Teiichi Kobayashi, professeur de paléontologie à l'Université impériale de Tokyo, au milieu des années trente, alors qu'il travaillait sur les fossiles cambro-ordoviciens de la vallée du Columbia.

Les archéologues, anthropologues, biologistes, géologues et paléontologues européens et nord-américains ont décrit et commenté – énormément et avec beaucoup de suffisance – les objets et les spécimens prélevés (pillés)  en Asie.  Le paléontologue Teiichi Kobayashi est l'un des rares savants asiatiques qui a emprunté la route vers l'Occident.

Dans les années vingt et trente, la Commission géologique du Canada entreprenait la cartographie de reconnaissance de la Cordillère canadienne. Sur le terrain, plusieurs géologues se plaignaient de la difficulté d'obtenir une identification précise et rapide qui leur aurait permis de débrouiller la géologie complexe de ces montagnes. Le géologue en chef de la CGC de l'époque, George A. Young méprisait la paléontologie et, au cours de son mandat, la Division de paléontologie fut sous-financée et sous-équipée en personnel. Ses quelques paléontologues n'étaient dépêchés sur le terrain que pour lever des cartes géologiques, plutôt que travailler sur des fossiles. Avec dédain, Young rejetait l'utilité des fossiles pour la stratigraphie : « Parbleu ! Un bon homme de terrain peut démêler une succession sans s'inquiéter des coquillages ! Bien qu'au cours de son travail de cartographie des montagnes bordant le fleuve Columbia, à l'Est de la Colombie-Britannique, C. S. Evans eût amassé dans le shale et le calcaire du Groupe de McKay, plusieurs collections de fossiles cambriens et ordoviciens, la CGC ne les confia à aucun de ses paléontologues aux fins d'identification. Evans devait cependant recevoir un appui inattendu. 

 En 1930, Teiichi Kobayashi était un jeune paléontologue brillant et ambitieux, attaché à l'Université impériale de Tokyo et spécialisé dans les fossiles du paléozoïque inférieur. En plus d'étudier les fossiles cambriens et ordoviciens expédiés par les collectionneurs de fossiles qui suivaient l'armée impériale japonaise en Corée et en Chine du Nord, il s'intéressait aux fossiles non asiatiques. Portant son regard au-delà du Pacifique, il entreprit d'emprunter les collections de fossiles du paléozoïque inférieur découverts en Argentine, au Nevada, en Alaska et en Colombie-Britannique, notamment toutes les collections de fossiles qu'Evans avait extraites du Groupe de McKay. Les cadres de la Commission géologique du Canada étaient enchantés de pouvoir obtenir des résultats rapides de la part d'un paléontologue qu'ils n'avaient pas à rémunérer ! En 1938, Kobayashi publiait un premier article sur les fossiles britanno-colombiens, traitant des trilobites du Cambrien supérieur trouvés sur le mont Jubilee, tout juste à l'ouest de Harrogate. À cause du deuxième conflit mondial, la publication de sa longue monographie sur les fossiles de McKay devait attendre 1955. Pendant la guerre, il avait entreposé les fossiles britanno-colombiens dans le sous-sol de l'Université impériale de Tokyo.

Trilobites du Cambrien supérieur découverts par Kobayashi, dans la vallée du fleuve Columbia, en 1938.

Les photographies de fossiles prises par Kobayashi ne sont pas particulièrement bonnes et plusieurs des trilobites qu'il a étudiés n'avaient pas été bien conservés dans le shale. Ceci dit, son travail est important, car il a démontré que le Groupe de McKay contenait des dépôts du Cambrien supérieur et de l'Ordovicien inférieur. Il y a encore quelques années, ses deux articles publiés en anglais dans des revues scientifiques japonaises étaient les seuls à traiter des trilobites du Groupe de McKay dans l'Est de la Colombie-Britannique.