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Les vies anciennes : chroniques de paléontologie canadienne Hallucigenia retombe sur ses pattes
Ce nom évoque l'époque où l'expérimentation
psychotropique était à la mode. Ce fossile donne aussi une leçon
d'humilité aux paléontologues qui prétendent comprendre comment vivaient
les animaux préhistoriques.
![l'interprétation de Conway Morris du fossile d'Hallucigenia l'interprétation de Conway Morris du fossile d'Hallucigenia](/web/20061103025938im_/http://gsc.nrcan.gc.ca/paleochron/images/conwaymorris.jpg) l'interprétation de Conway Morris du fossile d'Hallucigenia |
![photographie de Lars Ramsköld photographie de Lars Ramsköld](/web/20061103025938im_/http://gsc.nrcan.gc.ca/paleochron/images/halluci1.jpg) photographie de Lars Ramsköld |
![sa reconstitution de l'animal sa reconstitution de l'animal](/web/20061103025938im_/http://gsc.nrcan.gc.ca/paleochron/images/halluci3.gif) sa reconstitution de l'animal |
Hallucigenia, un des fossiles les plus étranges et rares de la
carrière de Walcott, a fait l'objet de plus d'articles dans les journaux
populaires et scientifiques que tout autre fossile de la faune de Burgess.
En 1977, il faisait l'objet d'un des premiers articles où Simon Conway
Morris
présentait sa reconstruction des fossiles vermiformes du Shale de
Burgess. Il a baptisé ce petit fossile Hallucigenia et l'a
interprété comme ayant un tronc cylindrique soutenu par sept
paires de piquants minces et une rangée de
sept tentacules, le long de son dos. La tête est bien définie et son anus se trouve au bout
de sa long queue flexible. Les autres paléontologues et biologistes ont
immédiatement contesté l'orientation de cette reconstitution en
soulignant qu'il aurait été le seul animal connu à se mouvoir sur des
piquants rigides. Ses détracteurs arguaient qu'une locomotion sur des
tentacules plutôt que des piquants aurait été plus plausible. À
quoi Conway Morris répliquait qu'il n'était pas plus plausible que l'animal
se fût déplacé sur une unique rangée de pattes. Étant donné le nombre
réduit de spécimens et donc le volume d'informations sur lesquelles
discuter, le débat était dans une impasse. L'interprétation
de Conway Morris demeurait en vigueur : Hallucigenia
était un animal étrange, sans parents fossiles ou vivants.
Vers la fin des années quatre-vingts, entre en scène, Lars Ramsköld,
un dentiste suédois converti à la paléontologie et qui étudiait des
fossiles similaires découverts en Chine. Après avoir examiné la plupart
des spécimens d'Hallucigenia conservés dans les musées, il a
proposé que les piquants étaient plantés dans le dos de l'animal et
servaient à sa protection. Donc si ces piquants étaient alignés sur
le dos de l'animal, il devrait y avoir une double rangée de
tentacule plutôt qu'une seule. Pour vérifier son hypothèse, Ramsköld
demanda donc au conservateur de la collection Walcott à Washington la
permission de « préparer » le spécimen type d'Hallucigenia sparsa, en
d'autres termes, de creuser la pierre entourant le fossile. Cette
proposition était audacieuse, similaire à la demande d'un historien de l'art
au
conservateur des tableaux de Rembrandt conservés au Riiksmuseum d'Amsterdam
de l'autoriser à gratter un peu de peinture de la Ronde de nuit
afin de vérifier si le maître avait bien peint le visage du capitaine de la
compagnie par-dessus celui de son prédécesseur. À sa grande surprise, Ramsköld
obtint l'autorisation. Après avoir délicatement détaché quelques
éclats de schiste, il découvrait une deuxième rangée de
tentacules sous la première. Avec cette expérience simple et
audacieuse, Ramsköld confirmait son intuition scientifique. À
l'heure actuelle, pratiquement tous les paléontologues croient qu'Hallucigenia
était un petit animal marchant sur sept paires de tentacules fins et
souples et protégé par sept paires de longs piquants disposés sur son
dos.
En renversant l'animal et en lui rendant ses pattes, Ramsköld lui
donnait une famille. Les Onychophores, un phylum qui de
nos jours regroupe des animaux ressemblant à des chenilles et habitant
les forêts tropicales humides, ne comptaient qu'un seul représentant dans la
faune de Burgess, Aysheaia, dont Harry Whittington venait de donner
une nouvelle description. L'Aysheaia dépourvue d'aiguilles
dorsales avait comme parent Hallucigenia doté de longues
aiguilles dorsales. D'autres Onychophores du Cambrien munis de petits
piquants, assurent la transition entre les deux espèces.
Pour en savoir plus :
Conway Morris, S. |
1998 : |
The Crucible of Creation: The Burgess Shale and the Rise of Animals. Oxford University Press, 242 p. |
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