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Vieillissement et aînés

une aînée

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Les meilleures pratiques de prévention des chutes - basées sur l'expérience clinique

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L'information fournie dans ce chapitre sur les meilleures pratiques de prévention des chutes et des blessures liées aux chutes provient de directives et d'examens systématiques décrits en détail au début du chapitre 3. Des données supplémentaires, mettant en lumière des interventions canadiennes proviennent d'études menées après la publication des examens.

En 2003, l'Association canadienne de santé publique a demandé aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de jouer un rôle primordial de coordination dans l'intégration et l'harmonisation de la prévention des blessures avec les bonnes pratiques axées sur les preuves et les résultats.

Source : ACSP 2003 Résolutions et motions,
Résolution ACSP no 5, Prévention des blessures.

4.1 Les directives de pratique existantes

Au Canada et à l'étranger, des organisations professionnelles et des gouvernements ont mis en place des directives de prévention des chutes basées sur des examens systématiques des résultats de recherche sur les bonnes pratiques de prévention auprès des aînés.

Les directives préparées par les organisations professionnelles sont généralement considérées prescriptives pour la pratique professionnelle. Les organisations professionnelles du Canada commencent à développer des directives pratiques sur les chutes et les chutes des aînés. L'Association des infirmières et infirmiers autorisés de l'Ontario a récemment publié sa directive professionnelle, RNAO: Prevention of falls and injuries in the older adult83, comprenant les meilleures pratiques traitant de l'éducation des patients et de la prévention après une chute.

Au niveau international, l'une des directives les plus fréquemment adoptées est celle de l'American Geriatrics Society préparée en collaboration avec la British Geriatrics Society et l'American Academy of Orthopaedic Surgeons, comme décrit dans le chapitre précédent.

Au Royaume Uni, le National Institute for Clinical Excellence (NICE) a publié Clinical guideline 21: The assessment and prevention of falls in older people 200484. La directive décrit les bonnes pratiques basées sur les meilleures données concernant l'efficacité clinique et la viabilité économique. Elle encourage la participation des aînés dans les programmes de prévention des chutes et offre du soutien à l'éducation sur la prévention des chutes aux professionnels travaillant avec les aînés présentant des risques élevés de chute.

Les gouvernements mettent au point des directives exhaustives et des stratégies pour réduire les chutes. Le Royaume-Uni a établi le National Health Service Framework for Older People, avec une section entière consacrée à la prévention des chutes85. En Australie, le ministère de la santé et du vieillissement a développé une initiative nationale de prévention des chutes chez les aînés. Les gouvernements des états autraliens du Queensland et du New South Wales, ont développé des directives et des initiatives pour réduire les chutes86. Le gouvernement du Queensland, par exemple, a mis au point des directives exhaustives spécifiques aux environnements des hôpitaux publics et des établissements gouvernementaux de soins aux personnes âgées, en incorporant l'intégration communautaire. Un examen de la recherche sur les travaux de prévention des chutes et des blessures chez les aînés, réalisé en Australie en 2004, fait une distinction entre les approches axées sur la communauté, celles axées sur les hôpitaux et celles axées sur les établissements de soins87.

4.2 Les meilleures pratiques pour la prévention des chutes

Une brève évaluation pour dépister les risques élevés

À cause du fait qu'il n'est pratiquement pas faisable que tous les aînés bénéficient d'une évaluation exhaustive liée aux chutes et d'un plan de traitement complet, une brève évaluation des risques est souvent la première étape pour identifier ceux qui peuvent bénéficier le mieux de cette approche. La directive axée sur les preuves de l'American Geriatrics Society88 suggère qu'une brève évaluation des risques permettrait d'identifier les personnes qui doivent être référées pour une évaluation complète des risques de chute. Les trois groupes qu'une telle évaluation doit identifier sont les suivants : les aînés présentant des états pathologiques et ayant subi une ou plusieurs chutes, les aînés ayant rapporté des chutes récurrentes et les aînés présentant des anomalies de la démarche ou de l'équilibre.

Une telle évaluation peut varier pour les aînés vivant dans des environnements différents - collectivité, hôpital ou établissement de soins. Les évaluations peuvent être auto-administrées ou utilisées par les intervenants primaires : personnel paramédical; médecins de famille ou infirmiers; physiothérapeutes; ergothérapeutes; travailleurs de soutien au domicile; etc.

Une étude canadienne sur les anciens combattants et leurs aidants naturels a soutenu l'inclusion des facteurs suivants dans une brève évaluation des risques : handicaps des membres inférieurs, faiblesse des extrémités inférieures, mémoire inférieure à celle des pairs, une visite ou plus du médecin de famille au cours du dernier mois, et la prise de quatre médicaments ou plus. L'inactivité physique et les problèmes sérieux des pieds sont d'autres facteurs faisant l'objet d'un certain soutien pour l'inclusion dans une brève évaluation des risques89.

En raison de la nature multifactorielle des chutes, une évaluation d'un seul facteur ne permet pas d'identifier les personnes présentant des risques de chute90.

Une évaluation clinique exhaustive des risques

Une évaluation clinique exhaustive des risques comprend généralement les éléments suivants :

  • l'examen de l'historique et des circonstances des chutes; et
  • l'évaluation de la démarche, de l'équilibre, de la mobilité et de la faiblesse musculaire, du risque d'ostéoporose, de la capacité fonctionnelle perçue et de la peur de tomber, des troubles visuels et des effets des appareils correcteurs de la vue, de l'incontinence urinaire, des dangers au domicile, un examen cardiovasculaire et un examen de la prise de médicaments91.

La directive de l'American Geriatrics Society conseille que l'évaluation devrait être effectuée par un clinicien ayant les compétences et l'expérience appropriées. En plus des facteurs ci-dessus, la directive recommande l'inclusion de facteurs liés aux problèmes de santé aigus et chroniques; au fonctionnement des articulations des extrémités inférieures et des fonctions neurologiques de base.

Les interventions multifactorielles

Le rapport Rand, les examens Cochrane et le Guide FPT des meilleures pratiques ont tous conclu qu'il existait des preuves extrêmement convaincantes pour soutenir l'utilisation d'approches multidisciplinaires, multifactorielles et d'approches de santé et environnementales pour la prévention des chutes. Une approche exhaustive de prévention des chutes chez les aînés comprend de façon typique une combinaison d'évaluations et d'interventions telles que des programmes d'exercice, des modifications comportementales, un examen et une modification des médicaments, le traitement des états pathologiques concomitants, l'apport d'appareils fonctionnels et protecteurs, des modifications environnementales et l'éducation.

Les résultats soutiennent l'approche multifactorielle basée sur la population

« Malgré les limitations des études d'évaluation examinées, elles font rapport de façon constante et pour tous les programmes d'une diminution des blessures dues aux chutes, ce qui vient appuyer la thèse préliminaire voulant qu'une approche de prévention des blessures liées aux chutes basée sur la population est efficace et peut server d'assise aux pratiques de santé publique. » [Traduction]

Source: Population-based interventions for the
prevention of fall-related injuries in older persons
(Review),
The Cochrane Collaboration, 2005

D'excellents modèles d'interventions multifactorielles ont été développés au Canada et ailleurs, bien que peu d'entre eux aient été testés de façon empirique.

  • Une étude effectuée à Edmonton a montré des promesses dans la réduction des chutes en utilisant une approche multi-factorielle orientée sur les aspects environnementaux et comportementaux/cognitifs. La population cible était relativement en bonne santé et mobile, composée d'adultes âgés vivant dans la collectivité. Les aînés qui ont terminé le programme ont montré des réductions significatives dans huit des neuf facteurs de risque traités dans le programme. Au cours de la période de suivi de quatre mois, la proportion d'aînés ayant subi une chute était inférieure dans le groupe de traitement (17 %) par rapport au groupe témoin (35 %). De plus, une proportion significativement inférieure (20 %) de membres du groupe de traitement, ayant rapporté une chute l'année précédant le programme, a subi une chute durant la période de suivi en comparaison de personnes similaires du groupe témoin (35 %)92.

  • Une étude dans laquelle des infirmières et infirmiers et un physiothérapeute ont été formés pour effectuer des évaluations exhaustives et trois mois d'interventions centrées a eu pour résultat une réduction du nombre de personnes subissant des chutes et une réduction des chutes totales en comparaison du groupe témoin93.

Les programmes d'exercice

Les preuves deviennent de plus en plus probantes à propos des effets positifs de l'exercice physique sur la réduction des chutes et des blessures connexes. L'exercice physique peut améliorer l'équilibre, la mobilité et le délai de réaction. Il peut augmenter la densité minérale osseuse des femmes post-ménopausiques et des personnes âgées de plus de 70 ans. Le rapport Rand a conclu que les interventions d'exercice physique réduisaient le risque de chute de 15 % et le nombre de chutes de 22 %. Les programmes de prévention des chutes comprennent typiquement des exercices d'endurance cardiovasculaire, des exercices musculaires, des exercices de flexibilité et d'amélioration de l'équilibre. Les travaux de recherche soutiennent l'activité générale comme la marche en plein air ou dans des centres commerciaux, la pratique de la bicyclette, les exercices aérobiques doux et d'autres activités d'endurance, ainsi que des régimes spécifiques axés sur l'équilibre, la force ou la souplesse94.

Les programmes spécifiques d'exercice sont associés à une réduction des chutes et des blessures. Dans l'ensemble, l'Examen Cochrane a conclu que les résultats de trois essais cliniques contrôlés et randomisés ont prouvé que les chutes pouvaient être réduites par des programmes prescrits individuellement comprenant des exercices musculaires et de réadaptation de l'équilibre. Le Tai Chi en groupe ressort comme étant particulièrement efficace95.

Un autre examen a rapporté qu'un programme de 10 à 12 semaines d'exercices doux, axés sur l'équilibre, la force musculaire et la souplesse, produisait une tendance vers une réduction des chutes multiples chez les patients ayant une bonne observance. L'examen a également rapporté les bénéfices d'un programme d'exercice d'une durée de 80 minutes, de visites de suivi et d'encouragements par téléphone. Les participants rapportaient moins de chutes que les personnes du groupe témoin. Un programme d'exercice, combinant des exercices musculaires et d'endurance trois jours par semaine pendant six mois a entraîné une réduction de près de la moitié du risque de chute en comparaison des exercices axés uniquement sur la force musculaire ou l'endurance96.

Les études sur les bénéfices de la marche ont montré des résultats mixtes. La Nurses' Health Study a conclu que la marche pouvait être préventive chez les 61 200 femmes étudiées97. Cependant, un chercheur a rapporté une augmentation des chutes provenant « de la marche énergique chez des femmes post-ménopausiques »98. Dans l'ensemble, les auteurs du rapport Rand ont conclu que les données démontraient clairement les avantages de l'exercice physique en général, mais ne pouvaient donner de recommandations certaines concernant les exercices particuliers pour la prévention des chutes99.

La gestion clinique des maladies chroniques et aiguës

Parmi les maladies chroniques fréquemment impliquées dans les risques de chute, on peut mentionner l'arthrite, la maladie de Parkinson, les accidents cérébrovasculaires, l'incontinence urinaire, les chutes soudaines de la pression artérielle lors du lever et les états cardiovasculaires, dont les arythmies. Malheureusement, l'augmentation du risque de chute associée aux maladies chroniques peut être combinée à des risques supplémentaires liés aux effets secondaires des médicaments utilisés pour traiter ces états pathologiques. De façon similaire, les médicaments utilisés pour traiter les troubles du sommeil et les maladies aiguës peuvent entraîner une augmentation du risque de chute.

L'examen et la modification des médicaments

Des suggestions concernant l'amélioration de la gestion de la prise de médicaments ont été faites par diverses sources. Une directive australienne a rapporté que des programmes visant la réduction de l'utilisation des sédatifs et des tranquillisants avaient entraîné une réduction des fractures de la hanche dans les maisons de soins infirmiers100. Les suggestions sont les suivantes :

  • utiliser la dose efficace la plus faible possible de médicament pour des symptômes spécifiques;
  • recommander vivement une supervision et l'utilisation de systèmes d'aide à la marche pendant la prise de ces médicaments;
  • réduire l'utilisation chronique des médicaments;
  • limiter l'utilisation de médicaments multiples; et
  • effectuer des examens réguliers de l'ensemble des médicaments pris par les patients avec un axe sur la réduction progressive de ceux qui ne sont pas absolument nécessaires.

L'utilisation d'un traitement hormonal substitutif (THS) pour les femmes post-ménopausiques est controversée. Certaines études ont montré que les fractures du poignet et de la hanche peuvent être réduites avec ce traitement et que la perte osseuse peut être prévenue pour une durée pouvant aller jusqu'à 15 ans, avec une réduction du risque de fracture pouvant aller jusqu'à 50 %. Cependant, d'autres risques associés au THS doivent être étudiés plus en détail avant que des décisions informées puissent être prises sur son efficacité dans la prévention des fractures. Même avec la recherche complémentaire, les décisions sur l'utilisation du THS doivent être prises en se basant sur le profil de risque des femmes mêmes. D'autres médicaments rehaussant la masse osseuse ont été prouvés utiles dans la réduction des fractures des vertèbres et de la hanche. Ils comprennent des biophosphonates (étidronate, alendronate, pamidronate) et des modulateurs sélectifs des récepteurs d'oestrogène (raloxifène)101.

Le Rapport du directeur de la santé provinciale (Health Officer's Report) de la Colombie-Britannique met en lumière le fait que les pharmaciens doivent communiquer clairement à la fois avec les patients et les médecins à propos de l'interaction des médicaments et des chutes. Ce rapport recommande également que les pharmaciens fassent la promotion de l'utilisation des appareils fonctionnels comme les protecteurs de hanche et les appareils d'aide à la marche, qu'ils appliquent des étiquettes spéciales sur les médicaments connus pour augmenter les risques de chute et qu'ils s'assurent que les modes d'emploi des médicaments sont imprimés en gros caractères et qu'ils puissent être compris facilement par les clients102. Les approches non pharmaceutiques sont aussi à considérer, y inclus le massage et la chiropratie.

Correction de la vue

Bien que les problèmes de vue soient des risques connus de chute, il n'existe pas encore de résultats et de preuves de recherche démontrant que le traitement des problèmes de vue peut prévenir les chutes. Cependant, de nombreux problèmes de vue peuvent être corrigés avec un examen approprié et des lentilles de correction. Les lentilles progressives peuvent donner une vision de meilleure qualité de l'environnement. Cependant, il n'est pas recommandé que les aînés passent de lentilles bifocales à des lentilles progressives ou vice-versa103.

Les opticiens peuvent prévenir les aînés qu'il faut du temps pour s'adapter à de nouvelles lentilles, particulièrement les lentilles multifocales et que durant cette période d'adaptation, ils peuvent présenter un risque plus élevé de chute ou de blessure connexe, particulièrement, dans les escaliers. On peut suggérer aux aînés, par exemple, de s'assurer que leur environnement est bien éclairé et en ordre, d'éviter les couleurs neutres et de se rappeler d'enlever leurs lunettes de lecture lorsqu'ils se déplacent104. Certains aînés peuvent être réticents à subir un examen régulier des yeux et à acheter des lentilles de correction appropriées en raison des coûts.

Les appareils fonctionnels et autres équipements de protection

Les appareils fonctionnels et de protection comme les cannes, les ambulateurs, les poteaux de sécurité ou les barres d'appui de salle de bains sont souvent recommandés pour réduire les risques de chute, bien que l'on manque de recherche empirique pour prouver leur efficacité. Bien qu'il n'existe pas de preuve claire pour affirmer que les appareils fonctionnels provoquent ou préviennent les chutes, leur utilisation peut jouer un rôle important dans l'amélioration de la confiance et de la mobilité des aînés et dans l'encouragement à l'indépendance105. Un examen récent de la littérature mettant en lumière les demandes et les problèmes associés aux systèmes d'aide à la mobilité suggère qu'il faut peut-être être plus attentif dans les prescriptions des systèmes d'aide à la mobilité et mieux éduquer à l'utilisation sécuritaire des appareils prescrits106. Des systèmes plus sûrs d'aide à la mobilité sont au stade du développement, comme des systèmes novateurs de rampe conçus pour promouvoir l'utilisation sécuritaire des escaliers par les aînés ainsi que de nouveaux types de chaussures conçues pour améliorer l'équilibre en facilitant la sensation de pression allant de la semelle au pied107.

En 2003, l'Association canadienne des ergothérapeutes a demandé que « les Canadiennes et les Canadiens soient informés des avantages des technologies d'aide pour favoriser l'indépendance et la santé, afin de faciliter leur utilisation et leur acceptation sociale ». [traduction]

Source : Position statement: Assistivetechnology
and occupational therapy,

Association canadienne des ergothérapeutes, 2003.

Un projet national de l'Initiative pour la prévention des chutes de Santé Canada/Anciens Combattants Canada a permis d'organiser des groupes de discussion avec des aînés, des fournisseurs de services et des représentants de l'industrie des appareils fonctionnels. On a pu conclure que pour de nombreux aînés, les appareils fonctionnels, en particulier les systèmes d'aide à la mobilité, peuvent être perçus comme causes de discrimination et symboles du vieillissement et du déclin inévitable. Ces perceptions peuvent influencer la décision d'une personne d'utiliser ou non ces appareils108. D'autres chercheurs ont identifié des facteurs associés à l'utilisation des équipements adaptés, ces facteurs comprenant l'âge, le sexe, le milieu de vie et l'état de santé. Leurs conclusions indiquent que l'utilisation d'appareils fonctionnels est supérieure pour les personnes présentant des conditions orthopédiques aiguës et des handicaps multiples. L'élément de prévision le plus puissant de l'utilisation d'un tel système est le besoin perçu par le client lui-même pour un tel appareil109.

Les protecteurs des hanches sont conçus pour réduire les fractures de la hanche lors des chutes. Ces vêtements de protection du type sous-vêtement sont dotés d'une enveloppe molle ou dure située sur la région de la hanche. Les chercheurs ont rapporté que ces vêtements pouvaient prévenir les fractures de la hanche jusqu'à un niveau de 80 % à 95 %. Un examen commandé par Santé Canada et le ministère des Anciens Combattants a rapporté que cinq études avaient démontré des réductions des fractures chez des personnes portant ces protecteurs. Cependant, une seule de ces études a produit des résultats statistiquement significatifs. Les auteurs font remarquer que les résultats non significatifs sont sans doute dus aux différents protecteurs des hanches étudiés, à la taille réduite des échantillons et à la mauvaise observance du port du système110. Une étude a rapporté que personne ne portait de protecteur des hanches au moment d'une chute ayant entraîné une fracture de la hanche111.

Les systèmes personnels d'appel d'urgence sont conçus pour permettre une assistance rapide à une personne ayant subi une chute et nécessitant de l'aide. Bien que ces systèmes ne préviennent pas les chutes, ils peuvent réduire la gravité des blessures et des complications en assurant un traitement rapide et une limitation des dommages. De nombreux établissements de soins sont dotés de ces systèmes installés sous forme de boutons d'alarme situés près du sol. Les systèmes d'alerte, informant les fournisseurs de soins qu'un patient est en mouvement, peuvent réduire également les chutes. Une alarme ambulatoire installée sur la cuisse des aînés hospitalisés a démontré en moins d'une année une réduction des chutes de 45 % dans un service général et de 33 % dans un service orthopédique112, mais ces résultats n'ont pas été répliqués et pourraient ne pas être applicables à une population vivant dans la collectivité.

L'alimentation et les suppléments alimentaires

Des résultats de recherche limités mais prometteurs existent à propos des bénéfices d'une modification de l'alimentation et des suppléments. Un examen a suggéré que l'augmentation du calcium alimentaire a l'effet le plus bénéfique pour l'amélioration de la masse osseuse chez les personnes présentant une faible densité osseuse et celles ayant un faible apport de calcium (< 400 mg/jour)113. Il est conseillé actuellement que des suppléments de calcium (1500 mg/jour) peuvent être utilisés avec de la vitamine D (800 UI/jour) ou d'autres agents actifs. En particulier, les aînés vivant dans les établissements de soins de longue durée peuvent bénéficier de ces traitements, car il a été démontré qu'ils souffraient de carence en vitamine D en raison du manque d'exposition au soleil114. Un examen plus récent a permis de combiner des données provenant de cinq essais cliniques randomisés et de conclure que 37 % des personnes des groupes témoins avaient subi une chute en comparaison de 30 % pour les personnes prenant de la vitamine D115.

Il est également raisonnable de supposer que les personnes trop maigres ou mal nourries pourraient présenter un risque supérieur de fracture en raison de la présence d'un tissu adipeux trop mince pour protéger les os lors d'une chute, d'une faiblesse musculaire ou d'un délai trop lent de réaction lors d'une chute. L'amélioration de la santé buccale et les prothèses dentaires peuvent également améliorer l'alimentation. Ces questions doivent être traitées au niveau de la population ainsi que sur une base individuelle.

L'évaluation et les modifications environnementales

En 2003, l'Association canadienne de santé publique a adopté une résolution pour encourager les modifications aux codes du bâtiment liés à la conception des escaliers et à l'installation de barres d'appui dans les baignoires.

Source : ACSP 2003 Résolutions et motions,
Résolution no 2, Les chutes des aînés comme
question prioritaire de santé publique.

L'environnement domiciliaire

La majeure partie des chutes se produit au domicile ou autour de celui-ci, et les travaux de recherche indiquent que des modifications au domicile peuvent être efficaces dans la réduction des risques de chute116. Une évaluation de l'environnement du domicile vise à améliorer l'accès, la sécurité et le rendement des activités de la vie quotidienne. L'Agence de santé publique du Canada a publié un document intitulé Chez soi en toute sécurité117, comprenant une liste de vérifications validées de sécurité au domicile, qui peut être remplie par les aînés eux-mêmes ou en collaboration avec des bénévoles ou des travailleurs de la santé. Parmi les modifications, il faut mentionner l'élimination du désordre et la sécurisation des câbles électriques et des tapis « volants » pour prévenir les trébuchements; l'installation de rampes et de rails de soutien; l'amélioration de l'éclairage et le maintien d'une lampe de poche fonctionnelle à proximité, et l'amélioration de la sécurité des cabines de douche et des baignoires.

Un aspect important de la réussite des modifications du domicile est de s'assurer que les dangers identifiés sont réellement corrigés. Les programmes qui non seulement identifient les dangers et les modifications nécessaires, mais qui permettent également la réalisation des modifications, sont mieux en mesure de réussir que les programmes qui laissent les modifications à la discrétion des aînés118. Des études ayant exploré l'observance des modifications du domicile recommandées par un ergothérapeute indiquent que des facteurs tels que le besoin perçu de la modification ou les dégradations de l'état cognitif ou fonctionnel sont liés à l'observance. La participation de l'aîné dans les prises de décision concernant les possibilités de modification peut également influencer l'observance119.

Les meilleures pratiques pour favoriser les modifications à l'environnement domiciliaire

  • Inclure les modifications au domicile dans les programmes de réduction des chutes.

  • Combiner les programmes de modification du domicile avec des stratégies telles que l'éducation et les conseils sur la réduction des risques (particulièrement sur les autres risques qui se combinent aux facteurs environnementaux pour augmenter les risques de chute.)

  • Inclure un élément d'aide financière ou physique, offrant ainsi une aide réelle à l'aîné pour faire des changements dans son domicile.

  • Compter sur les compétences et la formation des ergothérapeutes pour effectuer les évaluations du domicile, car ils sont formés pour évaluer à la fois l'environnement des aînés et leur capacité à fonctionner dans cet environnement.

  • Cibler les personnes qui sont prêtes à changer. La préparation et la volonté de changer sont souvent une fonction de l'expérience d'une chute récente ou d'une perception accrue des risques de chute.

Adapté de : Guide des meilleures pratiques pour la
prévention des chutes chez les aînés vivant dans la
communauté.
Ministres fédéral/provinciaux/
territoriaux responsables des aînés, 2001.

Dans les espaces publics

Il existe de nombreux facteurs contribuant aux chutes dans les espaces publics et il est difficile de déterminer l'impact d'une intervention spécifique. Cependant, un projet de la Colombie-Britannique intitulé STEPS (Study to Promote Environmental Safety - Étude pour promouvoir la sécurité environnementale) fournit un modèle intéressant de réduction des risques de chute dans l'environnement public. Ce projet a permis de rassembler des fonctionnaires, des aînés, des travailleurs de l'entretien municipal et des propriétaires d'édifice pour examiner et réduire les dangers de chute dans la collectivité. Une ligne téléphonique d'urgence permettait aux personnes de rapporter les chutes et les dangers, ces rapports conduisant ensuite à une réparation ou à l'identification du danger par pulvérisation de peinture jusqu'à ce que la réparation puisse être effectuée120. Des campagnes de sensibilisation du public ont également permis d'éduquer la collectivité à propos des dangers de chute : les travailleurs municipaux, les aînés, les fournisseurs de soins, les facteurs et messagers et autres professionnels sont bien situés pour observer et rapporter les dangers de chute nécessitant une réparation.

Les codes et les normes du bâtiment peuvent jouer un rôle important dans la prévention des chutes. Le Système canadien hospitalier d'information et de recherche en prévention des traumatismes (SCHIRPT) rapporte que les escaliers, les planchers et les marches sont plus souvent impliqués dans des chutes que tous les autres endroits ou articles ménagers121.

L'Association canadienne de normalisation a adopté plusieurs initiatives pour améliorer la sécurité des aînés. Une initiative clé a été le développement de la directive B659-01 : Conception adaptée aux besoins des personnes âgées, directive mettant en place des principes de développement de produits, de services et d'environnements pour une société vieillissante122.

L'éducation

Il est généralement accepté, qu'en tant qu'intervention indépendante, l'éducation ne produit pas de déclin mesurable des chutes ou des blessures. Cependant, les efforts d'éducation des particuliers, des aidants naturels, des professionnels et des collectivités entières sont recommandés comme compléments des autres interventions. L'éducation efficace peut prendre plusieurs formes dont des brochures, fiches d'information ou autres documents imprimés; des débats publics ou groupes de discussion; l'utilisation des médias; et des séances de counselling individuelles. On cherche aussi actuellement à déterminer si les particuliers peuvent apprendre à tomber de façon plus sécuritaire depuis qu'un expérimentateur a découvert que durant les chutes sur le côté, les particuliers peuvent apprendre à éviter l'impact sur la hanche en modifiant leur position avant l'impact au sol, réduisant ainsi le risque de fracture123.

L'éducation des fournisseurs de soins est une autre approche de la prévention. Un programme éducatif innovateur a permis à des travailleurs de la santé communautaire d'apprendre à effectuer des évaluations de premier niveau des clients âgés vivant dans la collectivité et recevant des services de soins au domicile. Après une session de formation d'une journée, les travailleurs ont pu utiliser des outils d'intervention et de dépistage des risques auprès de clients sélectionnés. Le nombre total de chutes rapporté a été réduit de 44 % et l'étude est maintenant répliquée sous la forme d'un essai contrôlé randomisé pour établir plus clairement la relation entre la réduction des chutes et les bénéfices du programme124.

Réduire la peur des chutes

Les programmes éducatifs existants sont conçus pour prévenir les chutes. Cependant, il existe également un besoin d'intervention après les chutes afin de prévenir les chutes subséquentes éventuelles et traiter la peur de tomber de nouveau125. De nombreux programmes de prévention des chutes ciblent la peur et l'auto-efficacité, mais on dispose de preuves limitées de leur efficacité dans la réduction de la peur. Une étude a rapporté un effet modeste à court terme dans l'amélioration de l'auto-efficacité et l'augmentation du niveau d'activité en utilisant une intervention cognitive et comportementale. Malgré tout, aucun effet ne subsistait après six mois126. Une intervention comprenant la participation à des classes de Tai Chi a entraîné une réduction de la peur de tomber et du risque de chute. L'utilisation de systèmes de protection des hanches ne semblait pas réduire la peur de tomber mais était associée à une meilleure auto-efficacité127.

Une étude récente a conclu qu'une intervention visant à réduire la peur de tomber en utilisant des sessions de groupe était surtout efficace pour les participants qui étaient moins physiquement diminués, ceux qui avaient une peur plus intense des chutes et ceux qui avaient une meilleure auto-efficacité pour apporter des changements128. Certains travaux suggèrent que les interventions auprès des personnes traitées pour des blessures liées à une chute devraient inclure des efforts pour réduire ou limiter le déclenchement de la peur de tomber. De même, un soutien social amélioré est nécessaire pour atténuer la peur129. Une stratégie d'intervention à facettes multiples a démontré des améliorations significatives dans la capacité des aînés vivant dans la collectivité à réduire les risques de chute130.

Les programmes semblent être plus efficaces lorsqu'ils ciblent des facteurs de risque environnementaux et individuels que les aînés peuvent contrôler et corriger et lorsque ces programmes sont intégrés à une gamme de services comprenant de la prévention et de la gestion, des soins de courte durée, de la réhabilitation, des soins à domicile et un soutien à long terme.

4.3 La sélection des approches appropriées en fonction de l'environnement

Les aînés dans la collectivité

Un grand nombre des approches de prévention des chutes décrites ci-dessus sont appropriées pour les environnements communautaires. Parmi les aînés vivant dans la collectivité, les interventions doivent être adaptées au niveau individuel de fragilité. En effet, les approches adaptées pour des aînés en santé et actifs seront différentes de celles destinées aux aînés plus fragiles. En 2004, Santé Canada a mené une enquête pour déterminer les attitudes des aînés par rapport aux chutes qui a permis de conclure que les aînés en santé et plus jeunes tendaient à se concentrer sur une alimentation saine et l'exercice physique et ne tendaient pas à percevoir ces activités comme des moyens de prévention des chutes. Les personnes plus fragiles et plus vulnérables tendaient à se concentrer sur le maintien de leur autonomie et bien qu'elles présentaient un risque supérieur de chute, elles avaient tendance à nier ces risques. Cependant, en leur donnant l'information appropriée par l'intermédiaire des professionnels compétents, un bon nombre de ces personnes changent leur environnement et leurs comportements pour réduire les risques. Les aînés fragiles qui dépendent d'autres personnes pour leurs soins, ainsi que leurs professionnels de santé et leurs aidants naturels sont souvent très préoccupés par le risque de chutes et peuvent bénéficier d'une éducation et d'interventions.

Les aînés résidant dans les institutions

Un certain nombre de chercheurs ont étudié des approches de prévention des chutes dans les établissements de soins de longue durée. On peut trouver ci-dessous deux exemples prometteurs :

  • Un essai contrôlé et randomisé effectué dans des maisons de soins infirmiers combinait des évaluations individualisées et des interventions. Les interventions portaient sur la sécurité environnementale et personnelle (amélioration de l'éclairage des pièces, des sols, des planchers et des chaussures, etc.), l'utilisation et l'entretien des chaises roulantes (évaluation par un ergothérapeute), l'examen des prescriptions de médicaments psychotropes (évaluation et recommandations de changements éventuels), les transferts et déplacements (évaluation et recommandations de changements éventuels) et des interventions au niveau des installations (par exemple, programmes éducatifs pour le personnel.) Les établissements ayant fait l'objet d'interventions présentaient une réduction de 19 % des chutes récurrentes par rapport aux établissements témoins et une réduction de 31 % du taux de chute avec blessure131.

  • Un projet financé par le Fonds pour la santé de la population de l'ASPC a permis de développer un outil de surveillance des chutes pour les établissements de soins de longue durée, en se basant sur un examen de la littérature sur la prévention des chutes pour les résidents de ces établissements. Ce projet a développé plusieurs protocoles de travail en collaboration pour enregistrer et mettre en oeuvre des stratégies de prévention efficaces des chutes et des blessures liées aux chutes ainsi que des outils de surveillance de l'efficacité132.

Les aînés hospitalisés

Un bon nombre de pratiques de prévention existent pour protéger les aînés hospitalisés contre les chutes, dont des activités éducatives pour le personnel infirmier et de soutien, des activités d'orientation des patients, des examens des chutes antérieures et des modifications de l'environnement. Parmi les modifications environnementales, on peut mentionner la réduction des obstacles dans les salles et les services de soins médicaux, l'ajout d'éclairage supplémentaire et de barres d'appui dans les salles de bains et l'abaissement de la hauteur des côtés de lit et de celle des lits. D'autres approches aux problèmes de transfert et de mobilité consistent en l'ajout d'activités ambulatoires et de physiothérapie au programme de soins, et de porter une attention particulière aux chaussures (par exemple, le port de chaussettes non glissantes.) De plus, les hôpitaux disposent de stratégies intégrées pour assister les patients ayant des troubles cognitifs en éduquant les membres des familles à gérer les patients confus, en tentant de réduire les sédatifs et en déplaçant les patients confus à proximité du personnel infirmier133.

Un examen systématique récent a rapporté un effet d'ensemble de réduction de 25 % du taux de chute dans les études qui examinaient des interventions prospectives en comparaison du risque de chute des témoins historiques. La réduction du temps de repos au lit est une intervention pratique qui a des conséquences dans la prévention d'un certain nombre de complications graves acquises en milieu hospitalier134.

4.4 La récupération après une chute

Cette section résume les preuves et résultats présentés dans les examens systématiques, directives et autres études concernant les bonnes pratiques pour la récupération après une chute et la prévention des chutes subséquentes.

Bien qu'il existe de l'information sur la gestion de blessures spécifiques, et particulièrement sur les fractures des hanches, le concept de récupération après une chute n'est pas bien reconnu. La gestion des blessures après une chute doit aller au-delà du traitement de la blessure subie pour comprendre une évaluation et une réduction du risque de chutes subséquentes (c'est-à-dire, un examen des médicaments utilisés, exercices physiques et éducation) et le maintien d'un style de vie sain non limité par la peur de tomber et d'être blessé de nouveau.

La récupération après une chute va bien au-delà du traitement des blessures physiques

« Les conséquences des chutes ne sont pas limitées aux traumatismes physiques, mais comprennent un retrait de la vie sociale, un traumatisme psychologique et une augmentation de la dépendance. » [traduction]

Source : Fall injuries among Saskatchewan seniors,
Saskatchewan Health, 2002.

Chez les aînés, certains facteurs entrent en jeu dans la récupération après une chute. Deux études ont rapporté que presque la moitié des personnes ayant subi une chute avaient nécessité de l'aide pour se lever et que 10 % des chutes avaient entraîné une période d'attente de plus d'une heure avant que l'aide arrive sur place135. En comparaison des personnes ayant subi une chute mais qui étaient en mesure de se relever, celles qui ne pouvaient pas se relever étaient plus susceptibles de souffrir d'un déclin prolongé des activités de la vie quotidienne. Une recommandation clé des études examinées est que les aînés se présentant pour des soins médicaux d'une blessure liée à une chute devraient être évalués en terme de risque de chute et qu'il faudrait traiter les facteurs de risque qui sont modifiables136.

Le délire est une complication inquiétante pour les aînés ayant subi une intervention chirurgicale pour une fracture de la hanche, celui-ci apparaissant chez 35 % à 65 % des patients et pouvant affecter négativement la réhabilitation137. La dépression est un autre facteur qui a des implications pour la pratique médicale car elle peut affecter la récupération après des blessures liées aux chutes. Une étude a permis de découvrir qu'une dépression antérieure à une blessure liée à une chute n'était pas un élément de prédiction d'un handicap après la blessure. Cependant, des symptômes de dépression présents deux mois après la blessure étaient liés à des taux significativement supérieurs de handicap à court et à long terme138. Clairement, la dépression peut être déclenchée par une blessure liée à une chute et peut affecter la récupération après les blessures.

Dans l'ensemble du Canada, les services destinés aux aînés ayant subi une chute varient, particulièrement en ce qui concerne la prévention des chutes futures. Les variations les plus importantes semblent concerner les soins et le soutien à domicile et les services de physiothérapie. Une étape à considérer est l'ajout de directives de prévention des chutes axées sur les preuves et résultats pour les professionnels qui traitent les patients se présentant avec des douleurs ou des blessures consécutives à une chute. Ces professionnels peuvent comprendre les médecins, le personnel infirmier, les travailleurs de la santé dans les établissements de soins de longue durée et les établissements communautaires, les physiothérapeutes, etc.

4.5 Les facteurs influençant l'observance des patients en prévention des chutes

Le besoin d'autonomie, de dignité et d'indépendance d'une personne ainsi que la tendance à réduire la gravité d'une chute ou à rejeter le blâme sur quelqu'un ou quelque chose peut causer des problèmes à la mise en place réussie d'initiatives de prévention des chutes. Une étude a permis d'avoir des entretiens avec des femmes âgées qui n'avaient pas suivi les recommandations de modification de leur environnement pour réduire le risque de chutes. L'étude a conclu que ces femmes prenaient les décisions concernant la mise en oeuvre de ces changements dans leur domicile en se basant sur leur propre perception du niveau de risque et en fonction de leurs expériences et connaissances personnelles, plutôt que de l'expérience et des connaissances de la personne recommandant les changements. Ces femmes tendaient à modifier leur comportement plutôt qu'à modifier leur environnement, choisissant ainsi d'accepter un certain niveau de risque environnemental139.

Les aînés peuvent surestimer leur niveau de condition physique

Une enquête ontarienne soutenue par l'Initiative pour la prévention des chutes de Santé Canada/Anciens Combattants Canada a permis de découvrir que de nombreux aînés surestimaient leur niveau de forme physique et sous-estimaient leur perte d'acuité visuelle. Ces aînés peuvent ne pas reconnaître les détériorations subtiles de leur force physique, de leur coordination et de leur équilibre, ce qui peut les rendre plus susceptibles à une chute. À cause du fait qu'ils ne pensent pas présenter un risque de chute, ils peuvent ne pas prendre les précautions nécessaires et être moins susceptibles de répondre aux campagnes de prévention des chutes.

Source : Awareness and attitudes toward fall prevention:
Final report on a survey on Ontario seniors.
Association pour la santé publique de l'Ontario, 2002.

Diverses attitudes ont été observées chez des personnes ayant subi une chute. Une étude a permis de découvrir quatre modèles de réponse : une absence généralisée d'inquiétude; une perception de la chute comme faisant partie du processus naturel du vieillissement; la perception de l'incident comme une occasion d'apprentissage; et le vécu de l'événement comme un événement dramatique modifiant la vie140. Les personnes qui avaient peu d'inquiétude ou aucune inquiétude tendaient à apporter une valeur supérieure au maintien de leur indépendance et n'apportaient que peu de changements pour réduire le risque de chute à l'avenir. Les personnes qui percevaient les chutes comme faisant partie du processus naturel de vieillissement ou comme une occasion d'apprentissage prenaient des mesures pour réduire les risques. Celles qui vivaient l'événement comme un drame développaient une peur plus importante de tomber à l'avenir et se percevaient elles-mêmes comme très vulnérables aux chutes. Le dernier groupe apportait les changements plus importants pour réduire le risque de chute mais avait un sens diminué de maîtrise personnelle. Par conséquent, il est important pour les cliniciens de déterminer les interprétations des patients par rapport aux chutes car celles-ci peuvent influencer la volonté de l'aîné à apporter des changements.

La communication avec les patients à propos des chutes et de la peur associée est importante, à la fois pour traiter l'état médical lié à la chute et prévenir les chutes futures. La communication doit prendre en compte la tendance des personnes à se dissocier de la probabilité d'une chute future, à placer le blâme sur quelqu'un ou quelque chose et à vouloir maintenir un sens de contrôle personnel et d'indépendance. Il faut bien saisir la complexité de la peur de tomber pour avoir une communication efficace et mettre l'accent sur la « peur saine » qui mène à une réduction des risques plutôt que sur la « peur malsaine » qui peut tendre à une augmentation du risque de chute.

Une étude portant sur dix femmes vivant dans une maison de soins infirmiers a permis d'examiner les expériences de ces femmes et leurs sentiments après la chute141. Les femmes décrivaient des sentiments de détresse, d'impuissance, d'inquiétude et de frustration en conséquence de la chute. La plupart d'entre elles ressentaient la peur de tomber à l'avenir et avaient choisi d'utiliser des appareils fonctionnels pour leur mobilité. Elles étaient réticentes à participer à des programmes organisés d'activités physiques, en partie à cause du fait qu'elles n'avaient jamais été engagées dans des activités physiques pour leur plaisir à un moment quelconque de leur vie, et aussi en raison de la peur de tomber de nouveau.

Clairement, les chutes sont un sujet très chargé d'émotions pour les aînés. Une étude examinant les perceptions des chutes a permis de découvrir que le langage utilisé par les aînés pour décrire les chutes évitait les connotations de vulnérabilité personnelle142. De façon similaire, il existait une tendance des aînés à de dissocier eux-mêmes de la probabilité d'une chute et de considérer les autres personnes comme présentant des risques supérieurs143. De nombreuses personnes étaient fortement motivées à sous-estimer leur susceptibilité personnelle144.

Cette tendance à éviter d'être perçu comme vulnérable peut être reliée aux besoins de contrôle personnel ou d'autonomie. Pour les aînés ayant subi une chute, il peut exister une peur résiduelle par rapport à la perte possible de liberté. Un chercheur a découvert que bien que des résidents plus âgés vivant dans des maisons de soins infirmiers tombaient régulièrement, un bon nombre de ces personnes étaient très surprises de la raison pour laquelle elles étaient incluses dans le groupe des « personnes tombant fréquemment », car elles ne se percevaient pas elles-mêmes comme tombant régulièrement. Les résidents décrivaient les chutes comme étant provoquées par un facteur extérieur. Les auteurs ont conclu que le mécanisme de défense visant à déplacer le blâme permettait aux personnes tombant fréquemment de continuer à se percevoir comme étant « intactes »145. Les interventions doivent tenir compte de la tendance des personnes tombant fréquemment à nier cette réalité, mais aussi tenir compte de leur besoin de préserver leur estime de soi et leur indépendance. Il est important de respecter le droit des aînés de vivre avec un certain niveau de risque.

Sommaire

Il existe des données convaincantes démontrant l'efficacité d'une approche qui combine l'évaluation clinique des risques et les interventions multidisciplinaires et multifactorielles sur les facteurs de santé et d'environnement afin de réduire les chutes chez les aînés.

Certaines interventions peuvent cibler les facteurs de risque de chute d'un aîné alors que d'autres s'adressent à l'ensemble de la population; ces approches sont complémentaires et adaptables à l'environnement domiciliaire ou institutionnel. Une approche exhaustive comprend typiquement une combinaison d'évaluations et d'interventions, par exemple, des programmes d'exercice, des changements comportementaux, l'examen et la modification éventuelle des traitements médicamenteux, le traitement des problèmes de santé contribuant aux facteurs de risque, les appareils fonctionnels et de protection, les modifications environnementales et l'éducation à la fois des aînés et des fournisseurs de soins. Chez les aînés qui ont déjà subi une blessure suite à une chute, il faut tenir compte du temps de récupération, de la peur de faire une chute et de l'attitude de l'aîné pour prévenir de nouvelles chutes. Les interventions doivent renforcer l'estime de soi et l'autonomie.

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Mise à jour : 2005-11-04
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