Office of the Auditor General of Canada - Bureau du vérificateur général du Canada
Éviter tous les menusÉviter le premier menu English Contactez-nous Aide Recherche Site du Canada
À propos du Bureau Publications Salle des médias Carte du site Accueil
Rapport du vérificateur général
B V G
Points saillants
Introduction
Observations et recommandations
Conclusion
À propos de la vérification
1 — Points saillants de l'analyse effectuée par la société d'ingénierie sur les avantages et
les inconvénients de l'application de la méthode de conception-construction au projet de réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City
2 — Principaux intervenants du projet de réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City
3 — Sommaire des coûts internes pour le projet de réseau de transport d'électricité de la Société d'énergie du Yukon (en milliers de dollars)
4 — Projet de réseau
de transport d'électricité de Mayo-Dawson City — Coûts autorisés par rapport aux dépenses (en milliers de dollars)

Le projet de réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City

Communiqué

Points saillants

1. La Société d'énergie du Yukon vient de parachever la mise en œuvre du projet de réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City, qui vise à alimenter les abonnés de Dawson City. La réalisation de ce projet se justifiait essentiellement par les économies qui devaient découler du remplacement de l'énergie diesel électrique par l'hydroélectricité. Des économies sont encore possibles, mais la Société a mal administré le projet. Ainsi, il y a eu des retards importants, des dépassements de coûts, et la conception et la réalisation des ouvrages n'ont pas été conformes à l'objectif visé par la Société. Plus particulièrement, le conseil d'administration et la direction n'ont pas veillé à ce que la Société ait instauré des politiques et des pratiques judicieuses, ni exercé une surveillance et un contrôle suffisants sur la mise en œuvre du projet. Nous avons relevé ce qui suit :

  • la définition de l'ampleur et des coûts du projet a été lacunaire;
  • des risques importants ont découlé de la méthode de réalisation des travaux retenue, car la Société n'avait pas l'expérience ni les compétences nécessaires;
  • le projet a été mal géré;
  • la passation des contrats concernant les travaux et les services comportait des faiblesses importantes;
  • les contrôles de gestion financière et de gestion des coûts étaient inadéquats.

2. La Société d'énergie du Yukon estime que le coût du projet est d'environ 36 millions de dollars en tout, ce qui représente un dépassement des coûts d'environ 7 millions de dollars. Cependant, cette somme ne tient pas compte des réclamations importantes déposées par l'entrepreneur de construction et par la Société respectivement, qui étaient toujours en suspens au moment de la vérification.

Contexte et autres observations

3. La Société d'énergie du Yukon est le premier producteur et distributeur d'électricité du Yukon. Elle dessert des abonnés à Dawson City, à Mayo, à Faro et dans les localités avoisinantes. Elle vend aussi de l'électricité à une autre compagnie d'électricité, qui la distribue ailleurs sur le territoire, notamment à Whitehorse.

4. En juin 2000, le conseil d'administration de la Société a approuvé la construction d'une ligne de transport sur poteaux de bois qui devait être achevée avant la fin de 2002 et être à même de transporter l'hydroélectricité de Mayo à Dawson City, qui est à environ 223 kilomètres. Le projet prévoyait aussi la construction d'une nouvelle sous-station et la rénovation de deux autres sous-stations. Avant la mise en service du réseau en septembre 2003, la Société a alimenté ses abonnés de Dawson City (qui compte environ 2 000 habitants) grâce à de l'électricité produite par des installations locales au diesel. En remplaçant le diesel par l'énergie hydraulique, la Société a pour ainsi dire mis fin à la production d'énergie à partir de ce combustible.

5. Comme toute personne morale, la Société se doit d'adopter de saines méthodes de gestion et d'appliquer des principes de bonne gestion de projet. À titre de filiale d'une personne morale du gouvernement, elle fonctionne en toute indépendance par rapport au gouvernement du Yukon. Elle n'est donc pas assujettie aux mêmes règles que les ministères. Cependant, les personnes morales du gouvernement et leurs filiales font tout de même partie de l'administration publique et, à ce titre, elles se doivent de respecter les mêmes principes de gouvernance d'entreprise et de reddition de comptes. Le présent rapport offre au gouvernement l'occasion d'examiner et, au besoin, de renforcer la gouvernance et la reddition de comptes des personnes morales du gouvernement et de leurs filiales.

Introduction

La Société d'énergie du Yukon et son contexte opérationnel

6. La Société d'énergie du Yukon (la Société) est le premier producteur et distributeur d'électricité du Yukon, qui compte environ 30 000 habitants. Elle constitue une filiale de la Société de développement du Yukon qui est une personne morale du gouvernement du Yukon. Le gouvernement du Yukon nomme les membres du conseil d'administration de cette société (qui siègent aussi au conseil d'administration de la Société d'énergie du Yukon). Le conseil d'administration de la Société d'énergie du Yukon délègue la conduite des affaires courantes au président-directeur général et aux autres cadres supérieurs de la Société. La Société emploie environ 66 personnes.

7. La Société d'énergie du Yukon a été fondée en 1987 pour prendre possession des installations de production d'électricité qui étaient alors détenues par la Commission d'énergie du Nord canadien, un organisme fédéral. Toutefois, ce n'est qu'en 1997 que la Société a décidé d'exploiter et d'administrer ses propres actifs et d'embaucher son propre personnel. Au cours de ses 10 premières années d'existence, la Société avait en effet retenu les services de la Yukon Electrical Company Limited — une société privée de services collectifs — pour administrer et exploiter toutes ses installations.

8. Il y a environ 15 000 abonnés consommant de l'électricité sur le territoire. La Société dessert directement environ 1 700 abonnés — la plupart habitant Dawson City, Mayo et Faro, et leur périphérie. Indirectement, la Société fournit de l'énergie à plusieurs autres localités du Yukon, notamment Whitehorse, par le truchement de la Yukon Electrical Company Limited, qui achète l'électricité à la Société et la revend ensuite à ses abonnés.

9. La Société a une capacité de production de 75 mégawatts grâce à des installations hydroélectriques à Whitehorse (40 mégawatts), à Aishihik Lake (30 mégawatts) et à Mayo (5 mégawatts). Quant à ses installations alimentées au diesel, elles peuvent produire 39 mégawatts. Il y a en outre une petite production d'énergie éolienne. À titre d'entreprise de service public, la Société est régie par la Loi sur les entreprises de service public du Yukon, la Loi sur les sociétés par actions du Yukon et la Loi sur les eaux du Yukon. Les activités de la Société sont aussi régies par le Règlement sur la Société de développement du Yukon, qui découle de la Loi sur la Société de développement du Yukon. C'est ainsi que pour construire ou acquérir de nouvelles lignes à un voltage supérieur à un niveau donné, la Société doit obtenir l'approbation de sa société mère et du ministre responsable à la fois de la Société de développement du Yukon et de la Société d'énergie du Yukon.

10. Aux termes de la Loi sur les entreprises de service public, la Régie des entreprises de service public du Yukon, qui est un organisme quasi-judiciaire dont les membres sont nommés par le gouvernement du Yukon, est chargée de réglementer les entreprises de service public au Yukon. La Régie s'occupe notamment de dossiers concernant la modification des taux, les critères liés aux taux, ainsi que le service à la clientèle. Elle peut, par exemple, procéder à un examen public des demandes de modification des taux généraux présentées par les entreprises de service public. L'examen porte alors sur les revenus de l'entreprise et les dépenses engagées en vue de fournir de l'électricité. Les conclusions de cet examen servent, le cas échéant, à fixer les taux. Les taux ou tarifs actuels de l'électricité ont été établis en 1996-1997 et révisés à maintes reprises au cours des années qui ont suivi.

Le projet de réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City

11. Depuis 1951, l'installation hydroélectrique de la Société à Mayo dessert le centre du Yukon. La centrale alimentait à l'origine une mine, les villes de Mayo et de Keno City, et les localités avoisinantes. La fermeture de la mine en 1989 a cependant créé un excédent d'environ 3 mégawatts d'électricité à la centrale de Mayo pendant un certain nombre d'années. En 1991, la Yukon Electrical Company Limited a évalué la faisabilité d'un projet de ligne de transport d'électricité en vue d'utiliser cet excédent énergétique. En 1992, la Régie des entreprises de service public du Yukon a tenu une audience sur le plan d'immobilisations des deux sociétés. Elle avait par la suite recommandé de ne plus mener d'études sur le projet de ligne de transport, sauf si la fluctuation de la demande était suffisamment importante. De 1991 à 1997, les ventes d'électricité à Dawson City ont augmenté d'environ 29 p. 100. Mais ce n'est qu'en 1998 que le conseil d'administration de la Société de développement du Yukon a ordonné à la Société d'énergie du Yukon d'effectuer une étude de faisabilité exhaustive sur le projet de ligne de transport.

12. En juin 2000, le conseil d'administration de la Société d'énergie du Yukon a approuvé la construction d'une ligne de transport sur poteaux de bois, au coût de 27 246 000 $ (en dollars de 2002), selon les estimations. Le projet devait être achevé à la fin de 2002 et permettre d'acheminer l'électricité de Mayo à Dawson City sur une distance d'environ 223 kilomètres. La ligne de transport, conçue pour transporter une puissance de 15 mégawatts, devait desservir environ 2 000 habitants et alimenter une charge de pointe initiale d'environ 2,8 mégawatts. En août 2000, le ministre responsable à la fois de la Société de développement du Yukon et de la Société d'énergie du Yukon a approuvé le projet. Le projet prévoyait la construction d'une nouvelle sous-station à Callison (une sous-division de Dawson City) et des modifications à deux sous-stations déjà en place, une à Dawson City, l'autre à Mayo. Il avait pour grand objectif de réduire, à long terme, les tarifs d'électricité grâce à une meilleure utilisation de l'énergie hydroélectrique produite à Mayo en vue de remplacer l'énergie produite à Dawson City à partir du diesel, qui est plus coûteuse. (Voir la photographie)

Objet de la vérification

13. Nous avons effectué la vérification à la demande du conseil d'administration de la Société d'énergie du Yukon. Nous avons examiné les principales facettes et activités du projet de construction d'un réseau de transport d'électricité entre Mayo et Dawson City. Notre vérification a porté sur des domaines précis, notamment les suivants :

  • l'étude de faisabilité et l'analyse des coûts-avantages;
  • la gestion d'ensemble du projet;
  • les pratiques de passation des contrats;
  • la gestion de la mise en œuvre du projet;
  • les contrôles de gestion financière et de gestion des coûts du projet;
  • le respect des spécifications initiales.

Le présent rapport fait certes référence à divers entrepreneurs, mais nos commentaires et nos conclusions sur les méthodes de gestion et les mesures prises ne visent que la Société d'énergie du Yukon. Nous n'avons pas vérifié les dossiers des entreprises privées. Par conséquent, nos conclusions ne peuvent donc pas concerner les méthodes de gestion adoptées par les divers entrepreneurs et ne les concernent pas.

On peut obtenir un complément d'information sur la vérification en consultant la section intitulée À propos de la vérification, à la fin du présent rapport.

Observations et recommandations

Étude de faisabilité et analyse des coûts-avantages

L'ampleur et les coûts du projet ont été mal définis

14. Les responsables de la Société d'énergie du Yukon considèrent la construction du réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City comme le plus grand projet d'immobilisations jamais mis en œuvre par la Société. Nous avons constaté que la Société n'avait pas l'expérience ni les compétences nécessaires pour mener à bien un projet de cette nature et de cette envergure. En tout, elle a consacré 1,6 million de dollars à l'analyse des besoins, à une étude de faisabilité et à un avant-projet sommaire. Si la nécessité du projet, sa faisabilité et ses avantages ont été amplement justifiés, nous avons cependant constaté que l'ampleur et les coûts du projet n'avaient pas été définis comme il se doit dans l'étude de faisabilité et le devis.

15. En mai 1998, le conseil d'administration de la Société de développement du Yukon a autorisé une aide de 400 000 $ à la Société d'énergie du Yukon en vue de réaliser une étude de faisabilité exhaustive et de préparer un plan visant la définition d'un concept, ainsi que la mise en œuvre et le financement du projet proposé. La Société d'énergie du Yukon a réalisé l'étude de faisabilité qui évaluait diverses solutions de production d'énergie électrique, en fonction de divers facteurs économiques. L'étude signalait une augmentation de la demande d'électricité dans l'agglomération de Dawson City, une baisse des frais d'intérêts et une hausse du prix du diesel. Elle estimait que le projet coûterait 21 millions de dollars (en dollars de 1998).

16. En avril 1999, la Société a embauché une société d'ingénierie pour procéder à un contrôle par les pairs de l'étude de faisabilité. Cet examen a permis de conclure que les coûts pour l'ensemble du projet avaient vraisemblablement été sous-évalués de 2 à 3 millions de dollars. En avril 2000, après avoir examiné les hypothèses économiques et la méthode utilisées au cours de l'étude, le ministère du Développement économique du Yukon a conclu que celles-ci étaient raisonnables.

17. En juillet 1999, la Société d'énergie du Yukon a obtenu l'autorisation du conseil d'administration de préparer un avant-projet sommaire et d'engager des coûts dans la limite de 1,65 million de dollars, étant entendu que ces dépenses seraient intégrées au budget total du projet advenant sa mise en chantier. Vers la fin de 1999, la Société a retenu les services d'une société d'ingénierie pour préparer un avant-projet sommaire et une évaluation des coûts.

18. Au printemps 2000, la société d'ingénierie a évalué que les coûts du projet avoisineraient 25,5 millions de dollars (en dollars de 2000) — à savoir, 23 millions de dollars pour les travaux et 2,5 millions pour les coûts internes. Le 27 juin 2000, le conseil d'administration de la Société d'énergie du Yukon a approuvé la mise en œuvre du projet, au coût de 27 246 000 $ (en dollars de 2002) — un montant qui se ventile comme suit : 23 175 000 $ pour les travaux, 1 825 000 $ pour les coûts internes, et 2 246 000 $ pour les frais d'intérêts engendrés au cours des travaux et une provision pour inflation.

19. Selon les données communiquées au conseil d'administration, les coûts internes estimés à 1 825 000 $ engloberaient un large éventail d'éléments, y compris les suivants :

  • l'administration du projet;
  • la rémunération du personnel;
  • la préparation des appels d'offres;
  • l'évaluation et la sélection des entrepreneurs;
  • les permis;
  • la gestion des finances et des contrats;
  • la comptabilité et la préparation de rapports;
  • un arpentage légal.

Les coûts semblent avoir été sous-évalués, étant donné que la Société avait déjà autorisé des dépenses dans la limite de 1,65 million de dollars pour effectuer une étude de faisabilité et préparer un avant-projet sommaire. Les estimations n'ont pas tenu compte non plus des dépenses liées à d'autres éléments comme les frais juridiques et d'assurance pour la durée des travaux.

20. Un résumé schématique du projet a été présenté au ministre responsable en juillet 2000. Selon ce résumé, il était prévu que le projet permettrait de réaliser des économies d'environ 14 millions de dollars au cours de sa durée de vie (40 ans), par rapport aux coûts de la production d'énergie par des centrales diesel. Le projet devait aussi créer des débouchés d'emploi de l'ordre de 4,5 millions de dollars pour les Premières nations et les entreprises locales, et réduire les émissions de diesel.

21. Selon l'analyse effectuée par la Société quant aux économies éventuelles, les coûts associés à la production d'énergie à partir du diesel atteindraient, sur 40 ans, environ 42 184 000 $ en valeur actualisée. Par ailleurs, la Société estimait que les coûts liés au réseau de transport d'électricité pour la même période seraient de 27 964 000 $ en valeur actualisée. C'est donc dire que le remplacement de l'énergie diesel par l'hydroélectricité permettrait d'économiser environ 14 millions de dollars.

22. Dans son analyse, la Société a pris pour hypothèse que les coûts nets des immobilisations ayant trait au projet avoisineraient 23 millions de dollars, au lieu du coût total estimatif de 27,246 millions de dollars. On a procédé de la sorte, car la société mère — c.-à-d. la Société de développement du Yukon — devait verser une contribution de 4 millions de dollars en faveur du projet de la Société d'énergie du Yukon. Nous sommes d'avis qu'il aurait convenu de présenter le coût total du projet dans cette analyse. Nous avons noté que l'analyse des coûts ne tenait pas compte des dépenses en immobilisations nécessaires pour maintenir la centrale diesel à titre d'installation de réserve. La Société a expliqué qu'elle n'avait pas tenu compte de ces dépenses dans le descriptif et le budget du projet, car elle s'attendait à ce que ces dépenses soient très modestes. Au bout du compte, elles ont atteint environ 285 000 $.

23. En juin 2000, le conseil d'administration de la Société d'énergie du Yukon a demandé à la Société de développement du Yukon de verser une contribution remboursable, dans la limite de 900 000 $, pour la mise en place d'équipements d'électrification rurale. En février 2001, le conseil d'administration de la Société d'énergie du Yukon a approuvé un financement supplémentaire à hauteur maximale de 500 000 $ pour rénover des conducteurs, qui était assujetti au versement d'une contribution non remboursable par la société mère. La Société a par la suite reçu ces contributions. Conjuguées au financement initial de 400 000 $ approuvé par la Société de développement du Yukon pour l'étude de faisabilité et à l'enveloppe de 27 246 000 $ destinée aux travaux, les dépenses autorisées ayant trait au projet s'élevaient à 29 046 000 $ en tout.

24. En août 2003, le président en poste avait indiqué au conseil d'administration de la Société que le seuil de rentabilité du projet serait d'environ 40 millions de dollars. Nous n'avons cependant pas trouvé d'analyses pour étayer cette affirmation. La Société nous a fourni des données indiquant que les recettes prévisionnelles, en valeur actualisée, pour la région de Dawson City, sur 40 ans, se chiffreraient à 44,6 millions de dollars. Or les charges d'exploitation prévisionnelles pour le réseau de transport d'électricité, sur la même période, avoisineraient 6,4 millions de dollars en valeur actualisée. Selon notre analyse, le financement en faveur de ce projet pouvait être justifié, semble-t-il, si les coûts d'immobilisations ne dépassaient pas 38,2 millions de dollars.

25. Pour résumer, il semble que les coûts estimatifs du projet aient été sous-évalués. Plus particulièrement, les coûts internes éventuels ont été mal définis et budgétisés. Les dépenses en immobilisations liées au maintien opérationnel de la centrale diesel à titre d'installation de réserve n'ont pas été prises en compte dans les estimations. Comme nous l'expliquons plus loin dans le présent rapport, l'ampleur du projet a été modifiée à maintes reprises au cours des travaux. Il importe que la Société définisse l'ampleur des projets d'immobilisations et détermine les coûts de manière adéquate avant de les faire approuver.

26. Recommandation. Pour éviter de sous-évaluer le coût total de ses projets, la Société d'énergie du Yukon devrait veiller à définir de manière adéquate l'ampleur et les coûts de ses projets d'immobilisations avant de les faire approuver.

Réponse de la direction. La Société vient d'améliorer ses processus visant les projets d'immobilisations. Un comité « interservices » chargé de l'examen des projets étudie désormais toutes les propositions de projet et soumet des recommandations à l'approbation du conseil d'administration. Les projets, surtout ceux qui sont importants, sont accompagnés de descriptifs qui détaillent l'ampleur et les coûts prévus.

Des risques importants étaient associés à la méthode de « conception-construction »

27. La proposition présentée au conseil d'administration de la Société d'énergie du Yukon en juin 2000 prévoyait l'attribution d'un contrat unique pour effectuer les travaux, selon la méthode englobant « services d'ingénierie, approvisionnement, construction et gestion de projet ». La proposition indiquait aussi que la direction prévoyait faire appel à une petite équipe de gestion de projet qui serait composée d'un agent contractuel ou d'un entrepreneur qui serait le directeur du projet. La Société d'énergie du Yukon a retenu cette façon de faire, car elle était persuadée que cela accélérerait la réalisation du projet et réduirait le nombre d'employés internes nécessaires. Toutefois, le conseil d'administration ne semble pas avoir été pleinement informé des risques associés à la méthode englobant « services d'ingénierie, approvisionnement, construction et gestion de projet », qui a été rebaptisée plus tard par la Société la méthode de « conception-construction ».

28. Dans le rapport sommaire de juin 2000, la société d'ingénierie retenue pour préparer l'avant-projet sommaire et l'évaluation des coûts a recensé trois méthodes possibles pour réaliser le projet :

  • la méthode de « conception-construction » (projet clé en main);
  • la méthode de « conception, fourniture et installation des équipements »;
  • la méthode de gestion de la construction.

29. La société d'ingénierie a énuméré les nombreux inconvénients et les quelques avantages de la méthode de conception-construction (voir la pièce 1). Un des inconvénients est le fait qu'un seul entrepreneur assume tous les risques associés au projet. La société d'ingénierie a recommandé que le projet soit réalisé en faisant appel à la méthode de gestion de la construction, qui prévoit la préparation d'un avant-projet détaillé avant l'attribution des contrats et permet à la Société d'exercer un contrôle direct sur le calendrier de mise en œuvre du projet. Contre l'avis de la société d'ingénierie, la direction de la Société a cependant recommandé au conseil d'administration d'approuver la méthode de conception-construction.

30. Dans le cas présent, la Société d'énergie du Yukon s'attendait vraisemblablement à bénéficier des avantages de cette méthode. Cependant, il semble qu'elle ait sous-estimé les risques qui s'y rattachaient parce qu'elle connaissait mal la méthode. Comme nous l'expliquons plus loin dans le rapport, la Société a consacré plus de ressources à la gestion de ce projet que ce qui est normalement prévu pour bien réaliser un projet.

Le projet n'a pas été examiné en profondeur avant d'être mis en œuvre

31. Aux termes de la Loi sur les entreprises de service public du Yukon, le commissaire en conseil exécutif peut, par décret, désigner tout projet énergétique qu'il juge suffisamment important sur le plan énergétique comme « projet agréé ». Un projet énergétique peut concerner une usine, une fonderie, une raffinerie ou tout autre ouvrage conçu pour l'utilisation ou la transformation de ressources énergétiques. Par ailleurs, un organisme qui envisage de mettre en œuvre un projet agréé doit présenter une demande auprès du ministre concerné en vue d'obtenir un « certificat de construction ». Le ministre transmettra par la suite la demande de certificat à la Régie des entreprises de service public du Yukon pour étude.

32. Lorsque le ministre responsable de la Société de développement du Yukon et de la Société d'énergie du Yukon a approuvé le projet de réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City en août 2000, la Société de développement du Yukon lui avait fait savoir que la ligne de transport ne réunissait pas les conditions requises pour être désignée comme projet énergétique, aux termes de la Loi. Elle avait aussi indiqué que la Société d'énergie du Yukon avait jugé peu probable que la Régie des entreprises de service public du Yukon prenne une décision ou fasse une intervention qui poserait problème, et qu'elle était en mesure de faire face à ce risque. Par conséquent, le ministre n'avait alors pas saisi la Régie des entreprises de service public du Yukon du projet. En janvier 2001, la Régie a indiqué qu'elle était d'accord avec la Société d'énergie du Yukon, à savoir que la Régie n'était pas tenue, de par la loi, d'approuver la réalisation du projet, ni de juger de la prudence des dépenses engagées dans le cadre du projet tant que la Société ne chercherait pas à rentrer dans ses frais.

33. La Régie des entreprises de service public du Yukon n'était certes pas tenue d'examiner le projet, mais, dans d'autres provinces ou territoires, notamment les Territoires du Nord-Ouest et la Colombie-Britannique, l'examen de tels projets est obligatoire. Ces examens permettent de procéder à une évaluation critique des propositions de projet, ce qui peut permettre de les améliorer. Un examen de ce genre aurait permis à la Société de s'assurer dans une certaine mesure que l'organisme de réglementation n'aurait pas soulevé d'objections importantes contre son projet, une fois celui-ci achevé — s'il avait été réalisé selon les plans approuvés.

34. Compte tenu des dépenses substantielles et des risques importants associés aux grands projets d'immobilisations, nous sommes d'avis qu'il serait prudent que la Société d'énergie du Yukon demande au ministre responsable de faire désigner, par décret, les futurs projets de cette nature et de cette ampleur comme des projets agréés. Cela rendrait obligatoire un examen effectué par la Régie des entreprises de service public du Yukon et, au besoin, la tenue d'une audience publique avant la mise en chantier du projet. La Société nous a fait savoir qu'elle soumettra volontairement à la Régie des entreprises de service public du Yukon les projets d'immobilisations dont les coûts prévisionnels excéderaient un seuil donné pour qu'elle les étudie avant leur mise en œuvre.

35. Recommandation. La Société d'énergie du Yukon devrait demander au ministre responsable de solliciter un décret auprès du commissaire en conseil exécutif en vue de faire désigner les futurs projets d'immobilisations importants comme des projets agréés, conformément à la Loi sur les entreprises de service public du Yukon. Les projets agréés seraient alors examinés par la Régie des entreprises de service public du Yukon, et, au besoin, des audiences publiques pourraient être tenues avant leur mise en chantier. Le ministre voudra peut-être envisager de présenter des modifications législatives qui feraient obligation à la Régie des entreprises de service public du Yukon d'examiner tous les grands projets d'immobilisations avant leur approbation.

Réponse de la direction. La Société propose d'établir un processus en vertu duquel tous les projets d'immobilisations de plus de 3 millions de dollars devraient être approuvés au préalable par la Régie des entreprises de service public du Yukon.

La gestion d'ensemble du projet

Absence de politiques et de procédures établies en matière de gestion des projets

36. Nous nous attendions à ce que la Société dispose d'une politique de gestion des projets prévoyant des normes cohérentes pour la sélection, l'approbation, le contrôle financier et la réalisation de projets d'immobilisations. Nous avons cependant constaté que la Société ne possédait pas une telle politique et qu'elle n'avait donc pas de normes ni de procédures précises pour mettre en œuvre le projet de réseau de transport d'électricité. Il est primordial que le conseil d'administration et la direction définissent de bonnes politiques et pratiques, et exercent une surveillance et un contrôle sur la gestion et les activités de la Société.

Les rôles, les responsabilités ainsi que les obligations à l'égard de la reddition de comptes étaient mal définis

37. Nous nous attendions à trouver un descriptif du projet, accompagné d'un énoncé des objectifs, présentant une définition précise des rôles, des responsabilités et des obligations à l'égard de la reddition de comptes, la méthode de mise en œuvre, les budgets détaillés et les contrôles prévus. Nous n'avons toutefois pas trouvé un tel document. Au lieu de cela, il y avait des bribes d'information sur l'équipe de gestion du projet et sur les liens hiérarchiques entre les divers intervenants. La Société a aussi fait référence aux responsabilités décrites dans le contrat de travaux et le contrat du directeur du projet, mais nous avons jugé que les responsabilités n'y étaient pas définies de manière adéquate.

38. Nous nous attendions à ce qu'il y ait un responsable [initiator] du projet, un « parrain » sponsor du projet et un directeur du projet. Dans le cadre d'un projet bien administré, le responsable du projet — un cadre supérieur — est responsable de la réussite du projet et il doit s'assurer que toutes les méthodes de gestion, tous les contrôles financiers et toutes les exigences nécessaires en matière de rapport sont instaurés. Le parrain du projet — qui est aussi un cadre supérieur — est chargé de favoriser la réussite du projet en servant de trait d'union avec le conseil d'administration ou le comité de la haute direction. Le directeur du projet est chargé de faire respecter les objectifs du projet.

39. Il est difficile de savoir qui a été le responsable du projet de réseau de transport d'électricité. Nous avons constaté qu'il y avait eu un remaniement constant dans la direction de ce projet entre 1999 et 2004. Le président de la Société, qui était en poste au moment de l'approbation du projet, a quitté la Société en septembre 2000. Son successeur a résigné ses fonctions en mai 2001, peu après l'attribution du contrat pour la réalisation des travaux. Le directeur financier qui lui a succédé a démissionné à son tour en décembre 2003.

40. Aucun parrain n'a été nommé pour le projet. C'est le président ou le conseiller du conseil d'administration qui présentait les rapports sur l'état d'avancement du projet au conseil d'administration de la Société. Dès le début du projet, le directeur des Services techniques (un des nombreux collaborateurs clés du président) faisait partie de l'équipe de gestion du projet, qui regroupait divers experts-conseils et des employés de la Société. Il a établi les budgets et effectué des analyses des écarts de temps à autre; il a en outre participé activement au projet lorsque des problèmes sont survenus. Nous n'avons cependant pas trouvé une description précise de son rôle. Il a pris sa retraite en août 2003, mais la Société a immédiatement retenu ses services de soutien technique pour aider à résoudre les problèmes en suspens. Nous avons constaté que la Société n'a pas établi de règles pour régir les contrats postérieurs à l'emploi. La Société a fait savoir qu'elle avait dû retenir les services de cet employé, car ses connaissances détaillées du projet étaient essentielles à l'achèvement du projet. (La pièce 2 présente les principaux intervenants du projet.)

41. Le directeur du projet (dénommé « expert-conseil » aux termes du contrat des travaux, dit accord de conception-construction) a été embauché à contrat par la Société. Cependant, on ne sait pas de qui le directeur de projet relevait directement. La Société nous a indiqué qu'il était sous l'autorité du président durant la majeure partie du projet. À notre avis, pour administrer avec succès un projet, le directeur de projet doit bien comprendre son rôle et ses pouvoirs. L'entrepreneur de construction nous a fait savoir que le directeur du projet comprenait mal son rôle et ses pouvoirs. De plus, le directeur de projet n'était pas complètement disponible après avril 2003, pour des raisons de santé. Bien que la société qui a agi à titre d'ingénieur du projet ait apporté son concours en l'absence du directeur de projet, l'entrepreneur de construction ne la considérait pas comme le directeur de projet.

42. Recommandation. La Société d'énergie du Yukon devrait élaborer une politique de gestion des projets en vue d'établir des normes et des procédures visant la sélection, l'approbation, le contrôle financier et l'exécution de projets d'immobilisations. Avant la mise en œuvre des projets d'immobilisations, elle devrait préparer un descriptif qui comprendrait un énoncé des objectifs et une définition précise des rôles, des responsabilités, des obligations à l'égard de la reddition de comptes, de la méthode de mise en œuvre, des budgets détaillés et des contrôles prévus.

Réponse de la direction. La Société effectuera une vérification des pratiques et des procédures de gestion des projets plus tard en 2005. Au terme de cet examen, une politique de gestion des projets sera définie. Au besoin, les directeurs de projet suivront une formation. S'agissant des descriptifs de projet, des descriptifs plus étoffés sont désormais préparés et examinés par le nouveau comité d'examen des projets.

La passation des contrats

Absence de politiques et de procédures claires à l'égard de la passation des contrats

43. La Société n'est pas tenue de respecter les directives administratives générales publiées par le gouvernement du Yukon pour attribuer des contrats visant la réalisation de travaux ou la prestation de services. En 2000, lors de l'approbation du projet par son conseil d'administration, la Société d'énergie du Yukon n'avait que des lignes directrices provisoires visant l'adjudication des marchés. Elle a rédigé une ébauche de lignes directrices visant la passation de contrats en janvier 2002, qui n'étaient toujours pas définitives lors de la mise en chantier du projet. Par conséquent, le personnel de la Société ne disposait pas de politiques ni de procédures claires à l'égard de la passation des contrats. Plus précisément, nous avons noté l'absence de limites financières ou de seuils au-dessus desquels les contrats devaient être accordés par voie d'appel d'offres.

44. La Société d'énergie du Yukon a lancé un appel d'offres dans quelques cas, mais pour ce qui est de ce projet, nous avons constaté qu'elle a attribué 12 contrats (de plus de 50 000 $) à un fournisseur unique. Nous n'avons pas trouvé dans les dossiers de la Société des éléments qui auraient pu justifier une telle façon de faire. L'absence d'un processus concurrentiel réduit les possibilités de trouver le meilleur entrepreneur possible ou d'obtenir le meilleur prix possible pour des services de qualité. Certains contrats et paiements dont il est question dans les prochains paragraphes du présent rapport nous inquiètent particulièrement.

Il y a eu des lacunes importantes dans la passation des contrats de travaux et de services

45. Le contrat de travaux de construction. En octobre 2000, la Société d'énergie du Yukon a appliqué une série de critères qu'elle avait établis en vue de présélectionner six sociétés pour qu'elles soumissionnent pour les travaux de construction du projet. Nous avons constaté que les critères retenus n'étaient pas adaptés précisément aux exigences ayant trait à un projet réalisé selon la méthode de conception-construction. De plus, nous n'avons pas été en mesure de déterminer si les valeurs attribuées à certains critères étaient raisonnables ou adéquates, ni si la Société avait recueilli suffisamment d'information sur les entreprises concernées pour prendre une décision éclairée.

46. S'agissant du contrat de travaux, la Société a certes lancé un appel d'offres le 24 novembre 2000, mais ce n'est qu'un mois plus tard, environ, qu'elle a envoyé aux soumissionnaires éventuels l'accord de conception-construction qui était un élément clé de l'appel d'offres. Les sociétés invitées à soumissionner ont posé beaucoup de questions pour obtenir des éclaircissements sur les travaux envisagés et, à leur demande, la date limite pour présenter les soumissions a été reportée du 23 janvier 2001au 6 février 2001. La Société d'énergie du Yukon a reçu trois soumissions. Deux d'entre elles ont été rejetées car elles ne respectaient pas les exigences obligatoires prévues dans l'appel d'offres. Selon la Société, une des sociétés disqualifiées n'a pas été en mesure de fournir les renseignements exigés concernant la sécurité et les assurances, ni de présenter sa proposition dans les formes voulues; l'autre avait ajouté des conditions ou des réserves à sa proposition. Ainsi, il n'y avait qu'une soumission acceptable. La Société d'énergie du Yukon a décidé de négocier avec la seule société en lice plutôt que de lancer un autre appel d'offres. La société retenue (Chant Construction Company Inc.) était moins bien classée que plusieurs autres sociétés qui avaient été évaluées au cours de l'étape de la présélection.

47. Lors d'une réunion avec la société retenue, en février 2001, les représentants de la Société d'énergie du Yukon ont formulé un certain nombre d'inquiétudes concernant la proposition reçue. Par exemple, ils ont noté que divers éléments étaient absents de l'énoncé des travaux formulé dans la proposition. Ils ont aussi remarqué que la proposition n'était pas accompagnée d'un plan d'achat ni d'un programme officiel de sécurité. De plus, certains prix unitaires inscrits dans la proposition ne correspondaient pas à l'énoncé des travaux défini dans l'appel d'offres.

48. Au cours de la négociation du contrat de travaux en mars 2001, la Société a aussi appris que l'entrepreneur avait peu d'expérience dans le transport de l'énergie et la construction de sous-stations. Pour réaliser ce projet, l'entrepreneur prévoyait faire appel à divers spécialistes qui étaient répartis un peu partout dans le centre du pays. La Société n'aurait pas, semble-t-il, dûment envisagé de lancer un nouvel appel d'offres pour ce contrat après l'émergence de ces inquiétudes. Elle a signé le contrat de travaux de construction (l'accord de conception-construction) le 11 avril 2001, en contrepartie d'un prix négocié fixe de 22 070 790 $.

49. Les contrats signés avec le directeur de projet et l'ingénieur du projet. Lorsque le conseil d'administration a approuvé le projet, la Société a fait savoir qu'elle embaucherait un entrepreneur à titre de directeur de projet. La Société a par la suite prévu un budget de 800 000 $ pour la gestion du projet. Elle a attribué deux contrats, sans lancer d'appels d'offres : le premier à une société qui devait diriger le projet et le deuxième à une autre société pour assurer les services d'ingénierie. La Société a intégré les services d'ingénierie aux coûts de gestion interne du projet. Au terme du projet, la Société avait versé plus de 2,3 millions de dollars, en tout, à ces deux sociétés. Elle nous a fait savoir que le projet avait nécessité un plus grand soutien de gestion que ce qui avait été prévu. Nous avons relevé des lacunes importantes dans ces contrats — plus particulièrement, l'absence de dispositions pour protéger les intérêts de la Société.

50. Le contrat avec le directeur de projet n'a pas été attribué par la voie d'un appel à la concurrence. En juillet 2000, la Société a sélectionné le directeur de projet grâce aux services d'une société locale de ressources humaines, à partir d'une liste de sept candidats. Un seul candidat (Ian Hayward, directeur de la société Windrush Engineering) était disponible et intéressé par le projet. Cependant, la Société n'a pas cherché d'autres candidats ailleurs. Dans un premier temps, elle a retenu les services de la société pour des conseils concernant l'appel d'offres et la sélection des entrepreneurs en vue de réaliser les travaux du réseau de transport d'électricité. Les services d'experts-conseils devaient être fournis d'août à octobre 2000, pour une somme maximale de 30 000 $ (TPS en sus). Le prix du contrat est par la suite passé à 70 190 $ pour la réalisation de travaux supplémentaires, et la date d'achèvement a été repoussée au 31 mai 2001.

51. En septembre 2001, la Société a passé un contrat de gestion du projet avec la même société; le contrat était rétroactif au 1er juin 2001. Le contrat prévoyait que la Société paierait le directeur de projet en fonction du nombre d'heures travaillées en 2001 et en 2002 (le directeur de projet devait travailler 150 heures par mois en moyenne), plus les frais remboursables. Nous avons constaté que le contrat ne prévoyait pas un prix maximal ou un plafond. Il ne comportait pas non plus de dispositions concernant la vérification des réclamations.

52. En vertu du contrat initial visant les services d'experts-conseils et du contrat subséquent conclu avec la même société pour la gestion du projet, la Société d'énergie du Yukon a versé 424 455 $ en tout, selon les factures présentées par le directeur de projet. Chaque facture faisait état d'un certain nombre d'heures, mais nous avons constaté qu'aucune n'était accompagnée de feuilles de temps détaillées. Nous avons aussi noté que la Société avait remboursé au directeur de projet environ 6 000 $ correspondant à des frais de représentation (pour des repas et des consommations alcooliques pris avec des dirigeants de l'entreprise de construction et de la société d'ingénierie, et avec le personnel et les experts-conseils de la Société d'énergie du Yukon) qui n'étaient pas prévus dans le contrat.

53. Le contrat avec la société chargée des services d'ingénierie a aussi été attribué sans appel d'offres. Aucun effort n'a été fait, semble-t-il, pour lancer un appel d'offres; et nous n'avons trouvé aucune explication dans les dossiers de la Société pour justifier cette façon de faire. Rien ne permet de croire que le conseil d'administration a approuvé le contrat de services d'ingénierie ayant trait au projet. Nous avons aussi noté que le directeur de projet (Ian Hayward) était le fondateur de la société d'ingénierie retenue (Ian Hayward International Ltd), où il a occupé un poste de directeur jusqu'en 1995. La Société d'énergie du Yukon connaissait ces liens, mais elle a passé les deux contrats à fournisseur unique sans poser de questions à cet égard.

54. La Société a intégré les services d'ingénierie dans les coûts internes de gestion du projet. Toutefois, retenir les services de cette société d'ingénierie était contraire à la méthode de conception-construction qui avait été proposée par la direction — à savoir employer une petite équipe de gestion dirigée par un seul entrepreneur qui agit à titre de directeur de projet. Aux termes du contrat, sous la direction du directeur de projet, le personnel local de la société d'ingénierie (un ingénieur et son assistant sur place, quatre inspecteurs sur le terrain et un directeur local) et le personnel de son siège social et de ses autres bureaux (un ingénieur et son assistant sur place, des inspecteurs sur le terrain, des maîtres de l'ouvrage, des ingénieurs principaux et subalternes, un dessinateur, un technicien et un secrétaire) seraient responsables des services d'ingénierie. La Société d'énergie du Yukon paierait les frais liés aux services d'ingénierie, en fonction du nombre d'heures consacrées au projet, et les frais remboursables. L'accord ne fixait pas de limite de prix ni ne prévoyait de dispositions permettant à la Société d'effectuer une vérification des réclamations, au besoin. L'accord est entré en vigueur le 3 mai 2001, même si les deux parties ne l'ont signé qu'en septembre 2001. Nous avons constaté que la société d'ingénierie avait présenté une facture d'environ 10 000 $ pour des services rendus en avril 2001, ce qui indique qu'elle avait commencé ses travaux avant la date d'entrée en vigueur du contrat. À notre avis, passer des contrats rétroactifs et permettre l'exécution de travaux avant la finalisation des arrangements contractuels sont des pratiques inacceptables.

55. Le contrat a été signé au nom du directeur des Services techniques, par un employé de la Société de l'échelon des superviseurs qui n'avait pas l'autorité nécessaire pour le faire. Cet employé n'était pas un cadre de la Société. Or les lignes directrices de la Société ayant trait au pouvoir de signature stipulent qu'un administrateur (du conseil d'administration) et un cadre de la Société doivent signer ensemble pour autoriser une dépense initiale de plus de 500 000 $ liée à des activités d'exploitation et d'entretien (et pour des dépenses en immobilisations de plus de 1 million de dollars), avec l'approbation préalable du conseil d'administration. Au 31 mai 2004, la Société avait versé près de 1,9 million de dollars à la société d'ingénierie. À elles seules, les dépenses liées à ce contrat ont excédé de beaucoup le budget de 800 000 $ qui avait été prévu par la Société pour les coûts internes de gestion du projet.

56. La Société d'énergie du Yukon n'a pas exigé de l'ingénieur du projet qu'il présente des feuilles de temps détaillées pour étayer les heures facturées, sauf pour le mois d'août 2001. En effet, préoccupée par les heures facturées par les maîtres de l'ouvrage de l'entreprise, la Société a demandé une feuille de temps détaillant le nombre d'heures consacrées à chaque tâche pour ce mois. Nous avons aussi noté qu'en mai 2002, le directeur de projet avait écrit à la Société concernant la facture présentée par l'ingénieur du projet pour avril 2002. Il avait déclaré qu'il pouvait se porter garant de toutes les dépenses, sauf des heures facturées par les maîtres de l'ouvrage (10 290 $). Il avait fait savoir qu'il ne disposait d'aucun instrument, autre que la feuille de temps, pour évaluer leur collaboration. Il a néanmoins recommandé d'acquitter la facture, ce qu'a fait la Société sans poser de questions supplémentaires. Les responsables de la Société nous ont fait savoir que l'ingénieur du projet avait aussi fourni des renseignements concernant deux autres factures (octobre et décembre 2003), à la demande de la Société.

57. Autres contrats. Nous avons relevé un certain nombre de lacunes dans d'autres contrats accordés dans le cadre du projet. Ainsi, aux termes de divers contrats, la Société a payé aux entrepreneurs plus que le prix maximal fixé, et ce, sans préparer d'avenants. Dans un autre cas, des paiements d'environ 136 595 $ ont été faits pour des biens et des services sans aucun contrat écrit. Les paiements ont été versés sur simple présentation de factures par l'entrepreneur.

58. En résumé, nous avons recensé des lacunes importantes dans la passation des contrats de travaux de construction et de services. La Société n'avait pas établi de politiques ni de procédures claires pour attribuer les contrats en vue d'assurer la transparence, de faire jouer la concurrence et d'obtenir le meilleur prix. Elle a passé plusieurs contrats sans appels d'offres. Nous avons constaté que le contrat pour les services d'ingénierie avait été mal planifié et n'avait pas été autorisé selon les règles. En outre, les contrats avec le directeur de projet et la société d'ingénierie ne prévoyaient pas de dispositions adéquates pour protéger les intérêts de la Société.

59. Recommandation. La Société d'énergie du Yukon devrait établir et mettre en application une politique et des procédures claires à l'égard de la passation des contrats dans le souci d'assurer la transparence, de faire jouer la concurrence et d'obtenir le meilleur prix. Elle devrait veiller à ce que :

  • des exigences contractuelles adéquates soient définies au préalable;
  • les contrats soient signés seulement par les personnes qui sont habilitées à le faire;
  • les contrats précisent clairement les résultats attendus, le prix maximal et un plafond des coûts;
  • les contrats prévoient des dispositions visant la vérification des réclamations, au besoin;
  • les paiements soient effectués seulement dans les limites approuvées.

Réponse de la direction. La Société d'énergie du Yukon a chargé un expert-conseil d'examiner ses pratiques d'achat et de passation des contrats en 2004. Par la suite, de nouvelles politiques et lignes directrices visant la passation des contrats, qui vont régler les points soulevés, ont été définies et approuvées par le conseil d'administration.

La gestion de la mise en œuvre du projet

La mise en œuvre du projet a été très problématique

60. De nombreux problèmes sont survenus au cours de la mise en œuvre du projet, y compris les suivants :

  • la violation du droit de propriété des Premières nations;
  • la modification du tracé pour contourner l'aéroport de Dawson City;
  • un désaccord sur les données topographiques et les conditions du sol;
  • l'enlèvement des arbres après le déboisement;
  • des vibrations sur la ligne de transport d'électricité;
  • des avant-projets et des plans insatisfaisants.

De plus, il y a eu de nombreux différends entre la Société et l'entrepreneur de construction. La Société a allégué que l'entrepreneur avait failli à certaines obligations contractuelles. L'entrepreneur a affirmé quant à lui qu'il y avait eu ingérence de la part de la Société et du directeur de projet. Il aurait été impossible de prévoir certains de ces problèmes au cours de l'étape de la planification, mais d'autres sont attribuables à la mauvaise planification, communication et gestion de projet de la Société. Ces problèmes ont entraîné des coûts supplémentaires, des différends qui ne sont pas réglés entre la Société et l'entrepreneur de construction, et des retards dans la réalisation du projet.

61. La violation du permis d'utilisation du sol et du droit de propriété des Premières nations. La Société a allégué que l'entrepreneur de construction n'avait pas obtenu au préalable un droit d'accès temporaire aux terres du district de Mayo et qu'il avait violé le permis d'utilisation du sol. Elle était aussi d'avis que l'entrepreneur n'avait pas adopté des pratiques responsables pour ce qui est de la planification du tracé, ce qui avait donné lieu à des violations du droit de propriété des Premières nations. De fait, la Société d'énergie du Yukon a reconnu que l'entrepreneur avait déboisé un lopin de terre appartenant aux Premières nations sans avoir obtenu les autorisations nécessaires, et que les Premières nations avaient déposé une requête pour obtenir des dommages-intérêts pour leur terre. L'entrepreneur nous a déclaré qu'il s'attendait à ce que la Société d'énergie du Yukon ait obtenu toutes les servitudes et les droits de passage nécessaires, comme le prévoyait le contrat. Au moment de notre vérification, la Société avait réclamé un dédommagement d'environ 119 000 $ à l'entrepreneur pour les coûts occasionnés par la violation du droit de propriété.

62. La modification du tracé pour contourner l'aéroport de Dawson City. La Société a indiqué qu'au début de l'étape de la planification (par exemple lors de l'étude de faisabilité), elle ne connaissait pas les plans d'expansion de l'aéroport de Dawson City. Peu après le début de la préparation de l'avant-projet, la Société a appris que l'aéroport avait mis en œuvre son projet d'expansion et que des règlements de zonage provisoires avaient été instaurés pour l'aéroport. Il a donc fallu modifier le tracé de la ligne de transport d'électricité pour contourner l'aéroport. En août 2001, la Société a envisagé divers tracés et choisi le tracé Australian Mountain/Hunker Creek pour remplacer le tracé initial. À la lumière de l'analyse des coûts préparée par l'entrepreneur de construction, la Société a estimé que la modification du tracé coûterait environ 600 000 $. En novembre 2001, la Société a demandé à l'entrepreneur de construction d'évaluer le coût d'un ordre de modification pour le nouveau tracé. Pour y donner suite, l'entrepreneur a présenté en mai 2002 une demande visant l'établissement d'un ordre de modification d'une valeur approximative de 1,2 million de dollars, demande qui a été rejetée par la Société. À ce moment-là, une grande partie des travaux étaient déjà en cours. L'entrepreneur nous a fait savoir qu'il avait accepté la modification de l'énoncé des travaux sans insister pour définir tous les coûts ni les faire approuver au préalable, dans le but de respecter le calendrier de réalisation du projet. La Société a versé environ 650 000 $ à l'entrepreneur, mais elle n'a pas établi un ordre de modification officiel; elle était d'avis qu'il serait difficile et long d'évaluer un paiement pour des travaux qui avaient déjà été effectués. La Société a décidé que les revendications émanant des deux parties à cet égard seraient évaluées dans leur globalité après la mise en service du projet. En octobre 2003, l'entrepreneur a présenté deux réclamations totalisant environ 1 million de dollars pour la modification du tracé, qui venaient s'ajouter à la somme de 650 000 $ déjà versée. Au moment de notre vérification, la Société contestait ces deux réclamations.

63. Les données topographiques et les conditions du sol. Lorsque la Société a rencontré l'entrepreneur de construction en février 2001 pour négocier le contrat, ses représentants ont noté que la proposition de l'entrepreneur ne faisait pas appel aux données topographiques sur les régions éloignées qui accompagnaient l'appel d'offres. La Société croit que cela était attribuable surtout à la méconnaissance de l'entrepreneur de ce type de données. Par la suite, le directeur de projet a indiqué que, selon lui, l'entrepreneur ne savait pas comment utiliser les données topographiques. L'entrepreneur prétend quant à lui que les données n'étaient pas aussi exactes que ce qui était indiqué dans l'appel d'offres. Il a donc été forcé d'obtenir ces informations ailleurs en vue de réaliser la conception détaillée de la ligne de transport d'électricité. L'entrepreneur a aussi affirmé que les conditions du sol sur les sites étaient différentes de celles indiquées dans l'appel offres.

64. En octobre 2003, l'entrepreneur a présenté une réclamation de 750 000 $ pour des dépenses engagées en raison des données topographiques inexactes, et une autre réclamation de 612 630 $ pour des coûts supplémentaires attribuables aux conditions du sol inattendues qui ont eu des répercussions sur l'installation des poteaux en bois de la ligne de transport. La Société conteste ces réclamations. (Voir la photographie)

65. L'enlèvement des arbres après le déboisement. En mars 2000, la Société a conclu une entente avec deux Premières nations qui leur donnait le droit inaliénable de récupérer, à leurs frais, le bois des arbres abattus dans le cadre du projet. Celles-ci n'étaient cependant pas tenues de le faire. Aux termes de cette entente, le bois devait être enlevé dans un délai de deux ans après les travaux de déboisement.

66. Au cours de la planification du projet, la Société n'a pas prévu de dépenses importantes pour l'enlèvement et la récupération du bois. C'est donc dire que l'enlèvement du bois n'a pas été intégré à l'accord de conception-construction. Au cours des travaux de construction, la Société a dû verser environ 400 000 $ à l'entrepreneur et à un sous-traitant pour faire transporter le bois dans des lieux déterminés par les deux Premières nations. Elle a procédé ainsi pour veiller à ce que le projet respecte les conditions relatives au permis d'enlèvement du bois, qui faisaient obligation d'enlever les arbres abattus avant le 31 mars 2002, et parce que les deux Premières nations n'étaient pas satisfaites par la quantité de bois récupérable qui restait. La Société a affirmé que les méthodes de déboisement utilisées par l'entrepreneur avaient détruit beaucoup de bois. L'entrepreneur est d'avis que ses méthodes de déboisement étaient adéquates et efficaces.

67. Les problèmes de vibrations. Au lendemain d'un séisme survenu le 3 novembre 2002, la Société a effectué un examen des problèmes de vibrations associés à la tension de la ligne de transport d'électricité et les a analysés. Elle a allégué que les tensions étaient trop fortes sur la ligne, ce qui la rendait sensible aux vibrations dans certaines circonstances et pouvait causer des défaillances prématurément. La Société est d'avis que l'entrepreneur a la responsabilité d'installer des amortisseurs sur les lignes pour réduire l'effet des vibrations. En octobre 2003, la Société a déposé une réclamation d'environ 1 million de dollars pour ce défaut allégué, qui est contestée par l'entrepreneur. L'entrepreneur estime que la tension de la ligne de transport d'électricité est conforme aux spécifications du projet. (Voir la photographie)

68. Les relations entre la Société et l'entrepreneur de construction. En avril 2002, le conseiller auprès du conseil d'administration de la Société a indiqué que le problème le plus grave à l'époque était les relations entre la Société et l'entrepreneur de construction. Cela tenait surtout au fait que la Société avait envoyé en mars 2002 une lettre à la société de cautionnement de l'entrepreneur dans laquelle elle s'inquiétait de la manière dont l'entrepreneur exécutait le contrat. L'entrepreneur a contesté l'opinion exprimée par la Société et a demandé à ce que la lettre soit retirée, ce que la Société a refusé de faire. En octobre 2003, l'entrepreneur a déposé une réclamation de 6 millions de dollars contre la Société, en indiquant que les déclarations prétendument erronées de la Société l'avaient empêché de présenter des soumissions pour divers projets comme il aurait pu le faire autrement.

69. De plus, l'entrepreneur a présenté deux réclamations contre la Société de 1,65 million de dollars en tout, en alléguant que la Société et le directeur de projet s'étaient ingérés dans les moyens, les méthodes et le calendrier des travaux adoptés par l'entrepreneur et les sous-traitants. Au même moment, la Société a déposé, pour sa part, deux réclamations contre l'entrepreneur, totalisant environ 5,8 millions de dollars, pour une pénalité de retard dans les travaux, des coûts découlant de ce retard et des coûts de gestion supplémentaires. Aucune de ces réclamations n'était encore réglée au moment de notre vérification.

70. L'avant-projet et les plans. Aux termes de l'accord de conception-construction, l'entrepreneur de construction était tenu de préparer un projet d'exécution complet des travaux et de le présenter à la Société en vue de le faire approuver avant le début des travaux de construction des sous-stations. Ces documents devaient comporter des plans et des spécifications précisant toutes les exigences nécessaires pour construire dans les règles un réseau de transport d'électricité. La Société a éprouvé des difficultés à obtenir un avant-projet et des plans satisfaisants de la part de l'entrepreneur. L'entrepreneur nous a fait savoir qu'il y avait un désaccord important entre les deux parties pour ce qui était des normes obligatoires à respecter.

71. Dans certains cas, l'entrepreneur a demandé l'autorisation de commencer les travaux avant d'avoir terminé l'avant-projet et les plans. La Société nous a indiqué qu'elle avait accédé à sa demande dans le but de faire avancer le projet. C'est ainsi qu'en août 2002, elle a autorisé la mise en route des travaux de construction des infrastructures aux sous-stations, même si les plans n'était pas terminés ni approuvés. Par ailleurs, l'installation des équipements dans les sous-stations a suivi sans que les problèmes concernant les plans aient été complètement réglés. Par la suite, ayant relevé un certain nombre de problèmes, le personnel de la Société avait craint que les plans utilisés sur le chantier soient inexacts. Lorsque la Société a constaté que la préparation des plans n'avait pour ainsi dire pas progressé, elle a décidé, au début de février 2003, de suspendre les travaux pour des raisons de sécurité et à la suite de problèmes signalés sur le chantier. Entre-temps, il n'y avait aucun plan complet et détaillé pour la mise en service du réseau de transport d'électricité.

72. Les deux parties ont mis plusieurs mois à dénouer l'impasse concernant la qualité des plans des travaux et de la mise en service, et les défauts constatés, entre autres. En mai 2003, les deux parties ont convenu d'établir un plan d'action en vue d'achever la réalisation du projet. Elles ont en outre nommé un arbitre impartial pour résoudre leurs différends. Le 27 mai 2003, le ministre responsable à la fois de la Société d'énergie du Yukon et de sa société mère, la Société de développement du Yukon, a nommé un nouveau président au conseil d'administration de la Société de développement du Yukon (qui est aussi devenu président du conseil d'administration de la Société d'énergie du Yukon). Une des premières missions du nouveau président a été de résoudre les questions concernant le projet de réseau de transport d'électricité.

73. La date d'achèvement prévu des travaux était à l'origine le 1er novembre 2002. Mais le réseau de transport d'électricité n'a été mis en service que le 5 septembre 2003. Cette date avait été établie par l'arbitre et acceptée par les parties. À cette date, le projet était presque achevé (à 95 p. 100), en dépit du fait que les plans étaient toujours incomplets et qu'un certain nombre de défauts n'avaient toujours pas, semble-t-il, été corrigés. C'est ainsi que des raccordements de câble inadéquats et une mauvaise ventilation dans les immeubles posaient problème, et que des éléments mineurs du projet n'étaient pas encore terminés. En janvier 2004, la Société a accepté la livraison des plans conformes à l'exécution des travaux, qui dataient du 23 décembre 2003. Ce faisant, la Société a convenu que l'entrepreneur de construction avait satisfait aux obligations contractuelles concernant la livraison des plans.

74. En résumé, nous avons recensé divers problèmes dans la mise en œuvre du projet qui sont pour la plupart attribuables à la mauvaise planification, communication et gestion de projet de la Société. Ils ont alourdi les coûts du projet, créé des différends entre la Société et l'entrepreneur qui sont toujours en suspens, et retardé la réalisation du projet. L'entrepreneur de construction reconnaît qu'il est en partie responsable de certains problèmes qui sont survenus. Par exemple, il a exécuté l'accord de conception-construction sans insister pour faire apporter des modifications importantes au contrat en sachant qu'il y avait des problèmes à l'égard des documents se rattachant au contrat. Il est d'avis que l'accord de conception-construction était incohérent et définissait mal les attentes ou les responsabilités des deux parties qui devraient être formulées dans un protocole conventionnel de conception-construction.

75. Recommandation. Lors de la mise en œuvre de projets d'immobilisations, la Société d'énergie du Yukon devrait

  • adopter de saines pratiques de gestion de projet;
  • assurer le respect des dispositions prévues dans les contrats;
  • établir des ordres de modification officiels, au besoin;
  • veiller à ce que seuls les travaux qui sont autorisés soient exécutés;
  • surveiller les travaux afin de prendre les mesures qui conviennent, en temps opportun, lorsque des problèmes surviennent.

Réponse de la direction. Les pratiques recensées par le Bureau du vérificateur général du Canada sont à l'étude. Même si les écarts signalés par rapport aux « pratiques exemplaires » ne concernent en général que le projet de Mayo-Dawson City, la direction veillera à ce que les recommandations formulées soient appliquées à tous les projets futurs, sans égard à leur taille ou à leur complexité.

Des réclamations importantes demeurent en suspens en dépit de l'entente stipulant que le projet a été achevé

76. L'accord de conception-construction comporte des clauses visant la résolution des différends, notamment le recours à la négociation, à la médiation et à l'arbitrage (avec des délais précis). Cependant, nous avons constaté qu'aucune des parties à l'accord n'avait fait appel à ces dispositions.

77. Comme nous l'avons déjà mentionné, les travaux ont été arrêtés en février 2003. Pourtant, ce n'est qu'en mai 2003 que les deux parties ont signé un accord complémentaire pour achever la réalisation du projet. Dans le cadre de cet accord, elles ont nommé un arbitre pour résoudre leurs différends. Aux termes de l'accord de conception-construction, il était entendu que les deux parties devaient faire des efforts raisonnables pour résoudre leurs différends par voie de négociation. La résolution d'un certain nombre de problèmes grâce à l'intervention de l'arbitre a permis d'achever la réalisation du projet, mais plusieurs réclamations n'ont toujours pas été réglées.

78. Le 2 octobre 2003, l'arbitre a ordonné aux deux parties de soumettre une liste de réclamations définitive le 15 octobre 2003 au plus tard. L'entrepreneur de construction a présenté des réclamations de l'ordre de 17 millions de dollars, en tout, visant diverses questions. La Société a quant à elle présenté une réclamation de 9,5 millions de dollars concernant des coûts de gestion de projet supplémentaires, des retards dans l'exécution du projet et d'autres problèmes. Nous ne formulons pas d'opinion sur les mérites de ces réclamations.

79. Le 16 janvier 2004, les deux parties ont conclu une entente stipulant que le projet était terminé et prévoyant le règlement d'un certain nombre de questions. La mission de l'arbitre a aussi pris fin en janvier. Au moment de notre vérification, les parties n'avaient pas convenu de la manière de résoudre les dernières réclamations en suspens. Elles n'ont pas appliqué les dispositions inscrites dans l'accord de conception-construction, qui prévoient que l'une ou l'autre des parties peut confier à l'arbitrage la résolution définitive d'un litige.

80. Nous avons constaté que la Société avait consacré beaucoup de temps, d'efforts et d'argent à l'embauche d'avocats et d'experts-conseils pour l'aider à résoudre les réclamations en suspens. La Société a consenti des efforts pour faire progresser l'étude de ses réclamations, mais elle n'a pas connu beaucoup de succès. Peu importe l'issue de l'affaire, il est primordial que les coûts supplémentaires supportés par la Société soient comptabilisés comme il se doit dans le budget du projet.

81. Recommandation. Lors de la mise en œuvre de projets d'immobilisations, la Société d'énergie du Yukon devrait avoir recours aux dispositions visant le règlement des différends qui sont prévues dans les contrats et les accords pour résoudre efficacement et en temps voulu les différends avec les entrepreneurs.

Réponse de la direction. La direction aura recours aux dispositions sur le règlement des différends au besoin lorsque cela sera dans l'intérêt de la Société d'énergie du Yukon.

Les contrôles de gestion financière et de gestion des coûts

Les contrôles de gestion financière et de gestion des coûts étaient inadéquats

82. Lors de la mise en œuvre d'un projet de l'envergure et de la nature du réseau de transport d'électricité, nous nous attendrions à ce que l'organisme concerné dispose de contrôles adéquats visant la gestion financière et la gestion des coûts, dans le but de veiller à ce que l'ampleur et les coûts du projet respectent le budget, et que tous les ordres de modification et dépassements de coûts soient approuvés selon les règles. En ce qui a trait à la réalisation du projet de réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City, nous avons cependant relevé des lacunes dans ces domaines.

83. Le personnel de la Société d'énergie du Yukon a éprouvé des difficultés à rapprocher les budgets détaillés et les analyses des écarts avec les premières estimations des coûts, qui avaient été approuvées par le conseil d'administration de la Société et la société mère. La Société d'énergie du Yukon a certes instauré plusieurs codes dans son système de comptabilité pour enregistrer les dépenses faites dans le cadre de ce projet, mais nous avons constaté que cela ne permettait pas de surveiller adéquatement les dépenses faites dans le cadre du projet, par rapport aux budgets, ni d'en faire rapport. En 2004, la Société a mis plusieurs mois à effectuer un rapprochement entre les coûts réels du projet et la première estimation des coûts et les coûts approuvés.

84. Nous avons constaté que les coûts internes n'ont pas été convenablement contrôlés. Selon les données de la Société, les dépenses liées aux coûts internes ont totalisé 8,3 millions de dollars environ pour ce projet; alors que le budget initial prévoyait 1 825 000 $ (voir la pièce 3). Ces dépenses se rapportaient notamment aux éléments suivants : l'étude de faisabilité, la préparation des appels d'offres, la gestion interne du projet, la rémunération du personnel et les frais de déplacement, les coûts indirects, les assurances et les frais juridiques, les honoraires des experts-conseils et des entrepreneurs, et des frais divers. Par exemple, les dépenses liées à la gestion du projet se sont élevées à environ 2,6 millions de dollars, alors que la Société avait prévu un budget de 800 000 $. On a consacré 1,1 million de dollars à la rémunération du personnel et aux frais de déplacement, par rapport à un budget prévisionnel de 50 000 $. La Société a indiqué qu'en raison des multiples problèmes survenus au cours de la réalisation du projet et de la mise en service du réseau, le personnel avait été mis davantage à contribution que ce qui était prévu.

85. Aux termes du contrat de construction, la Société pouvait modifier les travaux grâce à un ordre de modification ou à une directive. Un ordre de modification est un document écrit, signé par la Société d'énergie du Yukon et accepté par l'entrepreneur de construction, qui autorise l'ajout, le retrait ou la révision d'éléments concernant l'énoncé des travaux ou qui modifie le calendrier des travaux ou les prix.

86. Une directive de modification est un ordre écrit signé par la Société d'énergie du Yukon qui ordonne l'ajout, le retrait ou la révision d'éléments concernant l'énoncé des travaux avant que les deux parties conviennent de modifier le contrat. Un ordre de modification serait enregistré dès que les deux parties auraient accepté de modifier le contrat.

87. Nous nous attendions à ce que des ordres de modification aient été officiellement établis pour toutes les modifications apportées aux travaux qui avaient été acceptées, initialement, par la Société et l'entrepreneur. L'accord de conception-construction prévoyait au début un prix fixe de 22 070 790 $. Par la suite, la Société a approuvé neuf ordres de modification prévoyant des paiements d'environ 1,3 million de dollars. Cependant, comme nous l'avons mentionné au paragraphe 62, la Société a versé 650 000 $ en tout à l'entrepreneur sans établir un ordre de modification officiel. De plus, plusieurs ordres de modification étaient toujours en litige après l'achèvement du projet. L'entrepreneur réclame en effet 1,1 million de dollars de plus à cet égard.

88. Nous avons constaté que la Société avait versé 273 683 $ à l'entrepreneur de construction pour des travaux effectués conformément à des directives de modification, mais qu'aucun ordre de modification officiel n'avait été préparé pour ces travaux. En outre, une réclamation supplémentaire de 780 371 $ pour des travaux effectués conformément à des directives de modification, qui a été déposée par l'entrepreneur, n'était toujours pas réglée au moment de notre vérification.

Il y a eu des dépassements de coûts importants

89. Nous avons noté que le conseil d'administration de la Société recevait régulièrement des rapports sur l'état d'avancement du projet qui étaient présentés surtout par le président ou le conseiller. La direction avait noté la possibilité de dépassements de coûts dès mars 2002. Pourtant, il n'y avait aucun contrôle ni procédure en vigueur en vue d'autoriser les dépassements de coûts et d'approuver les paiements excédant les limites autorisées dans le cadre du projet. Rien ne permet de croire que la direction a demandé au conseil d'administration d'approuver un quelconque dépassement de coûts et que le conseil d'administration a officiellement approuvé les dépassements.

90. Le 31 mai 2004, la Société avait consacré environ 33,5 millions de dollars à ce projet (voir la pièce 4). Cette somme excède d'environ 4,5 millions de dollars la limite des coûts autorisée. Ce dépassement est attribuable surtout aux facteurs suivants : les modifications apportées à l'ampleur du projet (par la voie de divers ordres et directives de modification); les dépenses imprévues liées aux travaux de construction (par exemple l'analyse à la suite du séisme, la violation du droit de propriété des Premières nations et l'embauche d'un arbitre pour résoudre les litiges contractuels); les coûts de gestion de projet supplémentaires; la sous-évaluation des coûts, qui n'ont pas été inclus dans le budget (par exemple la rémunération du personnel, les frais juridiques, les assurances et l'enlèvement des arbres après le déboisement).

91. En novembre 2003, la Société a indiqué que les coûts totaux du projet s'élèveraient à environ 36,2 millions de dollars, ce qui représentait un dépassement de coûts d'environ 7 millions de dollars. Cependant, cette somme ne tient pas compte de toutes les réclamations présentées par l'entrepreneur de construction ni des propres réclamations de la Société, qui n'étaient toujours pas réglées au moment de notre vérification. Comme nous l'avons déjà indiqué dans le présent rapport, l'investissement en faveur de ce projet pourrait être justifié si les coûts d'immobilisations ne dépassent pas 38,2 millions de dollars. Nous craignons que les dépassements de coûts importants ne réduisent de beaucoup les économies qui peuvent être attendues de ce projet. Cependant, en raison du renchérissement récent du diesel, les perspectives de rentabilité du projet sont plus prometteuses.

92. Recommandation. La Société d'énergie du Yukon devrait établir des contrôles visant la gestion financière et la gestion des coûts lors de la réalisation de projets d'immobilisations. Ces contrôles devraient permettre de veiller à ce que l'ampleur et les coûts des projets respectent les budgets approuvés et que les ordres de modification et les dépassements de coûts soient autorisés selon les règles.

Réponse de la direction. En général, il a été constaté que les systèmes de contrôle internes de la Société d'énergie du Yukon ne comportaient pas de faiblesses importantes. Cependant, la direction reconnaît que la mise en œuvre du projet de Mayo-Dawson City n'a pas été faite dans le respect des processus et des contrôles normaux. Cela ne devrait plus se reproduire à l'avenir, car on a modifié les processus et amélioré la gouvernance d'entreprise.

Le respect des spécifications initiales

Le produit final comporte toujours des lacunes

93. L'accord de conception-construction détaille les exigences que doit respecter et appliquer l'entrepreneur au cours de la conception, de la construction et de la mise en service du projet. Il renferme un énoncé qui affirme que l'objectif de l'accord est de produire « un ouvrage de premier ordre sur le plan de la conception et de la construction ». Il prévoit aussi le respect des normes en vigueur dans le secteur du service public d'électricité.

94. Comme nous l'avons déjà noté, l'accord de conception-construction établissait clairement l'obligation de l'entrepreneur de soumettre des plans à l'approbation de la Société d'énergie du Yukon avant d'entreprendre les travaux. Dans le cadre d'un projet de cette nature, il est primordial de disposer de plans exacts et certifiés avant d'entreprendre les travaux. Ce n'est pas ce qui est arrivé. De fait, les problèmes qui sont survenus au cours de la mise en service du réseau et la liste des défauts dressée par la Société indiquent qu'il y a eu des erreurs de conception et de filage ainsi que des problèmes liés à l'adaptation des équipements, et que le travail a été bâclé. L'entrepreneur est cependant d'avis que ses plans répondaient aux normes en vigueur dans le secteur.

95. L'accord de conception-construction faisait aussi obligation à l'entrepreneur de demander à la Société de lui délivrer un « certificat d'achèvement des travaux » une fois les travaux terminés conformément aux exigences contractuelles et tous les défauts corrigés à la satisfaction de la Société. La Société devait alors délivrer le certificat et verser à l'entrepreneur le solde impayé du contrat, y compris la retenue de garantie d'exécution.

96. En janvier 2004, la Société a délivré le certificat mentionné précédemment après que les deux parties ont signé l'accord mentionné dans le paragraphe 79 du présent rapport. La Société a accepté de libérer l'entrepreneur de la provision pour garanties, prévue dans le contrat, mais uniquement pour les travaux ayant trait à la ligne de transport d'électricité. Cette décharge ne s'appliquait pas à la provision pour garanties de l'entrepreneur à l'égard des autres volets du projet, notamment les sous-stations. La Société a aussi convenu, sauf indications contraires dans l'accord du 16 janvier 2004, que l'entrepreneur de construction ne serait pas responsable des défauts et des travaux incomplets recensés antérieurement par la Société, qui avaient été acceptés par les deux parties ou déterminés par l'arbitre.

97. En concluant à l'achèvement du projet, la Société et l'entrepreneur de construction sont parvenus à un compromis sur les plans du réseau de transport d'électricité. La Société a pris livraison des plans dans leur version du 23 décembre 2003 et accepté de les terminer elle-même.

98. La Société est d'avis qu'il y avait un défaut dans la conception de la ligne de transport, car elle est sensible aux vibrations en raison de la tension élevée des conducteurs. Cela pourrait accroître les coûts d'entretien et d'exploitation du réseau au cours de sa durée de vie. À la fin de 2004, la Société a retenu les services d'une entreprise pour installer des amortisseurs sur la ligne, au coût d'environ 1 million de dollars.

99. La Société a aussi affirmé que l'entrepreneur de construction ne s'était pas acquitté de ses obligations contractuelles, qui prévoyaient que les principales pièces d'équipement électrique (notamment les transformateurs, les bobines et les compensateurs synchrones) devaient respecter certaines spécifications et être « à faible perte ». La Société est d'avis que cela va se traduire par un renchérissement du coût de l'énergie au cours de la durée de vie du projet, car l'équipement installé consomme plus d'énergie que ce qui était prévu et précisé dans l'accord. La Société a déposé une réclamation de 530 000 $ à cet égard, qui a été contestée par l'entrepreneur.

100. Au terme de notre mission de vérification sur le terrain, la Société nous a fait savoir qu'il n'y avait eu qu'un petit nombre de pannes depuis la mise en service du réseau de transport d'électricité en septembre 2003. Bien que l'accord de conception-construction prévoie en toutes lettres que la Société vise à obtenir « un ouvrage de premier ordre sur le plan de la conception et de la construction », à la lumière des nombreux défauts constatés et des divers problèmes signalés au cours de la construction et de la mise en service du projet, il semble que cet objectif n'ait pas été atteint.

Examen des tarifs (« taux ») par la Régie des entreprises de service public du Yukon

Un examen complet des coûts du projet est nécessaire

101. La Société d'énergie du Yukon s'est engagée à ce que son projet n'ait pas d'effets négatifs sur les tarifs payés par les abonnés. Compte tenu des dépassements de coûts importants lors de la mise en œuvre du projet, nous sommes d'avis qu'il serait essentiel que la Régie des entreprises de service public du Yukon amorce un examen exhaustif des coûts d'immobilisations et d'exploitation du projet, ainsi que des problèmes en suspens lorsque la Société tentera de rentrer dans ses frais. Cela contribuerait à déterminer si le projet a des effets négatifs sur les tarifs de l'électricité.

Conclusion

102. Le réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City est le plus grand projet d'immobilisations jamais mis en œuvre par la Société d'énergie du Yukon. Cependant, la Société n'avait ni l'expérience ni les compétences nécessaires pour mener à bien un projet de cette nature et de cette envergure. Si la nécessité du projet, sa faisabilité et ses avantages ont été amplement justifiés, l'ampleur et les coûts du projet ont été mal définis. Le conseil d'administration de la Société d'énergie du Yukon n'a pas été complètement informé des risques associés à l'application de la méthode de conception-construction sans avoir l'expérience et les compétences nécessaires. Ni le conseil d'administration ni la direction n'ont veillé à ce que la Société ait instauré des politiques et des pratiques judicieuses. Ils n'ont pas non plus exercé une surveillance et un contrôle suffisants au cours de la mise en œuvre de ce projet.

103. La Société n'a pas une politique qui établit des normes et des procédures en matière de gestion de projet. De fait, le projet a été mal géré. Les rôles, les responsabilités et les obligations à l'égard de la reddition de comptes n'ont pas été clairement définis. Divers problèmes et des retards importants sont survenus au cours de la réalisation du projet. Par ailleurs, le produit final comporte toujours des lacunes. Il semble que l'objectif de la Société, à savoir obtenir un ouvrage de premier ordre sur le plan de la conception et de la construction, n'ait pas été atteint.

104. Nous avons recensé des lacunes importantes dans la passation des contrats de travaux et de services. En effet, il n'y avait pas de politique officielle faisant obligation d'attribuer les contrats par voie d'appels d'offres, ni de procédures de passation des marchés prévoyant des limites financières et des seuils au-dessus desquels les contrats devaient être accordés par voie d'appel d'offres.

105. Les contrôles visant la gestion financière et la gestion des coûts étaient inadéquats. Il y a eu des dépassements de coûts importants pour terminer le projet. Nous craignons que ces dépassements de coûts ne réduisent de beaucoup les économies qui peuvent être attendues de ce projet. Étant donné que la Société d'énergie du Yukon s'est engagée à ce que son projet n'ait pas de répercussions négatives sur les taux payés par les abonnés, nous sommes d'avis qu'il serait important que la Régie des entreprises de service public du Yukon procède à un examen exhaustif des coûts du projet lorsque la Société tentera de rentrer dans ses frais.

À propos de la vérification

Objectifs

Déterminer si le projet de réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City :

  • a été convenablement défini en ce qui a trait à l'ampleur, aux coûts et aux avantages;
  • a été soumis à une gestion de projet, à des mesures de contrôle et à des obligations de reddition de comptes adéquates;
  • a permis d'obtenir un produit de qualité qui respectait les spécifications initiales.

Étendue et méthode

La présente vérification a porté sur les principaux volets du projet de réseau de transport d'électricité de Mayo-Dawson City, notamment les suivants :

  • l'étude de faisabilité et l'analyse des coûts-avantages;
  • la gestion d'ensemble du projet;
  • les pratiques de passation des contrats;
  • la gestion de la mise en œuvre du projet;
  • les contrôles de gestion financière et de gestion des coûts;
  • le respect des spécifications initiales du projet.

Nous avons examiné les dossiers du projet, les systèmes de gestion financière et les systèmes de contrôle des coûts. Nous avons aussi rencontré des directeurs du programme et des responsables de la Société. Nous n'avons pas étudié les dossiers des entrepreneurs.

Critères de vérification

  • La nécessité de réaliser le projet devrait être bien définie et être directement liée aux autres objectifs de la Société.
  • Les solutions qui pourraient éventuellement satisfaire aux exigences établies, et la faisabilité de leur application, devraient être définies et analysées.
  • La solution retenue pour élaborer et mettre en chantier le projet devrait donner naissance à un énoncé de projet qui prévoit des objectifs clairs et détaille les travaux, le calendrier, les budgets, l'organisation et les contrôles.
  • La passation des contrats devrait :
    • respecter les politiques établies;
    • tenir compte des exigences qui découlent de la définition du projet;
    • intégrer les modifications approuvées;
    • être conforme aux principes reconnus, notamment en matière d'organisation des projets, d'établissement des budgets, des calendriers et des contrôles, et de présentation de rapports.
  • La méthode de conception-construction devrait être clairement définie pour ce qui est des exigences visant l'avant-projet et les plans; et ces exigences devraient être communiquées à toutes les parties chargées de la conception.
  • La gestion d'ensemble du projet devrait être conforme aux principes reconnus en matière de gestion de projet.
  • Les exigences du projet devraient être respectées et la mise en service du projet devrait se faire à coût minimal et avec le moins d'interruptions possibles.
  • Le produit final devrait être conforme aux spécifications initiales.
  • Des contrôles financiers et comptables adéquats devraient être appliqués.
  • Les responsabilités et les obligations à l'égard de la reddition de comptes devraient être clairement définies et communiquées.

Équipe de vérification

Vérificateur général adjoint : Ronald C. Thompson
Directeur principal : Eric Hellsten
Directeur : Gerry Chu

Lana Lin

Pour obtenir un complément d'information, veuillez joindre la Direction des communications au (613) 995-3708 ou au 1 888 761-5953 (sans frais).