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Explorer les liens entre la santé mentale et l ’usage de substances

Aspects thérapeutiques

Les programmes de traitement de la maladie mentale et de l’abus de substances ont évolué différemment, même si ces derniers ont été offerts dans les hôpitaux psychiatriques ou généraux à un moment ou l’autre. Les deux domaines ont eu beau faire tous les efforts pour offrir le traitement le plus humain possible, l’opinion publique au sujet de l’usage de substances et des maladies mentales est restée ambivalente. Dans certains cas, une attitude punitive a influé sur l’action gouvernementale, ce qui s’est traduit par un désir de cacher aux yeux du public les problèmes de consommation de substances et de santé mentale. Aucun des deux domaines n’est parvenu à gagner suffisamment la sympathie de la population pour offrir les services de première qualité auxquels s’attendent les Canadiens et les Canadiennes lorsqu’il s’agit du traitement de problèmes de santé physique.

Traitement de l’abus de substances

Plusieurs questions encore en suspens ont entravé les progrès dans le domaine du traitement de la toxicomanie. La plus importante de ces questions est de savoir quand l’«usage» de substances devient l’«abus» et doit être traitée. Cet aspect est primordial, et peu de progrès seront possibles sur le plan thérapeutique si l’on continue de s’intéresser seulement aux formes les plus manifestes et les plus graves de l’usage de substances. La rhétorique selon laquelle presque tout usage de substances est abusif est également restrictive (ex.: société sans drogue). L’importance exagérée qu’on accorde à certaines drogues, ce qui renforce le mythe voulant que les drogues elles-mêmes soient le problème, est un autre exemple. Les drogues sont neutres, ni bonnes ni mauvaises en soi. L’usage qu’on en fait et les conséquences de cet usage constituent le problème. Croire qu’une personne est ou bien toxicomane ou ne l’est pas, sans moyen terme, pose également un problème. Un corollaire de cette croyance est qu’un toxicomane reste toxicomane jusqu’à la fin de ses jours. Cette étiquette «noir ou blanc» n’est pas accolée aux personnes obèses ou atteintes de dépression clinique. Nombre d’ex-fumeurs respirent à pleins poumons la fumée des autres sans recommencer à fumer.

Un corollaire de cette croyance est qu’un toxicomane reste toxicomane jusqu’à la fin de ses jours.

Aucune modalité de traitement en particulier n’est efficace pour tout le monde.
Néanmoins, peu de programmes de traitement offrent des choix, pour des raisons de philosophie, de formation du personnel et de budget. De plus,
ce qui constitue un traitement efficace est très discutable. Si l’abstinence est le seul objectif et la seule mesure de succès, peu de personnes réussiront en début de traitement. Pour cesser de fumer, par exemple, il faut essayer plusieurs fois.

Enfin, l’entraide joue un rôle primordial, mais où s’insère-t-elle dans un régime
thérapeutique? Est-elle nécessaire pour une guérison complète? Qui bénéficie le plus de la participation à une expérience d’entraide, et qui pourrait ne pas en bénéficier?

Il n’existe pas de réponses simples à ces questions ou problèmes, mais un débat constructif — qui da pas lieu à l’heure actuelle — devrait se faire dans la littérature et parmi les responsables de services.

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Il n’existe pas de réponses simples à ces questions ou problèmes, mais un débat constructif — qui da pas lieu à l ’heure actuelle — devrait se faire dans la littérature et parmi les responsables de services.

Nous soulevons plusieurs considérations et aspects nouveaux qui doivent être
incorporés dans le traitement actuel et futur de l’abus de substances:

  • Il est important de reconnaître que le traitement n’est que l’un des facteurs qui contribuent au résultat ou l’influencent. Les circonstances et les conditions psychosociales avant, pendant et après le traitement peuvent avoir une influence beaucoup plus marquée que le traitement comme tel. Minimiser les résultats négatifs ou appliquer la théorie de la réduction du tort représentent probablement des approches plus réalistes pour évaluer le traitement que simplement considérer si une personne continue de faire usage de drogue ou non.

  • Le domaine devrait faire savoir clairement que l’usage de substances se situe sur un continuum qui exige de multiples stratégies d’intervention. À un pôle, la promotion de comportements sains doit incorporer des approches éducationnelles et stratégiques. Question de rentabilité, beaucoup plus d’efforts devraient être déployés au pôle du continuum où les problèmes ont moins tendance à s’agglutiner, c’est-à-dire où le plus grand nombre de gens en bénéficieraient. Les problèmes chroniques et les incapacités les plus profondes devraient susciter les efforts les plus modestes, puisque ces cas représentent environ cinq pour cent de la population seulement et sont peut-être ceux qui répondent le moins bien à l’intervention. Pour cette population, plus de programmes de soutien sont plutôt nécessaires. Dans le cas des groupes les plus à risque par exemple, des stratégies de réduction du risque, comme des programmes d’échange de seringues, peuvent convenir le mieux. Cette exploration du traitement le long d’un continuum vaut pour l’alcoolisme surtout; son application aux autres toxicomanies est plus obscure.

  • Il faudrait s’efforcer davantage de servir efficacement des groupes de population particuliers. Il est important de savoir quelles interventions sont efficaces et lesquelles échouent chez telle ou telle population.

  • De nos jours, la plupart des clients des centres de traitement sont des polytoxicomanes. Toutes ces drogues devraient-elles être vues de la même manière? Faudrait-il, par exemple, encourager ou forcer les gens à cesser de fumer pendant qu’ils sont en cure pour d’autres drogues.

Haut de la pageTraitement des troubles mentaux

Le domaine de la santé mentale concentre ses efforts au pôle du continuum correspondant à la santé mentale minimale. En fait, le système de santé canadien dépense la plus grande partie de ses ressources pour les personnes les plus diminuées. Non seulement une telle approche dénote un manque de vision, mais elle est de surcroît inefficace. Voilà pourquoi toutes les provinces ont entrepris des réformes de la santé et délaissent le modèle institutionnel pour les systèmes communautaires. Ce changement de cap peut ou non inclure le domaine de la santé mentale.

En fait, Le système de santé canadien dépense la plus grande partie de ses ressources pour les personnes les plus diminuées.

La «honte» est au coeur de la problématique de la santé mentale. La maladie mentale indispose le grand public et passe pour une faiblesse de caractère (peut-être dangereuse). Nous ne sommes pas loin du Moyen Age encore pour ce qui est de comprendre le trouble mental ou la santé mentale. En conséquence, le groupe particulier de travailleurs de la santé qui soigne les problèmes de santé mentale se trouve souvent isolé, et porte lui-même des stigmates. Travailler auprès des personnes aux prises avec des troubles mentaux (ceux dont l’état est chronique en particulier) est une des spécialités médicales les moins «prestigieuses» et un des services communautaires les plus sous-financés.

Le diagnostic psychiatrique et les interventions psychothérapeutiques demeurent en marge des soins de santé en dépit des formidables avancées de notre compréhension de l’esprit et du cerveau. Parallèlement, il nous reste encore beaucoup à comprendre de la manière dont l’inné et l’acquis influencent le comportement humain.

Du point de vue thérapeutique, nous avons créé deux systèmes de santé: un système public pour les personnes aux prises avec des problèmes graves et chroniques, et un système privé pour les personnes moins diminuées. Le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-IV) sert de norme pour le classement des symptômes et permet une certaine uniformité dans le traitement des personnes qui présentent des profils semblables. Le manuel comprend de nombreuses catégories en relation avec la consommation d’alcool et de drogue. Les personnes qui présentent des symptômes moins graves ou mal définis allant du stress à la déprime existentielle sont généralement traitées par des psychothérapeutes et des conseillers de pratique privée dont la formation et l’expérience peuvent varier.

Haut de la pageTroubles mixtes

La part des problèmes de santé mentale prise en charge dans un programme de traitement de l’abus de substances, et vice versa, est importante. La consommation excessive d’alcool et de drogue cadre parfaitement avec de nombreux problèmes de santé mentale. L’anxiété, les troubles de l’humeur et même les épisodes psychotiques peuvent être mis en corrélation avec certaines expériences faisant intervenir les substances.

La notion de troubles mixtes évoque deux problèmes distincts chez une même personne. L’analyse séparée des problèmes de toxicomanie et de santé mentale ne doit pas faire perdre de vue qu’on a affaire à une seule personne. Celle-ci ne voit qu’un problème et ne consultera probablement que pour le plus urgent. Il incombe donc aux deux domaines d’aider la personne à comprendre comment un problème de santé est aggravé par l’usage de substances, ou vice versa.

L’analyse séparée des problèmes de toxicomanie et de santé mentale ne doit pas faire perdre de vue qu’on a affaire à une seule personne.

Un personnel qui n’a pas la formation pour traiter ou même reconnaître des troubles mixtes ne possède pas une formation suffisante. Les personnes dont la vie est marquée par la violence ont besoin d’une aide professionnelle différente de celles que requièrent les victimes de psychose, que la drogue soit en cause ou non. La capacité d’établir un double diagnostic est devenue un aspect crucial.

La question est controversée et exige l’attention des travailleurs de la santé dans les deux domaines. Comorbidité et double diagnostic ont beau être des notions courantes en psychiatrie, on ne les associe pas normalement à l’abus de substances et au trouble mental. Trouble mixte n’est pas une expression nouvelle non plus, mais peu de programmes bien établis s’intéressent au problème. La terminologie reste vague, et nombre de théories et de méthodologies de traitement en sont encore à un stade initial de développement. Malgré les nouveaux horizons qu’ouvrent des pionniers, le scepticisme demeure grand. Le domaine de la santé mentale et celui de l’usage de substances ont leur chasse gardée. Seul le temps permettra de régler certains des points en litige.

À l’heure actuelle, les personnes qui font une consommation excessive de substances sont reconnues comme des personnes à risque pour les problèmes de santé mentale, et elles peuvent présenter des symptômes, qu’il est possible de diagnostiquer, qui prédisposent à cette consommation excessive, la renforcent ou en découlent. De même, les personnes aux prises avec un trouble mental qu’il est possible de diagnostiquer ou même avec des problèmes de santé mentale plus bénins risquent d’éprouver, si elles n’en éprouvent pas déjà, des problèmes d’usage de substances. La question est de savoir qui sont ces personnes, quel est le rapport entre les deux problèmes, et qu’est-ce qui pourrait ou devrait être fait à ce sujet. Afin d’éviter que ces personnes ne viennent à présenter des problèmes chroniques d’alcoolisme ou de toxicomanie et de santé mentale, faudrait-il
expliquer le danger d’une consommation même modérée d’alcool sur fond de problèmes mentaux bénins? On a plus tendance à adopter ce point de vue dans les services de dés intoxication que dans les services de santé mentale; la question da jamais été abordée en relation avec les troubles mixtes.

Les personnes qui présentent des troubles bipolaires, qui ont une personnalité antisociale et qui sont schizophrènes sont fortement à risque pour les problèmes d’usage de substances, sous forme d’automédication ou par suite d’expériences de vie non satisfaisantes. Les symptômes de maladie mentale sont difficiles à démêler des symptômes d’intoxication, de dépendance et de sevrage, particulièrement dans le cas de l’alcool.

En raison de la prévalence très élevée de troubles mixtes parmi les personnes qui présentent des troubles psychiatriques reconnus, une attention particulière s’impose. Les spécialistes qui travaillent auprès de cette population ont besoin de temps pour vérifier des théories et des modalités de traitement, et pour entreprendre des essais cliniques qui permettront de déterminer les interventions optimales et les mesures de prévention possibles. Les travailleurs du domaine de l’abus de substances et ceux du domaine de la santé mentale peuvent coopérer à cet égard.

 

Mise à jour : 2004-10-01 Haut de la page