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Rapport du vérificateur général
B V G
Rapport d'avril 2005
Points saillants
Introduction
Observations et recommandations
Conclusion
À propos de la vérification
4.1 — Dépenses prévues pour le C4ISR — Défense nationale
4.2 — Examen des objectifs de la deuxième spirale
Liaisons de données tactiques et largeur de bande

Défense nationale — L'initiative C4ISR à l'appui du commandement et du contrôle

Communiqué

Points saillants

4.1 La Défense nationale estime que d'ici 2015, elle aura consacré près de 10 milliards de dollars à des projets d'amélioration de la collecte, du traitement et de l'utilisation des informations militaires. Cet investissement est indispensable pour fournir aux commandants de meilleures informations à l'appui de la prise de décision, afin qu'ils soient en mesure d'exercer un commandement et un contrôle plus rapides et efficaces dans les opérations interarmées et interalliées, et que nous puissions progresser au même rythme que nos alliés. C'est un élément clé de la transformation des Forces canadiennes pour faire face aux défis du XXIe siècle. L'initiative C4ISR (commandement, contrôle, communications, informatique, renseignement, surveillance et reconnaissance) est une stratégie qui vise à faciliter cette transformation des technologies de l'information.

4.2 Le Ministère a pris un bon départ dans la gestion du C4ISR, et il a établi des lignes directrices et des méthodologies pour aider à l'atteinte de ses objectifs. Cependant, certains des éléments clés qui sont requis pour assurer le succès de la mise en œuvre de l'initiative C4ISR ne sont pas encore en place. La Défense nationale doit accorder la priorité à la production d'une doctrine C4ISR interarmées, d'un concept des opérations, d'une définition précise de l'interopérabilité, et d'une vision commune de ce que le C4ISR signifie afin de mieux en guider le développement. La Défense nationale a déjà investi environ 4 milliards de dollars sur les 10 milliards de dollars prévus pour les projets C4ISR, et sans ces éléments clés, le Ministère risque de développer des systèmes non compatibles ou redondants.

4.3 Le C4ISR est complexe et coûteux, et il représente un investissement considérable qui permettra au Ministère d'améliorer la collecte, le traitement et l'utilisation de l'information pour les opérations, en particulier les opérations interarmées et interalliées. Le Ministère reconnaît que chaque armée ne peut pas et ne doit pas se doter de ses propres systèmes C4ISR. La Marine, l'Armée de terre et la Force aérienne doivent travailler ensemble et avec nos alliés pour profiter des économies d'échelle, et pour développer des systèmes interopérables et pleinement intégrés. C'est le Sous-chef d'état-major de la Défense (SCEMD) qui est chargé des opérations interarmées, mais chacune des trois armées (Marine, Armée de terre et Force aérienne) s'occupe traditionnellement de produire ce dont elle a besoin pour ces opérations. Par conséquent, plutôt que d'être mené conjointement, le développement du C4ISR a eu tendance à être mené séparément par chaque armée. De plus, les comités existants des capacités interarmées requises devront être dotés de pouvoirs mieux définis et jouer un rôle plus important dans l'approbation des projets pour que les activités soient bien coordonnées et répondent aux attentes des trois armées.

4.4 Pour que l'initiative C4ISR reste réalisable et financièrement abordable, la Défense nationale doit se doter de mécanismes pour faciliter le choix des projets et pour guider le développement des systèmes. Le Ministère utilise une méthodologie qui l'aide à définir et à préciser les besoins relatifs au système C4ISR au fils du temps, et il a commencé à élaborer une approche commune pour la conception des systèmes requis pour répondre à ces besoins. Cependant, les projets déjà en cours ou en développement n'ont pas été conçus selon une approche commune, et il faudra les examiner pour déterminer s'ils répondent toujours aux besoins du Ministère. Sans cette adhésion à une approche commune, le Ministère n'aura pas l'assurance que ses systèmes seront compatibles et intégrés tel que prévu. Une approche commune au niveau de la conception (c'est-à-dire une architecture d'entreprise) et un examen de tous les projets seront nécessaires pour que le Ministère puisse aller de l'avant d'une façon structurée, efficace et disciplinée.

Contexte et autres observations

4.5 Comme toutes les autres forces armées dans le monde, les Forces canadiennes ont pour objectif d'améliorer la collecte, l'analyse, la diffusion et le partage de l'information recueillie par le biais du C4ISR, afin de fournir aux commandants des renseignements fiables et pertinents pour la prise de décision. Les forces armées déploient des efforts soutenus dans le domaine du C4ISR, en raison des possibilités qu'offrent les technologies de l'information pour l'amélioration du commandement et du contrôle.

4.6 En décembre 2003, le ministère de la Défense nationale a publié le Guide de commandement et plan de campagne C4ISR, pour fournir aux Forces canadiennes des lignes directrices de haut niveau et une approche intégrée pour le développement et la transformation d'une capacité C4ISR qui pourra appuyer le commandement et le contrôle à l'échelle des Forces canadiennes pendant une bonne partie du XXIe siècle.

4.7 D'ici 2008, le Ministère veut avoir réalisé la première étape du C4ISR, et avoir achevé trois phases : développement du concept, consolidation des projets et des initiatives, et transformation initiale. Cela nécessitera la création d'une culture axée sur l'information et d'une organisation réseaucentrique.

4.8 Notre Rapport de 1994, chapitre 25, Technologie de l'information, recommandait que les systèmes de commandement et de contrôle puissent être capables d'opérer de concert dans le cadre d'opérations interarmées et interalliées, ce que le Ministère avait accepté comme une exigence impérative. L'Infrastructure de la technologie de l'information et le Système d'information, de commandement et de contrôle des Forces canadiennes s'efforçaient de répondre à cette exigence. Le Ministère avait reconnu que, jusqu'à tout récemment, il n'avait pas accordé une haute priorité à l'interopérabilité des systèmes dans le cadre des opérations interarmées. Néanmoins, notre chapitre de suivi de 1996 avait conclu qu'il faudrait encore effectuer certaines mises au point au niveau de l'interopérabilité des systèmes d'information, de commandement et de contrôle avant de pouvoir les utiliser dans le cadre des opérations interarmées et interalliées.

4.9 Dans notre Rapport de 1998, chapitre 3, Équiper et moderniser les Forces canadiennes, nous avons signalé que depuis 1994, l'Armée de terre ne s'était pas tenue à la fine pointe de la technologie pour la modernisation de son équipement, ce qui la rendait vulnérable dans les opérations de faible et de moyenne envergure. Certains problèmes ont été corrigés depuis, mais d'autres non. Par exemple, la Défense nationale a travaillé au développement d'un système de communications pour l'Armée de terre qui devait être prêt en 2001, et qui devait avoir une interopérabilité parfaite avec les autres systèmes de commandement et de contrôle des Forces canadiennes. Cependant, en 2004, ce système n'était pas encore pleinement opérationnel.

Réaction du Ministère. Le Ministère a fait connaître les mesures qu'il a prises ou compte prendre pour donner suite aux recommandations. Chaque recommandation présentée dans le chapitre est suivie d'une réponse détaillée.

Introduction

4.10 L'une des priorités du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes est de transformer la façon dont ils mènent leurs opérations en tirant profit des progrès réalisés dans les technologies de l'information. L'objectif est d'appuyer cette transformation opérationnelle en développant des systèmes C4ISR capables de fournir rapidement de l'information fiable et pertinente. Cela réduira l'incertitude à un niveau qui permet aux commandants de prendre les meilleures décisions possibles dans le contexte opérationnel.

4.11 D'après la Défense nationale, la nature de la guerre est en train de changer. L'évolution rapide de la technologie modifie en profondeur la société mondiale et le mode de fonctionnement des forces armées. Beaucoup de gens estiment que l'utilisation des technologies de pointe constitue une révolution dans les affaires militaires. Les alliés du Canada font appel à ces technologies eux aussi, pour pouvoir compter sur des forces modernes et interopérables dans les années à venir.

4.12 La Défense nationale a notamment pour rôle de maintenir la souveraineté du Canada et de contribuer à la défense de l'Amérique du Nord. Pour s'acquitter de cette tâche, ce Ministère doit accroître son aptitude à participer à des opérations interalliées. De plus, il est souvent appelée à collaborer avec d'autres ministères et avec des organisations non gouvernementales. D'après la Défense nationale, nos alliés du NORAD et de l'OTAN veulent que la Défense nationale soit un partenaire compétent capable de contribuer efficacement aux opérations interalliées. Par conséquent, les Forces canadiennes doivent être interopérables avec leurs partenaires dans le domaine de la défense; cela signifie qu'elles doivent se tenir au courant des nouveaux concepts et des nouvelles doctrines militaires, et suivre le rythme des progrès technologiques.

4.13 La vision stratégique du développement des Forces canadiennes au XXIe siècle est énoncée dans le document intitulé Façonner l'avenir de la défense canadienne : une stratégie pour l'an 2020 (la Stratégie 2020), qui dit notamment ceci :

Cette stratégie consiste essentiellement à positionner la structure des Forces canadiennes (FC) pour doter le Canada de forces modernes aptes au combat et adaptées à leurs tâches, qui pourront être déployées dans le monde entier et intervenir rapidement en cas de crise, tant au pays qu'à l'étranger, dans le cadre d'opérations interarmées ou interalliées.

4.14 La réalisation des objectifs de la Stratégie 2020 dépendra notamment de la capacité de la Défense nationale à intégrer les nouvelles technologies de l'information aux concepts opérationnels et organisationnels appropriés.

4.15 En juillet 2002, la Défense nationale a examiné ses capacités et a fait état, dans le document Perspectives sur les capacités 2002–2012, de ses lacunes dans les cinq domaines de capacités. Elle a déterminé qu'il existe une très grave lacune dans le domaine du renseignement et de l'information pour le commandement et le contrôle, et qu'elle devra améliorer l'élaboration de la doctrine, des concepts opérationnels et de la formation interarmées. Le Ministère est conscient de la nécessité d'intégrer les diverses initiatives, car si cette intégration n'est pas menée à bien, le niveau d'interopérabilité au sein des Forces canadiennes, et entre elles et nos alliés, ne sera pas suffisant. Perspectives sur les capacités 2002–2012 établit les priorités suivantes :

  • création d'un véritable système de commandement interarmées pour l'ensemble des Forces canadiennes;
  • plan global pour l'élaboration de politiques, de concepts et d'une doctrine interarmées;
  • développement d'une structure interarmées de commandement stratégique-opérationnel;
  • acquisition d'un ensemble cohérent et pleinement intégré de moyens de renseignement, de surveillance et de reconnaissance;
  • établissement de centres de fusion du renseignement et de l'information.

4.16 Le Ministère a lancé l'initiative C4ISR pour profiter des technologies de l'information et pour corriger ses lacunes d'une façon stratégique, mais aussi pour répondre aux besoins opérationnels de la Marine, de l'Armée de terre et de la Force aérienne.

4.17 Dans son analyse de la capacité C4ISR, le Ministère a découvert plusieurs problèmes qu'il faudra corriger, notamment :

  • la sous-utilisation des réseaux existants;
  • l'absence d'objectifs communs ou de normes communes;
  • le manque d'intégration entre les projets;
  • l'absence d'un système de gestion;
  • la nécessité d'un changement culturel et organisationnel;
  • la nécessité d'accroître les effectifs et la formation;
  • des contraintes de largeur de bande;
  • des contraintes de financement.
Objet de la vérification

4.18 Nous avons évalué les progrès accomplis par le Ministère dans la mise en œuvre des principaux changements organisationnels et opérationnels susceptibles d'accélérer la réalisation des objectifs en matière de C4ISR. Nous avons mis l'accent en particulier sur les progrès du Ministère dans l'élaboration de lignes directrices sur le C4ISR au niveau stratégique, ce qui inclut l'établissement de définitions claires et acceptées de tous, d'une doctrine, de lignes hiérarchiques et de responsabilités, d'un cadre pour une architecture C4ISR applicable à l'ensemble du Ministère, et de mesures du rendement.

4.19 Nous avons également examiné les progrès accomplis par la Défense nationale dans l'intégration des travaux déjà entrepris pour corriger les lacunes grâce à des solutions C4ISR. Enfin, nous avons examiné les coûts prévus de la mise en œuvre des solutions C4ISR, afin de déterminer si les exigences du Ministère sont abordables et réalisables. Le lecteur trouvera d'autres renseignements dans la section du présent chapitre intitulée À propos de la vérification.

Observations et recommandations

La Défense nationale va dans la bonne direction

4.20 Nous avons constaté que le Ministère a fait des progrès dans la correction de ses lacunes dans le domaine du C4ISR. Sous l'autorité du Vice-chef d'état-major de la Défense et du Sous-chef d'état-major de la Défense (SCEMD), la Défense nationale a créé le Comité des capacités interarmées requises et le Comité de surveillance C4ISR pour fournir une perspective stratégique et exercer un leadership dans le domaine du C4ISR. Grâce à ces comités, la haute direction dispose d'un forum où elle peut discuter des initiatives C4ISR interarmées.

4.21 Le Ministère a également mis sur pied une Équipe d'évaluation des capacités interarmées qui est chargée d'examiner les besoins opérationnels et d'évaluer si des initiatives ou des projets particuliers sont conformes aux objectifs communs. Cette Équipe d'évaluation peut ensuite informer le Comité des capacités interarmées requises et le Comité de surveillance C4ISR des possibilités qui existent dans le domaine du C4ISR.

4.22 Le Ministère a produit son Guide de commandement et plan de campagne C4ISR pour énoncer sa vision et fournir des lignes directrices sur la réalisation des objectifs en matière de C4ISR. Dans le plan de campagne, le Ministère signale que les trois armées ne doivent pas développer séparément leurs propres systèmes d'information pour le commandement et le contrôle. En effet, les trois armées risqueraient ainsi de prendre des chemins divergents, de développer des systèmes redondants, et de ne pas profiter des économies d'échelle. Cela augmenterait le risque que les systèmes ne puissent pas être interconnectés au besoin, ce qui est contraire aux objectifs du Ministère en matière de C4ISR.

4.23 Pour prévenir cette situation, le Ministère a adopté un modèle d'entreprise qui intègre tous les investissements et toutes les activités de gestion de l'information dans le cadre d'une stratégie globale pour la Défense. Grace à ce modèle, les trois armées et les groupes n'ont plus à mener leurs propres travaux de gestion de l'information. Les trois armées et les groupes établissent leurs besoins, mais c'est le Sous-ministre adjoint (Gestion de l'information) (SMA [GI]) qui est chargé de la conception des systèmes. En adoptant cette approche, la Défense nationale veut faire en sorte que des protocoles communs soient appliqués au développement des systèmes. Le Ministère croit que cela permettra d'établir un cadre structuré et une discipline pour la réalisation des initiatives C4ISR, et que d'ici 2008, des systèmes intégrés seront en place dans tous les secteurs fonctionnels.

Abordabilité

Les contraintes de financement pourraient mettre en péril certains projets C4ISR

4.24 Nous avons examiné les dépenses prévues pour 91 projets que la Défense nationale considère comme points de départ pour la planification et la mise en œuvre de la transformation du C4ISR. Nous estimons que les dépenses de C4ISR pourraient s'élever au total à 9,7 milliards de dollars, dont environ 4 milliards ont déjà été dépensés. Le Ministère prévoit que les 5,7 milliards qui restent seront dépensés au cours des 10 prochaines années. Dans quelques années, les dépenses de C4ISR atteindront un niveau correspondant à 40 p. 100 du budget d'immobilisations.

4.25 La pièce 4.1 montre les dépenses prévues pour les projets C4ISR, et la pression que cela exerce sur le budget d'immobilisations. Bien que le Ministère ait dû faire des choix difficiles dans la répartition du budget d'immobilisations, les dépenses prévues pour achever les projets en cours et entreprendre la réalisation des projets figurant dans le Plan stratégique d'investissement dans les capacités dépassent les sommes disponibles dans le budget d'immobilisations. Ces contraintes de financement pourraient entraîner la réduction, le report ou l'annulation de certains projets C4ISR.

4.26 Les objectifs en matière de C4ISR et le calendrier de mise en œuvre seraient compromis si les projets appropriés ne pouvaient pas être financés ou s'ils étaient reportés. Le Ministère a recommandé un examen de ses projets C4ISR pour vérifier s'ils sont toujours requis du point de vue opérationnel, mais nous avons constaté que cet examen n'a toujours pas été entrepris. Le Ministère devra procéder à cet examen pour s'assurer que les projets prévus ou en cours respectent les lignes directrices sur le C4ISR, pour éviter les chevauchements inutiles et obtenir les meilleurs résultats.

4.27 Dans son Plan stratégique d'investissement dans les capacités 2004, la Défense nationale indique quels sont les projets C4ISR qu'elle a l'intention de réaliser en priorité. Il y a trois types de projets C4ISR qui, d'après le Ministère, auront besoin d'un financement évalué à 5,7 milliards de dollars.

  • Projets essentiels. Ces projets sont jugés indispensables pour la mise en œuvre du C4ISR. Par exemple, le Projet de système de commandement des Forces canadiennes — Phase II (102 millions de dollars) est essentiel pour permettre une meilleure intégration de l'information. Au total, le Ministère prévoit dépenser environ 882 millions de dollars pour 13 projets essentiels au cours des 10 prochaines années. Tous les projets essentiels ont déjà été approuvés ou seront financés en priorité.
  • Projets connexes. Ces projets font partie de l'initiative C4ISR pour corriger les lacunes et continuer la transformation du C4ISR. Par exemple, le Projet de soutien spatial conjoint et le Projet d'amélioration de la distribution des données tactiques sont des projets connexes. Le Ministère prévoit dépenser environ 1,7 milliard de dollars pour des projets connexes au cours des 10 prochaines années. Nous avons constaté que sur les 19 projets connexes, 10 ont déjà été approuvés et sont en cours ou terminés. Les autres projets connexes, s'ils sont approuvés, auront besoin d'un financement évalué à 1,25 milliard de dollars étalé sur les 10 prochaines années.
  • Autres projets faisant partie du C4ISR. Il y a 59 autres projets C4ISR prévus par le Ministère ou déjà en marche. Le Ministère prévoit dépenser environ 3,1 milliards de dollars pour ces projets au cours des 10 prochaines années.

Stratégie de mise en œuvre du C4ISR

Des systèmes C4ISR ont été développés sans qu'on ait élaboré une doctrine ou un concept des opérations interarmées

4.28 Pour être utiles sur le plan opérationnel, les programmes de la Défense doivent être fondés sur une doctrine et des concepts d'opération appropriés. Un concept d'opération guide la planification, qui traduit les objectifs stratégiques en opérations militaires en indiquant clairement les actions qui sont requises pour accomplir la mission. La doctrine est essentielle, car elle établit les principes fondamentaux qui régissent la planification des opérations militaires, la recherche de compromis et le déroulement des actions. Le concept d'opération du Système de commandement des Forces canadiennes stipule que tous les programmes d'équipement, y compris les projets C4ISR, doivent être fondés sur une doctrine pertinente.

4.29 Le Guide de commandement et plan de campagne C4ISR dit que la doctrine, les concepts et les systèmes doivent évoluer selon un modèle unique et convergent qui garantit l'interopérabilité entre les trois armées. Sans ces éléments, les Forces canadiennes ne disposeraient pas d'un plan pour poursuivre le développement du C4ISR d'une façon qui répond aux exigences opérationnelles des trois armées.

4.30 Nous avons constaté que les 91 projets C4ISR vont de l'avant sans que ce plan ait été mis en place. Par conséquent, il est difficile de lier les projets à un objectif global interarmées en matière de C4ISR, ou d'obtenir l'assurance que les travaux C4ISR prévus ou déjà en cours se dérouleront selon un schéma commun.

4.31 Chacune des trois composantes des forces armées (Marine, Armée de terre et Force aérienne) a la responsabilité d'élaborer et d'entretenir sa propre doctrine et son propre concept d'opération. Le SCEMD est chargé de la doctrine et du concept d'opération pour les opérations interarmées et interalliées. Le Ministère a déclaré qu'il n'a pas encore comblé le fossé entre la doctrine au niveau des armées et la doctrine interarmées.

4.32 En août 2002, le Ministère a signalé qu'aucun effort n'était déployé pour le développement d'une doctrine interarmées en matière de C4ISR. Au moment de la présente vérification, le Ministère n'avait toujours pas de plans pour l'élaboration d'une doctrine C4ISR, même si le Plan de la Défense avait recommandé qu'une doctrine et des procédures d'interopérabilité interarmées soient élaborées et mises en œuvre avant juillet 2004.

4.33 Pour développer des systèmes conformes à sa vision C4ISR, le Ministère a besoin d'une doctrine et d'un concept des opérations, afin d'éviter d'aller dans la mauvaise direction — c'est-à-dire le développement de systèmes redondants ou incompatibles. Avec des dépenses prévues de près de 6 milliards de dollars sur les dix prochaines années pour le C4ISR, ces éléments clés devraient être mis en place dans les plus brefs délais.

4.34 Les liaisons de données tactiques et la largeur de bande sont deux exemples de projets C4ISR dont le développement doit se fonder sur une doctrine C4ISR (voir Liaisons de données tactiques et largeur de bande).

L'interopérabilité n'a pas encore été définie pour le C4ISR

4.35 La Défense nationale est également préoccupée par son niveau actuel d'interopérabilité avec ses alliés en ce qui concerne la doctrine. Une évaluation effectuée en 2002 a conclu que les problèmes d'interopérabilité pourraient avoir un impact important ou notable sur les opérations.

4.36 La Défense nationale n'a pas de définition approuvée de l'interopérabilité pour les opérations interarmées et interalliées. Dans ses documents, elle n'a pas adopté la définition proposée par l'OTAN pour les opérations interarmées et interalliés. D'après les documents du Ministère, la définition de l'OTAN est centrée sur les opérations de l'OTAN et ne répond pas aux besoins des Forces canadiennes. Cependant, aucune autre définition n'a été formulée. Le Ministère a l'intention d'établir un groupe de travail sur l'interopérabilité qui produira le plan d'interopérabilité dont il a besoin.

Certains éléments importants de la stratégie de mise en œuvre du C4ISR doivent être élaborés

4.37 Tâche. Le Plan de la Défense dit clairement que la Défense nationale améliorera sa capacité C4ISR. De plus, le Plan donne des directives précises au Sous-chef d'état-major de la Défense (SCEMD), au Chef d'état-major de la Force maritime, au Chef d'état-major de l'Armée de terre, au Chef d'état-major de la Force aérienne, au Sous-ministre adjoint (Gestion de l'information) (SMA[GI]) et au Sous-ministre adjoint (Science et technologie) sur la façon de procéder. Les trois armées et les groupes devront « auto-synchroniser » leurs activités et leurs efforts, à partir des indications du Guide de commandement et plan de campagne C4ISR et du Modèle d'intégration d'objectifs 2008.

4.38 Cette auto-synchronisation sera effectuée dans le cadre du processus de planification des activités, dans lequel les trois armées et les groupes établissent leurs besoins opérationnels ainsi que les besoins liés au C4ISR. Les trois armées et les groupes doivent déterminer comment ils vont « auto-synchroniser » leurs activités. Cependant, le Guide de commandement et plan de campagne C4ISR explique que l'auto-synchronisation se réalisera à mesure qu'une synergie sera créée entre la doctrine, les concepts et les capacités C4ISR. Par conséquent, pour que l'auto-synchronisation fonctionne, il faudra que le Ministère ait mis en place la doctrine et le concept des opérations requis.

4.39 Directives. Le Guide de commandement et plan de campagne C4ISR a été approuvé par le Comité de surveillance C4ISR, et il a été signé par le SCEMD, à titre de président du Comité de surveillance C4ISR. En février 2003, une présentation a été faite au Comité de gestion de la Défense sur les progrès accomplis jusqu'ici, et en décembre 2003, le Comité des capacités interarmées requises a approuvé le plan de campagne. Cependant, nous n'avons trouvé aucune directive du Sous-ministre ou du Chef d'état-major de la Défense sur la mise en œuvre du Guide de commandement et plan de campagne C4ISR. Nous n'avons pas trouvé non plus de directives émises par les groupes ou par les trois armées à l'intention des niveaux subalternes.

4.40 Le Ministère pourrait émettre une ordonnance administrative et une directive pour annoncer sa politique sur la mise en œuvre de l'initiative C4ISR, mais cela n'a pas encore été fait. Cette ordonnance administrative pourrait contenir des définitions ainsi que des précisions sur l'orientation stratégique, les rôles, les responsabilités et les lignes d'autorité.

4.41 Définition. Nous avons constaté que le C4ISR ne signifie pas la même chose pour tout le monde. Le Ministère signale lui aussi ce phénomène dans ses documents. Le Guide de commandement et plan de campagne C4ISR devra être mis à jour de façon à inclure des objectifs atteignables, des critères de mesure du succès, et des précisions sur la mission, les ressources, les contraintes et l'orientation stratégique à l'intention des commandants, selon le Processus de planification opérationnelle des Forces canadiennes. Si cette étape est franchie, l'initiative C4IRS deviendra plus claire.

4.42 Plans des groupes et des trois armées. En mars 2004, conformément au modèle d'entreprise du Ministère, le SMA(GI) a demandé aux groupes et aux trois armées de produire un plan de gestion de l'information/technologie de l'information pour juin 2004, afin d'instaurer une interface avec le Groupe de gestion de l'information. Cependant, au moment de la présente vérification, le SMA(GI) n'avait pas reçu toutes les informations attendues.

4.43 Plans d'accompagnement. Nous avons constaté que sur les dix plans d'accompagnement prévus par le Guide de commandement et plan de campagne C4ISR, seulement quatre étaient en cours d'élaboration. La préparation de ces dix plans était censée commencer au plus tard en avril 2004. Les documents du Ministère indiquent que quatre plans ont été élaborés, mais le Ministère n'a pu nous donner copie d'aucun de ces plans.

4.44 Évaluation des risques liés à la mise en œuvre du C4ISR. La Défense nationale dispose d'un Cadre intégré de gestion des risques stratégiques pour évaluer les risques et déterminer la façon de les gérer. Ce cadre est conçu pour proposer des méthodes et des mesures de gestion des risques qui appuient les objectifs de la Défense. Le concept de fonction intégrée de gestion des risques du Conseil du Trésor suppose que les ministères se doteront d'une infrastructure de gestion des risques pour fournir des directives claires et appuyer la haute direction. La Défense nationale a choisi de s'éloigner de l'approche du Conseil du Trésor et d'utiliser sa structure de comités et les processus de planification existants.

4.45 Le Ministère n'a pas encore effectué une évaluation des risques de son initiative stratégique C4ISR. Le Guide de commandement et plan de campagne C4ISR définit cinq « points décisifs pour l'atténuation des risques », c'est-à-dire cinq secteurs susceptibles de présenter des risques. Cependant, le Ministère devra évaluer en détail la nature et l'impact potentiel des risques dans chacun de ces secteurs, et élaborer une stratégie de gestion des risques.

4.46 Recommandation. La Défense nationale devrait accorder la priorité à l'élaboration d'une doctrine et d'un concept des opérations interarmées pour le C4ISR, et à la formulation d'une définition de l'interopérabilité, d'ici la fin de 2006.

Réponse du Ministère. D'accord. Il est reconnu que la doctrine, les concepts d'opération et les définitions claires constituent des éléments clés de la mise en œuvre du C4ISR et que leur élaboration demeure une haute priorité. Même si le processus de rédaction et d'approbation de doctrines et de concepts des opérations est très complexe, le Ministère fera tout son possible pour concevoir ces éléments d'ici la fin de 2006.

Une gestion plus rigoureuse du C4ISR est requise

4.47 Le Comité de surveillance C4ISR et le Comité des capacités interarmées requises ont été créés en 1999 et 2000 respectivement, pour permettre une meilleure coordination des besoins. Le Comité des capacités interarmées requises est chargé de faire mieux connaître le concept d'employabilité et le concept des opérations, de dégager un consensus sur l'énoncé des besoins opérationnels, et de résoudre les problèmes liés à l'envergure des projets au niveau ministériel. Le Comité de surveillance C4ISR élabore une perspective stratégique et exerce un leadership pour tout ce qui concerne le C4ISR.

4.48 Les documents du Ministère indiquent que cette structure de comités est problématique, à cause de l'absence de lignes d'autorité clairement établies. Bien que le Comité de surveillance du C4ISR assume un rôle de surveillance et de coordination pour l'administration des tâches courantes relatives au C4ISR, il n'existe pas d'autorité unique chargée des éléments importants comme la mise en œuvre du Guide de commandement et plan de campagne C4ISR ou l'examen des projets.

4.49 Nous avons constaté que souvent des intervenants du Ministère ont contourné cette structure de comités avant l'approbation des projets C4ISR. Par conséquent, nous n'avons pas pu déterminer comment ces comités ont pu remplir leur fonction d'examen et de coordination pour le C4ISR. Depuis 1999, seulement 6 des 13 projets essentiels et 2 des 19 projets connexes ont été soumis au Comité de surveillance C4ISR ou au Comité des capacités interarmées requises pour discussion, avant d'être transmis au Conseil de gestion du programme pour que leur financement soit approuvé.

4.50 Nous avons également constaté que pour environ 72 p. 100 des projets essentiels et des projets connexes du C4ISR, il manquait certains documents clés nécessaires à l'examen et à l'approbation du projet. Il manquait l'énoncé d'insuffisance en capacités ou l'énoncé des besoins opérationnels, ou les deux. Jusqu'ici, la Défense nationale a dépensé environ 2,9 milliards de dollars sur les 3,7 milliards prévus à des projets essentiels et connexes qui n'ont pas d'énoncé d'insuffisance en capacités ou d'énoncé des besoins opérationnels.

4.51 L'Équipe d'évaluation des capacités interarmées a signalé qu'il est très difficile d'établir une liste des projets C4ISR par ordre de priorité, car pour y arriver, il faut comparer un grand nombre d'éléments dissemblables. L'Équipe d'évaluation a également observé que la grande diversité de ces projets, qui fait qu'il est difficile de trouver un organe de décision ayant une connaissance approfondie de tous les projets, rend l'opération encore plus complexe.

4.52 Des représentants du Ministère nous ont signalé que le Comité des capacités interarmées requises et le Comité de surveillance C4ISR n'ont pas suffisamment de ressources pour participer davantage au processus de sélection des projets, car il leur faudrait beaucoup plus de personnel. De plus, le Comité de surveillance C4ISR devrait se réunir plus fréquemment.

4.53 Recommandation. La haute direction devrait s'assurer qu'à l'avenir, dans le cadre du processus d'approbation des projets, tous les projets C4ISR sont examinés et approuvés par le Comité des capacités interarmées requises et le Comité de surveillance C4ISR, afin de donner l'assurance qu'au bout du compte tous les projets seront compatibles avec les objectifs en matière de C4ISR.

Réponse du Ministère. D'accord. Les futurs projets C4ISR seront examinés par le Comité des capacités interarmées requises et le Comité de surveillance du C4ISR.

Les travaux commencent en vue de l'établissement d'une architecture d'entreprise pour le C4ISR

4.54 En 2002, un examen interne de la gestion de l'information a révélé que la Défense nationale n'avait pas d'architecture globale pour la gestion de l'information, et a décelé plusieurs cas de chevauchement. Par suite de ces constatations, le Ministère a adopté un modèle d'entreprise pour la gestion de l'information, et il a pris l'engagement de créer une architecture d'entreprise. Le SMA (GI) a commencé à travailler à l'établissement d'une architecture d'entreprise, ce qui inclut l'élaboration d'un plan pour montrer comment l'information sera obtenue, recueillie et intégrée aux divers secteurs fonctionnels du Ministère.

4.55 Le Ministère a déterminé quelles sont les activités qu'il doit entreprendre pour commencer à développer son architecture d'entreprise. En octobre 2004, il a publié un Plan d'architecture d'entreprise intégrée pour la Défense (Ébauche), pour faire connaître les principes de base de l'architecture d'entreprise du Ministère, et pour indiquer quelles activités seront terminées en 2006.

4.56 Le Ministère reconnaît qu'en ce qui concerne l'architecture d'entreprise, son principal défi consiste à déterminer quels éléments de ses trois portefeuilles de gestion de l'information — militaire, ministériel et commun — devront être interconnectés ou intégrés pour éviter les chevauchements et accroître la flexibilité. De plus, le Ministère se doit d'affecter les ressources appropriées aux priorités réelles.

4.57 Un autre défi auquel doit faire face le Ministère est de faire en sorte que les projets C4ISR prévus ou déjà en cours soient harmonisés avec l'architecture d'entreprise envisagée. Le Ministère devra prendre les mesures appropriées pour que les systèmes convergent de façon à répondre aux attentes de la haute direction. Le Ministère reconnaît qu'il faudrait procéder à un examen des projets/initiatives élaborés centralement ou par chacune des trois armées, car de nombreux projets ont commencé avant la publication par la Défense nationale du Guide de commandement et plan de campagne C4ISR. Le Ministère devra donc s'assurer que les projets prévus ou déjà en cours sont conformes à l'orientation qui est prise actuellement.

4.58 Sans une architecture d'entreprise, le Ministère risque d'acheter et de construire des systèmes qui font double emploi, ou des systèmes incompatibles et trop coûteux à entretenir et à intégrer. Cette architecture est essentielle, car elle servira à informer, à guider et à restreindre les décisions du Ministère, surtout celles qui se rapportent aux investissements dans les technologies de l'information.

4.59 Recommandation. La Défense nationale devrait s'occuper en priorité de terminer son architecture d'entreprise.

Réponse du Ministère. D'accord. Vu les conclusions de l'Examen stratégique de la gestion de l'information et les efforts continus pour concevoir un plan stratégique de gestion de l'information, l'établissement d'une architecture d'entreprise est manifestement une grande priorité. L'architecture d'entreprise et le plan de campagne C4ISR devraient être élaborés en symbiose afin de produire une architecture d'entreprise qui répondra efficacement aux besoins opérationnels et, par le fait même, à ceux du C4ISR.

La méthode de développement en spirale est tout indiquée, mais elle doit être améliorée

4.60 D'ici 2008, la Défense nationale a l'intention de mettre en œuvre le C4ISR en onze étapes de six mois chacune. Ces étapes sont désignées sous le nom de « spirales », et elles doivent aboutir à la mise en place du Modèle d'intégration d'objectifs 2008. Chaque spirale vise certains objectifs et (ou) capacités. À la fin de chaque spirale, les objectifs atteints ou les capacités acquises servent de base pour la spirale suivante. Les objectifs non atteints peuvent être reportés sur une spirale ultérieure ou simplement annulés. La souplesse de cette méthode de développement en spirale est ce qui la distingue de la méthode traditionnelle « en cascade ».

4.61 La méthode de développement en spirale semble appropriée pour le C4ISR, car les besoins globaux sont définis de façon approximative, et le produit final n'est pas encore connu. Cette méthode permet de modifier et de préciser les besoins pendant le déroulement du processus. Au moment de la présente vérification, le Ministère avait terminé les deux premières spirales, et il commençait à travailler sur la troisième.

4.62 L'un des objectifs du C4ISR est de répondre aux besoins opérationnels des groupes et des trois armées. Au départ, le Ministère a choisi d'élaborer les plans du C4ISR de façon centralisée, tout en se promettant d'accroître la participation des utilisateurs après la publication du Guide de commandement et plan de campagne C4ISR. Cependant, le Ministère n'a pu nous fournir aucune preuve de la participation des utilisateurs à la définition des besoins en matière de C4ISR au niveau opérationnel. Nous avons été informés qu'actuellement, il n'existe aucun processus qui permet de solliciter l'avis des utilisateurs. Cependant, le Ministère a organisé récemment un atelier à l'intention des utilisateurs. Avec la méthode de développement en spirale, il est essentiel de connaître et d'évaluer les besoins des utilisateurs, car autrement, on risque d'atteindre des objectifs et de développer des capacités qui ne répondent pas aux besoins des utilisateurs.

4.63 Les objectifs des spirales ont été élaborés en l'absence d'une architecture d'entreprise. Nous croyons que les futures spirales devraient être harmonisées avec l'architecture d'entreprise à mesure qu'elle sera développée, afin de donner à la haute direction l'assurance que l'initiative C4ISR va dans la bonne direction. Le Ministère a reconnu la nécessité d'harmoniser le C4ISR avec l'architecture d'entreprise, et il nous a informés qu'il est en train d'examiner les moyens qui lui permettront de s'acquitter de cette tâche.

4.64 Nous avons également remarqué que les objectifs des spirales, tels qu'énoncés par le Ministère, sont très vagues et sujets à interprétation. Il sera donc facile pour le Ministère de conclure qu'ils ont été atteints. Dans la pièce 4.2, nous examinons certains des objectifs de la deuxième spirale et comment le Ministère pourrait les améliorer pour les rendre plus précis, mesurables, atteignables, pertinents et limités dans le temps.

4.65 Nous avons constaté qu'au moment de la vérification, les principaux indicateurs de rendement n'avaient pas encore été établis. L'absence d'indicateurs signifie que le Ministère peut déclarer qu'il a atteint tel ou tel de ses objectifs, et même tous ses objectifs. Par exemple, le Ministère a conclu que 20 des 41 objectifs de la première spirale avaient été réalisés totalement ou en grande partie, mais nous avons été informés qu'il s'agit là d'une évaluation subjective qui n'est fondée sur aucun critère bien défini. Après étude, nous avons constaté que, pour 12 des 20 objectifs susmentionnés, il était difficile, à partir des éléments de preuve que nous possédions, de conclure que ces objectifs avaient été atteints en grande partie. Il était trop tôt pour évaluer si les objectifs de la deuxième spirale avaient été atteints, car ils venaient tout juste d'être établis.

4.66 Recommandation. Le Ministère devrait examiner les objectifs des spirales pour s'assurer qu'ils sont suffisamment clairs pour que les résultats puissent être mesurés.

Réponse du Ministère. D'accord. Les objectifs en spirale du plan de campagne C4ISR font constamment l'objet d'examens. Le développement en spirale est conçu pour évoluer à mesure que la mise en œuvre se poursuit et que les résultats finaux se clarifient.

Les tâches et les objectifs analysés durant la présente vérification faisaient partie des deux premières spirales du plan de campagne. À la fin de chaque spirale, des leçons ont été retenues, la méthodologie d'attribution des tâches a été améliorée, et les objectifs ont été clarifiés. C'est ainsi que de nombreuses suggestions faites par l'équipe de vérification durant leurs travaux ont déjà été intégrées à la spirale 3 et seront ancrées plus fermement lors des spirales suivantes.

4.67 Recommandation. Le Ministère devrait établir des indicateurs de rendement qui permettront à la haute direction de mesurer avec précision les résultats obtenus.

Réponse du Ministère. D'accord. Comme il est souligné à la réponse au point 4.66, le Ministère déterminera et appliquera des indicateurs de succès mesurables, lorsque les circonstances le permettront.

Gestion des ressources humaines

Le développement de ressources humaines qualifiées pour le C4ISR accuse du retard sur les autres activités

4.68 Suite à la transformation du C4ISR, il faudra un nombre approprié de militaires qualifiés pour exploiter les ressources des technologies de l'information. En 2003, dans les Forces canadiennes, il manquait plus de 700 officiers et militaires ayant les compétences et la formation nécessaires dans les groupes professionnels requis pour le C4ISR. La Défense nationale croit que la plupart des compétences associées au développement des capacités C4ISR peuvent être trouvées dans les Forces canadiennes. Cependant, trois compétences essentielles seront difficiles à trouver parmi les ressources humaines militaires existantes et prévues :

  • analystes de la fusion RSR—pour des systèmes spectraux particuliers;
  • gestionnaires de contenu—pour le traitement de l'information et la gestion des bases de données;
  • webmestres—pour la gestion et la diffusion du contenu des sites Web.

4.69 La formation sur la conversion et la modification des plans existants pour le développement des compétences et des cheminements professionnels requis ne commenceront pas avant 2007. De plus, d'après la Défense nationale, il faudra entre quatre et sept ans pour recruter et former des militaires possédant de solides compétences en gestion de l'information / technologie de l'information. L'attrition viendra aggraver la pénurie de personnel compétent en C4ISR. Le Ministère reconnaît que des stratégies d'atténuation devront être élaborées pour faire face aux questions telles que la formation et les services de soutien technique.

4.70 Le Ministère s'attaque à certains problèmes dans le cadre de son Projet d'analyse, de restructuration et d'adaptation de la structure des groupes professionnels militaires (PARA), mais nous avons été informés que l'établissement des besoins en ressources humaines pour le C4ISR ne sera pas terminé avant l'automne 2007. Le Ministère a besoin du PARA pour établir ses besoins en personnel, afin de s'assurer que son initiative C4ISR est réaliste et réalisable, compte tenu des restrictions en matière de ressources humaines. Des programmes de formation et de recrutement devront être élaborés à temps pour que des personnes compétentes soient disponibles lorsqu'on en a besoin. Nous constatons avec inquiétude que le développement des ressources humaines ne progresse pas au même rythme que les autres activités de transformation du C4ISR, ce qui risque de nuire à la capacité du Ministère de répondre à ses propres besoins.

4.71 Recommandation. La haute direction devrait prendre des mesures pour intégrer plus pleinement et rapidement la planification des ressources humaines dans sa stratégie de mise en œuvre du C4ISR.

Réponse du Ministère. D'accord. Le Ministère est très conscient de l'importance de la dimension humaine du C4ISR, et il fait tous les efforts possibles pour s'assurer qu'un personnel qualifié et compétent sera disponible pour doter les postes de C4ISR. Par conséquent, puisque l'on sait qu'il faut de quatre à sept ans pour complètement former le personnel technique, on s'attend à ce que la plupart des postes C4ISR exigent un personnel militaire de rang élevé. Dans un avenir rapproché, ces postes seront donc occupés par du personnel militaire existant plutôt que par des recrues. Dans la mesure du possible, les militaires sélectionnés pour ces postes recevront la formation nécessaire pour acquérir l'ensemble de compétences exigées pour des emplois particuliers. De plus, là où il manque de personnel compétent, on pourrait avoir recours à des ressources civiles.

En reconnaissance de l'importance des ressources humaines, les sous-ministres adjoints responsables du personnel militaire et civil ont des représentants qui siègent à tous les comités d'examen et de prise de décisions ministériels. Ils ont également mis en place un plan de RH pour répondre aux besoins en matière de C4ISR. Ce plan a été pleinement intégré au plan de campagne global C4ISR; il est respecté à la lettre pour que les exigences liées aux RH soient satisfaites afin de pouvoir mettre sur pied une capacité C4ISR complètement intégrée et interopérable d'ici 2008.

Conclusion

4.72 L'initiative C4ISR du Ministère résulte de la découverte de lacunes dans les capacités essentielles de commandement et de contrôle. Le Ministère reconnaît que ces lacunes doivent être corrigées. Pour atteindre son objectif, qui est de fournir aux commandants des informations de qualité pour faciliter la prise de décision, le Ministère veut mettre en place, d'ici 2008, des systèmes de commandement et de contrôle interopérables et pleinement intégrés. Pour être en mesure de respecter cette échéance, le Ministère devra éliminer certains obstacles à la mise en œuvre du C4ISR sans tarder.

4.73 La Défense nationale a adopté, de façon appropriée, une méthode de développement en spirale pour établir et préciser les besoins, ce qui lui permettra d'apporter les changements nécessaires pendant le processus. Avec cette méthode, le Ministère devra prendre les mesures suivantes pour améliorer les résultats :

  • examiner les projets C4ISR prévus et en cours;
  • définir clairement les objectifs de chaque spirale, et les mesures du rendement;
  • accroître la participation des utilisateurs à l'établissement des besoins;
  • veiller à ce que le développement d'une architecture d'entreprise soit une priorité, et à ce que les objectifs en matière de C4ISR soient compatibles avec cette architecture d'entreprise.

4.74 Pour le financement, les projets C4ISR seront en concurrence avec les autres priorités du programme d'immobilisations. Le Ministère a établi ses priorités et planifié ses dépenses en capital, mais le coût des projets dépasse le budget disponible. Ces contraintes de financement mettent l'initiative en péril. Tous les projets doivent être examinés afin de s'assurer que l'on accorde bien la priorité aux projets voulus, et qu'ils sont conformes aux objectifs établis.

4.75 Certains éléments de l'initiative C4ISR progressent plus vite que d'autres, d'où le risque pour le Ministère de développer des systèmes qui feront double emploi ou qui seront impossibles à intégrer ou à rendre interopérables. Le développement des systèmes se fait en l'absence d'une doctrine ou d'un concept des opérations interarmées pour le C4ISR. Il n'y a pas, notamment, de définition de l'interopérabilité, ni d'architecture d'entreprise en place pour garantir un développement harmonieux des projets. Une ligne directrice sur le développement des systèmes sera nécessaire si l'on veut que ceux-ci soient intégrés en 2008. Enfin, les programmes qui visent à faire en sorte qu'un personnel qualifié soit disponible au besoin ont pris du retard.

4.76 Les mécanismes de régie qui guident les progrès du C4ISR ne sont pas assez solides. Les problèmes d'autorité et d'orientation stratégique n'ont pas encore été résolus, bien que le Ministère en soit conscient. Par conséquent, certains projets n'ont pas encore été examinés et approuvés par les comités responsables, les objectifs en matière de C4ISR sont mal définis, et l'interopérabilité des systèmes pour les opérations interarmées et interalliés demeure incertaine.

À propos de la vérification

Objectifs

L'objectif global de notre vérification était de déterminer jusqu'à quel point la Défense nationale a été capable de déceler et d'exploiter les possibilités des technologies de l'information pour appuyer le commandement et le contrôle, et si la Défense nationale a un plan qui est réalisable et dont le coût est abordable.

Plus particulièrement, nous avons examiné jusqu'à quel point

  • le concept de C4ISR pouvait appuyer la capacité de commandement et de contrôle des Forces canadiennes, depuis le niveau stratégique jusqu'aux niveaux opérationnel et tactique;
  • les plans et les projets C4ISR étaient réalisables et d'un coût abordable.

Étendue et approche

Nous avons effectué notre vérification au Quartier général de la Défense nationale, et nous avons visité les Forces maritimes de l'Atlantique (Halifax) et du Pacifique (Esquimalt), le Secteur du Québec de la Force terrestre (Montréal), l'Unité de soutien de secteur et le 5e Groupe-brigade à Valcartier, la 1re Division aérienne du Canada et le Quartier général de la Région canadienne du Nord du NORAD à Winnipeg, ainsi que les établissements de Recherche et développement pour la défense Canada à Valcartier et Shirley's Bay.

L'équipe de vérification a interviewé des membres du personnel du SCEMD, du VCEMD, du SMA(GI), du SMA(S&T), du SMA(Mat) et du SMA(Fin SM), et elle a examiné les dossiers et les documents pertinents du Ministère. Les politiques, les normes et les accords de l'OTAN et du NORAD ont été examinés au besoin.

Pour vérifier le montant des dépenses, nous avons utilisé les données du Système de comptabilité financière et de gestion, de la Base de données des initiatives pour les capacités, et du Plan stratégique d'investissement dans les capacités.

Nous avons examiné si le concept de C4ISR et les exigences de la connectivité étaient bien compris. Nous avons examiné si les projets considérés comme nécessaires étaient réalisables et d'un coût abordable, et nous avons évalué l'interopérabilité pour les opérations interarmées et interalliées. Nous avons également examiné comment le processus d'approbation des projets C4ISR tient compte des besoins pour la mise en œuvre de l'initiative C4ISR.

Critères de vérification

Nous nous attendions à ce que la Défense nationale :

  • définisse clairement le C4ISR et précise ce qu'elle cherche à accomplir en se donnant des objectifs précis, mesurables, atteignables, réalistes et limités dans le temps;
  • s'assure que la mise en œuvre du plan de campagne peut être réalisée à un coût abordable et dans les délais prévus;
  • respecte la politique du Secrétariat du Conseil du Trésor et de la Défense nationale sur la gestion des risques lors de la mise en œuvre du concept de C4ISR.

Équipe de vérification

Vérificateur général adjoint : Hugh McRoberts
Directrice principale : Wendy Loschiuk
Premier directeur : Pierre Hamel
Directeur : Tony Brigandi

Karla Antoniazzi
Kirk Giroux
Peter MacInnis
Craig Millar
Kathryn Nelson

Pour obtenir de l'information, veuillez joindre le Service des communications en composant le (613) 995-3708 ou le 1-888-761-5953 (sans frais).


Définitions :

C4ISR — Command and Control, Communications, Computing, Intelligence, Surveillance and Reconnaissance (commandement, contrôle, communications, informatique, renseignement, surveillance et reconnaissance) : comprend la doctrine, les concepts, la connectivité, les systèmes d'information, les capteurs et les outils qui sont nécessaires pour appuyer efficacement le commandement dans l'ensemble des opérations des Forces canadiennes grâce à la transmission rapide d'informations fiables et pertinentes. (Retourner)

Commandement et contrôle — L'autorité qu'un commandant désigné exerce sur les forces qui lui sont assignées en vue d'accomplir une mission. Les fonctions de commandement et de contrôle sont exécutées grâce aux diverses ressources (personnel, équipement, communications, installations et procédures) que le commandant utilise pour planifier, diriger, coordonner et contrôler ses forces militaires dans l'accomplissement de leur mission. (Retourner)

Doctrine — Ensemble de principes fondamentaux qui guident les interventions militaires à l'appui des objectifs recherchés. (Retourner)

Concept d'opération — Expression claire et concise de la manœuvre choisie par le commandant pour exécuter la mission reçue. (Retourner)

Interopérabilité — Les Forces canadiennes n'ont pas de définition de l'interopérabilité. L'OTAN définit l'interopérabilité comme « l'aptitude des forces de l'Alliance et, lorsqu'il y a lieu, de forces des pays partenaires et autres à s'entraîner, à s'exercer et à opérer efficacement ensemble en vue d'exécuter les missions et les tâches qui leur sont confiées ». (Retourner)

Auto-synchronisation — Harmonisation des activités des groupes et des trois armées, pour qu'elles concordent avec le plan de campagne et pour qu'elles le complètent, sans contrôle externe. (Retourner)

Architecture d'entreprise — Un ensemble d'informations stratégiques qui définit la mission, les renseignements et les technologies nécessaires à l'exécution de la mission, et les processus de transition nécessaires à la mise en œuvre des nouvelles technologies en réponse aux besoins changeants de la mission. (Retourner)

Portefeuilles — Le portefeuille militaire comprend trois grandes familles de systèmes : les systèmes de soutien de la prise de décision, les capteurs et les systèmes de commande de l'armement. Le portefeuille ministériel se compose d'une grande famille de systèmes : les systèmes de gestion des ressources. Enfin, le portefeuille commun comprend deux grandes familles de systèmes : les systèmes de gestion de l'information et les systèmes de sécurité. (Retourner)

Méthode de développement en spirale — Méthode de développement des projets dont chaque étape ne dépend pas entièrement de la réussite de l'étape précédente. Avec la méthode de développement en spirale, plusieurs étapes peuvent se dérouler simultanément. (Retourner)