans les collectivités périphériques). 

Les approches traditionnelles à l'égard de la victimisation et les services non structurés offerts actuellement aux victimes au Yukon ont été examinés au moyen d'une consultation étendue, dans le cadre d'une autre étape du processus de recherche. La plupart des répondants croient que, dans un passé éloigné, les victimes de violence familiale ou d'agressions physiques ou sexuelles ne recevaient pas beaucoup de soutien personnalisé ou de compréhension.  La réponse la plus fréquente est que les femmes et les enfants devaient simplement « endurer » la violence. Toutefois, ces répondants soulignent qu'il existait pendant la période pré-coloniale, davantage de mécanismes d'adaptation intégrés à la culture et qui contribuaient à garder les gens plus proches les uns des autres et donc plus en sécurité. Les répondants ont également signalé qu'hommes et femmes tenaient des rencontres séparées et qu'il existait des mécanismes de médiation.

Les approches contemporaines non structurées actuelles contiennent des éléments positifs et d'autres moins constructifs. Les mécanismes moins constructifs comprennent le silence dans la collectivité. Certaines localités peuvent disposer d'un réseau de soutien informel, mais qui reste relativement inconnu à l'extérieur de la collectivité. On s'efforce actuellement de développer ces réseaux de soutien non officiels et d'augmenter la viabilité des services plus structurés en mettant l'accent sur la coopération et l'établissement de liens entre les organismes communautaires.

La plupart des répondants croient que le Yukon, comparativement aux autres régions du Canada et plus particulièrement aux autres régions du Nord, dispose d'un continuum bien développé de services professionnels pour les victimes. Ils soulignent la variété croissante de services spécialisés pour les victimes, les partenariats efficaces entre les organismes, la capacité croissante des fournisseurs de services de traiter les traumatismes à long terme et le volume élevé de travail accompli par l'ensemble des organismes de services aux victimes. Certains répondants croient voir les résultats de ces efforts dans une plus grande sobriété, une sensibilisation accrue de la collectivité et une plus grande participation aux activités de guérison, et plus particulièrement à celles fondées sur les croyances traditionnelles autochtones en matière de guérison. Bien qu'il n'existe pas de moyens permettant de le prouver hors de tout doute, il est possible que la baisse du nombre de cas signalés de violence familiale, d'agressions sexuelles et de violence envers les enfants soit le résultat de ces services et de ces interventions.

Cependant, tous les répondants considèrent qu'il existe encore des lacunes, des obstacles et des besoins en matière de prestation de services aux personnes, aux familles et aux collectivités victimes de violence. Ces défis, tels que signalés par les répondants, comprennent un soutien limité de la collectivité, un soutien limité des leaders, des ressources insuffisantes, des lacunes dans l'information et le système judiciaire.

Recommandations générales

Les fournisseurs de services des trois territoires du Nord souhaitaient ardemment participer à cette étude et fournir de l'information sur les degrés, la dynamique et les résultats de la victimisation dans leurs collectivités. Ils ont également fourni des opinions importantes et offert un large éventail de recommandations sur ce qu'il y a à faire.

Les recommandations présentées reposaient sur la nécessité de soutenir les programmes, et c'est aussi la principale recommandation de ce rapport. Bien que la nature exacte du soutien requis varie d'un territoire à l'autre, il existe des points communs : formation intense, campagne de sensibilisation et d'éducation du public, augmentation du soutien accordé aux réseaux, soutien des systèmes législatif et stratégique du système de justice pénale, et augmentation du soutien aux ressources communautaires.

S'inscrivant dans un modèle de développement communautaire fondé sur la compréhension des enjeux, l'auteur conclut que plusieurs services du Nord ont adopté une approche holistique et que les fournisseurs de services ont développé une expertise de ce qui doit être fait. Ce dont ils ont besoin pour y parvenir, c'est d'un plus grand soutien.

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