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Créer un cadre de sagesse communautaire : examen des services aux victimes dans les territoires du Nunavut, du Nord-Ouest et du Yukon

  1. 2.0 Nunavut
    1. 2.4 Examen des programmes dans d’autres collectivités autochtones éloignées (hors Nunavut)
      1. 2.4.5 Facteurs qui contribuent au succès des programmes
    2. 2.5  Recommandations sur les services aux victimes au Nunavut
      1. 2.5.1 Introduction

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2.4.5     Facteurs qui contribuent au succès des programmes

Les programmes décrits dans la présente section collaborent étroitement avec les refuges pour femmes battues, les travailleurs sociaux, les agents de probation et de libération conditionnelle, les programmes pour toxicomanes et d'autres fournisseurs de services. Ils sont également en liaison avec les fonctionnaires de la cour, la police, les travailleurs auprès des tribunaux, les Premières nations, les organismes métis et inuits, les centres d'amitié, les comités interorganismes et les comités de la justice communautaire.

Tous les programmes contactés sont situés dans les collectivités autochtones, métis et inuites éloignées et isolées. À cet égard, bon nombre font face aux mêmes défis que les fournisseurs de services aux victimes du Nunavut. Les répondants et les personnes qui ont contribué à la présente étude décrivent de façon plus détaillée les défis qu'ils doivent relever en matière de prestation des services à la section précédente. Toutefois, il est utile de présenter ici un résumé de leurs préoccupations tout en tenant compte des facteurs qui contribuent au succès des programmes. Voici le résumé de ces défis :

  • niveaux élevés de violence conjugale, agression sexuelle, violence à l'endroit des enfants, toxicomanie, suicide, désintégration de la famille, traumatisme subi dans les pensionnats, syndrome de stress post-traumatique et grief entre les générations, pauvreté, faibles niveaux d'instruction, niveaux élevés de chômage, manque de logements publics à prix abordable;
  • incertitude et crainte de la police et du système judiciaire;
  • faibles niveaux de signalement des crimes de violence;
  • moins de services aux victimes que dans les grands centres (et problèmes connexes que pose le transport des victimes vers les refuges et d'autres services situés à des centaines de milles de distance);
  • absence d'une loi protégeant les droits et la sécurité des victimes;
  • absence d'un plan directeur général pour faire face à la violence conjugale et aux agressions sexuelles chroniques et, en général, déni du fait que ces crimes soient aussi fréquents qu'ils le sont;
  • manque de leadership à tous les niveaux de l'État dans le domaine de la violence interpersonnelle;
  • vulnérabilité supplémentaire des femmes et des enfants autochtones et accent mis dans les collectivités autochtones éloignées sur le bien-être du délinquant par rapport au bien-être de la victime;
  • système de justice selon lequel l'expérience de la victime semble avoir moins de poids que celle du délinquant;
  • manque de professionnels, de paraprofessionnels et de bénévoles ayant reçu une formation dans la collectivité pour aider à assurer la sécurité et la prestation de services dans la collectivité;
  • incertitude au sujet du financement d'une année à l'autre des programmes ou d'éléments de programme (par conséquent, trop de temps est consacré à la rédaction de propositions dans une recherche perpétuelle de ressources);
  • le fait de se sentir incompris et mis de côté par les bailleurs de fonds et les fournisseurs de services dans les grands centres et les bureaux de l'État. 

En général, les fournisseurs de services aux victimes dans les endroits éloignés hors Nunavut ne se sentent pas dépassés par ces défis, mais ils considèrent ceux-ci comme un « état de fait » sur le plan des conditions de travail. En fait, bon nombre des personnes interrogées voient d'un très bon œil les initiatives récentes visant à améliorer la situation des victimes de violence et les services auxquels elles ont accès. D'après ces consultations, à partir de trois catégories de base, il est possible de procéder à une analyse des « pratiques exemplaires » en matière de programmes de services aux victimes. Ces catégories sont les suivantes : l'approche du développement communautaire, des programmes supérieurs de rétablissement des victimes à court et à long terme et une loi progressiste.

L'approche du développement communautaire

Les programmes de services aux victimes qui sont basés sur une approche accessible, non fondée sur le jugement, du développement communautaire, semblent remporter le plus de succès lorsque celui-ci est mesuré en fonction de l'utilisation, de l'efficacité de la guérison et de la prévention et de l'acceptation et de la prise en charge collectives.

Cette approche, comme en témoignent les services aux victimes Rocky (Rocky Mountain House, Alberta), la Three Sisters Haven Society (Dease Lake, C. -B. ) et le Centre des femmes de Yellowknife (Yellowknife, T.N.-O.), confère à la collectivité la possibilité, les compétences et le courage nécessaires pour appuyer les victimes et rejeter la violence interpersonnelle comme norme sociale. Ces services ont certaines pratiques exemplaires en commun, notamment : 

  • les services, mais en particulier le personnel, sont bien connus et très accessibles à tous les membres de la collectivité;
  • le personnel comprend l'histoire, les traditions, les croyances et les normes sociales des Premières nations, des Métis ou des Inuits dans sa collectivité;
  • le personnel comprend l'incidence à court et à long terme de la colonisation, de la toxicomanie, des pensionnats, de la pauvreté, de la violence interpersonnelle et des séquelles permanentes d'un traumatisme;
  • le personnel comprend les problèmes sociaux locaux énumérés plus haut;
  • le personnel demeure en contact constant et il entretient des relations personnelles avec les autres fournisseurs de services, les dirigeants autochtones, les Aînés et tous les membres de la collectivité;
  • les membres du personnel visitent et rencontrent les membres de la collectivité dans leur maison et leur bureau (c. -à-d. Qu'ils ne s'attendent pas à ce que les membres de la collectivité viennent à eux);
  • des combinaisons de services, dont ont besoin les victimes de violence, sont disponibles en un endroit;
  • les responsables de ces services entretiennent d'excellentes relations avec tous les fournisseurs de services communautaires, ils tiennent des réunions et travaillent régulièrement avec la police, les conseils de bande et d'autres organismes et programmes communautaires;
  • le service en question demande à la collectivité de participer à ses programmes et il s'emploie à répondre aux demandes d'une manière concrète;
  • le personnel comprend les besoins en matière de sécurité et de rétablissement des victimes;
  • le personnel est fortement engagé à l'égard de son travail et il défend les victimes personnellement; il est reconnu publiquement comme un défenseur de toutes les victimes de violence;  
  • le personnel est ouvert aux programmes novateurs et il travaille de manière créatrice avec les ressources limitées à sa disposition. 

Plusieurs autres programmes, décrits plus haut, encouragent une approche des services aux victimes axée sur le développement communautaire, à savoir les Services aux victimes de Happy Valley - Goose Bay (Labrador) et le programme des bénévoles qui viennent en aide aux victimes de concert avec la GRC (Yukon). Ces programmes offrent une formation permanente aux membres de la collectivité dans les domaines de l'intervention d'urgence immédiate, des droits des victimes et de la préparation des victimes en vue de leur témoignage devant le tribunal. Ces bénévoles et « paraprofessionnels » font partie d'un réseau plus étendu de services aux victimes dans leur région qui les supervise, les forme et les appuie dans leur travail.

Même si les programmes communautaires du Labrador et du Yukon n'offrent pas la même gamme de services que ceux de Rocky Mountain House, Dease Lake et Yellowknife, on peut considérer qu'ils constituent des pratiques exemplaires sur le plan du développement communautaire parce qu'ils :

  • font appel aux membres actuels permanents de la collectivité pour l'exécution des programmes;
  • établissent un lien entre ces membres du personnel et le maintien de l'ordre, les services aux victimes et les services de justice dans leur collectivité et leur région;
  • contribuent à l'évolution des normes communautaires selon lesquelles on appuie les victimes en recourant à des Autochtones au lieu de blâmer celles-ci;
  • renforcent le sentiment de sécurité et la valorisation des membres de la collectivité victimes de violence. 

Des programmes supérieurs de rétablissement des victimes à court et à long terme

On peut observer d'excellents exemples de programmes de rétablissement des victimes à long terme dans le Programme de traitement Isuarsivik à Kuujjuaq (Québec) et le Programme de guérison et de rétablissement des femmes et des enfants du YWCA à Yellowknife (T.N.-O.).

Le Programme de traitement Isuarsivik a élaboré l'un des premiers programmes de traitement des toxicomanes inuits efficaces au Canada. Pour bien des victimes des régions isolées du Canada, le fait de mettre fin à leur toxicomanie contribue dans une large mesure à rompre le cycle de violence chronique dans leur vie. Les pratiques exemplaires de ce programme sont les suivantes :

  • utilisation de la langue et de la culture inuites;
  • exploration de la spiritualité et des traditions inuites;
  • recours au personnel inuit rémunéré;
  • utilisation des méthodes de traitement utiles d'autres cultures;
  • un solide programme de suivi et d'aide postpénale. 

Le Programme de guérison et de rétablissement des femmes et des enfants du YWCA est un autre exemple de l'excellence dans le traitement de longue durée des femmes et des enfants victimes de violence depuis longtemps. La force de ce programme est attribuable aux facteurs suivants :

  • la durée du programme est assez longue (10 mois) pour permettre de stabiliser les participants et d'inspirer un progrès permanent sur le plan des attitudes, des connaissances, des sentiments et du comportement;
  • de plus, elle est assez longue pour permettre d'obtenir un logement et des soins aux enfants stables et permanents;
  • on a le temps de résoudre les problèmes juridiques et financiers à long terme;
  • les participants ont le temps de constituer un réseau de soutien officieux et officiel complet dans la collectivité;
  • les besoins des participants dans tous les domaines sont abordés : santé et sécurité physiques, soutien financier, perfectionnement des compétences personnelles, soutien des parents, possibilités d'instruction, formation professionnelle et recherche d'emploi, intervention thérapeutique cognitive et affective et traitement de la toxicomanie. 

En outre, bien qu'elles ne soient généralement pas considérées comme des « programmes de rétablissement des victimes », les récentes initiatives en matière de justice réparatrice dans certaines administrations peuvent contribuer dans une grande mesure au rétablissement des victimes de violence à court terme. Dans la présente étude, nous évoquons l'exemple des Services aux victimes régionaux Buffalo à Buffalo Narrows en Saskatchewan. Toutefois, bien des programmes de services aux victimes dans les régions autochtones éloignées du Canada et de l'Alaska estiment que les initiatives comme les forums sur la justice familiale et les cercles de détermination de la peine produisent des résultats très positifs pour les victimes lorsqu'elles sont planifiées et mises en œuvre avec soin.

Il importe cependant de noter que ces initiatives peuvent porter préjudice aux victimes, sauf si les conditions suivantes sont réunies[36] :

  • un médiateur ou un animateur chevronné s'occupe du processus;
  • la victime comprend clairement le processus de justice réparatrice et ses droits aux termes de la loi;
  • la victime accepte librement de participer, sans coercition de la part du délinquant ou de la collectivité;
  • la victime bénéficie d'un soutien intégral avant, durant et après le processus;
  • le processus fait intervenir les fournisseurs de services communautaires locaux ainsi que la famille et les défenseurs du délinquant et de la victime et le personnel de la justice;
  • les besoins à court et à long terme de la victime en matière de sécurité sont satisfaits. 

Selon les répondants de la présente étude, lorsque ces critères ou pratiques exemplaires sont satisfaits, les initiatives dans le domaine de la justice réparatrice peuvent avoir les résultats positifs suivants :

  • elles donnent aux victimes de violence la possibilité de divulguer toutes les incidences du crime sur leur vie dans un cadre sécuritaire et public;
  • elles uniformisent les règles du jeu entre la victime et le délinquant, car la version de la victime devient aussi importante pour que justice soit rendue que la version du délinquant;
  • elles accroissent la probabilité que la victime maîtrise et prenne en charge sa vie et atténuent le sentiment de peur et l'état de détresse, ce qui aide au rétablissement général;
  • elles rendent publique l'expérience de la victime, ce qui augmente la prise en main par la collectivité de la sécurité et de la santé de ses membres;
  • la présence du délinquant, des membres de la famille, du personnel de la justice et des fournisseurs de services valide et normalise la dévastation affective, spirituelle, financière et physique subie par la victime. 

Une loi progressiste

Les exemples de l'Alaska et du Yukon font ressortir l'importance et la pertinence d'une loi progressiste et axée sur la victime. Les fournisseurs de services du Yukon interrogés dans le cadre de la présente étude ont indiqué que les femmes leur ont dit que la Loi sur la prévention de la violence familiale leur avait sauvé la vie et offert des choix dont elles ne disposaient pas sur le plan de la sécurité et du rétablissement. Le coordonnateur des services aux victimes de l'Alaska a déclaré que les collectivités et les victimes voyaient d'un très bon œil les divers systèmes d'information des victimes. La loi de l'Alaska qui garantit une aide financière immédiate aux victimes de crime présente des avantages évidents.

Une loi progressiste peut ne pas être considérée comme un « service direct ». Toutefois, sans celle-ci, les fournisseurs de services aux victimes et les victimes ont moins de choix et ils font face au risque beaucoup plus grand d'une revictimisation constante. L'analyse de l'expérience dans les provinces et territoires qui ont adopté leur propre loi sur la violence familiale montre que des facteurs connexes de la mise en œuvre d'une telle loi, c. -à-d. Les liens requis en matière d'infrastructure, la formation permanente de tout le personnel et l'éducation et l'information du public constituent la clé de l'utilisation efficace d'une telle loi[37].

Les initiatives législatives peuvent devenir des pratiques exemplaires, car :

  • elles répondent directement aux besoins physiques et financiers immédiats des personnes et des familles victimes de violence;
  • elles répondent aux besoins immédiats et à long terme des victimes en matière de sécurité;
  • elles peuvent amener les victimes à faire partie de réseaux d'information sur la justice;
  • elles peuvent améliorer le statut juridique des victimes et leur garantir des droits et des recours en vertu de la loi, ce qui leur permet de maîtriser davantage leur vie;
  • elles portent sur les réactions traumatiques chez les victimes de violence, car elles abordent directement l'isolement, la crainte, la panique et l'état de détresse qui résultent de traumatismes. 

En résumé, les pratiques exemplaires dans le domaine de la prestation de services aux victimes dépendent des facteurs suivants :

  • la mise en œuvre d'une approche de la prestation des services axée sur le développement communautaire qui s'inspire des demandes de la collectivité et de recommandations concernant la conception et l'exécution des programmes et des relations établies entre la collectivité et les fournisseurs de services;
  • l'établissement de programmes de rétablissement des victimes à court et à long terme qui permettent aux victimes de violence de maîtriser ou de recommencer à maîtriser leur vie;
  • l'adoption d'une loi progressiste. 

2.5        Recommandations sur les services aux victimes au Nunavut

2.5.1     Introduction

Les recommandations examinées dans la présente section résultent de plusieurs processus de consultation différents. Le sondage téléphonique mené auprès de tous les fournisseurs de services du Nunavut comprenait une question sur les recommandations concernant les services aux victimes éventuels au Nunavut. En outre, des fournisseurs de services clés du Nunavut (qui figurent à l'annexe A) ont reçu la section précédente décrivant les pratiques exemplaires en matière de services aux victimes dans d'autres collectivités autochtones éloignées. Leurs réactions au sujet de ces initiatives prises en matière de services aux victimes dans d'autres provinces et territoires, ainsi que leurs propres opinions concernant la prestation des services au Nunavut, ont permis de formuler d'autres recommandations. Toutes ces recommandations servent de base à la présente section.

En outre, la Conférence sur l'aide aux victimes des Territoires du Nord-Ouest a eu lieu à Yellowknife en 2001 pendant l'étape de la collecte des données de la présente étude. Dans le cadre de ce projet de recherche, nous avons pu tirer parti des discussions tenues à cette conférence. Les recommandations des délégués figurent ici.

Les recommandations concernant l'amélioration des services aux victimes au Nunavut peuvent se classer dans quatre catégories, à savoir :

  • formation, soutien et rétablissement pour les fournisseurs de services actuels;
  •  formation, soutien et rétablissement pour les collectivités;
  •  leadership et systèmes législatif, judiciaire et correctionnel;
  •  programmes de services aux victimes. 

Les recommandations dans la présente section sont précédées d'extraits d'énoncés formulés au cours des entrevues téléphoniques et des entrevues sur place avec les répondants du Nunavut.


[36]  Cela est particulièrement important dans les cas de violence familiale afin que les processus de justice réparatrice n'exercent pas une pression supplémentaire visant à inciter la victime à poursuivre des relations familiales violentes ou potentiellement violentes. Voir Naomi Giff, La justice au Nunavut : bibliographie annotée, RR2000-7, Ottawa, Division de la recherche et de la statistique, ministère de la Justice Canada, 2000; et Crnkovich, Addario, Archibald, Les femmes inuites et le système de justice du Nunavut, RR2000-8, Ottawa, Division de la recherche et de la statistique, ministère de la Justice Canada, 2000.

[37] Tim Roberts, Review of Provincial and Territorial Family Violence Legislation and Implementation Strategies, 2002.

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