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Maladies chroniques au Canada


Volume 25 Numéro 2 2004

[Table des matières]

Agence de santé publique du Canada

Exposition professionnelle dans les industries chimiques et pétrochimiques et risque de cancer de la vessie dans quatre provinces de l'Ouest canadien


Anne-Marie Ugnat, Wei Luo, Robert Semenciw, Yang Mao et le Canadian Cancer Registries Epidemiology Research Group


Résumé

On a avancé l'hypothèse que des facteurs professionnels jouaient un rôle critique dans le cancer de la vessie. La présente étude castémoins en population vise à confirmer l'association entre certains facteurs de risque professionnels et non professionnels et le risque de cancer de la vessie au moyen de données recueillies dans quatre provinces de l'Ouest canadien. Des analyses de régression logistique inconditionnelle ont été réalisées à partir des données relatives à 549 cas de cancer de la vessie confirmés par des examens histologiques et à 1 099 témoins. Le risque de cancer de la vessie augmentait avec le nombre de paquets-années de cigarettes, le rapport des cotes (RC) se situant dans le plus haut quartile de 3,32 (intervalle de confiance [IC] à 95 %, 2,28-4,82). Une relation dose-effet a été établie entre le cancer de la vessie et le nombre de paquets-années de cigarettes (p < 0,0001). Une tendance positive a été observée avec la consommation de café chez les hommes (p < 0,0001), le risque étant le plus élevé dans la catégorie d'exposition la plus forte : les consommateurs de quatre tasses de café ou plus par jour avaient un RC de 1,77 (IC à 95 %, 1,11-2,82). L'augmentation du risque de cancer de la vessie était associée à une exposition professionnelle auto-déclarée à plusieurs produits chimiques : amiante (RC 1,69 [IC à 95 %, 1,07-2,65]); huile minérale, huile de coupe ou de lubrification (RC 1,64 [IC à 95 %, 1,06-2,55]); la benzidine (RC 2,20 [IC à 95 %, 1,00-4,87]). La fraction étiologique du risque (FER) a été estimée à 51 % pour l'usage de cigarettes, à 17 % pour la forte consommation de café, à 6 % pour l'exposition à l'amiante, à 10 % pour l'exposition à l'huile minérale, de coupe ou de lubrification et à 1 % pour l'exposition à la benzidine. Bien que les expositions auto-déclarées aux produits chimiques comportent d'importantes limites, les résultats évoquent une augmentation du risque pour plusieurs associations déjà signalées entre des agents ou industries chimiques et le risque de cancer de la vessie.

Mots clés : cancer de la vessie; profession

Renseignements de base

Le cancer de la vessie vient au quatrième rang des cancers les plus fréquemment diagnostiqués chez les hommes au Canada1. On estime que 3 700 nouveaux cas seront diagnostiqués en 2004, soit un taux annuel de 23 pour 100 000 hommes canadiens.

L'exposition environnementale à certains produits chimiques a été associée à une augmentation du risque du cancer de la vessie2-4. Dans les pays industrialisés, la cigarette a été reconnue comme le principal facteur de risque, étant à l'origine d'environ 50 % des cas de cancer de la vessie chez les hommes5. L'exposition professionnelle constitue le deuxième facteur de risque en importance6. De nombreux produits chimiques qui ont été évalués par le Centre international de recherche sur le cancer7 en raison du risque potentiel de cancer qu'ils présentent pour les humains proviennent des industries chimiques et pétrochimiques. On a avancé l'hypothèse que la plupart des produits chimiques cancérigènes altèrent les cellules urothéliales lorsqu'ils sont présents dans l'urine.

Le Système national de surveillance accrue du cancer (SNSAC), coordonné par Santé Canada, offrait un excellent moyen de confirmer l'association entre certains facteurs de risque professionnels et non professionnels et le risque de cancer de la vessie dans un vaste échantillon canadien prélevé dans une population. Puisque d'autres études ont montré que dans les pays industrialisés, le risque attribuable dans la population de cancer de la vessie associé à une exposition professionnelle est inférieur à 10 % chez les femmes8 alors qu'il atteint 25 % chez les hommes9, nous avons décidé de concentrer notre attention sur la population masculine canadienne.

Matériel et méthodologie

Sélection des cas et des témoins

Mis au point au milieu des années 90, le SNSAC a utilisé des questionnaires pour recueillir des données détaillées sur les facteurs de risque de 19 types de cancer dans un échantillon pancanadien de 20 755 patients dont le cancer venait d'être diagnostiqué et de 5 039 témoins dans la population. Il visait à étudier la relation entre les facteurs environnementaux et le risque de cancer10.

À partir des données du SNSAC, nous avons réuni tous les nouveaux cas de cancer de la vessie confirmés par des données histologiques (Classification internationale des maladies, neuvième révision, code C67) chez les hommes de 20 à 75 ans qui avaient été signalés entre 1994 et 1997 dans quatre provinces de l'Ouest canadien (Colombie-Britannique, Alberta, Saskatchewan et Manitoba). Notre étude a porté sur ces provinces parce que le SNSAC n'a pas recueilli de données sur le cancer de la vessie en Ontario, au Québec ou au Nouveau-Brunswick, et que les autres principales industries chimiques et pétrochimiques au Canada sont situées dans l'Ouest.

Nous avons utilisé des méthodes particulières pour chaque province et avons constitué des échantillons représentatifs de chacune d'entre elles pour regrouper les témoins dans la population répertoriés dans la base de données du SNSAC. À partir de ce regroupement, des groupes témoins ont été choisis dans divers groupes d'âge (groupes de cinq ans) suivant une distribution similaire à celle utilisée pour les cas de cancer de la vessie. En Colombie-Britannique, en Saskatchewan et au Manitoba, un échantillon aléatoire a été obtenu par l'entremise des régimes provinciaux d'assurance maladie, qui couvrent en général plus de 95 % des résidents de la province. Un système d'appel aléatoire a permis d'obtenir l'échantillon de témoins en Alberta.

Collecte des données

Dans le but de recueillir de l'information sur tous les antécédents résidentiels et professionnels des sujets et sur d'autres facteurs de risque de cancer de la vessie, des questionnaires à remplir par les répondants ont été envoyés et un suivi téléphonique a été effectué au besoin pour obtenir des clarifications. Le questionnaire a permis entre autres de recueillir des données démographiques, des données sur la situation socioéconomique, le mode de vie, le comportement, les habitudes alimentaires, l'activité physique et les antécédents professionnels. Dans l'ensemble, les taux de réponse dans les provinces de l'Ouest s'élevaient à 60 % pour les cas de cancer de la vessie chez les hommes et à 59 % chez les témoins.

Exposition professionnelle

Le questionnaire de collecte de données comportait des questions sur les antécédents professionnels. Pour chaque emploi occupé pendant au moins 12 mois, les répondants devaient fournir des détails sur le type d'industrie, leurs principales fonctions, le lieu de leur travail, le titre du poste, le régime de travail (temps plein, temps partiel ou saisonnier) et la durée d'emploi. Les sujets devaient également indiquer s'ils avaient déjà travaillé pendant plus d'un an avec l'une ou l'autre des 17 substances chimiques étudiées, ainsi que la durée totale de l'exposition. Les données sur l'exposition professionnelle ont été obtenues de deux façons.

  1. Comme seulement un petit nombre de sujets ont dit avoir été exposés aux 17 substances chimiques, toutes les variables de l'exposition professionnelle ont été traitées comme des variables dichotomiques : déjà exposé par opposition à jamais exposé. La durée de l'exposition professionnelle à des substances chimiques a été classée en quatre catégories : longue durée (20 ans ou plus), durée moyenne (de 10 à 19 ans), courte durée (de 1 à 9 ans) et aucune exposition.
  2. À partir du titre du poste, des fonctions et des domaines industriels indiqués sur le questionnaire, nous avons codé la profession selon la Classification type des professions (CTP) et la Classification type des industries établies par Statistique Canada11. Les trois groupes professionnels suivants ont été définis à l'aide des trois premiers chiffres de la CTP :
    • professions non liées aux produits chimiques (p. ex., travail de bureau, vente ou services)
    • professions liées aux produits chimiques, mais non dans les principales industries chimiques (p. ex., agriculture, exploitation minière)
    • professions dans l'une des trois principales industries chimiques (p. ex., métallurgie, fabrication de la pâte et du papier ou traitement des produits chimiques, du pétrole, du caoutchouc, du plastique et matières analogues).

Les années de travail dans ces industries ont été classées en quatre catégories : longue durée (20 ans ou plus), durée moyenne (de 10 à 19 ans), courte durée (de 1 à 9 ans) et aucune exposition.

Analyse statistique

Comme nous avions accès à des données sur un grand nombre de variables, nous avons adopté un processus de sélection fondé sur des associations biologiques et statistiques corroborées par les études publiées et l'analyse unidimensionnelle. Toutes les variables pour lesquelles il existait des différences statistiquement significatives entre les cas et les témoins dans l'analyse unidimensionnelle ont été incluses dans le modèle final d'analyse multidimensionnelle.

Des modèles de régression logistique multiple inconditionnelle (logiciel SAS)12 ont été employés pour estimer les rapports de cotes (RC) tout en tenant compte des facteurs possibles de confusion. Vu que des méthodes d'échantillonnage différentes avaient été utilisées dans chaque province, la province de résidence a été prise en compte dans l'analyse unidimensionnelle. Le modèle d'analyse multi-dimensionnelle incluait l'âge (20-54, 55-64, 65-74), les années d'exposition, la province de résidence, le niveau de scolarité, le nombre de paquets-années de cigarettes, la consommation de café et de thé.

Pour calculer la FER, nous avons eu recours à une méthode présentée par Bruzzi et coll.13, qui permet d'effectuer une estimation à partir des données des études castémoins. Les calculs tiennent compte du RC et de la distribution de l'exposition uniquement chez les cas, présumant que ceux-ci sont représentatifs de tous les cas dans la population. En plus de la FER totale, le risque attribuable sommaire pour chacun des multiples facteurs a été estimé tout en prenant en considération les autres facteurs de risque.

Résultats

En tout, 549 cas de cancer de la vessie chez les hommes et 1 099 témoins de sexe masculin ont été inclus dans l'étude. Le tableau 1 compare les cas et les témoins eu égard aux caractéristiques mentionnées dans les études publiées comme étant des facteurs de risque de cancer de la vessie. Les témoins étaient plus nombreux à avoir un niveau de scolarité supérieur que les cas. Le risque augmentait en fonction du nombre de paquets-années de cigarettes et de la consommation de café. Une relation dose-effet a été observée chez les hommes, le risque étant le plus élevé dans la catégorie d'exposition la plus forte : les personnes qui fumaient depuis au moins 30 années avaient un RC de 3,32 (IC à 95 %, 2,28-4,82 et celles qui buvaient au moins quatre tasses de café par jour avaient un RC de 1,77 (IC à 95 %, 1,11-2,82).

TABLEAU 2
Exposition à des substances chimiques et risque de cancer de la vessie chez les hommes, 1994-1997
  Nbre de cas exposés Nbre de témoins Rapport de cotes ajusté
Substance† n = 549 % n = 1,099 %
(IC à 95 %)‡
Amiante 84 15,3 122 11,1 1,69 (1,07-2,65)
Goudron de houille, suie, brai, créosote, asphalte 95 17,3 152 13,8 1,30 (0,89-1,92)
Huile minérale, de coupe ou de lubrification 141 25,7 209 19,0 1,64 (1,06-2,55)
Benzidine 14 2,6 15 1,4 2,20 (1,00-4,87)
Colorants 21 3,8 23 2,1 1,13 (0,43-2,96)
Gaz moutarde 8 1,5 5 0,5 3,05 (0,87-10,68)
Matériaux de soudage 145 26,4 238 21,7 1,11 (0,74-1,66)
Sels d'arsenic 8 1,5 13 1,2 0,94 (0,20-4,52)
Sels de chrome 8 1,5 20 1,8 1,03 (0,29-3,67)
Sels de cadmium 8 1,5 15 1,4 1,08 (0,43-2,70)
Huile d'isopropyle 16 2,9 20 1,8 1,31 (0,43-3,98)
Chlorure de vinyle 16 2,9 26 2,4 0,90 (0,34-2,38)
Pesticides 66 12,0 12,0 10,9 1,50 (0,89-2,53)
Herbicides 65 11,8 115 10,5 1,18 (0,66-2,12)
Sources de rayonnements 38 6,9 76 6,9 1,39 (0,75-2,56)
Poussière de bois 121 22,0 271 24,7 0,81 (0,55-1,21)
†  Déjà exposés pendant plus d'une année.
‡  Données ajustées pour tenir compte de la province, de l'âge, du nombre de paquets-années de cigarettes, du niveau de scolarité, des années d'exposition, de la consommation de café et de thé.
Remarque : Les paquets-années constituaient une variable continue, et la consommation de café était une variable catégorique.

Exposition professionnelle auto-déclarée aux produits chimiques

Le tableau 2 donne un aperçu des RC pour le cancer de la vessie d'après l'exposition professionnelle aux substances chimiques mentionnées expressément dans le questionnaire. Après correction pour tenir compte de la province de résidence, du nombre de paquets-années de cigarettes, de l'âge, du niveau de scolarité, des années d'exposition à la substance chimique, de la consommation de café et de la consommation de thé, nous avons constaté que les risques de cancer de la vessie étaient significativement élevés chez les sujets faisant état d'une exposition professionnelle à ces agents chimiques : amiante (RC = 1,69, IC à 95 %, 1,07-2,65); huile minérale, de coupe ou de lubrification (RC = 1,64, IC à 95 %, 1,06-2,55); et benzidine (RC = 2,20, IC à 95 %, 1,00-4,87). Un risque non significativement élevé a été observé chez les hommes qui déclaraient avoir été exposés aux substances chimiques suivantes : colorants (RC = 3,05, IC à 95 %, 0,87-10,68); pesticides (RC =1,50, IC à 95 %, 0,89-2,53); herbicides (RC = 1,18, IC à 95 %, 0,66-2,12); sources de rayonnements (RC = 1,39, IC à 95 %, 0,75-2,56); huile d'isopropyle (RC = 1,31, IC à 95 %, 0,43-3,98); asphalte et créosote (RC = 1,30, IC à 95 %, 0,89-1,92); et matériaux de soudage (RC = 1,11, IC à 95 %, 0,74-1,66).

Le tableau 3 présente les RC ajustés pour le cancer de la vessie chez les hommes en fonction de la durée d'exposition aux produits chimiques étudiés. Le risque de cancer de la vessie augmentait avec le nombre d'années d'exposition aux colorants. Les RC s'établissaient à 1,1 (IC à 95 %, 0,4-2,8) pour une exposition de 1 à 9 ans, à 3,4 (IC à 95 %, 0,6-20,9) pour une exposition de 10 à 19 ans et à 4,7 (IC à 95 %, 0,9-23,8) pour une exposition de 20 ans ou plus. Les tests de tendance étaient significatifs (p = 0,03).

Industries chimiques regroupées selon la CTP

Il ressort de l'examen de l'exposition professionnelle selon les groupes dans la CTP (tableau 4) que, comparativement aux hommes qui ont occupé uniquement des emplois non liés aux produits chimiques, ceux qui avaient déjà exercé un travail lié aux produits chimiques (mais pas dans les principales industries chimiques) affichaient un risque de cancer de la vessie non significativement accru (RC = 1,20, IC à 95 %, 0,90-1,60). Les hommes qui avaient déjà travaillé dans les industries de la métallurgie ou de la pâte et du papier présentaient un risque non significativement accru de cancer de la vessie : les RC s'élevaient à 1,30 (IC à 95 %, 0,55-3,30) et à 2,33 (IC à 95 %, 0,75-7,25), respectivement. Les hommes qui avaient déjà travaillé dans l'une des principales industries chimiques (métallurgie, fabrication de la pâte et du papier ou pétrole, caoutchouc ou plastique) couraient également un risque non significativement accru de cancer de la vessie (RC = 1,27, IC à 95 %, 0,65-2,47). Des résultats similaires ont été obtenus lorsque nous avons tenu compte uniquement de la province de résidence et de l'âge.

Fraction étiologique du risque (FER)

Une estimation de la FER est présentée au tableau 5. Dans l'ensemble, la FER s'établissait à 51 % pour la consommation de tabac, à 33 % pour la consommation de café et à 16 % pour l'exposition professionnelle à l'amiante, à l'huile minérale, de coupe ou de lubrification et à la benzidine. Ces trois facteurs combinés expliquaient plus de 70 % des cas de cancer de la vessie dans cette population. La FER la plus élevée a été observée chez les sujets dont la consommation de tabac était de 30 paquets-années ou plus (26 %). La consommation de quatre tasses de café ou plus a été mise en cause dans 17 % des cas de cancer de la vessie. Le risque attribuable à la profession variait de 1,4 à 10,1 %.

Analyse

Dans la présente étude castémoins, nous avons observé une association significative entre le risque de cancer de la vessie et l'exposi tion professionnelle des Canadiens de sexe masculin à certains produits chimiques : huile minérale, de coupe ou de lubrification, amiante et benzidine. Selon les estimations, 16 % des cas de cancer de la vessie auraient pu avoir été prévenus par l'élimination de l'exposition professionnelle à ces produits chimiques. Comparativement aux hommes qui n'avaient jamais occupé d'emplois liés aux produits chimiques, ceux qui avaient déjà travaillé dans les industries de la métallurgie ou de la pâte et du papier ou dans l'une ou l'autre des principales industries chimiques (métallurgie, fabrication de la pâte et du papier, traitement du pétrole) couraient un risque non significativement accru de cancer de la vessie. Nous avons également confirmé que l'usage du tabac et la consommation de café étaient significativement liés à une augmentation du risque de cancer de la vessie. La proportion des cas de cancer de la vessie attribuable à l'usage de tabac et à la forte consommation de café atteignait 51 % et 17 %, respectivement.

Une recension du CIRC a conclu que les études effectuées chez les humains fournissaient suffisamment de données montrant que les huiles minérales (contenant divers additifs et impuretés) qui ont été utilisées dans certaines professions comme le renvidage, l'usinage de métaux et le traitement de la jute sont cancérigènes pour les humains14. Plusieurs études cas-témoins sur le cancer de la vessie ont fait état d'une association entre le risque de cancer de la vessie et la profession d'usineur, les RC variant entre 1,5 et 5,015. Dans notre étude, nous avons également noté une augmentation du risque de cancer de la vessie chez les hommes exposés dans leur travail à de l'huile minérale, de coupe ou de lubrification. On devrait envisager l'adoption de stratégies de prévention visant à réduire les effets de l'exposition professionnelle à ce type d'huiles. La Occupational Safety and Health Administration du US Department of Labour a établi deux limites d'exposition qui peuvent s'appliquer aux huiles de coupe. Les employés ne devraient pas être exposés à plus de 5 mg/m3 de dispersion d'huile minérale pendant une durée moyenne pondérée dans le temps (TWA) de huit heures, ni à plus de 15 mg/m3 de toute particule pendant une TWA de huit heures16.

On sait depuis longtemps que le cancer de la vessie est lié à l'exposition professionnelle dans les industries qui produisent des colorants17. Comme d'autres études 17-19, la présente étude a mis en évidence une relation dose-effet entre le nombre d'années d'exposition à des colorants et le risque de cancer de la vessie chez les hommes. Il est bien établi que la benzidine fait courir un tel risque20,21, et notre étude en a apporté une autre confirmation.

Les résultats des études épidémiologiques sur le cancer de la vessie et l'amiante sont contradictoires. Silverman et ses collègues22 ont laissé entendre que les travailleurs de l'amiante et les isolateurs peuvent courir un risque accru de cancer de la vessie, alors que d'autres chercheurs n'ont décelé aucune association23,24. Dans notre étude, le risque plus élevé de cancer de la vessie observé chez les hommes exposés à l'amiante pourrait s'expliquer par le fait que les hommes exposés à l'amiante risquaient grandement d'avoir aussi été exposés à de l'huile minérale, de coupe ou de lubrification (plus de la moitié des hommes exposés à l'amiante [118/206] avaient également été exposés à de l'huile de lubrification).

Les FER pour l'exposition professionnelle s'élevaient, selon les estimations, à 10 % pour huile minérale, de coupe ou de lubrification, à 6 % pour l'amiante et à 1 % pour la benzidine. La FER pour l'huile minérale, de coupe ou de lubrification est beaucoup plus élevée que pour l'amiante et la benzidine. Bien que le RC pour l'huile minérale, de coupe ou de lubrification soit modéré (1,64), les travailleurs sont plus souvent exposés à cette substance qu'à l'amiante et à la benzidine. Nous avons examiné la CTP des personnes qui ont déclaré avoir été exposées dans leur travail à de l'huile minérale, de coupe ou de lubrification.

TABLEAU 4
Professions et risque de cancer de la vessie chez les hommes au Canada, 1994-1997
Groupes de la CTPs* Nbre de cas Nbre de témoins Rapport de cotes ajusté (IC à 95 %)† Rapport de cotes ajusté (IC à 95 %)‡
n = 549 % n = 1 099 %
Toutes les professions liées aux produits chimiques 114 20,8 287 26,1 1,00 1,00
Ont déjà travaillé avec des produits chimiques mais pas dans les principales industries chimiques 395 71,9 725 66,0 1,37 (1,06-1,77) 1,20 (0,90-1,60)
Ont déjà travaillé dans les industries de traitement des métaux 9 1,6 18 1,6 1,22 (0,53-2,83) 1,30 (0,55-3,30)
Ont déjà travaillé dans les industries de la pâte et du papier 7 1,3 7 0,6 2,59 (0,86-7,79) 2,33 (0,75-7,25)
Ont déjà travaillé dans les industries du pétrole 6 1,1 9 0,8 1,48 (0,51-4,34) 0,99 (0,28-3,53)
Ont déjà travaillé dans l'une des principales industries chimiques (traitement des métaux, fabrication de la pâte et du papier ou traitement du pétrole, etc,) 22 4,0 34 3,1 1,56 (0,86-2,81) 1,27 (0,65-2,47)
CTP = Classification type des professions (de Statistique Canada)
*   Ont déjà occupé un emploi pendant plus d'un an.
†   Données ajustées pour tenir compte de la province de résidence et de l'âge.
‡   Données ajustées pour tenir compte de la province, de l'âge, du nombre de paquets-années de cigarettes, du niveau de scolarité, des années d'exposition, de la consommation de café et de thé.


TABLEAU 5
Risques relatifs et attribuables pour les cinq facteurs de risque de cancer de la vessie
Facteur de risque Code utilisé dans le modèle Nbre de cas Nbre de témoins Risque relatif (IC à 95 %) FER %+
Paquets-années de cigarettes 51,2
0 0 62 300 1  
1 - < 10 1 59 234 1,15 (0,76-1,74)* 1,4
10 - < 20 2 113 201 2,23 (1,53-3,25)* 11,6
20 - < 30 3 104 136 2,67 (1,78-4,00)* 12
> 30 4 202 205 3,32 (2,28-4,82)* 26,2
Consommation de café 32,6
< 1 tasse par mois 0 34 142 1  
1 tasse par mois et 1 tasse par jour 1 89 263 1,13 (0,69-1,83)† 1,8
2-3 tasses par jour 2 214 400 1,56 (0,99-2,46)† 14,2
> 4 tasses par jour 3 210 282 1,77 (1,11-2,82)† 16,5
Produit chimique 15,7
Amiante, aucune exposition 0 465 977 1  
Amiante, exposition 1 84 122 1,69 (1,07-2,65)‡ 6,3
Huile minérale, de coupe ou de lubrification, aucune exposition 0 408 890 1  
Huile minérale, de coupe ou de lubrification, exposition 1 141 209 1,64 (1,06-2,55)‡ 10,1
Benzidine, aucune exposition 0 535 1 084 1  
Benzidine, exposition 1 14 15 2,20 (1,00-4,87)‡ 1,4
Tous les facteurs de risque inclus dans ce tableau 71,3
*   Données ajustées pour tenir compte de l'âge, de la province, du niveau de scolarité, de la consommation de café et de thé.
†   Données ajustées pour tenir compte de l'âge, de la province, du niveau de scolarité et du nombre de paquets-années de cigarettes.
‡   Données ajustées pour tenir compte de l'âge, de la province, du niveau de scolarité, du nombre de paquets-années de cigarettes et de la consommation de café et de thé.
+ Données ajustées pour tenir compte des facteurs de risque inclus dans le présent tableau.

Les résultats ont montré que 26 % des hommes occupaient des emplois liés à l'agriculture, à la pêche, à la foresterie, à l'exploitation minière et à l'exploitation des carrières; 63 % des hommes avaient des emplois liés à la transformation, à l'usinage, à la fabrication de produits, aux métiers de la construction, à la conduite de matériel de transport, à la manutention des matériaux et à l'utilisation d'équipement.

Dans notre étude, des augmentations statistiquement significatives par un facteur de deux ou de trois ont été observées dans les RC pour tous les niveaux de consommation de tabac se situant audessus de 10 paquets-années. Une relation dose-effet a été établie entre le cancer de la vessie et le nombre de paquets-années. De telles associations sont bien documentées dans la littérature25-27. Nos données militent en faveur d'une association entre la consommation de café et le risque de cancer de la vessie, ce qui concorde avec d'autres études 28,29. Pour écarter toute possibilité d'effet résiduel de l'usage du tabac, la consommation de café et le risque de cancer de la vessie ont également été examinés chez les non-fumeurs. Un excès de risque statistiquement significatif a été constamment relevé chez les sujets ayant bu plus de quatre tasses de café par jour (RC = 6,17, [IC à 95 %, 1,73-21,96]). Cependant, une revue systématique récente de la littérature a laissé entendre que la consommation de café et celle de thé n'étaient probablement pas associées au cancer de la vessie30. La consommation de café a été abondamment étudiée comme facteur de risque potentiel, mais les associations observées de façon inconstante semblent indiquer que la relation est soit plutôt faible, non causale ou qu'elle dépend de façon complexe de facteurs non mesurés31. Les estimations du risque attribuable révélaient que 33 % des cas de cancer de la vessie chez les hommes auraient pus être prévenus par l'élimination de la consommation de café. Une étude antérieure effectuée par D'Avanzo et coll. 32 a montré que la consommation de café était potentiellement responsable de 23 % des cancers de la vessie. La possibilité d'un biais de rappel ne peut être écartée dans notre étude.

Le principal avantage de la présente étude est qu'elle est basée dans une population. Nous avons pu examiner le risque de cancer de la vessie selon l'exposition auto-déclarée à certaines substances chimiques au travail et selon le groupe professionnel d'après la CTP. Nous avons également tenu compte des principaux facteurs de risque de cancer de la vessie.

Les taux moyens de réponse des cas de cancer de la vessie et des témoins étaient faibles (60 % et 59 %, respectivement). Comme nous n'avions pas accès aux données sur l'exposition des non-répondants, nous n'avons pu examiner s'il existait ou non des différences systématiques entre les répondants et les non-répondants pour ce qui est de l'exposition professionnelle. Le faible taux de réponse peut introduire un biais potentiel lié à la non-réponse.

Cette étude n'a porté que sur les emplois occupés pendant plus d'une année, mais cela peut poser un problème important dans le cas de ceux qui étaient des employés saisonniers (et étaient exposés). Il reste que la sous-estimation de l'exposition serait probablement la même pour les cas et les témoins, entraînant un biais du RC approchant 1.

Nous avons mis au point nos méthodes d'évaluation de l'exposition sans validation par des pairs. Puisque ces méthodes n'ont jamais été validées, la possibilité d'erreur de classification ne pouvait être mesurée. Les données sur l'exposition professionnelle aux produits chimiques était fondées uniquement sur le rappel par les sujets de contacts avec des substances chimiques choisies a priori et énumérées dans le questionnaire. Nous n'avons pas tenté d'obtenir tous les titres de postes occupés par les sujets pour établir un lien avec les profils d'exposition locaux. Toutefois, nous avons examiné la CTP pour l'exposition professionnelle auto-déclarée à l'amiante, à l'huile minérale, de coupe ou de lubrification ou à la benzidine. Les résultats montrent que plus de 90 % de ces répondants avaient déjà travaillé dans l'industrie chimique. Il est donc peu probable que cette méthode ait introduit un biais d'information important, il est fort probable qu'elle ait entraîné une erreur de classification de l'exposition et fait en sorte que des associations véritables n'ont pas été relevées ou ont été sous-estimées. L'exposition professionnelle auto-déclarée à des produits chimiques pourrait également introduire un biais de rappel vu que les personnes qui ont subi des effets délétères tendent à s'en souvenir et signalent leurs expositions antérieures différemment de celles qui n'ont pas éprouvé des problèmes de santé.

Nous n'avons utilisé que les trois premiers chiffres des codes de la CTP pour déterminer les professions des sujets. Le regroupement des emplois faisait en sorte que des personnes ayant des fonctions et des expositions différentes ont été placées dans le même groupe professionnel; on s'attend habituellement à ce que cela entraîne une erreur de classification non différentielle et un biais dans l'estimation du risque proche de zéro 33.

Les comparaisons multiples posent également un problème dans cette étude. Des résultats faussement positifs risquent d'être produits à cause de la variation aléatoire. Il faut donc user de prudence dans l'interprétation des résultats de la présente étude.

Conclusion

En conclusion, notre étude semble indiquer que l'exposition professionnelle à certaines substances chimiques est associée à une augmentation du risque du cancer de la vessie. D'autres études doivent cependant être effectuées pour recueillir suffisamment de données à l'appui de relations causales et examiner les mesures de prévention. Nous avons confirmé que les emplois liés aux produits chimiques présentent un risque de cancer de la vessie chez les Canadiens de sexe masculin. Les résultats de cette étude corroborent l'existence d'une association entre les facteurs liés au mode de vie (cigarette et consommation de café) et le cancer de la vessie chez les hommes.

Remerciements

Les auteurs tiennent à remercier le Dr K. Johnson de ses commentaires concernant le manuscrit, ainsi que L. Anderson pour son aide dans la révision du manuscrit et L. On et S.Y. Pan pour leur assistance technique.

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Coordonnées des auteurs

Anne-Marie Ugnat, Wei Luo, Robert Semenciw, Yang Mao, Division de la surveillance et de l'évaluation des risques, Agence de santé publique du Canada, Santé Canada, Ottawa (Ontario) Canadian Cancer Registries Epidemiology Research Group
Correspondance : Wei Luo, Division de la surveillance et de l'évaluation des risques, Centre de prévention et de contrôle des maladies chroniques, Agence de santé publique du Canada, Santé Canada, IA 6702A, 120, chemin Colonnade, Ottawa (Ontario), Canada K1A 0K9; fax : (613) 941-2057; courriel : Wei_Luo@hc-sc.gc.ca


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Dernière mise à jour : 2004-08-19 début