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Volume 18, No 1- 2000

 

 

Agence de santé publique du Canada

La recherche active participative comme moyen de comprendre la façon dont les Autochtones du Canada perçoivent la hausse de l'incidence du diabète

Patricia Boston, Steven Jordan, Elizabeth MacNamara, Karne Kozolanka, Emily Bobbish-Rondeau, Helen Iserhoff, Susan Mianscum, Rita Mianscum-Trapper, Irene Mistacheesick, Beatrice Petawabano, Mary Sheshamush-Masty, Rosie Wapachee et Juliet Weapenicappo


Résumé

Dans ce document, on examine les avantages qu'il y a à adopter des méthodes actives participatives pour les recherches sur les Autochtones du Canada. Partant d'une récente étude qualitative sur le diabète sucré non insulinodépendant chez les Cris de la baie James, on y expose et analyse la méthode utilisée pour concevoir une forme de recherche active qui s'intéresse à la façon dont les Cris perçoivent la hausse de l'incidence et de la prévalence du diabète. Pour s'assurer de bien comprendre leur point de vue, les chercheurs ont recruté des membres de la communauté crie pour qu'ils agissent à titre de co-chercheurs dans le cadre de l'étude. Ceci a facilité l'énonciation d'un point de vue cri sur le diabète et a aussi permis aux membres cris de l'équipe de chercheurs de se familiariser avec les connaissances et compétences nécessaires pour des formes de recherche qualitative qui peuvent servir de fondement à la fois aux politiques et aux pratiques dans le domaine de la santé et les domaines connexes. Ce document traite plus particulièrement de la façon dont l'étude a été conçue et des leçons qui peuvent être tirées de ce type d'enquête collaborative.

Mots clés : Aboriginals; Canada; diabetes mellitus, non-insulin-dependent; participatory action research; qualitative methodology; social environment


Introduction

Le diabète est en train de devenir un problème de plus en plus grave dans les communautés autochtones partout dans le monde. Le diabète sucré non insulinodépendant (DSNID) est désormais une des principales causes de morbidité et de mortalité dans ces communautés partout en Amérique du Nord1-5. Au Canada, on note un changement surtout depuis la Seconde Guerre mondiale. Certains ont laissé entendre qu'il est dû à des transformations sociales et culturelles rapides, qui sont venues s'ajouter à l'existence d'un génotype de susceptibilité6-8.

Les taux de prévalence du diabète dans les communautés autochtones du Canada varient grandement d'un groupe linguistique et culturel à l'autre, selon le lieu géographique8-10. Au cours des 30 dernières années, les Cris de la baie James ont subi d'énormes bouleversements sociaux et culturels liés à l'imposition d'un mode de vie sédentaire, à la consommation d'aliments transformés et à l'instauration d'une économie fondée sur l'argent9-11. Ces changements sont en corrélation avec la prévalence accrue du DSNID.

Dans de récentes études, on a commencé à se concentrer sur les habitudes de vie (p. ex., le retour à la nature) et leur effet sur l'équilibre du diabète6,12. Cependant, peu d'études se sont intéressées à la perception ou à la connaissance de profane que les populations autochtones ont du diabète, ou à ce que cette maladie représente pour elles sur les plans social et culturel13,14. De même, on a accordé peu d'attention à la façon dont les services de santé et les mesures de prévention pour diabétiques sont organisés par rapport aux pratiques culturelles courantes des patients et de leurs familles.

L'étude sur laquelle se fonde ce document a été commandée en juin 1995 par le Conseil cri de la santé et des services sociaux de la baie James (CCSSSBJ), qui souhaitait que ces questions soient examinées. Elle fait partie d'une série d'activités que l'on mène actuellement pour lutter contre la hausse de l'incidence et de la prévalence du diabète chez les Cris de la baie James. Ces activités ont inclus une enquête sur la prévalence ayant pour but d'évaluer un programme pilote de sensibilisation au diabète mis en oeuvre par des représentants en santé communautaire (RSC), l'embauchage d'une infirmière éducatrice spécialiste du diabète pour appuyer et améliorer les soins courants offerts aux patients, un projet se rapportant au diabète gestationnel et visant à offrir des conseils en matière de nutrition aux Cries enceintes et, plus récemment, la constitution d'un registre du diabète, commencée en mai 1996.

Parmi les chefs cris, on observe de plus en plus une volonté politique de faire passer le diabète au rang des priorités dans le domaine de la santé. Cette attitude a aidé à susciter une gamme croissante d'activités parrainées par des conseils communautaires, telles que la semaine de la sensibilisation au diabète, des concours d'amaigrissement et l'élaboration de plans visant la création de sentiers de promenade et d'autres formes d'activité physique. Dans le prolongement de la Déclaration des Premières Nations sur le diabète (1995), on espère que ces initiatives et d'autres encore aideront à sensibiliser les Cris au fait qu'ils doivent commencer dès maintenant à prendre des mesures pour lutter contre cette maladie.

Cependant, malgré la détermination du CCSSSBJ à contenir la maladie, on prend de plus en plus conscience que les mesures de prévention existantes et certains traitements n'ont pas été aussi efficaces chez les Cris qu'ils l'ont été dans le Sud. Aussi, on se rend de plus en plus compte que certaines formes de soins de santé et d'éducation qui ont fait leurs preuves dans le Sud ne sont peut-être pas adaptées au contexte culturel propre aux communautés cries de la baie James.

Ce projet de recherche avait donc pour but d'étudier et d'explorer comment le CCSSSBJ pourrait concevoir des formes de prestation de soins de santé visant à prévenir le diabète, en se fondant sur les perceptions et les expériences que les Cris ont de la maladie. On a considéré que ce travail était urgent pour deux raisons. Premièrement, comme chez les autres peuples autochtones, l'incidence et la prévalence du diabète ont augmenté de façon marquée au cours des deux dernières décennies chez les Cris, surtout depuis la signature de la Convention de la baie James avec le gouvernement du Québec (1976). La croissance de la maladie dans les communautés de la baie James se reflète déjà dans l'affectation de fonds additionnels à la prévention du diabète. Deuxièmement, malgré la volonté du CCSSSBJ de faire face à ce qui semble être une épidémie imminente et son engagement financier à le faire, on hésite, avec raison, à consacrer de grosses sommes d'argent à des programmes et services qui, même s'ils ont été mis à l'essai et s'ils ont fait leurs preuves dans le Sud, peuvent ne pas être efficaces ou tout aussi efficients dans le Nord.

Dans ce contexte, nous avons cherché, par notre recherche, à vérifier comment les communautés cries de la baie James perçoivent et interprètent l'incidence croissante du diabète parmi les leurs et comment elles y réagissent, puisque, selon nous, toute intervention visant cette maladie doit reposer sur la connaissance et l'expérience qu'elles en ont. Autrement dit, on a avant tout cherché à tenir compte de la connaissance et de l'expérience que les Cris ont de l'impact du diabète sur leur vie de tous les jours et sur leurs communautés. Partant de ce principe, on s'est fixé quatre objectifs.

  • Favoriser la participation active des fournisseurs de soins de santé et des communautés cries à la définition du problème à examiner et des façons de l'aborder
  • Révéler les points forts et les obstacles associés à une mise en oeuvre efficace et efficiente de programmes de prévention et de traitement du diabète dans les communautés cries
  • Déterminer les plans d'action et les formes d'organisation qui permettront de surmonter les obstacles possibles à une bonne prévention et un bon traitement du diabète
  • Faire des recommandations concernant les façons dont les conclusions de l'étude pourraient être valablement incorporées à des programmes de prévention du diabète

Pour fixer ces objectifs, il a fallu effectuer une forme de recherche sociale qui non seulement reposait sur des formes qualitatives d'enquête, mais nécessitait aussi la participation active de membres de la communauté crie au processus de recherche et à son produit. Pour cette raison, on a jugé que la participation des neuf RSC représentant chacune des communautés cries de la région de la baie James était indispensable à la mise en oeuvre et au développement de l'étude. La participation des RSC à titre de co-chercheurs a permis de recueillir un ensemble de points de vue unique et souvent surprenant sur les perceptions culturelles qui constituent l'expérience du diabète chez les Cris.

Organisation et exécution de la recherche

La recherche nécessaire pour cette étude a été effectuée entre les mois de septembre 1995 et mars 1996 par une équipe composée de trois ethnographes et un médecin de l'Université McGill et de neufs RSC du Conseil cri de la santé et des services sociaux de la baie James. Adoptant une approche qualitative de l'enquête sociale, les chercheurs se sont intéressés à recueillir des données par voie d'entrevues, d'observation de participants, de notes prises sur le terrain et de preuves documentaires. Après les étapes de la traduction et de la transcription, les données ont été organisées à l'ordinateur et analysées suivant les thèmes et catégories qui s'en dégageaient par rapport aux objectifs de l'étude. Les données organisées ont ensuite servi de base pour tirer certaines des conclusions présentées dans ce document.

Dès le début, l'étude a pris deux orientations interreliées qui ont ensemble permis de recenser des connaissances et perceptions pouvant servir de base au CCSSSBJ pour l'élaboration de politiques et programmes visant à lutter contre l'expansion du diabète sucré parmi les populations cries de la baie James. La première orientation, sur laquelle nous reviendrons plus tard, consistait à explorer comment le diabète est perçu et vécu par les Cris qui en sont atteints, leurs familles, ainsi que leurs parents et amis des différentes communautés de la région de la baie James.

Pour cette partie de l'étude, les données ont été recueillies par les RSC, mais l'organisation et la mise en oeuvre ont découlé d'une collaboration constante avec les chercheurs de McGill. Cette collaboration s'est avérée essentielle au développement d'une conception et de compétences communes pour faire face au problème à étudier, et elle a également servi de base à nos prétentions concernant la validité de nos conclusions. Autrement dit, la connaissance intime et la compréhension tacite de la culture et de la communauté cries que possédaient les RSC ont permis de mettre au jour les différentes perceptions et expériences que les Cris ont du diabète par rapport à leur vie de tous les jours et à leurs communautés.

Cette collaboration a fait appel aux principes et pratiques propres à la recherche active participative15. De plus en plus utilisée par les chercheurs du domaine de l'éducation, cette forme de recherche se distingue des formes conventionnelles d'enquête sociale par une volonté d'élargir le rôle et la représentation de communautés subordonnées et marginalisées dans des processus décisionnels formels. Cela se fait par différents mécanismes et pratiques dans le contexte du processus de recherche, mais surtout par une redéfinition de la relation entre le chercheur et les sujets de la recherche16. En effet, la recherche active participative vise à éliminer la distinction entre les chercheurs et les sujets. Le rôle que les chercheurs professionnels ont à jouer dans la recherche active participative consiste à ajouter leur expertise aux connaissances, compétences et expériences des non-professionnels qui sont les sujets de leurs enquêtes. De cette manière, le processus de recherche est conçu comme étant une «rencontre» de partenaires égaux, qui peuvent dialoguer et mettre en commun différents genres de connaissances, d'expériences et de compétences entourant la façon d'aborder un problème de recherche particulier.

La méthode de recherche active participative choisie pour cette étude a été déterminée au cours d'une série d'ateliers qui ont réuni les chercheurs de McGill et les RSC entre septembre 1995 et février 1996. Ces ateliers avaient pour but de familiariser les RSC avec les techniques de recherche qualitative pour qu'ils puissent commencer à recueillir des données pour l'étude dans leurs communautés. Faisant appel à leur connaissance personnelle et professionnelle de la culture crie, les RSC ont également joué un rôle clé dans la définition - et parfois la redéfinition - de l'orientation de la recherche au fur et à mesure qu'elle progressait. Ainsi, les ateliers ont servi de forum pour l'échange d'idées et la mise en commun de connaissances, de conceptions et de compétences qui ont fait en sorte que le plan de recherche reflète le point de vue des Cris sur les questions entourant le diabète. Par exemple, les thèmes explorés au cours des entrevues avec des Cris atteints du diabète sont ressortis des discussions courantes avec les RSC. Au fur et à mesure que la recherche progressait et que les données étaient réunies et analysées, ces thèmes étaient développés et modifiés, et leur orientation changeait. Cette approche a également été appliquée aux notes recueillies sur le terrain par les RSC, sous forme d'observations et d'autres données pertinentes.

Après leur initiation aux techniques de recherche qualitative, les RSC ont commencé à recueillir des données dans leurs communautés. Compte tenu de leurs autres obligations (leur travail et la formation), on a convenu que chaque RSC interviewerait trois Cris diabétiques (27 interviews en tout) pendant une heure. Les interviews et les notes prises sur le terrain ont servi de base à un second atelier, au cours duquel nous avons commencé à analyser et à établir les thèmes et catégories à partir des données. Les conclusions tirées lors de cet atelier ont mené à une deuxième série d'interviews qui ont non seulement permis d'effectuer un suivi dans les secteurs d'enquête déjà explorés au cours des interviews initiales, mais ont également couvert des sujets nouveaux ou imprévus. Ainsi, les RSC ont dû, en un deuxième temps, interviewer pendant une heure deux Cris diabétiques (18 interviews en tout).

Pour le troisième et dernier atelier, tenu en février 1996, les RSC et les chercheurs de McGill ont réuni et analysé toutes les interviews, les notes prises sur le terrain et les autres données pertinentes, en vue de produire un rapport pour le CCSSSBJ17. La structure, le contenu, les thèmes et les orientations du rapport ont été déterminés à cet atelier.

Bien qu'on n'en donne pas un compte rendu complet dans ce document, la deuxième partie de notre étude a été menée par un membre de l'équipe de McGill, qui s'est intéressé aux perceptions et points de vue des professionnels de la santé (PS) à l'égard de l'expansion du diabète dans les communautés cries de la baie James. Le but de cette composante de l'étude était de vérifier non seulement la façon dont les PS réagissaient à la hausse des taux d'incidence et de prévalence du diabète chez les Cris, mais aussi la façon dont leur travail dans ce domaine pouvait être amélioré et soutenu par des mécanismes à la fois formels et informels, à l'intérieur et à l'extérieur du système de santé. Nous voulions plus particulièrement vérifier ce que les PS percevaient comme étant des obstacles à l'efficacité de leurs méthodes de travail actuelles par rapport au diabète et les façons dont ces obstacles pouvaient être surmontés.

On a interviewé différents PS, dont neuf médecins, le directeur des Services professionnels, dix infirmières, deux nutritionnistes, une diététiste, trois dentistes, un travailleur social communautaire et un gestionnaire de ressources humaines. Un quart de ceux qui ont été interviewés avaient entre 2 et 5 ans d'expérience de travail dans le Nord, mais la majorité en avaient entre 5 et 22.

On a enregistré des interviews d'une à deux heures dans la région de la baie James et à Montréal, en utilisant un protocole d'interview mis au point avec l'aide des PS qui avaient une expérience de travail dans le Nord et une certaine connaissance du diabète chez les populations autochtones. Au besoin, on organisait des interviews spéciales de suivi pour clarifier des points particuliers. Les données provenant de cette partie de l'étude ont été analysées par les chercheurs de McGill, et les thèmes et questions qui en ressortaient ont servi de base à l'élaboration du plan de recherche suivi avec les RSC.

Le diabète et les communautés cries

La communauté crie est en gros définie, aux fins de cette étude, comme étant l'ensemble des patients, des familles, des membres de la communauté, des représentants en santé communautaire et des Anciens. On a interviewé des représentants de chacun de ces secteurs de la communauté. Comme il a été mentionné précédemment, nous avons considéré que la participation des RSC était essentielle pour obtenir l'accès voulu aux connaissances, aux expériences et aux perceptions culturelles que les Cris ont du diabète et de ses causes, ainsi que de la prévention et du traitement de cette maladie. Nous croyions qu'en créant au sein de la communauté un sentiment de «propriété» à l'égard du processus de recherche et de son produit, nous pourrions acquérir une connaissance plus nuancée et plus profonde des mécanismes qui contribuent à la perception que cette communauté a du diabète.

Nous avons également conclu que la contribution des RSC aux données devait être considérée comme étant issue du contexte communautaire. Les représentants en santé communautaire font partie intégrante de leur communauté et ils ont eux-mêmes fait l'expérience du diabète, personnellement ou dans leur famille. Ils ont joué un rôle déterminant en clarifiant différentes questions et en s'assurant de l'exactitude de nos interprétations. Nous sommes toutefois demeurés liés par des questions d'éthique et de confidentialité et avons donc dû incorporer les données des RSC à celles de l'ensemble de la communauté crie dans les conclusions générales de l'étude.

Les thèmes centraux qui se sont dégagés des données concernaient en gros les différences de communication qui interviennent quand il s'agit de convertir des connaissances en renseignements pratiques et utilisables. Ces différences de communication entre les professionnels de la santé et les patients cris venaient plus particulièrement de différences de perception liées à la communication verbale, à la nourriture, au mode de vie, aux croyances entourant la santé et la maladie, ainsi qu'à la participation à l'élaboration de politiques et à la prise de décisions. Nous analyserons ces thèmes un à un.

Communication

L'obstacle le plus couramment cité était celui de la communication, et ce, non seulement entre le système de santé et la communauté crie, mais aussi à l'intérieur de segments de la communauté elle-même. Du point de vue des principales sources d'information (les RSC) et des personnes qu'elles ont interviewées, le diabète crée un obstacle à la communication à tous les niveaux de l'organisation de la santé communautaire.

Un des problèmes de communication est relié aux rôles des membres de la famille, à l'intérieur même de la famille. L'existence du diabète risque de modifier les rapports dans bien des familles traditionnelles lorsque les enfants ont des habitudes de vie différentes (p. ex., s'ils mangent des aliments non traditionnels) de celles de leurs parents. De plus, il se crée des tensions dans les familles lorsque, par exemple, des jeunes sont considérés comme n'ayant pas été «éduqués» ou formés suivant les traditions de la famille crie, tout en étant au courant des méthodes modernes de prévention et de traitement du diabète. Un homme a exposé la situation ainsi :

Les jeunes, qui ont beaucoup d'instruction, en savent plus sur le diabète [...] Les personnes plus âgées ont de l'expérience parce qu'elles ont vécu plus longtemps [...] et je crois qu'elles devraient faire profiter les autres de ce qu'elles savent [...] Si nous nous parlions, tout le monde en profiterait.

Un autre facteur relié à l'accessibilité des aliments traditionnels et à la question plus vaste de la communication était celui de la langue. On a cité la mauvaise connaissance de la langue comme étant un obstacle courant à l'efficacité des services existants. On entrevoyait comme solutions que les gens «sachent comment lire les étiquettes des aliments» et aient les traductions et l'aide nécessaires pour comprendre comment interpréter les différences entre le glucose et le sucre, par exemple. Les obstacles de la langue et de la signification ont été cités dans le contexte de l'accès à des renseignements pratiques et utilisables. Comme le disait une personne : «Tous ne savent pas exactement comment les médicaments fonctionnent ou comment se font le traitement et la prévention.»

De plus, l'analyse des croyances pertinentes, comme celles qui entourent la santé et la maladie, le mode de vie et l'alimentation, est sérieusement compromise par les différences de perceptions et de croyances, entre les familles ou les générations.

Aux yeux de bien des familles, le diabète isole et marginalise le membre atteint par rapport aux autres membres de la famille, par rapport aux autres familles et par rapport à la communauté locale. Le diabète est perçu comme étant une maladie qu'il faut «cacher», «un secret à ne pas dévoiler à la famille et aux amis» et une «tare». Par exemple, bien des répondants ont parlé de sentiments d'isolement venant du fait qu'ils ne peuvent participer aux activités sociales traditionnelles des Cris, qui sont centrées sur les repas et sont un facteur primordial de cohésion et d'unité familiale. Une personne l'a exprimé ainsi :

Ils vont en parler dans ma communauté, ils vont en parler de façon générale, mais sans nécessairement dire «moi, je l'ai», vous savez? [...] Maintenant, ils commencent lentement à prendre confiance en eux, mais en tant qu'individu, on le garde secret. C'est surtout caché, je crois.

De plus, certains des répondants estimaient que les Cris devaient «manger la nourriture de l'homme blanc, qui n'est pas de la bonne nourriture pour les Cris». En outre, les Cris qui ont le diabète ne peuvent pleinement apprécier les fêtes, qui font partie intégrante de la vie et de l'héritage des Cris, et ils ne peuvent y participer pleinement, à cause des rigueurs du régime alimentaire qu'ils doivent s'imposer.

Certains ont dit percevoir un manque de cohérence dans les communications entre les patients et les professionnels de la santé. Au niveau le plus général, ces préoccupations semblaient révéler une incapacité de communiquer de façon correcte et significative. Les commentaires de deux personnes différentes le montrent :

On nous a dit de manger beaucoup de salades. C'est tellement différent de notre alimentation traditionnelle [...] manger plus de tomates, plus de céleri, plus de poires [...] Nous n'avons même pas de mots cris pour désigner ces légumes.

Puisqu'elle [la patiente] hoche la tête quand elle lui parle, l'infirmière pense qu'elle comprend l'anglais et elle n'a jamais d'interprète sur place. Elle peut dire quelques mots en anglais, mais elle ne s'exprime pas facilement dans cette langue, pas aussi facilement qu'en cri.

On a plus particulièrement noté l'existence de problèmes de communication et de problèmes d'incompréhension culturelle entre les professionnels de la santé et les patients cris.

Habitudes alimentaires et croyances entourant la nourriture

Les habitudes alimentaires et les croyances entourant la nourriture ont été citées le plus souvent comme étant le principal obstacle aux échanges entre les PS et la communauté. Il y avait souvent des problèmes liés à la perception de ce qu'étaient les aliments appropriés. Par exemple, nous avons demandé si les gens avaient de la difficulté à se procurer les aliments qu'ils aimaient (souhaitant par là engager une discussion plus poussée). Plusieurs répondants ont laissé entendre que les aliments jugés «bons» pour le diabète n'étaient pas jugés «bons» dans le contexte des croyances et habitudes alimentaires des Cris. Les aliments jugés sains dans le monde cri risquent d'être de la viande grasse d'oie, d'ours, de canard, de castor, de caribou ou de lagopède cru, ou du poisson gras comme l'omble ou la truite. Plusieurs personnes ont mentionné que des aliments comme les légumes et salades, que les professionnels de la santé trouvent excellents, «semblent avoir un goût étrange». Un patient a dit à ce sujet :

Dans le régime, on dit qu'il faut manger beaucoup de légumes et mon estomac crie [...] et j'ai encore faim après [...] mais quand j'ai mangé de la bonne nourriture grasse, je me sens bien. J'ai l'impression d'avoir mangé.

Une autre personne a simplement fait remarquer que la nourriture pour diabétique, c'est essentiellement de la «nourriture pour rat musqué». Et, même si l'on comprend qu'il est important d'éviter la nourriture grasse dans le système de valeurs du Sud, le gras est néanmoins perçu comme étant «nécessaire», «bon» et «nourrissant» dans le système de valeurs cri. Un des RSC s'est fait raconter l'histoire d'un Cri qui est descendu à Montréal pour la première fois. Il est allé dans un restaurant pour manger un steak de boeuf et le serveur lui a demandé quelle cuisson il préférait. Il a répondu : «Avec beaucoup de gras!»

Il faudrait insister sur le fait que la notion d'«aliment gras» est un aspect fondamental de la conception crie des causes et remèdes de la maladie et de la préservation de la santé. Des répondants se rappelaient la nature «saine» des aliments que mangeaient les Cris lorsqu'ils menaient leur vie traditionnelle de chasseurs, par exemple des viandes grasses, et ils comparaient ces aliments aux aliments «malsains» de leur régime alimentaire actuel. Par conséquent, lorsqu'il mange certaines choses comme du gras (idéalement du gras d'oie, d'ours ou de lapin), le patient cri essaie d'améliorer et non pas d'empirer son état de santé. Comme le rapportait un répondant : «Les gens ont tendance à acheter du poulet ou du boeuf. Les légumes viennent un peu en dernier.»

Ces questions concernant les habitudes et croyances alimentaires sont perçues comme étant inquiétantes lorsque la tendance à éviter des aliments, ajoutée aux préférences culturelles, déséquilibre l'alimentation, justement à un moment où un régime équilibré peut être nécessaire pour prévenir ou atténuer le diabète.

Accessibilité de la nourriture crie

La difficulté de se procurer de la nourriture crie a constamment été présentée comme étant un problème. Des gens demandaient qu'il y ait d'autres façons de déterminer les besoins particuliers des patients cris ayant le diabète. D'autres ont admis qu'ils souhaitaient remplacer le prêt-à-manger par des aliments cris plus naturels. Comme le précisait une personne : «Les aliments naturels achetés à l'épicerie [seraient mieux] au moins que le macaroni cuit au micro-ondes.» Les participants souhaitaient également trouver des solutions au problème de la rareté du gibier (lapin, oie, castor) dans les épiceries et ils espéraient que cette viande devienne plus disponible.

On estimait qu'il fallait identifier les éléments fondamentaux des habitudes alimentaires cries et les intégrer aux régimes alimentaires et aux programmes d'éducation. Cette suggestion a été perçue comme une solution au problème des aliments universellement détestés par les Cris, comme les légumes. Les répondants ont insisté autant comme autant sur ce problème. On prétend que ce n'est pas seulement une question de bonne nutrition, mais aussi une question de préservation de la santé et de bien-être. Les aliments qui goûtent bon ou qui peuvent être employés pour modifier d'autres aliments sont perçus par les Cris comme étant un facteur important dans le fait de «se sentir bien» ou de «se sentir en santé». On laisse entendre qu'un meilleur accès à un régime à base de viande ou à de la viande dans les épiceries, et qu'un accès aux services locaux ou à de futurs services de piégeage pourraient grandement améliorer le moral des patients cris et des membres de leurs familles, ainsi que de ceux qui leur fournissent de la nourriture.

Perceptions des modes de vie

Nous avons constaté qu'il était souvent question de difficultés liées aux perceptions différentes que les PS et la communauté crie ont des coutumes. Les répondants nous ont laissé savoir que, bien qu'on leur dise qu'ils doivent suivre de façon rigoureuse un régime pour diabétique, pour «être poli et respectueux» dans leur culture, il faut tout de même participer à des repas collectifs. «C'est manquer de respect que de refuser ouvertement de la nourriture.» Du point de vue des membres de la communauté, le fait de refuser de la nourriture dans un contexte social ou familial équivaut à se séparer de sa famille ou de sa communauté. Comme l'expliquait l'un d'eux : «Offrir de la nourriture, c'est une manifestation de gentillesse; la refuser, c'est refuser cette gentillesse.» D'autres commentaires avaient trait à l'importance de la participation aux fêtes et au sentiment d'«être différent».

Ils ont eu une fête [...] Ils [la famille] nous ont offert toutes sortes de nourriture et, quand je me suis assis, mon repas était déjà là dans du papier d'aluminium [...] et c'était un peu sec [...] pas gras [...] un morceau de viande [...] Ça m'a fait un peu de peine, vous savez.

Croyances entourant la santé et la maladie

La principale croyance crie entourant les causes du diabète est qu'il s'agit d'une maladie de l'homme blanc et qu'elle vient de son sang. Il n'est pas clair si les Cris perçoivent le diabète comme étant un «virus» introduit par l'homme blanc ou un autre agent. De plus, les répondants étaient nombreux à reconnaître le lien entre l'expansion du diabète dans leurs communautés et, comme le décrivait l'un d'eux, «le déclin du mode de vie ancestral». Tous, sans exception, attribuaient cette situation aux changements économiques et sociaux provoqués par le développement économique qui s'est engagé dans les années 70, mais surtout par la Convention de la baie James et le barrage qui en est résulté.

La majorité des répondants continuaient de replacer le traitement du diabète dans un contexte cri, même s'ils disaient «suivre les instructions» des PS. Même si notre but était d'évaluer la façon dont les gens utilisent les systèmes auxquels ils ont actuellement accès, nous avons également posé des questions initiales au sujet d'autres expériences de guérison. Personne n'a mentionné expressément avoir eu recours à des pratiques de guérison autres, mais la majorité des répondants ont mentionné des perceptions culturelles différentes de la «guérison» et du mieux-être, qui sont considérées plus saines que celles du système de santé public.

Une autre pratique de vie saine aux yeux des Cris est celle qui consiste actuellement à retourner vivre dans la nature. Les gens associent souvent des sentiments d'«énergie» et de «rajeunissement» à ce genre de vie. Une personne l'a expliqué ainsi :

Si vous êtes ici en cette période de l'année, la ville se vide et les gens ont hâte de se préparer pour retourner vivre dans la nature. Tout le monde en parle. C'est tout simplement un sentiment de rajeunissement. Une des plus belles périodes de l'année, en fait.

De plus, le concept de l'«excédent de poids» était perçu comme ayant un rapport direct avec la nécessité d'emmagasiner (sainement) de l'énergie corporelle vitale. Une personne le décrivait ainsi : «Être maigre n'est pas sain. Être gras l'est.» Il importe de comprendre que d'être «gras» dans ce concept signifie être robuste ou avoir quelques kilos en trop, ce qui permet d'être plus fort et plus en mesure d'exercer ses activités courantes, à la différence de l'obésité, que les répondants ne jugeaient pas souhaitable. Parfois, ces croyances étaient directement reliées aux différences de perception culturelles entre les patients cris et les PS. Un patient a déclaré :

L'infirmière est tellement heureuse de voir que je perds du poids. Moi, je m'inquiète de cette perte de poids. Elle est trop rapide [...] et l'infirmière pense que je fais de l'exercice [...]

Un autre patient exposait la situation ainsi :

Et même un simple excédent de poids n'est pas perçu comme un problème [...] Ici, c'est un signe de prospérité, de réussite.

Bien des répondants ont dit comprendre les raisons pour lesquelles il est bon d'utiliser un glucomètre pour mesurer la glycémie, mais d'autres ont également exprimé des doutes concernant la fréquence avec laquelle les glucomètres sont effectivement utilisés ou la rigueur avec laquelle les régimes alimentaires sont suivis. Certaines personnes ont dit qu'elles suivaient les «instructions» (des PS), tandis que d'autres ont dit les «connaître» mais ne pas les suivre.

Il semble crucial pour l'interprétation de ces données de reconnaître que, même si la majorité des répondants ont recours au système de santé, il ne semble pas que cela assure la conformité ou l'intégration. Autrement dit, les choix se rapportant à la santé et à la maladie continuent en grande partie à se faire en fonction de la culture crie. Une constatation importante est que la plupart des Cris considèrent les approches «du Sud» (ou des Blancs) face à la santé et à la maladie comme étant distinctes et ne signalent donc pas avec quelque constance le recours à d'autres pratiques. On a aussi entendu parler de «crainte» du diabète et de «méfiance» à l'égard de tout depuis la Convention de la baie James, et entendu dire que les remèdes de l'homme blanc ne fonctionnent pas.

Processus cris de prise de décisions et d'élaboration de politiques

Une autre conclusion tirée de la majorité des réponses concerne la question du contrôle communautaire sur les décisions. Il y a eu beaucoup de discussions entourant les questions soulevées au sujet des changements de mode de vie depuis la Convention de la baie James. Les commentaires mettaient en évidence un sentiment de sous-participation aux grandes décisions portant sur des questions de politiques à la fois locales et de portée plus vaste. Deux répondants ont affirmé ceci :

Ils écoutent rarement ce que l'on dit. Quand on demande quelque chose, ce n'est jamais fait. Les Anciens veulent que le chef soit ici tout le temps, mais le chef a tant de choses à faire [...] tellement d'obligations qu'il ne peut être ici tout le temps.

Pour ce qui est des questions de prise de décisions, bon nombre ont avoué avoir des sentiments d'«impuissance» et de désespoir. Par rapport à la question de l'impuissance, un Ancien mentionnait :

Je n'ai jamais pensé que ma vie serait ainsi [...] Lorsque je regarde dehors, tout ce que je vois, c'est une autre maison; je ne vois pas la rivière ni le lac [...] Je n'ai jamais pensé que je serais enfermé dans le salon de quelqu'un.

Et d'autres éprouvaient un sentiment d'aliénation par rapport aux processus décisionnels officiels :

J'ai vu trois Anciens. Ils étaient assis là et je leur ai dit : «Êtes-vous allés à la réunion hier soir?» Ils ont un peu ri et l'un a dit : «Ouais! Je suis resté environ une demi-heure et je suis retourné chez moi.» Et j'ai demandé : «Pourquoi? Pourquoi?» Et ils ont dit : «Ça sert à quoi? C'est eux qui prennent les décisions.»

Bien que nous ayons pu examiner ces problèmes un peu plus à fond, nous nous sommes rendu compte que la majorité des répondants ne savaient pas vraiment au départ comment ils pourraient influencer l'élaboration de politiques se rapportant au diabète ou comment ils pourraient y participer activement. Néanmoins, la communauté crie a exprimé le désir de participer davantage à l'élaboration de politiques et de programmes à tous les niveaux. Des répondants ont laissé entendre qu'il était nécessaire d'assurer aux chefs et à leurs communautés respectives un plus grand accès partagé aux connaissances existant sur le diabète. Certaines solutions ont été proposées, comme par exemple de favoriser une plus grande participation des Cris aux émissions sur la santé et aux débats radiophoniques, ainsi qu'une participation plus active des chefs et conseils de bande à ces activités.

Au cours de la dernière étape du projet de recherche, les données d'entrevue et d'observation ont révélé un certain nombre de tendances dans la façon dont les gens perçoivent la participation aux processus d'élaboration de politiques et de programmes ayant trait à la prévention et au traitement du diabète.

Éducation

On a également signalé qu'il fallait pour les Cris des séances d'information concernant la nourriture et les régimes alimentaires. On a proposé de prévoir des cours sur la nutrition au second cycle du primaire et au premier cycle du secondaire, qui seraient donnés par des Cris. Les façons de s'impliquer que l'on envisageait s'apparentaient à ceci : «faire participer des diabétiques eux-mêmes aux activités d'éducation se rapportant au diabète». Ce commentaire résume assez bien : «Personne ne peut enseigner mieux à un Cri qu'un autre Cri.»

On jugeait aussi nécessaire que les Cris participent davantage à la préparation de matériel d'éducation pour les Cris. Les participants ont proposé un livre de recettes cri pour les diabétiques, des cours de cuisine cris, des ateliers et des rencontres informelles en cri, ainsi que des groupes de soutien pour diabétiques.

Conclusion

Nous croyons qu'il y a à tirer de cette étude plusieurs leçons qui pourraient servir à des recherches futures sur les problèmes de santé des Autochtones. La première a trait à l'orientation méthodologique et aux procédures employées pour étudier l'impact d'une maladie, telle que le diabète, sur les communautés autochtones. En effet, notre étude reposait sur le principe fondamental que les opinions, points de vue et expériences des Cris de la baie James devaient être pris en considération dans le processus de recherche dès le départ. On y est parvenu en veillant à ce que des membres de ces communautés (les RSC) participent aux activités de recherche et à ce qu'ils déterminent la façon de conceptualiser et d'examiner le sujet de la recherche.

Comme il a déjà été mentionné, on a utilisé une forme de recherche active participative pour assurer une perception commune et un engagement commun face à la réalisation de ce but. Ce processus a permis l'échange continuel de différentes formes d'expertise, celles des RSC et celles des chercheurs de McGill. Dans le cas des Cris, les ateliers de recherche ont constitué un moyen de transférer et d'acquérir des connaissances et compétences d'«expert» reliées aux méthodologies et procédures de recherche qualitative. Dans le cas des chercheurs de McGill, les ateliers étaient l'occasion de découvrir des détails intimes de la société et de la culture cries, ainsi que des façons de formuler et de mettre en application un processus de recherche en partant du point de vue des Cris.

Les thèmes principaux qui se dégagent des résultats de la recherche sont centrés sur les différentes façons dont les perceptions que les Cris ont de la santé et de la maladie peuvent constituer la base d'une information pratique à utiliser pour élaborer des politiques et des programmes axés sur la prévention du diabète. Dans ce contexte, nos conclusions tendent à établir qu'il subsiste d'importants obstacles sociaux et culturels qui entravent la communication de renseignements et de connaissances sur la maladie entre les communautés cries et les professionnels de la santé. Ces obstacles touchent un vaste éventail de points associés à la signification culturelle de la nourriture, aux croyances entourant la santé et la maladie et, de façon plus générale, le processus de prise de décisions et d'élaboration de politiques. Par conséquent, il importe de comprendre que, même si bien des Autochtones utilisent les services de santé, cela ne signifie pas pour autant qu'il y ait de leur part quelque forme d'adhésion ou d'intégration.

Certaines des préoccupations les plus pressantes peuvent être classées dans la catégorie générale de la communication. Par «communication», on entend les différentes façons dont les Cris pensent au diabète et en parlent, et les façons dont ils gèrent la maladie dans leur vie de tous les jours, par rapport au système de santé. Les données recueillies laissent supposer que les Cris donnent des sens très différents à la maladie ainsi qu'à son origine, à ses effets, au traitement et à la prévention. Ainsi, ceux d'entre nous qui offrent actuellement des services dans le cadre du système de santé et qui ne sont pas conscients de toute la complexité que la culture et la langue donnent aux problèmes de santé courent le risque d'offrir des services qui ne servent pas au mieux les intérêts du patient, de sa famille ou de la communauté. Par conséquent, sur le plan des politiques générales, nous estimons qu'il existe un urgent besoin de mettre davantage l'accent sur l'éducation et la formation des professionnels de la santé et de faire porter celles-ci sur les connaissances, perceptions et expériences que les communautés autochtones ont du diabète.

Enfin, notre recherche laisse supposer que les problèmes de communication sous-jacents constituent des obstacles à une entente mutuelle, mais aussi qu'ils limitent les pouvoirs décisionnels et l'autonomie dans l'élaboration des programmes et politiques que veulent les Autochtones. En effet, par suite de cette étude, le CCSSSBJ a nommé des RSC au sein d'importants organismes décisionnels chargés de la création de programmes et services pour diabétiques. Nous croyons que des mesures comme celles-là amélioreront la communication et abaisseront les obstacles, et qu'elles multiplieront en outre les occasions de créer et d'entretenir des liens valables et équitables pour les uns comme pour les autres.

Remerciements

Les auteurs tiennent à remercier le Conseil cri de la santé et des services sociaux de la baie James pour l'appui qu'il a donné à l'étude sur laquelle se fonde ce document et pour avoir autorisé la publication de ses conclusions.

Ils aimeraient aussi exprimer leur gratitude aux membres des communautés cries et aux professionnels de la santé qui ont participé à l'étude. Enfin, ils remercient les deux réviseurs anonymes qui leur ont fourni des commentaires sur un avant-projet de ce document.


Références des auteurs

Patricia Boston, Steven Jordan et Karne Kozolanka, Département d'études en éducation, Faculté de l'education, Université McGill, 3700, rue McTavish, Montréal (Québec)  H3A 1Y2
Elizabeth MacNamara, Département de la biochimie médicale, Faculté de médecine, Université McGill, Hôpital général juif, Montréal (Quebec)
Emily Bobbish-Rondeau, Le conseil cri de la santé et des services sociaux de la baie James (CCSSSBJ) - Chisasibi
Helen Iserhoff et Beatrice Petawabano, CCSSSBJ - Mistissini
Susan Mianscum, CCSSSBJ - Ouje-bougoumou
Rita Mianscum-Trapper, CCSSSBJ - Waswanipi
Irene Mistacheesick, CCSSSBJ - Wemindji
Mary Sheshamush-Masty, CCSSSBJ - Whapmagoostui
Rosie Wapachee, CCSSSBJ - Namaska
Juliet Weapenicappo, CCSSSBJ - Eastmain


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Dernière mise à jour : 2002-10-29 début